TROISIÈME VOLUME
Plutarque commence sa biographie de Lykurgue par les mots de mauvais augure suivants : Relativement au législateur Lykurgue, nous ne pouvons affirmer absolument rien qui ne soit controversé : il y a différents récits au sujet de sa naissance, de ses voyages, de sa mort et aussi de sa manière d’agir, aussi bien comme politique que comme législateur : c’est sur l’époque où il vivait qu’on s’accorde le moins. Et ce début n’est que trop bien justifié par la nature peu satisfaisante des renseignements que nous trouvons non seulement dans Plutarque lui-même, mais dans ces autres auteurs d’après lesquels nous sommes obligés de nous faire une idée du mémorable système de Lykurgue. Si nous examinons les sources d’où est tirée la vie de Lykurgue de Plutarque, nous verrons qu’à l’exception des poètes Alkman, Tyrtée et Simonide, de qui il a emprunté moins que nous n’aurions désiré, il n’a pas d’autorités plus anciennes que Xénophon et Platon : Aristote est cité plusieurs fois, et c’est incontestablement le meilleur de ses témoins ; mais le plus grand nombre d’entre eux appartiennent au siècle qui suit ce philosophe. Ni Hérodote ni Éphore ne sont nommés, bien que le premier fournisse quelques particularités courtes mais intéressantes ; et le second aussi (autant que nous pouvons en juger par les fragments qui restent) s’étendait au long sur les actes du législateur spartiate[1]. Hérodote représente Lykurgue comme oncle et tuteur du roi Labôtas, de la ligne Eurysthénide ou Agide des rois spartiates ; et ceci le placerait, suivant la chronologie admise, environ 220 ans avant la première Olympiade constatée (vers 996 av. J.-C.)[2]. Tous les autres récits, au contraire, semblent le représenter comme un frère plus jeune, appartenant à l’autre ligne ou ligné Proklide des rois spartiates, bien qu’ils ne soient pas parfaitement d’accord relativement h son extraction. Tandis que Simonide en faisait le fils de Prytanis, Dieutychidas le disait petit-fils de Prytanis, fils d’Eunomos, frère de Polydektês et oncle aussi bien que tuteur de Charilas, le plaçant ainsi le onzième dans la lignée d’Hêraklês[3]. Aristote adoptait cette dernière donnée, coïncidant, d’après la chronologie reçue, avec la date d’Iphitos l’Eleien, et la première célébration des jeux Olympiques accomplie en commun par Lykurgue et par Iphitos[4], ce qu’Aristote admettait comme un fait. Lykurgue, d’après l’hypothèse mentionnée ici, serait de l’an 880 environ, un siècle avant les Olympiades constatées. Eratosthène et Apollodore le plaçaient un assez grand nombre d’années avant la première Olympiade. S’ils entendaient par là l’époque reconnue comme l’Olympiade d’Iphitos, leur date coïnciderait presque avec- celle d’Hérodote ; si, d’un autre côté, ils entendaient la première Olympiade constatée (776 av. J.-C.), ils ne seraient pas bien éloignés de l’opinion d’Aristote. Timée nous fournit indirectement une preuve non équivoque de la confusion inextricable qui régnait dans l’antiquité relativement à l’époque du grand législateur spartiate : il supposait qu’il avait existé deux personnages du nom de Lykurgue, et qu’on avait attribué à un seul les actions des deux. Il est évident par là qu’on ne pouvait arriver à aucune certitude, même au troisième siècle avant l’ère chrétienne, au sujet de la date ou de la naissance de Lykurgue. Thucydide, sans mentionner le nom de Lykurgue, nous apprend que ce fut 400 ans et un peu plus avant la fin de la guerre du Péloponnèse[5], que les Spartiates sortirent de leur état précédent de désordre intérieur et désespéré, et entrèrent dans leur politique actuelle. Nous pouvons présumer à bon droit que ces mots font allusion a la discipline et a la constitution de Lykurgue que Thucydide doit ainsi s’être représentées comme introduites vers 830-820 avant J.-C., temps coïncidant à peu prés avec le commencement du règne du roi Têleklos. Autant qu’il est possible de se former une opinion, au milieu de preuves à la fois si chétives et si contradictoires, j’incline à adopter l’opinion de Thucydide quant au temps où la constitution de Lykurgue fut introduite à Sparte. L’état d’eunomie et de bon ordre qu’établissait cette constitution, combiné avec la guérison des grandes séditions intérieures qui avaient régné auparavant et qui avaient contribué beaucoup à affaiblir les Spartiates, cet état, disons-nous, est représenté (et avec beaucoup de plausibilité) comme la grande cause de la carrière victorieuse commençant avec le roi Têleklos, le conquérant d’Amyklæ, de Pharis et de Geronthræ. Il semblerait donc, à défaut d’une preuve meilleure, qu’une date, rattachant le récent aiguillon de la nouvelle discipline au règne de Têleklos, est plus probable qu’une époque quelconque, soit postérieure, soit antérieure[6]. O. Müller, après avoir jeté un regard sur les circonstances étranges et improbables qui nous sont transmises relativement à Lykurgue, fait observer que nous n’avons absolument aucun renseignement sur lui comme individu[7]. Cette remarque est parfaitement juste ; mais une autre
remarque que fait le même éminent auteur, au sujet du système de lois de
Lykurgue, me paraît erronée et a besoin d’être signalée plus
particulièrement, en ce que les corollaires qui en découlent dominent dans
une grande partie de son excellente histoire des Doriens. Il affirme que les
lois, de Sparte étaient considérées comme les vraies institutions doriennes
et que leur origine était identique à celle du peuple : Sparte est à ses yeux
le type complet des principes, des tendances, des sentiments doriens, et c’est
ainsi qu’elle est considérée dans tout le cours de l’ouvrage[8]. Mais une telle
opinion est à la fois gratuite — car le passage de Pindare, cité à l’appui, a
à peine quelque valeur — et contraire à tout le caractère des preuves
anciennes. Les institutions de Sparte n’étaient pas doriennes ; mais
particulières à elle-même[9] : elles la
distinguaient non moins d’Argos, de Corinthe, de Megara, d’Epidauros, de Sikyôn,
de Korkyra ou de Knidos que d’Athènes ou de Thèbes. Le premier fait capital à signaler relativement aux institutions attribuées à Lykurgue, c’est la période très reculée à laquelle elles eurent leur commencement : il semble impossible de placer cette époque plus tard que 825 avant J.-C. Nous ne trouvons pas, nous n’avons pas non plus le droit d’attendre de récit digne de foi par rapport à des événements si anciens. Si nous avons un pied sur un terrain historique, en tarit que les institutions elles-mêmes sont réelles, l’autre flotte encore dans la région trompeuse du mythe, quand nous nous efforçons d’en saisir les causes créatrices : le nuage existe encore qui nous empêche de distinguer entre le dieu et l’homme. Le jour sous lequel Lykurgue apparaissait aux yeux d’un Grec intelligent du cinquième siècle avant l’ère chrétienne est représenté d’une manière si claire, bien que brièvement, dans le passage suivant d’Hérodote, que je ne puis mieux faire que de le traduire : Dans les temps très anciens (fait observer Hérodote) les Spartiates
étaient chez eux-mêmes les plus dénués de lois d’entre tous les Grecs et les
plus inaccessibles aux étrangers. Ils passèrent à un bon ordre légal de la
manière suivante : quand Lykurgue, Spartiate considéré, visita Delphes pour
consulter l’oracle, au moment où il entra dans le sanctuaire, — Tu es venu, Lykurgue, à mon riche autel, chéri de Zeus et de tous les dieux olympiques. Est-ce comme à un dieu ou comme à un homme que je dois m’adresser à toi en esprit ? J’hésite, et cependant, Lykurgue, je penche plutôt à t’appeler un dieu. (Ainsi
parla Tel est le renseignement le plus ancien (venant d’Hérodote) que nous ayons relativement à Lykurgue, et qui lui attribue tout l’ordre de choses dont l’écrivain fut témoin à Sparte. Thucydide aussi, bien qu’il lie mentionne pas Lykurgue, est d’accord avec Hérodote, en disant que le système en usage chez les Lacédæmoniens, tel qu’il la vit, avait été adopté par eux quatre siècles auparavant, les avait arrachés à d’intolérables désordres et les avait conduits à la prospérité et an succès[10]. Hellanicus, dont les écrits précédèrent un peu ceux d’Hérodote, non seulement ne fit pas (plus que Thucydide) mention de Lykurgue, mais il est difficile de croire qu’il ait attaché quelque importance au nom, puisqu’il attribuait la constitution de Sparte aux premiers rois, Eurysthenês et Proklês[11]. Mais les écrivains postérieurs, que Plutarque a surtout
compilés pour composer sa biographie, déclarent être beaucoup mieux informés
au sujet de Lykurgue et entrent dans plus de détails. Son père, nous dit-on,
fut assassiné pendant l’état précédent de licence ; mais son frère allié,
Polydektês, mourut de bonne heure, laissant une veuve enceinte, qui proposa à
Lykurgue de l’épouser et de devenir roi. Mais Lykurgue, repoussant l’offre
avec indignation, attendit la naissance de son jeune neveu Charilas, présenta
l’enfant publiquement dans l’agora comme le futur roi de Sparte, et renonça
aussitôt à l’autorité qu’il avait exercée provisoirement. Cependant la veuve
et son frère Léonidas soulevèrent contre lui des accusations calomnieuses de
desseins menaçant la vie du jeune roi, accusations qu’il crut devoir prévenir
par une absence temporaire. En conséquence, il quitta Sparte et alla en
Krête, où il étudia le gouvernement et les coutumes des diverses cités ;
ensuite il visita l’Iônia et l’Égypte et (comme l’affirmaient quelques auteurs) Pendant ce temps, le jeune roi Charilas grandit et prit le sceptre, comme représentant la famille Proklide ou Eurypontide. Mais les rênes du gouvernement s’étaient relâchées davantage, et les désordres étaient devenus pires que jamais quand revint Lykurgue. Trouvant que les deux rois aussi bien que le peuple étaient las d’une condition si désastreuse, il s’imposa la tâche d’y apporter un remède, et dans cette pensée il consulta l’oracle de Delphes ; il en reçut de vives assurances de l’encouragement divin, avec une ou plusieurs injonctions spéciales (les primitives Rhêtræ de la constitution) qu’il apporta avec lui à Sparte[13]. Puis il se présenta soudainement dans l’agora, avec trente des 4artiatà les plus distingués, tous en armes, comme ses gardes et ses partisans. Le roi Charilas, bien que terrifié d’abord, quand il apprit les desseins de son oncle, s’offrit volontairement pour les seconder ; tandis que la masse des Spartiates se soumit respectueusement au vénérable Hêraklide qui venait comme réformateur chargé d’une mission de Delphes[14]. Telles furent les mesures par lesquelles Lykurgue acquit son ascendant : nous avons maintenant à examiner quel usage il en fit. Son premier acte, conformément à A prendre la constitution politique de Sparte attribuée à
Lykurgue, on voit qu’elle ne différait pas essentiellement de la grossière
organisation que présentent les poèmes homériques, où nous trouvons toujours
un conseil de chefs ou de vieillards, et par occasion les assemblées d’une
agora qui écoutait. Il était difficile de supposer que les rois spartiates
pussent jamais avoir gouverné sans quelques formalités de cette espèce ; de
sorte que l’innovation, si c’était réellement une innovation attribuée à
Lykurgue, doit avoir consisté en quelques nouveaux détails relatifs au sénat
et à l’agora, à fixer le nombre[18] trente et les
obligations du premier, et la place spéciale d’assemblée de la seconde aussi
bien que l’étendue du privilège qu’elle avait à exercer ; consacrant le tout
par l’érection des temples de Zeus Hellanios et d’Athênê Hellania. L’idée du
sujet tel que le présente Plutarque aussi bien que Platon[19], comme si le
sénat était entièrement une nouveauté, ne répond pas aux tableaux de l’ancienne
épopée. Le là nous pouvons plus naturellement imaginer que la constitution
politique de Lykurgue, abstraction faite des éphores qui y furent ajoutés dans
la suite, offre seulement les anciens traits du gouvernement héroïque de Pendant cinq siècles successifs de l’histoire de Sparte,
depuis Polydôre et Théopompe, aucun des rois ne tenta de commettre une telle
violence[21],
jusqu’à l’époque d’Agis III
et de Kleomenês III
(240 av. J.-C. a 220
av. J.-C.). A l’époque que nous venons de mentionner, l’importance de Il est évident que le fait allégué ici par Kleomenês (point curieux dans les coutumes spartiates) ne contribue guère à prouver la conclusion qu’il en tirait quant à la qualité primitive des éphores comme simples députés nommés par les rois. Il est probable qu’ils furent établis pour la première fois à l’époque de la guerre messênienne, et cela coïncide avec le récit qui rapporte que le roi Théopompe était une des parties consentantes à la mesure ; il est également probable que leurs fonctions étaient d’abord comparativement circonscrites et s’étendirent par des empiétements successifs. Mais ils semblent avoir été dès le début un conseil dont l’origine était spécialement populaire, en opposition avec les rois et le sénat. On peut en trouver une preuve dans l’ancien serment, qui était échangé chaque mois entre les rois et les éphores ; le roi jurant en son nom qu’il exercerait ses fonctions royales conformément aux lois établies, les éphores jurant au nom de la cité qu’à cette condition son autorité resterait inébranlable[25]. Ce contrat mutuel, qui probablement formait une partie de la cérémonie pendant les sacrifices mensuels offerts par le roi[26], dura jusqu’à une époque où il doit être devenu une pure formalité, et où le pouvoir des rois avait été longtemps subordonné à celui des éphores. Mais il commença évidemment par être une réalité, quand le roi était le chef prédominant et effectif de l’État, et quand les éphores, revêtus de fonctions particulièrement défensives, servaient de garanties au peuple contre l’abus de l’autorité royale. Platon, Aristote et Cicéron[27] expliquent tous l’institution primitive des éphores comme destinée à protéger le peuple et à restreindre les rois : le dernier les assimile aux tribuns de Rome. Telles étaient les relations qui avaient existé jadis entre les rois et les éphores, bien que dans des temps postérieurs elles eussent été si complètement renversées, que Polybe regarde les premiers comme essentiellement subordonnés aux seconds, un des devoirs des rois étant, selon lui, de respecter les éphores comme leurs pères[28]. Et tel est sans contredit l’état des choses pendant toute la période mieux connue de l’histoire que nous traverserons ci-après. Les éphores sont les directeurs généraux des affaires publiques[29] et le conseil suprême exerçant le contrôle et tenant en échec toute autre autorité dans l’État, sans aucune limite assignable à leurs pouvoirs. L’ascendant extraordinaire de ces magistrats se montre particulièrement dans ce fait dont parle Aristote, qu’ils s’exemptaient de la discipline publique, au point que l’année de leur charge ou ils se livraient à leurs aises formait un contraste marqué avec les exercices fatigants et le sobre régime communs également aux riches et aux pauvres. Les rois sont réduits à un certain nombre de fonctions spéciales, combinées avec des privilèges en partie religieux, en partie honorifiques : leur attribut politique le plus important, c’est qu’ils sont ex officio généraux des forces militaires dans les expéditions au dehors, Mais même ici nous trouvons le déclin sensible de leur pouvoir. En effet, tandis qu’on apprenait à Hérodote, et tel avait été probablement l’ancien privilège, que le roi pouvait faire la guerre contre qui il voulait, et qu’aucun Spartiate ne pouvait l’en empêcher sous peine de commettre un sacrilège[30], nous verrons dans le cours des époques de cette histoire les mieux connues que ce sont ordinairement les éphores (avec ou sans le sénat et l’assemblée publique) qui décident la guerre ; le roi ne prend le commandement que quand l’armée est mise en marche. Aristote semble considérer le roi spartiate comme une sorte de général héréditaire ; mais, même dans la jouissance de ce privilège, on lui mettait des entraves ; car deux des cinq éphores accompagnaient l’armée, et il paraît qu’il invoqua fréquemment leur pouvoir pour assurer l’obéissance à ses ordres[31]. Les pouvoirs politiques directs des rois étaient ainsi
considérablement amoindris ; cependant ils conservaient encore de l’importance
sous beaucoup de rapports. Ils possédaient de vastes domaines royaux dans un
grand nombre des municipes des Periœki ; ils recevaient à l’occasion de
fréquents présents, et quand on offrait des victimes aux dieux, les peaux et
d’autres portions leur appartenaient comme casuel[32] ; ils avaient au
sénat leurs votes, qui, en cas d’absence., étaient donnés en leur nom par
tels des autres sénateurs qui étaient leurs plus proches parents : l’adoption
d’enfants recevait son accomplissement formel en leur présence, et ils
jugeaient les prétentions contradictoires portées devant les juges pour la
main d’une héritière orpheline dont un testament ne réglait pas le sort ;
mais, avant tout, ils avaient de profondes racines dans les sentiments
religieux du peuple. La prééminence de leur lignage rattachait l’État entier
à une paternité divine. Pour eux, les chefs des Hêraklides, ils étaient les
donataires spéciaux du sol de Sparte octroyé par les dieux, l’occupation des
Dôriens n’étant sanctifiée et bénie par Zeus qu’en vue d’établir les enfants
d’Hêraklês dans la vallée de l’Eurotas[33]. Ils
représentaient l’État dans ses relations avec les dieux, étant de droit
prêtres de Zeus Lacedæmôn (les idées du dieu et du pays se confondant en une seule) et
de Zeus Uranios, et offrant les sacrifices mensuels nécessaires pour assurer
au peuple la protection du ciel. Bien que des individus pussent parfois être
écartés, il ne fallait rien moins qu’une nouvelle révélation divine pour
engager les Spartiates à sortir de la lignée pure d’Eurysthenês et de
Proklês. En outre, la remarquable cérémonie de deuil qui avait lieu à la mort
de chaque roi semble indiquer que les deux familles royales, qui se croyaient
achæennes[34]
et non dôriennes, étaient considérées comme le grand lien commun d’union
entre les trois parties constitutives de la population de Appuyé par un respect traditionnel d’une force si grande,
un roi spartiate, doué de talent militaire et d’énergie individuelle comme
Agésilas, exerçait un ascendant considérable ; mais de tels cas étaient très
rares, et dans toute la période historique nous trouverons que le roi n’était
qu’une force secondaire, efficace dans des occasions spéciales. Pour des
ordres politiques réels, dans les circonstances les plus importantes aussi
bien que dans les moindres, le Spartiate s’adresse au conseil des éphores,
auquel les citoyens les plus puissants non moins que les plus humbles[38] rendent
obéissance avec un degré de précision que rien, si ce n’est la discipline
spartiate, n’aurait produit. La police intérieure et les affaires étrangères
de l’Etat sont entre les mains des éphores, qui exercent une autorité
approchant du despotisme, sans aucune espèce de responsabilité. Ils désignent
et dirigent le corps des trois cents citoyens jeunes et actifs, qui faisait
le service immédiat de police de La guerre et la paix paraissent avoir été soumises, dans la plupart des occasions, sinon dans toutes, au sénat et à l’assemblée publique ; aucune question ne pouvait arriver à la dernière avant d’avoir passé par le premier. Et nous trouvons quelques occasions en petit nombre dans lesquelles la décision de l’assemblée publique était une expression réelle d’une opinion, efficace quant au résultat, comme par exemple, l’assemblée qui précéda immédiatement et décida la guerre dit Péloponnèse. Ici, outre les hasards sérieux que présentait ce cas, outre la prudence générale, attribut du caractère spartiate, il y avait la grande autorité et l’expérience du roi Archidamus qui s’opposaient à la guerre, bien que les éphores y fussent favorables[43]. L’assemblée publique, dans ces circonstances particulières, manifesta réellement une opinion, et en vint à une division. Mais dans la plupart des cas, elle semble n’avoir été rien de, plus qu’une formalité inefficace. La règle générale ne permettait pas de discussion ouverte, et aucun simple citoyen ne pouvait non plus parler qu’avec une autorisation spéciale des magistrats. Peut-être même, la liberté générale de discuter, si elle eût été donnée, aurait pu ne servir à rien ; car à Sparte non seulement on n’avait pas le pouvoir de parler en public, mais on n’avait pas l’habitude de débattre les mesures publiques rien ne caractérisait mieux le gouvernement que l’extrême secret de ses actes[44]. Les propositions présentées par les magistrats étaient ou acceptées ou rejetées, sans qu’il fût permis de les amender. Il ne pouvait y avoir d’attrait qui engageât le citoyen à assister à une telle assemblée ; et nous pouvons conjecturer d’après les paroles de Xénophon que, de son temps, elle consistait seulement en un certain nombre de notables convoqués spécialement, outre le sénat, corps qui lui-même est appelé la petite ekklêsia[45]. En effet, la constante et effrayante diminution que subit le nombre des citoyens ayant droit de l’être suffisait seule pour diminuer le nombre de ceux qui assistaient à l’assemblée, aussi bien que pour abattre toute force imposante qu’elle avait pu jadis posséder. Une assemblée dans de telles conditions, bien qu’elle fût toujours conservée comme une formalité, et que son consentement fût indispensable dans des questions importantes et pour qu’une loi passât (ce qui toutefois semble s’être présenté bien rarement à Sparte), une telle assemblée, disons-nous, ne pouvait être en pratique qu’un bien faible obstacle à l’administration des éphores. Le sénat, corps permanent avec les rois y compris, était le seul frein réel qui modérât leur pouvoir, et il doit avoir été dans une certaine mesure un corps concourant au gouvernement, bien que le langage élevé et imposant, dont se servent Démosthène et Isocrate pour parler de sa suprématie politique, dépasse de beaucoup ce qui était en réalité. Sa fonction la plus importante était celle de cour de justice criminelle, devant laquelle était traduit tout homme mis en jugement pour crime capital[46]. Mais, dans l’accomplissement de ce devoir ainsi que des autres dont ils étaient chargés, nous trouvons les sénateurs aussi bien que les rois et les éphores accusés de corruption et de vénalité[47]. Comme ils n’étaient pas nommés avant soixante ans et qu’ensuite ils gardaient leur charge toute leur vie, flous pouvons croire sans peine que quelques-uns d’entre eux continuaient de les exercer après le temps de l’extrême vieillesse qui rend l’homme incapable, ce qui, bien que toléré sans doute par les Lacédæmoniens, grâce au respect extraordinaire qu’ils avaient pour la vieillesse, ne pouvait manquer de diminuer l’influence du corps comme élément concourant au gouvernement. La brève esquisse donnée ici du gouvernement spartiate
montrera que, bien que les théoriciens grecs trouvassent de la difficulté a
déterminer dans quelle classe ils le rangeraient[48], c’était en
substance une oligarchie compacte, sans scrupule et bien obéie, renfermant en
elle, comme subordonnées, ces portions qui avaient dominé jadis, les rois et
le sénat, et adoucissant l’odieux, sans diminuer le mal du système, par son
changement annuel d’éphores qui gouvernaient. Nous devons en même temps distinguer
le gouvernement de la discipline et dé l’éducation de Lykurgue, qui tendaient
sans doute à égaliser le riche et le pauvre, sous le rapport de la vie, des
habitudes et des jouissances pratiques. Hérodote (et vraisemblablement aussi Xénophon)
pensait que la forme que nous venons d’exposer était celle que le
gouvernement avait reçue dans l’origine de la main de Lykurgue. Or, bien qu’il
y ait de bonnes raisons pour supposer qu’il en était autrement, et pour
croire que les éphores furent une addition postérieure, cependant ce seul
fait, qu’Hérodote reçut ce renseignement a Sparte, attire notre attention :
sur un attribut important de la politique spartiate, qu’il est a propos d’exposer.
Cet attribut, c’est sa stabilité sans égale pendant quatre ou cinq siècles
successifs, au milieu de gouvernements tels que ceux de Nous passons de la constitution politique de Sparte aux classes et à la distribution civiles, au-, relations économiques, et en dernier lieu au système particulier d’habitudes, d’éducation et de discipline, que Lykurgue, dit-on, établit chez les Lacédæmoniens. Ici encore nous nous trouvons avec des renseignements imparfaits quant aux institutions existantes, et au milieu de la confusion, lorsque nous essayons d’expliquer comment naquirent ces institutions. Il semble cependant constaté que tous les Dôriens, dans tous leurs établissements, se divisaient en trois tribus, les Hylleis, les Pamphyli et les Dimanes ; de plus, dans toutes les cités doriennes, il y avait des familles hêraklides distinguées dans lesquelles on choisissait des œkistes quand on formait de nouvelles colonies. On peut retrouver ces trois tribus à Argos, d Sikyôn, à Epidauros, à Trœzên, à Megara, à Korkyra, et vraisemblablement aussi à Sparte[50]. Les Hylleis reconnaissaient comme éponyme et comme premier père Hyllos, fils d’Hêraklês, et par conséquent croiraient descendre d’Hêraklês lui-même : nous pouvons supposer que les Hêraklides, appelés spécialement ainsi, comprenant les deux familles royales, avaient été les aines de la tribu des Hylleis, dont l’ensemble est quelquefois désigné par Hêraklides ou descendants d’Hêraklês[51]. Mais il semble qu’il y a eu aussi à Sparte, comme dans d’autres villes doriennes, des habitants non doriens, séparément de ces trois tribus et incorporés dans des tribus qui leur étaient particulières. L’une de ces dernières, les Ægeides, venus, dit-on, de Thèbes comme alliés des envahisseurs dôriens, est nommée par Aristote, Pindare et Hérodote[52] ; tandis que les Ægialeis à Sikyôn, la tribu Hyrnêthia à Argos et à Epidauros, et d’autres à Corinthe dont nous ne connaissons pas les noms, représentent également les portions non dôriennes de leurs communautés respectives[53]. A Corinthe le nombre total des tribus était, dit-on, de huit[54]. Mais à Sparte, bien que nous paraissions reconnaître l’existence des trois tribus dôriennes, flous ne savons pas combien«il y avait de tribus en tout ; encore moins savons-nous dans quelle relation les Obæ ou Obês, autre division subordonnée du peuple, étaient vis-à-vis des tribus. Dans l’ancienne Rhêtra de Lykurgue il est ordonné que les tribus et les Obês soient conservés sans changement : mais ce qu’avancent O. Müller et Bœckh[55], qu’il y avait trente Obês en tout, dix pour chaque tribu, n’a pas d’autre preuve qu’une ponctuation particulière de cette Rhêtra, rejetée par divers autres critiques, et vraisemblablement à juste titre. Nous restons ainsi sans aucun renseignement relativement à l’Obê, bien que nous sachions que c’était une division antique, particulière et durable dans le peuple de. Sparte, puisqu’elle se rencontre dans la plus ancienne Rhêtra de Lykurgue, aussi bien que dans des inscriptions récentes à la date de l’empire romain. Dans des inscriptions semblables et dans le récit de Pausanias, il est cependant reconnu une classification de Spartiates distincte et indépendante des trois anciennes tribus dôriennes, et fondée sur les divers quartiers de la cité, Limnae, Mesoa, Pitanê et Kynosura[56] ; c’est de l’une de ces quatre divisions qu’était tirée la définition ordinaire d’un Spartiate du temps d’Hérodote. Il y a lieu de supposer que les anciennes tribus dôriennes tombèrent en désuétude à Sparte (comme cela arriva pour des quatre tribus ioniennes à Athènes), et que la classification locale dérivée des quartiers de la ville en prit la place, ces quartiers ayant été originairement les villages séparés de l’agrégat dont Sparte était composée[57]. Il est assez probable que le nombre de trente des vieux sénateurs se rattachait aux trois tribus dôriennes, chacune d’elles fournissant dix membres, bien qu’il n’y ait pas de preuve de ce fait. On reconnaît trois divisions principales dans la
population de Le Periœkos était aussi un homme libre et un citoyen, non
de Sparte, mais de quelqu’un des cent municipes de la Laconie[60]. Ils recevaient,
lui et la communauté à laquelle il appartenait, leurs ordres de Sparte, n’ayant
pas de sphère politique propre, ni aucune part dans la détermination des
mouvements des autorités spartiates. Dans l’île de Kythêra[61], qui formait un
des municipes des Periœki, il résidait un bailli spartiate en qualité d’administrateur.
Mais en était-il de même dans les autres, c’est ce que nous ne pouvons affirmer
; il n’est pas non plus sans danger de conclure de l’un de ces municipes à
tous ; il peut y avoir eu des, différences considérables dans la manière d’agir
avec les uns et les autres. Car ils étaient disséminés sur tout le territoire
de Quand nous en viendrons à décrire la démocratie d’Athènes
après la révolution de Kleisthenês, nous verrons les dêmes, ou municipes et
villages locaux de l’Attique, incorporés comme fractions égales et constitutives
du tout appelé le dême (ou
la cité) d Athènes, de sorte qu’un dêmotês d’Acharnæ ou de Sphêttos
est en même temps complètement citoyen athénien. Mais les municipes des Periœki
sont vis-à-vis de Sparte dans un rapport d’inégalité et d’obéissance, bien qu’ils
appartiennent comme elle au même agrégat politique, et composent avec elle la
libre communauté lacédæmonienne. C’est ainsi qu’Orneæ et autres lieux étaient
des municipes d’hommes personnellement libres, mais dépendant politiquement d’Argos,
Akrœphiæ de Thèbes, Chæroncia d’Orchomenos, et diverses villes thessaliennes
de Pharsalos et de Larissa[65]. Cette condition
entraînait avec elle un sentiment de dégradation, et une négation pénible de
cette autonomie dont chaque communauté grecque était avide[66] ; tandis qu’étant
maintenue par une force supérieure, elle avait une tendance naturelle,
peut-être sans le vœu réfléchi de la cité dominante, à dégénérer en une oppression
pratique. Mais outre cette tendance générale, l’éducation particulière d’un
Spartiate, tout en lui donnant de la force, du courage et une précision
militaire, était en même temps si rigoureusement particulière, qu’elle le rendait
dur, peu accommodant et incapable de sympathiser avec la marche ordinaire du
sentiment grec, pour ne riels dire de la rapacité et de l’amour de l’argent,
qui, d’après de bonnes preuves, appartenaient au caractère spartiate[67], et que nous ne
devions guère nous attendre à trouver dans les disciples de Lykurgue. Comme
Harmostes hors de leur ville natale[68], et dans les
relations avec des inférieurs, les Spartiates semblent avoir été plus
impopulaires que d’autres Grecs, et nous pouvons supposer qu’une semblable
rudesse hautaine dominait dans leurs ‘procédés à l’égard de leurs propres
Periœki, qui ne leur étaient certainement attachés par aucun lien d’affection,
et qui se révoltèrent pour la plupart après la bataille de Leuktra, aussitôt
que l’invasion de Isocrate, prenant l’antique légende Hêraklide pour point
de départ, avec sa conquête instantanée et son triple partage de tout le Péloponnèse
dôrien entre les trois frères Hêraklides, attribue la première origine des
municipes des Periœki à des séditions intérieures survenues parmi les
conquérants de Sparte. Selon lui, la période qui suivit immédiatement la
conquête fut un temps de violente lutte intestine dans Sparte nouvellement
conquise, entre :le petit et le grand nombre, l’oligarchie et le dêmos. La
première étant victorieuse, deux importantes mesures furent les conséquences
de sa victoire. Elle bannit le grand nombre
après sa défaite et le refoula de Sparte en Laconie, conservant la résidence à
Sparte exclusivement pour elle-même ; elle lui assigna la partie la moins
importante et la moins fertile de Le renseignement fourni ici par Isocrate, relativement à la première origine de la distinction établie entre les Spartiates et les Periœki, n’est rien de plus qu’une conjecture ; ce n’est pas même une conjecture probable, puisqu’elle a pour base la vérité historique de l’antique légende hêraklide, et qu’elle transporte les disputes qui avaient lieu du propre temps de l’auteur entre l’oligarchie et le dêmos à une ancienne période à laquelle n’appartiennent pas de telles disputes. Il n’y a non plus rien, aussi loin que s’étend notre connaissance de l’histoire grecque, qui appuie ce qu’il avance, à savoir, que les Spartiates se réservaient le poste le moins dangereux dans le combat, et exposaient indûment les Periœki au péril. Une si lâche combinaison n’était pas parmi les péchés de Sparte ; mais il est vrai sans aucun doute que, comme le nombre des citoyens diminuait continuellement, les Periœki en vinrent à constituer, dans les temps postérieurs, une proportion de plus en plus considérable de l’armée spartiate. Toutefois, quant au pouvoir dont , suivant Isocrate, les éphores étaient investis, de mettre les Periœki à mort sans jugement préliminaire, nous pouvons pleinement croire qu’il était réel et qu’il fut exercé aussi souvent que l’occasion sembla l’exiger. Nous mentionnerons tout à l’heure la manière dont ces magistrats agissaient avec les Ilotes, et nous verrons d’amples raisons pour conclure de là que, toutes les fois que les éphores jugeaient un homme quelconque dangereux pour la pair publique, soit un Spartiate inférieur, soit un Periœkos, soit un Ilote, le mode le plus sommaire de se débarrasser de lui était ordinairement considéré comme le meilleur. A l’égard des Spartiates de distinction et d’un rang élevé, ils étaient sans doute prudents et mesurés dans l’application de la peine ; mais la même nécessité d’être circonspects n’existait pas à l’égard des classes inférieures ; en outre, le sentiment des exigences de la justice, réclamant un jugement équitable avant que la punition fût infligée, appartient aux associations athéniennes beaucoup plus qu’aux Spartiates. Quant au nombre de fois que de telles exécutions sommaires eurent lieu ; nous ne savons rien sur ce point. Nous pouvons faire remarquer que le récit qu’a fait ici Isocrate
de l’origine des Periœki laconiens n’est pas essentiellement inconciliable
avec celui d’Éphore[71], qui racontait
que Eurysthenês et Proklês, lors de la première conquête de Quant à l’assertion de O. Müller, répétée par Schoemann[73], que la différence de races était strictement conservée, et que les Periœki étaient toujours considérés comme Achæens ; je ne trouve pas de preuve sur ce point, et je la crois erronée. Relativement à Pharis, à Geronthræ et à Amyklæ, trois villes des Periœki, Pausanias nous donne à entendre que les habitants préexistants furent chassés assez longtemps après la conquête dôrienne, et remplacés par une population dôrienne[74]. Sans ajouter beaucoup de foi à ce renseignement, a l’appui duquel Pausanias ne pouvait guère avoir de bonnes autorités, nous pouvons toutefois l’admettre comme représentant ce que le cas a de probable et comme contrebalançant l’hypothèse dénuée de preuve de Mailler. Les municipes des Periœki étaient composés, soit entièrement de Doriens, soit de Dôriens incorporés en proportion plus ou moins grande avec les habitants préexistants. Mais quelque différence de race qui ait pu jadis exister, elle fut effacée avant les temps historiques[75], pendant lesquels nous, ne trouvons en Laconie aucune preuve d’Achæens connus comme tels. Les Hêraklides, les Ægides, les Talthybiades, appartenant tous à Sparte, semblent être les seuls exemples de races séparées (qu’on peut partiellement distinguer des Dôriens) connues après le commencement de l’histoire authentique. Les Spartiates et les Periœki constituent un seul agrégat politique, et ce fait aussi entra si complètement dans l’opinion générale (en parlant des temps qui précèdent la bataille de Leuktra) que la paix d’Antalkidas, qui garantissait l’autonomie de chaque cité grecque séparée, ne fut jamais interprétée de manière à détacher de Sparte les villes des Periœki. Ils sont également connus comme Laconiens ou Lacédæmoniens, et Sparte est regardée par Hérodote seulement comme la première et la plus brave parmi les cités nombreuses et braves des Lacédæmoniens[76]. Les vainqueurs à Olympia sont proclamés, non comme Spartiates, mais comme Laconiens, titre également porté par les Periœki. Et bien des noms parmi les nombreux vainqueurs que nous trouvons dans les listes olympiques comme Laconiens peuvent probablement avoir appartenu à Amyklæ ou à d’autres villes periœkiennes. Les hoplites periœkiens constituèrent toujours une proportion
numérique considérable et prépondérante de l’armée lacédæmonienne dans les
temps postérieurs, et doivent sans aucun doute avoir été exercés, plus ou
moins parfaitement, à la tactique militaire particulière à Sparte, puisqu’ils
étaient appelés à obéir aux mêmes ordres que les Spartiates en campagne[77] et à accomplir
les mêmes évolutions. On rencontre quelques cas, bien que rarement, où un
periœkos a un commandement élevé dans une expédition étrangère. Du temps d’Aristote,
la portion la plus considérable de Les Ilotes de Laconie étaient colons ou serfs attachés au sol qu’ils labouraient au profit des propriétaires spartiates certainement, probablement aussi des propriétaires periœkiens. Ils formaient la population rustique du pays, qui, habitait, non dans des villes, mais soit dans de petits villages[79], soit dans des fermes détachées, à la fois dans le district entourant immédiatement Sparte, et aussi autour des villes laconiennes des Periœki. Naturellement, il y avait aussi des Ilotes qui vivaient à Sparte et dans d’autres villes, et faisaient l’office d’esclaves domestiques, mais tel n’était pas le caractère général de cette classe. Nous ne pouvons douter que la conquête dôrienne partie de Sparte n’ait trouvé cette classe dans la condition de villageois et de paysans vivant isolément ; mais dépendaient-ils de propriétaires achæens préexistants, ou étaient-ils indépendants comme une grande partie de la population villageoise dé l’Arkadia, c’est là une question à laquelle nous ne pouvons répondre. Dans l’un ou l’autre cas cependant, il est facile de concevoir que les terres des villages (avec les cultivateurs qu’elles portaient) étaient les plus aisées à approprier au profit de maîtres résidant à Sparte ; tandis que les villes, avec le district placé immédiatement autour d’elles, fournissaient à la fois habitation et nourriture aux détachements avancés des Dôriens. Si les Spartiates avaient réussi dans la tentative qu’ils firent pour agrandir leur territoire par la conquête de l’Arkadia[80], ils auraient très probablement pu convertir Tegea et Mantineia en villes periœkiennes, avec un territoire amoindri habité (soit entièrement, soit en partie) par des colons dôriens, tandis qui ils auraient transféré à des propriétaires résidant à Sparte une grande partie des campagnes des Mænalii, des Azanes et des Parrhasii, en en réduisant les habitants à la condition d’Ilotes. La distinction entre une population de ville et une population de village semble être la principale cause de la différence dans la manière dont les Periœki et les Ilotes étaient traités en Laconie. Une proportion considérable des Ilotes étaient de pitre race dôrienne, étant les Messêniens Dôriens à l’ouest du mont Têygetês, conquis dans la suite et réunis à cette classe de cultivateurs dépendants qui, comme classe, doivent avoir commencé à exister dès le premier établissement même des envahisseurs dôriens dans le district qui entourait Sparte. Nous ne pouvons établir clairement l’origine du nom d’Ilotes : Éphore le tirait de la ville de Helos, sur la côte méridionale, que les Spartiates avaient prise, dit-on, après une résistance si opiniâtre qu’elle les poussa à traiter les captifs avec une extrême rigueur. Il y a bien des raisons poux rejeter ce récit, et on a proposé une autre étymologie d’après laquelle Ilote est synonyme de captif : ce qui est plus plausible, sans toutefois encore être convaincant[81]. Les Ilotes vivaient dans les villages ruraux comme ascripti glebœ, cultivant leurs terres et payant leur redevance au maître à Sparte, mais ayant leurs maisons, leurs épouses, leurs familles, les sentiments mutuels de voisinage loin des yeux du maître. Ils n’étaient jamais vendus hors du pays, et probablement on ne les vendait jamais ; en effet, ils appartenaient moins au maître qu’à l’Etat, qui constamment lés appelait pour le service militaire et récompensait leur bravoure et leur activité par le don de la liberté. Meno le Thessalien de Pharsalos prit trois cents Penestæ parmi ceux qui lui appartenaient pour secourir les Athéniens contre Amphipolis : ces Penestæ Thessaliens étaient sous beaucoup de rapports analogues aux Ilotes, mais aucun Spartiate ne possédait individuellement le même pouvoir sur ces derniers. Les Ilotes étaient ainsi une partie de l’État, ayant leurs sympathies domestiques et sociales développées, le pouvoir dans une certaine mesure d’acquérir une propriété[82], et la conscience d’être Grecs d’origine et de langage, points de supériorité marquée sur les étrangers qui formaient la population des esclaves à Athènes et à Chios. Ils semblent n’avoir été nullement inférieurs à aucune population de village en Grèce ; tandis que l’observateur grec avait une plus forte sympathie pour eux que pour les esclaves achetés d’autres États, sans rappeler que leur aspect homogène, leur nombre et l’emploi qu’on faisait d’eux pour le service militaire, les mettaient plus en vue. Le service dans la maison d’un Spartiate était tout entier accompli par des membres de la classe des Ilotes ; car il semble qu’il y a eu peu d’autres esclaves dans le pays, s’il y en a eu. Les diverses anecdotes que l’on raconte relativement à la manière dont on les traitait à Sparte marquent moins de cruauté que de mépris plein de faste[83], sentiment que nous ne sommes nullement surpris de découvrir parmi les citoyens prenant place à la table commune. Plais la grande masse des Ilotes qui habitaient à la campagne étaient l’objet d’un sentiment bien, différent de la part des éphores spartiates, qui connaissaient leur bravoure, leur énergie et leur mécontentement constant, et cependant étaient forcés de les employer comme portion essentielle 4e l’armée de l’État. Les Ilotes servaient communément comme troupes légères, qualité dont les hoplites spartiates ne pouvaient dispenser leur suite. A la bataille de Platée, chaque hoplite spartiate avait sept Ilotes[84], et chaque hoplite periœkos un seul Ilote pour le servir[85] ; mais, même dans le camp, les Spartiates prenaient leurs mesures pour se tenir en garde contre quelque mutinerie soudaine de ces compagnons armés à la légère, tandis qu’à l’intérieur le citoyen tenait habituellement son bouclier séparé de son anneau pour prévenir la possibilité qu’il fût saisi dans un but semblable. Quelquefois des Ilotes choisis étaient revêtus de pesantes armures et servaient ainsi dans les rangs, recevant de l’État l’affranchissement comme récompense d’une bravoure, distinguée[86]. Mais Sparte, même à l’apogée de sa puissance, fut plus d’une
fois mise en danger par la réalité, et toujours assiégée par la crainte, d’une
révolte d’Ilotes. Pour la prévenir ou l’étouffer, les éphores se résignaient
à insérer des stipulations expresses de secours dans leurs traités avec
Athènes, à appeler des troupes athéniennes dans le cour de Pour cet acte sombre et sanglant Thucydide est notre témoin[87], et Thucydide décrivant un fait contemporain pour lequel il avait fait des recherches. Sur une preuve moins sérieuse nous aurions hésité à ajouter foi à cette assertion ; mais se trouvant comme elle l'est au-dessus de tout soupçon, elle en dit plus que des volumes sur le caractère inhumain du gouvernement lacédæmonien, tout en nous découvrant en même temps la grandeur des craintes que leur inspiraient les Ilotes. Pour accomplir l'assassinat de ce régiment de braves gens voués à la mort, il a fallu un grand nombre d'auxiliaires et d'instruments ; cependant Thucydide, avec toutes ses recherches, n'a pu découvrir comment un seul d'entre eux avait péri : il nous dit que personne ne le savait. Nous voyons ici un fait qui démontre d'une manière non équivoque le mystère impénétrable dont étaient entourés les actes du gouvernement spartiate, l'absence non seulement de discussion publique, mais de curiosité publique, et l'empire absolu que les éphores exerçaient sur la volonté, les bras et la langue de leurs sujets spartiates. Le conseil des Dix à Venise, avec toutes les facilités pour les noyades nocturnes que présentait leur cité, aurait difficilement pu accomplir un si vaste coup d'État avec de tels moyens invisibles. Et, d'après cela, nous pouvons juger, même quand nous n'aurions pas d'autre preuve, combien les habitudes d'une assemblée publique se seraient peu accordées soit avec la trempe d'esprit des Spartiates, soit avec la marche de leur gouvernement. |
[1] Hoeren, Dissertatio de Fontibus Plutarchi, p. 19-25.
[2] Hérodote, I, 65. En outre, Hérodote donne le fait comme l’assertion des Lacédœmoniens eux-mêmes.
[3] Plutarque, Lykurgue, c. 1. Suivant Denys d’Halicarnasse (Ant. Rom., II, 49), Lykurgue était l’oncle non le fils d’Eunomos.
Aristote considère Lykurgue comme tuteur de Charilas (Politique, II, 7, 1) ; cf. V, 10, 3. V. O. Müller (Hist. of Dorians, 1-7, 3).
[4] Phlegôn aussi ajoute Kleosthenês de Pisa (De Olympiis ap. Meursii op., VII, p. 128). Il parait qu’il existait un disque à Olympia, sur lequel était inscrite la formule de la trêve olympique avec les noms d’Iphitos et de Lykurgue comme les auteurs communs de la trêve qu’ils auraient proclamée de concert. Aristote croyait à la vérité de cette circonstance et l’admettait comme une preuve du fait que cette inscription déclarait attester ; et O. Müller est aussi disposé à la prendre pour vraie, c’est-à-dire comme contemporaine des temps auxquels elle déclare se rapporter. J’arrive à une conclusion différente : je ne doute pas de l’existence du disque ; mais que l’inscription qu’il portait ait été réellement écrite en 880 avant J.-C. ou à peu près, cela serait en désaccord avec les probabilités raisonnables résultant de la paléographie grecque. Si cet ancien et mémorable instrument eût existé à Olympia du temps d’Hérodote, il eût difficilement assigné à Lykurgue l’époque que nous ‘lisons maintenant dans ses écrits.
Les assertions présentées dans l’History of the Dorians de Müller (I, 7, 7) au sujet de Lycurgue,
Iphitos et Kleosthenês, rédigeant la loi fondamentale de l’armistice olympique,
ne sont appuyées par aucune preuve suffisante. — Au temps plus avancé de la
majesté établie dis la fête olympique, les Eleiens exercèrent indubitablement
le pouvoir dont il parle ; mais rattacher cette circonstance à quelque
règlement réfléchi a’Iphitos et de Lykurgue, c’est selon moi inexact. V. la
mention d’une trêve semblable proclamée dans toute
[5] Thucydide, I, 18.
[6] M. Clinton, d’accord avec Thucydide, fixe la législation de Lykurgue à 817 ans avant J.-C. environ, et sa régence à 852 avant J.-C., environ trente-cinq ans avant (Fasti Hellen., V, 1, ch. 7, p. 141) ; il place aussi l’Olympiade d’Iphitos en 828 avant J.-C. (F. H., vol. II, p. 410 ; App., c. 22).
Dans ce chapitre, M. Clinton réunit et discute les divers renseignements relatifs à la date de Lykurgue ; cf. aussi Larcher ad Herod., I, 67, et Chronologie, p. 486-492. — Les différences que présentent ces assertions doivent, après tout, être prises comme elles sont, car elles ne peuvent être conciliées qu’à l’aide de suppositions arbitraires qui ne font que nous égarer en présentant une apparence d’accord là où il n’en existe pas en réalité. Je pense, comme M. Clinton, que l’assertion de Thucydide doit ici être prise comme la meilleure autorité. Mais je n’admets nullement le procédé qu’en commun avec Larcher, Wesseling, sir John Marsham et autres, il emploie relativement au passage d’Hérodote où cet auteur appelle Lykurgue le tuteur et l’oncle de Labôtas (de la ligne Eurysthénide). M. Clinton dit : D’après la notoriété du fait que Lykurgue était attribué à l’autre maison (les Proklides), il est manifeste que le passage doit être corrompu (p. 144) ; et alors il procède à la correction du texte d’Hérodote, conformément à ce que propose sir J. Marsham. — Ce procédé me semble inadmissible. Le texte d’Hérodote se lit parfaitement bien et n’est contredit par rien qu’on puisse trouver ailleurs dans Hérodote lui-même ; de plus, nous avons ici une garantie positive de son exactitude, car M. Clinton lui-même admet qu’il était du temps de Pausanias précisément comme nous le lisons maintenant (Pausanias, III, 2, 3). De quel droit alors le changeons-nous ou que gagnons-nous à le faire ? Le seul droit que nous ayons pour agir ainsi, c’est la supposition qu’il a dû y avoir une uniformité de croyance, et des moyens de constater satisfaisants (relativement à des faits et à des personnes du neuvième et du dixième siècle avant l’ère chrétienne), existant parmi les Grecs du cinquième siècle et des suivants, supposition que je tiens pour inexacte. Et tout ce que nous gagnons, c’est une unanimité illusoire résultant de mots mis gratuitement dans la bouche d’un de nos témoins. — Si nous pouvons prouver qu’Hérodote a été mal informé, il est juste d’agir ainsi ; mais nous n’avons pas de raison pour altérer sa déposition. Il fournit une preuve claire qu’il existait des récits très différents quant à la seule question, celle de savoir à laquelle des deus lignes des Hêraklides appartenait le législateur spartiate, et qu’il y avait une différence énorme quant à l’époque où il vivait.
[7] History of the Dorians, I, 7, 6.
[8] History of the Dorians, III, 7, 8. Alf. Kopstadt reconnaît cette assertion comme une erreur dans l’ouvrage de Müller. V. l’excellente dissertation qu’il a récemment publiée De Rerum Laconicarum Constitutions Lycurgeæ Origine et Indole, Gryphiæ, 1849, sect. 3, p. 18.
[9] Entre autres preuves nombreuses pour ce point, v. Aristote, Ethic., X, 9 ; Xénophon, Republ. Laced., 10, 8.
[10] Hérodote, I, 65-66 ; Thucydide, I, 18.
[11] Strabon, VIII, p. 363.
[12] Plutarque, Lykurgue, 3, 4, 5.
[13] Pour une instructive revue du texte aussi bien que du sens de cette ancienne Rhêtra, V. Urlichs, Ueber die Lycurgischen Rhêtra, ouvrage publié depuis la première édition de notre histoire. La réfutation qu’il fait des changements téméraires de Goettling me semble complète ; mais ses propres conjectures ne sont pas toutes également plausibles ; je ne puis pas non plus souscrire à l’explication qu’il donne de άφίστασθαι.
[14] Plutarque, Lykurgue, c. 5-6. Hermippos, le disciple d’Aristote, déclarait donner les noms de vingt de ces trente dévoués partisans.
Il y avait cependant un récit différent, qui rapportait que Lykurgue, à son retour de ses voyages, trouva Charilas gouvernant comme un despote (Heraclid. Pontic., c. 2).
[15] Les mots de l’ancienne Rhêtra - Διός Έλλανίου καί Άθηνάς Έλλανίας ιερόν ίδρυσάμενον, φυλάς φυλάξαντα, καί ώβάς ώβάξαντα, γερουσίαν σύν άρχαγέταις, καταστήσαντα, ώρας έξ ώρας άπελλάζειν μεταξύ Βαβύκας καί Κνακίωνος, ούτώς είσφέρειν τε καί άφίστασθαι - δάμω δ̕ άγοράν είμεν καί κράτος. (Plutarque, Lykurgue, 5-6.)
La leçon άγοράν
(le quatrième mot avant la fin) est celle de l’édition de Coray : d’autres
leçons proposées sont κυρίαν,
άνωγάν, άγορίαν, etc. Les
MSS. sont toutefois corrompus d’une manière irrémédiable, et aucune des
conjectures ne peut être déclarée certaine. —
[16] Plutarque, Lykurgue, c. 5-6.
Plutarque nous dit que
[17] Hérodote, I, 65 ; cf. Plutarque, Lykurgue, c. 7 ; Aristote, Politique, V, 9, 1 (où il donne la réponse du roi Théopompe).
Aristote nous dit que les éphores étaient choisis, mais non pas comment ils l’étaient ; c’était seulement de quelque manière excessivement puérile (II, 6, 16). — M. Barthélemy Saint-Hilaire, dans sa note relative au passage d’Aristote, présume qu’ils étaient naturellement choisis de la même manière que les sénateurs ; mais il ne semble pas qu’il y ait dans Aristote des raisons suffisantes pour appuyer cette opinion. Il n’est pas non plus facile de concilier les mots d’Aristote touchant l’élection des sénateurs, où il l’assimile à une αϊρεσις δυναστευτική (Politique, V, 51 8 ; II, 6118), avec le tableau que Plutarque (Lykurgue, 26), fait de cette élection.
[18] Kopstadt admet cette supposition que le nombre des membres du sénat, ne fut pas définitivement fixé avant la réforme de Lykurgue (Dissertation, ut sup., sect. XIII, p.109).
[19] Platon, Leg., III, p. 691 ; Platon, Epist. VIII, p. 354, B.
[20] Platon, Leg., III, p. 691 ; Aristote, Politique, II, 6, 20.
[21]
La conspiration de Pausanias, après l’échec de Xerxès, était dirigée contre la
liberté de
[22] Xénophon, Republic. Laced., c. 14.
[23] Plutarque, Agis, c. 12.
[24] Plutarque, Kleomenês, c. 10.
[25] Xénophon, Republic. Lacedæmon., c. 15.
[26] Hérodote, VI, 57.
[27] Platon, Leg., III, p. 692 ; Aristote, Politique, V, 11, 1 ; Cicéron, De Republ., Fragm. II, 33, éd. Maii : Ut contra consulare imperium tribuni plebis, sic illi (ephori) contra vim regiam constituti ; et De Leg., III, 7, ainsi que Valère Maxime, IV, 1.
Cf. Plutarque, Lykurgue, c. 7 ; Tittmann, Griechisch. Staatsverfassung, p. 108, sqq.
[28] Polybe, XXIV, 8.
[29] Aristote, Politique, II, 6, 14-16.
[30] Hérodote, VI, 56.
[31] Aristote, II, 7, 4 ; Xénophon, Repub. Laced., c. 13 ; Helléniques, II, 4, 29 ; III, 2, 23.
On mit une restriction spéciale aux fonctions du roi, comme commandant en chef de l’armée, en 417 avant J.-C. après l’expédition contre Argos mal conduite par Agis, fils d’Archidamus. On prit soin alors que dix conseillers spartiates accompagnassent toujours le roi dans chaque expédition (Thucydide, V, 63).
[32] L’argent produit par la vente des peaux des nombreuses victimes offertes dans les sacrifices publics à Athènes est compté comme un article spécial du revenu public dans la rigoureuse économie de cette cité. V. Bœckh, Public Econ. of Athens, III, 7, p. 333 ; Eng. Trans. Corpus Inscript., n° 157.
[33] Tyrtée, Fragm. I, éd. Bergk ; Strabon, XVIII, p. 362. Cf. Thucydide, V, 16 ; Hérodote, V, 39 ; Xénophon, Helléniques, III, 3, 3 ; Plutarque, Lysandre, c. 22.
[34] Hérodote, V. 72. V. dans Plutarque le récit du stratagème avorté de Lysandre pour rendre là dignité royale élective, en mettant en avant un jeune homme qui passait pour fils d’Apollon (Plutarque, Lysandre, c. 25-26).
[35] Xénophon, Helléniques, III, 3, 1.
[36] Pour les privilèges des rois spartiates, V. Hérodote, VI, 56-57 ; Xénophon, Republ. Laced., c. 15 ; Platon, Alcibiade, I, p. 123.
[37] Hérodote, VI, 66, et Thucydide, V, 16, en fournissent des exemples.
[38] Xénophon, Republ. Laced., c. 8, 2, et Agésilas, c. 7, 2.
[39] Xénophon, Rep. Laced., 8, 4 ; Thucydide, I, 131 ; Aristote, Politique, II, 6, 14.
Platon, dans sa République, désapprouve également tous décrets généraux enchaînant à l’avance la volonté d’hommes parfaitement élevés comme les gardiens de sa République, qui feront toujours ce qu’il y a de mieux à faire dans chaque occasion spéciale (République, IV, p. 425).
[40]
Outre
Les trois Rhêtra étaient (Plutarque, Lycurgue, c. 13 ; cf. Apophth., Lacon., p. 227) : 1. Ne pas recourir à des lois écrites. 2. Ne pas employer dans la construction des maisons d’autres instruments que la hache et la scie. 3. Ne pas entreprendre d’expéditions militaires souvent contre les mêmes ennemis. — Je partage l’opinion de Nitzsch qui croit (Histor. Homer. p. 61-65) que ces Rhêtra, bien que sans doute elles ne soient pas dues réellement à Lykurgue, sont néanmoins anciennes (c’est-à-dire probablement d’une date qui se trouve quelque part entre 650 et 550 avant J.-C.), et non pas les simples fictions d’écrivains relativement modernes, comme semblent le penser Schoemann (Ant. Jur. Pub., IV, 1, p. 132) et Urlichs (p. 241). Et bien que Plutarque spécifie le nombre trois, cependant il paraît qu’il y en avait encore plus, comme on doit croira quo .l’indique le langage de Tyrtée ; les trois Rhêtra : que distingue Plutarque méritaient une attention particulière, pour des raisons que nous ne comprenons pas aujourd’hui. — Ces maximes ou règles d’État étaient probablement conservées avec les réponses de l’oracle de Delphes, autorité d’oit beaucoup d’entre elles peuvent sans aucun doute être émanées, telle que la fameuse prophétie ancienne Ά φιλοχρηματία Σπάρταν όλεϊ, άλλο δέ ούδέν (Krebs, Lectiones Diodorea, p. 140. Aristote, περί πολιτειών, ap. Schol. ad Euripide, Andromaque, 446. Schoemann, Comm. ad Plutarque, Ag. et Cleomen. p. 123). — Nitzsch fait de bonnes remarques en expliquant la prohibition portée contre l’emploi de lois écrites. Cette prohibition fut probablement provoquée par cette circonstance, que d’autres États grecs employaient des législateurs tels que Zaleukos, Drakôn, Charondas ou Solôn, chargés de leur présenter tout d’un coup une série d’ordonnances on de dispositions écrites.. Quelques Spartiates peuvent avoir proposé qu’uni législateur analogue fût nominé pour Sparte : à cette proposition on opposa un refus sous la forme la plus solennelle possible, au moyen d’une Rhêtra formelle qui fut adoptée peut-être après un, avis reçu de Delphes. Il n’y a donc pas (si nous concevons ainsi l’événement) de contradiction, comme quelques auteurs le représentent, à défendre l’usage des lois écrites par une Rhêtra écrite elle-même. Pour employer une phrase qui offre une analogie plus grande avec les discussions modernes : Les Spartiates, d’après l’ordre de l’oracle, se décident à conserver leur loi commune non écrite, et à ne pas codifier.
[41] Xénophon, Helléniques, III, 2, 23.
[42] Le cas de Leotichydes, Hérodote, VI, 72 ; de Pleistoanax, Thucydide, II, 21-5, 16 ; Agis, II, Thucydide, V, 63 ; Agis, III, Plutarque, Agis, c. 19 ; V. Plutarque, Agésilas, c. 5.
Relativement aux éphores en général, v. Wachsmuth, Hellen. Alterthumskunde, V, 4, 42, vol.
I, p. 223 ; Cragius, Rep. Lac., II,
4, p. 121. — Aristote signale distinctement les éphores comme άνυπεύθυνοι
: de sorte que l’histoire à laquelle il est fait une brave allusion dans
[43] Thucydide, I, 67, 80, 87.
[44] Thucydide, IV, 68 ; cf. IV, 74 ; et sa remarquable expression au sujet d’un homme si distingué que Brasidas, et IV, 24, à propos des ambassadeurs lacédæmoniens envoyés à Athènes. Cf. Schoemann, Antiq. Jur. Publ. Græc., IV, 1, 80, p. 122 ; Aristote, Politique, II, 8, 3.
[45] Τήν μικράν καλουμένην έκκλησίαν (Xénophon, Helléniques, III, 3, 8), ce qui signifie les γέροντες ou sénat, et personne autre, excepté les éphores, qui le convoquaient (V. Lachmann, Spart. Verfass., sect. 12, p. 216). Ce qui est encore, plus à, remarquer, c’est l’expression οί έκκλητοι comme équivalente à ή έκκλησία (cf. Helléniques, V, 2, 11 ; VI, 3, 3), montrant évidemment un nombre spécial et limité de personnes réunies. V. aussi II, 4, 38 ; IV, 6, 3 ; V, 2, 33 ; Thucydide, V, 77.
L’expression de οί έκκλητοι n’aurait jamais pu être usitée comme équivalente pour désigner une ekklêsia athénienne.
[46] Xénophon, Republ. Laced., 10 ; Aristote, Politique, II, 6, 17 ; III, 1, 7 ; Démosthène, Cont. Lept., c. 23, p. 489 ; Isocrate, Or. XII (Panathenaic.), p. 266. Le langage de Démosthène semble particulièrement inexact.
Plutarque (Agésilas, c. 32), à, l’occasion de quelques Spartiates soupçonnés de conspirer qui furent mis à mort par Agésilas et les éphores, quand Sparte était dans un danger imminent d’être,attaquée par Epaminondas, affirme que ce fut la première fois qu’un Spartiate eût été mis à mort sans jugement.
[47] Aristote, Politique, II, 6, 18. Cf. aussi Thucydide, I, 131, au sujet de Pausanias coupable, πιστεύων χρήμασι διαλύσειν τήν διαβολήν ; Hérodote, V, 72 ; Thucydide, V, 16, concernant les rois Leotychides et Pleistoanax ; le brave et habile Gylippe – Plutarque, Lysandre, c. 16.
[48] Les éphores sont considérés quelquefois comme un élément démocratique, parce que chaque citoyen spartiate avait chance de devenir éphore ; quelquefois comme un élément despotique ; parce que, dans l’exercice de leur pouvoir, ils n’étaient soumis qu’à peu de contrainte et à aucune responsabilité. V. Platon, Leg., IV, p. 712 Aristote, Politique, II, 3, 10 ; IV, 7, 4, 5.
[49] On peut voir dans Isocrate un exemple de la manière dont cette antiquité était louée. Or. XII (Panathenaic.) p. 288.
[50] Hérodote, V, 68 ; Stephan. Byz., v. Ύλλέες et Δυμάν ; O. Müller, Dorians, III, 5, 2 ; Bœckh, ad Corp. Inscript., n° 1123. Thucydide, I, 24, au sujet de Phalios l’Hêraklide à Corinthe.
[51] V. Tyrtée, Fragm. 8, 1, éd. Schneidewin, et Pindare, I, 61 ; V, 91, où les expressions descendants d’Hêraklês comprennent évidemment plus que les deux familles royales. Plutarque, Lysandre, 22 ; Diodore, XI, 68.
[52] Hérodote, IV, 149 ; Pindare, Pyth., V, 67 ; Aristote, Λακων Ηολιτ, p. 127, Fragm., éd. Neuman. Les Talthybiadæ, ou hérauts à Sparte, formaient une famille ou caste à part (Hérodote, VII, 134).
O. Müller suppose, sans aucune preuve, que les Ægeides doivent avoir été adoptés dans une des trois tribus dôriennes ; c’est un des corollaires de son hypothèse fondamentale, que Sparte est le type du pur dôrisme (vol. II, p. 78). Kopstadt pense (Dissert., p. 67) que j’ai été injuste envers O. Müller en n’approuvant pas sa preuve ; mais, en étudiant de nouveau le point eu question, je ne puis voir de motif pour modifier ce qui est présenté ici dans le texte. La section de l’ouvrage de Schoemann (Antiq. Jur. Publ. Græc., IV, 1, 6, p. 115) sur ce sujet affirme beaucoup plus qu’il ne peut être prouvé.
[53] Hérodote, V, 68-92 ; Bœckh, Corp. Inscr., n° 1130, 1131 ; Stephan. Byz. v. Ύρνίθιον ; Pausanias, II, 28, 3.
[54] Photius, Πάντα όκτώ ; et Proverb. Vatic., Suidas, XI, 64 ; cf. Hesychius, v. Κυνόφαλοι.
[55] Müller, Dorians, III, 5, 3-7 ; Bœckh, ad Corp. Inscript., Part. IV, sect. 3, p. 609.
[56] Pausanias, III, 16, 6 ; Hérodote, III, 55 ; Bœckh, Corp. Inscript., n° 1241, 1338, 1347, 1425 ; Steph. Byz. v. Μεσόα ; Strabon, VIII, p. 394 ; Hesych., v. Πιτάνη.
Il y a beaucoup de confusion et de différence d’opinion au sujet des tribus spartiates. Cragius en admet six (De Republ. Lacon., I, 6) ; Meursius, huit (Rep. Lacon., I, 7) ; Barthélemy (Voyage du jeune Anacharsis, IV, 185) en donne cinq. Manso a discuté le sujet d’une manière détaillée, mais, à mon axis, peu satisfaisante, dans le huitième appendice du premier livre de son Histoire de Sparte (vol. II, p. 125) ; et le second appendice du Dr Thirlwall (vol. I, p. 517) mentionne à la fois toutes les différentes opinions modernes sur ce point obscur, et ajoute plusieurs critiques utiles. La modique somme de preuves primitives que nous avons laisse beaucoup de place pour fies hypothèses opposées, et peu de chance de parvenir à une conclusion certaine quelconque.
[57] Thucydide, I, 10.
[58] Un ou deux Periœki paraissent comme officiers chargés d’un commandement militaire vers la fin de la guerre du Péloponnèse (Thucydide, VIII, 6, 22) ; mais ce semble être de rares exceptions, même quant au service étranger sur mer ou sus terre, tandis qu’un Periœkos magistrat à Sparte était chose inouïe.
[59] Les Messêniens assujettis payaient une moitié (Tyrtée, Fragm. 4, Bergk).
[60]
Strabon, VIII, p. 362. Etienne de Byz. cite ce total de 100 municipes quand il
parle de plusieurs d’entre eux différant les uns des autres ; mais probablement
il copiait Strabon, et ne peut point par conséquent passer pour une autorité
distincte. Le total de 100 municipes appartient à l’apogée de la puissance
spartiate, après la conquête et avant la séparation de
M. Clinton (Fast. Hellen., II, p. 401) a réuni les noms d’environ 60 sur 100.
[61] Thucydide, IV, 53.
[62] Xénophon, Helléniques, IV, 5, 11 ; Hérodote, Il, 7 ; Thucydide, V, 18-23. La fête Amyklæenne des Hyakinthia, et le temple Amyklæen d’Apollon semblent être au premier rang dans l’esprit des autorités spartiates. (Thucydide, IV, 8), qui sont prêts avant le reste et marchent contre les Athéniens à Pylos, comprennent probablement les Amyklæens.
Thucydide appelle en général
[63] Le mot περίοικοι est quelquefois employé pour signifier simplement des États voisins environnants, dans son sens géographique naturel. V. Thucydide, I, 17 et Aristote, Politique, II, 7, 1.
Mais il est employé plus ordinairement pour signifier
les membres sans privilèges ou moins privilégiés du même agrégat politique
vivant en dehors de la ville, en opposition avec les bourgeois qui vivaient
dans ses murs et jouissaient des privilèges complets. Aristote s’en sert pour
désigner la classe correspondant en Krête aux Ilotes Lacédæmoniens (Politique, II, 7, 3) ; il n’existait pas
en Krête de classe correspondant aux Periœki lacédæmoniens. En Krête il n’y
avait pas deux degrés d’infériorité ; il n’y en avait qu’un seul, et qui était
marqué par le mot περίοικοι
; tandis que le Periœkos lacédæmonien avait l’Ilote au-dessous de lui. Pour un
Athénien le mot entraînait l’idée d’une dégradation vague. — Pour mieux
comprendre le status
du Periœkos, nous pouvons le comparer au Metœkos ou Metœque. Ce dernier réside
dans la cité, mais c’est un étranger résidant par tolérance, et non un indigène
; il paye une taxe spéciale, est exclu de toute fonction politique, et ne peut
même avoir accès auprès du magistrat que par l’intermédiaire d’un citoyen ami
ou Prostatês (Lycurg. cont. Leocrat.,
c. 21-53) : il porte les armes pour la, défense de l’État. La situation d’un
Metœkos était toutefois bien différente dans les diverses villes de
[64] Les πόλεις des Periœki lacédæmoniens sont souvent mentionnées. V. Xénophon (Agésilas, II, 24 ; Laced. Repub., XV, 9 ; Helléniques, VI, 5121).
[65] Hérodote, VIII, 73-135 ; Xénophon, Helléniques, VI, 1-8 ; Thucydide, IV, 76-94.
[66] Xénophon, Helléniques, VI, 3, 5, 9, 19. Isocrate, écrivant à l’époque de la puissance thébaine, après la bataille de Leuktra, caractérise les villes bœôtiennes comme étant περίοικοι de Thèbes. (Or. VIII. De Pace, p. 182) ; cf. Orat. XIV. Plataic., p. 299-303. Xénophon tient le même langage, Helléniques, V. 4, 46 : cf. Plutarque, Agésilas, 28.
[67] Aristote, Politique, II, 6, 23.
[68] Thucydide, I, 77-95 ; VI, 105. Isocrate (Panathenaic., Or. XII, p. 283). Cf. Orat. de Pace (Or. VIII, p. 180-181), Orat. Panégyrique, (Or., IV, p. 64-67).
[69] Isocrate, Panathenaic., Or. XII, p. 280.
[70]
Isocrate, Orat. XII (Panathenaic.) p. 276-271. Ce qu’il dit
dans le même discours (p. 246), que les Lacédæmoniens avaient mis à mort sans jugement plus de Grecs
qu’il n’en avait été jugé à Athènes depuis qu’Athènes était une cité,
se rapporte à leurs alliés ou sujets hors de
[71] Éphore, Fragm. 18, 61 Marx ; ap. Strabon, VIII, p. 365.
[72]
Le Dr Arnold (dans sa Dissertation sur la constitution spartiate, annexée au
premier volume de son Thucydide, p. 613) ajoute plus de confiance à la valeur
historique de ce récit d’Isocrate que je n’incline à le faire. D’un autre côté,
sir G. C. Lewis, dams l’examen qu’il fait de
Un autre point du renseignement d’Isocrate est que les
Dôriens, à l’époque de la conquête primitive de
[73] Schoemann, Antiq. Jurisp. Græcorum, IV, 1. 5, p. 112.
[74] Pausanias, III, 2, 6 ; I11, 22, 5. On trouvera l’assertion de Müller dans son History of the Dorians, III, 2, 1 : il cite un passage de Pausanias qui n’a nullement trait au point en question.
Sir G. C. Lewis (Philolog. Mus., ut sup., p. 41) est du même avis que Müller.
[75] M. Kopstadt (dans la savante Dissertation dont j’ai parlé plus haut, De Rerum Laconicarum Constitutionis Lycurgeæ Origine et Indole, c. II, p. 31) conteste ce principe relativement aux Periœki. Il semble le comprendre dans un sens que mes paroles ne présentent guère, sens du moins que je n’avais pas l’intention de leur donner, à savoir, que la majorité des habitants dans chacune des cent villes des Periœki se composait de Dôriens — ut per centum Laconiæ oppida distributi ubique majorem incolarum numerum efficerent (p. 32). Je voilais seulement affirmer que quelques-unes des villes des Periœki, telles qu’Amyklæ, étaient entièrement ou presque entièrement dôriennes ; beaucoup d’autres parmi elles partiellement dôriennes. Mais quel peut avoir été le nombre comparatif (probablement différent dans chaque ville) des habitants dôriens et non dôriens, c’est ce qu’on ne peut en aucune façon déterminer. M. Kopstadt (p. 35) admet qu’Amyklæ, Pharis et Geronthræ, étaient des villes Periœkiennes peuplées par des Dôriens ; et si ce fait est vrai, il dément la maxime générale sur la foi de laquelle il contredit ce que j’affirme : sa maxime est nuuquam Dorienses a Doriensibus, nisi bello victi erant, civitate æquoque jure privati sunt (p. 31). Il est dangereux de poser des principes si larges relativement à une uniformité supposée de règles et de pratique dôriennes. La haute autorité de O. Müller l’a induit en erreur sous ce rapport.
Il est évident qu’Hérodote (cf. son expression, VIII, 73
et I, 145) concevait tous les habitants libres de
[76] Hérodote, VII, 234.
[77] Thucydide, VIII, 6-22. Ils n’avaient cependant point part à la discipline de Lykurgue ; mais ils semblent être nommés οί έκ τής χώρας παίδες, en oposition avec οί έκ τής άγωγής (Sosibius ap. Athenæ, XV, p. 674).
[78] Aristote, Politique, II, 6, 23.
Sir G. C. Lewis, dans l’article cité plus haut (Philolog. Mus., II, p. 54), dit au sujet des Periœki : Ils vivaient à la campagne ou dans de petites villes du territoire laconien, et cultivaient la terre, qu’ils ne tenaient pas d’un citoyen individuellement, mais ils payaient pour elle un tribut ou une rente à l’État ; étant exactement dans la même condition que les possessores du domaine romain, ou les Ryots dans l’Hindostan avant l’introduction d’un Établissement Permanent. » On peut douter, je pense, que les Periœki payassent une rente ou un tribut quelconque tel que celui que suppose ici sir G. Lewis. Le passage d’Aristote que nous venons de citer semble montrer qu’ils payaient une taxe directe individuellement, et précisément d’après le même principe que les citoyens Spartiates, qui ne s’en distinguent que parce qu’ils possèdent des propriétés foncières plus considérables. Mais, bien que le principe de la taxation fût le même, il y avait en pratique (selon Aristote) de l’injustice dans la manière de l’imposer. Les citoyens spartiates (fait-il observer) étant les plus riches propriétaires fonciers, ont soin de ne pas faire mutuellement un examen rigoureux, dit payement de la taxe foncière, i. e. ils ferment mutuellement les yeux sur les moyens qu’ils emploient pour y échapper. Si les Spartiates avaient été les seules personnes qui payassent l’είσφορά ou la taxe foncière, cette observation d’Aristote n’aurait pas eu de sens. En principe, la taxe était imposée et sur leurs propriétés plus considérables et sur les propriétés plus petites des Periœki ; en pratique, les Spartiates s’entraidaient pour échapper à la proportion due.
[79] Tite-Live signale distinctement le caractère villageois des Ilotes, XXXIV, 27 ; quand il décrit les châtiments infligés par le despote Nabis : Ilotarum quidam (hi suret jam inde antiquitus castellani, agreste genus) transfugere voluisse insimulati, per omnes vicos sub verberibus acti necantur.
[80] Hérodote, I, 66.
[81] V. O. Müller, Dorians, III, 3, 1 ; Éphore ap. Strabon, VIII, p. 365 ; Harpocration, v. Εϊλωτες.
[82] Kleomenês III offrit l’affranchissement à tout Ilote qui pourrait payer cinq mines attiques : il était dans un besoin grand et immédiat d’argent, et leva de cette manière 500 talents. Six mille Ilotes doivent ainsi avoir été en état de trouver chacun cinq mines, ce qui était une somme très considérable (Plutarque, Kleomenês, c. 23).
[83] Tel est le récit rapportant que dis Ilotes étaient obligés de paraître eu état d’ivresse, pour exciter chez les jeunes gens un sentiment de répugnance contre l’ivrognerie (Plutarque, Lykurgue, c. 28 ; et Adversus stoïcos de commun. Notit., c. 19, p. 1067).
[84] Hérodote, IX. 29. Les Spartiates aux Thermopylæ semblent n’avoir été servis chacun que par un seul Ilote (VII, 229).
O. Müller paraît croire que les soldats armés à la
légère qui servaient les Hoplites periœkiens à Platée n’étaient pas Ilotes (Dor., III, 3, 6). Hérodote ne dit pas
distinctement qu’ils le fussent ; mais je ne vois pas de raison pour admettre
deux classes différentes de soldats armés à la légère dans les forces
militaires spartiates. — Le calcul que donne Müller du nombre des Periœki et
des Ilotes repose complètement sur des données très peu dignes de foi. Entre
autres il faut mentionner la supposition qu’il fait que πολιτική χώρα
signifie le district de Sparte, en tant que distingué de
[85] Xénophon, Reg. Lac., c. 12, 4. Kritias, de Lacedæm. Repub. ap. Libanium, Orat. de Servitute, t. II, p. 85, Reisk.
[86] Thucydide, I, 101 ; IV, 80, V, 14-23.
[87] Thucydide, IV, 80.