LIVRE III — LES ACTES DES APÔTRES
Quelque temps après son départ de Thessalonique, à la fin de son second voyage de mission, en 52, saint Paul était passé à Éphèse, l’antique cité de l’Ionie, devenue à cette époque, sous les Romains, la métropole de l’Asie proconsulaire. L’Apôtre ne put alors séjourner dans cette ville, mais il promit à ses amis d’y revenir[1]. Dans son troisième voyage, en 55, il tint sa promesse et il y demeura trois ans[2]. Éphèse était située dans une plaine fertile, au sud de la rivière du Caystre, presque vis-à-vis de l’île de Samos, non loin de la mer et à peu près au milieu de la côte occidentale de l’Asie Mineure. Placée entre Smyrne[3] et Milet, elle était à 320 stades de la première et à une distance un peu moindre de la seconde. La plaine où elle était bâtie, fruit des alluvions, a une longueur de près de deux heures de marche, du levant au couchant, sur une largeur de plus d’une heure. Elle est bornée de trois côtés par des montagnes escarpées ; le mont Gallésius au nord, le mont Pactyas à l’est, le mont Coressus au sud ; à l’ouest, elle va se perdre dans la mer Égée. Éphèse s’élevait au sud de la plaine et ses édifices couvraient une partie des collines qui la bordent en cet endroit. Avantageusement placée pour le commerce, sa situation l’avait rendue l’entrepôt de tout le trafic de l’Asie Mineure, et les richesses de l’Orient affluaient dans son port de Panormus. Ses commencements avaient été obscurs elle était peu importante sous Androclès l’Athénien, à qui la légende rapporta sa fondation[4], mais elle s’était accrue sous Lysimaque, l’un des généraux d’Alexandre le Grand, et avait atteint, sous la domination romaine, quand elle fut visitée par saint Paul, l’apogée de sa prospérité. Célèbre par son luxe et par sa magnificence, elle l’était plus encore par ses magiciens et par son temple de Diane. Nous allons voir bientôt le rôle que jouaient ce temple et cette déesse à Éphèse. L’histoire de saint Paul rappelle aussi l’influence dont jouissait la magie dans cette cité[5]. Les lettres Éphésiennes, Έφέσια γράμματα[6], étaient fameuses chez les anciens, et les auteurs classiques nous en ont conservé le souvenir[7]. C’étaient des symboles mystérieux[8], qui étaient gravés sur la couronne, la ceinture et les pieds de la statue de Diane[9]. Ils ressemblaient par la forme aux caractères runiques du Nord. Quand on les prononçait, ils avaient la vertu d’un charme ; quand on les portait écrits sur soi, ils servaient d’amulettes[10]. Crésus, disait-on, avait répété sur le bûcher qui allait le dévorer et dont il fut délivré, ces syllabes toutes-puissantes ; un athlète éphésien, tant qu’il avait eu sur sa personne le rouleau qui contenait ces mots magiques, avait triomphé de son antagoniste de Milet ; il avait été vaincu, dès le jour où il avait perdu son talisman[11]. L’étude de ces lettres tragiques avait donné naissance à des livres nombreux, que l’on vendait à un grand prix[12]. On venait de fort loin, à Éphèse, consulter ses magiciens renommés[13]. Les monuments qui ornaient la ville étaient dignes de son éclat et de sa splendeur. Outre le temple de Diane, l’une des sept merveilles du monde, dont nous parlerons plus loin, on y remarquait l’Augusteum, dédié à l’empereur Auguste, plusieurs autres temples, le grand Théâtre, le Stadium ou gymnase. Cependant tous ces édifices superbes qui faisaient l’orgueil de la cité et que l’on devait croire éternels, ne devaient pas durer toujours. Une légende raconte que, sous la persécution de Dèce, en 250, sept jeunes chrétiens s’enfuirent dans une caverne du voisinage, pour échapper à la mort. Là, ils tombèrent dans un profond sommeil. Quand ils se réveillèrent, un siècle et demi s’était écoulé, l’empereur Théodose était assis sur le trône des Césars ; ils se rendirent au mi-lieu de la ville ; au lieu du temple d’Artémis, ils ne virent plus que des églises chrétiennes ; alors, rendant grâces à Dieu de ce que le Christ avait vaincu le paganisme, ils se couchèrent de nouveau et s’endormirent, cette fois pour toujours, du sommeil de la mort[14]. Néron est probablement, celui qui avait porté les premiers coups à Éphèse[15]. Trajan arracha au temple d’Artémis ses portes richement sculptées pour les offrir à un autre temple de Byzance. Les Goths, sous l’empereur Galien, en 263, achevèrent l’œuvre de destruction : ils prirent la ville et brûlèrent l’Artémision[16]. De nos jours, il ne reste pas même le nom de l’ancienne métropole de l’Ionie. Là où avait fleuri Éphèse, on ne voit plus qu’un misérable village turc, appelé par les indigènes Aïa-Soulouk[17]. Jusqu’à ces dernières années, on peut dire qu’il y avait à peine des ruines, et ce n’est qu’après de longs efforts qu’un patient explorateur anglais, M. Wood, a réussi à reconstituer la topographie de la cité. Ses fouilles sont précieuses pour le livre des Actes et elles nous fournissent des confirmations nouvelles de l’exactitude de saint Luc. C’est en 1863 que M. Wood commença à rechercher les ruines du grand temple de Diane, dont il ne restait plus de traces depuis des siècles[18]. Il poursuivit ses explorations sur le site de la grande ville de l’Asie Mineure pendant près de onze ans, jusqu’en avril 1874, et n’y dépensa pas moins de quatre cent mille francs. Tant de peines et d’argent n’ont pas été perdus : le savant anglais a non seulement retrouvé, grâce à son infatigable persévérance, les restes du temple de Diane, mais aussi ceux du grand Théâtre et de l’Odéon, des débris de sculpture et de nombreuses inscriptions grecques et latines[19] qui sont d’une valeur inappréciable pour la connaissance de l’antiquité, et en particulier des Actes, comme nous allons le voir. ARTICLE Ier. — LE RÉCIT DE LA SÉDITION PAR SAINT LUC. Le trait caractéristique du récit des Actes, concernant le séjour de saint Paul à Éphèse, est le rôle prépondérant que joue, dans cette ville, le culte d’Artémis ou Diane, la grande Diane des Éphésiens[20]. Il s’éleva en ce temps-là, dit saint Luc (pendant que saint Paul était à Éphèse), un grand trouble... Car un orfèvre, nommé Démétrius, qui faisait de petits temples d’argent d’Artémis et qui donnait beaucoup à gagner aux ouvriers, les assembla avec d’autres qui travaillaient à ces sortes d’ouvrages et leur dit : « Vous savez, ô hommes, que c’est de cette industrie que vient notre fortune, et vous voyez et entendez dire que ce Paul, ayant persuadé non seulement Éphèse, mais presque toute l’Asie, a changé les sentiments d’une multitude, en disant ; “ Ce ne sont pas des dieux, mais les ouvrages de la main des hommes ”. Or, non seulement nous courons risque que notre métier ne soit décrié, mais que le temple même de » la grande déesse Artémis ne tombe dans le mépris, et que » la majesté de celle que toute l’Asie et le monde entier révèrent ne tombe dans l’oubli ». Ayant entendu ce discours, ils furent remplis de colère, et ils s’écrièrent : « Grande est l’Artémis des Éphésiens ! » Et toute la ville fut remplie de confusion ; toute la foule courut au Théâtre et y entraîna Gaius et Aristarque, compagnons de voyage de Paul. Or, Paul voulant pénétrer au milieu du peuple, les disciples l’en empêchèrent. Quelques-uns aussi des Asiarques, qui étaient ses amis, envoyèrent vers lui pour le prier de ne pas se présenter au Théâtre. Cependant les uns criaient une chose et les autres une autre, parce que la réunion était pleine de confusion, et la plupart ne savaient même pas pourquoi l’on était rassemblé[21]. Cependant, on dégagea Alexandre
de la foule, à l’aide des Juifs qui le poussaient devant eux. Or, Alexandre
demanda de la main qu’on fît silence, voulant se défendre devant le peuple.
Mais, dès qu’il eut été reconnu pour Juif, tous, d’une seule voix, ne
cessèrent de s’écrier, pendant environ deux heures : « Grande est l’Artémis
des Éphésiens ! » Le grammate ayant enfin calmé la foule, dit : « Éphésiens, qui dans le monde ignore que la ville d’Éphèse est » particulièrement vouée au culte de la grande Artémis, tombée du ciel ? Puisque donc on ne peut le » contester, il faut que vous vous calmiez et que vous ne fassiez rien inconsidérément, car ceux que vous avez amenés ici ne sont ni sacrilèges ni blasphémateurs de votre déesse. Que si Démétrius et les ouvriers qui sont avec lui ont à se plaindre de quelqu’un, il y a des jours d’audiences publiques et des proconsuls[22] ; qu’ils portent contre lui leurs accusations. Si vous avez quelque autre affaire à régler, qu’elle soit traitée dans une assemblée légale, car nous courrions risque d’être accusés de sédition sur ce qui s’est passé aujourd’hui, personne ne donnant » un motif qui puisse être allégué de cet attroupement. » Et ayant parlé ainsi, il congédia l’assemblée[23]. Aucun auteur ancien ne nous a laissé de l’Éphèse impériale un tableau plus vivant, plus animé, plus exact que celui de saint Luc. Son récit est rempli de mots et de locutions particulières ; mais les expressions, comme le fond de sa narration, sont parfaitement justifiées par l’épigraphie et par les fouilles de M. Wood. C’est ce que nous allons montrer, en reprenant d’abord une à une les principales circonstances de la narration et en examinant ensuite les expressions et les locutions grecques qui lui sont propres. ARTICLE II. — LE TEMPLE DE DIANE À ÉPHÈSE. Le premier trait qui frappe dans le discours de l’orfèvre Démétrius, c’est l’importance qu’il attache au temple d’Artémis ou de Diane. Toute la vie d’Éphèse, en effet, était comme concentrée dans ce temple. Il avait été bâti une première fois par l’architecte Chersiphron[24], avec le marbre du mont Prion. Les cités grecques d’Asie avaient toutes contribué aux frais de l’édifice ; Crésus, le célèbre roi de Lydie, avait prêté son concours. Commencé avant les guerres persiques, il avait continué à s’élever lentement pendant la guerre du Péloponnèse, et n’avait été achevé qu’au bout de cent vingt-cinq ans. Sa dédicace fut célébrée par un poète contemporain d’Euripide, Timothée. Mais, quelques années après, il devenait la proie des flammes, allumées par Érostrate, la nuit même où naissait Alexandre le Grand (356 avant J.-C.). Il fut rebâti avec plus de somptuosité et de magnificence : les Éphésiens donnèrent leur argent, leurs femmes offrirent leurs bijoux. Alexandre, après la victoire du Granique, célébra une fête solennelle en l’honneur de Diane, et proposa de payer tous les frais de reconstruction du temple, à la seule condition d’y inscrire son nom. La fierté éphésienne refusa de condescendre à ses désirs ; le vainqueur de l’Orient dut se contenter de faire diriger le travail par l’architecte Dinocrate[25] qui avait bâti Alexandrie, en Égypte, et de déposer, dans le sanctuaire, son portrait peint par Apelles[26]. La libéralité des adorateurs de Diane ne cessa d’enrichir et d’embellir son sanctuaire, auquel on ajoutait toujours de nouvelles décorations, de nouvelles œuvres d’art. Les inscriptions l’appellent le temple de l’Asie ; les offrandes y affluaient de tous côtés ; on y déposait, comme dans un trésor inviolable, les objets les plus précieux ; une grande partie de la richesse de l’Asie occidentale s’y était, avec le temps, accumulée, et on a comparé ce temple, non sans raison, à la Banque d’Angleterre ou à la Banque de France. Les curieux et les dévots y accouraient de tous les points du monde ancien pour admirer cet édifice, le plus beau, disait-on, que le soleil éclairât dans sa course, et pour obtenir les faveurs de la déesse à qui l’on attribuait la plus grande puissance. Avant de quitter Éphèse, on emportait, comme souvenir, ainsi que le disent les Actes[27], une image d’argent de ce sanctuaire qu’on était venu contempler de si loin[28]. Les médailles qui représentent le temple dont Démétrius et ses ouvriers fabriquaient des images, abondent[29] ; elles nous fournissent le moyen, en nous aidant en outre des renseignements complémentaires dus aux fouilles de M. Wood, de nous faire une idée de ce qu’était ce célèbre édifice.
La plate-forme sur laquelle il était bâti avait 437 mètres 40 (448 pieds) de long sur 74 mètres 85 (239 pieds) de large. Le temple lui-même avait 404 mètres (342 pieds) sur 50 mètres (463 pieds)[30]. Les fouilles ont amené la découverte de trois pavements superposés. Au-dessous du plus bas, on a trouvé une couche de charbon, entre deux couches d’une matière qui avait la consistance du mastic et qui paraît avoir été destinée à protéger les fondations contre l’instabilité du sol marécageux sur lequel elles étaient placées[31]. Ce sont là les fondations du plus ancien temple, au-dessus desquelles les deux autres qui le remplacèrent successivement furent bâtis depuis. Le dernier avait huit colonnes de façade, comme on le voit sur la médaille que nous reproduisons ici, et comme l’a constaté M. Wood. Ce savant croit que le nombre total des colonnes était de cent, d’une hauteur de 55 pieds environ, la plupart sculptées en relief offertes par des rois. Les inscriptions placées à la base montrent du moins qu’elles ont été données par des adorateurs de Diane[32]. L’aspect et le caractère de cet édifice religieux étaient tout différents, comme on peut le voir au premier coup d’œil, de nos églises et de nos cathédrales. Au lieu de ces formes élancées, qui s’élèvent vers le ciel, et de ces vastes nefs qui ouvrent leurs larges flancs pour recevoir une multitude de fidèles, les temples païens ne se composaient guère que d’entablements horizontaux, de hauteur médiocre, reposant sur des colonnes verticales ; ce n’étaient point des maisons de prière, couvertes d’un toit pour recevoir et abriter les adorateurs des dieux, c’étaient, en réalité, de simples colonnades, élevées, comme ornements, autour de la chapelle qui contenait l’idole, et, en grande partie, à ciel ouvert. Les colonnades du temple d’Artémis, à Éphèse, étaient particulièrement remarquables ; elles constituaient une époque nouvelle dans l’histoire de l’art grec ; elles étaient le plein épanouissement de ce gracieux style ionique dont la beauté féminine était plus appropriée au génie du Grec asiatique que le style dorique, plus mâle et plus ferme, que nous admirons dans le Parthénon et les Propylées d’Athènes[33]. Dans toute l’Asie Mineure, du temps de saint Paul, on ne voyait rien de comparable au temple de Diane : aucun édifice, dans le monde païen, n’excitait plus d’admiration, d’enthousiasme et aussi de superstition. Saint Luc nous peint donc, avec la plus parfaite exactitude, dans le discours de Démétrius qu’il nous a conservé, les sentiments des Éphésiens à l’égard de leur temple, dont toute l’Asie et l’univers entier vénèrent la majesté[34]. ARTICLE III. — LA GRANDE DIANE DES ÉPHÉSIENS. Avec le temple de Diane, ce qui est le plus révéré à Éphèse, d’après le récit de saint Luc, c’est la statue de la déesse. Ce que Démétrius reproche à saint Paul, c’est d’enseigner que les idoles ne sont pas des dieux, mais les ouvrages de la main des hommes, et cette attaque de l’Apôtre contre Artémis remplit tous les Éphésiens de colère ; le grammate ne parvient à les calmer, qu’en proclamant hautement que le monde entier sait qu’Éphèse est la fidèle adoratrice de la statue d’Artémis, de cette statue tombée du ciel[35]. L’épigraphie confirme d’une manière remarquable tout ce que rapportent les Actes. Nous ne possédons pas de texte qui attribue expressément, comme les Actes, une origine céleste au simulacre de Diane. Les monuments nous montrent du moins qu’elle ne venait pas de l’Hellade et confirment indirectement le texte sacré. Même après tous les embellissements de l’art grec, qui l’a transformée, la déesse des rives du Caystre garde les marques de sa grossièreté primitive.
La Diane qu’on adorait à Éphèse n’était point la poétique fille de Latone, la sœur du brillant Apollon. L’Artémis grecque était un type de beauté, aux formes élégantes et gracieuses, la déesse chasseresse ou bien la personnification de la Lune, éclairant de sa pâle lumière argentée l’obscurité et le silence de la nuit. L’Artémis d’Éphèse, au contraire, n’avait rien d’idéal : c’était une informe statue de bois[36], noircie par les siècles, revêtue, dans toute la partie inférieure du corps, non d’une tunique aux plis souples et ondoyants, mais d’un maillot ou de bandelettes qui la serrent à la façon d’une momie égyptienne[37]. Elle ne porte pas au front le croissant qui donne à Phœbé je ne sais quel air céleste ; elle a pour coiffure une couronne de tours ou une mesure à grains[38] ; au lieu de tenir dans sa main l’arc de la chasseresse ou le flambeau de la déesse Lucifère, elle est parfois armée d’un trident ; ni la biche ni le chien de chasse ne sont à ses côtés, mais des lions rampent le long de ses bras étendus, et sur les langes qui l’enveloppent on voit des têtes de taureau, des griffons, des fleurs et des fruits. Ce n’est pas la vierge pudique des poètes de l’Hellade, c’est une divinité nourricière, Artémis Polymammia[39], Diana nutrix[40], d’origine asiatique et non hellénique. Elle rappelle les idoles de l’Inde, non l’œuvre de Praxitèle qui décorait l’Acropole d’Athènes. Son vrai nom était Upis[41]. Quand les Grecs s’étaient établis en Asie Mineure, ils y avaient trouvé son culte déjà en honneur. Ils conservèrent la déesse comme divinité tutélaire, mais ils lui enlevèrent son nom barbare et lui substituèrent, en leur langue, celui d’Artémis. Comme elle n’avait ni la forme ni les attributs de la Diane grecque, on l’appelait la Diane d’Éphèse, pour la distinguer de la sœur d’Apollon. Il suffit de jeter un coup d’œil sur l’image des deux Artémis, pour voir la différence qui sépare l’art grec de l’art encore informe des anciens habitants de l’Asie Mineure. Les habitants d’Éphèse regardaient Diane-Upis comme la fondatrice de leur cité[42] et ils lui rendaient, à elle et à sa statue, un culte tel que les inscriptions seules peuvent nous en donner une idée. Dans l’une de ces inscriptions, nous lisons entre autres choses : Non seulement dans notre ville, mais partout des temples sont dédiés à la déesse, des statues lui sont érigées et des autels consacrés, à cause de ses manifestations... La plus grande preuve du respect qui lui est rendu, c’est qu’un mois a reçu son nom, étant appelé Artémision parmi nous, et Artémisius parmi les Macédoniens et les autres peuples de la Grèce. Pendant ce mois ont lieu des panégyries et des fêtes religieuses, surtout dans notre cité, qui est la nourrice de notre déesse éphésienne. En conséquence, le peuple d’Éphèse, considérant comme convenable que la mois tout entier qui porte le nom divin soit gardé comme saint et consacré à la déesse, a jugé à propos de régler son culte par ce décret. Il est donc décidé que tout le mois d’Artémision sera saint, que tous les jours de ce mois on célébrera des fêtes, la panégyrie des Artémisies[43] et les solennités saintes, pendant le mois consacré à la déesse. Ainsi le culte étant mis sur un meilleur pied, notre ville continuera à croître en gloire et sera prospère en tout temps[44]. Le dévouement des habitants d’Éphèse au culte de Diane est également constaté par les inscriptions découvertes par M. Wood. Ils aiment à prendre le titre de φιλάφτεμις, ami d’Artémis, dévoué à Artémis[45]. Ils lui font de nombreuses offrandes[46], comme ils célèbrent eh son honneur de nombreuses fêtes, en particulier celle du jour de sa naissance[47]. Le récit des Actes qualifie toujours Artémis de grande, μεγάλη[48] ; les inscriptions font de même ; l’une d’entre elles l’appelle même la très grande. Τήν μεγίτην θεόν Άρτιμιν[49]. Τή μεγίτη θεά Έφεσίς Άρτέμιδι[50]. Elle a ses prêtresses, les curateurs de ses temples, ses devins ou théologiens, ses choristes ou hymnodes, ses porteurs de sceptres ou skêptouchoi, ses femmes de chambre et même ses acrobates[51]. Des Éphésiens, en mourant, lui lèguent leurs biens en héritage : Πόπλιον Ούήδιον Παπιανόν Άντωνεΐνον τόν κράτιστον κληρονόμω χρησάμενον τή άγιωτάτη θεώ Έφεσία Άρτέμιδι ή πατρίς άνενεώσατο. Publius Vedius Papianus Antoninus, le très bon, ayant fait la très sainte déesse d’Éphèse, Artémis, son héritière, sa patrie en conserve le souvenir[52].
Des redevances sont assignées pour lui acheter des parures ; des fondations sont faites pour l’entretien et la garde de ses images ; des décrets sont publiés pour l’exhibition publique de ses trésors. M. Wood a découvert plusieurs inscriptions par lesquelles un certain C. Vibius Salutaris[53] donna au temple d’Artémis de nombreuses statues, images et autres objets de prix. L’état de délabrement de ces inscriptions ne permet de lire qu’une partie des dons de Salutaris. On y remarque entre autres use Artémis d’or de trois livres avec deux cerfs d’argent ; deux Artémis d’argent portant une torche, du poids de six livres[54]. Dans l’une d’elles, datée de l’an 104 de notre ère, il est ordonné que les trésors ainsi donnés seront portés, en procession solennelle, du temple au théâtre et du théâtre au temple, à chaque tenue des assemblées, aux jeux gymnastiques et à tout antre jour qui pourra être déterminé par l’assemblée et le peuple. Les susdites statues... et toutes les images de la déesse seront portées, du pronaos [du temple de Diane], tous les jours d’assemblée publique[55], au théâtre et aux jeux gymnastiques et aux autres jours que détermineront le sénat et le peuple, par deux gardiens du temple, les vainqueurs des jeux, un porte-sceptre et des gardes ; elles seront ensuite rapportées au temple et elles y seront déposées, les jeunes gens aidant aussi à les porter depuis la porte Magnésienne, et, après les assemblées, les accompagnant jusqu’à la porte Corésienne[56]. Nous voyons par ce dernier fait la place que tenait le théâtre dans la vie du peuple d’Éphèse : autre point d’accord entre l’épigraphie et le récit des Actes. Diane est presque autant chez elle au théâtre que dans son temple. Elle y préside en quelque sorte par son image, qu’on y apporte solennellement en procession. Ce théâtre revient souvent dans les inscriptions découvertes par M. Wood. C’est le lieu ordinaire des assemblées publiques, conformément à ce que disent les Actes[57]. On y proclame les édits, on y conserve les décrets, on y couronne les bienfaiteurs publics[58]. Ses pierres étaient couvertes d’inscriptions qui attestaient le culte qu’Éphèse rendait à Artémis[59]. ARTICLE IV. — CONSTITUTION POLITIQUE ET MUNICIPALE D’ÉPHÈSE. Les Actes, en racontant la sédition d’Éphèse, nous font connaître incidemment la constitution politique de cette ville. C’était une cité libre ou autonome, comme Thessalonique[60]. Elle avait par conséquent le privilège de s’administrer intérieurement à sa guise et d’avoir des magistrats particuliers[61], portant des titres locaux et jouissant d’attributions propres. Éphèse, comme les vieilles cités ioniennes, avait une organisation démocratique qui persista sous les Romains. Les inscriptions[62] parlent souvent du sénat, βουλή, et des assemblées du peuple, δήμος et έκκλησίας. Le sénat se réunissait probablement près de l’agora, au-dessous du théâtre ; le peuple, dans le théâtre même. Le récit de saint Luc parle de trois espèces de magistrats à Éphèse : du proconsul, du grammate et des Asiarques. Il y a des proconsuls, άνθύπατοι[63], dit saint Luc, — phrase dans laquelle le pluriel, par une figure de rhétorique, est probablement employé pour le singulier[64]. Le proconsul était le gouverneur de la province et l’administrateur suprême de la loi ; le grammate ou scribe était le premier magistrat de la ville elle-même ; les Asiarques étaient les présidents des jeux et des autres cérémonies religieuses. Le proconsul représentait le pouvoir central. Une médaille de Néron prouve que, du temps de cet empereur, comme du reste à toutes les époques, Rome envoyait à Éphèse des officiers revêtus de cette dignité[65]. Les grammates étaient à la tête des affaires municipales de la ville[66]. Les inscriptions nous apprennent que, au moins à une certaine époque, ils étaient au nombre de deux, l’un pour le sénat et l’autre pour le peuple. Ils étaient élus annuellement et paraissent avoir donné leur nom à l’année comme les consuls à Rome et les archontes à Athènes. Ils pouvaient remplir plusieurs fois la même dignité[67]. Les Asiarques, grands prêtres du culte de Rome et d’Auguste pour la province d’Asie, avaient à ce titre le privilège de présider aux jeux et aux fêtes, mais ils avaient la charge d’en supporter les dépenses, comme les édiles à Rome ; aussi, dit Strabon[68], les choisissait-on généralement parmi les Tralliens, les plus riches des Asiatiques[69]. Ils devaient avoir rempli toutes les magistratures de leur ville natale. Leur costume était brillant, ils portaient sur la tête une couronne d’or. Une médaille d’Hypæpa, en Lydie, représente un Asiarque, versant une libation sur un autel où est allumé le feu sacré, pendant que la Victoire, debout derrière ce magistrat, lui dépose une guirlande sur le front[70]. Tous ces magistrats, proconsuls, grammates, Asiarques sont fréquemment nommés, dans les inscriptions récemment découvertes. Quelquefois, deux des trois sont mentionnés sur la même pierre ; d’autres fois le même personnage réunit les deux dignités de grammate et d’Asiarque, soit simultanément, soit successivement. La mention du grammate, qui joue un rôle si important dans le récit des Actes, est la plus fréquente dans l’épigraphie d’Éphèse ; son nom est employé pour signer tous les décrets et pour fixer toutes les dates. Nous trouvons les trois titres dans la seule inscription suivante :
A l’empereur, César, fils de
Divus Nerva, Nerva Trajan Auguste Germanicus Dacicus
; l’ami d’Au- guste, le sénat d’Éphèse, et le
peuple néocore ont dédié, sous le proconsul Vettius Proculus[71], d’après un décret de T. Flavius Aristobule, Asiarque[72], grammate... fils de Pythion...[73] Il serait facile de multiplier les citations de ce genre[74], mais celle que nous venons de faire suffit pour justifier amplement tout ce que dit saint Luc sur l’organisation politique et municipale de la ville libre d’Éphèse[75]. ARTICLE V. — LOCUTIONS ÉPHÉSIENNES DANS LE RÉCIT DE SAINT LUC. Le dernier point que nous avons à relever dans le récit des Actes, ce sont les expressions et les locutions éphésiennes qu’il renferme. Non seulement le ton général du morceau a une couleur locale fortement accusée, non seulement les idées qui forment comme le fond du tableau sont celles qui régnaient dans la capitale de la province d’Asie, mais elles sont exprimées dans les propres termes dont on se servait sur les rives du Caystre. Nous avons déjà vu comment l’auteur des Actes, racontant ce qui s’était passé à Philippes ou à Thessalonique, écrit comme le faisaient les Philippiens ou les Thessaloniciens dans leurs inscriptions ; mais, nulle part, nous ne rencontrons une telle abondance de phrases ou de mots insolites, parce que nous avons ici un récit d’une plus grande longueur, contenant deux discours de deux habitants d’Éphèse, celui du juif Alexandre et celui du gram mate, qui parlent la langue de leur cité. A cause de ce caractère particulier du langage, les commentateurs ont été embarrassés, jusqu’à ces derniers temps, soit pour expliquer d’une manière précise, soit pour justifier ce que nous pourrions appeler des idiotismes ou des provincialismes. Les nombreuses inscriptions découvertes par M. Wood viennent aujourd’hui à notre aide ; elles suppléent au silence des auteurs de l’antiquité et aux lacunes des dictionnaires grecs, et elles éclairent la narration de saint Luc, en même temps qu’elles en confirment de la manière la plus frappante la véracité. Nous avons déjà constaté[76] comment les textes épigraphiques qualifient de grande la déesse d’Éphèse, d’accord avec les Actes, plaçant dans la bouche des séditieux le cri, poussé pendant plusieurs heures : Grande est la Diane des Éphésiens[77] ; nous avons montré aussi comment tous les titres de magistrats et d’officiers, cités par saint Luc, se lisent également dans les monuments d’Éphèse ; nous allons voir maintenant comment les fouilles de M. Wood ont mis à jour les expressions particulières contenues dans le discours du grammate[78]. Les inscriptions qu’il a découvertes contiennent en effet les mots grecs employés dans le récit des Actes. D’après un texte trouvé dans le grand théâtre, certains délits, tels que la mutilation des images et statues, doivent être, regardés comme un sacrilège et une impiété. . . . . . . . . . . ου ή τάς είκόνας πρός τό . . . . . τινι τρόπω κακουργηθήναι έπί . . . . έστω ίεροσυλία καί άσέβεια[79]. Ίεροσυλία, impiété, est le même mot que ίεροσύλους, impies, des Actes[80]. Le grammate justifie les accusés juifs de ce crime. Le terme νεωκόρος, néocore, dont se sert le grammate dans saint Luc, pour qualifier le culte qu’Éphèse rend à Diane, et qui signifie proprement celui ou celle qui balaye le temple, a été également retrouvé dans les inscriptions : Qui ne sait, dit-il, que la ville d’Éphèse est la néocore d’Artémis ?[81]. Aucun Grec ne l’ignorait du temps de saint Paul, mais avant les fouilles de ces dernières années, il n’en était plus ainsi. On savait bien que ce mot était d’un usage courant à Éphèse, comme en général dans les autres villes asiatiques, pour marquer le culte rendu aux empereurs romains, mais non pour le culte de la divinité locale ; on l’avait même suppléé comme vraisemblable dans la lacune d’une inscription mutilée, où il s’agissait d’Éphèse et de Diane[82], mais on n’avait aucun exemple direct où Éphèse fût appelée certainement « néocore d’Artémis[83]. » L’inscription de M. Wood dont nous parlions tout à l’heure dit expressément que la « cité des Éphésiens est deux fois néocore des Augustes, selon les décrets du sénat, et néocore d’Artémis. »
... et deux fois néocore des Au- gustes, selon les décrets du sénat, et néocore d’Artémis, et ami d’Augus- te, la ville des Éphésiens, le voi- le (?)[84] du théâtre [qui avait été] mis en pièces, complètement a réparé et
ar- rangé avec d’autres ressources et... ...............le proconsul Tinéius Sacerdos. Portez-vous bien[85]. Le grammate termine son discours dans saint Luc en faisant appel aux formes reconnues de la loi. Άγόραιοι (sous-entendu ήμέραι) άγονται, dit-il, c’est-à-dire, il y a des jours où le proconsul rend la justice[86]. Mais s’il ne s’agit pas de discussions judiciaires ordinaires, continue le grammate, que l’affaire soit portée devant l’assemblée légale, έννομος έκκλησία. Il entend par là une assemblée qui se tenait à un jour fixe et déterminé par la loi. Une inscription trouvée dans ce même théâtre, où le grammate avait prononcé les paroles que nous venons de rapporter, nous parle de cette assemblée légale. Il y est dit qu’une certaine statue d’argent d’Athênê ou Minerve sera apportée à chaque assemblée légale, κατά πάσαν νόμιμον έκκλησίαν, au-dessus du banc où les enfants sont assis[87]. C’est ainsi que tous les traits les plus particuliers et les plus singuliers du récit de saint Luc sont confirmés, illustrés et expliqués par les découvertes récentes. On voit par tout ce qui précède que non seulement l’auteur des Actes raconte des faits qui sont en parfaite harmonie avec les mœurs et les habitudes des Éphésiens, mais qu’il parle le langage qu’on parlait dans leur ville, et qu’il met dans leur bouche les expressions et les locutions qui leur étaient propres et dont quelques-unes ne se retrouvent pas ailleurs. On reconnaît là le témoin contemporain, qui a été mêlé aux événements qu’il raconte ou les a appris de la bouche même des acteurs. |
[1] Actes, XVII, 19-21.
[2] Actes, XIX, 10 et XXX, 31. Cf. I Cor., XVI, 8.
[3] Pline, H. N., V, 31, 120, édit. Teubner, 1870, t. I, p. 208, dit que, de son temps, Éphèse et Smyrne étaient les deux yeux de l’Asie. Verum Ephesum alterum (il vient de parler de Smyrne) lumen Asiæ...
[4] Strabon, XIV, 1, 3, édit. Didot, p. 540. Elle était néanmoins plus ancienne. Cf. E. H. Plumptre, Saint Paul in Asia Minor, in-16, Londres (sans date), p. 89.
[5] Actes, XIX, 19. Voir aussi saint Jérôme, Præf, in Epist. ad Ephesios, t. XXVI, col. 441. Cf. Philostrate, Vita Apollonii Thyanei, l. IV et V.
[6] Voir Suidas, Lexicon, à ce mot. Il les définit, édit. G. Bernhardy, t. I, col. 673, des incantations obscures.
[7] Cf. Plutarque, Sympos., l. VII, q. 5.
[8] Voir, Figure 19, une plaque de terre cuite contenant les έφέσια γράμματα. Au milieu est la Diane d’Éphèse. L’inscription n’a pas de sens. On peut lire seulement à la première ligne du haut : ΑΡΤΕΜ ΦΑΟΣ ΙΕΡΟΝ. Cette plaque est conservée à Syracuse.
[9] A Eustathe, de Thessalonique, Commentarii ad Homeri Odysseum, φ, 2 in-4°, Leipzig, 1825. Le texte d’Eustathe est cité dans Migne, Patr. græca., t. IX, col. 72, note 20.
[10] D’après Clément d’Alexandrie, Stromates, V, 8, L. IX, col. 72-73, les mots magiques, étaient les suivants : Άσκιον, Κατάσκιον, Αίξ, Τετράς, Δαμναμενεύς, Άισιον. Il ajoute que le philosophe pythagoricien Androcyde les expliquait comme signifiant : Ténèbres, Lumière, la Terre, l’Année (avec ses quatre saisons), le Soleil (comme domptant toutes choses) et Vérité. Dans un autre passage des mêmes Stromates, I, 15, t. VIII, col. 781, il attribue à une tribu phrygienne, les Idéodactyles, l’invention des lettres éphésiennes.
[11] Suidas, Lexicon, t. I, col. 673.
[12] Actes, XIX, 19. Voir Conybeare et Howson, Life and Epistles of saint Paul, p. 371. — Sur le prix élevé des livres dans l’antiquité grecque et sur les livres de Protagoras brûlés à Athènes sous Périclès, voir V. Duruy, Histoire des Grecs, t. II, 1888, p. 625.
[13] Les magiciens d’Éphèse étaient, par suite, recherchés au loin. Balbilus, l’astrologue de Néron et de Vespasien, était né dans cette ville. Le plus fameux magicien du paganisme expirant, Maxime, qui initia l’empereur Julien aux mystères d’Éleusis, était aussi Éphésien. Voir W. Smith, Dictionary of Greek and Roman Biography, t. II, 1851, p. 991.
[14] Cette légende est racontée dans une homélie de Jacques de Sarug (721). Elle fut traduite en latin et saint Grégoire de Tours l’a insérée dans son De gloria martyrum, I, 95, t. LXXI, col. 787-789. Mahomet l’a racontée dans le Koran, sourate XVIII. Cf. Pagliarini, Septem dormientium historia, in-4°, Rome, 1741 ; Bidermann, Fabulæ de septem dormientium historia, in-4°, Fribourg, 1752 ; Th. G. von Karajan, Von den siben Slafaeren, Gedicht des XIII. Jahrhunderts, in-4°, Heidelberg, 1839.
[15] Tacite, Ann., XV, 45.
[16] Tr. Pollion, Vitæ Galien., dans l’Historia Augusta, édit. Panckoucke, 1844, t. I, p. 316. Plumptre, Saint Paul in Asia Minor, p. 137.
And
Ephesus shall wall along her shore,
And
seek her temple — temple found no more.
[17] On explique généralement le nom d’Aïa-Soulouk comme étant une contraction ou une corruption des mots grecs : ό άγιος θεόλογος, le saint théologien, locution par laquelle on désigne l’apôtre saint Jean. Dans le Nouveau Testament grec, l’Apocalypse porte le titre de ‘Άποκαλυψις Ίωάννου θεολόγου.
[18] Von allen grossen Tempeln des Alterthums war das Artemision der einzige, dessen Stätte spurlos verschwunden war, bis es dem Kunsteifer und der Energie Englands nach zwülfjährigem Durchwühlen der ganzen Ebene in Frühjahr 1871 endlich gelungen ist, aus 20 Fuss Tiefe die im Schlamm versunkenen Marmortrümmer wieder an das Licht zu ziehen. E. Curtius, Ephesos, ein Vortrag gehalten im wissenschajtlichen Verein zu Berlin, am 7. Februar 1874, p. 35. — Sur le temple d’Éphèse, voir V. Duruy, Histoire des Grecs, t. I, 4887, p. 615-616 ; cf. p. 658, 660-661. — J’ai visité une première fois, en 1888, les ruines d’Éphèse et celles du temple de Diane, le fameux Artémision. De cette merveille du monde, il ne reste qu’une sorte de creux, actuellement rempli d’eau où nous avons entendu coasser de nombreuses grenouilles. Nous en avons fait le tour à cheval, en passant, à l’extrémité ouest, dans l’eau et dans la boue. Au milieu du marais, beaucoup de débris en marbre, entre autres des fameuses colonnes cannelées. Tout le reste de ce qui a été retrouvé a été porté à Londres. — Quand nous avons visité une seconde fois Éphèse et l’Asie Mineure en 1893, l’habile explorateur de Pergame et de Magnésie du Méandre, M. Karl Humann, nous dit que les fouilles d’Éphèse étaient néanmoins à recommencer, malgré tout ce qu’avait fait M. Wood, parce que les chercheurs anglais ne s’étaient pas préoccupés de reconstituer scientifiquement la ville antique, mais principalement de retrouver de beaux morceaux de sculpture. M. Humann venait de reprendre ces fouilles importantes, lorsqu’une mort bien regrettable l’a arrêté au milieu de ses travaux. M. Humann était né à Steele, dans la Prusse rhénane, le 4 janvier 1839 ; il est mort à Smyrne en avril 1896. Voir Beilage, zur Allgemeinen Zeitung, 45 avril 1896, p. 7.
[19] J. T. Wood, Discoveries at Ephesus including the site and remains of the great temple of Diana, with numerous illustrations from original drawings and photographs, Londres, 1877, Introduction, p. VII-VIII.
[20] Actes, XIX, 34.
[21] Jamais peut-être le caractère d’une sédition populaire n’a été peint plus simplement ni plus justement que par ces seuls mots : Et la plupart ne savaient même pas pourquoi l’on était rassemblé. Actes, XIX, 32. Conybeare et Howson, Life and Epistles of saint Paul, p. 431.
[22] Pour les proconsuls d’Éphèse, voir B. V. Head, On the chronological Sequence of the Coins of Ephesus, in-8°, Londres, 1880, p. 72.
[23] Actes, XIX, 23-40.
[24] Strabon, XIV, 1, 22, édit. Didot, p. 547 ; Pline, H. N., XXXVI, 21, édit. Lemaire, t. IX, p. 497 et note ; cf. t. VII, p. 141, note.
[25] Pline, H. N., VII, 38, édit. Lemaire, t. VII, p. 143 et note. Cf. Strabon, XIV, 1, 23, édit. Didot, p. 547.
[26] La valeur de celte peinture était, dit-on, énorme : For one picture, representing Alexander the Great grasping a thunderbolt, no less than twenty talents of gold had been paid, representing, in modern valuation, l. 38.650 sterling (966.250 fr.). Plumptre, Saint Paul in Asia Minor, p. 100.
[27] Actes, XXI, 24.
[28] Les commentateurs ont hésité sur la nature des édicules fabriqués par Démétrios, mais il ne nous paraît pas douteux que ce ne fussent des représentations eu petit du temple de la déesse, tel que nous le voyons sur les médailles. Faciens ædes argenteas. Quænam hæc ? demande Cornélius à Lapide, in Actes, XIX, 24, édit. Vivés, t. XVII, p. 357. — Primo, aliqui censent fuisse vota et anathemata, quæ offerebant Diane : ob depulsum periculum, vel acceptum beneficium. — Secundo, alii censent cum Chrysostomo, fuisse arcas sive thecas in quibus gestabantur amuleta, puta signa Dianæ, sive litteræ Ephesiæ, quas contra febres, morbos, pericula, aut pro felici sorte et fortuna, fallaces sacerdotes Diane : dabant adventantibus. Aut potius, ut Baronius, hæ ædes erant ipsæ argenteæ statuæ Dianæ, cum suis ædiculis seu loculamentis. — Tertio et optime, hæ ædes erant imagines sive simulacra templi Dianæ. Ita enim ejus templum venerabantur, ut illud in imaginibus effingerent, ejusque similitudinem in statuis, puta in ædiculis argenteis conflarent, quibus effigiem, sive statuam Dianæ imponebant ; eas deinde vel offerebant Dianæ in templo ; vel ad collum, aut in pileis et vestibus appensas gestabant, sicut nostri peregrini gestant imagines B. Virginis Lauretanæ ; aut ceste domi in larariis et oratoriis eas reponebant, præsertim si solidæ essent, non planæ et in lamina. Id ita esse patet ex eo quod cas Lucas græce vocet ναούς, id est templa, et Polybius ναίδια, id est parva templa, templula, puta delubra et ædiculas effigie templi in quibus reponebantur statuæ Dianæ. — Voici ce que dit M. Wood au sujet de ces édicules : The long Salutarian inscription, found on one of the walls of the southern passage into the Theatre, and which was inscribed in the lime of Trajan, about A. D. 104, describes in detail a number of these shrines, probably similar to those made by Demetrius and his fellow-craftsmen. The shrines described in this inscription and numbering more than thirty, were of gold and silver, weighing from three to seven pounds each, and represented figures of Artemis with two stags, and a variety of emblematical figures ; these were voted to Artemis and were ordered in be placed in her temple. J. T. Wood, On the antiquities of Ephesus having relation to Christianity, dans les Transactions of the Society of Biblical Archæology, t. VI, 1878, p. 328.
[29] La médaille (agrandie) que nous reproduisons, Figure 20, est donnée d’après Wood, Discoveries at Ephesus, p. 267. On trouve plusieurs autres vues du temple ou médailles dans le même ouvrage.
[30] Ce sont les mesures données par M. Wood. Pline, H. N., t. V, p. 122, XXXVI, 14, dit : Universo templo longitudo est CCCCVV pedum, latitudo CCXXV.
[31] The excavations led to the discovery of three pavements, one below the other ; the lowest 1 feet 6 inches beneath the highest, and each representing a stage in the historv of the fabric. Below the lowest of these was found a layer of charcoal three inches thick betweeen two strata of a soft substance of the consistency of putty, giving a singular confirmation ot the statement of an ancient writer, that Chersiphron, the architect of the Temple built by Crœsus, under the advice of Theodorus of Samos, ordered the foundations to be laid on fleeces of wool and charcoal, so as to guard against the risks likely to arise from the marshiness of the soil. It seems to follow from this that we have here the floor of the first Temple, that the pavement above it represents that which was built circ. A. D. 400, by Pæonius who was also the architect of the Temple of Apollo at Branchidæ, and was destroyed by Herostratus, and that the topmost pavement belongs to the greatest and last of the three temples which replaced it, and remained till its destruction by the Goths. Plumptre, Saint Paul in Asia Minor, p. 98-99. — Græcæ magnificentiæ vera admiratio exstat templum Dianæ Ephesiæ, ducentis (ailleurs : quadringentis) viginti annis factum a tota Asia, dit Pline. In solo id palustri fecere, ne terræ motus sentiret aut hiatus timeret, rursus, ne in lubrico atque instabili fundamenta tantæ molis locarentur, calcatis ea substravere carbonibus, dein velleribus lanæ. H. N., XXXVI, 14, édit. Teubner, t. V, p. 122. — Nous avons remarqué plus haut que sur l’emplacement du temple est aujourd’hui un marais.
[32] Universo templo, dit Pline, columnæ CXXVII, a singulis regibus faciæ, sexaginta pedum altitudine, ex iis XXXVI cælatæ... Cætera ejus operis ornamenta plurium librorum instar obtinent, nihil ad speciem naturæ pertinentia. Pline, H. N., XXXVI, 14, édit. Teubner, t. V, p. 122-123. Voir pour la description du temple, Conybeare et Howson, Life and Epistles of saint Paul, p. 423.
[33] Conybeare et Howson, Life and Epistles of saint Paul, p. 423.
[34] Actes, XIX, 27.
[35] Actes, XIX, 35. Littéralement, venant de Jupiter. La Vulgate porte : fille de Jupiter, Jovisque prolis. Cornélius a Lapide, in Actes, XIX, 35, édit. Vivès, t. XVII, p. 360.
[36] D’après M. Wood, Discoveries at Ephesus, p. 75, cette statue pouvait être un aérolithe, d’une grosseur extraordinaire, ayant une apparence humaine. — On croit généralement que la statue d’Artémis était en bois de vigne. Voici ce que dit Pline à ce sujet : De simulacro ipso dem ambigitur : cæteri ex hebeno esse tradunt. Mucianus ter consul ex his qui proxume viso eo scripsere vitigineum et nunquam mutatum septiens restituto templo... Adjicit multis foraminibus nardo rigari, ut medicatus humor alat teneatque juncturas. H. N., XVI, 79, édit. Teubner, t. III, p. 39. Cf. E. Curtius, Ephesos, p. 30 et 38.
[37] Voir les Figures 21, 22 et 23. La Diane d’Éphèse, placée au milieu, Figure 22, reproduit une statue du Musée du Vatican, à Rome. La Diane, à droite, Figure 23, est la Diane chasseresse du Musée de Dresde ; celle de gauche, Figure 21, est la Diane Lucifère du Musée du Capitole, à Rome. Pour la Diane d’Éphèse, voir aussi celle qui est représentée plus haut, dans l’intérieur du temple. Voir enfin les têtes de Dianes grecques sur les monnaies de Macédoine. — On trouve d’autres représentations de la Diane d’Éphèse dans Wood, Discoveries at Ephesus, p. 266, 269, 270. — Le Musée Guimet à Paris possède une belle statue de la Diane d’Éphèse.
[38] Le modius, boisseau. Le modius servait de coiffure symbolique pour plusieurs dieux. Voir Dictionnaire de la Bible, t. I, col. 1841.
[39] Scribebat [Paulus] ad Ephesios Dianam colentes, non hanc venatricem, quœ arcum tenet atque succinta est, sed illam multimammiam, quam Græci πολύμαστην, »dit saint Jérôme, Præf. in Epist. ad Ephesios, t. XXVI, col. 411, ut scilicet ex ipsa quoque effigie, mentirentur omnium eam bestiarum et viventium esse nutricem.
[40] Curtius a montré que c’était, sous un autre nom, l’Astarté phénicienne. Die griechische Götterlehre von geschichtlichen Standpunkt, in-8°, 1875. Cf. G. Perrot, Histoire de l’art, t. III, p. 319.
[41] Plumptre, Saint Paul in Asia Minor, p. 89.
[42] Άρχηγέτιν. Wood, Inscriptions from the great Theatre, n° 1, col. I, l. 17, p. 4.
[43] Artémisies est le nom des fêtes en l’honneur d’Artémis.
[44] Bœckh, Corpus inscriptionum græcarum, t. II, Berlin, 1843, n° 2954, p. 600. L’inscription est en partie mutilée, mais les lettres qui manquent ont été facilement suppléées dans la partie rapportée ici.
[45] Wood, Inscriptions from the great Theatre, n° 1, col. II, l. 24-25, p. 6 ; col. VI, l. 78-79, p. 36.
[46] Voir Wood, Inscriptions from the site of the temple of Diana, n° 17, p. 19, les inscriptions dédicatoires, et passim.
[47] Wood, Inscriptions from the great Theatre, col. VII, l. 14-15 et l. 29, p. 40.
[48] Actes, XIX, 27, 28, 34, 35.
[49] Le grammate, dans son discours, Actes, XIX, 35, s’exprime d’une manière tout à fait semblable : τής μεγάλης Θεάς Άρτέμιδος.
[50] Wood, Inscriptions from the great Theatre, n° 1, col. I, l. 9-10, p. 2 ; col. VI, l. 80-81, p. 36 ; voir aussi col. IV, l. 48-49, p. 16 ; col. V, l. 85, p. 24 ; col. VI, l. 34. p. 30.
[51] Έσσήνκι, θεολόγοι, ύμνωδοί, σκηπτούχοι, κοσμητεΐραι. Voir Wood, Inscriptions, II, p. 2 ; IV, n° 2, p. 4, etc., pour les Essènes ; VI, l. 56-51, pour les théologiens et les hymnodes, p. 22 ; ibid., l. 61, pour les porteurs de sceptres, p. 22 ; ibid., καθαρσίοι, les purificateurs ; ibid., 1. 84-85, 0eaµtgeol, interprètes des oracles ; ibid., l. 86, άκροβάταις τής θεοΰ, p. 36 ; ces acrobates sont aussi nommés, col. VII, l. 13, p. 40. Quant aux femmes chargées de prendre soin de la statue de la déesse, nous lisons dans une inscription : Ce sanctuaire et cet espace consacré appartiennent à Pomponia Faustina, κορμητείρης τής Άρτέμιδος, héréditaire, et à Ménandre son mari. Inscriptions from the city and suburbs, n° 14, p. 36.
[52] Wood, Inscriptions front the city and suburbs, n° 9, p. 31.
[53] Wood, Inscriptions from the great Theatre, n° 1, p. 2 et suiv.
[54] Wood, Inscriptions from the great Theatre, col. III, l. 15 ; col. IV, l. 39, p. 10-14. Cf. ibid., p. 44.
[55] Κατά πάσαν έκκλησίαν.
[56] Wood, Inscriptions front the great Theatre, col. VII, l. 30-42, p. 42. Cf. aussi col. II, l. 20-30, p. 6-8. — Col. VI, l. 46, p. 32 et suiv., on lit ce décret : Qu’il soit permis aux porteurs d’or (χρυσφοροΰσιν) de porter, dans les assemblées publiques (έκκλησίας) et les jeux (άγώνας), les images et les statues qui ont été dédiées par Gaius Vibius Satutaris, hors du pronaos du temple d’Artémis, les gardiens (τών νεωκορών) du temple en prenant la charge et les jeunes gens (έφήβων) se joignant à eux pour les porter depuis la porte Magnésienne, et les accompagnant en procession jusqu’à la porte Corésienne. Cf. pour le théâtre, un autre décret, ibid., l. 64-67, p. 34.
[57] Actes, XIX, 29. D’après M. Wood, le grand théâtre pouvait contenir 24.500 personnes, Discoveries at Ephesus, p. 68.
[58] Résolution du sénat et du peuple. Métras fait cette proposition : Attendu qu’Archestratos, fils de Nicon de Macédoine, étant en bons termes avec le roi et commandant les troupes à Clazomène, s’est montré fidèle aux intérêts du roi et a sauvé les navires chargés de grains de celte ville, le sénat et le peuple d’Éphèse lui décernent une couronne d’or et le proclameront à la fête de Dionysos au théâtre, etc. Wood, Inscriptions from the temple of Diana, n° 25, p. 38-39. Vingt-six des inscriptions publiées par M. Wood, et appartenant au temple de Diane, ont été trouvées, non dans le temple, mais dans le grand théâtre, ibid., p. 1. — L’inscription no 7, ibid., p. 10-13, est tout à fait analogue à celle du no 25 que nous venons de rapporter, mais plus détaillée ; de même n° 11, p. 20-21, etc.
[59] Voir, figure 24, les ruines du théâtre d’Éphèse, tel qu’il était il y a une soixantaine d’années (d’après Léon de Laborde, Voyage de l’Asie Mineure, grand in-fol., Paris, 1838, pl. XLIV ; cf. p. 90), et Figure 25, les mêmes ruines, d’après une photographie prise par M. Henri Cambournac, lors de notre second voyage à Éphèse en 1893. — On voit encore au milieu des ruines de nombreux fragments d’inscriptions.
[60] Voir plus haut.
[61] Voir ce que nous avons dit plus haut, sur les villes libres.
[62] Voir, par exemple, l’inscription citée plus loin.
[63] Actes, XIX, 38.
[64] C’est ainsi que dans Euripide (Iph. Taur., 1339), Oreste et Pylade sont accusés de voler les statues et les prêtresses, quoiqu’il n’y ait qu’une seule statue et une seule prêtresse. Lightfoot, Illustrations of the Acts, dans la Contemporary Review, mai 1878, p. 295. Quelques critiques pensent à tort qu’il y avait alors réellement deux proconsuls à Éphèse. D’ordinaire, il n’y avait qu’un proconsul, mais peu après l’avènement de Néron, Junius Silanus, qui remplissait cette charge, fut empoisonné, à l’instigation d’Agrippine, par ses deux procurateurs, Céler et Ælius, et ils exerçaient maintenant leurs fonctions, avec l’autorité proconsulaire, en attendant la désignation d’un nouveau proconsul. Plumptre, Saint Paul in Asia Minor, p. 123 ; Lewin, Saint Paul, t. I, p. 338 ; Tacite, Ann., XIII, 1, édit. Teubner, t. i, p. 225. Tacite, sur lequel s’appuie M. Plumptre, ne dit pas que Céler et Ælius aient gouverné la province avec le, titre de proconsuls ; la coexistence de deux proconsuls dans une même province est un fait inouï. Du reste, l’événement raconté par les Actes est de l’an 57 et l’empoisonnement de Silanus est de la fin de l’an 54.
[65] Voir figure 26. — ΚΑΙΣΑΡ ΝΕΡΩΝ. Tête diadémée de Néron. — v. ΕΦ. ΝΕΩΚΟΡΟΝ ΑΙΧΜΟΧΑΗ ΑΟΥΙΟΥΛΑ ΑΝΘΥΠΑΤΩ. (Monnaie) des Éphésiens, Néocores, Æchmoclès Aviola, proconsul. — Temple de Diane. — Cf. Akerman, Numismatic Illustrations of the New Testament, p. 55.
[66] Comme le mot γραμματεύς désigne une magistrature spéciale à Éphèse, les anciens commentateurs n’en ont pas compris la véritable signification, Seriba hic, dit Cornélius a Lapide, in Actes, XIX, 35, édit. Vivès, p. 360, fuit secretarius civitatis, vel consiliarus magistratus ejusque quasi os et sensus, quales in Belgio sunt et vocantur Pensionarii. Unde græce vocatur γραμματεύς, id est legis doctor, qui jura civitatis callet et tuetur, ac in iis Magistratum informat et dirigit. Syrus vertit, princeps civitatis, quasi fuerit cancellarius. — Un simple greffier eut le talent de se faire écouter lit-on dans l’Histoire générale de l’Église, rectifiée et continuée par le baron Henrion, Paris, 1843, t. I, p.58. — C’est par suite de cette ignorance que quelques-uns, comme Baronius, ont pensé que le scribe d’Éphèse était le juif Alexandre. Il est clair que ce n’est pas un Juif qui était à la tête du gouvernement éphésien. Le juif Alexandre ne peut parvenir à calmer la foule. Le grammate qui, étant païen, fait l’éloge de Diane, réussit à l’apaiser. Sur le grammate, voir J. Menadier, Qua condicione Ephesii usi sint inde ab Asia in formam provinciæ redacta, in-8°, Berlin, 1880, p. 78.
[67] Une médaille de Drusus porte, sur le revers, le nom de Cousinios, grammate des Éphésiens pour la quatrième fois. Voir figure 27. — Bustes de Drusus et d’Antonia. — v. ΕΦΕ. ΚΟΥΣΙΝΙΟΣ Το Δ (Monnaie) des Éphésiens, Cousinios, grammate pour la quatrième fois. Cf. Akerman, Numismatic Illustrations of the New Testament, p. 53. On possède aussi des jetons de grammate. En voir un dans V. Duruy, Histoire de la Grèce, t. I, 1886, p. 396.
[68] Strabon, XIV, 42, édit. Didot, p. 644.
[69] Sur les Asiarques, voir Lightfoot, Apostolic Fathers, 3 in-8°, t. II, part. II, p. 987-998 ; Marquardt, Römische Alterthümer, t. IV, p. 374. — P. Guiraud, Les assemblées provinciales dans l’empire romain, in-8°, Paris, 1887, donne la liste complète des Asiarques dont les noms ont été retrouvés par les savants modernes.
[70] Voir figure 28. Revers d’une monnaie d’Hypæpa, en Lydie. ΕΠΙ [Μ]ΕΝΑΝΡΟΥ Β ΑΣΙ[ΑΡΚΟΥ] ΣΤΡ(ατηγου) ΥΠΑΙΠΗΝΩΝ (Monnaie) des Hypæpéniens, sous Ménandre, pour la seconde fois Asiarque et prêteur. — Cf. Akerman, Numismatic Illustrations of the New Testament, p. 51.
[71] Vettius Proculus était proconsul vers l’an 112 de l’ère chrétienne. Cf. Waddington, Fastes des provinces asiatiques, p. 716.
[72] Publius Vedius Antoninus est aussi qualifié Asiarque, Wood, Inscriptions from the great Theatre, n° 3, l. 12, p. 46.
[73] Wood, Inscriptions front the site of the temple of Diana, n° 13, p. 14-15. — Le grammate est nommé plusieurs fois, Inscriptions from the great Theatre, col. V, I. 58-59 : τώ γραμματεΐ τοΰ δήμου, et l. 52, 54, où il paraît être question d’un grammate du sénat, p. 22 ; col. VI, l. 45, Julien, fils d’Alexandre, est dit grammate du peuple pour la seconde fois, p. 32. Voir aussi ibid., n° 4, p. 48. Sur l’office de grammate à Éphèse, voir Bœckh, Corpus Inscriptionum græcarum, n° 2953, t. II, p. 598 ; cf. p. 599 ; Wood, Inscriptions from the great Theatre, p. 49.
[74] Voir d’autres inscriptions sur les Asiarques publiées par le Μουσεΐον καί βιβλιοθήκη τής εύαγγελικής σχολής, 3e période, Smyrne, 1880, p. 177-179.
[75] Sur quelques autres termes spéciaux des Actes, voir E. L. Hicks, On some political terms employed in the New Testament, dans The Classical Revew, 1887, t. I, p. 4-8, 42-46.
[76] Les passages que nous avons rapportés plus haut appellent aussi Diane la déesse des Éphésiens, comme le fait le grammate, Actes, XIX, 37, τήν Θεάν ύμών.
[77] Actes ; XIX, 28, 34.
[78] Nous avons rapporté plus haut ses expressions en grec. Actes, XIX, 37, 35, 38, 39. Il est digne de remarque que toutes ces expressions éphésiennes se lisent dans le discours du grammate du peuple d’Éphèse, rapporté par saint Luc : preuve de la fidélité avec laquelle est reproduit ce discours.
[79] Wood, Inscriptions front the great Theatre, I, col. IV, lig. 39-41, p. 14.
[80] Actes, XIX, 37.
[81] Actes, XIX, 35.
[82] Bœckh, Corp. Inscript. græc., t. II, n° 2972, p. 609. Voir aussi Eckhel, Doctr. Num., t. II, p. 520 ; Monnet, Description des médailles antiques, t, III, p. 153 ; Suppl., t. VI, p. 245, 247, 250, 253 ; Xénophon, Anabase, V, 3, 6, édit. Didot, p. 267 ; J. Sabatier, dans la Revue numismatique, 1859, pl. XII, n° 4, où est représenté un médaillon de bronze, au revers de Caracalla, frappé à Éphèse, que je crois inédit, dit M. Sabatier.
ΑΥ . Μ . ΑΥΡ .
ΑΝΤΩΝΕΙΝΟΣ
Buste lauré et cuirassé de Caracalla, à droite, dans un cercle de grénetis.
Revers : ΕΦΕΣΙΩΝ . ΔΙΣ . ΝΕΩΚΟΡΟΝ
et à l’exergue, en deux
lignes,
ΚΑΙ ΤΗΣ
ΑΡΤΕΜΙΔΟΣ
Statue de Diane d’Éphèse, entre les deux Dioscures à cheval ; le tout dans un cercle de grénetis. Ibid., p. 305. Cf. Lightfoot, dans la Contemporary Review, mai 1878, p. 295. Voir plus haut, figure 20, où on lit le mot ΝΕΩΚΟΡΩΝ.
[83] Νεωκόρος, de ναός, temple, et κορεΐν, nettoyer. — Néocore. 1° Terme d’antiquité. Officier chargé de garder les temples et d’y entretenir la propreté. Le néocore chargé de veiller à la décoration et à la propreté des lieux saints [Suidas in Νεωκ.] et de jeter de l’eau lustrale sur ceux qui entrent dans le temple [Mém. de l’Acad. des Belles-Lettres, t. I, p. 61]. Barthélemy, Anacharsis, ch. XXI [édit. de 1188, t. II, p. 398]. — 2° Nom que prirent les villes qui avaient fait bâtir des temples en l’honneur des empereurs. Smyrne était néocore d’Auguste. Littré, Dictionnaire de la langue française, 1877, t. III, p. 712. Le Dictionnaire de l’Académie, 1878, t. II, p. 263, au mot néocore, s’exprime de même. Cf. Rich, Dictionnaire des antiquités romaines et grecques, trad. Chéruel, 1859, p. 426.
[84] Le pétasos désigne une sorte d’ombrelle, probablement ici le velum qui sert à garantir les spectateurs, dans le théâtre, contre le soleil. Cf. Lucrèce, IV, 75. D’après d’autres, ce mot désigne le toit. Wood, Inscriptions from the great Theatre, p. 53.
[85] Wood, Inscriptions from the great Theatre, n° 6, p. 50-52. Cf. Inscriptions from the site of the temple of Diana, n° 12, p. 14 ; n° 15, p. 16 ; Inscriptions from the great Theatre, n° 1, col. I, p. 2. — Q. Tinéius Sacerdos fut consul en 219 de notre ère.
[86] Cette phrase a été jusqu’ici mal comprise par la plupart des traducteurs et des interprètes, faute de renseignements suffisants. Voir Cornélius a Lapide, in Actes, XIX, 38, édit. Vivès, t. XVII, p. 360. — Dans les provinces, les citoyens romains étaient, pour toutes les matières légales, sous la juridiction du proconsul. Pour faciliter l’administration de la justice, tout le pays était divisé en districts dont chacun avait une ville chef-lieu où se tenaient les assises, forum ou conventus. Le proconsul, à des époques fixes, parcourait ces districts, accompagné par son interprète, parce que toutes les affaires légales de l’empire se traitaient en latin, et tous ceux qui avaient des procès ou des affaires importantes qui requéraient l’emploi des formes légales, comparaissaient devant lui ou devant les juges qu’il pouvait établir. Ainsi, Pline, tout imbu de l’esprit romain, a grand soin, dans sa description géographique de l’empire, de mentionner les villes où se tenaient les assises, et l’étendue du district qui en dépendait. Dans la province d’Asie, il nomme expressément Sardes, Smyrne et Éphèse, et les villes particulières qui ressortissaient à leur tribunal. La visite officielle du proconsul à Éphèse était nécessairement très importante... La phrase : άγοραίους [ήμέρας] άγειν, équivaut à celle de César : conventus agere, et à celle de Cicéron : forum agere. Nous trouvons la même phrase grecque dans Strabon. Conybeare et Howson, Life and Epistles of saint Paul, p. 427.
[87] Wood, Inscriptions from the great Theatre, col. VI, l. 95-96, p. 38. — La Vulgate traduit έννομος έκκλησία, Actes, XIX, 39, par : in legitima ecclesia. Baronius, d’après saint Épiphane, Hær. 30, a pensé, ainsi que d’autres commentateurs, que le mot ecclesia désignait la synagogue juive. Cf. Cornélius a Lapide, in Actes, XIX, 39, édit. Vivès, t. XVII, p. 369. L’épigraphie éphésienne fixe encore ici le véritable sens.