MÉMOIRES SUR LA CONVENTION ET LE DIRECTOIRE

TOME PREMIER. — LA CONVENTION

 

CHOIX DE MES OPINIONS, DISCOURS ET RAPPORTS PRONONCÉS A LA CONVENTION.

 

 

MOTION DE RÉVISER LES LOIS RÉVOLUTIONNAIRES.

27 PLUVIÔSE AN III.

 

IL n'y a pas de plus funestes défenseurs de la constitution que ceux qui vont puiser dans les journaux la base de leurs opinions. (Applaudissements.) Je me croirais indigne d'être législateur, si je suivais cette conduite. Il y a longtemps qu'on suppose que la constitution démocratique est attaquée par un parti puissant. Je ne doute pas qu'il n'y ait en France quelques ennemis de là démocratie, mais je crois que le plus mauvais moyen de la défendre est de supposer tous les jours qu'on l'attaque. Qu'importe à la nation que quelques journalistes disent leur opinion sur la manière dont la constitution est rédigée ? Moi, je vais plus loin, et je dis que s'il y avait dans la constitution un article qui ne me convînt pas, j'aurais le droit, en m'y soumettant, d'écrire contre. (Applaudissements réitérés.) Je déclare que si ce droit n'existait pas, il n'y aurait pas en France plus de liberté qu'en Russie.

Il est quelques hommes corrompus qui, à l'aide des calomnies qu'ils propagent, cherchent à faire croire que le règne de la justice n'est qu'une chimère, et que le régime des prisons va reparaître. (Vifs applaudissements.) Mais la Convention saura tous les terrasser : (Oui, oui ! s'écrient tous les membres.) Pour moi, je ne vois pas d'ennemis plus dangereux pour la république que celui qui s'oppose au retour de l'ordre et du règne des lois. (Applaudissements.)

Comment voulez-vous que ceux qui pendant dix-huit mois n'ont vécu que de brigandage et de désordre, puissent consentir au retour de la justice ? (Vifs applaudissements.) Pour moi, je le déclare, il n'y aura jamais de transaction entre certains hommes et moi ; une barrière éternelle nous sépare.

Le temps du charlatanisme est passé ; disons donc franchement qu'il n'y aura point de stabilité dans nos finances, tant que le gouvernement n'inspirera point assez de confiance ; et le nôtre n'a point assez de force.

Il faut, si vous voulez éviter une réaction funeste, il faut examiner la loi du 17 septembre et toutes les lois révolutionnaires, qui ne sont que des lois arbitraires. (On applaudit.) C'est le seul moyen de ramener la paix, de faire cesser toutes ces dénominations de jacobins, de modérés, de feuillants, de maratistes ; car il fut un temps où il n'y avait que de ces espèces d'hommes et où l'on ne trouvait pas un seul citoyen. (Vifs applaudissements.)

J'invite la Convention à activer les travaux de cette commission nommée, depuis deux mois, qui ne s'assemble pas, et qui, par ses retards, compromet le salut de la république. Cette commission a déjà fait des travaux préparatoires ; je demande qu'elle nous fasse un rapport dans une décade.