HISTOIRE LA TERREUR 1792-1794

NOTES, ÉCLAIRCISSEMENTS ET PIÈCES INÉDITES

 

X. — BIRON EN VENDÉE.

 

 

Biron avait été arrêté à la fin de juillet 1793 et incarcéré à l'Abbaye. Sa santé était fort ébranlée depuis longtemps, et il demanda plusieurs fois à être jugé, ou à être autorisé à se retirer à la campagne pour se soigner. La question fut portée à la tribune le 4 septembre 1793, et Lecointe-Puyraveau proposa, au nom de l’humanité, de traiter Biron de la même manière qu’Anselme et Ferrand, qui étaient restés en état d’arrestation chez eux, sous la garde d’un gendarme. Mais la Convention refusa cet adoucissement, au nom de l’égalité, et Biron dut attendre en prison le jour de son jugement.

Il avait préparé pour sa défense un long mémoire justificatif Nous préférons reproduire une partie des pièces sur lesquelles il s’appuyait.

 

Le général Biron au Comité de salut public.

Niort, le 12 juin 1793.

Je n’ai pas encore tous les détails de l’affreuse déroute de Doué et de Saumur. La Commission centrale, sous les yeux de qui se sont passés ces tristes événements, en a sans doute informé le Comité de salut public. Les causes en sont et en seront éternellement les mêmes, tant que l'on n’y apportera pas de remède : défaut d’organisation, d’instruction, de subordination ; obéir paraît si loin de l’égalité que personne ne s’en impose le devoir. Il résulte de là que, dans beaucoup d’occasions, des braves gens ne servent pas plus utilement que des lâches.

Quelques bons citoyens ont paru penser qu’un tel désordre provenait du défaut de confiance dans : les généraux, et que les soldats en accorderaient davantage à un général pris parmi eux. Je combattrais cette proposition s’il nous restait plus de généraux dont l’expérience militaire, l’habitude de commander à la guerre, dussent inspirer la confiance ; mais la plupart de nos talents militaires sont aussi jeunes que la République, et la différence de l’expérience est peu considérable. Tentons donc ce moyen peut-être plus influent que tous autres sur les devoirs du soldat ; tirons de ses rangs un soldat estimé et unissant à sa confiance, l’exercice de la discipline, l’expérience des avantages qu’elle procure ; il l’établira peut-être. Les plans de campagne ne lui manqueront pas plus qu’à nous. Il sera facile de le débarrasser de la correspondance ; je m’en chargerai, s’il veut ; et si cela convient au nouveau général, je serai de bon cœur son premier aide de camp, ou le soldat le plus subordonné de son armée.

Mais je le répète, le métier de général est devenu impossible à faire, car on lui oppose chaque jour de nouveaux obstacles, de nouvelles difficultés. Je n’ai jamais manqué et je ne manquerai jamais au respect que je dois aux Commissions ou Sections de Commissions composées de représentants du peuple ; mais mon devoir me commande impérieusement de déclarer au Comité de salut public et à la Convention nationale s’il le faut, que les Commissions, sans doute très utiles dans le principe, se sont multipliées à tel point qu’elles sont véritablement devenues nuisibles au service de la République.

Salut et fraternité.

BIRON.

 

Premier plan de campagne arrêté par les généraux, de concert avec les représentants du peuple, et en présence des commissaires du Conseil exécutif et du ministre de la Guerre réunis à Tours, le 11 juin 1793.

 

L’assemblée délibérant sur les moyens de réparer les échecs que la République éprouve, depuis quelque temps, de la part des brigands répandus dans le département de la Vendée et autres circonvoisins, voulant arrêter leurs progrès effrayants et les suites funestes que peut entraîner la perte de Saumur ;

Considérant que la marche constante des rebelles a été de réunir leurs forces, toutes les fois qu’ils ont voulu faire quelque tentative, et de nous attaquer toujours avec des forces supérieures ;

Considérant que le plan suivi de notre part jusqu’à ce moment, en divisant nos forces, entraînerait infailliblement la perte de la République, ainsi que le prouve une trop malheureuse expérience ;

Considérant que l’évacuation des différentes villes ne changera pas leur sort, puisqu’il est presque impossible que, dans la situation actuelle des choses, aucune puisse faire résistance, et qu’en recueillant les troupes de la République, on est assuré de délivrer d’une manière efficace tous les pays ravagés par les rebelles ;

Considérant enfin que, d’après différents rapports, l’esprit public est tellement gâté dans les principales villes, telles qu’Angers et Nantes, que l’on y parle hautement de composition avec les brigands, et que les troupes républicaines y sont mal reçues ; que ces villes d’ailleurs sont dépourvues de fortifications et autres moyens de défense ;

Il a été, par les généraux réunis, arrêté ce qui suit :

1°. Il n’y aura qu’une seule armée.

2°. Toutes les troupes qui se trouvent à Niort et lieux voisins marcheront sans délai sur Saumur, en passant par Doué.

3°. Toutes celles qui sont commandées par les généraux Barbazan, Granvillier, Hérault et Coustard, l’artillerie, les munitions de guerre, vivres et autres objets qui se trouvent à Angers et lieux voisins, se replieront sur l’armée de Niort, en passant par le pont de Ce pour se rendre à Doué, lieu de la réunion. Ce mouvement s’opérera aussitôt que les rebelles marcheront de Saumur sur Angers par la rive droite de la Loire ; dans le cas où ils marcheraient uniquement sur la rive gauche de la Loire, toutes les forces d’Angers et des environs se réuniront au pont de Ce, et y feront face à l’ennemi. Enfin dans le cas où les rebelles se porteraient sur Angers par l’une et l’autre rive de la Loire, les troupes de la République chercheront à se faire jour à travers la colonne ennemie qui se trouverait sur la rive gauche et se réuniront, à Doué, à l’armée de Niort. Dans tous les cas, on aura la précaution de couper le pont de Cé, en le quittant, et de détruire les ouvrages qui peuvent être utiles aux rebelles.

4°. Les troupes qui se trouvent en ce moment ou qui arriveront à Tours, ainsi que celles de Chinon, Loudun et l’armée commandée par le général Salomon, seront destinées à se réunir à l’armée de Niort et seront disposées suivant les circonstances.

5°. Les forces qui sont à Machecoul se replieront aussitôt sur Nantes, afin d’y arrêter les brigands.

Tout ce que dessus a été fait et arrêté par nous, généraux réunis à Tours, et sauf l’approbation du général en chef de l’armée des côtes de la Rochelle, auquel le présent plan sera envoyé à l’instant et extraordinairement.

Le 11 juin 1793, l’an II de la République une et indivisible.

Les généraux de division : DUHOUX, MENOU.

Les généraux de brigade : ALEX. BERTHIER, SANTERRE.

 

Nous, représentants du peuple réunis à Tours, ayant sévèrement examiné les mesures arrêtées dans le plan ci-dessus, déclarons qu’elles nous paraissent les plus efficaces pour arrêter les progrès des rebelles et sauver la République. <( Fait à Tours les mêmes jour et an que dessus.

PIERRE CHOUDIEU, BODIN, RICHARD, TALLIEN, RUELLE, BOUEBOTTE, DDELAUNAY.

 

Tout ce que dessus a été fait en présence des citoyens Lachevardière, commissaire national du Conseil exécutif et Parein, commissaire du ministre de la Guerre.

Fait à Tours lesdits jour et an.

PAREIN, LACHEVARDIÈRE.

 

 

 

Deuxième plan de campagne du 25 juin 1793,

 

Sur la réquisition des représentants du peuple réunis en commission centrale à Tours, de l’adjoint du ministre de la Guerre et des commissaires nationaux délégués par le Conseil exécutif provisoire, faite cejourd’hui aux généraux soussignés,

Les généraux de division Duhoux, Labarolière, Menou et Goustard, et les généraux de brigade Berthier, Santerre, Fabrefond, Dutrey, Barbazan et Beffroy, réunis en présence des représentants du peuple, de l’adjoint au ministre de la Guerre et des commissaires nationaux, ont unanimement arrêté ce qui suit, après une mûre discussion.

1°. Sur la première question, de savoir si l’on pouvait marcher avec l’armée de Tours, vu la nécessité de voler sans délai au secours de Nantes menacée par les rebelles ;

Tous les généraux ont pensé que l’on pouvait marcher au secours de Nantes avec toute la partie de l’armée de Tours qui se trouve suffisamment armée, équipée et organisée.

2°. Sur la seconde question ainsi posée : doit-on marcher ?

L’avis de tous les généraux a été que l’on devait marcher le plus promptement possible.

3°. Et enfin sur la troisième proposition, qui consistait à savoir comment l’armée de la République marcherait ;

Tous les généraux ont été d’avis que l’armée marcherait à Nantes, sur le côté droit de la Loire seulement, savoir : une colonne composée de la presque totalité des forces, par les chemins dans les terres ; et un petit corps de flanqueurs composé de troupes légères à cheval, par la levée ou au bas des coteaux qui font face à la rive droite de la Loire, et sur les hauteurs.

Il a été en outre unanimement arrêté que le présent plan serait adressé à l’instant au général Biron et que l’armée ne se mettrait en marche qu’après sa réponse.

Il a été également arrêté que le général Biron sera invité, au nom du salut public, à faire tous les mouvements qu’il jugera nécessaires pour assurer l’exécution du plan ci-dessus, protéger et couvrir la ville de Tours où se trouvent les magasins de toutes les armées et où il ne restera qu’une force de 4.000 hommes ou environ en partie non armés, et même à entreprendre sur Saumur, s’il est possible, pour faire une diversion favorable à l’exécution des mesures ci-dessus arrêtées.

Fait et arrêté à Tours, le 25 juin 1793, l’an II de la République française.

J. LABAROLIÈRE, BARBAZAN, J. MENOU, GUY, COUSTARD-SAINT-LÔ, ALEX. BERTHIER, SANTERRE.

 

Nous, adjoint au ministre de la Guerre et commissaires nationaux délégués par le Conseil exécutif provisoire,

Après avoir pris communication du plan ci-dessus, déclarons que ces mesures sont les seules efficaces, dans les circonstances actuelles, pour le salut de la chose publique.

Fait à Tours, lesdits jour et an.

RONSIN, LACHEVARDIÈRE, DUMAS.

 

Les représentants du peuple près l’armée des côtes de la Rochelle réunis en commission centrale à Tours, après avoir pris connaissance du plan de campagne et des dispositions militaires arrêtées cejourd’hui parles généraux ici présents et réunis en conseil général ; considérant qu’elles ne peuvent avoir d’exécution qu’autant que le concert et l’ensemble le plus parfait seront établis entre les mouvements des deux armées de Tours et de Niort ; que le succès même des opérations dont il s’agit dépend entièrement de la direction à donner aux forces existant à Niort ; arrêtent qu’il sera envoyé un courrier extraordinaire au général en chef Biron, pour lui communiquer les mesures que la situation actuelle de la ville de Nantes a forcé les généraux d’adopter, et sur lesquelles il est requis, au nom du salut public et sur sa responsabilité personnelle, de faire connaître sans délai sa résolution et ses projets.

A Tours, le 25 juin 1793, an II de la République une et indivisible.

BOURBOTTE, RUELLE, P.-N. DELAUNAY, L. TURREAU, DANDENAI, P. CHOUDIEU.

 

PREMIER ARRÊTÉ DU COMITÉ DE SALUT PUBLIC.

Séance du 28 juin 1793.

Vu la lettre écrite, le 12 de ce mois, par le général Biron au Comité, renfermant copie de la lettre écrite à ce général par les généraux de division et de brigade réunis à Tours, des réquisitions qui lui ont été adressées par la Commission centrale des représentants du peuple, de la réponse du général à ces pièces, de la lettre au ministre de la Guerre, des états de l’armée des côtes de la Rochelle.

Le Comité, considérant qu’à la nouvelle du danger de la ville de Nantes menacée par les rebelles, les généraux divisionnaires et les généraux de brigade réunis à Tours ont arrêté, le 25 de ce mois, que toute la partie de l’armée de Tours, suffisamment armée, équipée et organisée, se mettra en marche pour secourir Nantes, et qu’il ne sera laissé à Tours qu’une force de quatre mille hommes en partie non armés ; que le général Biron sera invité de pourvoir à la défense de cette dernière ville et de tenter une diversion sur Saumur ;

Que le citoyen Ronsin et les commissaires nationaux ont pris, le même jour, communication de cet arrêté et ont déclaré qu’il contient les seules mesures efficaces que l’on puisse employer pour le salut public ;

Que les représentants du peuple ont pris, le même jour, un arrêté portant que les mesures adoptées par les généraux de division et de brigade de Tours seront communiquées au général Biron, sur lesquelles il est requis, au nom du salut public et sur sa responsabilité personnelle, de faire connaître sans délai sa résolution et ses projets ;

Que les généraux de division et de brigade ont écrit le même jour au général Biron que, d’après la réquisition qui leur a été faite par les représentants du peuple, l’adjoint du ministre de la Guerre et les commissaires nationaux, ils avaient pris un arrêté relatif aux secours à envoyer à Nantes ; qu’ils lui ont déclaré que, pressés de secourir cette ville, ils vont laisser la ville de Tours exposée aux tentatives des rebelles ; qu’ils l’ont invité de faire passer des forces à Tours ; qu’ils ont enfin prié lé général de les éclairer sur une opération aussi importante ;

Que le général Biron a répondu, le 26, aux généraux de division et de brigade qu’ils étaient sans doute plus en état que lui de juger quel parti ils peuvent tirer de leur position ; qu’il est nécessaire de couvrir la ville de Tours, qu’on doit regarder comme une barrière, et qui renferme des magasins précieux ; qu’il leur a envoyé un état de son armée et des forces dont il peut disposer pour la défense de Tours, pour les mettre à portée de juger jusqu’à quel point leur plan est praticable ; qu’il leur a déclaré de quelle partie de leur plan il peut seconder l’exécution, et quelle partie il ne peut adopter, s’il n’en reçoit un ordre formel du Conseil exécutif ;

Qu’il a écrit le 26 au ministre de la Guerre pour annoncer qu’il ne se portera pas sur Saumur sans un ordre positif ; que sa responsabilité doit cesser du moment où la Commission centrale veut influencer les opérations militaires, les discuter et les arrêter avec une publicité qui doit en empêcher l’effet ; qu’il ne peut plus commander utilement l’armée des côtes de la Rochelle et qu’il prie le ministre de lui désigner à qui il doit remettre le commandement ;

Considérant que le conseil de guerre a été tenu d’une manière irrégulière et avec une sorte de publicité qui ne peut que contrarier l’exécution des meilleurs plans ; que l'on a voulu influencer le général, et ne lui laisser aucune liberté de délibérer sur les mesures adoptées, en l’obligeant d’approuver le projet proposé ; que les réclamations du général sont fondées sur ce qu’exige le bien du service et l’intérêt de la République ;

Que le général Biron étant investi de la confiance de la Nation, il doit diriger avec liberté et sans influence secrète ou publique toutes les opérations militaires ;

Qu’il importe de prendre des mesures sagement concertées pour conserver la ville de Nantes, la défendre de Pat-taque des rebelles, ne pas exposer la ville de Tours et les magasins de la République, défendre et conserver Niort, la Rochelle et Saint-Maixent ;

Arrête que le général Biron est invité de continuer de commander l’armée ; que l’intérêt de la République ne permettant pas d’accepter sa démission, son patriotisme ne lui permettra pas de persister à l’offrir ; que sans s’arrêter au plan des généraux de division et de brigade, approuvé par l’adjoint du ministre de la Guerre et les commissaires nationaux, autorisé par les représentants du peuple, le général Biron fixera le plan qu’il jugera le plus avantageux et le plus utile à la République pour assurer la défense de Nantes dans l’extrême danger dont elle est menacée, ne pas exposer la ville de Tours et les magasins de la République, assurer Niort, la Rochelle et Saint-Maixent contre les entreprises des rebelles ; qu’il dirigera les opérations militaires, dans lesquelles il ne pourra être influencé ni contrarié par les représentants du peuple ni par les agents du Conseil exécutif.

Que les représentants du peuple seront invités de se conformer sans délai au décret de la Convention nationale qui les rappelle à leur poste, pour donner au Comité les instructions et les renseignements attendus sur l’armée des côtes de la Rochelle.

Que le ministre de la Guerre rappellera le citoyen Ronsin, son adjoint.

Qu’il rappellera pareillement ceux des commissaires nationaux qui ont assisté au conseil de guerre du 25 et ceux qui, dans les départements, sont une occasion de trouble et d’inquiétude relativement à la sûreté des propriétés.

Que le ministre de la Guerre répondra sans délai aux demandes du général Biron concernant les généraux, adjudants et autres officiers et agents nécessaires au service de l’armée.

Qu’il sera adressé une expédition du présent arrêté au général Biron, aux représentants du peuple réunis à Tours et au ministre de la Guerre.

CAMBON, GUYTON, RAMEL, LINDET, SAINT-JUST, JEAN BON-SAINT-ANDRÉ, HÉRAULT, BERLIER, DELACROIX.

 

Les représentants du peuple membres du Comité de salut public au général Biron, commandant en chef de l’armée des côtes maritimes de l’Ouest.

Paris, le 28 Juin 1793.

Les événements et la correspondance nous ont convaincus, général, que la multiplicité des commissaires était une source continuelle de difficultés et d’inconvénients. La Convention nationale avait été déterminée, par la force des circonstances, à autoriser un assez grand nombre de ses membres de se rendre à l’armée ; on manquait de généraux, d’officiers ; on n’avait point d’armée ; les rebelles devenaient redoutables ; les événements se succédaient avec une rapidité alarmante. On ne put se refuser au vœu manifesté de voir plusieurs de nos collègues se rendre dans leurs départements, où l'on croyait que leur influence, leurs liaisons, leurs alliances contribueraient, autant que la force des armes, à faire rentrer les rebelles dans le devoir.

Il s’est formé un grand nombre de commissions qui se sont isolées, qui n’ont entretenu aucune correspondance entre elles, et qui ont adopté des plans et des projets qui n’avaient aucun ensemble et qui ne pouvaient nous promettre aucun succès.

La Convention nationale a rappelé tous ses membres à leur poste ; elle a fixé le nombre de ceux qui doivent se rendre à l’armée ; ses nouveaux choix inspireront la confiance et rempliront l’attente publique.

Vous connaissez, général, l’instruction décrétée par la Convention nationale ; vous savez de quelle considération et de quelle confiance elle a voulu investir les généraux.

Depuis que vous êtes arrivé dans les départements de l’Ouest, vous vous êtes constamment appliqué à fournir et à organiser l’armée ; vous avez arrêté un plan de campagne, vous avez justifié nos espérances.

La représentation nationale sera à l’armée ce qu’elle doit être. Elle maintiendra Tordre et la subordination ; elle appellera la confiance et la fixera sur le général.

Les grandes difficultés qui auraient pu s’opposer à vos succès sont écartées ; tout concourra à assurer l’exécution de vos plans militaires. Vous avez servi la patrie, parce que vous l’aimiez ; vous continuerez de servir la République, et c’est à la tête de l’armée que vous commandez que vous devez la servir, dans les circonstances où vos succès doivent avoir la plus haute influence sur la liberté.

Nous attendons, général, de votre civisme, de votre dévouement à la République, que vous conserverez le commandement de l’armée sur laquelle la République fonde ses espérances.

Nous avons chargé le ministre de la Guerre de prendre en la plus haute considération tout ce que vous demandez pour l’armée, et de prendre sans délai les déterminations les plus utiles au service et les plus satisfaisantes pour le général.

CAMBON fils aîné, BERLIER, D. V. RAMEL.

 

DEUXIÈME ARRÊTÉ DU COMITÉ DE SALUT PUBLIC.

Séance du 30 juin 1793.

Le citoyen Choudieu, l’un des représentants du peuple auprès de l’armée de la Rochelle à la division de Tours, a demandé communication de l’arrêté pris par le Comité, le 28 de ce mois, sur la lettre du général Biron du 26, et les pièces, états et mémoires joints à sa lettre.

II a exposé, au nom de la Commission, que des avis certains annonçant que le dessein des rebelles était de se porter sur Nantes, la division de l’armée campée auprès de Tours étant organisée et impatiente d’aller combattre les rebelles, les généraux avaient arrêté, dans un conseil de guerre, un projet qu’ils croyaient devoir satisfaire l’impatience de la division et conserver la ville de Nantes menacée du danger le plus imminent ; que ce projet devait être soumis à l’examen et à la décision du général ; que l’intention des officiers généraux et des agents principaux n’a pas été de forcer les suffrages du général, mais de le consulter, de lui communiquer un plan, des vues, et d’attendre ses ordres.

Que les représentants du peuple, en lui adressant le résultat du conseil de guerre du 25, n’ont pas eu l’intention d’influencer le général ; qu’ils ont voulu fixer son attention sur la situation des affaires et engager le général à prendre une prompte détermination.

Qu’ils avaient écrit au général et qu’ils n’avaient pas reçu sa réponse ; qu’en lui communiquant les vues des officiers généraux, ils s’étaient proposé d’accélérer et non d’influencer la détermination du général en chef ; qu’ils présumaient que la division de Niort était assez forte et assez bien organisée pour concerter un grand mouvement dans toutes les parties de l’armée.

Il a ajouté que le citoyen Ronsin et les commissaires nationaux ont rendu des services signalés ; que l’armée atteste leur capacité et leur intelligence ; que le rappel de ces agents serait très préjudiciable au service.

Il a enfin demandé que les représentants du peuple soient autorisés d’employer les talents du général Berthier, sous un chef, et en le surveillant avec une extrême exactitude ; que c’est à cet officier général que l'on doit la prompte organisation de l’armée ; que, si les circonstances et l’opinion ne permettent pas de le placer à la tête de l’état-major, on peut néanmoins faire choix d’un chef et charger du travail cet officier général qui, pour servir la patrie, consent à faire le sacrifice de l’amour-propre et des prétentions. Il a représenté un avis des officiers généraux, qui atteste les services du général Berthier et l’inconvénient de se priver de l’usage de ses talents.

Il a demandé que l’on développe, avec plus d’étendue ou de clarté, les dispositions du décret du 30 avril et de l’instruction décrétée par la Convention nationale concernant l’ordre que doivent observer entre eux les représentants du peuple, dans leurs dispositions et leurs délibérations, pour obvier à l’inconvénient qui résulte de la contrariété et de l’incohérence des mesures.

Le Comité de salut public arrête qu’il sera écrit au général Biron pour lui confirmer qu’il n’a été dans l’intention de qui que ce soit de forcer son suffrage, ou d’influencer son opinion, et d’ajouter à sa responsabilité ; que tous les avis se sont réunis pour attendre sa détermination ; que la liberté des communications n a pas été considérée comme un moyen d’influence ; que le plan adopté est celui qui a été proposé par le général, qui s’occupera des moyens d’exécution avec toute l’activité et la prudence qu’exigent les circonstances ; que la célérité influera particulièrement sur le succès.

Le ministre de la Guerre sera averti de ne pas rappeler le citoyen Ronsin et les commissaires nationaux qui ont pris part au résultat du conseil de guerre du 25 de ce mois, vu l’utilité de leur service dans l’armée.

Les représentants du peuple sont autorisés d’employer le général Berthier, dans l’état-major, sous un chef. Le Comité, ne croyant pas qu’on puisse l’employer en chef, approuve cependant qu’on ne se prive pas de ses talents ; qu’on l’employé et qu’on l’observe.

Les représentants du peuple ne doivent à l’avenir éprouver aucune de ces contrariétés qui ont rendu leur mission difficile, et traversé ou retardé leur succès. Un décret a fixé le nombre des députés qui resteront ou se rendront à l’armée ; le choix est fixé par le même décret.

Les représentants pourront prendre, au nombre de deux, toutes les déterminations que les circonstances exigeront, et les faire exécuter provisoirement, à la charge d’en rendre compte à la Commission centrale ; les représentants qui auront pris des arrêtés rapporteront leurs décisions et leurs procès-verbaux à la Commission, pour concerter toutes les opérations et en assurer l’ensemble et l’uniformité, vu que c’est dans la Commission centrale que réside principalement l’autorité ; que toutes les délibérations doivent y être prises ; que tous les ordres doivent en émaner, autant qu’il est possible ; et que ce n’est que par la nécessité du service que les représentants peuvent prendre des arrêtés séparément, et néanmoins au nombre de deux.

CAMBON, GUYTON, DELMAS, SAINT-JUST, RAMEL, COUTHON, BARÈRE, LINDET, BERLIER.

 

Les représentants du peuple membres du Comité de salut public au gênerai Biron, commandant en chef de l’armée des côtes maritimes de l’Ouest,

Paris, le 1er juillet 1793.

Nous avons eu, général, une conférence avec le citoyen Choudieu, notre collègue, l’un des représentants du peuple qui était à Tours le 25 juin. C’est de lui que nous savons que l’intention des officiers généraux de la division de Tours, des commissaires nationaux, était de vous consulter et d’attendre Tordre du général pour s’y conformer.

Les représentants du peuple n’ont pas eu intention d’influencer votre opinion. Vous avez été alarmé, parce que vous avez pensé que le projet que l’on soumettait à votre examen était un projet adopté dans la division de l’armée, et que l'on voulait ajouter au poids de votre responsabilité pour déterminer plus sûrement votre suffrage.

Les circonstances étaient grandes et pressantes, l’état-major était inquiet de ne recevoir aucunes nouvelles de votre part ; il croyait n’avoir pas un moment à perdre pour vous informer du danger qui menaçait la ville de Nantes, de la disposition des esprits, et vous communiquer ses vues.

Les représentants du peuple ont pensé qu’ils devaient vous proposer de prendre en grande considération la situation des affaires, accélérer votre détermination. Ils vous avaient écrit, ils n’avaient pas encore reçu votre réponse ; votre avis seul devait, dans l’esprit de tous, déterminer le mouvement de la division.

Nous n’avons pas cru devoir persister, après avoir entendu notre collègue, à exiger le rappel de l’adjoint du ministre de la Guerre et des commissaires nationaux qui ont assisté au conseil de guerre du 25. Ces citoyens ont rendu des services essentiels à la division ; ils ont donné de grandes preuves de capacité, de zèle et d’activité.

Vous connaissez, général, le caractère des Français. Là grandeur et la célérité dans les entreprises sont nécessaires pour soutenir leur courage ; c’est au milieu des dangers qu’ils aiment à signaler leur constance ; mais une longue attente, l’inaction prolongée les fatiguent plus que les travaux d’une campagne.

Nous vous invitons, général, à concilier l’activité et la prudence, à profiter des dispositions de l’armée. La division de Tours paraît prête à marcher contre les rebelles ; elle s’est organisée avec une célérité qui nous présage des succès. Nous désirons que la division de La Rochelle s’organise, s’embrigade et se mette sans délai en étal d’exécuter le plan que vous nous avez communiqué. C’est à ce plan que nous pensons que l’on doit s’en tenir ; nous persistons à l’approuver, et nous sommes persuadés que, dans tous les changements qui peuvent arriver, vous saurez prendre vos avantages.

CAMBON fils aîné, BERLIER.

 

Le général Biron au Comité de salut public,

Angers, le 12 juillet 1793.

J’ai l’honneur de rendre compte au Comité que j’ai reçu un arrêté du 1er juillet, et que ma très mauvaise santé et la certitude de ne pouvoir plus commander utilement l’armée des côtes de La Rochelle m’ont déterminé à envoyer au ministre de la Guerre ma démission de ce commandement en chef, avec la déclaration que, dans tous les lieux et dans tous les grades, je dévouerai de bon cœur le reste de mes jours et de mes forces au service de la République. Si la Convention nationale jugeait devoir faire examiner ma conduite par une cour martiale, je jouirais de la satisfaction qu’éprouve tout homme pur en voyant scruter sa conduite. Comme, depuis le 23 juin, le ministre de la Guerre ne répand )lus même à mes lettres les plus importantes, j’ai l’honneur le prévenir le Comité que, dans huit jours, rien au monde ne m’empêchera de remettre le commandement de l’armée des côtes de La Rochelle à l’officier général le plus ancien après moi. Je prie instamment le Comité de me faire désigner le lieu où je dois me rendre, pour attendre les ordres delà Convention, après avoir quitté le commandement de l’armée.

BIRON.

 

Au citoyen Barère.

Angers, le 12 juillet 1793.

Le dernier effort que j’ai fait, citoyen Représentant, pour aller de Niort à Saumur joindre l’armée qui allait au secours de Nantes a fini d’épuiser mes forces et m’a mis dans un état de faiblesse et de souffrance qui ne me permet plus, en honneur et en conscience, de conserver le commandement en chef de l’armée des côtes de La Rochelle.

Ce commandement exige dix fois plus d’activité qu’aucun autre ; j’ai la goutte dans la tête, je crache le sang, et très incessamment je ne pourrai plus rester debout. J’ai envoyé ma démission au ministre de la Guerre ; j’y ai joint la déclaration que tous mes désirs étaient de dévouer le reste de mes forces et de mes jours au service de la République, dans quelque lieu et dans quelque grade que ce pût être. J’ai demande seulement qu’il me fût permis de m’arrêter, trois i5emaines ou un mois, dans le lieu quelconque que l'on voudra me désigner, pour y soigner un peu ma santé qui en a depuis longtemps un besoin indispensable. Je n’ai pas eu un instant de repos depuis la séparation de l’Assemblée Constituante, et le tems que nous y avons passé ne peut guère s’appeler du repos. J’ai constamment fait la guerre depuis, sans jamais avoir eu trois jours de tranquillité. Si quelques remèdes et quelques soins peuvent me remettre, aucun bon citoyen n’appartiendra plus que moi à la chose publique.

Je crois devoir vous avertir que son salut tient peut-être à ce que le Comité de salut public envoie des commissaires d’une sagesse, d’une impartialité reconnues, prendre des renseignements et des détails sur cette armée. Ils se convaincront facilement, par l’affreux désordre qui y règne, qu’elle sert bien plus la contre-révolution que la Révolution, et je vous jure qu’il n’y a rien d’exagéré dans ce que je vous dis là. Cela mérite la plus sérieuse attention.

Je vous demande pardon de mon importunité, citoyen Représentant ; vous l’excuserez en pensant que j’ai trouvé quelque satisfaction à vous expliquer la démarche que je fais,, et à vous mettre à portée de surveiller une armée qui finira peut-être par être bien, si l'on ne se donnait pas tant de peine pour qu’elle fût mal.

BIRON.

 

Dénonciations contre Biron.

 

Niort, le 24 juin 1793.

Il est bien malheureux qu’on ne puisse pas profiter des^ bonnes dispositions des soldats et qu’on laisse leur courage s’amollir dans l’oisiveté. Faut-il donc attendre que les rebelles aient rassemblé de nouvelles forces, ou qu’ils aient reçu des secours étrangers, pour aller les attaquer ? Aujourd’hui, le seul obstacle qui s’oppose à notre marche est, à ce qu’on dit, le manque de voitures. Nous craignons que, lorsqu’on y aura pourvu, il ne s’élève d’autres empêchements. Nous sommes^ au désespoir de l’état de nullité où sont réduits les trente mille hommes cantonnés ou campés depuis Saint-Maixent jusqu’aux Sables.

Ici, l’esprit public est totalement perverti. Le peuple prend Brissot et Roland pour de bons citoyens, et les Montagnards pour des scélérats qui veulent l’anarchie et sont causes de la guerre de la Vendée. Vous seriez étonnés de ce que nous entendons dire tous les jours. Les autorités constituées nous ont paru mauvaises ; nous sommes vus de’ mauvais œil, et une petite émeute populaire bien dirigée pourrait leur faire raison de nous, La subordination n’est pas mieux établie. Le soldat vend ses cartouches, le voiturier le foin, la paille et le pain qui lui sont confiés pour être transportés ; enfin, tout est dans un bouleversement tel, qu’il est instant d’y remédier.

Les commissaires du Conseil exécutif,

TESSON, BRÛLÉ.

 

Angers, le 11 juillet 1793, l’an II de la République une et indivisible.

Je soussigné, Pierre-Mathieu Parein, chef des bureaux de la quatrième division au département de la Guerre, commissaire du Conseil exécutif auprès de l’armée des côtes de La Rochelle,

Certifie et atteste qu’après notre arrivée dans la ville de Tours, il y a environ deux mois, avec le citoyen Ronsin, adjoint au ministre de la Guerre, nous avons parcouru toute la circonférence du terrain occupé par les brigands ; que, dans cette expédition, nous avons examiné très attentivement leur position et celle de notre armée sur tous les points que menacent les rebelles ; que, de retour dans la ville d’où nous étions partis, nous nous sommes rendus à Saumur pour y conférer avec les représentants du peuple, afin de déterminer quelle serait la mesure la plus salutaire à adopter contre les rebelles ; qu’après avoir discuté le projet de campagne, il a été arrêté à Saumur, en présence du général Biron, il y a six semaines environ, que les brigands seraient attaqués par plusieurs points et que l'on ferait marcher en masse toutes les forces de l’armée, comme étant la seule mesure à prendre qui pût convenir aux circonstances.

Mais par une fatalité qu’on ne doit attribuer qu’à quelques traîtres qui, sans doute, étaient présents à la discussion de ce projet de campagne et qui en ont probablement fait part aux brigands, nous nous sommes vus attaqués le lendemain, d’abord à Doué et ensuite à Saumur, où nous avons essuyé un échec qui a désorganisé l’armée. Arrivés à Tours, où les généraux s’étaient repliés — Biron était alors à l’armée de Niort —, nous donnâmes tous nos soins pour rassembler les débris de l’armée de Saumur, et en moins de quinze jours, nous rassemblâmes et nous fîmes camper près de dix-huit à vingt mille hommes qui dans ce moment marchent à l’ennemi.

De son côté, le général Biron n’a point fait tout ce qui était en son pouvoir pour seconder l’armée de Tours ; loin de s’occuper à organiser son armée à Niort, pendant les six semaines qu’il y a resté ; loin de prendre à cet égard toutes les mesures que sa place et les intérêts de la République lui prescrivaient dans ces circonstances si périlleuses, il a mis la plus grande négligence dans toute sa conduite.

1°. Il devait organiser son armée de Niort en brigades et en divisions, et on assure qu’il n’en a rien fait.

2°. Il devait protéger par trois ou quatre mille hommes la ville de Saumur, lors de la marche de la troupe de Tours sur Angers, et il n’en a rien fait.

3°. Il devait au moins envoyer des forces à Westermann, ainsi que celui-ci les lui demande par une de ses lettres, lors de la prise de Bressuire, et il n’en a rien fait.

4°. C’est que Biron, au lieu de rester à Niort pour organiser son armée et la disposer à marcher contre les brigands, s’est rendu à Saumur et Angers où sa présence était inutile, puisque l’armée de Tours était toute organisée.

5°. C’est que Biron, dans toutes ses actions, n’a cessé de persécuter les patriotes, tels que les employés des commissaires du Conseil exécutif, ainsi que le citoyen Rossignol, lieutenant-colonel de la 35e division de gendarmerie, connu par son patriotisme.

6°. C’est que, dans ce moment, l’armée de Niort, qui se montait de vingt à vingt-cinq mille hommes, se trouve totalement fondue, pour ainsi dire, et qu’on ne sait ce qu’elle est devenue.

7°. C’est que le général Biron a laissé sortir et s’en retourner chez eux un ou deux bataillons de Bordeaux, sans avoir employé l’autorité dont il était revêtu pour les faire rentrer dans l’ordre et l’obéissance aux lois.

8 °. C’est que le même général a souffert qu’il fût tenu des propos très inciviques dans les sociétés populaires qui prêchaient le fédéralisme, et qu’il n’a donné aucun ordre pour faire défendre ces sociétés, quoiqu’il fût instruit de leur conduite.

D’après tous ces motifs et une infinité d’autres qui seront sans aucun cloute mis sous les yeux des représentants du peuple, je ne balance point à déclarer que Biron est un traître à la République, et qu’il est très important, je ne dis pas seulement de le destituer, mais même de le livrer au glaive de la loi.

PAREIN.

 

Angers, le 11 juillet 1793.

Je soussigné, Charles-Philippe Ronsin, général de brigade et adjoint au ministre de la Guerre, déclare en mon âme et conscience que je regarde comme traître à la Patrie Biron, général en chef de l’armée des côtes de La Rochelle :

Pour avoir mis une négligence aussi astucieuse que perfide dans l’organisation de l’armée qui était à Niort ;

Pour avoir disposé les différents corps de sorte que, de vingt-deux mille hommes dont il pouvait disposer en masse au 24 juin, il ne lui en reste aujourd’hui que cinq mille ;

Pour être parti brusquement pour Angers, au lieu de porter à Westermann les secours demandés après la prise de Châtillon ;

Pour avoir causé, par ce refus, le massacre de toute l’infanterie de celte petite armée, la prise de son artillerie et tous les malheurs qu’entraîne une déroute ;

Pour avoir osé, par une calomnie digne d’être punie par les lois, écrire au ministre de la Guerre, que tous les agents de ma commission étaient des désorganisateurs qui prêchaient le pillage, excitaient à la désobéissance, à couper des têtes, etc. ; tandis que chargé par la Commission centrale d’organiser deux commissions militaires, j’employais ces mêmes agents à poursuivre les vrais désorganisateurs, les espions et les traîtres ;

Pour avoir souffert que les généraux nobles de cette armée profitassent du crime ou de Terreur de quelques volontaires, pour jeter sur tous les bataillons de Paris le mépris le plus injuste et la défiance la plus dangereuse ;

Enfin, pour avoir mis une lenteur vraiment bonne à déconcerter les mesures propres à assurer le succès de nos armes, et pour n’avoir exécuté que des attaques partielles, comme s’il eût voulu détruire en détail une armée qui était, il y a un mois, assez forte pour exterminer en huit jours les brigands, si elle n’eût pas été commandée par des hommes que nous n’avons que trop de motifs de suspecter ; je parle de Biron, de Menou, de Labarolière, de Berthier et de Barbazan. Que ces généraux, qui n’ont pas la confiance des patriotes, soient remplacés de suite par des hommes éclairés qui, bien connus par leur dévouement au salut de la République, connaissent assez les localités et les mœurs du pays occupé par les brigands, pour ne pas s’attacher à ces mesures si lentes et à ces combinaisons si savantes de l’ancienne tactique ; et se rappeler surtout que le moyen le plus prompt de terminer cette guerre, c’est de se rapprocher davantage de la manière dont les brigands la font. Mais pour n’exciter aucune de ces secousses dangereuses dans des armées qui n’ont pas été préparées à ces grands événements, et pour ne laisser à aucun des généraux suspectés le temps d’échapper au glaive des lois, en cherchant un refuge et même un appui au loin, il faut se hâter de les mettre hors d’état de nuire.

J’ose le prédire, si vous tardez à rappeler Biron, ses complices et ceux qui l’entourent ; si, par un exemple terrible, vous ne vous hâtez pas d’effrayer ceux qui voudraient encore imiter Lafayette, Dumouriez, Wimpfen, cette armée va se détruire partiellement. Les départements voisins en deviendront plus hardis à la révolte ; ces malheureuses contrées seront longtemps dévastées par la guerre civile, et les généraux suspects que vous n’aurez pas punis ou destitués à temps ne seront plus les généraux de la République, mais bien ceux des départements qui se sont déclarés pour le fédéralisme,

RONSIN.