VIE DE  NAPOLÉON

— FRAGMENTS —

 

XI.

 

 

Bataille de Roveredo.

 

Le 19 août 1796, le roi d'Espagne conclut avec la République un traité d'alliance offensive et défensive. Cet événement eut une influence salutaire sur les gouvernements de Naples et de Turin. Il faut se rappeler ce qui ne cessa pas d'être vrai : le roi de Sardaigne pouvait détruire l'armée française, en cas de revers sur l'Adige. Par suite de l'impéritie du Directoire, l'armée piémontaise ne se battait pas sous les ordres de Bonaparte ; elle était intacte et une intrigue de cour pouvait la lancer contre lui.

A peine les Autrichiens furent-ils rentrés dans le Tyrol, que Wurmser ayant été joint par quelques bataillons, se trouva de nouveau supérieur en nombre aux Français. Ce maréchal reçut l'ordre positif de délivrer Mantoue, et il connaissait si peu le caractère de son adversaire, qu'il s'imagina pouvoir atteindre ce but sans combats.

Davidowich, avec vingt mille hommes, fut chargé de la défense du Tyrol ; Wurmser lui-même, avec les vingt-six mille restant, passa les montagnes qui forment la vallée de l'Adige vers la source de la Brenta, et suivit le cours de cette rivière, dans le dessein de déboucher par Porto Legnano, sur les derrières de l'armée française.

Le hasard voulut qu'au moment où Wurmser s'enfonçait dans la vallée de la Brenta, le général français qui venait de recevoir un renfort de six mille hommes, s'avançait de son côté dans le Tyrol. Il voulait tâcher de faire sa jonction avec l'armée du Rhin. Quelques mois auparavant, après la paix avec le roi de Sardaigne, Napoléon avait présenté cette idée au Directoire, mais Jourdan s'était fait battre ; Moreau, compromis, se mit en retraite et ne put plus songer à pénétrer dans le Tyrol.

Napoléon ignorait la défaite de Jourdan, aussi bien que les mouvements de Wurmser sur Bassano, lorsque le 2 septembre il s'avança dans la vallée de l'Adige. Il y eut de brillants combats à Mori, à Calliano et une bataille à Roveredo. Les Autrichiens ne s'instruisaient point par leurs défaites et commettaient les mêmes fautes. Leurs généraux étaient vieux ; fidèles au système de la vieille guerre, ils éparpillaient leurs troupes en petits détachements devant un homme qui agissait en masse. Une tactique nouvelle eût été d'autant plus nécessaire aux Autrichiens que l'armée française, remplie d'enthousiasme pour la liberté, d'orgueil militaire et de confiance dans son chef, arrivait à des traits presque incroyables de bravoure et d'audace.