La
journée du 5 septembre 1793 qui marque, avec le début officiel de la Terreur,
le triomphe du programme des Enragés, marque aussi le déclin rapide de leur
action comme parti. Leurs chefs vont être arrêtés l’un après l’autre. Ils
disparaissent de la scène et c’est l’hébertisme qui hérite de leur influence
et de leurs troupes. LA PREMIÈRE ARRESTATION DE JACQUES ROUX. Déjà
Jacques Houx avait été arrêté, le 22 août, par ordre de la Commune et gardé
au violon municipal du 22 au 27 août, en pleine agitation sectionnaire. Mais
à cette première arrestation le gouvernement était resté étranger. La section
de Jacques Roux, la section des Gravilliers, était gouvernée alternativement
par deux factions, celle du prêtre et celle du conventionnel Léonard Bourdon,
qui dirigeait l’Institut des jeunes Français établi dans l’ancien prieuré de
Saint-Martin des Champs. Léonard Bourdon, comme ou Ta vu précédemment, pour
lutter de popularité contre son rival, avait fini par préconiser la
réquisition générale des subsistances. Profitant de la réaction qui avait
suivi les troubles du savon, à la fin de juin, il parvint à placer ses
partisans au bureau et dans les comités de la section. Parmi eux figurait un
homme de loi au passé fort trouble, Germain Truchon[1]. Truchon
la Grande Barbe, boutefeu de la section des Gravilliers, « défenseur des
intrigans et des escrocs », comme l’appelait Jacques Roux[2]. Au
moment même où Cauchois dirigeait contre la Commune l’offensive des sections,
Jacques Roux s’efforçait de reconquérir le bureau de la section des
Gravilliers. Il commença l’attaque à la séance du dimanche 18 août. Nous
connaissons ce qui s’est passé à la fois par le procès- verbal officiel de
l’assemblée de la section, par les pièces du dossier des poursuites et par le
récit de Jacques Roux lui-même dans le numéro du 28 août de son journal. Sur
les 9 heures du soir, les partisans de Jacques Roux dénoncèrent la gestion
des commissaires que la section avait chargés de l’inventaire du mobilier de
l’église Sainte-Elizabeth, devenue bien national[3]. Ils conclurent en réclamant
l’arrestation d’un de ces commissaires nommé Chemin, qui avait déjà été
l'objet d’accusations graves[4]. « Il avait été vendu [à
Sainte-Elizabeth] deux chaudières de cuivre » et différents objets.
Finalement, on réclama l’arrestation de tous les commissaires qui avaient
opéré avec Chemin. Mais le citoyen Jean-Baptiste Fleury, qui présidait,
refusait de mettre aux voix cette proposition, sous prétexte que l’affaire
n’était pas de la compétence de la section, mais qu’elle regardait les
tribunaux. Un grand tumulte s’éleva. Fleury se couvrit â trois reprises. Vers
minuit, il leva la séance, « se voyant dans l’impossibilité de ramener
le calme et craignant d’être arraché au fauteuil où il n’y avait aucune
sûreté pour lui[5]. » Le vice-président
Suppinger le remplaça, mais celui-ci refusa, lui aussi, de mettre aux voix la
motion des partisans de Jacques Roux. Alors le menuisier Nattay, doyen d’âge,
monta au fauteuil et invita l’assemblée b choisir un autre président. Il
proposa Jacques Roux, qui fut nommé et qui accepta. La motion de
l’arrestation des commissaires de Sainte-Elizabeth fut alors votée, bien que
les secrétaires de l’assemblée aient refusé d’y apposer leur signature, et la
séance orageuse fut levée le 20 août à 2 heures du matin. Un ordre signé de
Jacques Roux incarcéra Chemin dans la geôle de la section pour vingt-quatre
heures. Le
triomphe du chef des Enragés ne devait pas être de longue durée. Ses ennemis
savaient qu’il avait en Hébert un rival sur l’appui duquel ils pouvaient
compter. Et, en effet, dès le 21 août, Hébert dénonçait Jacques Roux aux
Jacobins pour une pétition que celui-ci aurait fait approuver à sa section et
où Pache était accusé d’accaparement. Le lendemain, Truchon, à la tête d’une
députation des deux comités civil et révolutionnaire de la section des
Gravilliers, se présentait à la Commune et l’invitait à prendre des mesures
pour rétablir l’ordre dans l’assemblée de cette section, troublée par les
intrigues de Jacques Roux, qui était parvenu à faire casser le bureau de
cette section. Truchon demandait la réintégration des membres révoqués et des
poursuites contre Jacques Roux, qu’il accusait de friponneries. Jacques Roux
aurait détourné une partie de la collecte qu’il avait faite en faveur de la
sœur du commandant Beaurepaire, l’héroïque victime de la capitulation de
Verdun[6]. Un
administrateur de la police répondit ii Truchon que ses désirs étaient
devancés. Les poursuites contre Jacques Roux étaient déjà commencées. Il
venait d’être incarcéré dans le violon de l’Hôtel-de-Ville d’où on se
proposait de le transférer à la Conciergerie. Après que Chaumette à son tour
eut prononcé un réquisitoire contre Jacques Roux, la Commune décida d’envoyer
des commissaires dans la section des Gravilliers pour y rétablir l’ordre et
remettre en fonctions le bureau illégalement destitué. On ne
se borna pas à arrêter Jacques Roux. On mit aussi en prison ses principaux
partisans : Nattay, Bousquet, Duplas, Graillot, etc.[7]. Au
premier moment, cependant, la section avait essayé de résister au parti de
Truchon et à la Commune. Le 22 août, elle avait protesté contre les
arrestations et délégué à la Commune six commissaires pour s’informer de
leurs motifs[8]. Protestation sans résultat. Jacques
Roux fut perquisitionné à son domicile, rue Aumairé, le 23 août, par
l’officier de police Cayanagh, agissant en vertu d’un ordre des
administrateurs de police Macino et Michonis... L’officier de police mit les
scellés sur une commode placée au milieu de la chambre et sur une garde-robe
située au pied du lit. Il se retira en emportant la collection des ouvrages
de J. Roux et quelques lettres[9]. L’une
de ces lettres, adressée au citoyen Petit[10], commissaire adjoint pour la
fabrication des piques à Langres, est fort intéressante, parce qu’elle nous
révèle la tactique du chef des Enragés : « L’assemblée
générale de la section des Gravilliers écrit Jacques Roux, a reçu avec un plaisir
inexprimable de vos nouvelles. Elle était bien assurée que vous propageriés
partout les sentiments républiquains qui vous animent. Les obstacles que vous
pouvés éprouver ne peuvent qu’enflammer de plus en plus votre courage. S’il
est une circonstance où l’on doit se montrer, c’est sans doute à l’égard des
accapareurs qui assassinent les citoyens par le monopole journalier dont ils
nous rendent les victimes. La guerre mortelle que vous leur déclarez honore
votre cœur. Oui, citoyen, en resserrant les liens de la fraternité, nous
viendrons à bout de terrasser les ennemis redoutables de notre salut, la victoire
est indubitable dès que les femmes se mêleront parmi les Sans-Culottes[11]. Elles ont le double avantage
de vaincre les hommes par l’éclat de leurs charpies et leur intrépidité. Nous
touchons au montent de faire une levée considérable de républicains pour
écraser la tyrannie. Qu’il arrive bientôt le moment décisif pour le triomphe
dé la liberté et le règne du bonheur ! Citoyen, je n’attends pas ce moment
pour éprouver le plaisir que j’ay à vous répondre. Je ne pouvais avoir une
mission plus chère à mon cœur, après celle de sceller de mon sang les
principes que j’ay développés, après celle de mourir pour l’unité et
l’indivisibilité de la République française. Tous nos frères de la section
vous envoyent le baiser des sans-culottes. Daignés le recevoir de mqy le
premier. » Cette
lettre montre que Jacques Roux né bornait pas son activité à Paris, mais
qu’il l’étendait aux départements. Le conseil d’utiliser les femmes contre
les accapareurs est déjà significatif. L’espoir de se servir de la levée en
masse l’est plus encore. Au mois de février déjà Jacques Roux avait profité de
la levée des 300.000 hommes pour agiter le peuple de Paris. Le recrutement de
la première réquisition lui apparaît une nouvelle occasion à saisir, « un moment
décisif pour le triomphe de la liberté et le règne du bonheur. » Cette
expression même « le règne du bonheur », montre aussi qu’il n’a pas eu vue
seulement la baisse du prix des denrées, mais une véritable révolution sociale. L’instruction
cependant suivait son cours. Les dénonciations pleuvaient contre Jacques Roux.
Un certain Lepage, éventailliste, marché Saint-Martin, n° 10, dénonçant les
propos que le prêtre aurait tenus le dimanche précédent, « contre toutes
les autorités de Paris, notamment lo maire et la Commune qu’il a traité de chef
d’accaparements », « sistème qui ne tend pas à moins qu’à égarer le
peuple et cela dans le sens des aristocrates ». Le même Lepage invitait
l'administration de police à interroger Jacques Roux sur ce qu’il était allé
faire plusieurs fois, rue de l’Université, chez Mme de Périgord, dont toute
la famille était émigrée. Le
citoyen Pierre Egasse, commissaire civil et de surveillance de la section des
Gravilliers, que les amis de Jacques Roux avaient voulu mettre en prison,
dénonça le prêtre pour prévarication dans la gestion des fonds de la section.
Quand Jacques Roux avait été président et trésorier des Gravilliers, à
l’époque du 10 août, il aurait reçu un assignat de 200 livres d’un citoyen
Lallemand et il n’aurait pas mentionné cette recette dans le compte qu’il
rendit à la fin de sa présidence. Egasse aurait signalé cette omission et là
aurait été l’origine et la haine que Jacques Roux lui portait. Le
citoyen Louis-Edmond O’Reilly[12] déposa le même jour, 21 août, ;
que Jacques Roux avait disposé arbitrairement d’une partie de la collecte
qu’il avait faite en faveur de la sœur de Beaurepaire. Le
citoyen Barbot, président du comité civil de la section, ajouta que, le
dimanche précédent, lors de la tenue de l’assemblée générale de la section,
il avait entendu Jacques Roux à la tribune indisposant les esprits contre les
tribunaux, contre le' département et la municipalité, enfin contre les
comités de section. Le
citoyen Mercier, électeur de 1792 et membre du conseil général de la Commune,
dénonça Jacques Roux, le 23 août, pour avoir distribué des bulletins de vote
à son nom dans le corps électoral lors du renouvellement de la municipalité.
Le comité de correspondance des Jacobins se mit à son tour en mouvement et,
le 31 août, il adressa aux administrateurs de police de procès-verbal par
lequel le club avait blâmé Jacques Roux, le 1er juillet précédent. Le
prêtre socialiste subit trois interrogatoires, les 23, 24 et 27 août. Il
n’eut pas de peine à se justifier sur les accusations de péculat. Il protesta
qu’il n’avait pas distribué de billets à son nom dans l’assemblée du corps
électoral. Son accusateur, Epellé, était un calomniateur auquel il avait déjà
répondu dans] une affiche intitulée Jacques Roux au sieur Epellé[13]. Il rappela ses charités, qu’il
élevait un orphelin, qu’il avait remis à plusieurs citoyens pauvres une somme
de 217 livres, produit de ses ouvrages patriotiques, que, lors de la
reddition de ses comptes, il y avait près d’un an, il avait remis « une paire
d’éperons en argent, des boutons en or, des breloques en or, différentes
pièces d’argent qui n’étaient pas portées sur les procès-verbaux », et que
l’assemblée générale des Gravilliers avait ordonné mention de sa belle
conduite sur ses registres. Il ne connaissait pas la citoyenne
Talleyrand-Périgord, mais seulement son fermier Lamotte-Bourru, qui était,
comme lui, originaire de la Charente. Il se défendit d’avoir dénigré la
nouvelle Constitution. Il voulait simplement la compléter avant qu’elle n’ait
été sanctionnée par le peuple. Il la regardait comme « l’étoile du salut
public ». Il n’avait calomnié ni Robespierre, ni Thuriot, il proclamait, au
contraire, qu’ils avaient rendu de grands services et il était disposé « à
les couvrir de son corps ». « Quant au citoyen Pache, il a pensé qu’il
pouvait être induit en erreur sur les subsistances de Paris, cependant il a
toujours loué son zèle et sa vertu. » Les
administrateurs de police, malgré leur désir de trouver Jacques Roux
coupable, n’osèrent pas le garder plus longtemps sous les verrous. Ils
décidèrent, le 27 août, de le traduire devant le tribunal de police
correctionnelle et ils le mirent en liberté sous le cautionnement de deux
citoyens connus, « les citoyens Albert-Alexandre Guilmaut, tablettier, rue
des Vertus n° 31, et Jacques Bourbon, cordonnier, rue Philippeaux n° 34 ». La
section des Gravilliers avait fait entre temps, le 25 août, une nouvelle
démarche à la Commune, en faveur de Jacques Roux, qui n’avait pas démérité,
disait-elle[14]. La Commune s’était retranchée
derrière les tribunaux. Jacques Roux ne resta pas longtemps en liberté. Huit
jours plus tard, il retournait en prison. Le 5 septembre au matin, le jour
même où s’organisait la manifestation qui allait obliger la Convention à
mettre la Terreur à l’ordre du jour, Jacques Roux commit l’imprudence de se
rendre aux Jacobins avec les délégués des sections. L’ancien ami de Dumouriez
et de Brissot, Bonnecarrère, qui était parvenu à se faire nommer président de
la section de la Fontaine de Grenelle[15], s’était lui aussi rendu aux
Jacobins. Leur présence à tous deux souleva des protestations : « L’on
propose, dit le procès-verbal officiel[16], que Jacques Roux et
Bonnecarrère, qui siègent dans |q société, soient conduits au Comité de
Sûreté générale comme gens très suspects. Le collègue de Jacques Roux {sic) demande d’être distingué de de
ce collègue qu’il ne connaissait point. D’après différentes propositions,
l’assemblée arrête que les individus dénoncés seront conduits aux comités
révolutionnaires de leurs sections. Les citoyens Namis, Saint-Aubin et Jourdan
sont nommés pour les accompagner ». Jacques
Roux fut dope conduit au comité révolutionnaire des Gravilliers. Ses
partisans firent remarquer que l’assemblée qui avait ordonné l’arrestation
pratiquait de caractère légal, une « société populaire ne pouvait, selon la
loi, avoir aucune prépondérance sur un corps constitué ». Cet avis fut appuyé
et le comité décida de nommer quatre commissaires pour s’informer auprès de
la société des Jacobins des faits qui avaient motivé la mesure rigoureuse
prise contre Jacques Roux. Pendant ce temps, celui-ci était prévenu que « ce
n’était que fraternellement qu’il était retenu au comité ». Les quatre
commissaires envoyés aux Jacobins, Camelin, Barbot, Derouvroy et l’inévitable
Truchon, revinrent annoncer que les Jacobins avaient confirmé leur
délibération contre Jacques Roux et qu’fis enverraient le lendemain les
pièces à l’appui. En attendant, Jacques Roux fut gardé en arrestation. Puis,
on se ravisa. Les deux comités civil et révolutionnaire des Gravilliers
décidèrent de renvoyer sur le champ Jacques Roux devant le comité de salut
public du département de Paris, qui exerçait la haute police sur toute la
ville. Il y fut immédiatement conduit par les citoyens Taloul, Dusaulsoy, Dollau
et Capron. Le lendemain, le comité de salut public du département de Paris rendait
son arrêt : « Considérait... que Jacques Roux... déjà suspect dans
l’opinion publique, est très suspect auprès de tous ceux qui ont suivi ses
manœuvres et que le jugement unanime de la société des Jacobins sur son
compte est une preuve irrésistible contre lui, arrête que Jacques Roux sera
conduit provisoirement à Sainte-Pélagie, conformément à la loi sur les hommes
suspects, et, par mesure de sûreté générale, arrête en outre que le présent
arrêté sera envoyé à la société des Jacobins avec invitation de faire passer
au comité les différentes inculpations qu’elle aurait à produire contre lui,
pour prendre, d’après ses renseignements, des mesures ultérieures »[17]. C’était
la seconde fois en quinze jours que Jacques Roux était emprisonné. Ses
ennemis espéraient bien que cette fois on ne le relâcherait pas. Le 8
septembre, un jacobin, ami d’Hébert, Desfieux, fit nommer une commission
d'enquête chargée de recevoir les dénonciations contre le prêtre socialiste.
R ajouta que la commission recevrait aussi les dénonciations qu’on pourrait
faire contre Théophile Leclerc, qui était encore en liberté- Il s’agissait
donc bien de frapper le parti des Enragés à la tête dans la personne de ses
deux journalistes. LA CAMPAGNE DES ENRAGÉS CONTRE LA TERREUR. L’un et
l’autre, qui continuaient à rédiger leurs feuilles, firent d’abord bonne
contenance. « Le citoyen Desfieux, écrivit Leclerc, n’atteindra pas le
but qu’il s’est proposé. Je ne me tairai pas ; je ne m’évaderai pas et cent
mille guillotines ne m’empêcheront pas de dire au peuple la vérité tout
entière »[18]. L’observateur Latour la
Montagne note, dans son rapport du 13 septembre, qu’on s’arrachait le journal
de Leclerc et que celui-ci gagnait beaucoup d’argent[19]. De son
côté Jacques Roux écrivait de même qu’il ne craignait pas la mort et qu’il
continuerait à dire toute la vérité[20]. Tous
les deux se mirent dès lors à mener contre la Convention et contre les
arrestations arbitraires la plus véhémente campagne. Ces terroristes
s’apercevaient un peu tard que la Terreur qu’ils avaient tant réclamée
fonctionnait seulement contre les plus chauds révolutionnaires ! « On avait
demandé, dit Leclerc, dans son numéro du 15 septembre, qu’on mette la Terreur
à l’ordre du jour, on y a placé le funeste esprit de vengeance et de haine
particulière... » Et Jacques Roux répétait en écho, dans son n° 265 : « On ne
fait pas aimer et chérir un gouvernement en dominant les hommes par la
Terreur ». Il montrait qu’aux mains des intrigants et des ennemis du peuple,
la terrible loi des suspects était exécutée contrairement à son esprit. Il se
demandait déjà plus de deux mois avant que Camille Desmoulins n’élevât la
voix dans le Vieux Cordelier, si on était revenu au temps des Néron et des
Caligula : « Ce n’est pas en brouillant, en renversant, en incendiant, en
ensanglantant tout, en faisant de la France une vaste bastille, que notre
Révolution fera la conquête du monde... C’est ressusciter le fanatisme que
d’imputer à un homme le crime de sa naissance. Il y a plus d’innocens
incarcérés que de coupables. Si l’on ne met un frein à ces emprisonnemens qui
souillent l’histoire de la Révolution et dont on ne trouve pas d’exemples
dans les annales des peuples les moins civilisés, la guerre civile ne tardera
pas à s’enflammer ». Depuis qu’il était à Sainte-Pélagie, Jacques Roux
appréciait la légalité et blâmait les excès ! Leclerc
et lui ne se bornaient pas à gémir. Ils préparaient leur revanche en
réclamant avec force la mise en vigueur de la Constitution, c’est-à-dire le
renouvellement de la Convention et des élections générales : « Encore
quelques jours, écrivait Jacques Roux dans son n° 266, le masque sera arraché
aux ennemis de la liberté ; nous verrons s’ils se perpétueront dans leurs
places, s’ils ne nous ont fait une Constitution sublime que pour l’enfreindre
à chaque instant, que pour violer les propriétés et les personnes... »
Jacques Roux n’aurait pas pris ce ton menaçant, s’il n’avait pas cru pouvoir
compter sur l’action énergique et prochaine de ses partisans. Pendant
que Varlet réunissait à l’Evêché les délégués des sections afin de leur faire
signer une pétition contre le décret qui mettait fin k la permanence de leurs
assemblées, Glaire Lacombe agitait la société des républicaines
révolutionnaires, qui avait déjà réclamé, le 26 août, à la Convention, la
mise en vigueur immédiate de la Constitution[21]. Le 16 septembre, la société
des républicaines révolutionnaires revint à la charge. Elle réclama de la
Convention deux choses : 1° la réclusion des femmes publiques et 2” la
réclusion des femmes d’émigrés : « Nous les voyons journellement,
disaient-elles, promenées dans leurs voitures, allant et venant de la ville à
la campagne, et nous sommes fondées à croire que ces promenades ne sont autre
chose qu’une espèce de petite poste établie pour colporter de Paris aux
environs et des environs à Paris des correspondances contre-révolutionnaires[22]. » Quelques instants plus
tard, nouvelle pétition de la société fraternelle de la section de l’Unité,
appuyée par le club des Cordeliers et par de nombreuses autres sections et
sociétés populaires[23], pour réclamer l’obligation
pour toutes les femmes déporter la cocarde nationale. Dans la même séance
encore, une députation du club des Cordeliers vint dénoncer les représentants
en mission aux armées et à l’intérieur et demander qu’il leur fût défendu de
prendre des arrêtés de nature à entraver la marche du Conseil exécutif. La
Convention accueillit très mal cette pétition. Elle décida même que l’orateur
des Cordeliers serait conduit au Comité de Sûreté générale pour y communiquer
ses pouvoirs et les documents « dont il était porteur. Cette pétition
des Cordeliers ne figure pas in extenso dans les Archives
parlementaires. Je vois dans le rapport de l’Observateur Roubaud, en date
du 19 septembre, qu’elle fut arrachée et qu’elle causa de la rumeur, « en
raison des vérités qu’elle contient, que la Convention n’a plus le courage
d’avouer et encore moins d’adopter ». Ces
pétitions répétées montraient que les Enragés n’avaient pas renoncé a
intimider la Convention. Mais les lois votées le 5 septembre avaient affermi
l’autorité des hommes au gouvernement. Les adversaires des Enragés
méprisèrent leurs menâtes et prirent contre eux l'offensive le soir même, aux
Jacobins, sous le premier prétexte veilu. CLAIRE LACOMBE SUR LA SELLETTE AUX JACOBINS. Claire
Lacombe s’était, parait-il, répandue en menaces contre une des adhérentes de
la société ; là citoyenne Gobin, qui avait mal parlé de Théophile Leclerc.
Elle aurait déclaré qu’elle la ferait rayer de la société des républicaines,
si elle lie proüvait ses dénonciations. La citoyenne Gobin se plaignit aux
Jacobins, qui s’empressèrent de saisir l’arme qu’elle leur offrait. Le
ci-devant capucin François Chabot donna de sa personne contre Claire Lacombe
et contre Leclerc. Il révéla que la première était venue lui recommander le
ci-devant maire de Toulouse de Rey, arrêté comme fédéraliste[24]. Mais, comme Chabot s’étonnait de
cette recommandation en faveur d’un ex-noble, « d’un homme qui avait
fait emprisonner des patriotes », Claire Lacombe s’emporta en menaces et
en gros mots : « Madame Lacombe, car ce n’est pas une citoyenne, avoua que ce
n’était pas M. de Rey qui lui tenait à cœur, mais bien son neveu qui l’avait
touchée... » Chabot fit fuser les rires. Il révéla encore que Claire Lacombe
protestait contre les arrestations de suspects et que ses compagnes avaient
osé s’en prendre a Robespierre et l’appeler Monsieur Robespierre[25]. Basire ajouta quelques faits
au réquisitoire de Chabot. Les républicaines révolutionnaires étaient venues
le trouver au Comité de Sûreté générale pour lui demander la liberté d’un
nommé Sémandv. Elles l’avaient traité de blanc-bec, « elles me dirent que
j’étais comme M. Robespierre, qui osait les traiter de
contre-révolutionnaires... » Basire conclut que leur société devait être
soumise a un scrutin épuratoire. Renaudin révéla que Claire Lacombe avait
logé chez elle l’ex-noble Théophile Leclerc et il prétendit que celui-ci
avait volé à un de ses amis une paire de pistolets. D’autres
jacobins encore dénoncèrent les intrigues de Claire Lacombe et de sa société
: « La femme qu’on vous dénonce, dit l’un d’eux, est fort dangereuse en ce
qu’elle est fort éloquente ; elle parle bien d’abord et attaque ensuite les
autorités constituées... Elle a tiré à boulets rouges dans un discours que
j’ai entendu et sur les Jacobins et sur la Convention. » Un autre donna la
lecture d’un passage du journal de Leclerc où celui-ci déclarait qu’il
poignarderait quiconque viendrait l’arrêter : « Durosoi et Royou, dit-il, ne
tenaient pas un autre langage, quand ils payèrent de leur tête la peine de
leur folio et de leur scélératesse... » A ce
moment, Claire Lacombe, qui assistait à la séance dans une tribune et qui
avait déjà fait demander sans succès par écrit au président Sijas
l’autorisation de répondre à ses accusateurs, voulut prendre la parole[26]. Son intervention déchaîna un
violent tumulte. Les femmes des tribunes crièrent : « A bas l’intrigante
! A bas la nouvelle Corday ! » Le président dut se couvrir. Quand le
calme fut revenu, les Jacobins décidèrent d’inviter la société des femmes
révolutionnaires à se débarrasser par un scrutin épuratoire des intrigantes
qui s’étaient glissées parmi elles et de conduire sur le champ, sous bonne
garde, Claire Lacombe au Comité de Sûreté générale[27]. Ce qui fut fait. Les scellés
furent apposés sur son appartement, hôtel de Bretagne, rue Croix-des-Petits-
Champs, mais, dès le lendemain, les scellés étaient levés et la belle actrice
remise en liberté. On n’avait voulu que l'effrayer. VARLET CONTRE LES QUARANTE SOUS. La
séance des Jacobins du 16 septembre aurait dû être un avertissement pour les
Enragés. Mais ceux-ci comptaient sur les sections[28]. Ils s’entêtèrent. Le
lendemain, 17 septembre, ils mobilisèrent leurs forces. Varlet se présenta à
la Convention pour lire une pétition de la majorité des sections contre le
décret qui avait supprimé leur permanence et institué une indemnité de 40
sous en faveur des citoyens pauvres qui se rendraient à leurs assemblées
générales, réduites k deux par semaine. « Ce décret, dit Varlet, est
attentatoire à la constitution et à la Déclaration des droits. Celui qui le
premier proposa un décret particulier à la ville de Paris [c’était Danton]
vous lit violer votre serment. Avez-vous pu, sans attenter aux droits du
souverain, réduire les assemblées du peuple et en prescrire la durée ? Non,
et vous l’avez vous-mêmes reconnu dans un autre temps. Lorsqu’une faction scélérate
vous proposa d’anéantir la permanence des sections, il se trouva ici de
braves Montagnards, inébranlables dans les principes, qui s’y opposèrent.
Vous voulez fermer l’œil du peuple, attiédir sa surveillance, et dans quelle
occasion ? Quand les dangers de la patrie l’obligent à remettre entre vos
mains un pouvoir immense qui exige une surveillance active ; à l’instant où
la République se déclare en révolution, où elle met en réquisition les hommes
et les armes, où elle a besoin de tous les services que ses enfants peuvent
lui rendre ! » Le début était déjà fort habile. La fin ne l’était pas moins.
Varie ! rejetait au nom du peuple la paie des 40 sous comme une aumône
déshonorante : « Que deviendraient les assemblées du peuple, si le
gouvernement pouvait les payer ? Dans un état libre, le peuple ne peut se
salarier lui-même pour exercer ses droits ; si le lien social tenait à cette
indemnité, la déclaration des droits ne serait plus qu’une chimère, la ligne
de démarcation entre les citoyens serait rétablie... » L’effet
produit fut si grand que trois orateurs, dont deux du Comité de Salut public,
durent se succéder à la tribune pour combattre l’argumentation du jeune
Varlet. Basire
exposa que la paie des 40 sous n’avait été instituée que pour permettre aux
sans-culottes d’assister aux assemblées de section et d’y arracher la
majorité aux riches. Il dénonça Varlet, « jeune homme bien imprudent, s’il
n’est pas stipendié par l’aristocratie ». « Je le dénonce pour
former avec Jacques Roux un pendant a l’abbé Royou. » Il conclut en
demandant que sa pétition fût renvoyée au Comité de Sûreté générale. Robespierre
inculpa les pétitionnaires d’hypocrisie. « C’est pour anéantir les droits du
peuple que quelques intrigants ont l’air de réclamer pour lui une étendue
illimitée. » La permanence des sections favorisait, on effet, les muscadins.
L’indemnité de 40 sous était aussi légitime que celle qui était payée aux
représentants du peuple. « Ceux qui osent s’élever contre cette mesure
conservatrice des droits du peuple ne sont que les avocats des aristocrates,
des riches et des muscadins. » Saint-André
ajouta que la pétition de Varlet avait été « entièrement puisée dans les
arrêtés fédéralistes et contre- révolutionnaires des sections de Lyon, de
Toulouse, de Marseille et de Bordeaux ». « Citoyens, ne vous le
dissimulez pas, le but des aristocrates est d’amener la Contre-Révolution par
un mouvement sectionnaire... » La Convention passa à l’ordre du jour sur la
pétition. L’ARRESTATION DE VARLET. Basire
reprit la parole pour demander pourquoi Varlet qui était dans l’âge de la
réquisition, n’était pas à la frontière. On autre membre proposa de le faire
garder par un gendarme, mais la Convention s’y refusa par respect pour le
droit de pétition. Varlet fut laissé en liberté, mais pas pour longtemps. Le
lendemain, le Comité de Sûreté générale lança contre lui un mandat d’arrêt qui
l’écroua aux Madelonnettes, « pour avoir tenu dans un groupe des propos
contre-révolutionnaires »[29]. Le commissaire de police de la
section des Droits de d’Homme perquisitionna chez lui, rue Tiron, n° 6. Varlet
resta en prison pendant deux longs mois. Heureusement pour lui, il avait des
amis qui ne l’oublièrent pas. Dès le,29 du 1er mois, la société des Amis de
la Loi et de la Liberté, de l’Egalité et de l’Humanité, séante rue du
Vert-Bois n° 17, réclama sa mise en liberté en attestant son patriotisme[30]. Le 5 du 2e mois, l’assemblée
générale de la section des Droits de l’Homme prit une semblable initiative.
Trois jours plus tard, le comité révolutionnaire de la même section fit une
démarche auprès du Comité de Sûreté générale en faveur de Varlet, « qui est
un vrai républicain ». Le même jour, 8e du 2e mois, les citoyens Claude
Lechard, de la section du Muséum, Pol- tier, de la section de Bonne-Nouvelle,
tous deux jacobins, le citoyen Vassaux, électeur et membre de la Commune du
10 août, Clamaron, de la section des Gravilliers, Joëris, de la section des
Droits de l'Homme, Lechard, de la section du faubourg Montmartre et Jacobin
firent à leur tour un vif éloge du patriotisme pur et désintéressé du jeune
Apôtre de la Liberté et réclamèrent son élargissement. Le 22
brumaire enfin, le conseil général de la Commune s’occupa de Varlet. Hébert
lui-même prit la parole eu sa faveur et le conseil le chargea, avec Bernard,
de faire le nécessaire auprès du Comité de Sûreté générale, afin de demander
que « Varlet fut promptement jugé et mis en liberté, s’il n’y avait aucun
fait grave contre lui... » La démarche réussit. Le 24 brumaire, Varlet fut
ramené dans sa section « au milieu de ses concitoyens, à la grande
satisfaction de tous », dit le procès-verbal du comité révolutionnaire. li
alla le lendemain remercier la Commune. Il rappela qu’il avait prêché le
républicanisme sur les places publiques et il demanda l’autorisation de
continuer son apostolat du haut d’une tribune roulante. Chaumette rendit justice
à son patriotisme, mais observa qu’il fallait prendre garde que « des
intrigants ne s’emparassent des tribunes publiques qui devaient être
réservées à la vieillesse respectable ». « Un privilège particulier pour
l’établissement d’une tribune choquerait les principes de l’égalité. » Le
conseil passa à l’ordre du jour, mais en le motivant « sur ce que tout
citoyen peut faire ce que la loi ne défend pas ». Il décida en outre, à la
requête de Chaumette, de demander a la Convention « rétablissement de
tribunes et de rostres où l’on instruirait le peuple sur les grands principes
du patriotisme et de la raison. » Il est très significatif que Varlet ait dû
sa liberté à Hébert. Son cas n’a pas dû être isolé. Beaucoup de ceux qui
suivaient auparavant Jacques Roux et Leclerc constitueront le gros du parti
hébertiste. LA SUPPRESSION DES CLUBS DE FEMMES. Claire
Lacombe et le bataillon des républicaines révolutionnaires paraissaient plus
dangereux que Varlet. Elles avaient de sérieux appuis dans les sections, à la
Commune et jusqu’aux Jacobins. Le 20 septembre, la société populaire de la
section de la Montagne se plaignit aux Jacobins que les femmes
révolutionnaires qui portaient la cocarde avaient été insultées et menacées.
Les Jacobins, par l’organe de Renaudin lui-même, accueillirent ces plaintes
et décidèrent de demander conjointement à la Commune d’obliger toutes les citoyennes
sans distinction à porter la cocarde. La Commune prit un arrêté conforme
séance tenante[31]. Il est visible que les
autorités s’appliquaient à distinguer Claire Lacombe de la société qu’elle
présidait. La Feuille
du Salut public, organe officieux, publia, le 24 septembre, l’information
suivante : « La femme ou la fille Lacombe est enfin en prison et hors d’état
de nuire ; cette bacchante contre-révolutionnaire ne boit plus que de l’eau ;
on sait qu’elle aimait beaucoup le vin, qu’elle n’aimait pas moins la table
et les hommes ; témoin la fraternité intime qui régnait entre elle, Jacques
Roux, Leclerc et compagnie ». Cette information injurieuse et diffamatoire
n’était pas exacte. Claire Lacombe était encore en liberté, mais on avait
l’œil sur elle. Le 22
septembre, l’observateur Rousseville note que les femmes révolutionnaires
envoyaient la veille une députation à la section de la Croix-Rouge pour se
plaindre qu’on voulait les arrêter et qu’elles demandaient la responsabilité
des ministres, l’organisation de 4 tribunaux révolutionnaires, le jugement
des aristocrates dans les 24 heures, le supplice d’Antoinette et de Brissot,
la taxe de toutes les denrées à l’usage du peuple et la nomination d’un
comité central composé de députés de toutes les sections[32]. Si le policier dit vrai, les
Enragés auraient médité un nouveau mouvement sectionnaire. Mais la
société des républicaines révolutionnaires n’avait plus beaucoup de semaines
à vivre. Le G octobre, le club des Hommes révolutionnaires du 10 août, qui
comptait parmi ses membres plus d’un aristocrate déguisé en maratiste,
dénonça à la Convention le club de Claire Lacombe et demanda sa dissolution.
La dénonciation, dont le texte manque aux Archives parlementaires, fut
renvoyée au Comité de Sûreté générale. C’était déjà mauvais signe. Le jour
même, les citoyennes dénoncées se présentèrent à la barre pour répondre à
leurs accusateurs. On refusa de les admettre. Elles revinrent le lendemain.
Cette fois Claire Lacombe fit entendre à la barre une courageuse protestation
: « Législateurs, on est venu hier surprendre votre religion ; des
intrigants, des calomniateurs, ne pouvant nous trouver des crimes, ont osé
nous assimiler à des Médicis, à une Elisabeth d’Angleterre, à une Antoinette,
à une Charlotte Corday ! Ah ! sans doute, la nature a produit un monstre qui
nous a privées de l’Ami du peuple ! Mais nous, sommes-nous responsables de ce
crime ? Corday était- elle de notre société ? » Claire Lacombe commit
l’imprudence de terminer par une menace : « Nos droits sont ceux du peuple,
et, si on nous opprime, nous saurons opposer la résistance à l’oppression. » Il ne
semble pas qu’il y ait eu un débat quelconque. La défense de Claire Lacombe
fut renvoyée au Comité de Sûreté générale comme la dénonciation. Mais,
trois semaines plus tard, à la suite d’une intrigue où trempa Fabre
d’Eglantine, le club des femmes révolutionnaires était fermé. Le 8
brumaire, 29 octobre, une députation de femmes vint demander deux choses à la
Convention : 1° de ne pas rendre obligatoire pour les femmes le [tort du
bonnet rouge, « sans quoi l’art du commerce est tout à fait détruit » ;
2° d’ordonner la dissolution du club des femmes révolutionnaires. Les femmes
de la Halle s’étaient plaintes la veille à la Commune que les républicaines
révolutionnaires avaient voulu les forcer à se coiffer du bonnet rouge, et
Léonard Bourdon avait demandé que les fidèles de Claire Lacombe fussent
tenues de se renfermer dans les bornes de la loi et de ne pas troubler
l’ordre public par des signes de distinction. Que
s’était-il passé ? Une rixe avait éclaté près de l’église Saint-Eustache,
dans les dépendances de laquelle la société féminine tenait ses séances. Il
paraîtrait que les républicaines avaient voulu forcer les autres femmes à
porter le bonnet rouge à leur exemple. L’hébertisme
Maribon-Montaut, flairant une intrigue, lit remarquer qu’il n’avait jamais
été question d’imposer aux femmes un mode quelconque de coiffure. Le jour
même, 8 brumaire, le Comité de Salut public du département de Paris avait
fait tirer à 1.000 exemplaires une affiche au sujet de la rixe de la veille.
Il y était dit que cette rixe était le résultat d’une manœuvre des partisans
de Brissot et de ses complices dont le procès s’instruisait au tribunal
révolutionnaire. On avait trompé les dames de la Halle en leur faisant croire
faussement que les femmes révolutionnaires voulaient demander à la Convention
un décret pour obliger toutes les femmes à porter le bonnet rouge, les
pantalons et le pistolet à la ceinture[33]. Fabre
d’Eglantine, qui avait déjà commencé, dans le secret des comités de
gouvernement, l’offensive contre tous les patriotes énergiques, monta 'a la
tribune après Montaut. Il rappela adroitement les troubles qui avaient eu
lieu à propos de la cocarde cl ii trouva très vraisemblable que les disciples
de Claire Lacombe aient voulu imposer le bonnet rouge : « Prenez bien garde,
dit-il, qu’après avoir obtenu un décret sur ce dernier objet, on ne s’en
tiendra pas là on viendra vous demander la ceinture, puis les pistolet3 à la
ceinture... Vous verriez des files de femmes aller au pain comme on va à la
tranchée ». Et l’histrion se mit à prononcer un réquisitoire contre « les
filles émancipées », « les grenadiers femelles », qui allaient au club au
lieu de s’occuper de leur ménage et de leurs enfants. Il fut très applaudi
par une assemblée qui avait peur de la rue et qui on était resté sur les
droits de la femme aux plaisanteries de collège. La Convention renvoya
l’affaire au Comité de Sûreté générale. Comme
si ce Comité n’attendait qu’un signal, dès le lendemain, son rapporteur Amar
était prêt à déposer son rapport. Grossissant les troubles qui s’étaient
produits l’avant- veille au marché des Innocents, près de Saint-Eustache,
Amar les attribua, selon la formule, à la malveillance contre-
révolutionnaire cachée sous un masque démagogique. Il conclut que les femmes,
ne devaient pas s’occuper de politique, car elles, ne pourraient le faire
qu’en, sacrifiant les fonctions privées auxquelles la nature les avait
destinées : « Chaque sexe., dit-il, est appelé à un genre d’occupation
qui lui est propre ; son action est circonscrite dans un cercle, qu’il ne
peut franchir... » Il conclut, que les sociétés populaires de femmes
devaient être dissoutes. Chartier
voulut défendre, le droit des femmes : « A moins que vous ne contestiez
que les femmes font partie du genre humain, pouvez-vous, leur ôter ce droit,
commun à tout être pensant ? ... » Il fut interrompu par des murmures. Basire
lui répondit par la distinction du régime normal et du régime révolutionnaire
: « Vous vous êtes déclarés gouvernement révolutionnaire. En cette qualité,
vous pouvez prendre toutes les mesures que commande le salut public. Vous
avez jeté pour un instant le voile sur les principes, dans la crainte de
l’abus qu’on en pourrait faire, Il est donc uniquement question de savoir si
les sociétés de femmes sont dangereuses. L’expérience a prouvé, ces jours
passés, combien elles sont funestes à la tranquillité publique ; cela posé,
qu’on ne-me parle plus des principes !... » C’était brutal. Cela
plut à la Convention qui décréta, séance tenante, la suppression des clubs de
femmes et ordonna en même temps la publicité des séances de toutes les
sociétés politiques ou- littéraires. Pour
atteindre une société parisienne, qui avait été d’un puissant appui aux
Enragés, L’Assemblée n’avait pas hésité à détruire tous ces nombreux clubs de
femmes qui avaient fait surtout le territoire une œuvre patriotique et
civique si méritoire, si digne d’admiration ![34] Elie payait d’ingratitude
celles qui avaient servi avec abnégation la cause de la Révolution. Elle les
rejetait de la cité. Elle les renvoyait dédaigneusement à leur ménage,
oubliant qu’elle les- renvoyait aussi au piètre ! En vain les citoyennes
républicaines révolutionnaires voulurent-elles protester contre la mesure
d’exception qui les frappait. Leur députation qui se présenta à la barre, le
15 brumaire, 5 novembre, affirma que leur société était presque entièrement
composée de mères de famille, de femmes de défenseurs de la patrie. Dès les
premiers mots, on les interrompit par des risées. Elles se retirèrent au
milieu des huées[35]. Le même
jour, Glaire Lacombe était de nouveau perquisitionnée par le comité
révolutionnaire de la section de 1792, sur la dénonciation d’un citoyen
Larivière. On trouva chez elle 21 piques « d’un modèle très meurtrier ». Une
de ces piques fut portée au Comité de Sûreté générale qui hésita cependant à
sévir[36]. L’ARRESTATION DE LACOMBE ET DE LECLERC. Claire
Lacombe fut laissée en liberté, mais elle renonça à la politique et se
confina dans l’art dramatique. Le 20 ventôse, elle demanda à la Commune un
passeport pour se rendre à Dunkerque, où l’appelait un engagement théâtral.
Le passeport lui fut accordé, mais quelques jours plus tard, le 27 ventôse,
la malheureuse actrice était l’objet d’une dénonciation d’une femme Mallet,
qui la représentait comme très liée avec les hébertistes, notamment avec
Mazuel, qui aurait vécu avec elle. Claire Lacombe n’alla pas à Dunkerque. Le
13 germinal, au moment du procès des Dantonistes, le Comité de Sûreté
générale la fit arrêter et elle resta on prison au Luxembourg et à
Sainte-Pélagie pendant plusieurs mois[37]. Quand
le club de femmes fut fermé, Théophile Leclerc, qui avait déjà cessé son
journal depuis le 15 septembre, épousa Pauline Léon, la plus vaillante
iieutonante de Claire Lacombe, puis il s’empressa de quitter Paris. Il
s’enrôla dans le bataillon de la réquisition de la section de Marat et alla
tenir garnison à La Père, où il devint secrétaire du commandant de place.
C’est là qu’il fut arrêté avec sa femme le 14 germinal, par ordre du Comité
de Sûreté générale[38] Claire Lacombe avait été
arrêtée la veille. Tous deux étaient encore en prison le 16 messidor. Je
perds ensuite leur trace. LE PROCÈS ET LA MORT DE JACQUES ROUX. Restait
Jacques Roux, le vrai chef du parti. Le 23 septembre, des citoyens des Gravilliers
étaient venus à la Commune pour réclamer sa liberté. Le président de
l’assemblée municipale leur répondit que « sûrement ils étaient mus par
l’intrigue, puisque tour à tour l’on demandait l’élargissement et
l’incarcération du prêtre Jacques Roux ». Hébert prit ensuite la parole pour
énumérer « les crimes » de celui-ci. Il y eut cependant un débat,
ce qui montre que Jacques Roux gardait à l’Hôtel-de-Ville quelques partisans.
Le Conseil passa à l’ordre du jour en le motivant sur la loi des suspects[39]. Jacques
Roux resta donc en prison. Mais, plus courageux que Leclerc, il continua son
journal quand même. Il avait eu autrefois des moments de faiblesse. Il avait
rusé avec sa conscience. Maintenant qu’il est sous les verrous, il se fait un
cœur d’airain. Il attaque en face ceux qui oppriment son parti. II s’indigne,
dans son n° 267, que la société des femmes révolutionnaires, qui avait rendu
tant de services, ait été dénoncée aux Jacobins, le 16 septembre, « par
des hommes qui eurent recours mille fois à leur courage et à leur ver tu. »
Il s’indigne qu’on ait outragé les membres du club des Cordeliers qui avaient
protesté û la barre de la Convention contre les actes arbitraires commis par
les proconsuls en mission : « Il n’est plus permis, dit-il, d’émettre
son vœu dès qu’il blesse l’orgueil des hypocrites qui sont à la tête du
gouvernement... Des commissaires usurpent la souveraineté nationale, exercent
dans plusieurs départements les cruautés familières aux vice-rois et aux
dictateurs envers ceux qui ont les yeux ouverts sur leurs crimes, qui ont
dénoncé leurs trahisons[40]... » Jamais, quand il
était en liberté, Jacques Roux n’avait encore « avili » à ce point
les autorités constituées. Ses derniers numéros sont un réquisitoire véhément
et motivée contre la Terreur qu’il montre dirigée contre les meilleurs
républicains. La loi des suspects, appliquée contre son esprit, devient un
instrument de vengeance et d’ambition. Les
attaques, de Jacques Roux émurent l’antifédéraliste, journal officieux
qui, dans son numéro du 16 brumaire, s’étonna de l’impunité de leur auteur : « M.
Jacques Roux, dans un des derniers numéros.de son journal, fait une diatribe
violente contre les comités révolutionnaires des sections et les citoyens qui
sont à la tête du gouvernement ; il prétend que des intrigans, après s’être
servis de lui, et d’autres patriotes comme fui, pour briser la couronne[41], les font emprisonner
aujourd’hui et exercent une inquisition dictatoriale. Jacques Roux compte sur
le mépris, peut-être dangereux, que les autorités constituées font des
libelles, » Cet appel à la répression devait être entendu. Le 8
frimaire, au moment même où la dénonciation de Chabot contre les agents de l’étranger
livrait la grave affaire de la compagnie des Indes et provoquait.de nouvelles
arrestations politiques, le comité révolutionnaire des Gravilliers délibérait
de mettre en, prison les partisans de Jacques Roux dans la section : Bosquet,
Bourbon, Graillot, Nattay, Duclos, Bouillant, Philippe, Michault, Sangé[42]. Deux jours auparavant, Nattay,
avait été élu par la section, membre, du jury pour l’instruction des affaires
de faux assignats. Il fut conduit avec ses, compagnons, le 13 frimaire, à la
prison de La Force. Déjà Jacques Roux avait été transféré à Bicêtre et son
journal avait cessé de paraître. Le 23 nivôse, Jacques Roux devait être jugé
par le tribunal de police correctionnelle séant au Châtelet. Il comparut,
mais le tribunal se déclara incompétent et le renvoya devant le tribunal
révolutionnaire. Le prêtre se vit perdu. Après la lecture du jugement, dit le
procès-verbal, « le citoyen Jacques Roux a demandé a faire une observation au
tribunal... et, remerciant le tribunal dans la sévérité de son jugement et
faisant semblant de serrer sous sa veste, du côté gauche, des papiers, il a
avec sa main droite ouvert un petit couteau à manche d’ivoire et s’en est
porté différents coups, à ce qu’il a paru au tribunal par la lame du couteau
toute teinte de sang, à dessein de se détruire. Ces mouvements furieux ayant
été aussitôt remarqués, il a été sur-le-champ saisi par les gendarmes et les
huissiers présens, désarmé et emporté, rempli de sang, dans la salle du
Conseil et l'a, un chirurgien a été aussitôt mandé pour te visiter et
constater sa blessure ». En attendant l’arrivée du chirurgien, le tribunal
interrogea le blessé el le dialogue suivant s’engagea : « Pourquoi avez-vous
attenté à vos jours ? — Depuis longtemps j’étais résolu au sacrifice de ma vie,
mais les injures et les inculpations atroces de mes persécuteurs m’ont singulièrement excité à passer aux actes. — Le tribunal, par son jugement,
n’avait
pas prononcé sur votre affaire, il n’avait fait que vous renvoyer devant des juges
compétens. — Je n’ai point à me plaindre du tribunal, il a
agi d’après la loi, mais, moi, j’ai agi d’après ma liberté. — Vous n’aviez pas à craindre de paraître devant le tribunal
révolutionnaire. Marat, que vous regardez comme votre ami, y a également paru
et en est sorti triomphant. — Il y a beaucoup de différence entre Marat et
moi. Marat n’avait pas mon énergie et il n’a pas été persécuté comme moi. Je
méprise la vie. Un sort heureux est réservé aux amis de la liberté dans la
vie future. Je vous recommande mon petit orphelin Masselin que j’ai recueilli
chez moi. Je demande qu’avant de terminer ma carrière, on me couvre du bonnet
rouge et que le président du tribunal me donne le baiser de paix et de
fraternité... » Le président fit à l’instant ce que Jacques Doux demandait. Le
chirurgien Sougues constata que Jacques Roux « s’était frappé à cinq endroits
à deux lignes de distance l’un de l’autre au-dessus du mamelon gauche ;
qu’aucune de ses blessures ne pénétrait dans la poitrine et qu’elles
n’étaient pas dangereuses ; qu’c les avaient à peu près trois lignes de
largeur ; que la cinquième seulement, au bord du sternum, était à environ un
pouce au-dessous des autres[43]. » Jacques
Roux fut transporté à l’infirmerie de Bicêtre. Mais il n’avait pas renoncé au
suicide. Le 16 pluviôse, l’officier de paix Mercereau écrivait à
Fouquier-Tinville que le prisonnier « employait tous les moyens
possibles pour épuiser sa santé, afin de se soustraire au procès qu’il devait
subir au tribunal révolutionnaire... » Le 22 pluviôse, il recommença sa
tentative manquée. Il se porta au sein gauche des blessures profondes et
dangereuses, dont l’une pénétra le poumon gauche. Il mourut dans la journée à
Bicêtre, et fut enterré dans le cimetière de Gentilly. LE RÔLE HISTORIQUE DE JACQUES ROUX. Cette
fin de Jacques Roux, qui rappelle les morts antiques racontées par Tacite,
rachète certaines pages troubles de son passé. Le prêtre ambitieux avait
certainement de la sincérité et du caractère. Presque
seul, en marge de toutes les autorités communales ou nationales, il osa
formuler, dès le mois de décembre 1792, le programme des revendications
populaires. Il osa demander au régime nouveau d’être aussi bon pour tes
masses que l’avait été l’ancien. II préconisa le retour à la réglementation,
parce que la réglementation avait été édictée par les rois dans l’intérêt des
pauvres. Il fut un des premiers à comprendre que les principes de liberté
absolue inscrits dans la législation nouvelle servaient l’intérêt d’une
classe au détriment de la société. Contre les propriétaires, détenteurs ou
accapareurs des subsistances et des denrées de première nécessité, il dressa
pour la première fois le peuple des sans-culottes qui ne possédaient que
leurs bras. Au reste, il n’est pas un homme à théories et à systèmes. Il voit
la misère, il dénonce les abus et il propose les remèdes empiriques que lui
suggèrent les faits. La
crise économique et sociale dont il a analysé les causes est si forte que les
dirigeants eux-mêmes, qui l’injurient, sont bien forcés de l’écouler et
d’adopter une à une ses solutions. Mais, chaque fois, ils ne cèdent que sous
la pression du dehors. Jacques Roux, qui se heurte au mauvais vouloir des
dirigeants, est réduit à l’action directe. Chrétien au fond de lame, il fait
figure d’anarchiste. Ses alliés, qui sont parfois ses rivaux, Varlet et
Théophile Leclerc, le premier par ses prédications sur les places publiques,
le second par ses déclamations furibondes, contribuent à exagérer le
caractère subversif de sa politique interventionniste. L’adhésion bruyante du
club féminin de Glaire Lacombe jette sur son groupe une nuance de ridicule
qui le discrédite. L’heure est venue pour Hébert d’endiguer le courant
populaire qui portait Jacques Roux. Hébert dépouille le prêtre de son
programme, mais, pour le réaliser, il change sa méthode. Il sollicite ta
collaboration des autorités au lieu d’user uniquement de l’intimidation et de
l’émeute. Les autorités cèdent pour éviter les troubles et, le jour même où
elles cèdent, elles commencent contre les Enragés une répression sans merci.
On ne se souvient plus des services qu’ils ont rendus, mais seulement des
peurs qu’ils ont provoquées. En même temps qu’on vote les lois qu’ils ont
inspirées, on les met en prison, on les juge et on dispersé leurs partisans.
Et, pour mieux les abattre, on tourne contre eux cette loi des suspects
qu’ils avaient réclamée, les premiers, contre les accapareurs. Ils furent les
premières victimes de la Terreur qui avait été leur œuvre. C’est peut-être une question oiseuse de se demander ce qui serait advenu, si les Enragés avaient pu s’emparer du gouvernement et s’ils avaient été chargés d’appliquer eux-mêmes les lois interventionnistes dont ils eurent l’idée. Ce furent leurs adversaires qui mirent en vigueur la législation qu’ils avaient réclamée. Les hébertistes, qui hériteront de leur popularité et de leurs troupes, ne pourront pas longtemps rester fidèles à leur primitive méthode de collaboration gouvernementale. Ils ne tarderont pas, eux aussi, à faire figure d’opposants et ils seront brisés à leur tour. |
[1]
Sur ce personnage, voir notre livre Autour de Robespierre.
[2]
Voir les n° 261 et 263 du journal de Jacques Roux, Le Publiciste de la
République française.
[3]
Disposition de J.-B. Fleury, qui présidait la section. Cette déposition est
datée du 21 août et a été reçue par le Comité de la section des Gravilliers (Arch.
nat., W, 20).
[4]
Est-ce l'imprimeur Chemin-Dupontès chez qui Jacques Roux avait édité auparavant
certains de ses sermons ? Chemin seconda activement Léonard Bourdon contre la
Commune le 9 thermidor. Il sera le fondateur de la secte des Théophilanthropes.
[5]
Déposition de Fleury,
[6]
Vérification faite, l’accusation portée par Truchon et ses acolytes se trouva
fausse La citoyenne Beaurepaire déclara qu’elle avait volontairement partagé
les fonds recueillis avec une veuve misérable que Jacques Roux avait
recommandée à sa charité.
[7]
Publiciste du 28 août (n° 271).
[8]
La délibération de la section, signée de Boursault, président, et de Binot,
secrétaire, est au dossier de Jacques Roux (Arch. nat., W., 20).
[9]
Arch. nat., W, 20.
[10]
Sans doute le fils de la veuve Petit, amie de Jacques Roux. La lettre est datée
du 23 août et elle porte le visa de l’administration de police du 24 août.
[11]
Cette phrase est soulignée par une autre plume, sans doute celle du juge ou
celle du policier.
[12]
L’observateur Mathieu Pannetier dénonça, dans son rapport du 24 septembre 1793,
le citoyen O’Reilly, ancien directeur de l’Opéra de Londres, comme un individu
suspect.
[13]
Je n’ai pas retrouvé cette affiche.
[14]
Moniteur, t. XVII, p. 505.
[15]
Le 3 septembre, la section de la Fontaine de Grenelle avait adopté une adresse
sur la réquisition et Bonnecarrère avait été chargé de sa rédaction (Archives
parlementaires, t. LXXIII, p. 442). On sait que Bonnecarrère avait été
considéré comme un agent de la Cour.
[16]
Archives nationales, AA, 14, L’extrait du procès-verbal des Jacobins
reproduit au folio 121 du registre du comité révolutionnaire des Gravilliers (Archives
nationales, F⁷ 2486) est signé de Lefort, président Letellier,
secrétaire, et Peganel, secrétaire.
[17]
Archives nationales, BB³ 81.
[18]
L’Ami du peuple, du 8 septembre.
[19]
TUETEY, Répertoire,
t. IX, n° 1294.
[20]
Le Publiciste, n° 264.
[21]
Le président Amar fit une réponse très sèche à la députation et Leclerc s’en
plaignit dans son numéro du 30 août.
[22]
Cette pétition avait déjà été soumise à la Commune le 14 septembre et la
Commune s’y était associée.
[23]
Contrat Social. Amis de la Patrie, Luxembourg, Arcis, Croix-Rouge, République,
Montagne, Bonconseil, Champs-Elysées, Panthéon, Finistère, Beaurepaire, Muséum,
Halle au Blé, Tuileries Marchés, Quinze-Vingts, Droits de l’Homme, Arsenal.
Maison Commune, Mail, Molière et Lafontaine, Gardes Françaises, Piques,
Mont-Blanc, Cité, soit 20 sections, plus les sociétés populaires suivantes :
Sans-Culottes, Jacobins, Cordeliers, Républicaines révolutionnaires, Hommes
libres,
[24]
Marc de Rev de Relhèze, fils de capitoul et maire de Toulouse, destitué comme
fédéraliste le 24 juillet 1793, condamné à mort par le tribunal révolutionnaire
le 11 messidor an II (22 juin 1794). (ADHER, Le comité des subsistances de Toulouse, p. VI.)
Claire Lacombe s’adressa à Chabot, parce que celui-ci avait habité longtemps à
Toulouse, dans un couvent de capucins. Peut-être l'y avait-elle connu, car elle
était originaire de l’Ariège.
[25]
Confirmé par la déposition de la citoyenne Jobé, le 'J prairial an II (Archives
nationales, F7 5750). La citoyenne Lemoce déposa le même jour qu’au sortir
d’une audience du Comité de Salut publie, Claire Lacombe avait dit de
Robespierre que c’était un lâche qui avait peur pour ses jours. « As-tu
remarqué comme il était pâle lorsque je lui parlais ? La peur ôtait peinte sur
sa figure ».
[26]
Je suis ici le récit que Claire Lacombe a écrit elle-même de la séance des
Jacobins (Arch. nat., T, 1001 ¹³).
[27]
« La société arrête à l’unanimité qu’elle écrira au Comité de Sûreté générale
pour l'engager à surveiller la dame Lacombe, accusée d’intriguer en faveur de
l’aristocratie » (Procès-verbal des Jacobins du 16 sept. 1793, signé J.-M.
Coupé de l'Oise, président ; Le Moÿ, Damesme, secrétaires ; Dubarran, Lefort,
T. Rousseau, Joseph Gaillard, etc. Arch. nat., F7 4756.
[28]
L’observateur Soulet déclare, dans son rapport du 17 septembre 1793, « qu’un
tas d'individus soudoyés ou aristocrates voudraient occasionner un mouvement en
engageant adroitement le peuple à se porter aux prisons ; surtout au Palais. »
(TUETEY, Répertoire,
t. IX, n° 1332),
[29]
TUETEY, Répertoire,
n° 1330. Le mandat d’arrêt est signé de Le Bas, Doucher, Saint-Sauveur, La
Vicomterie, Guffroy. Voulland et Vadier (Arch. nat., F⁴ 4775
⁴ⁿ).
[30]
Cette société étal 1 inspirée pur Léonard Bourdon et groupait les adversaires de
Jacques Roux, Voir, dans le dossier F¹ 4774 ¹⁶ des archives, une note du
comité de surveillance des Gravilliers où Nattay est accusé d’avoir fait tous
ses efforts pour détruire la société populaire du Vert-Bois.
[31]
Le 13 septembre déjà sur la réclamation de la section du Luxembourg, la Commune
avait arrêté que les citoyennes qui ne porteraient pas le signe vénérable de la
liberté ne seraient pas admises dans les édifices, jardins et monuments
publics. Le 21 septembre, à la demande des administrateurs de police de la
Commune de Paris, la Convention décréta que les femmes qui ne porteraient pas
la cocarde seraient punies, la première fois de huit jours de prison et, en cas
de récidive, réputées suspectes.
[32]
TUETEY, Répertoire,
IX, t. n° 1333.
[33]
Registre des délibérations du comité, BB ⁴ 81, à la date du 8 brumaire.
[34]
Voir l'histoire du club de femmes de Besançon, excellemment écrite par Mlle
Perrin, dans les Annales révolutionnaires, t. IX, et X.
[35]
Le Journal des Débats dit que leur députation était réduite à quatre
personnes.
[36]
Arch. nat., F⁷ 2178, registre du comité révolutionnaire de la section.
[37]
Elle ne fut remise en liberté que le 1er fructidor an III.
[38]
Archives nationales, F⁷ 4774 ⁹.
[39]
Moniteur.
[40]
Publiciste, n° ?67.
[41]
On lit, eu effet, dans le n° 268 du Publiciste. « Les scélérats, les
Tartuffe ! Ils se sont servis des Leclerc, des Varlet, des Jacques Roux, des
Bourgoin, des Gonchon, etc. Ils se sont servis des femmes révolutionnaires, des
Lacombe, des Colombes, des Champions, des Ardoins et de tant d’autres
républicains pour briser le sceptre des tyrans... pour renverser la faction des
hommes d’Etat. Aujourd'hui qu'ils ont entre leurs mains les clefs du Trésor
national, qu’ils disposent des principaux emplois civile et militaires et
qu’ils ont des satellites pour exécuter leurs ordres ; aujourd'hui qu’ils
tiennent le bâton de la République ; qu’ils sont gorgés du sang du peuple et
qu’ils sont armés de la foudre nationale, ils la font éclater impitoyablement
sur les patriotes incorruptibles qui ne s’agenouillent pas en esclaves devant
les nouveaux rois. »
[42]
Archives nationales, F⁷ 4775 ³, F⁷ 2480, F⁷ 4774
³⁶.
[43]
Je résume le procès-verbal (Arch. nat., W, 20). Le suicide de Jacques Roux est
également raconté dans l’Antibrissotin du 26 nivôse.