Si
Louise de La Vallière, abandonnée par le maître, se laissa séduire à l'idée
de plaire au monde par ses propres mérites et d'édifier la cour par l'exemple
d'une vie chrétienne, son illusion dut vite s'envoler. Le monde se détourna
en un clin d'œil. Tous les hommages, toutes les sollicitations, coururent à
Mme de Montespan, et cette habile femme ne les écarta pas, comme l'avait fait
en son temps sa discrète rivale. Louise fut aussi promptement renseignée sur
l'efficacité de l'exemple. Loin d'admirer son désintéressement, cette cour
sceptique affectait de croire qu'à l'imitation des favorites royales elle
visait à quelque bel établissement. On citait des noms de futurs maris, un
entre autres, le plus invraisemblable de tous, celui de Lauzun. Or, il
se trouva qu'à l'heure même du désenchantement de Louise, le besoin d'aimer
et d'être aimée s'empara un peu tardivement de Mademoiselle de Montpensier,
l'ambitieuse princesse qu'on appelait déjà la Grande Mademoiselle en 1661,
lorsqu'elle donnait des bals d'enfants à ses jeunes sœurs et à « la petite »
La Vallière. Elle avait passé quinze ans de sa vie à provoquer, à repousser,
à regretter toutes les demandes d'alliances royales et princières. Tel roi
d'Angleterre n'était pas assez solidement assis sur son trône ; tel de
Portugal pas assez galant ; ce duc de Lorraine laissait tomber les remparts
de sa capitale, tant et si bien qu'il ne restait plus de princes mariables ;
et c'est tout justement alors que l'infortunée ressentit un désir ardent
d'être mariée. Elle le raisonnait en elle-même, ce désir (car elle n'en
parlait à personne), et elle disait : « Ce n'est point une pensée vague ; il
faut qu'elle ait quelque objet ». Mais
elle ne trouvait pas qui c'était. Elle cherchait, songeait, ne trouvait
point. Enfin, après s'être bien inquiétée, elle s'aperçut que l'envahisseur
de son cœur, c'était M. de Lauzun. On
connaît Lauzun, l'amant de Mme de Monaco et de tant d'autres, l'homme qui
avait écrasé la main de sa maîtresse du talon de sa botte ; au demeurant,
cavalier spirituel, brave, fantasque, original. C'était tout naturellement ce
garçon à succès, tête légère et sans cœur, que la Grande Mademoiselle, en son
quarantième printemps, devait regarder comme le plus agréable ; rien ne
manquait à son bonheur que d'avoir un mari fait comme lui, qu'elle aimerait
fort, qui l'aimerait bien aussi. Pauvre princesse ! Personne ne lui avait
témoigné d'amitié. Elle voulait une fois en sa vie goûter la douceur d'être
aimée de quelqu'un, qui valût la peine qu'elle l'aimât. Puis il lui parut
qu'elle trouvait plus de plaisir à voir Lauzun et à l'entretenir ; que les
jours où elle ne le voyait point, elle s'ennuyait. Elle se persuada, cette
amoureuse quadragénaire, que la même pensée était venue à son adoré, mais
qu'il n'osait le lui dire[1]. Enfin, plaisir encore bien
grand, elle ne laisserait rien à ses héritiers, pas même l'espérance d'avoir
son bien. Elle
aborda insidieusement Lauzun, le consulta sur son idée de mariage, sur le
choix à faire. Lauzun, surpris, incertain, circonspect, en dit assez pour
laisser entendre qu'il avait compris, puis battit la campagne et répondit en
enfant aux enfantillages de la Grande Mademoiselle. Sur ces
entrefaites, la cour partit (28 avril 1670) pour -un voyage dans les Flandres. A Noyon, la
princesse pressa encore Lauzun de la tirer d'embarras dans cette grave
difficulté du choix d'un mari. Sa réponse fut équivoque ; il ne fallait
présentement songer qu'au voyage. Elle ne demanda rien de plus, « comptant M.
de Lauzun pour tout ». Les
ennuis cependant ne manquèrent pas. Près de Landrecies, le débordement d'une
rivière obligea la cour de s'arrêter dans une misérable maison. Un seul lit.
On jeta quelques matelas à terre : « Quoi, s'écria Marie-Thérèse, coucher
tous ensemble, ce seroit horrible ? » Le roi,
Mademoiselle plaidèrent la nécessité. La reine se mit sur le lit, mais de
manière à voir dans toute la chambre. « Vous n'avez qu'à laisser votre rideau
ouvert, lui dit le roi, non sans quelque aigreur, vous nous verrez tous. »
C'était vraiment une curieuse chambrée. Sur les matelas étendus, Monsieur
prit place le premier, puis Madame, puis le roi, puis Mademoiselle, à côté
d'elle Louise de La Vallière, et enfin Mme de Montespan[2]. C'est le voisinage de la
marquise qui répugnait à la délicatesse de Marie-Thérèse ; car, à cette
époque, la défiance de la reine ne pouvait plus s'égarer. Mais Louise,
épargnée de ce côté, ne jouissait pas pour cela d'une entière tranquillité.
Une autre jalousie se jetait sur cette infortunée, celle de la Grande
Mademoiselle. Cette triste passion, la fille de Gaston l'avait, pour prendre
son style, sentie se glisser dans son cœur en même temps que l'amour. Un «
sot bruit » avait couru que Lauzun voulait épouser la duchesse de La
Vallière. Quelques jours après cette mémorable couchée devant Landrecies, la
princesse ne put y tenir et questionna indirectement Lauzun. « Non, répondit
l'honnête personnage, quand on m'en a voulu donner l'idée, je m'en suis
toujours éloigné ; la seule chose à quoi je songerais, ce serait à la vertu
de la demoiselle, car s'il y avait la moindre faute, je n'en voudrais pas,
fût-ce vous, qui êtes au-dessus de tout[3]. » Et la grande innocente de
s'écrier : « Dites-vous bien vrai ? Si cela était, je vous aimerais encore
mieux. Moi, je suis sage. » Moins
de six semaines plus tard, ce grand amour donnait sa juste mesure. La cour
étant à Calais, on répandit la nouvelle que le roi d'Angleterre allait
répudier sa femme et qu'il voulait épouser Mademoiselle de Montpensier. Louis
en entretint la princesse, qui s'en remit à sa volonté. Monsieur trouvait le
projet fort beau, et Mme de Montespan que cela serait fort joli. La duchesse
de La Vallière ne disait rien. Marie-Thérèse, l'esprit le plus droit de toute
cette assemblée, donna seule le mot juste, aussi rapide que sincèrement
indigné : « Cela serait horrible », s'écria-t-elle. On ne fit pas attention à
ce que dit Marie-Thérèse. Quant à Lauzun, il déclara qu'il souhaitait
passionnément la fin de cette affaire ; et Mademoiselle de se persuader qu'il
ne pensait pas ce qu'il disait. Ce
projet à peine formé s'évanouit avant la fin du voyage. L'amour reprit
aussitôt la place de l'ambition. La jalousie suivit l'amour. Malgré la conversation
d'Avesnes, Mademoiselle ne se sentait pas rassurée sur les méchants bruits du
mariage de Lauzun avec la duchesse de La Vallière. Voulant se faire redire
qu'il n'en était rien, elle entreprit à ce sujet la sœur du Gascon, Mme de
Nogent : « N'avez-vous pas été bien fâchée des bruits que l'on a fait courir
de monsieur votre frère ? » Cette fine personne témoigna qu'elle en avait été
au désespoir[4]. Jamais
amoureuse ne nourrit jalousie plus persistante. De
retour à Paris, Mademoiselle rencontra le chevalier de La Hillière, simple
lieutenant aux gardes, dans la compagnie de M. de Lauzun. C'était un bien
petit personnage, mais il venait de dîner avec son chef, et la princesse ne
résista pas à l'envie de le faire parler. « Qu'est-ce, lui dit-elle, que ce
bruit que l'on fait courir, qu'il va épouser la duchesse de La Vallière ? —
Il m'en a parlé aujourd'hui même, répondit La Hillière, et il m'a dit en
propres termes : — Je suis enragé contre les gens qui font ce conte ; le roi
n'a jamais déshonoré personne ; il ne voudroit pas
commencer par moi. » Cette réponse fit un sensible plaisir à Mademoiselle[5], sans qu'elle cessât cependant
de jalouser Louise, alors que de la Montespan elle tolérait tout, trouvait
tout bien ; et il en était ainsi dans toutes les coteries de la cour. Pendant
que Mademoiselle ne songeait qu'à Lauzun, Lauzun qu'à cette fortune inespérée
; pendant que le roi était tout à Mme de Montespan et aussi à ses projets sur
la Hollande ; enfin quand La Vallière oubliée, dédaignée, exploitée, se
débattait entre ses idées de retraite et ses obligations de famille, la mort
donna à tout ce monde un avertissement aussi subit que solennel. Le
dimanche 29 juin 1670, Mademoiselle finissait à regret une de ses confidences
amoureuses à la sœur de Lauzun, quand, tout à coup, le duc d'Ayen, la
rencontrant, lui cria : « Madame se meurt ! » Aussitôt Mademoiselle de monter
dans son carrosse. Mais, à quelques pas delà, rencontrant
la reine : « Madame se meurt, lui dit Marie-Thérèse, Madame se meurt, et
savez-vous ce qu'elle a dit ? Qu'elle croyait être empoisonnée. » Les
mauvaises nouvelles vont vite. On savait déjà tous les détails. Madame était
dans le salon à Saint-Cloud, en bonne santé ; elle avait bu un verre d'eau de
chicorée, et un quart d'heure après s'était écriée qu'elle sentait un feu
dans l'estomac, qu'elle n'en pouvait plus. Il
n'était que trop vrai. La mort saisissait cette jeune princesse au moment où
il lui était permis de croire qu'échappée aux frivolités de la cour, elle
allait utilement employer tant de nobles qualités. Revenue d'Angleterre avec
toute la gloire et le plaisir que peut donner un voyage entrepris par amitié
et couronné d'un plein succès, « elle se voyait, à vingt-six ans, le lien des
deux plus grands rois du siècle[6] ». Un air de satisfaction
intime rehaussait encore sa beauté séduisante, et, en vérité, aux yeux les
moins prévenus, elle paraissait belle comme un ange[7]. Depuis huit jours, tout le
monde, hors Monsieur, rendait hommage à cette nouvelle puissance, puissance
fragile comme l'humanité. Madame avait subi de grandes fatigues au cours de
son voyage, beaucoup de veilles surtout. Son estomac, éprouvé par la
traversée, restait capricieux. On cite ce symptôme qu'elle ne pouvait plus
voir les fraises[8]. Cependant, toujours
imprudente, elle jouait avec une santé précaire, comme jadis avec sa
réputation, sauvée seulement à force de charmes, de grâces et de sincérité. On
était aux derniers jours de juin. La beauté du temps rappelait la splendeur
de l'admirable été de 1661, et les ombrages de Saint-Cloud avaient autant de
peine que naguère ceux de Fontainebleau à défendre leurs hôtes contre les
chaleurs excessives. Henriette se baignait malgré la défense des médecins, se
promenait tard au clair de lune, tout en se plaignant d'une douleur de côté.
Le matin de ce dimanche, 29 juin, quoique ayant bien passé la nuit, elle dit
à sa confidente, Mme de La Fayette, qu'elle se sentait chagrine ; mais quoi !
sa mauvaise humeur aurait fait les belles heures des autres femmes, tant elle
avait de douceur naturelle. On
ignorait alors, on sait exactement aujourd'hui ce qui chagrinait Madame. Il
lui fallait écrire à une princesse qui avait entrepris de la remettre en bons
termes avec Monsieur. Voici cette lettre, en quelque sorte testamentaire : «
J'étois, à mon retour, écrit-elle, persuadée que
tout le monde seroit content, et je trouve les
choses pires que jamais. » Elle avait été chargée par Monsieur d'obtenir de
Charles II : i° une confiance sur toutes les affaires entre Charles et lui,
accordée ; 2° une pension pour son fils, promise à peu près ; 3° le retour du
chevalier de Lorraine, à solliciter de Louis XIV ; demande déclinée ; mais
offre d'un asile en Angleterre pour le chevalier. En somme, la négociation
n'avait pas été infructueuse. Cependant « Monsieur ne veut entendre à rien
tant qu'on ne lui rendra pas le chevalier », et alors Madame de déclarer : «
On ne me fera jamais rien faire à coups de bâton. » « Le
seul parti que j'aie à prendre, ajoute-t-elle, c'est d'attendre la volonté de
Monsieur. S'il veut que j'agisse, je le ferai avec la dernière joie, n'en
pouvant avoir de véritable que je n'aie ses bonnes grâces. Sinon je me
tiendrai dans un silence proportionné à l'état où je serai auprès de lui,
attendant tous les méchants traitements dont il se pourra aviser, desquels je
ne me défendrai jamais qu'en taschant de ne pas lui
donner occasion par ma conduite de me blasmer. La
haine est volontaire ; l'estime ne l'est pas ; et j'ose dire que si j'ai
l'une sans l'avoir méritée, je ne suis pas absolument indigne de l'autre par
beaucoup d'endroits. C'est ce qui me console en quelque façon dans
l'espérance qu'il peut y avoir des retours favorables pour moi[9]. » Sur
cette pensée consolante, elle ferma sa lettre et se rendit à la messe. Au
retour, elle alla voir un artiste anglais (Lély ?), qui peignait sa fille et son
mari. Un peu fatiguée elle s'endormit. Pendant son sommeil, elle changea si
considérablement que Mme de La Fayette, qui ne l'avait pas quittée, et la
considérait à loisir, fut toute sur- prise et pensa qu'il fallait que l'esprit
de Madame Henriette contribuât fort à parer son visage, si agréable quand
elle était éveillée, si déformé quand elle était endormie ; effet peut-être particulier à ce jour, mais incontestable, car
d'autres personnes l'observèrent[10]. Madame,
à son réveil, vers cinq heures du soir, avait si mauvais aspect que Monsieur
lui-même en fit la remarque. La douleur de côté persistait. A ce moment, la
princesse demanda et reçut des mains de Mme de Gourdon un verre d'eau de
chicorée apporté par Mme de Gamaches. Elle le but et aussitôt se prit le
côté, s'écriant : « Ah ! quel mal ! je n'en puis plus ! » Elle rougit, pâlit,
devint livide. On l'emporta toute courbée. Mise en son lit, elle s'y tordait
de souffrances. Le premier médecin appelé, M. Esprit, crut à une colique ;
mais Henriette assura qu'on se trompait, qu'elle allait mourir, et demanda un
confesseur. Alors, se tournant vers son mari, elle l'embrassa, et avec une
douceur et un air capables d'attendrir les cœurs les
plus barbares : « Hélas ! Monsieur, vous ne m'aimez plus, il y a longtemps ;
mais cela est injuste, je ne vous ai jamais manqué. » Monsieur parut fort
touché. Si la jeune femme avait été imprudente, était-il lui-même exempt de
torts ? L'heure des expiations sonnait pour tout le monde, pour lui le
premier. Tout à
coup Madame s'écria « qu'on regardât à cette eau qu'elle avait bue, que
c'était du poison ; on avait peut-être pris une bouteille pour l'autre[11] ». Enfin elle était
empoisonnée, elle le sentait bien et demandait du contrepoison. A cette
exclamation, Mme de La Fayette ne put s'empêcher de porter les yeux vers
Monsieur et de l'observer avec attention. Nullement troublé, Philippe
commanda de donner de cette eau à un chien. Il en but lui-même[12]. Mais cette défiance
instinctive était déjà la juste punition des propos si inconvenants qu'il
avait tenus, que sa femme ne vivrait pas et qu'il devait — une sorcière le
lui avait promis — se marier deux fois ? Ce soupçon injurieux, la cour, la
France, l'Europe entière ne purent s'en défendre. La postérité même en a
gardé longtemps l'impression. Madame
persistait à se croire empoisonnée, et même elle croyait l'être à dessein.
Quand Sainte-Foi, premier valet de chambre de Monsieur, lui apporta comme
contrepoison de la poudre de vipère, elle déclara qu'elle la prenait de sa
main, parce qu'elle se fiait à lui[13]. Cependant
le curé de Saint-Cloud avait confessé Henriette. Après la confession, elle
dit à voix basse à son mari quelques mots qu'on n'entendit pas, mais qui
parurent doux et obligeants. Entrevoyant ce tribunal où l'on ne mentira pas,
elle affirma de nouveau qu'elle n'avait jamais manqué à ses devoirs d'épouse.
Se croyant empoisonnée, elle n'imagina point que son mari fût capable d'un
pareil crime. Sur
l'ordre de Philippe, on commanda à l'église de Saint-Cloud de sonner les
cloches, d'assembler les chanoines, de réciter les prières pour les malades.
Au bout de trois heures, arrivèrent deux autres médecins, Vallot et Gueslin. Sitôt que Madame vit ce dernier, en qui elle
avait beaucoup de confiance, elle lui dit qu'elle était empoisonnée et qu'il
eût à la traiter en conséquence. Toutefois, après consultation, les trois
médecins assurèrent « sur leur vie » qu'il n'y avait pas de danger. Monsieur
s'empressa de le dire à Madame. Elle répondit, comme la première fois, «
qu'elle connaissoit mieux son mal que les médecins,
et qu'il n'y avoit point de remède », et cela avec
la même tranquillité et la même douceur « que si elle eût parlé d'une chose
indifférente[14] ». Ses souffrances étaient
pourtant si vives qu'elle souhaitait de mourir. « Si je n'étois
pas chrétienne, je me tuerais ! » A onze
heures, le roi, la reine, Mme de Soissons et Mademoiselle de Montpensier
arrivèrent. Puis vinrent ensemble ces compagnes de chaîne qu'on appelait les
Dames, la marquise de Montespan et Louise de La Vallière. Le maréchal de
Grammont, père de M. de Guiche, entra en même temps. Ainsi se trouvèrent
réunis ou représentés, presque au complet, les personnages de toutes les
intrigues que nous avons racontées, si importantes jadis aux yeux de ces
vivants qui dévoraient la vie, si mesquines, si misérables devant la mort.
Quand Madame reçut ces visiteurs, ou plutôt quand ils entrèrent, on avait dû
l'enlever de son lit de parade. Elle était sur une petite couchette, toute
échevelée, le temps ayant manqué pour la coiffer de nuit, sa chemise dénouée
au cou et aux bras. Maigre comme elle était, le visage pâle, le nez déjà
retiré, on l'aurait crue morte, si elle n'eût crié : « Voyez l'état où je
suis ! » disait-elle. Tout le monde pleurait. A ce
moment suprême, les caractères parurent dans leur naturel. Le roi se montra
bon, sensible, avec un sang-froid supérieur à tout ce qui l'entourait. Madame
lui dit, et il ne l'ignorait pas, qu'il perdait la plus véritable servante
qu'il aurait jamais ; et comme, tout en l'encourageant, il la félicitait de
sa fermeté : « Vous savez bien, dit-elle, que je n'ai jamais craint la mort,
mais seulement de perdre vos bonnes grâces. » Louis alors lui parla de Dieu,
et, après l'avoir louée de son courage, il lui recommanda d'être humble
devant la mort ; puis, sur l'avis de Monsieur, il ordonna qu'on envoyât
chercher Bossuet[15], et qu'on préparât tout pour
faire communier la moribonde. A son départ, Henriette l'embrassa tendrement,
lui fit ses confidences dernières. Voyant ses yeux pleins de larmes, elle le
pria de ne point pleurer, parce qu'il l'attendrissait. Enfin elle ajouta : «
La première nouvelle que vous aurez demain sera celle de ma mort[16]. » Ce furent ses dernières
paroles au roi. Elle embrassa aussi la reine, qui s'était montrée bien bonne
pour elle, depuis son retour à une vie sérieuse. Seule Marie-Thérèse n'avait
rien à se reprocher dans les fautes de cette jeunesse trop vite fauchée. Mademoiselle,
qui n'aimait pas les malades, prétendit qu'elle pleurait si fort qu'elle
n'osait approcher de Madame. Elle fit son adieu du pied du lit. Au surplus,
elle s'était donné beaucoup de mouvement, ne
trouvant personne assez triste ; sans elle on n'eût pensé à rien. Au fond, sa
seule préoccupation était la conséquence que cet événement pouvait avoir sur
sa destinée. A peine rentrée à Versailles, et quand Henriette vivait encore :
« Voici ce qui nous déconcerte », dit-elle à Lauzun[17]. Le
maréchal de Grammont, venu aussi à Saint-Cloud, s'était approché. Madame,
comme pour s'excuser des chagrins qu'elle avait causés à ce brave homme par
ses intrigues avec son fils M. de Guiche, lui adressa un mot aimable et lui
dit qu'il perdait une bonne amie[18]. Elle ajouta qu'elle avait cru
d'abord être empoisonnée par méprise[19]. Ses idées, sans doute sur les
assurances des médecins, avaient alors pris un autre cours. Quelques
paroles furent-elles échangées entre Henriette et Mme de Soissons, 'tour à
tour son alliée, sa rivale, sa complice, mais complice pervertie de cette
jeune femme qui n'était que légère ? Y eut-il un mot d'Henriette à son
ancienne fille d'honneur ? Les Mémoires du temps n'en rapportent pas.
L'Italienne, on le vit bien plus tard, n'était pas femme à s'étonner pour un
empoisonnement ; mais quelles pensées durent assiéger l'esprit si droit,
quels sentiments envahir l'âme si tendre de La Vallière ! Elle voyait périr
subitement cette princesse, cause de sa fortune et de sa perte. « Ô
mort, que tes approches sont cruelles à celui qui n'a jamais pensé à toi et
qui a mis toutes ses espérances dans les biens de la terre ! Ô mort, que ta
vue est terrible à celui dont tu finis tous les plaisirs et dont lu commences
déjà les appréhensions et les peines ![20] » Ces réflexions, que Louise de
La Vallière avait faites, étant elle-même aux portes du tombeau, avec quelle
puissance ne devaient-elles pas lui revenir au spectacle de cette effrayante
agonie ! Enfin,
tout ce monde des visiteurs sympathiques ou indifférents se retira. Près de
Madame restaient son aumônier et M. Feuillet. Ce confesseur ordinaire, le
Révérend Père Chrysostome[21], était un capucin à belle barbe
et qui faisait bonne figure dans les voyages officiels ; mais à cette heure
il ne s'agissait plus de parade. Comme le Révérend se perdait dans des
exhortations confuses, la mourante le pria de laisser parler M. Feuillet ;
voulant toutefois ménager sa susceptibilité, cette princesse, aimable
jusqu'au plus fort de ses souffrances, ajouta doucement : « Vous parlerez
ensuite[22]. » Il était onze heures du
soir. Le
chanoine Feuillet était un homme austère, rude dans ses discours, à ce point
qu'on lui avait interdit la prédication ; au demeurant plein de zèle. Très
défiant quant à l'efficacité de ces repentirs de malades à demi morts, il ne
ménagea rien pour exciter la contrition dans l'âme de la jeune femme qui
allait bientôt paraître devant le souverain juge. «
Madame, votre vie n'a été que péché. Il faut employer si peu de temps qui
vous reste à faire pénitence. — Montrez-moi donc comment il faut que je
fasse. Confessez-moi, je vous en prie. » Alors, Henriette se confessa de
nouveau, et Dieu lui donna des sentiments qui surprirent le confesseur. Elle
parlait un langage qu'on n'entend point dans le monde et demandait avec
grande instance de recevoir le Seigneur. Pendant qu'on était allé prévenir le
curé, M. Feuillet reprit à haute voix : « Humiliez-vous, Madame, voilà toutes
les grandeurs anéanties sous la puissante main de Dieu. Vous n'êtes qu'une
misérable pécheresse, qu'un vaisseau de terre qui se casse en pièces, et de
toute cette grandeur, il n'en reste aucune trace. — Il est vrai, mon Dieu »,
disait la moribonde. Sa
douleur attendrissait ce prêtre sévère et arrachait à sa rigueur des paroles
de miséricorde qui consolaient Henriette et ramenaient une expression de joie
sur le visage de la mourante. Elle demanda la croix dont la Reine mère
s'était servie à sa mort et elle la baisa très humblement. L'ambassadeur
d'Angleterre, lord Montagu, était l'un des premiers accourus près de la sœur
du roi son maître. On le tenait en dehors des négociations entreprises contre
la Triple-Alliance. Madame cependant, par quelques confidences mesurées,
avait su rendre sa situation moins pénible. La mort la pressant, elle le
chargea de dire au roi Charles qu'en lui recommandant l'alliance française,
elle n'avait obéi à aucun intérêt contraire au sien, qu'elle pensait toujours
que son honneur et son avantage étaient conformes à ceux du roi de France[23]. Lord Montagu lui demanda alors
si elle ne croyait pas qu'on l'eût empoisonnée. Je ne sais si elle lui dit
qu'elle l'était, rapporte Mme de La Fayette ; mais je sçai
bien qu'elle lui dit « qu'il n'en falloit rien mander au roi son frère, qu'il falloit lui épargner cette douleur, et qu'il falloit surtout qu'il ne songeât point à en tirer
vengeance, que le Roi n'en étoit point coupable,
qu'il ne falloit point s'en prendre à lui. » M.
Feuillet, quoique l'ambassadeur s'exprimât en anglais, ayant entendu ce mot
de poison : « Madame, lui dit-il, n'accusez personne et offrez votre mort à
Dieu en sacrifice, et ne pensez à autre chose. » Montagu n'en renouvelant pas
moins ses questions, Henriette ne répondit plus que par un mouvement
d'épaules[24]. A ce
moment on apporta le saint viatique. - « Ô mon Dieu, s'écria Henriette, je
suis indigne que vous veniez visiter une misérable pécheresse comme moi. —
Oui, Madame, vous en êtes indigne, reprit aussitôt M. Feuillet, mais il vous
a fait la grâce de vous préparer. Anéantissez-vous devant ce Dieu
miséricordieux. » Après avoir communié, la princesse demanda qu'on - lui
administrât l’extrême-onction, pendant que la bonté divine lui laissait le
jugement libre. Puis, ses douleurs s'aggravant : « Eh ! mon Dieu, ajouta-t-elle,
qu'on me fasse la charité de me saigner au pied, car j'étouffe. — Laissez,
Madame, faire les médecins ; ne pensez plus à votre corps ; sauvez seulement
votre âme. » Cependant
les médecins trouvèrent à propos de saigner Henriette. Au moment où on lui
appliqua les saintes huiles, Feuillet, de plus en plus rude, disait à haute
voix : « L'Église demande à Dieu, Madame, qu'il vous pardonne tous les péchés
que vous avez commis, par tant de mauvaises paroles, par les plaisirs pris
aux parfums et aux senteurs, par tant de regards illicites, tant de rapports
et de médisance, de concupiscence, d'œuvres mauvaises, défendus par la loi de
Dieu. » Si, à raison du temps si court laissé à la jeune femme pour se
reconnaître, on n'ose blâmer la rudesse du confesseur, on ne peut non plus s'empêcher
de plaindre la patiente : « Mon Dieu, s'écriait-elle, ces grandes douleurs ne
finiront-elles pas bientôt ? Quoi, Madame 1 vous vous oubliez ! Il y a
vingt-six ans que vous offensez Dieu (la malheureuse avait juste vingt-six
ans), et il y a six heures que vous faites pénitence. Dites plutôt avec saint
Augustin : Coupe, tranche, taille ; que ce cœur me fasse mal ; que je
ressente dans tous mes membres de très sensibles douleurs ; que le pus et
l'ordure coulent dans la moelle de mes os ; que les vers grouillent dans mon
cœur, pourvu que je vous aime, mon Dieu[25]. » J'espère,
Madame, reprit Feuillet, que vous vous souviendrez de vos promesses. — Oui,
monsieur et je vous conjure, si Dieu me renvoie la santé, ce que je ne crois
pas, de me sommer de [les tenir. — Madame je vous puis assurer que vos peines
finiront bientôt. — A quelle heure Jésus-Christ est-il mort ? — A trois
heures. — Peut-être me fera-t-il la grâce de mourir à pareille heure. — Elle
prit alors le dernier breuvage que les médecins lui présentèrent. Enfin
Bossuet arriva. « Elle fut aussi aise de le voir comme lui affligé. » Depuis
quelque temps, Madame - cherchait à s'instruire près de lui. Pour reconnaître
ses soins, elle avait fait monter, à son intention, une émeraude en anneau.
Presque expirante, elle s'en souvint et commanda qu'on la lui donnât quand
elle ne serait plus ; mais ce commandement, elle l'exprima en anglais, «
conservant ainsi jusqu'à sa mort la politesse de son esprit ». Bossuet
lui prodigua les consolations de sa parole évangélique. Il récitait des actes
de foi, de confiance et d'amour. Un instant il s'arrêta : « Croyez-vous,
monsieur, lui dit l'agonisante, que je ne vous entende pas parce que je me
suis un peu retournée ? Continuez encore un peu. » Vers le milieu de la nuit,
les douleurs s'apaisèrent. Henriette crut avoir sommeil et demanda quelque
repos. Bossuet partit un instant « pour aller prendre l'air. » Mais peu de
temps après, la malade se retourna et voyant Feuillet : « — Je vous
prie, lui dit-elle, qu'on appelle M. de Condom ! M. Feuillet ! c'en est
fait de moi à ce coup-ici ! — Eh bien, Madame, n'ètes-vous pas bien aise d'avoir accompli en si peu de
temps votre course ! Après un si petit combat, vous allez recevoir de grandes
récompenses ! » Bossuet arriva ; mais elle ne parlait plus. Il commença à
dire les prières des morts pendant que Feuillet continuait de parler à
l'agonisante. « En deux ou trois instants elle rendit son âme à Dieu. »
Madame mourut assez doucement, le lundi 30 juin à deux heures et demie du
matin, à peine âgée de vingt-six ans. Les
esprits restèrent longtemps sous l'impression de ce tragique événement. Aux
premières paroles d'Henriette, à ce sentiment intime qu'elle ne cessa de
manifester qu'après avoir renoncé à la vie et pardonné à tout le monde,
l'idée d'un empoisonnement s'était si vite répandue, que sa maison entière
demanda qu'on procédât à l'autopsie du corps[26]. Monsieur y consentit. Le roi
délégua son médecin Vallot pour assister à l'opération[27]. On pria l'ambassadeur
d'Angleterre, dont on devinait les soupçons, d'y venir avec tels médecins et
chirurgiens de sa nation qu'il désignerait. L'examen fut fait avec soin. On
conclut d'abord à une mort naturelle par choléra morbus, puis, par voie de conséquence,
à l'inanité de tout soupçon de poison lent ou actif[28]. Il semble toutefois que les
Anglais ne furent pas aussi convaincus que les Français, et qu'ils
reconnurent des traces d'empoisonnement[29]. Presque aussitôt, un écrit
très injurieux pour Monsieur circula et fut attribué au médecin de lord
Montagu[30], qui le désavoua faiblement. En
effet, l'ambassadeur pensa toujours que Madame avait été empoisonnée[31]. Bien
que la constatation faite par les médecins français dût être tenue pour
vérité officielle, bien que le roi fût déjà décidé à présenter l'événement
sous ce jour favorable, de grandes inquiétudes subsistaient. Le procès-verbal
concluant à la mort naturelle n'était pas signé, que le soir du 30 juin,
Louis, après son coucher et la retraite de tous les courtisans, se releva,
fit appeler le lieutenant de ses gardes, Brissac[32], et lui commanda d'enlever
sur-le-champ, à Saint-Cloud, le premier maître d'hôtel de Madame[33]. Le coup de main réussit, et
quelques heures après le maître d'hôtel arrivait à Versailles. « Mon ami, lui
dit le roi, en regardant ce malheureux des pieds jusqu'à la tête, écoutez-moi
bien. Si vous m'avouez tout et me répondez vérité sur ce que je veux savoir
de vous, quoi que vous ayez fait, je vous pardonne, et il n'en sera jamais
question ; mais prenez garde à ne pas me déguiser la moindre chose, car, si
vous le faites, vous êtes mort avant de sortir d'ici. Madame n'a-t-elle pas
été empoisonnée ? — Oui, Sire. — Et qui l'a empoisonnée, et comment l'a-t-on
fait ? — C'est le chevalier de Lorraine qui a envoyé le poison à Beuvron et à
d'Effiat. » Alors le roi, accentuant ses promesses de grâce et ses menaces de
mort : « Et mon frère le savait-il ? — Non, Sire. » Le domestique de Madame
ajouta qu'on n'avait pas assez de confiance dans Monsieur pour l'associer à
ce complot qu'il eût empêché ou même dénoncé[34]. A ces mots, le roi poussa un
grand « ah ! » de soulagement. « Voilà, dit-il, tout ce que je voulais savoir
», et il fit secrètement renvoyer le maître d'hôtel. Si
jamais entretien dut être secret, c'est assurément celui qui précède. Entre
le domestique et Saint-Simon, qui nous a conservé ces paroles, il n'y a qu'un
seul intermédiaire, le procureur général Joli de Fleuri, et il est à noter
qu'un parent de Joli faisait partie, également à titre de procureur général,
de la maison de Monsieur. Autre élément de conviction : la seconde femme de
Monsieur, la princesse Palatine, si intéressée à se rendre un compte exact
des choses, donne en substance le même récit que Saint-Simon. D'Effiat, le
jour du crime, fut trouvé touchant au gobelet de Madame et le frottant avec
un papier. Un valet de chambre, que la Palatine eut à son service, entra
alors et dit à d'Effiat : « Monsieur, que faites-vous à notre armoire, et
pourquoi touchez-vous à la tasse de Madame ? » Sans se troubler, ce
personnage si suspect répondit qu'il crevait de soif, cherchait à boire, et
que, voyant la tasse malpropre, il l'avait essuyée[35]. Ce fait est considérable. La
tisane dont Monsieur, dont tant de personnes burent sans inconvénient, était
saine ; c'est la tasse qu'il eût fallu examiner. Peu
d'années après l'événement, lord Montagu écrivait au premier ministre
d'Angleterre que si Madame Henriette avait été empoisonnée « comme tout le
monde le croit », la France et l'Europe entière dénonçaient le chevalier de
Lorraine comme son empoisonneur. Tout
serait dit, et l'on n'hésiterait plus à se prononcer, si l'on ne savait pas
que ce qui motivait cette déclaration de l'ambassadeur, c'était la rentrée en
France du chevalier, sa nomination au grade de maréchal de-camp, sa faveur
renaissante auprès de Monsieur[36], si l'on ne savait pas que
d'Effiat non seulement ne fut pas inquiété, mais continua d'habiter au
Palais-Royal et à Saint-Cloud[37]. Une telle conduite renverse
tous les raisonnements. Elle donne à penser qu'on a voulu précisément enlever
toute base à une opinion définitive sur la véritable cause de la mort de
Madame. Mais, si l'on a pu empêcher la déclaration d'évidence, on n'enlèvera
jamais cette idée d'empoisonnement qui fut celle de la victime et de ses
contemporains. Une chose encore certaine, c'est que Monsieur n'était pas
coupable. Saint-Simon, la seconde Madame en ont donné plusieurs preuves.
Voici la meilleure de toutes. La Grande Mademoiselle, qui avait si peur de
mourir, aurait volontiers épousé Monsieur. Elle aurait voulu cependant qu'on
écartât tous ceux qui étaient auprès de lui[38]. Ainsi
périt, à la fleur de l'âge, cette aimable Madame. Elle quittait, la première,
cette scène du monde où elle avait fait monter à sa suite Louise de La
Vallière. Toutes les deux y avaient commis de grandes fautes. Seulement, pour
l'une, la survivante, l'expiation devait durer plus de la moitié de sa vie. Pour
l'autre, il semble que l'on eût ramassé en quelques heures les souffrances
d'une vie entière. Toutes les deux avaient, dans leur rapide carrière, en
apparence triomphale, éprouvé plus de peines encore que de plaisirs. Le
médecin Bourdelot, qui combattait l'idée de l'empoisonnement de Madame,
cherchant une cause probable, à cette mort, l'attribuait « à ses grands
chagrins[39] ». Quoi
qu'ils pensassent au fond, Louis XIV et Charles II échangèrent avec solennité
leurs compliments de condoléance. Le maréchal de Bellefonds porta à Londres
ceux du roi de France. Le roi d'Angleterre renvoya les siens vers le
commencement du mois d'août par le duc de Buckingham, qu'on reçut avec les
plus grands honneurs. Cette mission se termina au milieu de festins et de
parties de plaisir qui contrastaient singulièrement avec la cause funèbre du
voyage. Une de ces fêtes présenta même un caractère intime et piquant. Lauzun
invita l'ambassadeur et deux Anglais de sa suite à souper. Il leur avait
ménagé la société de trois dames aimables, « une de ses maîtresses », on ne
dit pas laquelle, la marquise de La Vallière, belle-sœur de la duchesse[40], et la grosse et toute réjouie
Mme de Thianges, cette sœur de la Montespan, dont la maxime était qu'on ne
vieillissait pas à table. Les convives festoyaient gaiement, au son de divers
instruments, quand on vit entrer dans la salle un cavalier masqué, tenant par
la main deux dames également en masque. Tous les trois se mirent à danser.
Alors les amies de Lauzun, entourant le trio, dansèrent à leur tour, et à
chaque figure affectaient d'admirer l'épée de l'inconnu, tant et si bien
qu'elles s'en emparèrent et l'offrirent au duc. Puis, le cavalier et ses
compagnes se démasquèrent, et l'on reconnut le roi et Mme de Montespan. On ne
nomme pas la seconde danseuse. Louis, s'approchant de Buckingham, lui dit
que, désarmé par ces dames, il le priait d'accepter son épée[41]. L'épée et le baudrier étaient
estimés plus de vingt mille écus[42]. Ainsi,
les bruits du mariage projeté entre Monsieur et Mademoiselle ne préoccupaient
pas beaucoup Lauzun, qui n'avait pu garder grand espoir. Moins de six heures
après la mort de Madame — on voit que des plus grands coups de tonnerre le
retentissement dure peu —, le roi, prenant Mademoiselle de Montpensier à
part, lui disait : « Ma cousine, voilà une place vacante ; voulez-vous la
remplir ? — Vous êtes le maître, Sire : je n'aurai jamais d'autre volonté que
la vôtre. » Le roi la pressa : « Y avez-vous de l'aversion ? » Mademoiselle
ne répondit pas. A l'en croire, elle était pâle comme la mort, confuse,
interdite ; et cependant Louis, qui ne manquait pas de coup d'œil, comprit
qu'elle approuvait son projet. « J'y travaillerai, dit-il, et je vous en
rendrai compte. » Peu de temps après, entre le 9 et le 22 octobre, la cour
étant à Chambord, Mademoiselle, Mme de Montespan, là
duchesse de La Vallière et M. de Lauzun jouaient des montres. Lauzun
affectait de ne pas regarder Mademoiselle, qui s'aperçut alors qu'un ruban de
sa manchette était dénoué. Elle pria le petit homme de le lui remettre en
état ; mais il ne se sentit pas assez adroit. La princesse dut accepter cet
office de sa prétendue rivale, Mme de la Vallière, et n'en trouva pas moins
très plaisantes les mines du rusé courtisan[43]. Il reprenait sa puissance à
mesure que diminuaient les chances du mariage avec Monsieur, toujours très
froid. (3-22
octobre 1670.)
Mademoiselle, qui voyait à cet automne tomber les feuilles de son quarantième
printemps, en revint à son idée de faire le bonheur de Lauzun. Le
séducteur déployait une habileté consommée, affectant de s'immoler
discrètement au succès des grandeurs promises à la future Madame. Cependant,
il se préparait d'utiles alliances. Il se rapprochait de la Montespan, grande
amie de Mademoiselle. Ami lui-même de toute personne en faveur, il avait
repris pour son compte à Saint-Germain le rôle tenu jadis par Colbert au
palais Brion. Quand la marquise mit au monde son premier enfant adultérin,
c'est Lauzun qui l'emporta sous son manteau à travers le petit parc et le
remit à la veuve Scarron. Il réussit encore par des prodiges d'adresse à
faire épouser la nièce de la favorite, Mlle de Thianges par M. de Nevers, cet
homme « si difficile à décider ». Grâce à son savoir-faire, Mme de
Montespan accomplissait partout des merveilles[44]. Très
charitable aux faiblesses des autres, il se disait pour lui très délicat ;
bien loin d'être capable de se déshonorer en épousant La Vallière, il faisait
remercier la famille de M. de Roquelaure, où on lui proposait une alliance. «
Il ne se marieroit pas ou
il se marieroit mieux[45]. » Mademoiselle ne tint pas
devant tant de sacrifices. Elle s'offrit à ce dédaigneux. Et pourtant,
lorsqu'on parla du mariage de Lauzun avec une personne encore inconnue, quel
nom vint d'abord sur toutes les lèvres ? Celui de cette duchesse de La
Vallière tant jalousée[46]. Mais où l'étonnement commença
et devint saisissant, c'est lorsqu'on fut certain qu'il s'agissait de
Mademoiselle de Montpensier. Comment
le croire ? Mademoiselle, petite-fille de Henri IV, cousine germaine du roi !
Comment ne le croire pas ? Le roi avait donné son consentement. Les chefs de
la noblesse venaient remercier Mademoiselle de l'honneur qu'elle faisait aux
gentilshommes français. Colbert lui-même proposait à Lauzun de régler ses
affaires, et aussitôt travaillait au projet de contrat[47]. Avec toute la cour, Louise de
La Vallière présenta ses compliments à Mademoiselle. Par bien des raisons,
Louise n'avait jamais souhaité pour elle un mariage où elle n'aurait apporté
ni honneur ni amour. Elle connaissait trop le futur mari pour se faire
illusion sur le succès de cette singulière union. Sans affectation, très
simplement, elle complimenta la sœur de Lauzun et Mademoiselle. « Vous faites
une belle chose, dit-elle à la princesse, j'en suis bien aise, M. de Lauzun
est de mes amis[48]. » Mademoiselle ne
répondit rien. Mais
les politiques ont le cœur moins tendre que les amoureuses de quarante ans et
l'humeur moins facile. Entre tous, Louvois[49] détestait « le petit homme ».
Déjà en i668, il avait obligé le roi à revenir sur une promesse faite à son
favori et à lui reprendre la charge de grand maître de l'artillerie.
Satisfaite en ce point, sa jalousie reparut avec une force nouvelle quand le
roi donna, en 1670, à Lauzun, chef habile, au moins à la parade, le titre de
général d'armée. Derrière ce mariage, favorisé par Mme de Montespan, et qui
plus est, par Colbert, le soupçonneux ministre flaira « une cabale[50] ». Dès le 8 décembre, il était
avisé, et commençait sa résistance[51]. Lauzun l'apprit et se sentit
perdu. Ce fut Mademoiselle (reconnaissons sa vaillance) qui lui rendit un semblant de
courage. Louis,
cependant, continuait d'autoriser les préparatifs du mariage, préparatifs
très lents. Alors une femme encore obscure essaya son génie. Mme Scarron,
jeune veuve d'un vieux poète podagre et future épouse d'un vieux roi, trouva mauvais
qu'une princesse sur le retour prît pour mari un jeune gentilhomme. Quelles
furent ses raisons ? Cette femme qui a tant écrit, discuté, analysé, n'a
jamais rien dit à ce sujet. Ce qu'on sait, c'est que cette alliée de Louvois
eut le talent d'effrayer Mme de Montespan. Elle lui fit voir « que la famille
royale et le roi lui-même lui reprocheroit le pas
qu'elle lui faisoit faire[52] ». La favorite se rendit aux
discours de sa confidente, et, à son tour, impressionna le prince, aux
moments les mieux choisis. En même
temps, surgit une opposition très forte et d'inspiration plus haute, celle du
prince de Condé, de Madame d'Orléans, belle-mère de Mademoiselle, et surtout
de Marie-Thérèse. La fibre royale de cette princesse tressaillit à l'idée
d'une telle mésalliance. Louis était aussi un roi de grande race. S'il avait
d'abord cédé, c'est peut-être qu'il ne lui déplaisait pas de voir son
ancienne ennemie se ridiculiser. Les conseils de ses ministres, son bon sens
naturel eurent vite modifié ses idées. Ses derniers scrupules s'évanouirent à
la lecture du contrat prodiguant à Lauzun des biens qu'on aimait à regarder
comme appartenant à la maison de France. Il retira donc sa promesse, et ce
projet de mariage, admiré la veille, parut grotesque le lendemain. Lauzun
se montra calme et plus que résigné. Mademoiselle voulut croire qu'il pleura.
Elle seule alors vit ses larmes. Au surplus, elle pleura, soupira, cria pour
deux. Ô misères de la vie mondaine ! Cette infortunée, qui n'avait voulu
recevoir ni sa belle-mère, ni sa sœur, envoya quérir Mme de Montespan et la
pria fort de parler au roi. La favorite, qui l'avait trahie, n'en sut que
mieux lui servir une réponse honnête. Louise de La Vallière, toujours bonne,
revint tout naturellement vers l'affligée et s'efforça de la consoler. « Je
vous plains fort, lui dit-elle, une personne de votre condition ayant fait
les pas que vous avez faits inutilement, cela est digne de pitié. Pour M. de
Lauzun, il n'est point à plaindre ; le roi lui donnera plus de dignités et du
bien plus que vous ne lui en donneriez ; et, quand il ne se marieroit pas, il n'en sera que plus heureux. »
Mademoiselle ne prit pas ces paroles sincères en bonne part. Plus de quatre
ans après, elle ne pouvait s'empêcher de dire : « Je trouvai ce discours fort
sot ! » Triste discours, en effet, pour ces oreilles d'amoureuse dépitée. Celui-là seul qui lit au fond des esprits féminins pourrait dire si, en parlant des avances de Mademoiselle à Lauzun, la duchesse s'était souvenue des sarcasmes dont on l'accablait depuis plus d'une année, pour des prétentions imaginaires. Louise n'avait pas le goût des représailles. Désenchantée, elle commençait à voir le monde comme il était r « Et quand M. de Lauzun ne se marieroit pas, il n'en sera que plus heureux ! » Cette jeune femme, réputée si légère, avait très bien jugé ce rusé personnage et deviné que les passions mobiles du petit vainqueur des dames s'accorderaient mal avec les liens indissolubles du mariage, du mariage dont elle se faisait une idée d'autant plus haute qu'elle se sentait à jamais exclue de cette terre promise, hors de laquelle on ne trouve ni la famille ni cette affection qui dure toute la vie. |
[1]
Mademoiselle DE
MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 92, 94. S'il est des observateurs qui aiment à étudier la pensée
d'une même personne appréciant après un' long intervalle les mêmes événements,
nous ne pouvons que les inviter à lire dans les éditions anciennes et dans
l'édition Chéruel le passage des Mémoires de Mademoiselle de Montpensier, où
elle raconte son aventure.
[2]
Mademoiselle DE
MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 111. — PELLISSON,
Histoire de Louis XIV, et Lettres historiques, t. I, p. 1 et
suiv. — BUSSY-RABUTIN, Correspondance,
t. I, p. 270.
[3]
Mademoiselle DE
MONTPENSIER, Mémoires,
t VI, p. 119, 120. Entre le 4 et le 6 mai 1670.
[4]
Mademoiselle DE
MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 136. Sur La Hillière, v. SAINT-SIMON,
Mémoires, t. V, p. 365, éd. Boislisle.
[5]
Mademoiselle DE
MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 159. La place qu'occupe cette anecdote indique que les préoccupations
de Mademoiselle ont dû être bien vives, car elle l'intercale au milieu d'un
récit tout différent.
[6]
Histoire de Madame Henriette, p. 165 et suiv. La première partie de l'Histoire,
celle que Madame dictait et parfois écrivait en 1669 (v. Préface de Mme DE LA FAYETTE), finit à
l'année 1665. La seconde partie commence en juin 1670.
[7]
Mademoiselle DE
MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 137.
[8]
Rapport du médecin Bourdelot.
[9]
RAVAISSON, Archives
de la Bastille, t. IV, p. 33, 36. GUY-PATIN,
Lettres, t. III, p. 364, parle dès le 8 avril 1670 de la médiation de la
princesse Palatine ; il la considère comme ayant alors réussi. Il se trompait.
[10]
D'ORMESSON, Journal,
t. II, p. S93.
[11]
Histoire de Madame Henriette, p. 174. Bossuet rapporte que Madame dit au
maréchal de Grammont qu'elle avait cru être empoisonnée par méprise. Lettre de
Bossuet : FLOQUET,
Etudes sur la vie de Bossuet, t. III, p. 416.
[12]
Lettre de Bossuet, ci-dessus citée.
[13]
Histoire de Madame Henriette, p. 175, 193. L'Etat de la France pour 1669, p. 405,
cite à l'article de la maison de Monsieur, parmi les quatre valets de
chambre, couchans en icelle, et ayans la clef des
coffres, Jacques Thivol, M. de Sainte-Foy. Il
servait aux gages de 600 livres par an. Son
quartier était d'avril à juin.
[14]
Histoire de Madame Henriette, p. 180, 183.
[15]
Histoire de Madame Henriette, p. 189.
[16]
M. Floquet s'est trompé en disant que Madame avait demandé tout d'abord : « Monsieur
de Condom ! monsieur de Condom ! » Études, t. III, p. 393.
[17]
Mademoiselle DE
MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 148.
[18]
Histoire de Madame, p. 189.
[19]
Lettre de Bossuet : FLOQUET,
Études, t. III, p. 418.
[20]
Réflexions sur la miséricorde de Dieu, t. I, 97, vingt-troisième
réflexion. — Depuis longtemps, Louise et Madame vivaient en très bons termes,
témoin cet article des Comptes de la maison du Roi, t. I, p. 359 : « Au
sieur Nocret, pour un portrait de Madame la duchesse
d'Orléans qu'il a fait et posé dans la cheminée de la petite chambre de Mme de
La Vallière. »
[21]
Jean Chrysostome d'Amiens, capucin, confesseur et prédicateur ordinaire. Etat
de la France pour 1669, t. I, p. 434.
[22]
Histoire de Madame Henriette, p. 192. Mademoiselle DE MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 147.
[23]
Lettres de milord Montagu au roi d'Angleterre, 15 juillet 1670. V. Histoire
de Madame Henriette, p. 214.
[24]
Histoire de Madame Henriette, p. 193.
[25]
Le récit de M. Feuillet, chanoine de Saint-Cloud, plusieurs fois publié, se
trouve au t. III, p. 407, des Mémoires intéressants pour servir à l'histoire
de France, par PONCET
DE LA GRAVE. Paris, 1789. La
Bibliothèque nationale, la bibliothèque de l'Arsenal en possèdent des copies
manuscrites supérieures au texte imprimé.
[26]
« Une maladie si courte et si douloureuse donnoit de
l'étonnement et pouvoit faire penser à quelque chose
d'étrange. Monsieur, à la prière de tous ses domestiques, donna ordre pour
ouvrir le corps. » Relation de la maladie, mort et ouverture dit corps de
Madame, par l'abbé BOURDELOT,
médecin, au t. III, p. 411, des Mémoires intéressants pour servir à
l'histoire de France, par PONCET DE
LA GRAVE,
Paris, 1789.
[27]
Vallot a donné son sentiment particulier sur les causes de la mort de Madame.
Il conclut à la mort naturelle. V. Archives de la Bastille, t. IV, p.
37.
[28]
« De toute cette relation et discours il résulte que Madame est morte de
choléra morbus, dont les causes sont très connues et l'effet ordinaire, ce qui
ne laisse aucun soupçon de poison lent ni actif ». (Relation par Bourdelot, ou
peut-être d'après Bourdelot.) On ne peut oublier que cet homme capable finit
par s'empoisonner par imprudence.
[29]
Bourdelot prétend qu'il fit « comprendre à l'ambassadeur d'Angleterre et à
Milord qui étoient là » que la cause de la mort était
naturelle. V. Relation citée, l. c., p. 417. Il se flatta peut-être. «
Madame, dit Bouillau, est morte de mort naturelle
suivant les médecins français, de poison suivant les Anglais. » Archives de
la Bastille, t. IV, p. 36.
[30]
Mademoiselle DE
MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 151.
[31]
Lettre de lord Montagu, Vie de Madame, p. 203. Le même écrivait dès le 6
juillet : « Je ne suis pas assez bon médecin pour juger si elle a été
empoisonnée ou non. »
[32]
SAINT-SIMON, Mémoires,
t. II, p. 226, sur l'année 1701. Nous avons contrôlé le récit de Saint-Simon.
L'État de la France pour 1669 indique bien Brissac comme lieutenant de la
compagnie d'Aumont. On pourrait dire que le service de M. d'Aumont ne
commençait qu'en juillet ; mais, par mesure de précaution, le roi faisait
servir le capitaine d'une compagnie avec le lieutenant d'une autre compagnie.
Brissac devait donc servir à un autre moment que son capitaine. V. État,
t. I, p. 162.
[33]
Selon Saint-Simon, ce maître d'hôtel s'appelait Purnon,
et c'est aussi le nom que lui donne l'État de la France, t. I, p. 438.
[34]
« Non, Sire, aucun de nous trois n'étoit assez sot pour le lui dire, il n'a point de secret ; il nous auroit perdus. » SAINT-SIMON,
Mémoires, t. II, p. 226, éd. 1865. La seconde Madame, dans sa Correspondance,
« a donné une bonne version de cette partie du complot. » Lorsque ces
coquins tinrent conseil entre eux pour décider que l'on empoisonnerait la
pauvre Madame, ils discutaient s'ils devaient ou non prévenir Monsieur. Le
chevalier de Lorraine dit : « Non, ne le lui disons pas, il ne saurait se taire
; s'il n'en parle la première année, il nous fera pendre dix ans après. » Et
l'on sait que ces misérables ajoutèrent : « Gardons-nous bien de le dire à
Monsieur, qui le « dirait au roi, qui nous ferait pendre. » Correspondance,
t. I, p. 252. V. encore ibid., t. II, p. 206.
[35]
Correspondance complète de Madame, t. II, p. 522. SAINT-SIMON, Mémoires,
t. II, p. 229. La Palatine entendit le valet de chambre ; Saint-Simon entendit
Joli de Fleuri, qui avait interrogé le maître d'hôtel de Madame Henriette. V.
note à la fin du volume.
[36]
Lettre de milord Montagu à milord Arlington, 5 février 1672, Histoire de
Madame Henriette, p. 218. « Si Madame a été empoisonnée, comme tout le
monde le croit, toute la France le regarde comme son empoisonneur. »
[37]
Correspondance de Madame la duchesse d'Orléans, t. II, p. 114.
[38]
Mémoires-anecdotes de Segrais, p. 101.
[39]
Relation citée, l. c., p. 417.
[40]
Le texte d'où nous tirons cette anecdote dit cousine. C'est une erreur.
[41]
Dépêche de M. de Iturieta, ambassadeur espagnol, du 4 septembre 1670. Il dit
tenir le récit de la fête de l'une des dames qui y assistèrent. Certes, on doit
se méfier des dames ! Mais cette fois, le reporter, bien qu'indiscret, était
véridique. V. la Gazette de France, septembre 1670.
[42]
C'est le chiffre donné par la Gazette. Le reporter de don Iturieta dit plus de
16.000 louis. Voici une preuve de la véracité de l'ambassadeur espagnol.
Lorsqu'il déclara que son diseur était une femme, il eut soin d'ajouter : « Je
crois qu'on peut retrancher quelque chose de cette évaluation. » Archives de
la Bastille, t. IV, p. 46.
[43]
Mademoiselle DE MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 167.
[44]
Mademoiselle DE MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 201. Mme DE
SÉVIGNÉ, Lettres,
t. II, p. 23 (10 décembre 1670), édition Hachette.
[45]
Mademoiselle DE MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 194.
[46]
Mme DE SÉVIGNÉ, lettre du 15
décembre 1670, t. II, p. 27, édition Hachette.
[47]
Mme DE SÉVIGNÉ, Lettres,
t. II, p. 23, édition Hachette, 1860.
[48]
Mademoiselle DE MONTPENSIER, Mémoire,
t. IV, p. 181, 241.
[49]
V. C. ROUSSET, Histoire
de Louvois, t. I, p. 237. Le savant historien traite Lauzun de « fou »
; ambitieux soit, mais non pas fou. Le récit de cette affaire ne rentre pas
assez dans notre sujet pour l'aborder ici. Disons, toutefois, qu'il faut se
tenir en garde contre Saint-Simon, qui a dû brouiller deux historiettes. Si
vers mars 1669 Lauzun eût traité la favorite comme il est dit dans les Mémoires
du duc, on ne comprendrait pas qu'il se fût lié à elle en 1671. M. Clément,
dans son ouvrage Madame de Montespan et Louis XIV, p. 33 à 55, a aussi
confondu les dates.
[50]
D'ORMESSON, Journal,
t. II. p. 605.
[51]
Mademoiselle DE MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 189.
[52]
Mémoires de M. de marquis de La Fare, p. 188, édition d'Amsterdam, 1643.