Quand
Madame Henriette monta sa maison, ou plutôt quand on la monta pour elle, on
était aux derniers jours de mars. Dès le 19 avril, elle quittait Paris et
rejoignait la cour à Fontainebleau. Louise de La Vallière commença donc sans
transition une nouvelle vie. Elle y entrait sans guide. Sa mère et son
beau-père Saint-Remi, petites gens encore chargés de deux filles et d'un
garçon, restaient au Luxembourg. Louise ne devait trouver pour toute
connaissance intime qu'une autre fille d'honneur, Anne-Constance de
Montalais, intrigante et de conseil dangereux. Cette enfant de seize ans
était donc expédiée à l'aventure, ayant pour unique sauvegarde une maîtresse
de même âge, aussi peu expérimentée qu'elle, de plus très téméraire et très
avide de succès mondains. Au
temps où le jeune Louis XIV n'éprouvait de sentiment que pour les grandes
filles, c'est-à-dire pour les belles et les hardies, il s'était montré très
antipathique à la princesse d'Angleterre[1]. On se rappelle le petit
esclandre au bal de l'hiver de 1655. Le roi craignait qu'on ne voulût lui
donner sa cousine pour femme. Déjà marié, son hostilité se manifestait encore
par des propos que sa politesse eût condamnés plus tard, demandant, par
exemple, à son frère ce qui le pressait tant d'épouser les os du cimetière des Innocents[2]. Quelle
fut sa surprise quand il revit Henriette, dans ce splendide été de 1661, de
jeune fille devenue femme, toute transformée, toute transfigurée ! Une
beauté de seize ans, des grâces juvéniles, un esprit vif, délicat, enjoué,
s'étaient épanouis en un jour. Madame se sentait aimée du monde et volontiers
rendait amour pour amour. On vit alors s'allumer ces yeux noirs, pleins du feu contagieux que les hommes ne sauroient
fixement observer sans en ressentir l'effet ; ces yeux qui, au dire d'un contemporain, paroissoient atteints du désir de plaire[3] et
que chacun pouvoit croire attachés sur lui seul. Le roi connut, en la voyant
de plus près, combien il avoit été injuste en ne la trouvant pas la plus
belle personne du monde. Il s'attacha fort à elle et lui témoigna une
complaisance extrême[4]. De son côté, Madame se souvenoit, avec quelque noble dépit, que le roi
l'avoit autrefois méprisée, quand elle avoit pu prétendre à l'épouser, et le
plaisir que donne la vengeance lui faisoit voir avec joie de contraires
sentiments qui paroissoient s'établir pour elle dans l'âme du roi[5]. Bientôt, elle eut conquis ce
dédaigneux. Moins de quinze jours après son arrivée à Fontainebleau, elle disposoit de toutes les parties de divertissement.
Elles se faisoient toutes pour elle, et il paroissoit que le roi n'y avoit de
plaisir que celui qu'elle en recevoit. C'étoit dans le milieu de l'été.
Madame s'alloit baigner tous les jours. Elle partoit en carrosse à cause de
la chaleur, et revenoit à cheval, suivie de toutes les dames habillées
galamment, avec mille plumes sur leur tête, accompagnées du roi et de la jeunesse
de la cour[6]. Après le souper, on montoit dans des calèches légères,
et, sur la pointe des herbes, au bruit des violons, on s'alloit promener une
partie de la nuit autour du canal[7]. Ces promenades dans les bois duroient jusqu'à deux ou
trois heures après minuit et avoient un air plus que galant[8]. La Gazette de France
suffit à peine à l'enregistrement de cette série de fêtes variées. Dès le 8
mai, le roi donne à Madame -un divertissement sur l'eau, dans les galiotes,
avec fanfares de trompettes. Après la promenade, grande collation. Le même
jour, arrivent la Grande Mademoiselle et la nouvelle princesse de Toscane,
Marguerite d'Orléans, cette amie de Louise de La Vallière qui, dans sa petite
sagesse, demandait d'être mariée avant qu'elle connût la cour de France et
ses délices. Elle la vit précisément dans toute sa splendeur. En effet, le
soir de son arrivée, promenade sur le canal, représentation de la Comédie
française[9]. Le lendemain, le roi,
Monsieur, Madame visitent Mademoiselle ; le soir, bal. Louise de La Vallière
y trouva sa jeune amie, jadis si gaie, maintenant toute triste de s'en aller
vers un mari inconnu, laissant pour jamais son cousin Charles de Lorraine.
Très mécontente, la princesse recevait assez mal les visiteurs[10]. Aussi, dès le lendemain de son
départ, ne pensait-on plus à elle. Le matin, chasse ; le soir promenade sur
le canal, que des concerts rendent tout à
fait délicieuse. On
fut si charmé que, deux jours après, Baptiste Lulli, gentilhomme florentin, reçut le brevet de surintendant et compositeur de la musique du roi. Lambert, autre célébrité
musicale, fut nommé maître de la même musique[11]. On remplaça alors les
trompettes par trente-six violons, instruments plus amoureux. Le 22,
promenade à l'Hermitage, le plus bel endroit
de la forêt. On y
servit une magnifique collation aux reynes, à
Madame, et autres princesses et filles d'honneur de la maison royale[12]. Cette nouvelle de la Gazette a
la valeur d'une date historique. Les filles d'honneur commencent à attirer
l'attention[13]. Il en était plusieurs de fort
jolies. Une gravure nous a conservé un portrait de Louise de La Vallière dans
un costume qui rappelle cette époque. Elle est habillée élégamment ; de
nombreuses plumes ornent sa coiffure. Le visage souriant respire la joie. La
jeunesse est ardente au plaisir, et les plaisirs abondaient. Le 25, Monsieur
donne un bal. Le 27, chasse, où l'on vit toutes
les dames en équipage fort leste[14].
Leste était le mot
à la mode. Quand on songe à la cour du grand roi, il vient des idées de pompe
et d'étiquette majestueuse. Tout au contraire, on n'y trouvait rien d'élégant
qui ne fût leste. Le mois
de juin, à l'exception de quelques orages, déploya plus de splendeur encore
que le mois de mai. Monsieur et Madame avaient dû se rendre le 30 mai à
Colombes, près de la reine d'Angleterre[15] ; mais, dès le 2 juin, ils
revenaient en hâte. Non moins empressé de revoir Madame, Louis allait
au-devant d'elle jusqu'à l'Hermitage. Le lendemain, il ouvrait le bal avec sa
belle-sœur[16]. Le 11, promenade, toutes les
dames à cheval. Le soir, bal donné par Monsieur. Le 14, bal champêtre, offert
par le duc de Beaufort. Le 18, régal organisé par le duc de Saint-Aignan[17]. Le 25, fête donnée par le duc
d'Enghien. Le soir du même jour, promenade aux flambeaux[18]. Quand
on ne sortait pas, on répétait un ballet de Benserade. Cette jeunesse, si
vivante et si vigoureuse, avait songé un instant à la représentation d'un
autre ballet qu'on danserait à cheval, le soir, aux flambeaux[19]. Là encore le roi et Madame
tenaient les rôles principaux. Aussi, au bout d'un mois, n'était-il plus
question que de l'attachement de Louis pour.sa belle-sœur, et il parut aux yeux de tous qu'ils avoient l'un et
l'autre cet agrément qui précède d'ordinaire les grandes passions[20]. Beaucoup
de fêtes, trop de fêtes, pensait la reine-mère ! La jeune reine, de son côté,
se plaignait de tous ces divertissements qui lui enlevaient le roi, qu'elle
eût voulu, qu'elle ne pouvait pas suivre partout. Anne d'Autriche, quoi
qu'elle en pensât, réprimandait doucement sa belle-fille de cette jalousie
naissante. Au fond, plus inquiète que Marie-Thérèse, parce qu'elle
connaissait mieux et son fils et le monde, elle tenta de ramener la cour à
Paris, sous prétexte d'y passer pieusement le temps du jubilé[21]. Son conseil, est-il besoin de
le dire ? ne fut pas pris en considération. Alors, elle insinua à Madame que
tant de danses et de promenades nocturnes nuiraient à sa santé. A ces avis
discrets, elle ajouta des remontrances plus directes[22], et aussi mal écoutées. Tout occupée de la joie d'avoir ramené le roi, la princesse ne gardait aucune
mesure. Les mouvements de son cœur la
portoient à suivre âprement tout ce qui ne lui paraissoit pas criminel, ni
entièrement contraire à son devoir, et qui, d'ailleurs, pouvoit la divertir[23]. Le 27
juin, la reine-mère, pour mettre quelque
interruption aux promenades, emmena Madame à Villeroy et à Dampierre, chez la duchesse de
Chevreuse[24]. Le roi accompagna sa
belle-sœur jusqu'à quatorze lieues de Fontainebleau[25]. Au retour, même exubérance.
Alors, les représentations d'Anne d'Autriche s'accentuèrent. Monsieur y
joignit les siennes. La mère d'Henriette fut elle-même appelée[26]. On parla si fortement au roi et à Madame, qu'ils commencèrent à
ouvrir les yeux, et
résolurent de faire cesser ce grand bruit, par
quelque moyen que ce pût être. Ils convinrent entre eux que le
roi feroit l'amoureux de quelque personne de la cour, et, jetant les yeux sur les
dames et sur les jeunes filles qui
paroissoient les plus propres à ces desseins, ils choisirent Mlle de Pons, Mlle de Chimerault,
filles de la reine, fort coquettes, et enfin Louise de la Vallière[27]. C'est vers la fin de la
première semaine de juillet que fut ourdi le complot. La
voilà livrée aux jeux de cette cour, cette toute naïve
Louise de La Vallière, et livrée par la princesse, dame et gardienne de son
honneur, qui se sert d'elle comme d'un jouet. Que dire, si ce n'est
qu'Henriette avait le même âge que sa jeune suivante, âge cruel où l'on
ignore la pitié comme la prudence ? Aussitôt
conçu, ce plan fut exécuté. Tout d'abord Mlle de Pons, vertu médiocre, échappa
malgré elle à cette feinte galanterie. Sous prétexte d'une maladie de son
parent le maréchal d'Albret, on expédia la jeune fille à Paris. Le roi, qui
déjà savait tout, éventa la ruse. Son front se rembrunit, et l'on comprit que
le temps ne durerait pas, où l'on pourrait s'opposer à ses volontés[28]. Mlle de
Chimerault, plus habile, très experte dans l'art de la défense qui comporte
des sorties, reçut l'attaque du roi, y répondit ; mais, comme ce siège ne
servait que de diversion, on le mena lentement. Restait
Louise de La Vallière. Elle
atteignait à peine sa dix-septième année. Elle était grande, fine de taille[29], un peu maigre, de cette
maigreur souple qui sied à la jeunesse, comme aux jeunes arbres. Ses
détracteurs, car elle en eut bientôt, la trouvaient menue et qu'elle ne
marchait pas de bon air[30]. Mais une femme en général bien
sévère et qui ne l'aimait pas, Mademoiselle de Montpensier, avoue « qu'encore qu'elle fût un peu boiteuse, elle dansait bien[31] ». — « Elle boitait légèrement, dit une autre femme, mais cela ne lui alloit pas mal[32] ». En amazone, « elle
étoit de fort bonne grâce ». Une
tête charmante ornait ce corps sain et vigoureux. Seul point défectueux : ses
dents n'étaient pas belles[33], mais le teint était blanc[34] ; les yeux bleus[35] possédaient un charme qu'on ne
peut décrire[36]. « Ils avoient beaucoup de
douceur, et leur regard étoit tendre[37]. » Des cheveux alors d'un blond
argenté encadraient ce gracieux visage[38]. Le son de sa voix, d'une
douceur inexprimable, restait dans l'oreille, et ceux qui l'entendirent ne
l'oublièrent jamais. Un bon peintre a terminé ce portrait par une touche qui
lui donne l'expression définitive. « Elle n'étoit pas, dit-il, de ces beautés
toutes parfaites qu'on admire souvent sans les aimer. Elle étoit fort
aimable, et ce vers de La Fontaine : Et la grâce, plus belle encor que la beauté, semble
avoir été fait pour elle[39]. » Cependant
Madame Henriette, confiante dans ses attraits conquérants, goûtant d'avance
la joie des succès assurés, vivant hors d'elle-même et hors de toute réflexion,
n'avait pas aperçu le charme intime et la beauté persuasive de sa fille
d'honneur. Louis ne devait pas être moins surpris que sa belle-sœur. Les
Mancini lui avaient révélé la passion agressive, autoritaire, tyrannique.
Henriette, avec plus de grâce, affectait le même air impérieux. Quel
contraste dans Louise, douce, naïve, sincère ! Deux
mois à peine s'étaient écoulés depuis l'arrivée à la cour de l'innocente
Tourangelle, mais deux mois où les jours se comptaient par les fêtes. A
Paris, l'habitation dans des palais différents aurait facilement ménagé
quelques heures de calme et de réflexion. A Fontainebleau, on vivait presque
en commun du matin au soir et dans une sorte d'étourdissement continuel.
Trouble plus grand encore pour une jeune imagination, toutes ces fêtes
avaient déterminé comme une explosion nouvelle de galanterie. Le roi était le
galant de Madame ; de même, les filles de Madame avaient pour galants la fine
fleur des gentilshommes. Cette petite La Vallière, à qui naguère on eût quasi
contesté son titre de demoiselle, recevait les hommages de seigneurs très
titrés. « Tout le monde la trouvait jolie. Plusieurs jeunes gens prétendoient
se faire aimer d'elle, » un entre autres, le comte de Guiche. Enfin, Louise,
depuis trois mois, vivait dans cette atmosphère romanesque, si propre à la
formation de rêves merveilleux, qu'une réalité prochaine allait dépasser de
beaucoup. Sans
remonter jusqu'au passage du roi à Blois, Louise avait souvent aperçu ce
jeune prince depuis son retour à Paris, surtout quand elle accompagnait au
Louvre Marguerite d'Orléans. Maintenant, elle le voyait tous les jours, poli,
empressé, désireux de plaire, parlant peu toutefois et ne sortant jamais tout
à fait de la majesté royale. Très élégant de sa personne, il avait une
prestance héroïque. Ses lèvres un peu dédaigneuses n'en donnaient que plus de
prix à ses paroles, et ses regards étaient pénétrants[40]. On pouvait facilement le
prendre pour un de ces rois de roman, pour un de ces princes de l'Astrée qui
épousent des bergères. Or, Louise de La Vallière avait lu beaucoup de romans. Louis,
suivant ses conventions avec Madame, commença par jouer la comédie près de la
jeune fille ; mais le comédien disparut vite quand le roi éprouva cette
sensation jusqu'alors inconnue — car, marié trop jeune, il n'appréciait pas
assez l'affection profonde de sa femme —, de se sentir aimé sans calcul, sans
politique, enfin de se sentir aimé pour lui-même. Tout ce
qu'on a raconté de confidences entre les jeunes filles d'honneur, d'aveux
échappés devant la statue de Diane, entendus par le prince surpris et charmé,
toutes ces anecdotes n'ont d'autres garants que des- chroniques très
suspectes[41]. Que Louise ait aimé
spontanément ce jeune homme aimable, qu'elle lui ait présenté un cœur tout
ouvert à son amour, on n'en peut pas douter. Assurément, l'innocente ne
s'offrit pas. Peut-être même eût-elle à jamais gardé son secret, si par une
déclaration le roi n’eût provoqué son aveu. La
sincérité l'emporta vite sur la feinte. Pour suivre le plan élaboré entre lui
et Madame, le roi aurait dû prodiguer les démonstrations. Se sentant séduit,
ce séducteur se cacha, dissimula ses recherches. Plus il faisait de progrès
auprès de la jeune fille, et plus il se montrait réservé. Il ne la voyait pas
chez sa maîtresse ni dans les promenades du jour ; mais, le soir, « il
sortoit de la calèche de Madame et s'alloit mettre près de celle de La
Vallière, dont la portière étoit abattue, et, comme c'étoit dans l'obscurité
de la nuit, il parloit avec beaucoup de commodité[42] ». N'y eut-il aucun entretien
de jour ? Il serait difficile de le croire. La chronique en a conservé plus
d'un, œuvres peut-être d'esprits inventifs, mais qui indiquent toutefois
comment l'imagination se représentait alors ces entretiens de prince à
bergère. Le prince est poli, insinuant, et parle comme un héros de Mme de
Scudéry. On prête plus de naturel à Louise, assez souvent même un air de
mélancolique tristesse : « Hélas ! dit le roi, je parle en homme heureux, et
peut-être ne le serai-je de ma vie. — Je ne sçais pas ce que vous serez,
réplique La Vallière, mais je sçai bien que, si le trouble de mon esprit
continue, je ne serai guère heureuse. » La pluie survint. Le roi, de son
chapeau, couvrit la tête de la jeune fille et la ramena au palais, bravant
les yeux jaloux de la cour. « L'inquiétude de l'amour paraissoit seule sur
son visage ; sur celui de La Vallière, on remarquoit une grande tristesse[43]. » Quand
on lit les récits, même contemporains, de ce roman royal, il semble qu'ils
correspondent à de longs mois. L'histoire a peine à trouver deux courtes
semaines. On
était au lendemain de la représentation du ballet de l'Impatience ; on
chantait ces vers : Sommes-nous pas trop heureux, Belle Iris, que vous en
semble ? Nous
voici tous deux ensemble, Et
nous nous parlons tous deux ; La
nuit de ses sombres voiles Couvre
nos désirs ardens, Et
l'amour et les étoiles Sont nos secrets confidens. Mon
cœur est sous votre loi Et
n'en peut aimer une autre ; Laissez-moi
voir dans le vostre Ce
qui s'y passe pour moi. La
nuit est calme et profonde, Nul
ne vient mal à propos. Le
repos de tout le monde Assure
nostre repos[44]. On
mettait en pratique les instructions de Benserade. Le roi
occupait à Fontainebleau les grands appartements situés sur le côté gauche de
la cour de l'Ovale. Du même côté et dans le pavillon dit des Princes, à
l'entrée de cette même cour, était l'appartement de Monsieur, frère du roi,
de Madame Henriette et de ses filles d'honneur. Ce pavillon, bâti par Henri
IV, présentait, comme décoration intérieure, un caractère spécial. Tandis que
l'art païen de la Renaissance régnait en maître dans tout le reste du
château, on trouvait là un singulier mélange de sujets. A côté de Jupiter
enlevant Europe, ou conversant avec Callisto, on voyait Ève tendant la pomme
à Adam, puis les deux époux chassés du paradis terrestre[45]. Ce ne fut pas l'exemple
biblique qui frappa le plus les jeunes hôtes de 1661. Il est
de règle absolue dans la poétique universelle, quand il s'agit de héros
passionnés et de femmes au cœur tendre et sincère, d'amener ces amants, à
l'heure décisive, dans des grottes mystérieuses, un de ces jours où les
éléments déchaînés semblent conspirer leur perte. Plus d'un biographe de
Louise de La Vallière a tenté de la dérober au moment de l'épreuve sous cette
mise en scène virgilienne. Artifice vain et dangereux. Rien ne mérite plus le
pardon que la confession ingénue de la faute. Toujours, et c'est sa première
peine, l'amour défendu est condamné à revêtir une forme vulgaire. Louis XIV
subit la loi commune. Il avait alors un favori, le comte de Saint-Aignan[46], singulier personnage, qui
faisait le jeune homme et touchait à la quarantaine, père de trois grands
garçons et de trois filles abbesses[47]. Homme spirituel d'ailleurs,
poète au besoin[48], brave toujours, il avait gagné
la faveur du jeune Louis par une complaisance indigne de sa situation, et
surtout de son âge. Point à noter, Saint-Aignan avait fait partie de la
maison militaire de Gaston d'Orléans, et tout le petit monde de la cour de
Blois lui était familier. On l'avait nommé depuis gouverneur de Touraine.
C'était, pour prendre un mot honnête, l'intermédiaire désigné. A ce moment,
en sa qualité de premier gentilhomme de la chambre, il occupait un de ces
petits logements qui dans les palais contrastent si singulièrement avec la
splendeur des grands appartements. Saint-Aignan prêta sa chambre[49]. On
touche au seuil qu'on ne doit pas franchir ; mais, jetant un regard sur ce
passé qui ne revient pas, et sur cette innocence à jamais perdue, on est
obligé de constater que la résistance fut courte et la victoire prompte.
Louise, arrivée à Fontainebleau en mai, était avant la fin de juillet la
maîtresse du roi. Encore une fois, nous sommes au lendemain du ballet de l'Impatience
: Courons
où tendent nos désirs ; Il
n'est pas toujours temps de goûter les plaisirs ; On
ne peut en avoir trop tôt la jouissance : Il
faut presser pour estre heureux, Et
l'amour est sans traits, et l'amour est sans feux Quand
il est sans impatience. La
reine-mère, bien qu'ayant renoncé à tout pouvoir politique, veillait sur son
fils. Elle avait constaté d'abord avec inquiétude qu'il se relâchait fort sur
la dévotion, qu'il ne se confessait ni ne communiait plus si souvent[50]. La familiarité entre Louis et
Henriette l'aveugla sur le véritable péril. Quand elle apprit la liaison du
roi avec Louise de La Vallière, un peu avant le 20 juillet, le mal était
fait. Alors, elle reprocha à sa nièce de ne s'être pas opposée aux soins que
le roi rendait « à cette fille ». Elle tourna également l'esprit de Monsieur,
« qui prit au point d'honneur que le roi fût amoureux d'une fille de Madame
». Madame, et cela concorde bien avec ces rapides métamorphoses, n'avait rien
tenté pour retenir son galant[51]. Si, au fond de son cœur, elle
sentait quelque colère, c'était, toutes les femmes se ressemblent, non contre
l'homme qui l'abandonnait, mais contre la pauvre fille qu'elle avait en
quelque sorte jetée dans l'abîme. Pour le moment, entrée déjà dans une autre
intrigue, ce qui l'ennuyait le plus, c'était d'être sermonnée. Parmi les
avantages de l'hymen, elle avait surtout compté la suppression des
réprimandes de sa mère. Celles de sa belle-mère lui parurent intolérables, et
ses réponses se sentirent de sa mauvaise humeur. Anne
d'Autriche s'adressa alors directement à son fils. Elle lui représenta ses
devoirs envers Dieu, envers l'État ; qu'il devait craindre que beaucoup de
gens ne se servissent de cet attachement pour former des complots et lui
nuire un jour. Elle le pria aussi de l'aider à cacher sa passion à la reine,
dont l'état exigeait de grands ménagements. Louis estima ce second conseil[52]. Quant au premier, il le tint
pour superflu. Il était déjà persuadé de l'idée qu'il saurait concilier ses
caprices et ses devoirs[53]. Mazarin lui avait donné sur ce
chapitre une forte instruction, et, Mazarin étant mort, le roi suivait
d'autant plus volontiers ses préceptes[54]. La mère
de Louise ne parut pas. Une chanson du temps lui prête un vilain calcul[55]. On ne s'arrêterait pas à ces
odieuses imputations, si la conduite ultérieure de cette médiocre personne ne
les rendait vraisemblables. Le beau-père, M. de Saint-Remi, bonhomme fait à
servir, n'avait pas l'esprit très juste[56] ; on le verra bien par la
suite. Ce qu'on peut dire de mieux à la décharge de ces tristes parents,
c'est que, restés au Luxembourg, ils ignoraient ce qui se passait à
Fontainebleau. Tout le monde, d'ailleurs, se taisait devant le roi. Si les
conseils et les réprimandes d'une mère firent défaut à Louise de La Vallière,
les remords de sa conscience parlèrent vite, pour ne cesser jamais de se
mêler, c'est elle qui l'a dit, à ses plus grandes délices. Aux remords s'ajoutèrent
dès le premier jour ces piqûres mondaines, d'autant plus cruelles qu'on tient
à honneur de n'en pas paraître touché. Parmi
les jeunes seigneurs qui entouraient Louise de leurs hommages, se trouvait
Loménie de Brienne, garçon aimable, un peu fat, au demeurant incapable de
causer de parti pris de la peine à personne. Il disait toujours quelques
douceurs à la jeune fille et s'en croyait favorablement écouté, ignorant, le
malheureux, qu'il se posait ainsi en rival de son maître[57]. Il avait précisément fait
venir de Venise un peintre, Français d'origine, mais qui d'ordinaire
demeurait à l'étranger, et qu'on nommait Le Febvre. Ce peintre avait la vogue
pour les portraits de moyenne grandeur, où l'on représentait les seigneurs et
les dames en dieux ou en déesses, ou sous l'habit des saints leurs patrons[58]. Tenté par l'occasion,
l'impertinent proposa à Louise de La Vallière de la faire peindre en
Madeleine. Comble de mésaventure, pendant qu'il exposait ce beau projet à la
demoiselle d'honneur, pécheresse encore ignorée, le roi vint à passer.
Brienne alors de développer son idée, de faire remarquer à Louis la beauté de
la jeune fille : « Elle a quelque chose des statues grecques qui me plaît
fort. » Louise rougit et le roi s'éloigna sans répondre. Mais, le soir même,
Brienne aperçut le souverain qui, dans l'embrasure d'une fenêtre, parlait
avec beaucoup de vivacité à sa nouvelle maîtresse. Comprenant alors sa bévue
du matin et cherchant à la réparer, il demanda à Mlle de La Vallière si elle
consentait toujours à se faire représenter en Madeleine. Louis, qui l'avait
entendu, revint sur ses pas : « Non, elle est trop jeune pour être peinte en
pénitente ; il faut la peindre en Diane. » A ce
coup, Brienne ne dormit pas de la nuit. Dès le lendemain, il était chez le
roi, qui le fit entrer dans le cabinet dit de Théagène et de Chariclée[59], ferma la porte au verrou,
puis, se retournant vers le courtisan étonné et inquiet : « L'aimez-vous,
Brienne ? lui dit-il poliment et sévèrement, sans même nommer Louise. — Qui,
Sire ? Mlle de La Vallière ? — Oui, c'est elle dont j'entends parler. » Alors
Brienne de s'excuser, d'avouer qu'il sentait du penchant pour la jeune fille,
puis, pensant se justifier et perdant la tête, d'alléguer qu'il était marié.
Louis, sans s'arrêter à cette étonnante excuse et tout à sa passion : «
Brienne, vous l'aimez ! pourquoi mentez-vous ? — Ah ! sire, elle vous plaît
encore plus qu'à moi, et vous l'aimez. — Que je l'aime ou que je ne l'aime
pas, laissez là son portrait, et vous me ferez plaisir. » Louise
de La Vallière n'en fut pas moins représentée en Diane ; le peintre mit
Actéon dans le paysage. « Et le pauvre Actéon, dit encore Brienne, c'était
moi, malice innocente que le roi me fit[60]. » Guiche,
fils du maréchal de Grammont, se montra moins accommodant que Brienne.
C'était le jeune homme de la cour le mieux fait et le plus spirituel, brave
et portant déjà les marques de sa bravoure[61], un peu vain, par malheur, et
avec un air méprisant qui ternissait son mérite[62]. Marié trop jeune à une
charmante femme, il affectait de la dédaigner. A ce moment, il honorait La
Vallière de ses soins. On se demanda même si Guiche serait d'humeur à
souffrir un rival. Cela nous étonne ; mais il faut se reporter à la jeunesse
de Louis, élevé familièrement avec Tréville, Rohan, Lesdiguières, Brienne[63], avec ce même Guiche. Ces
jeunes seigneurs, ne trouvant pas dans leur camarade toute la vivacité qu'ils
avaient eux-mêmes, s'étaient imaginé qu'il manquait d'esprit. De là, dans
leur pensée, une espèce de mépris pour le roi, qui s'en aperçut 'et conçut
une secrète rancune, dont l'effet persistant ruina la fortune de ces téméraires
compagnons[64]. Enfin, soit crainte, soit
caprice, soit souvenir de son rôle dans le ballet royal de l'Impatience[65], Guiche se décida à se retirer
devant son rival couronné ; mais, l'imprudent s'exécuta de mauvaise grâce, «
en disant des choses assez désagréables » à Mlle de La Vallière. Puis, comme
à vingt ans rien ne dure, le lendemain, par une sorte de chassé-croisé, il
prenait auprès de Madame Henriette la place laissée vide par le roi, et avec
tant d'affectation que Louis, qui n'admettait point qu'on se réglât sur son
exemple, lui donna l'ordre de quitter Fontainebleau[66]. Sur ce, l'ambassadeur vénitien
(ces diplomates ont souvent montré plus de finesse) écrivit à son
gouvernement que l'union de la famille royale allait toujours s'affermissant[67]. Enfin,
on représenta le ballet des Saisons. Louise de La Vallière y figura à côté de
Mlle de La Motte-Argencourt, la dédaigneuse de 1658, de Mlles de Chimerault
et de Pons, les dédaignées de la veille. Elle représentait une nymphe, et
voici le couplet du libretto sur lequel elle entrait : Cette
beauté depuis peu née, Ce
teint et ces vives couleurs, C'est
le printemps avec ses fleurs Qui
promet une belle année[68]. Vers
médiocres, vers prophétiques. Le succès du ballet fut très grand. On le
représenta cinq fois en un mois[69]. Ce
petit triomphe de Louise devait être bientôt suivi d'un grand orage. Un des
anciens ministres du cardinal, le surintendant Foucquet, et l'homme de
confiance de Mazarin, Colbert, s'appliquaient avec la même sollicitude, mais
en prenant des voies diverses, à découvrir ce que le nouveau roi ferait de
son pouvoir, si sa volonté de commander devait être durable, si elle céderait
à la fatigue ou à l'attrait des plaisirs. Foucquet
apprit d'abord que le roi se relâchait fort sur la dévotion, qu'il se formait
une cabale pour l'engager avec une inconnue. Le 27 juin, il lui revient, par
le « bonhomme » confesseur de la reine-mère, qu'on parle de La Vallière. Assurément
il a déjà vu cette jeune fille, demoiselle de la cour, suivre les chasses,
danser dans le ballet ; mais, si emporté qu'on ait voulu le montrer, il n'a
pu donner son attention à toutes les femmes. Louise de La Vallière, sans
appui de famille, sans fortune, sans qualités extérieures extraordinaires,
hier encore ignorée, n'était pas faite pour attirer l'attention d'un homme de
cet âge. Toutefois, dès qu'elle fut en passe de devenir un personnage, et,
comme on dit de nos jours, « un facteur politique », Foucquet dut l'observer
comme il étudiait depuis longtemps le roi lui-même. Les
rapports arrivaient très contradictoires. La Loy, vulgaire entremetteuse,
notait ce qu'en disait Fouilloux, fille à qui L'on n'en faisait pas accroire.
Ce n'était rien que La Vallière. Tout le tendre allait à Madame. Fouilloux
croyait être encore au premier acte d'une comédie, alors que, par l'éternelle
puissance de l'amour, le dénouement s'était produit. La fiction
disparaissait, remplacée par une passion vraie et profonde. Bientôt,
on ne pouvait plus disconvenir du fait. On passait même de la médisance à la
calomnie : La Vallière n'en était pas à son premier coup. Il n'était ruse
qu'elle n'eût employée pour attirer l'attention du roi. La Loy, femme
pratique, à travers les propos de Fouilloux, enragée de n'être pas dans la
confidence de cette nouvelle intrigue, démêlait le plus clair de l'histoire :
c'est que La Vallière était la maîtresse du roi et que cet amour était
sérieux, puisque Louis l'entourait d'un si grand mystère : mystère redoutable
où le téméraire Foucquet résolut d'entrer. Le
soleil de cet été de 1661 se montra implacable. On avait remué beaucoup de
terre à Fontainebleau pour agrandir le canal. Le surintendant, à peine remis
d'une maladie qui, en décembre 1660, l'avait conduit aux portes du tombeau,
excédé de travail, rongé d'inquiétudes, pris par les mille obligations
voulues ou subies de la vie de la cour, ne tarda pas à être atteint de
malaria. Le 3 août, la fièvre saisit son corps. Elle énervait son esprit
depuis longtemps. L'équilibre de l'homme fut détruit. On ne
saura jamais au juste ce qui se passa à cette heure décisive. La prudence des
courtisans, la fureur jalouse du prince, la terreur de la cour ont enveloppé
l'aventure d'une ombre impénétrable. Foucquet,
victime de sa finesse, voulut voir par ses yeux, entendre par ses oreilles.
Qu'il ait tenté de supplanter le roi dans la faveur de la jeune Tourangelle,
ou de s'en faire le galant à l'imitation des Guiche et des Brienne, c'est
inadmissible. Il voulait tout simplement se rendre agréable à la favorite,
et, comme tous ceux que la fortune abandonne, il commit fautes sur fautes,
erreurs sur maladresses. Ses attentions pour La Vallière furent remarquées,
signalées d'abord à la Menneville par une dame de la suite de la reine-mère,
dame qui appartenait à Le Tellier. Bien plus, la comtesse de Soissons et
Madame elle-même en prirent ombrage. Mlle de Fouilloux le déclara à La Loy,
sans pourtant l'autoriser à en parler encore à Foucquet, qui naturellement
apprenait tout au bout d'une heure. L'avis
n'est point daté. Le surintendant le reçut-il avant ou après l'erreur
irréparable qui décida de son sort ? On ne sait. Suivant une lettre très
suspecte et par son origine et par son style, Foucquet aurait, par une
entremetteuse, peut-être par cette femme La Loy, fait complimenter La Vallière
sur sa beauté, avec accompagnement d'une offre de 20.000 pistoles[70]. La jeune fille aurait répondu
que 250.000 livres ne lui feraient pas faire un faux pas. L'intermédiaire mal
armée s'efforce de donner le change à Louise, en sentant bien que c'étaient
là des paroles perdues. Aussi conseille-t-elle vivement à Foucquet de prendre
les devants, de dénoncer au roi la demoiselle d'honneur comme ayant demandé
cet argent. Foucquet
était incapable d'un acte aussi lâche ; s'il l'évita, ce fut pour tomber en
pleine déroute. Rencontrant La Vallière dans l'antichambre de Madame, il crut
habile de l'entretenir des mérites du roi. Il parla en politique à cette
enfant, qui n'avait qu'une excuse à sa faute, son incontestable candeur.
Aussi, sans comprendre ces discours, peut-être en les comprenant mal, la
jeune fille, blessée surtout de ce qu'on voulût pénétrer dans le secret de
son cœur, raconta l'entretien à celui qu'elle aimait[71]. Louis,
jusqu'alors, n'avait guère ressenti que des froissements d'amour-propre.
Quand Mlle de La Motte-Argencourt, quand les Mancini avaient accepté d'autres
hommages que les siens, c'est à elles seules qu'il s'en était pris, et, pour
toute vengeance, il s'était retiré majestueusement. Mais, à présent, dans la
première ardeur de la possession de cette jeune fille qui l'aimait sans
coquetterie, sans ambition, pour lui-même, sa jalousie se transforma, devint
violente, aveugle. Alors que Foucquet s'efforçait à le servir dans sa
passion, il ne vit, on ne lui laissa voir que le surintendant chéri des dames
pour son esprit, sa bonne grâce, son humeur libérale. La condamnation de
l'imprudent fut d'autant plus irrévocable que, Louis dissimulant sa colère,
nulle explication n'était possible[72]. Depuis
le 4 mai, Louis avait, par beaucoup d'autres raisons, résolu la perte de
Foucquet. Au milieu même des fêtes de Vaux (17 août 1661), qui éclipsaient celles de
Fontainebleau, le roi, outré plutôt que surpris[73] par le luxe du surintendant,
voulut subitement le faire arrêter dans son propre château Sa mère lui
représenta qu'il serait indigne de la majesté royale de sévir contre un homme
dont on avait accepté l'hospitalité. Louis se contint, acheva d'organiser un
voyage en Bretagne[74], et partit pour Nantes, où, le
5 septembre, il s'assura de la personne de son ministre. L'infortuné fut
emprisonné pendant quelque temps dans ce château d'Amboise où la petite La
Vallière avait passé ses plus belles années. Coïncidence plus extraordinaire[75], le titulaire de la charge de
lieutenant du roi était alors François de La Vallière, le propre frère de
Louise. L'acte
d'autorité de Nantes eut son contre-coup à Fontainebleau, où les deux reines
de France étaient restées. La reine d'Angleterre vint les rejoindre[76]. Les exercices de piété
remplacèrent les bals. Plus de promenades romanesques, mais des pèlerinages
aux sanctuaires voisins. Des soirées recueillies terminaient ces pieuses
journées. Messieurs du conseil erraient seuls, d'un air préoccupé. On vivait
dans une atmosphère d'inquiétude et de surexcitation. Là, comme à Nantes, la
foudre tomba, mais cette fois à côté du but. Anne
d'Autriche était alors violemment irritée contre cette pauvre Louise, qui
détournait son fils de ses devoirs. Volontiers elle l'eût chassée de la cour
: mais elle avait peur du roi. Mlle de La Motte-Argencourt, dont Louis, en
1661, ne s'occupait plus, paya pour la coupable. Dans sa sévérité, qui visait
une autre victime, la reine-mère se formalisa de ce que cette jeune fille
eût, malgré sa défense, continué de parler à M. de Richelieu. Elle obligea l'imprudente
à s'enfermer dans un couvent. La Motte choisit celui des Filles de Sainte-Marie
de Chaillot[77]. Ce nom est encore à retenir[78], car si l'exemple ne produisit
alors qu'un effet médiocre, toutefois le souvenir de cette exécution resta
dans l'âme émue de La Vallière, qui, pendant cet orage, soit par souffrance,
soit par prudence, vivait fort retirée et ne sortait pas de sa chambre, une
petite chambre sous les toits, dans le galetas. A cette
heure, où plusieurs dames et demoiselles de renom tremblaient en apprenant la
saisie des papiers[79] de Foucquet, Louise, candide
pécheresse, ne se sentait coupable que devant Dieu. Elle revit le roi le 9
septembre[80]. L'absence, qui tue l'amour à
son déclin, l'excite à sa naissance. Louis, ayant couru la poste jour et
nuit, revenait plus empressé, plus tendre que jamais. Mais alors ce fut
Louise qui dut suivre sa maîtresse et quitter la cour. Aussi, un matin, le
roi montait-il à cheval, galopait jusqu'à Vincennes, où il donnait un coup
d'œil au château. De là, après avoir, à Paris, inspecté les travaux des
Tuileries, il courait à Saint-Cloud, puis à Versailles ; de bonne heure, dans
la soirée du même jour, il était revenu à Fontainebleau, n'ayant pas fait
moins de trente-sept lieues[81]. Cet exploit, qui semble à
peine croyable à notre époque amollie, émerveilla les contemporains. Mais
tous n'en devinèrent pas la cause. Monsieur, Madame et la fille d'honneur de
Madame, Louise de La Vallière, étaient alors à Saint-Cloud, et c'est à
Saint-Cloud que dîna le roi[82]. Peu
après, Madame Henriette et sa maison reprirent leur place à Fontainebleau.
Cependant on n'y revit plus ni la gaieté d'avril, ni l'éclat de juillet. La
reine approchait de son terme et ne sortait plus que pour visiter les
églises. On annonçait aussi la grossesse de Madame, malade de corps, plus
malade d'esprit. En outre, la chute du surintendant alarmait beaucoup de
monde. L'argent se faisait rare, et les partisans, directement visés,
fermaient leurs bourses[83]. Mal plus grand encore : à la
suite d'un été dont la chaleur torride n'avait été coupée que par
d'épouvantables orages[84], le spectre de la famine apparaissait
dès l'automne. Les grandes fêtes furent remplacées par de simples chasses à
travers les bois aux feuilles trop tôt jaunies. Qu'importe ? A peu près
indifférents aux choses extérieures, les amoureux aiment tout ce qui les
réunit, le bal où l'on se donne la main, la chasse où l'on court l'un à côté
de l'autre, les sons de la musique ou le vaste silence des bois, également
propices aux confidences. Si l'on avait à désigner un moment heureux dans
cette vie si tourmentée de Louise de La Vallière et de son royal amant, c'est
ce mois d'octobre 1661 qu'il faudrait prendre. Pendant
ce temps-là, Marie-Thérèse, innocente victime des alliances politiques,
vivait environnée d'un silence profond, fait de crainte et de compassion.
Obligée par son état de ne se promener qu'en chaise, elle ne pouvait ni voir
ni entendre. Ses pratiques religieuses l'absorbaient. Une seule fois, elle
sortit de sa réserve, et précisément lorsqu'il lui était le plus commandé
d'être circonspecte. A la nouvelle de l'affront fait à l'ambassadeur français
à Londres par l'ambassadeur d'Espagne, Louis fut saisi d'une telle colère,
qu'oubliant les ménagements dus à la reine, il éclata devant elle en menaces
de vengeance contre son beau-père, expulsa brutalement M. de Fuensaldagne,
défendit toute communication avec Madrid. Marie-Thérèse, à son tour,
s'emporta en vifs reproches et prit parti pour son père contre son mari[85]. Rien ne pouvait davantage
froisser le roi. Cette crise dura pendant toute la seconde moitié du mois
d'octobre. C'est alors que le jeune monarque partait en forêt, courant avec
sa maîtresse et quelques intimes. Puis,
le vent froid, qui dépouillait les arbres, chassa Les invités dans leurs
palais et dans leurs hôtels de Paris, Madame repartit le 25 novembre,
emmenant la favorite encore inconnue et qui ne souhaitait rien de plus que
cette bienheureuse obscurité. Louis resta près de la reine, dont chaque jour
il attendait la délivrance. Il serait injuste dans cette histoire de ses
faiblesses de ne point montrer sa bonne attitude en ce jour d'épreuve. Le 1er
novembre ; dès cinq heures du matin, le roi se confessa et communia[86]. On éprouva de grandes
inquiétudes. De l'antichambre on entendait Marie-Thérèse, affolée par ses
douleurs, s'écrier : Non quiero parir, quiero morir — je ne veux pas
enfanter, je veux mourir —. Le roi, la reine-mère, toutes les personnes que
leur rang autorisait à se tenir près de la patiente, passaient
continuellement de la chambre à la chapelle. Enfin, à midi, naquit un
dauphin, que Louis présenta lui-même à la foule amassée dans la cour de
l'Ovale[87]. L'émotion
et la piété du souverain attendrirent les bonnes âmes. On voulait croire
qu'en dehors de quelques emportements de jeunesse, Louis n'avait d'affection
vraie que pour la reine. Toutefois, le diplomate qui représentait encore
officieusement l'Espagne, tout en envoyant à Madrid la nouvelle de la
naissance du dauphin, y ajouta de curieuses réflexions sur la ferveur des
Français, qui prient Dieu dans le besoin et l'oublient dans la prospérité. M.
de Vuorden, c'est le nom de ce froid et judicieux Flamand, ne croyait guère
aux dévotions subites, nées du désir ou de la peur. La fin
de cette année 1661, témoin de la chute de Louise de La Vallière, fut édifiée
par la conversion d'une pécheresse illustre. Le 24 novembre, pendant que
Madame Henriette, achevant de fatiguer son corps par le trouble de son
imagination, revenait à Paris et lisait un volume de lettres du comte de
Guiche, jetées dans sa litière par l'intrigante Montalais ; pendant qu'à sa
suite Louise vivait dans ses souvenirs, une très grande princesse, Mme de
Longueville, commençait sa confession générale. Elle se résignait « à remuer
encore ce fumier-là ». « Prosternée à terre, n'osant pas lever les yeux sur
l'autel, elle se comparait à la Chananéenne, se regardait comme une chienne,
indigne des moindres miettes des grâces de Dieu. » Elle songeait à mortifier
son corps, complice de ses fautes, à se retirer loin du monde. C'est « une
horrible présomption que de s'y croire propre à aider le prochain. Quand on
s'y est perdu soi-même, on n'est pas digne d'y servir autrui ». Enfin,
lorsque cette pénitente fut admise à la communion, un cri s'échappa de ses
lèvres reconnaissantes : Quid retribuam Domino pro omnibus quœ retribuit
mihi ?[88] Que rendrai-je au Seigneur pour
tout ce qu'il m'a donné ? Ces pensées, ces expressions mêmes, nous les
entendrons plus tard s'échapper des lèvres de Louise de La Vallière. Rapprochement non moins surprenant : l'église des Carmélites est celle où Mme de Longueville se retirait le plus souvent alors[89]. Dix-huit ans après, son cœur y sera reçu par Louise de La Vallière, devenue sœur Louise de la Miséricorde, religieuse carmélite. |
[1]
Mme DE MOTTEVILLE, Mémoires,
t. IV, p. 255.
[2]
Mademoiselle DE MONTPENSIER, Mémoires,
t. III, p. 421.
[3]
CHOISY, Mémoires
pour servir à l'histoire de Louis XIV, t. III, p. 28, éd. 1727. Voyez aussi
l'Épitre à Madame, en tête de l'École des femmes, donnée au
public par Molière en 1662.
[4]
Mme DE LA FAYETTE, Histoire de
Madame Henriette, p. 52. L'édition de 1728 et celle de 1742 ont la même
pagination.
[5]
Mme DE MOTTEVILLE, Mémoires,
t. IV, p. 268.
[6]
LORET, la
Muze historique, t. III (liv. XII, lettre XXIV), p. 367.
[7]
Histoire de Madame Henriette, p. 53.
[8]
Mme DE MOTTEVILLE, Mémoires,
t. IV, p. 269.
[9]
Gazette de France, 1661, p. 451.
[10]
Gazette de France des 10 et 11 mai. — Mademoiselle DE MONTPENSIER, Mémoires,
t. III, p. 314. — LORET,
la Muze historique, t. III (liv. XII, lettre XVIII), p. 351.
[11]
Gazette de France, 1661, p. 476.
[12]
Gazette de France, 1661, p. 508.
[13]
LORET (la
Muze historique, t. III (livre XI, lettre XIX), p. 353) parle à mots
couverts des intrigues des cours, des trianfes des yeux vainqueurs, des
sentiments des politiques, desseins, prétentions, pratiques.
[14]
Gazette de France, 1661, p. 508.
[15]
LORET, la
Muze historique, t. III (livre XII, lettre XXII), p. 361.
[16]
Gazette de France, 2, 3 juin 1661.
[17]
Gazette de France, 1661, p. 579 et 607. — LORET, la Muze historique, t. III
(livre XII, lettre XXVI), p. 371.
[18]
Gazette de France, p. 579, 607 et 632.
[19]
LORET, la
Muze historique, t. III (livre XII, lettre XXI), p. 357.
[20]
Histoire de Madame Henriette. Une lettre saisie dans ce qu'on appela la
cassette de Foucquet confirme le récit de Mme de La Fayette. Voyez CHÉRUEL, Mémoires
sur Foucquet, t. II, p. 112. Voyez encore un pamphlet du temps, Il
Mercurio postigliono di questo e l'altro mondo, in Villa-Franca, appresso
Claudio del Monte, 1667, p. 69. Le Postiglione a été traduit en
français, ou à peu près, à Liège, chez Claude Guibert, s. d. Il parait avoir
été rédigé avant la mort de la reine-mère, vers la fin de 1665. — Un tableau,
dont nous donnons la reproduction, se rapporte à cette période.
[21]
LORET, la Muze
historique, t. III (livre XII, lettre XXIII), p. 362.
[22]
Histoire de Madame Henriette, p. 54.
[23]
Mme DE MOTTEVILLE, Mémoires,
t. IV, p. 271.
[24]
Mme DE MOTTEVILLE, Mémoires,
t. IV, p. 278. Gazette de France, 27 et 30 juin 1661. Dès le 4 juillet,
la femme Laloy avertissait Foucquet de l'arrivée de la reine d'Angleterre et de
l'objet de son voyage. Le 7, elle ajoute que c'est pour
parler à Madame touchant le roi, et que c'est la reine-mère qui fait tout cela.
CHÉRUEL, Mémoires
sur Foucquet, t. II, p. 183.
[25]
Relation de l'ambassadeur vénitien Grimani, 28 juin 1661, filza 127, f° 242 v°.
Manuscrits de la Bibliothèque nationale.
[26]
Gazette de France, 6 juillet, p. 650.
[27]
Histoire de Madame Henriette, p. 58.
[28]
Mme DE MOTTEVILLE, Mémoires,
t. IV, p. 279. — Il résulte des Mémoires de Mme de Motteville que la
retraite forcée de Mlle de Pons eut lieu après le 27 juin, après l'arrivée de
la reine d'Angleterre à Fontainebleau et avant le 16 juillet, date du renvoi du
comte de Guiche. Voyez ibid., p. 281. Voyez aussi les Mémoires de
Madame de Caylus, p. 130, éd. Rounié.
[29]
Correspondance de la princesse Palatine, t. II, p. 91.
[30]
Le Palais-Royal, à la suite de l'Histoire amoureuse des Gaules,
t. II, p. 34, éd. Livet.
[31]
Mademoiselle DE MONTPENSIER, Mémoires,
t. IV, p. 394.
[32]
Correspondance de la princesse Palatine, l. c. Bien entendu, la
princesse Palatine ne vit La Vallière que plus tard.
[33]
Histoire amoureuse des Gaules, l. c. « Elle avoit de vilaines dents. » —
Correspondance de la princesse Palatine, l. c.
[34]
Mme DE MOTTEVILLE, l. c. — Histoire
amoureuse des Gaules. Ce dernier ajoute : « marquée de petite vérole. »
[35]
L'auteur de l'Histoire amoureuse les a vus bruns ; mais il a du mal
voir. Mademoiselle de Montpensier, la princesse Palatine, l'abbé Choisy sont
d'accord sur le bleu.
[36]
Correspondance de la princesse Palatine, l. c.
[37]
Mme DE MOTTEVILI.E, l. c.
[38]
CHOISY, Mémoires,
Collection Michaud, p. 582. — SOURCHES, Mémoires, t. I, p. 18, éd. Hachette.
[39]
CHOISY, Mémoires,
Collection Michaud, p. 582. — SOURCHES, Mémoires, t. I, p. 18, éd. Hachette.
[40]
Voir un portrait dessiné et gravé par Nanteuil en 1661. Les traits n'y sont pas
encore trop accentués. Voir aussi plusieurs dessins de Le Brun, qui sont au
Louvre.
[41]
Ces pamphlets ne nous sont pas parvenus dans leur rédaction primitive. Pour
mettre à même de les juger, il suffira de dire qu'ils placent à Versailles le
théâtre de la séduction. Il faut s'en tenir au récit de Mme de La Fayette
confirmé par les Mémoires de Mademoiselle de Montpensier, t. III, p.
527. V. aussi l'Illustre pénitente, p. 22. -
[42]
Histoire de Madame Henriette, p. 64.
[43]
Le Palais-Royal ou les Amours de mademoiselle de La Vallière : Histoire
amoureuse des Gaules, t. II, p. 39. — Histoire de l'amour feinte du roi
pour Madame, ibid., p. 105.
[44]
Œuvres de Benserade, t. II, p. 238, éd. Paris. Bien que dans ces Œuvres
le ballet de l'Impatience ait été imprimé après celui des Saisons,
il doit être placé le premier, ayant été représenté en février 1661. Voyez la
Muze historique, t. III, p. 322.
[45]
GUILBERT, Description
de Fontainebleau, t. II, p. 77.
[46]
CHOISY, Mémoires,
p. 587. Voyez encore le ballet de l'Impatience. Benserade vaut un
chroniqueur. Voyez ses Œuvres, t. II, p. 210. — Histoire de Madame
Henriette, p. 69.
[47]
P. ANSELME, t.
II, 1721. Saint-Simon, sur DANGEAU, XII, p. 148.
[48]
Saint-Aignan eut une pièce de vers, en l'honneur de la Vierge, couronnée au
Palinod de Caen, en 1667. Il était membre de l'Académie française dès 1663. Hist.
de l'Académie française, par D'OLIVET,
p. 161, éd. d'Amsterdam, 1730. — V. Mémoires de René Rapin, t. III, p.
382.
[49]
Histoire de Madame, p. 70, éd. 1742.
[50]
Lettre du 20 juillet 1661 adressée à Foucquet par un de ses espions, que M.
Chéruel suppose être l'abbé de Bel-Esbat. Mémoires sur Foucquet, t. II,
p. 169.
[51]
Histoire de Madame, p. 60.
[52]
Mme DE MOTTEVILLE, Mémoires,
t. IV, p. 280.
[53]
Dans le Recueil de pièces galantes en prose et en vers de madame la comtesse
de la Suze et de monsieur Pélisson, etc., édit. de 1696, Paris, Cavelier,
on trouve (t. II, p. 1) un dialogue, Ergasis et Edone ou le Travail et la
Volupté. Ce petit morceau contient une théorie très curieuse sur le sujet
qui nous occupe. Ergasis dit à Edone : « Ne vous enorgueillissez pas de ce que
le grand prince dont vous parlez vous rend quelques visites, et sachez que ce
n'est que pour se délasser des grandes fatigues qu'il est obligé de souffrir en
gouvernant tout seul. Il est dans un âge où il ne lui est pas permis de vous
fuir ; mais après tout, sachez, puisque cela vient à propos, qu'il ne trouve
pas du tout bon que vous inspiriez à ses sujets des sentiments si éloignés de
ceux qu'ils doivent avoir. »
[54]
M. Clément n'a retrouvé qu'un fragment de ces instructions ; les libellistes du
temps les connaissaient au moins par ouï-dire. Voyez Il Mercurio postiglione,
p. 118.
[55]
Recueil de Maurepas, t. I, V. aussi l'Illustre Pénitente, p. 20.
Mons, 1678, « Une mère plus ambitieuse pour la fortune de sa fille, que zélée
pour la conservation de son innocence. »
[56]
Mémoires de Beauvau, p. 220. Saint-Remi est assez mal noté dans les Mémoires
de Goulas, t. II, p. 134.
[57]
L'aventure que nous allons raconter est datée par ce que dit Brienne père à son
fils ; la reine-mère lui avait parlé depuis plus de quinze jours des amours du
roi et de La Vallière. (Mémoires de Brienne, t. II, p. 170.)
[58]
« Le Febvre fit le portrait de Madame en Vénus, très bien accompagnée de
Cupidon, et dans le lointain, il avait placé Adonis chassant. » BRIENNE, Mémoires,
t. II, p. 171.
[59]
Grand cabinet du roi, ainsi nommé à cause d'une série de tableaux de Dubois,
représentant les aventures de Théagène et de Chariclée. Voyez GUILBERT, Description
historique de Fontainebleau, t. I, p. 137.
[60]
Il existait au château de Bures (Seine-et-Oise) un tableau dans le goût de ceux
que peignait Le Febvre. Il représentait une jeune femme en Diane. Dans le fond,
l'Amour indiquait à des nymphes Actéon qui s'avance. La coiffure de Diane
semblerait dénoter une époque postérieure de vingt à vingt-cinq ans à celle qui
nous occupe ; mais cela ne suffirait pas pour établir que le tableau n'a pu
être peint en 1661 ; ce pourrait être une coiffure de fantaisie adoptée ensuite
parla mode. Assurément, nous ne prétendons pas identifier la Diane de Bures
avec la Diane de Fontainebleau. Il faut noter cependant que, suivant une
tradition, elle serait le portrait de la princesse de Conti.
[61]
Il avait reçu une rude blessure à la main.
[62]
Histoire de Madame Henriette, édit. d'Amsterdam, 1742, p. 44.
[63]
BRIENNE, Mémoires,
t. I, p. 238.
[64]
Conversation de Boileau, recueillie par Brossette. SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. V, p. 82.
[65] Mon cœur avec
l'amour a toujours quelque affaire ;
Mais lorsque
tout enlier ma maitresse l'aura,
Souvenez-vous
que ce sera
Si mon maître
n'en a que faire.
[66]
Dès le 27 juin. Histoire de Madame, p. 66.
[67]
« Sempre più nella casa reale si va crescendo l'amor. » 19 juillet 1661, filza
127. Manuscrits de la Bibliothèque nationale. La filza 127 ne renferme pas de
dépêches expédiées le 30 août 1661. De là on passe (aujourd'hui) à la filza
129, c'est-à-dire au 7 mars 1662.
[68]
Œuvres de Benserade, t. II, p. 221, édit. 1697.
[69]
26, 30 juillet, 3, 16, 23 août, LORET, la Muze historique, t. III (1. XII, lettre XXX), p.
383 et suiv.
[70]
Vrai ou faux, le fait se retrouve dans un factum du temps, Il Mercurio
postiglione, p. 76. On y parle de 25.000 doubles, doppie.
[71]
CHOISY, Mémoires,
p. 585, éd. Michaud.
[72]
J. LAIR, Nicolas
Foucquet, t. I, p. 152.
[73]
Ce n'était pas la première fois que le roi allait à Vaux. Depuis longtemps, il
n'était bruit que des embellissements de ce château.
[74]
Dès le 4 août, la Gazette signale les préparatifs du voyage en Bretagne,
1661, p. 797. De même, elle dit, le 17, après le voyage à Vaux, que « Leurs
Majestés témoignèrent estre merveilleusement satisfaites ». Ibid., p.
798.
[75]
En 1659, François de La Baulme Le Blanc, seigneur de la Vallière avait été
nommé lieutenant de roi à Amboise. Inventaire analytique des archives
municipales d'Amboise, p. 113.
[76]
Gazette de France, 25 août 1661. Mme de Motteville indique à tort le 28,
et son dernier éditeur, le 1er septembre. Voyez Mémoires, t. IV, p. 285.
[77]
Gazette de France, 2 septembre.
[78]
V. sur la retraite de Mlle de La Motte-Argencourt, note 1 à la fin du volume.
[79]
On a beaucoup exagéré l'importance de ces papiers. V. J. LAIR, Nicolas
Foucquet, II, p. 86.
[80]
Mme de La Fayette dit le 8, Loret dit le 9 : « Le neuf de ce mois que l'Aurore
— chez Titon reposait encore. — Sa personne à telle heure indue — n'étant
nullement attendue. » La Muze historique, t. III, p. 403.
[81]
« En icelle seule journée, — ayant fait, à n'en mentir pas, — plus de cent
douze mille pas, — à compter trois mille par lieue. » LORET, la Muze historique, t.
III, p. 406. Le fait est attesté par tous les contemporains. Voyez CHOISY, Mémoires,
p. 590, de l'édition Michaud et Poujoulat.
[82]
Gazette de France, 1661, p. 1037. 1038.
[83]
GUY PATIN, Lettres,
19 septembre 1661, t. II, p. 299.
[84]
Le Gatinais avait été particulièrement dévasté. Voyez LORET, la Muze historique, t.
III, p. 368.
[85]
Extraits des manuscrits de Vuorden, p. 189. Paris, 1870.
[86]
Mémoires de Madame de Motteville, t. IV, p. 302.
[87]
Biographie et fragments inédits extraits- des manuscrits du baron de Vuorden.
Paris, 1870.
[88]
Psaume CXV, verset 12.
[89]
V. COUSIN, Œuvres,
Littérature, t. III, p. 196, 203, 216, 223. La pièce citée est une sorte
de confession commencée le 24 novembre 1661 et qui finit en janvier 1662. Nous
reviendrons plus bas sur la ressemblance frappante de ce morceau avec les Réflexions,
œuvre de La Vallière.