HISTOIRE DU PARLEMENT DE NORMANDIE

DEPUIS SA TRANSLATION À CAEN, AU MOIS DE JUIN 1589, JUSQU'À SON RETOUR À ROUEN, EN AVRIL 1594

 

PRÉAMBULE.

 

 

Une interprétation libérale des volontés de M. Pierre-Aimé Lair a décidé l'impression de ce Mémoire, et la même fondation qui a provoqué ce travail par l'ouverture d'un concours, en assure aujourd'hui la publication. Je suis donc doublement obligé envers le généreux donateur et envers l'Académie. Aussi je souhaiterais vivement de pouvoir présenter en retour une œuvre moins imparfaite, et qui trahît moins l'inexpérience de son auteur. Deux années d'étude, ajoutées aux deux précédentes, et l'impression, même avant le grand jour de la publicité, m'y ont fait voir bien des côtés faibles ; autant que j'ai pu, je les ai fortifiés. Mais je ne laisse pas de sentir combien j'ai besoin encore que le public prenne exemple sur l'Académie, et tienne compte avant tout du bon vouloir et des efforts consciencieux. Devant déjà beaucoup à cette critique qu'un homme d'un goût sûr et d'un esprit délicat., M. Andrieux, appelait « la critique avant la lettre », lui devant d'autant plus qu'elle a été tout ensemble bienveillante et sincère, j'attends du lecteur de semblables leçons, toujours prêt à les écouter, toujours prêt à en profiter.

C'est un bonheur pour moi, plus encore qu'un devoir, de témoigner ici ma reconnaissance à toutes les personnes à qui cette œuvre est redevable, qui m'ont mis à même de l'entreprendre et que je voudrais appeler mes commanditaires, en donnant à ce mot un sens plus élevé. En effet, c'est avec leurs fonds que j'ai travaillé. Sans doute, elles n'ont point fait cet ouvrage ; autrement il serait meilleur ; mais je n'aurais pu le faire sans elles, sans le goût du travail que je tiens de mon cher maitre, M. Charles Marie, professeur au lycée de Caen, qui m'a toujours ouvert les trésors de son savoir et de son âme excellente ; sans le goût de l'histoire que M. Puiseux sait d'autant mieux inspirer qu'il le possède à un plus haut degré ; sans le goût des lettres que se sont efforcés de développer en moi, par leurs leçons, par leurs récompenses, par leurs exemples, tant d'autres maîtres que je remercie du fond du cœur. Je ne puis les nommer tous ; mais je veux citer au moins M. Léopold Delisle, membre de l'Institut et du Conseil de l'École des chartes, dont je devrai sans cesse rappeler le nom, car il n'a jamais cessé de me prodiguer ses bienveillants conseils ; M. Bertrand, qui, maire de la ville de Caen et- doyen de la Faculté des lettres, sachant à ce double titre combien l'amour des choses de l'intelligence honore une cité, invite si bien les jeunes gens à ce noble culte ; M. Julien Travers, secrétaire de l'Académie, à qui le manuscrit de ce Mémoire a dû beaucoup depuis le concours, à qui la publication ne devra pas moins. Pourrais-je oublier un maître bien cher, dont la haute position et l'éminent savoir commandent le respect, dont l'intérêt porté jusqu'au dévouement ne peut être égalé par la reconnaissance de ceux qu'il protège, si affectueux surtout et si tendre qu'ils ne peuvent trop l'aimer en retour, M. le conseiller d'État Boulatignier ? Qu'il me soit permis enfin dans ce jour où, publiant mon premier travail sous les auspices de plusieurs de mes éminents concitoyens, je crois me placer sous une heureuse protection en invoquant ces noms chéris et respectés ; qu'il me soit permis de nommer mon père et ma mère, car sans eux encore, sans leur labeur, sans leurs sacrifices, aurais-je reçu cette seconde vie que donne l'instruction ? aurais-je pu entrer dans la douce voie de l'étude ? En présence de toutes ces dettes, que je voudrais, je ne dis pas acquitter, mais reconnaître plus dignement, je sens plus que jamais l'insuffisance de cet humble Essai. Puisse le public, par un indulgent accueil, venir en aide à ma reconnaissance ! et puissé-je moi-même, un jour, en donner des gages plus sérieux !

 

JULES LAIR.

Paris, le 1er décembre 1860.