HISTOIRE DE LA GAULE

TOME III. — LA CONQUÊTE ROMAINE ET LES PREMIÈRES INVASIONS GERMANIQUES.

CHAPITRE II. — LES CIMBRES ET LES TEUTONS.

 

 

I. — LE DANGER GERMANIQUE[1].

La chute de l’Empire celtique eut une dernière et plus grave conséquence : les nations désunies se trouvèrent trop faibles pour résister aux Barbares d’outre Rhin. — Longtemps après cette chute, lorsque les Romains étaient devenus les maîtres de toute la contrée, ils justifiaient ainsi cette conquête : si César n’avait point pris la Gaule, elle serait devenue la proie des Germains[2] ; et cela, sans être certain, paraissait fort plausible. Mais ils ne disaient pas que si la Gaule avait été ouverte aux Germains, c’était après la funeste besogne faite par Domitius.

Les hommes qui habitaient alors à l’est du fleuve n’étaient pas d’une origine et d’une espèce différentes de ces Celtes et de ces Belges qui, quelques siècles auparavant, avaient fondé les empires et les nations de la Gaule. Mais tant de choses s’étaient passées depuis ces évènements, que les Germains et les Gaulois avaient cessé de se comprendre et se traitaient le plus souvent en ennemis. Le Gaulois avait mêlé son sang, sa langue et son humeur à celles d’hommes différents, Ligures, Ibères et Méridionaux de toute sorte ; le Germain passait pour appartenir à une race pure[3], ou, s’il s’était mélangé avec d’autres hommes, c’était aux hordes errantes et aux tribus sauvages des steppes et des marécages de la Scythie[4] Il demeurait fidèle aux vieilles divinités que lui montrait la nature, le Soleil, la Lune, la Terre et le Feu[5]. Son corps robuste, à la haute taille, aux membres solides, endurci et exercé dès l’enfance[6], ignorait encore l’ivresse du vin[7], et ces agréments de la table, du costume et de la maison, où le Gaulois savait se complaire[8]. Après Pythéas, aucun vaisseau du Midi n’avait abordé aux rivages de la Germanie ; on connaissait fort peu sur ces terres les objets et les hommes de la Méditerranée[9] ; les marchands venaient rarement jusque-là, alors qu’ils sillonnaient la Gaule en tout sens[10]. L’état social progressait lentement. En temps de paix, c’était la dispersion en des centaines de tribus, obéissant chacune à un chef ou un roi qui servait de juge et de prêtre[11]. Les hommes vivaient surtout des produits de la chasse et de l’élève des bestiaux[12] ; le labour et la culture du sol étaient choses secondaires[13] ; la propriété personnelle n’existait pas pour la terre, et les chefs assignaient chaque année aux familles le terrain qu’elles avaient à entretenir[14]. On habitait dans des fermes et des hameaux : il manquait à la Germanie ces deux signes de la civilisation qui commençaient à faire la gloire des Gaules, la monnaie et la grande ville[15] La plupart des tribus en étaient toujours aux vieilles armes, à la javeline[16], à la lance[17] et à la hache de guerre[18]. L’épée était rare[19], et, sauf le bouclier[20], on ignorait d’ordinaire les armes défensives[21].

Mais tout cela n’en rend les Germains que plus redoutables. En hommes que le sol ne retient pas, ils n’hésitent jamais à combattre[22]. L’absence de propriété foncière fait qu’ils ne connaissent pas cette lutte entre riches et pauvres, ces misères et ces injustices sociales, ces tyrannies de grands dont souffre la Gaule[23]. S’ils s’accordent davantage entre eux, c’est pour piller et tuer sur les terres voisines[24]. Pauvres et incapables du travail des champs, la guerre est leur meilleure façon de vivre[25]. Et ils la font bien. Leurs armes d’hast ou de jet sont plus sûres que l’épée gauloise[26]. Les Celtes, gâtés par la passion du cheval, n’ont pas d’infanterie sérieuse à opposer aux fantassins germains, souples et agiles comme des Ligures, et dont la rapidité tenait du miracle[27]. Au reste, ces Barbares savent bien monter à cheval : ils chargent, en rangs pressés et solides comme une muraille, avec une vigueur impétueuse et rude[28] ; et si leurs montures, laides et lourdes, ignorent l’art des galops et des voltiges auquel se façonnait la cavalerie des Celtes, ce sont des animaux d’une docilité et d’une endurance à toute épreuve[29]. Sur le champ de bataille, le soldat germain n’est pas moins brave que son ennemi de Gaule, mais il est plus têtu et plus rusé : s’il faut lâcher pied, il le fait sans fausse honte, quitte à revenir au bon moment[30]. Il ne s’embarrasse pas de ces subtilités d’amour-propre dont s’est compliquée la vie du guerrier celte. Hommes et bêtes, les Germains ont conservé, en face des Gaulois qui se civilisent, leur force naturelle et brutale[31].

Or, vers la fin du second siècle, diverses circonstances vont rendre plus pressant encore le péril germanique : des pensées et des ambitions nouvelles surgissent parmi ces hommes, pour les grouper, les exciter et les lancer au dehors.

 

II. — FORMATION DES PEUPLADES GERMANIQUES[32].

Jusque-là, à part les Celtes et les Belges des rives de la mer du Nord, le monde n’avait entendu parler d’aucune nation transrhénane[33]. De ces peuplades qui vont bientôt remplir l’Europe de leurs menaces, Cimbres, Teutons, Suèves, Marcomans et autres, il n’est pas une seule fois question dans les textes antérieurs au proconsulat de Domitius. Au sud des monts Hercyniens, dans les vallées du Hein et du Danube, nous trouvons de vieux États celtiques entrés depuis longtemps dans la vie de l’Europe : Helvètes en Franconie et en Souabe, Volques Tectosages en Bavière, Taurisques ou Noriques en Autriche et Boïens en Bohême[34]. Mais, dès que l’on a franchi les dernières forêts des montagnes centrales, dès que l’on entre dans la plaine aux grands fleuves et aux vastes marécages, Ems, Weser, Elbe, Oder et Vistule, l’obscurité se fait complète, et tous les hommes de ces pays se perdent sous le nom mythique de Scythes ou d’Hyperboréens[35].

Si nous ne connaissons chez eux aucun nom de peuple, il est possible que ce soit le fait du hasard, et parce que les marchands et les savants du Midi ont eu peu de souci de ce sol perdu dans la brume. Mais c’est peut-être aussi parce que les hommes d’Allemagne n’ont point formé de grand État, de groupe politique étendu et puissant, et qu’ils étaient, comme la Bretagne et la Gaule ligures avant l’arrivée des Celtes, partagés entre des milliers de tribus, qu’aucun lien solide n’unissait.

Cent ans avant notre ère, la Germanie prend corps à nos yeux. Au-dessus de ses tribus, elle a ses nations, ses ligues, et même des ambitions plus vastes. On sent fermenter en elle toutes les forces de rapprochement et de cohésion qui avaient créé en Gaule, depuis longtemps, Bituriges, Arvernes ou Éduens, et créé encore, par-dessus ces noms, l’empire de Luern et de Bituit. Que les peuplades germaniques datent de ce temps, et soient alors nées spontanément, par une entente graduelle entre tribus voisines, ou qu’elles fussent, non pas une nouveauté, mais de très antiques sociétés fédérales, oubliées pendant des siècles et remises ensuite en vigueur[36], peu importe à l’histoire de ce moment. Mais toujours est-il que, dans les années où l’Empire arverne disparut de la Gaule, de fortes peuplades apparurent au delà du Rhin.

Comme chez les Celtes et chez les Belges, ces peuplades s’étaient formées dans des régions naturelles, et le plus souvent des deux côtés d’une grande voie fluviale ou maritime. — Les Cimbres occupaient le Jutland, le golfe de Hambourg et l’estuaire de l’Elbe[37], vaste territoire qui avait été jadis le domaine des Celtes et des Belges. A leur droite, dans les îles danoises et le Mecklembourg, les Teutons[38] et les Ambrons[39] s’étaient unis aux Cimbres par une étroite fraternité. A leur gauche, les Frisons vivaient misérablement, bloqués par leurs tourbières le long de l’Océan au chapelet d’îles[40], et les Bataves, fiers et sauvages, s’isolaient dans les îles du Rhin et de la Meuse[41]. Voilà pour les peuples de la mer. — A l’intérieur des terres, les plus riches empires se fondaient dans les fertiles vallées qui se déversent sur la rive droite du Rhin : celui des Sicambres, souverain des plaines basses de la Westphalie[42] ; celui des Ubiens, le plus puissant et le plus laborieux de tous, en Prusse rhénane, sur les belles terres que, de l’autre rive, domine aujourd’hui le clocher de Cologne[43] ; et, adossées au Taunus, dans les vallons du Nassau, les deux nations sœurs des Usipètes et des Tenctères[44]. Voisines des Belges et bordées par le fleuve le plus populeux de l’Allemagne, visitées des marchands[45] et riches en sol fromentier[46], ces quatre nations s’habituaient à une vie moins fruste et plus sédentaire que leurs congénères, se laissaient gagner par l’exemple et les leçons des Gaulois de l’autre bord[47]. — C’était au contraire la pure Germanie qui revendiquait les peuplades, plus inquiètes et plus mobiles, des tristes marécages et des fleuves monotones de l’intérieur. Campés des deux côtés de l’Ems, les Bructères s’appuyaient vers le levant aux bois mystérieux de Teutoburg[48]. Sur le Weser, se succédaient trois nations qui seront bientôt célèbres : les Chauques innombrables, dans les basses terres du Hanovre et de l’Oldenbourg[49] ; les Chérusques, en amont de la porte de Westphalie, maîtres des carrefours les plus passagers de l’Allemagne centrale[50] ; et les Chattes, encadrés par les montagnes qui présentent à la Hesse une ceinture de noires forêts[51]. Plus loin, quatre peuplades, les plus remuantes de toute l’Allemagne, se partageaient les eaux de l’Elbe au nord de la Bohême demeurée celtique : les Marcomans en Saxe et en Thuringe[52], les Semnons en Brandebourg[53], les Lombards[54] et les Hermundures[55] dans les terres que baigne le fleuve avant d’arriver à Hambourg. Chose étrange ! le plus fameux et le plus vigoureux de ces derniers peuples, et peut-être de tout le nom germanique, était celui des Semnons, possesseurs du carrefour de Berlin et du sol bas et marécageux où viennent se confondre les deux plus grands bassins de fleuves allemands, ceux de l’Elbe et de l’Oder[56]. Et ce morceau de terre, qui rappelait l’isthme gaulois des Carnutes entre la Seine de Paris et la Loire d’Orléans, semblait préluder déjà à sa souveraineté sur la Germanie. — Enfin, à l’extrême levant, dans les plaines infinies de l’Oder et de la Vistule, vaguaient des nations aux limites imprécises et aux destinées incertaines, Burgondes[57], Vandales[58], Goths[59] et bien d’autres[60] : et ces noms, réservés à une prodigieuse fortune, n’étaient alors que de simples mots pour les Occidentaux qui les répétaient.

Parmi ces peuplades, celles de la vallée du milieu, ou de l’Elbe, Lombards, Hermundures, Semnons et Marcomans, s’étaient groupées sous le nom collectif de Suèves[61]. Cette fédération, qui embrassait, disait-on, cent tribus[62], devenait peu à peu la puissance la plus énergique de l’Allemagne entière[63]. La force des hommes qui la composaient venait à la fois d’un farouche respect pour le foyer natal et d’un irrésistible besoin d’aventures. Comme toute leur fortune consistait en bestiaux et en chariots, rien ne leur plaisait plus que de partir pour émigrer et conquérir[64] ; et cependant, ils n’oubliaient jamais les divinités et les sanctuaires du sol des ancêtres. Chaque année, les délégués de tous les peuples du sang suève se rassemblaient dans un bois sacré de la nation centrale, les Semnons du Brandebourg, comme les druides de la Celtique se réunissaient chez les Carnutes ; là, d’émouvants mystères leur rappelaient qu’ils étaient en face de leurs dieux communs et souverains, à l’ombilic éternel de leur race[65]. Et de ce contact divin avec la terre maternelle, de cette fraternité autour des autels, les Suèves sortaient plus unis, plus braves, plus orgueilleux de leur nom.

D’autres liens, d’autres titres unissaient entre elles les nations. Celles de l’Océan et de la Baltique, Cimbres, Teutons et Chauques, s’appelaient les Ingyévons[66] ; on donnait le nom d’Istévons aux habitants des bords du Rhin[67], et celui d’Hermions aux Germains des fleuves du Centre, Chattes, Chérusques et Suèves[68].

Enfin, au-dessus de tous ces noms de tribus, de peuplades et de ligues, ne tardera pas à poindre la pensée d’une patrie germanique. Peut-être cette pensée était-elle une chose ancienne, survivance d’une migration lointaine ou de quelque empire démembré, et les prophètes de la Germanie nouvelle ne feront que réveiller l’écho d’une Germanie disparue, comme l’empire de Bituit l’Arverne n’était que le retour à la Celtique d’Ambigat. Peut-être cette idée nationale naquit-elle peu à peu des relations entre peuplades, d’ambitions communes, de parlers semblables, et ce fut un désir imprévu plutôt que le souvenir du passé. En tout cas, elle allait prendre force au moment même où la patrie gauloise disparaissait devant la victoire de Rome. Les poètes d’outre Rhin chantaient que leurs peuples et leurs guerriers étaient tous issus d’un même héros, fils d’un dieu et petit-fils de la Terre, ancêtre et créateur de la race[69] germanique[70]. Et s’ils donnaient à ces peuples un ancêtre commun, c’était avec l’espérance d’en faire une seule famille[71].

Certes, les temps sont loin où ce rêve d’une fraternité germanique pourra devenir une réalité. Il manque, pour la bâtir, ce qui a fait la concorde, la grandeur et la beauté de l’État gaulois dans le siècle de Luern et de Bituit, il manque l’appui de la nature. Le sol de la Germanie, à la différence du nôtre, n’aide pas à l’entente et n’invite pas à l’unité. Elle peut évidemment se donner le cadre de frontières naturelles, Océan, montagnes ou fleuves : mais ses limites s’imposeront si peu à ses chefs ou à ses voisins, qu’elles changeront sans cesse, et qu’on ne saura si la terre allemande finit au Rhin ou aux Ardennes, à l’Oder ou à la Vistule, aux monts Hercyniens, aux Alpes ou au Danube[72]. Le vrai terme de la Germanie, au temps de César, ce n’étaient point de hautes cimes ou de larges rivières visibles de tous, mais ces immenses déserts que les peuplades créaient autour d’elles[73]. A l’intérieur de la contrée, la plaine et la montagne, au lieu d’alterner en une vie solidaire[74], semblent se séparer pour un divorce éternel. Au sud, ce sont des chaînes qui s’enchevêtrent, irrégulières et confuses, hérissées de bois où les Romains admireront encore les merveilles des forêts vierges[75]. Au nord, c’est la plaine fangeuse où de grands fleuves coulent lentement, ne rapprochant jamais leurs routes vers un but commun[76]. Entre leurs cours parallèles, la principale ligne de jonction est marquée par les vallées de la Havel et de la Sprée, avec leurs lacs et Berlin au milieu d’eux : et là, à Berlin, près de l’endroit même oit fut jadis le bois sacré des Suèves, on peut se croire au cœur de l’Allemagne, à égale distance des montagnes et de l’Océan, de la mer Baltique et de la mer du Nord, de la Vistule des Scythes et du Rhin des Gaulois. 11lais quelle différence, comme foyer d’une grande nation, entre cet îlot émergeant des marécages et l’acropole de l’Auvergne ou les riants carrefours de Lyon et de Paris ! Il faudra des circonstances innombrables et de rudes courages humains, pour que la Germanie arrive à cet accord national avec lequel, du premier coup, la Gaule apparaît dans l’histoire.

 

III. — LES CIMBRES ET LES TEUTONS[77].

De ces peuplades germaniques, les Cimbres et les Teutons furent les premières à courir le monde. Ils habitaient, on l’a vu, ces terres basses de la mer du Nord et de la Baltique, du Jutland et des îles danoises,’d’où étaient sortis jadis les Celtes et les Belges. Ils étaient, pour une part, leurs descendants. On verra combien ils leur ressemblaient[78]. Et ce sont des causes pareilles qui les firent partir.

Leur domaine était, du sol germanique, la portion qui s’avançait le plus vers la mer, c’est-à-dire celle que les marchands visitaient le plus et que les étrangers ignoraient le moins. Sur ce rivage se recueillait l’ambre, la plus précieuse denrée qui sortît du pays des Hyperboréens[79] ; là finissait l’Elbe, la grande voie commerciale de l’Allemagne, et cette route était gauloise à son origine, suève dans son cours moyen, et, à son débouché sur la mer, regardait l’île de Bretagne. Pythéas le Grec avait autrefois visité ces parages ; et c’était sans doute, le long des plages de l’Océan et des rives du grand fleuve, un mouvement continu de barques et de trafic[80].

Cette situation privilégiée, ce contact avec des hommes très divers, avaient fait des Cimbres et des Teutons des nations puissantes et nullement impropres à la vie civilisée[81]. Hambourg, Kiel et Copenhague, les endroits souverains du Nord, étaient sous leur dépendance, et sur leur cap avancé du Jutland, les Anciens purent chercher les colonnes d’Hercule du Septentrion[82].

Certes, ils ne différaient pas d’aspect des autres Germains : leurs corps énormes à la taille splendide, leurs yeux bleus[83], leur force et leur audace surhumaines[84] rappelèrent aux Grecs ces hommes du Nord, derniers-nés des Titans[85], dont parlaient leurs poètes, et qui avaient bravé jadis Apollon et Jupiter. La religion des Cimbres était, comme celle de tous les Barbares, impérieuse et sanguinaire[86] : ils n’avaient point de prêtres, leurs rois en tenaient lieu sans doute ; le soin des sacrifices appartenait à des voyantes, qui égorgeaient les victimes humaines et prédisaient l’avenir[87]. Point d’idoles : un vase pour les sacrifices[88], un taureau de bronze pour les serments[89]. Leurs dieux étaient avec eux et les suivaient, sans qu’ils eussent besoin de les enfermer dans un temple ou dans une image.

Mais ce n’étaient point, tant s’en faut, des brutes et des sauvages. On voyait chez eux de vastes lieux de refuge et le goût de se bâtir des villes[90]. Ils ne dédaignaient pas l’agriculture, la vie de la terre les attirait[91], et ils se montraient entendus dans les choses de l’industrie et du commerce[92]. Comme les Gaulois, ils avaient la passion des belles armes, aux couleurs voyantes, au métal éclatant, aux ornements magnifiques : cuirasses de fer, boucliers peints en blanc, casques surmontés de mufles et de panaches[93]. Ils savaient obéir à leurs chefs, respecter la parole donnée, rendre justice même à un ennemi, s’astreindre à la discipline et montrer une décision réfléchie[94].

Les Anciens ont vu en eux de simples bandits, et le nom même de Cimbres a fini par signifier brigands et voleurs[95]. En réalité, c’était une nation fugitive, qui cherchait partout des terres et des foyers. Si elle dut quitter son pays, ce fut contrainte par des malheurs sans nom.

La tradition nous la montre fuyant devant un raz-de-marée terrible[96], semblable à celui qui avait jadis chassé les Celtes. La chose est fort probable. Mais il a pu y avoir d’autres causes à leur départ, des dissensions intestines, des misères matérielles[97], peut-être l’hostilité des voisins[98] ou la poussée de nouvelles tribus, venues le long de la Baltique.

Tous, du reste, ne se résignèrent pas au départ. Il resta assez de Cimbres pour perpétuer en Germanie le nom de la peuplade, et les Teutons leurs frères ne les rejoignirent que plus tard[99]. Le premier ban des émigrants se composa, dit-on, de 300.000 hommes, non compris les femmes et les enfants[100]. Leurs chariots portaient leur fortune et allaient leur servir de demeures et de foyers[101], jusqu’au jour où les dieux leur rendraient un abri et des terres.

 

IV. — LES CIMBRES FUGITIFS DANS L’EUROPE CENTRALE.

Les Cimbres se dirigèrent vers le sud. Ils se déplaçaient fort lentement, s’arrêtaient plusieurs mois après quelques journées d’étapes[102] : à chaque arrêt, ils tentaient de constituer leur empire et de commencer une vie normale ; et, chaque fois, de nouvelles craintes venaient les assaillir, ils levaient le campement et recommençaient leur course incertaine[103].

Il est possible qu’ils aient d’abord songé à la Gaule, où tant de leurs ancêtres s’étaient enrichis. Mais les Belges montaient bonne garde. Les émigrants prirent le chemin du Midi.

Au delà de la forêt Hercynienne (Hesse et Thuringe), ils se trouvèrent en face d’autres Gaulois, les Helvètes de la Franconie et les Boïens de la Bohème. C’étaient de vieux États, encore solides : les Boïens repoussèrent les Cimbres et les rejetèrent sur le Danube[104].

Là aussi, des peuples robustes gardaient la contrée, les Volques en Bavière, les Noriques ou Taurisques dans les monts de Styrie : les routes des Alpes étaient bien gardées. Les émigrants ne songèrent pas à l’Italie.

Il fallut descendre plus bas, toujours le long du fleuve. A défaut de l’Italie, les Germains espéraient peut-être la Grèce, et il est à croire qu’ils ont rêvé à leur tour de Delphes et de ses richesses. Mais à l’approche des montagnes (vers Belgrade), ils se heurtèrent à d’autres tribus gauloises, les Scordisques[105]. Le chemin était fermé partout. Depuis l’embouchure du Rhin jusqu’à celle du Danube, les nations gauloises se suivaient sans interruption, barrant le passage aux invasions, entourant le monde méditerranéen d’un boulevard protecteur (avant 113).

 

V. — ROME AFFAIBLIT LES ÉTATS CELTIQUES.

Mais, à la même époque, ces nations celtiques, contre lesquelles la Barbarie était impuissante, furent affaiblies et menacées par le peuple romain lui–même.

On a déjà vu la ruine de l’empire formé par les Arvernes cher, les Gaulois de l’Occident. Au nord de l’Italie, les Romains gravissaient les sentiers des Alpes, assaillant et massacrant les tribus gauloises et ligures qui les gardaient[106]. Sur la frontière de l’Adriatique, ils franchirent les cols des Alpes Juliennes, attaquèrent ou tracassèrent le riche et pacifique royaume de Norique[107], et s’ils lui laissèrent sa liberté, ce fut après lui avoir imposé un traité et maîtrisé ses forces (115)[108]. Plus à l’est enfin, les gouverneurs de la Macédoine ne laissaient aucun repos aux Scordisques (117-109), dont le nom même finira par s’oublier[109].

Des Pyrénées à l’Hémus, les contemporains de Caïus Gracchus étaient sortis de la réserve que les Scipions s’étaient imposée à l’endroit des Barbares du Nord. Partout, les expéditions avaient été fructueuses et la gloire facile. Ces peuplades celtiques allaient tomber comme une moisson déjà mûre entre les mains du sénat.

C’est alors que, par-dessus les Gaulois affaiblis, se présentèrent à nouveau les Cimbres, et que Rome, pour la première fois, eut à combattre l’invasion germanique.

 

VI. — LA VICTOIRE DES CIMBRES A NORÉIA.

La masse des émigrants, remontant la Save ou la Drave, pénétra dans l’État gaulois de Norique[110]. Cette fois, ils furent assez heureux pour n’être point repoussés : ils s’avancèrent jusque près de Noréia (Neumarkt), qui servait de capitale au royaume[111]. Ils n’étaient plus qu’à cinq étapes de l’Italie.

Le sénat envoya sur place un consul et une armée. Les Cimbres connaissaient déjà le nom de Rome, et, comme tous les Barbares, ils s’inclinèrent d’abord devant ce peuple de dieux[112] : ils se déclaraient prêts à s’éloigner des Alpes et à évacuer le Norique. Mais le consul, Cneius Papirius Carbon, décida de les attaquer quand même[113].

Il y avait, en cette année 113, vingt ans que Scipion Émilien s’était emparé de Numance. Depuis ce temps, Rome se trouvait sans grand capitaine et sans ennemi redoutable. Les guerres de Gaule et d’Illyrie furent à peine plus que des passe-temps. La discipline s’était relâchée ; les généraux cherchaient moins la gloire que le butin : ces campagnes des Alpes ne furent que des opérations de brigandage[114]. Carbon et son armée allèrent au-devant des Cimbres comme s’il ne s’agissait que d’une chasse à l’esclave.

L’illusion se dissipa vite. Des maladresses et des perfidies furent commises par le consul ; le nombre et la bravoure des Cimbres leur fournirent une rapide vengeance. Beaucoup de Romains furent tués, et toute l’armée eût péri, sans un orage qui sépara les combattants[115]. A la première rencontre entre Latins et Germains, la honte de l’Allia avait failli se renouveler.

Mais, même vaincue, le grand nom de Rome en imposait aux Cimbres. Ils ne franchirent pas les Alpes, et ne durent profiter de leur victoire que pour piller les Gaulois de Styrie, enrichis par trois siècles de paix et de travail[116] Les Celtes se trouvèrent, autant que les Romains, les vaincus de la première bataille.

 

VII. — LE MONDE BARBARE EN MOUVEMENT VERS LE SUD.

Les évènements qui suivent sont mal connus. Une seule chose est certaine, c’est que les peuples du Nord, Gaulois et Germains, s’agitèrent pour de nouvelles entreprises, comme si la défaite de Rome avait suscité d’audacieuses espérances.

Chargés de butin, les Cimbres remontèrent le Danube et refirent en vainqueurs, à travers les pays celtiques, la route qu’ils avaient parcourue en fugitifs. Leur but, cette fois, était de franchir le Rhin et de passer en Gaule[117] Ils mirent quatre ans avant d’arriver sur les bords du fleuve (113-109).

Vers ce temps–là, leurs frères, Teutons et Ambrons, quittaient à leur tour les terres septentrionales et se dirigeaient contre ce même fleuve et cette même Gaule (avant 105). La troupe paraissait aussi formidable que celle des Cimbres, trois cent mille âmes ou davantage[118]

Des Celtes, les plus exposés étaient alors les Helvètes. Leur domaine s’étendait surtout entre le Rhin, le Mein et le Neckar. C’était une admirable position, près de ce carrefour de Francfort[119] qui a fait si souvent la loi au commerce de l’Europe centrale : de là, les Helvètes donnaient la main, d’un côté aux Celtes de l’Empire arverne, et, de l’autre, à ceux du Danube ; et de là encore, dix chemins rayonnaient au nord vers les plaines de la Basse Allemagne, par les vallons de la Hesse et les défilés du Taunus. Si Celtes et Germains arrivaient à s’entendre, c’est en ce lieu que pourrait être le foyer de leur alliance. Mais pour le moment, comme il y a lutte entre ces deux groupes d’hommes, les Helvètes seront les premiers à souffrir : ils ont à redouter les Suèves de l’Elbe, qui grandissent et s’étendent, et les Cimbres errants, dont on prévoit le retour. — Devant ces dangers[120], une partie de ce peuple, et entre autres la tribu des Tigurins, résolut de renoncer à son antique patrimoine. Plutôt que d’être les victimes des Cimbres, les Helvètes préférèrent les imiter et s’enrichir des dépouilles d’autrui. On les vit remonter le Rhin à la recherche de terres ou de butin[121]. L’un après l’autre, sous les coups de Rome et les menaces des Germains, les États celtiques se disloquaient, et leurs tribus revenaient à l’incohérence d’autrefois.

C’était vers la Gaule que convergeaient toutes ces bandes. De ce côté, point de montagnes à franchir, un pays fort riche, des nations désunies, aucune résistance à craindre, sauf des légions que Rome enverrait dans sa province. La Gaule allait devenir le champ de bataille où les hommes du Midi défendraient leur œuvre contre les Barbares du Nord.

 

VIII. — CAMPAGNES CONTRE LES HELVÈTES ET LES VOLQUES.

Les Cimbres arrivèrent les premiers (109), franchirent le Rhin (vers Mannheim ?)[122] et rencontrèrent, on ne sait où, l’armée du consul Marcus Junius Silanus.

Même après leurs victoires et leurs courses extraordinaires, les Barbares manquaient encore de confiance. Ils se montrèrent, en face du consul, ce qu’ils étaient en réalité, un peuple vagabond, qui voulait sa place au soleil. Et ils supplièrent Silanus de la leur donner dans l’Empire, pour y vivre sujets et soldats de Rome. Leurs envoyés furent expédiés au sénat[123]. Mais celui-ci avait trop d’hommes et pas assez de terres[124] : Silanus reçut l’ordre de ne point traiter. Les Barbares alors, dit-on, attaquèrent les premiers, et ce fut pour leurs adversaires un désastre pareil à celui de Noréia (109)[125]. — Cependant, les Cimbres n’osèrent pas prendre les terres qu’ils avaient demandées. Ils n’entrèrent pas en Italie, ni même dans la Gaule romaine, et ils s’éloignèrent vers l’occident[126].

La défaite de Silanus acheva d’ébranler le monde. A peine les Cimbres avaient-ils disparu, que les Helvètes se présentèrent à leur tour aux frontières de la Province (109-8). Le sénat, partout, cessait d’être redoutable. L’Afrique était soulevée et victorieuse sous les ordres de Jugurtha (110-109). A l’approche de leurs frères de Celtique, les Gaulois soumis à Rome s’agitèrent dans l’espoir de la liberté[127], et les Volques Tectosages du Haut Languedoc, jusque-là si paisibles, méprisèrent le traité qui les unissait à l’Empire, et emprisonnèrent la garnison de Toulouse[128]. Du lac de Genève aux Pyrénées, l’œuvre de Domitius était compromise[129] ; tout l’Occident semblait sur le point d’échapper au peuple romain.

Ce qui sauva l’Empire, ce fut que ses ennemis ne surent pas s’entendre. Quand les Helvètes se montrèrent, les Cimbres et les Teutons erraient au loin dans la Gaule, et Jugurtha ne s’occupait que de ses affaires. Comme il était l’ennemi le plus redoutable, on lui réserva les deux meilleurs généraux, Metellus et Marius (109-105), et on expédia contre Helvètes et Volques des hommes médiocres, le consul Lucius Cassius Longinus (107) et son successeur Quintus Servilius Cépion (106).

Il n’y eut du reste, pour le moment, que demi-mal. La Province laissée sans armée par la défaite de Silanus, les Helvètes purent la traverser sans peine[130] : ils se dirigeaient vers Toulouse, peut-être pour s’entendre avec les révoltés du Languedoc. A l’approche du nouveau consul, Cassius, ils ne songèrent plus qu’à quitter la terre romaine, et, par la Garonne, ils s’échappèrent vers l’Aquitaine. Cassius les poursuivit, et il les atteignit presque à la frontière, chez les Nitiobroges de l’Agenais[131]. Mais les Helvètes étaient commandés par un jeune chef, hardi et intelligent, Divico[132]. Il tendit un piège au consul ; celui-ci s’y laissa prendre, et il lui fallut combattre dans les pires conditions. Il fut tué, et après lui son premier légat, Lucius Calpurnius Pison ; le reste de l’armée s’enfuit dans son camp. Pour la sauver, son chef improvisé, le légat Caïus Popillius, dut livrer des otages, abandonner la moitié des bagages, et même, dit-on, laisser passer sous le joug tous ceux qui avaient survécu[133]. Il semble qu’en échange les Helvètes cessèrent pendant quelque temps d’inquiéter la province gauloise (107).

Les Volques de Toulouse, abandonnés à eux-mêmes, ne purent avoir raison de la domination romaine : le consul Cépion arriva à temps pour sauver la garnison[134], et, pour que sa victoire ne demeurât pas sans profit, il pilla la ville indigène[135] et confisqua tous les trésors accumulés par les dévots dans les enceintes et les étangs sacrés[136] de la vieille Toulouse (106). Ce fut une prise superbe : plus de deux cent mille livres d’or et d’argent[137] furent expédiées à Marseille pour y être chargées à. destination de Rome et du sénat. Mais Cépion n’entendait pas avoir travaillé seulement pour le trésor public. En route, l’escorte qui accompagnait le butin fut attaquée et massacrée, et les choses précieuses disparurent. On demeura convaincu que Cépion était le bandit ; un procès lui fut intenté, qui en provoqua d’autres. Des légendes se formèrent sur l’or de Toulouse : on raconta qu’il était maudit des dieux, que les Volques l’avaient volé à l’Apollon de Delphes, les Romains à l’Apollon des Celtes, et Cépion aux dieux de son peuple : quiconque y touchait périrait[138]. Après les défaites, les hontes se multipliaient dans l’Empire romain : le joug chez les Helvètes et le sacrilège chez les Volques. Il fallait s’attendre aux pires catastrophes[139].

 

IX. — LA BATAILLE D’ORANGE.

Les Cimbres vengèrent les dieux et la bonne foi[140]. Quatre ans après leur victoire sur Silanus, ils reparurent aux frontières de la Gaule romaine, et cette fois ils n’étaient plus seuls. Les Teutons, les Ambrons, les Helvètes, les avaient rejoints[141] Toute la Barbarie s’était enfin conjurée contre le nom latin, et un demi-million d’hommes se déversa vers le Sud.

Rome avait envoyé au delà des Alpes toutes ses forces disponibles, 80.000 hommes, dit-on[142], sous la conduite du consul Cneius Mallius Maximus[143] et de Cépion, demeuré en Gaule comme proconsul. C’était plus de soldats qu’il n’en fallait pour se délivrer des Barbares. Mais les chefs, d’ailleurs sans cesse en querelle[144], étaient vulgaires, médiocres, orgueilleux, cupides et téméraires[145] J’imagine que l’armée ne valait pas mieux[146]. Mais, des deux bons généraux de Borne, Metellus était en disgrâce, et Marius en finissait avec Jugurtha.

En première ligne (vers Vienne ?) se tenait un corps d’avant-garde, commandé par un légat de rang consulaire, Marcus Aurelius Scaurus[147]. Plus au sud, les deux chefs s’étaient partagé la Province, et Mallius à l’est, Cépion à l’ouest du Rhône, attendaient l’ennemi chacun avec ses légions[148].

Les Barbares, d’un seul coup, se débarrassèrent de Scaurus, lui battirent son armée et le firent prisonnier. On raconte que le légat montra dans son malheur une superbe toute romaine : introduit dans le conseil des rois, il leur déclara qu’ils pouvaient renoncer à l’Italie, et que Rome était invincible. Un roi timbre, saisi de colère, le tua là-dessus[149], et les coalisés s’apprêtèrent à donner un nouveau démenti à la parole du sénateur.

La masse barbare se mit en branle sur la rive gauche du Rhône. Epouvanté, Mallius, qui la gardait, appela son collègue. Cépion refusa de traverser le fleuve[150]. Puis, craignant que le consul ne remportât la victoire à lui seul, il se ravisa, et le rejoignit avec ses légions. Les deux armées n’en restèrent pas moins séparées, chacune campant de son côté[151].

A leur tour, les Barbares s’effrayèrent de se voir tant d’ennemis, et, comme avant chaque bataille, ils envoyèrent une ambassade pour supplier le consul[152]. Qu’on leur assigne des terres, qu’on leur distribue du blé, et ils resteront en repos[153]. Les députés furent éconduits, et peu s’en fallut que Cépion ne les fît massacrer[154].

Mais qu’allait-il advenir si on laissait faire ce forcené ? Les soldats prirent peur, et obligèrent Cépion à conférer avec le consul. Une entrevue eut lieu : elle n’aboutit qu’à un échange d’injures[155]. Des envoyés du sénat arrivaient, invitant les généraux à la concorde, Cépion refusa de les entendre[156]. Et même lorsque l’ennemi se présenta pour l’attaque, les deux chefs ne voulurent point rapprocher leurs légions[157].

La bataille eut lieu dans la plaine entre Orange et le Rhône[158], le 6 octobre 106[159], d’abord contre Cépion, puis contre Mallius[160]. Ce furent les Barbares qui attaquèrent[161] : les Anciens nous ont laissé l’impression comme d’une chevauchée monstrueuse, d’un ouragan d’hommes et de bêtes, balayant le sol jusqu’au fleuve[162], renversant les légions et leurs camps, semant partout le désespoir, la fuite et la mort[163]

Quand l’armée romaine eut disparu[164], que ses deux camps eurent été détruits, les Gaulois et les Germains ne songèrent plus qu’aux dieux. Ils ne voulurent rien prendre de leur victoire, ni hommes ni choses[165] : l’or et l’argent furent jetés dans le Rhône, les armes et les vêtements furent brisés ou déchirés, les captifs furent pendus aux arbres, et les chevaux offerts au fleuve. Tous les Esprits de la terre eurent leur part du butin[166].

Les deux chefs échappèrent[167], mais il ne restait plus aucune force militaire entre les Alpes et les Pyrénées. L’Espagne et l’Italie étaient ouvertes aux Barbares. Rome se crut à la veille de perdre l’empire du monde, et de l’abandonner aux nations du Nord[168].

Mais leurs destinées n’étaient point prêtes. Une dernière fois, les Germains reculèrent devant l’Italie et se retournèrent vers le couchant. A la même date, Marius ramenait dans Rome Jugurtha vaincu[169]. Le peuple et le sénat pouvaient opposer enfin aux Barbares une armée et un général de premier ordre. On les envoya en Gaule aussitôt après le triomphe (1er janvier 104)[170], et l’éloignement de l’ennemi leur donna le loisir de se préparer à la lutte suprême.

 

X. — LA DÉVASTATION DE L’OCCIDENT.

Comme auparavant, ce furent les Gaulois qui pâtirent le plus de la défaite des Romains. Après la bataille d’Orange, les Cimbres et les Teutons se séparèrent[171] : les premiers, plus habitués que leurs frères aux soldats et aux généraux du Midi, se réservèrent le Languedoc et l’Espagne ; la Gaule fut donnée aux Teutons[172]

Ils avaient déjà traversé toute la contrée pour rejoindre leurs compagnons d’aventures : ils y revinrent pour piller ou pour conquérir.

Au nord, ils trouvèrent une forte résistance. Les Belges eurent le temps et la volonté de s’unir contre eux : c’étaient du reste les plus braves des Gaulois, et ils connaissaient de longue date ce genre d’ennemis. Les Teutons furent écartés de leurs terres[173]. Tout ce qu’ils purent obtenir ou prendre, ce fut le pays de Namur, le long de la Meuse, sur la grande route qui menait en Allemagne. Ils y laissèrent 6000 hommes, qu’on appellera plus tard les Aduatiques[174], et qui feront souche d’une puissante tribu. Pour le moment, ils ne restaient là que pour garder les bagages et le butin, jusqu’au jour où les Cimbres et les Teutons reviendraient du sud et retourneraient chez eux par cette route[175]. Ce qui semble prouver que la plupart des émigrants avaient renoncé à prendre des terres dans le Midi, et qu’ils s’occupaient d’assurer leur retour, après une dernière campagne de butin au delà des monts.

Si la Belgique put éviter le désastre, les Celtes souffrirent tous les maux[176]. Les Teutons avaient beau jeu dans leur pays : plus de pouvoir central, les peuples désunis, des luttes sociales et politiques, la honte des dernières défaites. Rome avait préparé le champ pour eux.

Il paraît bien que les Gaulois n’ont essayé de lutter ni en batailles rangées ni en campagnes d’escarmouches. Ils ne songèrent qu’à sauver leur vie : les terres découvertes furent abandonnées, et la population s’enferma dans les places fortes.

Les Teutons, après avoir pillé le pays, essayèrent d’enlever les villes. Mais, comme tous les Barbares, ils n’entendaient rien aux sièges, et ils durent se borner à quelques blocus. Au milieu des campagnes recouvertes d’ennemis, les cités gauloises demeurèrent séparées du monde. On raconta plus tard, de ces années de misères, d’effroyables épisodes. Dans certaines villes, la famine fut telle qu’il ne resta le choix qu’entre la reddition et la mort : on tua ceux qui ne pouvaient combattre, et leurs corps servirent à nourrir les survivants[177]. Enfin, le flot des Teutons s’écoula hors de ces régions dévastées (105-103 ?).

Les Cimbres, pendant ce temps, avaient pillé le Languedoc[178] et étaient passés en Espagne[179]. Ils se trouvaient là chez les Romains. Chose étrange ! aucun souvenir ne nous est resté de ce qu’ils firent. Nous ignorons si des légions les ont combattus, et jusqu’où ils sont allés. On rapporte seulement qu’ils furent la cause de grands maux, mais que les Celtibères réussirent à les battre[180]. Aux deux extrémités de l’Occident, en Belgique et en Aragon, les Germains avaient rencontré des adversaires qui ne les craignaient point.

A la fin, les Cimbres repassèrent les Pyrénées pour rejoindre les Teutons, et la masse reformée devait gagner l’Italie.

 

XI. — MARIUS EN PROVENCE[181].

L’armée que Marius amena en Gaule, au printemps de 101, ne ressemblait pas aux misérables troupes qui s’étaient laissées égorger à Orange et à Noréia[182]. Une partie en était formée par les vieux soldats venus d’Afrique, où, sous les ordres de Metellus et de Marius, pendant cinq ans, ils avaient tenu tête aux indigènes de Jugurtha, les ennemis les plus rusés et les plus audacieux que home eût connus depuis les Celtibères : à l’école d’un tel adversaire, ils avaient acquis l’habitude du sang-froid, beaucoup d’entrain et l’esprit de décision[183]. Autour de ces vétérans se groupaient les recrues de l’année[184]. Mais Marius excellait à former le soldat et à dresser une armée : en quelques mois, sous sa main, les éléments disparates fusionnaient, et la légion sortait, homogène et compacte, comme fondue d’un seul jet[185]. Ce fut à cette tâche qu’il consacra le temps de la marche et les premiers mois passés en Provence[186] : à défaut de la bataille, il façonna et fatigua les hommes par les courses, les fardeaux, les besognes journalières. Il se montra sévère, violent et criard. Et les conscrits, traités en mulets par ce terrible chef, eurent d’abord une grande frayeur[187]. Au surplus, il n’avait que l’apparence de la dureté, du moins quand il s’agissait de ses légions. Ce n’était point un général à l’ancienne mode, hautain, froid et méticuleux : l’esprit démagogique était passé en lui. Tout en exigeant d’eux une obéissance précise et une discipline absolue, il tenait à convaincre ses soldats[188] autant qu’à leur commander. Il se mêlait à eux, partageait leur vie, leur parlait en camarade et les hommes connaissaient vite que le consul et eux étaient attachés à une œuvre commune[189].

Chef excellent, Marius ne fut pas un grand capitaine ; que Rome ait fait de lui un dieu[190], c’est pur engouement de parti, et parce que les Cimbres avaient inspiré une grande peur. Il apparut, dans ses campagnes, plus sage que hardi, parfois timoré, d’une imagination assez courte et d’une prudence consommée. Il n’était point destiné aux vastes opérations, audacieuses et compliquées : mais il préparait à fond une bataille, et il ne laissait rien au hasard[191]. S’il lui manquait l’envergure d’un conquérant, il était fait pour ne rien craindre d’un adversaire et d’un danger.

On le savait à Rome, on pressentait en lui l’obstacle désigné par les dieux pour arrêter le péril barbare. Une fois envoyé en Gaule, on ne voulut pas qu’il revint sans avoir combattu, on l’y laissa, et toujours avec le titre de consul, décerné en son absence et continué chaque année, toutes choses contraires aux lois ou aux coutumes (104-102)[192].

Car, devant le danger qui s’approchait, on imposait silence aux lois, et les habitudes romaines s’oubliaient. L’armée et l’état-major de Marius offraient un étrange spectacle. Il s’y trouvait des hommes et des dieux venus des points les plus opposés de l’Empire, comme si l’Italie avait fait appel à toutes les forces du monde qu’elle avait vaincu et qu’elle protégeait maintenant. A côté des légionnaires, prolétaires sortis des boutiques et des taudis de Rome[193], se trouvaient les cohortes des coureurs ligures, chasseurs et bergers descendus de leurs montagnes et prêts à pousser leur sauvage cri de guerre[194]. Des Grecs de Marseille, soldats, trafiquants, convoyeurs ou interprètes, accompagnaient l’armée, rendant d’ailleurs les plus grands services. Autour de Marius, des officiers bien choisis, hardis, sérieux et intelligents, comme l’Italien Sertorius, qui apprenait la langue gauloise pour diriger le service des renseignements[195], le Romain Sylla, toujours à la recherche des coups de main et toujours assuré de les réussir[196]. Aux aigles de bronze des légions[197] se mêlaient des vautours de Gaule, hôtes familiers des soldats[198]. Une prophétesse syrienne, Martha, ne quittait pas le camp et la personne même de Marius, assistant aux sacrifices en robe de pourpre, une javeline, à la main[199].

L’année 101 se passa dans l’attente. On eût pu, je crois, occuper l’armée à quelque expédition dans la Province même. Depuis dix ans qu’avaient commencé les malheurs de Rome au delà des Alpes, son pouvoir était compromis des deux côtés du Rhône. Les Allobroges se plaignaient ; même après le pillage de Toulouse, les Volques Tectosages tinrent longtemps la campagne[200]. Marius se défia toujours des Celtes et des Ligures du pays, et dut prendre des précautions contre leurs menées[201]. — Mais le prudent général jugea plus sage de patienter à l’endroit des indigènes : tout se borna à un exploit de Sylla, qui captura le roi des Tectosages[202], comme il avait jadis enlevé Jugurtha.

On s’attendait à voir les Barbares au printemps de 103[203] : ils ne parurent point. Les soldats risquaient de s’énerver dans l’oisiveté[204]. Marius eut le bon sens de les occuper sans relâche. Dans cette province toute récente, il ne manquait pas de grands travaux à entreprendre pour le profit de la contrée et le bénéfice du peuple romain. Le consul y employa ses hommes, et ce fut peut-être le premier général qui ait fait servir des légions à des œuvres utiles.

L’œuvre principale[205] que Marius imposa à son armée fut de construire un canal entre le Rhône et la mer (depuis Fos jusqu’à l’île des Pilotes ?[206]). La barre du fleuve rendait fort difficile l’accès du bras principal[207] : le chenal ouvert par les Romains, large et en mer profonde, permit d’éviter les dangers ou les lenteurs de l’entrée en rivière[208]. — Marius, en ordonnant cette tâche, l’expliqua par des nécessités militaires : il campait près du Rhône, il avait besoin de ravitailler son armée par le fleuve, vite et sûrement[209]. Mais le canal devait être aussi d’un grand secours pour le commerce, et il ne pouvait déplaire au consul de rendre service aux négociants et aux chevaliers, qui l’avaient porté au pouvoir et qui l’y maintenaient[210].

Les soldats se plaignaient parfois de ces besognes : ils n’étaient plus, disaient-ils, que de vulgaires terrassiers, creusant des fossés et nettoyant des marécages[211]. Mais le général put les contenir le temps nécessaire, et, deux ans après son arrivée en Provence, on annonça le retour des Barbares (fin de 103 ?)[212]. Le monde entier était dans l’attente. Des prodiges survenaient en Europe et en Asie ; les dieux et les prophètes de l’Italie et de la Grèce tournaient leurs regards vers Marius[213].

Les Cimbres rejoignirent en Gaule les Teutons, les Ambrons et les Tigurins eux-mêmes[214]. Contre cette multitude, les légions de Marius eussent été peut-être insuffisantes[215]. Mais à peine réunie, elle se disloqua de nouveau[216].

Il est vrai que ce fut après avoir arrêté une attaque d’ensemble contre l’Italie, le plan le plus intelligent et le plus grandiose qu’ait jamais conçu une imagination de Barbare ; et, pour l’avoir formé, il faut que les chefs de ces hommes aient connu le pays où ils allaient, les routes qui y conduisaient, les armées qui leur seraient opposées.

La frontière italienne, autrement dit la chaîne des Alpes, se présente sous trois lignes, bordant chacune un côté de l’horizon : le couchant vers la Gaule, le nord vers l’Allemagne, le levant vers l’Autriche. Les émigrants se partagèrent en trois armées, et chacune eut sa ligne d’attaque et d’invasion[217]. Les moins nombreux, les Tigurins, furent envoyés à l’est, dans le Norique, pour occuper les Alpes Juliennes[218] : c’était là en effet, près de l’Adriatique, qu’étaient les seuils les plus bas et les cols les plus faciles[219]. La troupe la plus aguerrie, les Cimbres, choisirent la route la plus pénible, celle du centre, qui va d’Innsbruck à Vérone par le Brenner et le défilé de l’Adige. Pour les Teutons, ils iraient droit devant eux, le long du Rhône et du littoral ligure[220]. Rendez-vous était donné dans les plaines du Pô[221], vers lesquelles convergeraient bientôt les bandes qui s’écartaient maintenant. Et pour cet extraordinaire projet, si vaste et si simple, les Germains ne s’embarrassèrent ni des montagnes, ni des distances, ni des chemins, ni des saisons[222], se préparant à circuler dans le chaos de l’Europe centrale, guerriers, femmes et bestiaux, avec la même aisance que s’il s’agissait de manœuvrer sur un terrain de manège.

Rome leur opposa deux principales armées : celle du consul Catulus fut installée en Vénétie, contre les Cimbres et les Tigurins, celle de Marius attendit les Teutons en Provence. On pouvait espérer que celui-ci, qui allait prendre tout de suite contact avec l’ennemi, s’en déferait assez tôt pour rejoindre son collègue en Italie avant l’arrivée des Cimbres. Et il fallait avoir cette espérance : car, disait-on, si Marius était battu, c’en était fait de Rome[223].

Marius attendait l’ennemi au confluent de la Durance et du Rhône, au carrefour de toutes les routes du Midi, à la portée de Marseille et de ses convois (près de Barbentane ?)[224]. Son camp était à l’abri des plus fortes attaques et dominait les chemins et la plaine[225]. D’immenses provisions y étaient entassées, et l’armée entière s’y réunit. Le consul ne voulait rien risquer, en face d’un ennemi que des légions n’avaient jamais vaincu, et que ni lui ni ses cohortes n’avaient encore vu de près[226] (août 102[227]).

Quand les Barbares apparurent, officiers ou soldats romains demandèrent aussitôt le combat. Marius fit défendre de sortir du camp, et, à tour de rôle, il posta tous les hommes sur les retranchements, avec la seule consigne de regarder et d’écouter les Barbares. Peu à peu, ils s’accoutumèrent à leurs clameurs, à leurs figures et à leurs gestes ; ils apprirent à connaître leurs armes. La peur s’éloignait du camp romain : et c’était elle surtout qui avait amené les catastrophes[228].

Les Teutons devenaient à leur tour plus hardis. Ils pillaient tout le pays sous les yeux des Romains ; ils s’approchaient du camp, à portée des traits et de la voix[229]. L’un d’eux provoqua Marius à la manière de son peuple[230]. D’autres finirent par tenter un assaut. Mais les Barbares étaient incapables d’un siège. Ils furent repoussés à coups de flèches ou de javelots[231], et les Romains purent juger de leur manière de combattre. Après trois jours[232] d’efforts inutiles, ils prirent le parti de se remettre en route, et, laissant là les Romains, de gagner l’Italie par la route de la Provence[233].

Six jours durant, leurs files innombrables passèrent le long du camp, en vue des légionnaires montés sur le rempart. De grosses plaisanteries s’échangeaient, et les Barbares offraient aux Italiens de se charger de commissions pour leurs femmes, auxquelles ils auraient bientôt à parler[234]. Les Romains regardaient, et Marius laissait dire : c’était pour lui une occasion inespérée de dénombrer l’armée entière de ses ennemis. Son plan, d’ailleurs, était déjà arrêté[235] : comme les Teutons s’avançaient avec une extrême lenteur, rien ne lui était plus facile que de les rejoindre ou de les dépasser, et de les combattre au bon endroit et au bon moment. A peine les dernières troupes disparues, il sortit de son camp et développa ses légions en ordre de marche[236].

En Provence, les Teutons s’engagèrent sur la route d’Italie, la seule qu’ils pussent prendre. Elle les menait dans la vallée de l’Arc, et ils devaient passer sous les murs de la forteresse d’Aix, qui gardait le chemin. Marius, au lieu de suivre les Barbares, prit des voies de traverse, courut plutôt qu’il ne marcha, dépassa les bandes sans être vu[237], et arriva à Aix en même temps que leur avant-garde[238].

XII. — LA BATAILLE D’AIX.

Cette fois, il voulait la bataille[239], et, dans ce pays qu’il connaissait bien, il la plaçait à merveille. A Aix, la route et la rivière de l’Arc, jusque-là libres dans la plaine, s’insinuent entre deux chaînes de très hautes collines[240]. Au couchant, par où les Barbares arrivaient, c’était, sur la rive droite de l’Arc, une immense esplanade où leur multitude allait se répandre[241] ; au levant, c’était le défilé où elle devait ensuite s’amincir en longues files ; au nord, près des sources chaudes, sur le penchant des dernières hauteurs, Aix surveillait les abords du passage[242] ; au sud enfin, de l’autre côté de l’Arc, Marius, campé sur les collines (le Montaiguet ?[243]), dominait la plaine, le défilé et la rivière[244]. Les Barbares seraient pris comme dans un étau[245]

Quand le général installa son camp, il n’y avait encore, dans la plaine, que les Ambrons : c’étaient les plus braves des Germains, mais ils n’étaient que trente mille, et, ignorant sans doute l’arrivée de l’ennemi, ils ne songeaient qu’à boire, dormir ou se baigner, dans cette campagne d’Aix si fertile, si chaude et si riante[246]. Le consul jugea bon de s’en débarrasser tout de suite, et, avant même d’avoir achevé les remparts du camp, il consentit à la bataille[247].

Tous les avantages du terrain étaient d’ailleurs pour lui. Il laissa les Ambrons prendre la formation de combat et s’avancer en bon ordre, hurlant leur cri de guerre et frappant leurs armes en cadence. Mais, en passant la rivière, qui les séparait du camp romain, leurs rangs se disloquèrent, et alors Marius lança sur eux, dévalant de la hauteur au pas de course, les Ligures d’abord[248] et les légionnaires ensuite. Surpris par la charge, les Barbares reculèrent en désordre : le massacre en commença dans les eaux de l’Arc, il se continua sur la plaine, et ne finit qu’autour des chariots du campement. Là, les femmes se mêlèrent au combat, armées d’épées et de haches ; et, devant cette résistance sauvage, les Romains s’arrêtèrent et regagnèrent leur camp à la fin du jour[249].

C’était la première victoire remportée sur les Germains : mais il restait à combattre le gros de l’armée, la foule des Teutons qui arrivaient sur le champ de bataille[250]. Les Romains veillèrent toute la nuit, dans la crainte d’une attaque[251]. Des bruits effroyables remplissaient la plaine ; des hurlements de colère, des lamentations pareilles à des cris de bêtes, montaient jusqu’au camp, et les légionnaires demeuraient aussi troublés qu’après une défaite[252].

Le jour se leva, les Barbares n’attaquèrent point : l’armée romaine put se reposer ; Marius voulut qu’elle mangeât et s’endormît de bonne heure. Il avait fixé au lendemain l’action décisive[253].

Ce soir-là, il fit sortir du camp Claudius Marcellus avec trois mille hommes. L’officier devait, à la faveur de la nuit, faire par les collines le tour de la plaine où campait l’ennemi, et se poster derrière lui, sur les hauteurs et dans les vallons boisés qui dominaient son campement. A l’heure du combat, il interviendrait[254].

Au matin d’une tiède journée d’automne[255], Marius envoya ses cavaliers dans la plaine, et rangea ses légions, devant le camp, en ordre de bataille. Les Teutons acceptèrent joyeusement le combat, et, sans attendre l’attaque, ils montèrent à l’assaut de la colline. Le consul les laissa gravir les premières pentes, et, quand ils furent à portée, commanda le jet du javelot, puis la charge à l’épée. La double manœuvre produisit sur les Germains l’effet rapide et meurtrier qui avait déjà ruiné tant d’armées gauloises. Le désordre se mit dans leurs rangs, et, sur ce terrain en pente, ils ne purent garder l’équilibre de combat. Ils reculèrent, mais, à peine arrivés en plaine, ils savaient reformer leurs rangs[256]. A la différence des Celtes, le premier choc ne les abattait pas, et l’affaire s’annonçait terrible. C’est alors que Marcellus fit débusquer ses hommes par derrière, en poussant de longues clameurs. Les dernières lignes se débandèrent, le désarroi gagna de proche en proche[257]. On était aux heures les plus chaudes de la journée[258] : les Germains ne pouvaient lutter à la fois contre le soleil, le trouble et l’ennemi. La fatigue et la faiblesse les livrèrent bientôt sans défense, et la vraie bataille prit fin[259].

 

XIII. — CONSÉQUENCES DE LA BATAILLE POUR LA GAULE.

Le reste de la journée et la journée suivante furent consacrées à égorger ou à prendre ce qui restait[260]. On tua plus de cent mille hommes, on fit près de cent mille prisonniers[261], peut-être davantage, si l’on compte les femmes et les enfants. Beaucoup périrent de leurs propres mains : trois cents Germaines, sans doute les prêtresses[262], acceptèrent de se rendre si on faisait d’elles les esclaves des déesses et non pas des hommes ; sur un refus, elles s’étranglèrent[263]. Il ne s’échappa que quelques cavaliers, chefs ou autres. On les traqua. Une troupe put s’enfuir le long du Rhône ; elle allait s’évader par le Rhin : les Séquanes la capturèrent et l’expédièrent au vainqueur[264]. Parmi les fugitifs qu’on saisit fut un roi des Teutons, peut-être le chef de guerre de la horde, Teutobod : c’était un homme d’une taille et d’une force surhumaines, qui fatiguait jusqu’à six chevaux dans une bataille[265]. Près d’Aix, une jonchée continue de cadavres recouvrait la plaine et le lit de la rivière[266]. Des milliers de prisonniers, des amas de chariots et d’armes, s’entassaient aux abords du camp[267]. Je ne crois pas que depuis l’origine de Rome, aucun imperator eût encore fait, en si peu d’heures, une œuvre de destruction aussi formidable.

Les êtres vivants et les plus belles choses furent réservées pour le butin légitime et pour le triomphe[268]. Le reste, réuni en monceau, forma un trophée colossal que l’on offrit aussitôt aux dieux de la victoire. L’armée se rangea alentour, en costume de guerre et couronnée de fleurs. Marius s’approcha, vêtu du manteau de pourpre, tenant la torche allumée et l’élevant des deux mains vers le ciel. Mais soudain arrivèrent, bride abattue, des messagers de Rome, apportant au général la nouvelle de son cinquième consulat. Et, au milieu de la joie et des acclamations de tous, l’énorme bûcher s’enflamma.

Les uns après les autres, les vainqueurs et leurs amis reçurent leur récompense. Marius était continué dans la magistrature souveraine[269]. Chacun de ses soldats put espérer sa part d’esclaves et de butin[270] A la cité de Marseille, qui avait rendu les plus grands services, le général abandonna la propriété ou l’usufruit du canal du Rhône, avec le droit d’y lever des taxes à la montée et à la descente[271] ; peut-être de nouvelles terres lui furent-elles données dans la vallée de l’Arc[272]. Les Séquanes obtinrent ou gardèrent le titre d’amis. Rome recouvrait au delà des Alpes ses alliances et son prestige.

 

XIV. — LA BATAILLE DE VERCEIL.

Mais pendant ce temps, l’Italie était enfin envahie par les Cimbres.

Les Cimbres avaient accompli autour des Alpes une marche extraordinaire. Ils avaient traversé la Suisse et le Tyrol, et s’étaient engagés sur le col du Brenner[273]. L’hiver qui survint ne les arrêta pas[274]. Ils montèrent et ils descendirent sans peur ces routes étroites, ardues et interminables de l’Europe centrale avec leurs femmes, leurs enfants, leurs chiens, leurs chevaux de guerre, leurs bêtes de somme et leurs chariots[275]. Ils étaient encore trois cent mille hommes[276]. Beaucoup étaient morts depuis près de vingt ans qu’ils avaient quitté leur patrie, mais des enfants étaient venus parmi eux, de nouvelles générations se groupaient autour des rois. Au-devant de la multitude s’avançait l’élite des quinze mille cavaliers, étincelant sous le métal de leurs cuirasses, les panaches de leurs casques et la blancheur de leurs boucliers[277].

Le général romain, Catulus, n’essaya pas de défendre le passage des Alpes[278]. Il attendit l’ennemi aux abords de Trente, pour lui disputer celui de l’Adige[279] Un pont réunissait les deux rives. En avant du pont, sur le bord ultérieur, il avait construit une forte redoute, défendue par une troupe d’élite ; en arrière, sur le bord d’en deçà, étaient le camp et le gros de l’armée. Mais alors les Romains virent un spectacle prodigieux, le plus émouvant de cette guerre inouïe. Les Cimbres se déchaînèrent, pareils à une trombe, sur la route, sur le pont, l’armée et la rivière même. Les uns faisaient flotter dans l’Adige des arbres entiers, qui allaient heurter et secouer les piles ; d’autres y précipitaient des quartiers de roches pour bâtir un nouveau pont ; et on en voyait qui du haut des cimes neigeuses, assis sur leurs boucliers comme sur des traîneaux, glissaient vers le chemin le long des précipices. On eût dit qu’ « ils arrachaient les montagnes, ainsi qu’avaient fait les Titans[280]. L’armée romaine perdit son sang-froid ; pour échapper au désastre, Catulus fit lever les aigles[281]. Il risqua d’abandonner à l’ennemi la garnison de la redoute. Mais, comme elle se battait fort bien, les Cimbres lui accordèrent la vie à de bonnes conditions, qu’ils jurèrent sur leur taureau de bronze[282] (janvier 101 ?[283]). — Les pires journées de la longue lutte commencèrent pour l’Italie. On dut abandonner le bas pays au nord du Pô, la Vénétie et la Lombardie même. D’Aquilée à Verceil, les Cimbres pillèrent toute la campagne, se gorgeant de vin et de victuailles, emplissant leurs chariots d’objets précieux[284]. Comme dans la Gaule livrée aux Teutons, les villes seules survécurent, épaves au milieu des flots ennemis[285].

A la fin du printemps, Marius revint avec son armée victorieuse[286]. Il rejoignit celle de Catulus, et, à la tête de plus de cinquante mille hommes, il se mit en campagne[287].

Le consul sentait ses troupes assez fortes et assez sûres pour lui permettre de renoncer aux lenteurs et aux précautions d’une guerre savante. Il franchit le Pô, alla chercher les Germains, qu’il rencontra fort loin vers l’ouest, entre Turin et Milan[288], et il ne refusa pas de parler avec eux. Leur chef de guerre, le roi Boïorix, vint le trouver, et, suivant la coutume des Barbares, lui proposa un jour et un lieu pour la bataille qui déciderait entre Rome et son peuple. Marius accepta, et le rendez–vous fut fixé à trois jours de là, dans les plaines de Verceil[289].

Des deux côtés[290], les troupes furent disposées avec intelligence, et les rangs furent pris avec ordre. Marius divisa son armée en trois corps, plaçant au centre le moins solide : il la tourna le dos au soleil, pour que l’ennemi eût contre soi la chaleur et la lumière de cette journée de canicule (30 juillet 101[291]). Les Cimbres firent de leurs bandes deux énormes parts : d’un côté, l’infanterie, massée en un carré d’une lieue et demie de front, et de l’autre, leurs quinze mille cavaliers. — Ce furent les Barbares qui se mirent les premiers en branle : leurs escadrons esquissèrent un mouvement de recul, les Romains eurent le tort de les suivre, sans trop réfléchir, et tandis que l’une des ailes, dirigée par Marius, se perdait dans la plaine à la recherche de l’ennemi, le centre, commandé par Catulus, vint à l’improviste se heurter à l’infanterie des Germains, qui se mettait en mouvement comme les flots d’une mer immense ; et cette partie de l’armée romaine souffrit d’abord beaucoup. Enfin, Marius rejoignit l’adversaire, et la mêlée générale s’engagea, presque à tâtons, au milieu d’une poussière aveuglante.

La chaleur du Midi eut raison des Cimbres autant que l’épée des légionnaires. Ils se battirent en désespérés : pour résister à la tentation de fuir et pour mourir ensemble, les premiers rangs s’étaient liés par des chaînes attachées aux baudriers, et ils périrent tous, à la place où ils avaient combattu. Les autres s’enfuirent jusqu’aux chariots du campement. Là, les femmes, vêtues de noir, leur donnèrent à comprendre qu’ils n’avaient plus qu’à mourir. Et le suicide des vaincus commença : les uns se firent écraser par les bêtes des attelages ; les autres se laissèrent égorger par les femmes elles-mêmes, sœurs, épouses ou filles ; et celles-ci, ensuite, étranglèrent les enfants, et se pendirent. Deux rois s’élancèrent l’un contre l’autre, l’épée en avant, et expirèrent du même choc. Tout valait mieux que l’esclavage à Rome[292]. Les Romains purent cependant sauver soixante mille prisonniers. On évalua au double le nombre des morts[293].

Vers la même époque, une campagne de Sylla délivra des Helvètes les Alpes du Norique[294] Beaucoup parvinrent du reste à s’échapper et, leur chef Divico en tête, à rejoindre leurs frères de Gaule[295].

 

XV. — CONSÉQUENCES DE LA GUERRE POUR L’HISTOIRE DE ROME.

Les nations errantes n’existaient plus. A leur place, plus de deux cent mille cadavres gisaient dans les plaines des deux Gaules, et cent cinquante mille esclaves s’en allaient peupler en Italie les ateliers, les fermes et les écoles de gladiateurs[296]. Eux et leurs fils n’oublieront jamais les temps glorieux de leur liberté et de leur vie vagabonde ; dans trente ans, sous les ordres de Spartacus, ils se retrouveront réunis en armée, et ils essaieront une dernière revanche[297].

Pour le moment, Rome est toute à la joie. Ces deux victoires ne lui ont sans doute pas donné un pouce carré de terrain, mais elles lui ont procuré la plus riche moisson d’esclaves qu’elle ait encore faite. La Ville Éternelle recouvrait sa gloire dans le monde : elle le sauvait des Germains, comme elle l’avait délivré des Gaulois[298]. Tout péril paraissait écarté des frontières de son empire. Elle salua Marius comme un nouveau fondateur[299].

Il y avait de l’exagération dans cette joie et dans ces dithyrambes : chevaliers et démagogues tenaient à transformer Marius en grand homme. Ces Cimbres et ces Teutons faisaient plus de bruit que de besogne. Nulle part, ils n’étaient parvenus à fonder un État et à prendre des villes, pas même dans la Celtique, pourtant si misérable. Ils avaient reculé devant les Celtibères d’Espagne et les Belges des Ardennes. Eux qui n’avaient enlevé ni Aquilée, ni Narbonne, ni Gergovie, ils n’eussent certes pas réussi là où Hannibal avait échoué.

Mais les dangers comptent moins pour leur portée réelle que pour la crainte et les légendes qu’ils ont inspirées. Du péril cimbrique Rome avait conclu deux choses : l’une, que les peuples du Nord ne la laisseraient jamais en repos ; l’autre, que les Alpes ne suffiraient pas à protéger l’Italie, et qu’en revanche, la province avancée de Gaule l’avait garantie contre les premières attaques. Ces pensées et ces formules ne disparaîtront plus de sa vie politique. Elles fourniront aux proconsuls et aux empereurs des prétextes pour s’avancer toujours plus loin, prendre des terres et attaquer des peuples[300]. L’invasion des Cimbres et des Teutons servira à justifier toutes les guerres transalpines, comme le danger d’Hannibal avait amené la conquête du monde méditerranéen.

 

 

 



[1] Sur les institutions primitives de la Germanie, entre autres : les commentaires de la Germanie de Tacite, et, parmi les plus anciens, Althamer, Commentaria Germaniæ, 1536, parmi les plus récents : Holtzmann, Germanische Alterthümer, Leipzig, 1873 ; Baumstark, Ausführliche Erläuterung, etc., 2 v., 1875 et 1880 ; Müllenhoff, Die Germania (D. A., IV), 1900 ; en outre, Fustel de Coulanges, Recherches, 1885, p. 189 et suiv. ; etc.

[2] Cette idée se trouve déjà en germe chez César, De b. G., I, 31, 11 et suiv. ; Tacite, Hist., IV, 73 (peut-être inspiré du passage de César).

[3] Tacite, Germanie, 2 et 4, et il est probable que les Germains le disaient eux-mêmes, id., 2.

[4] Les Vendes, Venedi, qui sont les anciens Slaves (Pline, IV, 97 ; Tacite, Germanie, 46), et les Sarmates (Germanie, 46 ; cf. Pline, IV, 81). Au delà de la Vistule.

[5] César, VI, 21, 2 ; cf. Tacite, Germanie, 2, 40, 45 ; Ann., XIII, 55, 57.

[6] César, I, 39, 1 ; VI, 21, 3-5 : 23, 6 ; Strabon, VII, 1, 2 ; Tacite, Germanie, 4.

[7] César, IV, 2, 6.

[8] César, VI, 22, 3.

[9] César, IV, 2, 1.

[10] César, IV, 2, 1.

[11] César, VI, 23, 5 ; cf. 21, 1.

[12] César, VI, 21, 3 ; 22, 1.

[13] César, VI, 22 ; 29, 1.

[14] César, VI, 22, 2 ; avec cette remarque que, dans ces passages de César, il s’agit surtout des Suèves (Fustel de Coulanges, Recherches, p. 258-9).

[15] Tacite, Germanie, 5 et 16 ; cf. César, VI, 22, 3.

[16] La framea, lance au fer très court, Tacite, Germ., 6 ; cf. 11, 13 et 24 ; et la longue lance à la hampe énorme, Tacite, Ann., I, 64 ; II, 14 et 21 ; Hist., V, 18 ; Germ., 6. Boltzmann, p. 142, croit qu’il s’agit de la même arme.

[17] Les missilia (Tacite, Germanie, 6) doivent être les gœsa ; præusta (dards de bois) aut brevia tela, Tacite, Ann., II, 14 ; tragula, César, V, 35, 6 ; jacula fervefacta, V, 43, 1 ; verutum, V, 44, 7 et 10 ; κοντοΐς, Dion, XXXVIII, 49, 2 ; Plutarque, Marius, 25.

[18] Je pense à la cateia des Teutons ; Virgile, Én., VII, 741 ; Servius, ad En., VII, 741 ; Silius Italicus, III, 277 ; Valerius Flaccus, VI, 83 ; Isidore de Séville, XVIII, 7, 7 ; Reinach, Les Celtes... du Pô, p. 194 et suiv.

[19] Tacite, Germ., 6 (cf. 13, 44 et 46) ; et cela résulte aussi du récit des guerres contre les Chérusques, Ann., II, 14 et 21. C’est, le plus souvent, la grande épée gauloise : chez les Suèves (Dion Cassius, XXXVIII, 49, 2) ; chez les Cimbres (Plutarque, Marius, 25). La petite épée ailleurs (Tacite, Germ., 44 [43]).

[20] Tacite, Germ., 6, 13, 44 [43] et 46. C’est, le plus souvent, le long bouclier des Barbares du Nord, mais fort peu résistant, fait simplement d’osier tressé, sans fer ni cuir, et peint de couleurs distinctives, blanc chez les Cimbres (Plutarque, Marius, 25), noir chez les Ariens (Tacite, Germanie, 43) ; Tacite, Ann., II, 14 ; Dion, XXXVIII, 49, 6 ; cf. César, De b. G., II, 33, 2.

[21] Tacite, Germanie, 6 ; Ann., II, 14 ; Dion, XXXVIII, 50, 2. — Casques et cuirasses chez les Cimbres, Plutarque, Marius, 25.

[22] César, VI, 22, 3.

[23] César, VI, 22.

[24] César, VI, 23.

[25] César, VI, 22, 3 ; 23, 6 ; libidinem cuncta armis agendi, Tacite, Ann., XIII, 57.

[26] Cf. Tacite, Germanie, 6.

[27] Cela est souvent répété par les Anciens : César, I, 48, 5-7 ; VIII, 36, 2 ; Tacite, Germanie, 6 et 46. De là l’existence de corps d’infanterie d’élite, qui couraient et combattaient au milieu des cavaliers, aussi rapides qu’eux (César, I, 48, 5-7 ; Tacite, Germanie, 6).

[28] César, IV, 2 ; IV, 12, 1 ; VII, 13, 1-2 ; 67, 5 ; 70, 3-4 ; 80, 6 ; Dion, XL, 39, 3.

[29] César, IV, 2, 2 et 5 ; Tacite, Germanie, 6.

[30] César, De b. G., V, 34, 3 ; 35, 1-3 ; Tacite, Germanie, 6. — Il semble que les Germains aient eu, comme manière habituelle de combattre, l’ordre dispersé (per disjectas catercas, Tacite, Ann., II, 45 ; cf. Hist., IV, 20), c’est-à-dire une série de petites troupes, de quelques centaines d’hommes, tous parents ou alliés, 300 plus ou moins (Dion, XXXVIII, 49, 6), chacune serrée et tassée en tortue sous les boucliers, formant une sorte de phalange en coin ou cuneus (Dion, XXXVIII, 49 et 50 ; César, I, 52, 4-5 ; Tacite, Germanie, 6 et 7 ; Ann., II, 45). Aucune manœuvre d’ensemble, chaque groupe agit à sa guise (cf. Tacite, Hist., IV, 76).

[31] Cf. César et Hirtius, IV, 2, 5 ; VIII, 25, 2 ; Strabon, VII, 1, 2.

[32] Entre autres : Cluverius, Germania antiqua, 1631 ; Zeuss, Die Deutschen, 1837 (toujours capital) ; Müllenhoff, Deutsche Altertumskunde, II, 1887, IV, 1900 ; Holtzmann ; Baumstark, vol. de 1880 ; Much dans les Beiträge zur Geschichte der deutschen Sprache, XVII, 1893 ; le même, Deutsche Stammeskunde, 1900 (collection Gœschen) ; Hirt dans les Beiträge, XXI, 1896, p. 125 et suiv. ; Bremer, Ethnographie der germanischen Stämme, 2e éd., 1900 (Grundriss de Paul) ; Ihm, aux différents noms dans l’Encyclopädie de Wissowa, 1894 et suiv. — Nous nous servons, pour grouper et placer les peuplades, surtout des plus anciens textes, César, Strabon et Pline. Je doute qu’avant César, aucun auteur, pas même Posidonius (contra, Bremer, p. 741-2), ait parlé de la géographie politique de la Germanie. Sur l’histoire de cette géographie, en dernier lieu Detlefsen, Die Entdeckung des germanischen Nordens, Berlin, 1904. — Ce qui complique extraordinairement cette géographie, c’est : 1° que la plupart de ces peuples étaient à demi nomades ; 2° que leur nom, suivant leurs conquêtes ou leurs défaites, s’étendait ou se restreignait ; 3° que bon nombre de ces noms sont ceux de tribus, placées pour un temps sous la suzeraineté de ligues d’étendue variable, ligues auxquelles on a appliqué abusivement ces noms de tribus.

[33] Exception faite pour les noms, d’ailleurs énigmatiques, qui remonteraient à Pythéas. — Je n’hésite pas à voir dans les Hyperboréens d’Hérodote (IV, 33) les Estes, Æstii, du Samland (golfe de Dantzig), pays de l’ambre (Tacite, Germanie, 45), et dans ces derniers les restes d’une population agricole et marchande, prégermanique, analogue aux indigènes préceltiques de Gaule et de Bretagne. Mais les Grecs, qui l’ont connue avant 400, sans doute par l’intermédiaire des Siennes de Hallstatt, ne donnent pas son nom. Cf., sur ces Estes, Tomaschek ap. Wissowa, s. v.

[34] Ajoutez, je crois, un État celtique en Transylvanie, et les Colini, sans doute en Silésie.

[35] Hérodote, IV, 32-6.

[36] Tacite (Germanie, 2 : Vera et antiqua nomina) semble rappeler cette opinion. — Sur ce problème, cf. les remarques très justes de Bremer, § 21, 71-3, p. 762-4, 893-6.

[37] Cimbri : Strabon, VII, 2, 1-4 ; Monument d’Ancyre, V, p. 104, Mommsen ; Mela, III, 32 ; Pline, II, 167 ; IV, 95, 96, 97 et 99 ; Tacite, Germanie, 37 ; Ptolémée, II, 11, 2, 7 et 16. C’est à tort que Müllenhoff (II, p. 289, 300) place les Cimbres loin de la mer, sur l’Elbe moyen ; il a été réfuté, sans trop de peine, par Marcks, Zippel, Ihm et Matthias.

[38] Teutones ou Teutoni. La place assignée aux Teutons n’est point certaine ; mais ils semblent bien limitrophes des Cimbres ; Mela, III, 32 et 54 ; Pline, IV, 99 ; XXXVII, 33. — Un rameau détaché, dans la même région, forma plus tard les Teutonoarii (Ptolémée, II, 11, 9). — Zeuss (p. 149) identifie aux Teutons les Nuithones de Tacite (Germanie, 40). En tout cas, chez Tacite (id.), Reudigni, Aviones, Anglii (cf. Ptolémée, II, 11, 8), Varini (cf. Pline, IV, 99 ; Ptolémée, II, 11, 9), Eudoses, Suardones, Nuithones, forment, dans le Mecklembourg, une fédération qui a pour centre religieux l’île de Nerthus (Rugen ? Heiligenhafen ou Fehmarn ? qui occupent, plus que Rugen, une position centrale) ; et il est possible que cette société religieuse soit la survivance de la peuplade des Teutons.

[39] Les Ambrones ne sont mentionnés par aucun géographe ; on ne les trouve qu’à propos des campagnes des Teutons leurs associés : ce dont il résulte qu’ils n’habitaient pas loin d’eux. Zeuss (p. 149) suppose en eux les ancêtres des Saxons du nord de l’Elbe. Mais il serait possible qu’ils fussent, non pas le nom d’un peuple, mais de la troupe d’élite des Teutons.

[40] Frisii : Pline, IV, 101 ; XXV, 21 (d’après des documents contemporains d’Auguste) ; Tacite, Germanie, 34 ; Ann., I, 60 ; IV, 72-4 ; XI, 19 ; Dion, LIV, 32 ; etc. — Les Frisiavones de Pline (IV, 101 et 106 ; cf. C. I. L., VII, 178, 214, 1194, 1125, etc.) doivent être les Frisons les plus voisins du Zuiderzée. — Les Frisons étaient séparés des Cimbres, au temps de la Germanie (34), par les Chauques du rivage, à l’embouchure du Weser : il est possible que cette extension des Chauques le long de la mer soit postérieure au départ des Cimbres.

[41] Batavi. Dès le temps de César et au sud du Rhin, mais peut-être depuis peu de temps ; César, IV, 10, 1 ; Tacite, Germ., 29 ; Hist., IV, 12 et 15 ; etc. — A eux se rattachent : 1° les Cannenefates (Tacite, Ann., IV, 73 ; XI, 18 ; Hist., IV, 15 ; Pline, IV, 101 ; Velleius, II, 105 ; etc.), qui ne sont peut-être qu’un rameau des Bataves (on a même supposé que c’était le nom de leurs cavaliers, Boltzmann, p. 140 et 232) ; 2° les Sturii (Pline, IV, 101) ; 3° les Marsacii (id.). D’ailleurs César dit nationibus (IV, 10, 4).

[42] Il faut les placer sans doute dans les vallées de la Ruhr et de la Lippe et sur le Rhin depuis Düsseldorf. Sugambri et Sigambri : César, IV, 16, 2 ; 18, 4 ; 19, 4 ; VI, 35, 5 ; Strabon, VII, 1, 3. — A eux se rattachent, je crois : 1° les Chamavi ; 2° les Tubantes, qu’on voit les uns et les autres installés plus tard dans la Gueldre et l’Over-Yssel (Tacite, Ann., I, 51 ; XIII, 55 et 56 ; Strabon, VII, 1, 4 ?) ; 3° les Guberni, plus tard sur la rive gauche (Pline, IV, 106) ; 4° les Marsi, plus tard sur la haute Ruhr ? (Strabon, VII, 1, 3, peut-être 4 ; Tacite, Ann., I, 50), nom qui s’est peut-être étendu à tous les Sicambres. — On identifie d’ordinaire les Sicambres avec les Gambrivii de Tacite (Germanie, 2) et les Γαμαβρίουοι de Strabon (VII, 1, 3) : je crois plutôt, pour ces derniers noms, à un peuple ou une ligue de la région du Weser. — Sur les Sicambres et les peuplades de ce groupe, Essellen, Geschichte der Sigambern, Leipzig, 1868.

[43] Vallées de la Sieg et de la Wupper. Ubii, César, IV, 3, 3 ; 8, 3 ; 11, 2 ; 16, 5 ; 19, 1 ; VI, 9, 6 et 8 ; 10, 1 ; 29, 1-2.

[44] Usipetes et Tencteri ; César, IV, 4, 1 : texte (c’est le seul) d’où il résulte que les deux peuples habitaient d’abord près des Suèves d’Arioviste, qui les expulsèrent : ce qui ne permet pas de les placer ailleurs que dans le bassin de la Lahn, ou, à la rigueur, dans ceux de l’Eder et de la Fulda. — Nous trouverons là plus tard les Mattiaci et les Chatti (Tacite, Germanie, 29 et 30).

[45] César, IV, 3, 3.

[46] César, IV, 3, 3 ; VI, 10, 2.

[47] César, IV, 3, 3.

[48] Bructeri : Strabon, VII, 1, 3 ; Tacite, Ann., I, 51, 60 ; etc. Qu’ils aient touché la Lippe, cela résulte de Strabon, mais les Sicambres les séparaient du Rhin. — Au même peuple je rattacherai les Ampsivarii, dont le premier domicile parait être dans la vallée inférieure de l’Ems ; Tacite, Ann., VIII, 55 et 56 ; Strabon, VII, 1, 3 et 4 (sous le nom de Καμψιανοί, Άμψανοί).

[49] Chauci. Ne sont pas mentionnés avant Auguste et ont pu s’étendre surtout après la migration des Cimbres ; Strabon en parle encore comme d’un moindre peuple, VII, 1, 3 et 4 ? ; Pline, IV, 101 ; XVI, 2 et 5 ; Velleius, II, 106 ; Dion, LIV, 32 ; Tacite, Annales, II, 24 ; Germanie, 35 ; etc. On les distinguait en majores et minores. — Au même groupe : 1° les Angrivarii, au nord des Chérusques, du côté de Verden ? (Tacite, Ann., II, 8 ?, 19 et 22 ? ; Germ., 33) ; 2° les Καοΰλκοι de Strabon, VII, 1, 3 (les Καλούκωνες de Ptolémée, II, 11, 10) ; 3° les Dulgubnii ; 4° les Chasuarii (Tacite, Germanie, 34) ; 5° les Chattuarii (Strabon, II, 11, 10 ; VII, 1, 3) ou Attuarii (Velleius, II, 105), peut-être les mêmes que les précédents.

[50] Depuis Minden jusqu’au confluent du Diemel et depuis le Harz jusqu’à l’Eggegebirge ? Cherusci : César, VI, 10, 5 ; Strabon, VII, 1, 3 ; Pline, IV, 100. — César rapporte que les Chérusques sont, au sud, séparés des Suèves par la silva Bacenis. Zeuss (p. 11 et 94-8) a supposé que les Suèves de ce passage sont les Chattes, et que la silva Bacenis est le Harz. Mais tout ce que les Anciens nous ont rapporté des Chattes (note suivante) les distingue des Suèves. Je crois donc que sous le nom de Chérusques, César comprend également les Chattes, et que la silva Bacenis est la chaîne qui sépare les bassins du Weser et du Mein (celui-ci occupé par les Suèves), soit Vogelsberg, Rhœn et Thuringerwald. — Aux Chérusques se rattachent les Fosi (Tacite, Germanie, 36).

[51] Chatti : Strabon, VII, 1, 3 et 4 ; Pline, IV, 100 ; Tacite, Annales, XII, 28 ; Germanie, 29 (d’où il résulte bien que les Chattes existaient dès le temps de César, cf. note précédente), 30, 31, etc. — A eux se rattachent les Mattiaci, qui n’ont dû s’établir que plus tard, .autour de Wiesbaden (Pline, XXXI, 20 ; Tacite, Germanie, 29). L’extension de ce peuple et des Chattes dans le Nassau est postérieure à l’invasion suève.

[52] César les nomme, Marcomanni, I, 51, 2, sans dire leur situation ; elle résulte : 1° des textes du temps d’Auguste (Orose, VI, 21, 15 ; Florus, II, 30, 23 ; Velleius, II, 108 ; Dion, LV, 10 a, 2) ; 2° du fait qu’ils conquirent la Bohême sur les Celtes ; 3° de leur nom, les Hommes de la Frontière germanique du coté des Celtes de Bohème et de Franconie. — Les Ouadi (Strabon, VII, 1, 3) devaient être près d’eux, en Saxe ou Lusace.

[53] Semnones : Velleius, II, 106 et 107 ; Strabon, VII, 1, 3 ; Tacite, Germanie, 39 ; Annales, II, 45 ; Monument d’Ancyre, V, 17, p. 101, Mommsen.

[54] Langobardi : Velleius, II, 106 ; Strabon, VII, 1, 3 ; Tacite, Ann., II, 45 : XI, 17. Sur la rive gauche, pays de Lunebourg.

[55] Hermunduri : Strabon, VII, 1, 3 ; Pline, IV, 100 ; etc. A chercher entre le Brandebourg et le Mecklembourg. — Plus tard en Thuringe, où ils remplaceront les Marcomans. — C’est sans doute parmi ces peuples de l’Elbe que se trouve le domicile primitif des tribus établies par Arioviste sur le Rhin : 1° Harudes (César, I, 31, 10 ; 37, 2 ; 51, 2 ; Charydes, Mon. d’Ancyre, V, 16, p. 104, Mommsen), ceux-ci à coup sûr sur l’Elbe, vers Hambourg ; 2° Triboci ou Triboces ; 3° Vangiones ; 4° Nemetes ; 5° Sedusii (César, I, 51, 2).

[56] Sur cette situation centrale de Berlin, cf. Reclus, Géographie, III, 1878, p. 836-8.

[57] Burgodiones, pays des Vandili, Pline, IV, 99. En Poméranie ?

[58] Vandili, Pline, IV, 99. En Poméranie ? Peut-être un nom collectif des peuples du Nord-Est (cf. Tacite, Germanie, 2).

[59] Gutones, Pline, IV, 99 : cf. Gothones, Tacite, Germanie, 44 [43]. En Prusse ?

[60] Charinni et Varinnæ, Pline, IV, 99 (dans le Mecklembourg ?) : — Les Lygiens, Lugii ou Lygii, sans doute moins une nation qu’une ligue des peuples de l’Est ; Strabon, VII, 1, 3 (cf. Tacite, Germanie, 43). En Posnanie ? — Autres : Zumi, Butones [Gulones ?], Sibini, Mugilones (Strabon, VII, 1, 3). — Les Peucini et les Bastarnæ du Dniester, qui passaient pour des Germains (Pline, IV, 100 ; Strabon, VII, 2, 4 ; 3, 15), étaient, je crois, des Gaulois d’origine, non transformés. — La Silésie et la Moravie demeuraient aux Celtes, tout comme la Bohême.

[61] Le fait que les Suèves sont un nom collectif, et celui des peuples de l’Elbe, résulte moins des textes de César que de ceux de Strabon, VII, 1, 3, et de Tacite, Germanie, 38. C’est à tort qu’on y rattache les Chattes. Il serait du reste possible qu’on ait aussi désigné spécialement sous ce nom la nation caput, les Semnons (cf. Pline, IV, 100).

[62] César, I, 37, 3 ; IV, 1, 4 ; les centum pagi des Semnons (Tacite, Germanie, 39) doivent être ceux de la ligue suève.

[63] César, IV, 37, 3 ; Strabon, VII, 1, 3.

[64] Strabon, VII, 1, 3.

[65] Tacite, Germanie, 39 : Inde initia gentis ... ibi regnator omnium deus (Wuotan ?). — Autres sanctuaires collectifs en Germanie : l’île de Nerthus pour les peuples de la Baltique, le lucus de Castor et Pollux pour les Lygiens (Germanie, 43), le templum Tanfanæ pour les Marses ou les Sicambres (Tacite, Annales, I, 51), un point sur le flumen et les silvæ frontières entre Chattes et Hermundures (la Werra ? Tacite, Hist., XIII, 57 ; cf. Zeuss, p. 97-8), la silva Herculis chez les Chérusques et tribus du Weser (Tacite, Annales, II, 12), peut-être Héligoland.

[66] Pline, IV, 99 : les mss. ont Ingyævones ; cf. Tacite, Germanie, 2 : Ingævones ou Inguenones. Le nom serait ancien si Pythéas l’a déjà trouvé à l’embouchure de l’Elbe (Pline, IV, 96 : Inguæones).

[67] Pline, IV, 100 : Istriaones ; cf. Tacite, Germanie, 2 : Istævones.

[68] Pline, IV, 100 : Hermiones ; cf. Tacite, Germanie, 2 ; Mela, III, 32. — D’autres noms circulaient, par exemple celui de Vandili pour les gens du Nord-Est, de Lugii pour ceux de l’Est. Et parmi les Hermions, il est possible qu’on distinguât les Suèves de l’Elbe et les Gambrivii du Weser.

[69] Tacite, Germanie, 2 : Celebrant carminibus antiquis... Tuistonem deum Terra editum et filium Mannum, originem gentis conditoresque ; chez les Suèves, le lieu de la naissance est le bois des Semnons (Germanie, 39). Tuistonem est la leçon du ms. du Vatican 1518, Tuisconem, de celui de Stuttgart, Tristonem, de ceux du Vatican 1862 et de Leyde. On a proposé Teutonem (Cluvier, p. 65-66 ; Holtzmann, p. 98 ; etc.). Ce Tuisto est l’équivalent de Teutatès et du Dis pater gaulois.

[70] Il résulte évidemment du passage de Tacite (Germanie, 2) que les Germains se donnaient un nom commun. Tacite ne dit pas lequel. Mais il semble bien que ce soit un nom tiré de celui de leur père divin Tuisto, soit Tuistones (Tuiscones ? Teutones ?), d’où est dérivé le nom que porte la langue germanique au moins dès l’époque carolingienne, thiudisca, theodisca, teutisca, tiutisca, theotisca, etc., et d’où vient le mot de deutsch. Il ne serait pas impossible que les Teutons ne fussent ce nom collectif localisé sur une ligue particulière. — Quant au nom de Germani, il n’apparaît pas à coup sûr avant César ; dans ce sens, Hirschfeld, p. 268 et s. ; contra, Müllenhoff, II, p. 161. — Il a, d’après Tacite, été appliqué aux Germains des Ardennes (Éburons et autres) par les Gaulois, puis étendu par eux à tous les Transrhénans, enfin accepté par les Germains eux-mêmes et par les Romains ; Tacite, Germanie, 2 : Qui primi Rhenum transgressi Gallos expulerint ac nunc Tungri, tunc Germani vocati sint [de même, César, II, 4, 10 : ... Eburones... qui uno nomine Germani appellantur] : ita nationis nomen, non gentis evaluisse paulatim, ut omnes primum a victore ob metum [a victo reor ? Hirschfeld ; en tout cas il s’agit des Gaulois], mox etiam a se ipsis, invento nomine Germani vocarentur. D’après Strabon (VII, 1, 2), le mot ne serait autre que le latin germanus, et il aurait été imaginé par les Romains pour rappeler que les Germains étaient les vrais Gaulois, c’est-à-dire de purs Galates, non mêlés à d’autres populations comme les Celtes et les Belges aux indigènes ; mais le passage de César donne raison à Tacite. — Ce nom de Germains a soulevé des discussions innombrables, et à propos de son origine (celtique, romaine ou germanique), et à propos de son étymologie. J’incline (hypothèse de Zeuss, p. 59) à le croire un mot celtique ou belge, mais très voisin d’un mot germanique ayant le même sens, et il ne serait pas impossible encore que ce mot gaulois eût un sens voisin de celui du latin germanus. — Cf., outre Zeuss : Holtzmann, p. 104-112 (d’accord avec Strabon) ; Müllenhoff, II, p. IR9-206 ; Kossinna, Beiträge zur Geschichte der deutschen Sprache, XX, 1895, p. 258 et s. ; Hirschfeld, Kiepert-Festschrift, 1898, p. 261 et suiv. ; Bremer, § 3 ; etc.

[71] Cf. Tacite, Annales, II, 10.

[72] Cf. Tacite, Germanie, 1 ; Strabon, VII, 1, 1 ; Mela, III, 25.

[73] César, De b. G., IV, 3, 1-2.

[74] Cf., au contraire, la Gaule, t. I, chapitre premier.

[75] Roborum vastitas intacta... miracula excedit, Pline, XVI, 6.

[76] Comparez la description de la Germanie chez Strabon (VII, 1, 2-4) avec ce qu’il dit de la Gaule.

[77] Pour tout ce qui suit : Cellarius, De Cimbris et Teulonis, 1701 (Diss., II, p. 488 et s.) ; Johann Müller, Bellum Cimbricum, Zurich, 1772 ; Brœmmel, Der Kampf der Rœmer mit den Kimbern und Teutonen, Bâle, [1829] ; Herm. Müller, Die Marken des Vaterlandes, I, 1837, p. 131 et suiv., et les notes ; Schiern, Origines et migrationes Cimbrorum, Copenhague, 1842 ; Horkel, Die Geschichtschreiber der deutschen Urzeit, I, 1849, p. 27 et suiv. ; Am. Thierry, II, l. V, ch. 1 ; Mommsen, Rœm. Geschichte, II, p. 139 et s. : Pallmann, Die Cimbern und Teutonen, Berlin, 1870 ; Sepp, Die Wanderung der Cimbern und Teutonen, Munich, 1882 (thèse de Wurtzbourg) ; Müllenhoff, Deutsche Altertumskunde, II, 1887, p. 112-189 (1872), p. 282-303 : Desjardins, II, p. 302 et suiv. ; Zippel, Die Heimat der Kimbern, Kœnigsberg, 1892 ; Marcks, Bonner Juhrbücher, XCV, 1894, p. 29 et suiv. ; von Peucker, Wanderung über die Schlachtfelder der deutschen Urzeit, 2e éd., 1893, p. 10 et suiv. ; Helbling, Der Zug der Cimbern und Teutonen, Winterthur, 1898 (thèse de Zurich) ; Ihm, art. Cimbri apud Wissowa, III, II, 1899 ; Matthias, Lober die Wohnsitze und den Namen der Kimbern, Berlin, 1904 ; Wilke, Wo tag die Heimat, etc., Deutsche Geschichtsblütter, VII, 1906, p. 291 et suiv. — Il semble qu’il faille distinguer deux groupes de textes au sujet de ces guerres : ceux, en première ligne Plutarque, qui proviennent de Posidonius, et les textes latins, qui, par Tite-Live, doivent venir d’annalistes, Clodius Paulus, Valerius Antias, les mémoires de Catulus ; voyez l’étude des sources faite par Müllenhoff, II, p. 126-153, et Helbling, p. 6 et suiv.

[78] Par là s’explique la facilité avec laquelle tous les contemporains les ont identifiés avec les Gaulois ou les Celtes (Cicéron, De oratore, II, 66, 266 ; De prov. cons., 13, 32 ; Salluste, Jugurtha, 114 ; Appien, Ill., 4). Remarquez les analogies de leur armement avec celui des Gaulois. Il ne me parait pas y avoir de différence entre les noms d’hommes gaulois et ceux des chefs teutons (Teutobodus, var. Teuto vocatus, Teutobocchus, Teutobocus ; Florus, I, 38, 11 ; Orose, V, 16, 12) et cimbres (Boiorix, Lugius, Claodicus, Cæsorix ; Orose, id., 20 ; Florus, id., 18 ; Plutarque, Marius, 25).

[79] Cf. Pline, IV, 97, XXXVII, 42. Comme l’ambre frison cesse d’être mentionné à partir de l’ère chrétienne, il semble qu’il se soit alors épuisé.

[80] L’expédition maritime des Romains, en 5 ap. J.-C., ne peut s’expliquer que parce qu’ils suivirent une route (de l’embouchure du Rhin au Jutland et de là l’Elbe jusqu’à Tangermünde ?) connue et montrée par les indigènes (Mon. d’Ancyre, V. p. 105 ; Velleius, II, 106 ; Pline, II. 167).

[81] Il semble, à lire Plutarque, Marius, 15-21 et 24-7, que les Teutons (mer Baltique) étaient plus sauvages que les Cimbres (mer du Nord) : et cela était naturel. Mais l’impression peut être trompeuse.

[82] Tacite, Germanie, 34.

[83] Plutarque, Marius, 11.

[84] Strabon, VII, 2, 1 : Florus, I, 38, 2, 5 et 12 ; Plutarque, Marius, 11, 16 et 23.

[85] Plutarque, Marius, 23.

[86] Strabon, VII, 2, 3 ; Orose, V, 16, 5 et 6.

[87] Strabon, VII, 2, 3 : cf. César, I, 50, 4.

[88] Strabon, VII, 2, 3 et 1.

[89] Plutarque, Marius, 23.

[90] Plutarque, Marius, 11 ; Appien, Illyrica, 4 ? ; Tacite, Germanie, 37 ; il me parait impossible que ce détail, emprunté au récit de la navigation de la flotte romaine dans les eaux de l’Elbe, ne concerne pas les deux rives du fleuve. On a songé (cf. Matthias, p. 35), sans preuves péremptoires, aux vastes lieux de refuge visibles aujourd’hui encore entre Weser et Elbe, dans la région maritime ; cf. Virchow, Zeitschrift für Ethnologie, XIX, 1887, p. 368 et s., et, dans un autre sens, Hofmeister, Bericht über den neunten Verbandstag der west- und süddeutschen Vereine, 1908, p. 51 et s.

[91] Florus, I, 38, 22 ; Tite-Live, Ép., 65 ; Plutarque, Marius, 24 : Granius.

[92] Cela me parait résulter de l’usage chez eux d’objets de métal, armes, cuirasses, chaînes et objets de culte.

[93] Plutarque, Marius, 25.

[94] Plutarque, Marius, 23 et 25.

[95] Plutarque, Marius, 11 (chez les Germains) ; Strabon, VII, 2, 1 et 2 ; Festus, p. 43, M. (chez les Gaulois), et p. 17, M.

[96] Strabon, VII, 2, 1 ; Florus, I, 38 [III, 3], 1 ; Festus, p. 17, M.

[97] Cf. Appien, Illyrica, 4.

[98] Les Chauques sur le Weser, les Suèves sur l’Elbe.

[99] Le raz-de-marée n’a pu se faire sentir en Baltique.

[100] Plutarque, Marius, 11.

[101] Florus, I, 38, 16 et 17 ; Plutarque, Marius, 21 et 27 ; Orose, V, 16, 18 ; Pline, VIII, 143.

[102] Peut-être le temps de semer et de récolter.

[103] Tout cela résulte de la très longue durée de leur migration, plus de dix ans, d’avant 113 à 101.

[104] Posidonius ap. Strabon, VII, 2, 2 (il n’est question que des Cimbres). — Comme il est parlé des Boïens et non des Helvètes, il semble que les Cimbres soient passés par la route (le la Saale. — Il existe au Greinberg, prés de Miltenberg, sur le Mein (Franconie), une sorte de menhir avec l’inscription inter Teutonos, C. I. L., VIII, 6610, et là également ont été découvertes des inscriptions Mercurio Cimbriano (6604 et 6605), à rapprocher de Mercurio Cimbrio du Heiligenberg de Heidelberg (6402). On en a conclu (id., p. 284) à l’existence de colonies laissées par les Cimbres et les Teutons, soit à ce moment, soit à leur retour du sud, colonies analogues à celle des Aduatiques. Cela est fort hypothétique : Cimbrius ou Cimbrianus me parait être une simple épithète accolée au Mercure de ces deux hauts lieux.

[105] Posidonius, l. c. Une allusion peut-être à ces faits chez Appien, Illyrica, 4 : cf. Zippel, Die Rœmische Herrschaft in Illyrien, 1877, p. 142 et suiv.

[106] Destruction, en 118, des Stœni dans les Alpes de Brescia (Tite-Live, Ép., 62 ; Orose, V, 14, 5). Guerre contre les Salasses du val d’Aoste, non suivie, semble-t-il, d’annexion, en 143 (Tite-Live, Ép., 53 ; Orose, V, 4, 7 ; Dion Cassius, XXII, 74 ; Obsequens, 21), et colonisation d’Ivrée en 100 (Velleius, I, 15).

[107] Expédition de Marius Æmilius Scaurus en 115 contre les Galli Karnei ; C. I. L., I, 1, 2e éd., p. 49 ; Aurelius Victor, de vir. ill., 72, 7, Keil.

[108] Appien, Celtica, 13.

[109] Tite-Live, Ép., 63 ; Velleius, II, 8, 3 ; Florus, 1, 39 [III, 4] ; Eutrope, IV, 24, 25, 27 ; Dion Cassius, XXVI, 88 ; Dittenberger, Sylloge, 2e éd., 318 et 931. — Sur tous ces combats : Mommsen, Röm. Geschichte, II, p. 168-171 ; Zippel, p. 142 et suiv. ; Perdrizet, Bull. de torr. hell., XX, 1896, p. 488 et s.

[110] Posidonius ap. Strabon, VII, 2, 2 ; Tite-Live, Ép., 63 : Appien, Illyrica, 4 (?) ; Celtica, 13 ; Eutrope, IV, 25 (Italiam pour Illyricum).

[111] Appien, Celtica, 13 ; Strabon, V, 1, 8 ; Tite-Live, Epit., 63 ; Velleius, II, 12 ; Tacite, Germanie, 37 ; Julius Obsequens, 38 ; Quintilien, Declamat., III, p. 45, Obrecht.

[112] Cf. Velleius, II, 107.

[113] Appien, Celtica, 13.

[114] Salluste, Jugurtha, 41 et 44.

[115] Appien, Celtica, 13 (parle de Teutons) ; Strabon, V, 1, 8 (Cimbres) ; Tite-Live, Epit., 63 (Cimbres) ; Velleius, II, 12 ; Tacite, Germanie, 37 ; Julius Obsequens, 38 (Cimbres et Teutons) ; Quintilien, Declamat., III, p. 45, Obrecht.

[116] Cf. Tite-Live, Ép., 63 ; Appien, Celtica, 13.

[117] Strabon, VII, 2, 2 ; Appien, Celtica, 13.

[118] Cela parait résulter des chiffres donnés pour les batailles d’Aix.

[119] Ajoutez, et toujours chez les Helvètes, la situation de Mannheim au confluent du Neckar, dont les avantages ont déterminé l’importance de la ville celtique de Lopodunum.

[120] Posidonius, qui ne connaissait pas l’intérieur de la Germanie, n’attribuait qu’à la migration cimbrique le départ des Helvètes. Il ne me parait point douteux qu’il ne faille tenir aussi compte des entreprises des Suèves. Cinquante ans plus tard, nous ne trouverons plus que les Suèves dans les vallées du Mein et du Neckar, et César n’en parle pas comme de nouveaux arrivés : il est donc probable que, dès 109, ils ont commencé à déborder sur les Helvètes par les routes de la Thuringe.

[121] Sans doute d’après Posidonius, Strabon (VII, 2, 2, et IV, 3, 3) fait partir les Tigurins et les Toygènes (Τωυγενούς, pagus dont il n’est question que là et, sans doute par erreur, IV, 1, 8). Il y eut certainement accord entre Cimbres et Helvètes : les Helvètes ont dû accorder le libre passage aux Germains ; mais je crois bien, vu que leur présence en Gaule n’est signalée qu’après celle des Cimbres, qu’ils sont partis à la suite des antres, et non pas avec eux. — Une question impossible à résoudre est la suivante : que sont devenus les Volques Tectosages de Bavière ? Je suppose que les Cimbres ont commencé la destruction de ce peuple, dont il ne sera désormais plus question, et que cette destruction, continuée par les brigandages périodiques des Rètes et des Vindéliques (Strabon, IV, 6, 8), aura été achevée par les Suèves.

[122] La date résulte du consulat de Silanus, et de Velleius, II, 8 (entre 111 et 108). L’endroit peut résulter de l’entente avec les Helvètes. On a également rattaché à leur passage chez les Séquanes le texte de Strabon relatif à l’alliance de ce peuple avec les Germains (IV, 3, 2).

[123] Florus, I, 38 [III, 3], 2 ; Tite-Live, Ép., 65 (place la négociation après la bataille). C’est à tort, ce me semble, que Müllenhoff (II, p. 294-5) rapporte à cette ambassade l’envoyé teuton de Pline, XXXV, 25.

[124] Quas daret terras populus Romanus, etc., Florus, ibid., 3.

[125] Florus, ibid., 3-4 (Cimbres, Teutons et Tigurins réunis) ; Tite-Live, Ép., 65 (Cimbres seulement) ; Velleius, II, 12, 2 (Cimbres et Teutons) ; Quintilien, Decl., III, p. 45 ; Eutrope, IV, 27 (Cimbres). — Comme Silanus fut accusé d’avoir fait la guerre injussu populi (Asconius in Cornelianam, p. 71, Kiessling), on peut supposer qu’il est allé chercher l’ennemi au delà de la frontière, et que la bataille eut lieu vers Lyon. — On peut rattacher à un séjour fait chez les Allobroges les mauvais traitements que l’un de leurs chefs subit de la part de Silanus (Cicéron, Div. in Cæc., 20, 67 ; Verrines, II, 47, 118).

[126] Sans doute à la rencontre des Teutons.

[127] Il y eut peut-être aussi mécontentement chez les Allobroges.

[128] Dion Cassius, XXVII, 90, Boissevain. Peut-être seulement en 106.

[129] On comprend que l’accusation contre Silanus ait été dirigée par Cn. Domitius Ahenobarbus, fils du conquérant des Gaules (en 104 ou 103 ; Cicéron, Divinatio in Cæc., 20, 67 ; Verrines, II, 47, 118 ; Asconius, l. c.).

[130] Nous présentons le récit comme on le fait d’ordinaire (Mommsen, II, p. 175-6 ; Herzog, p. 60 ; Müllenhoff, II, p. 296), et comme on doit le faire si on accepte le Nitiobrogum de Tite-Live et l’Oceanum d’Orose. Mais je me demande encore s’il ne faut pas corriger en Allobrogum et Lemanum, et placer toutes ces marches entre Vienne et Genève (après d’autres, Thierry, II, p. 9, Desjardins, II, p. 311).

[131] Orose, V, 15, 23 : L. Cassius consul in Gallia Tigurinos osque Oceanum persecutus est.

[132] Cela résulte de ce qu’en dit César (I, 13 et 14), qui le connut en 58.

[133] La bataille a dû se livrer vers Agen ; Orose, V, 15, 23-4 (les mss. appellent le légat Publius). Tite-Live, Ép., 65 : L. Cassius... in finibus Nitiobrogum [sic les deux mss., Allobrogum dans l’éd. princeps ; cf. l’éd. Jahn, 1853], etc. ; César, De b. Germanie, I, 12, 5 et 7 ; Appien, Celt., I, 3 (d’après Clodius Paulus ; cf. Peter, Relliquiæ, p. CCCI). — Si le détail du joug est certain, l’institution serait aussi gauloise. — On a rapporté à ces campagnes le trésor de monnaies celtiques de Tayac en Gironde (Forrer, Keltische Numismatik, 1908, p. 316 et s.), mais je le crois postérieur.

[134] Dion Cassius (XXVII, 90, Boissevain) semble dire qu’il fut introduit de nuit dans la ville par les amis qu’y conservait Rome.

[135] Orose, V, 15, 25 (à tort proconsule) ; Aulu-Gelle, III, 9, 7.

[136] E templo Apollinis, Orose ; templis, Aulu-Gelle ; έν σηκοΐς... έν λίμναις, Strabon, qui parle en outre d’un ίερόν άγιον ; τά ίερά, Dion ; lacum, Justin.

[137] Orose (103.000 livres d’or et 110.000 d’argent) ; 15.000 talents d’or et d’argent bruts, Strabon (d’après Posidonius) ; 110.000 livres d’argent, 1.500.000 livres d’or, Justin.

[138] Aulu-Gelle, III, 9, 7 : Veteris proverbii... aurum Tolosanum ; Orose, V, 15, 25 ; Strabon, IV, 1, 13 (d’après Timagène et Posidonius) ; Cicéron, De natura deorum, III, 30, 74 ; Justin, XXXII, 3, 9-11 (d’après Timagène ?) ; Dion, XXVII, 90 (id.).

[139] Justin, XXXII, 3, 11.

[140] Justin, XXXII, 3, 11.

[141] Ce qui me fait croire à la réunion de tous les Barbares au moment de la bataille d’Orange, c’est : 1° l’importance exceptionnelle de l’armée concentrée par les Romains (trois corps) ; 2° l’étendue de la victoire ; 3° la participation des Ambrons à la bataille, lesquels paraissent les compagnons ordinaires des Teutons  ; 4° le texte formel d’Orose, V, 16, 1 : Cimbros et Teutonas et Tigurinos et Ambronas, Gallorum Germanorumque gentes, quæ tunc ut imperium Romanum extinguerent conspiraverunt.

[142] Tite-Live (d’après Valerius Antias) parle de 80.000 Romains et alliés, et 40.000 valets, tués à Orange (Ép., 67 ; Orose, V, 16, 3).

[143] Sur son nom, j’accepte l’orthographe de C. I. L., X, 1781, et de C. I. Gr., 2485 ; mais il n’est pas certain que le vrai nom soit Mallius et non Manlius, cf. Boissevain, éd. de Dion, I, p. 334-5.

[144] Dion, XXVII, 91 ; Granius, p. 11, Flemisch : Orose, V, 16, 2.

[145] Pour Martius, Cicéron, Pro Murena, 17, 36 ; Pro Plancio, 5, 12 ; pour Cépion, Dion et Granius, l. c.

[146] Cf. Quintilien, Declamationes, III.

[147] Tite-Live, Ép., 67 ; Granius Licinianus, p. 11, Flemisch ; Dion, XXVI1, 91 ; Quintilien, Decl., III, p. 45 ; Velleius, II, 12, 2 ; Tacite, Germanie, 37.

[148] Leur situation respectée résulte des récits de Granius et d’Orose (V, 16, 1).

[149] Tite-Live, Ép., 67 ; Granius Licinianus, p. 11, Flemisch ; Dion, XXVI1, 91 ; Quintilien, Decl., III, p. 45 ; Velleius, II, 12, 2 ; Tacite, Germanie, 37.

[150] Dion, XXVII, 91 ; Granius, l. c.

[151] Dion, XXVII, 91 ; Granius, l. c.

[152] Dion, XXVII, 91 ; Granius, l. c.

[153] Granius : Pacem violentes et agros petentes frumentumque quod sererent. Il semble résulter de ce passage que les Germains demandaient seulement de rester sur place pendant un an au plus, avec le droit d’ensemencer les terres et de faire la moisson.

[154] Dion, XXVII, 91 ; Granius, l. c.

[155] Dion Cassius, XXVII, 91, 4.

[156] Granius.

[157] Granius ; la plus grande faute paraît venir de Cépion, Tite-Live, Ép., 67 ; Valère Maxime, IV, 7, 3 ; Cicéron, De Orat., II, 28, 124.

[158] Secundum Arausionem, Tite-Live, Ép., 67 ; cf. Plutarque, Sertorius, 3.

[159] Pridie nonas octobres, Granius, et Plutarque, Luc., 27. C’est la date du calendrier officiel, et non celle du calendrier julien.

[160] L’ordre des attaques semble résulter du récit de Granius, et aussi de ce que Dion placé le camp de Cépion plus près de l’ennemi ; Florus parle au contraire d’une première bataille contre Mallius. Plutarque (Marius, 19) attribue le rôle prépondérant aux Ambrons.

[161] Granius.

[162] Les Romains paraissent avoir eu le Rhône à dos (cf. Orose, V, 16, 6 ; Plutarque, Sertorius, 3).

[163] Orose, V, 16, 2-7 ; VI, 14, 2 (en partie d’après Valerius Antias, par Tite-Live) : Tite-Live, Ép., 67 (Cimbres seulement) ; Florus, I, 38 [III, 3], 4 ; Eutrope, V, 1 ; Granius, p. 11, Flemisch ; Salluste, Jugurtha, 114, 1 ; Velleius, II, 12, 2 ; Plutarque, Sertorius, 3 ; Marius, 19 ; Lucullus, 27 (Cimbres) ; Tacite, Germanie, 37 ; Valère Maxime, IV, 7, 3 ; Cicéron, De orat., II, 28, 124 ; Végèce, III, 10 (Cimbres) ; Appien, Illyrica, 4 ; Diodore, XXXIV-V, 37 ; Quintilien, Declam., III, p. 45.

[164] Il ne resta, dit Orose, que 10 hommes sur 120.000 (V, 16, 4) : ce qui représente la légende. Végèce (III, 10) parle au contraire de legionum reliquiæ. Parmi ceux qui survécurent, Sertorius n’échappa qu’en traversant le Rhône à la nage, blessé et chargé de ses armes, luttant contre la violence du courant (Plutarque, Sertorius, 3).

[165] Il est probable qu’avant la bataille ils avaient voué aux dieux toute l’armée ennemie ; cf. Tacite, Ann., XIII, 57. Sur ces vœux, Schwally, Semitische Kriegsaltertümer, I, 1901, p. 29 et s.

[166] Orose, V, 16, 5-6.

[167] Ils furent accusés et proscrits en 104 ou 103 (Tite-Live, Ép., 67 ; Valère Maxime, IV77, 3 ; Granius, p. 13 ; Cicéron, De orat., II, 28, 124). Cf. Mommsen, II, p. 179-180.

[168] Orose, V, 15, 7 ; VI, 14, 2 ; Eutrope, V, 1 ; Appien, Ill., 4 ; Salluste, Jugurtha, 114, 1-2 ; Granius, p. 13.

[169] Salluste, Jugurtha, 114.

[170] L’envoi de Marius en Gaule dut être décidé extra ordinem aux élections consulaires, vers le 1er novembre 105 (Salluste, Jugurtha, 114, 3). Cf. Willems, Sénat, II, p. 105.

[171] Tite-Live, Ép., 67.

[172] Tite-Live, Ép., 67 ; Obsequens, 43 [103]. — J’attribue hypothétiquement aux Teutons seuls les différents épisodes que César met au compte des Cimbres et des Teutons (De b. Germanie, II, 4, 2 ; I, 33, 4 ; II, 29, 4 ; VII, 77, 12 et 14). Il serait d’ailleurs possible qu’ils fussent aussi le fait des Cimbres et des Teutons réunis entre 109 et 105, ou encore que ces épisodes se soient partagés entre cette période et celle de 105-102. Je doute que la dévastation ait pu être l’ouvre des Cimbres et des Teutons réunis après la guerre d’Espagne.

[173] César, II, 4, 2 ; Strabon, IV, 4, 3.

[174] César, II, 29-33 ; II, 4, 9. De 6.000 guerriers qu’ils furent à l’origine, ils passent, quarante ans plus tard, à une population de 75.000 âmes, sans aucun doute par l’union avec les indigènes de ces mêmes terres. Le nom est peut-être nouveau, et tiré d’un nom de rivière autrefois commun en Belgique, ce qui expliquerait l’homonymie de leur nom avec celui de Tongres, Aduatuca.

[175] César, II, 29, 4. Pour avoir choisi cet endroit, qui est précisément sur la grande route de Sambre-et-Meuse, laquelle mène en effet à Hambourg et à la Baltique, il faut que les Teutons aient étudié et connu les lieux, et sans doute qu’en venant ils soient passés par là.

[176] Ce qui suit, d’après César, I, 33, 4 ; II, 4, 2 ; VII, 77, 12 et 14.

[177] César, VII, 77, 12.

[178] Tite-Live, Ép., 67.

[179] Tite-Live, Ép., 67 ; Obsequens, 43 [103] ; Sénèque, Ad Helviam, 7, 2 ; Plutarque, Marius, 14 ; Jérôme, Epistolæ, 123, 16, Migne, I = P. L., XXII, c. 1058.

[180] Textes de la note précédente.

[181] Outre les ouvrages généraux : Bouche, Chorographie, I, 1664, p. 419 et suiv. ; Pitton, Histoire de la ville d’Aix, 1666, p. 41 et suiv. ; Papon, Hist. gén. de Provence, I, 1776, p. 527 et suiv. ; de Haitze (mort en 1737), Hist. de ta ville d’Aix [ms. Méjanes 1001], I, p. 35, éd. de la Revue Sextienne, 1880 ; Fauris de Saint-Vincens, Magasin encyclopédique, 1814, IV, p. 314 et suiv. ; Castellan, Dissertation, etc. (Mém. ... des Antiquaires, IX, 1832, p. 48 et suiv.) ; Statistique du département des Bouches-du-Rhône, II, 1824, p. 249 et suiv., et passim [partie rédigée par Toulouzan ?] ; Tiran, Étude d’un camp, etc. (Mém. ... des Antiquaires, 1840) ; Rouchon, Des Saliens, p. 282 et s. (Mém. de l’Acad. d’Aix, VIII, 1861) ; Rostan, Cottard et Audric, Congrès scientifique de France, XXXIIIe s., Aix, 1866, II, 1867, p. 248 et suiv. ; Gilles : 1° Campagne de Marius, 1870 ; 2° Marius et Jules César, 1871 ; 3° Précis... des monuments triomphaux, 1873 ; Dervieu, La Campagne de C. Marius contre les Teutons, 1891 ; de Duranli La Calade : 1° Observations d’un habitant d’Aix sur la brochure de... Dervieu, Aix, 1892 ; 2° Rapport... sur le cours de Marius Clerc, 1901 (Acad. d’Aix, XVIII, 1902) ; de Saint-Eutrope, Observations d’un Provençal sur les écrits relatifs à la défaite, etc., 1892 ; Bérenger-Féraud, La Campagne de Marius en Provence, 1895 (très commode répertoire) ; Clerc, La Bataille d’Aix, 1906 (le plus important ; cours de la Faculté des Lettres d’Aix, 1897-1900).

[182] Cf. Plutarque, Marius, 13-15. Végèce suppose, je crois à tort, que l’armée de Marius était composée des reliquiæ de la bataille d’Orange (III, 10).

[183] Voyez Salluste, Jugurtha, à partir de 45, et surtout 45, 87 et 100.

[184] Si on peut conclure pour les campagnes de Gaule de ce que Marius a fait pour celles d’Afrique, Salluste, Jugurtha, 86 et 87.

[185] Salluste, Jugurtha, 87 ; cf. Végèce, III, 10.

[186] Plutarque, 13, cf. 14.

[187] Plutarque, 13 et 14 ; Végèce, III, 10.

[188] Cf. Salluste, Jugurtha, 100, 5.

[189] Plutarque, 7 et 14 ; Salluste, Jugurtha, 92, 1-2 ; 100, 4.

[190] Salluste, Jugurtha, 92 ; Cicéron, De prov. cons., 13, 32.

[191] Cf. Salluste, Jugurtha, 88, 2 ; 90, 1 ; 100 ; 401, 2.

[192] Cf. Mommsen, Staatsrecht, I, p. 485, 500, 502. Marius fut nommé, sans doute vers le ter nov. 105, étant en Afrique ; consul pour la deuxième fois, pour 104 (Salluste, Jugurtha, 114 ; Plutarque, Marius, 12) ; il fut nommé en 104, étant en Gaule, consul pour la troisième fois, pour 103 (Plutarque, Marius, 14) ; en 103, il fut nommé consul pour la quatrième fois, pour 102, mais cette fois il vint à Rome, laissant l’armée à Manius Aquilius (Plutarque, 14) ; en 102, il fut nommé consul pour la cinquième fois, pour 101, étant en Gaule, et vers le temps de la bataille d’Aix (Plutarque, Marius, 22). Cf., sur ces renouvellements, Cicéron, Pro lege Manilia, 20, 60 ; De prov. cons., 8, 19 ; Tite-Live, Ép., 67.

[193] Salluste, Jugurtha, 86.

[194] Plutarque, Marius, 19 : ce cri de guerre était Άμβφωνες ou quelque chose d’approchant. Ces cohortes de Ligures avaient rendu de grands services dans les guerres d’Afrique (Salluste, Jugurtha, 93 : 100, 2).

[195] Plutarque, Sertorius, 3. Il semble bien qu’il apprit le celtique, soit qu’il ait eu besoin de surveiller les Celtes du Midi, soit parce qu’il y avait beaucoup de Celtes parmi les ennemis. Mais je n’en conclurai pas que les Cimbres parlaient la langue celtique. Sertorius a dû rester en Gaule de 105 à 102.

[196] Cf. Salluste, Jugurtha, 96, 3 ; Plutarque, Sylla, 3 et 4 : il resta en Gaule comme légat de Marius en 104, tribun militaire sous ses ordres en 103 : en 102, il est en Italie.

[197] C’est en 104, au cours de ses campagnes de Gaule, que Marius renonça aux autres enseignes des légions, sangliers, loups, chevaux, minotaures, pour s’en tenir aux aigles (Pline, X, 16). Il est possible que ce soit pour distinguer plus complètement les enseignes romaines des gauloises, qui étaient d’ordinaire des sangliers. Cf. Renel, Les Enseignes, 1903, p. 196-7.

[198] Alexandre de Myndos ap. Plutarque, Marius, 17.

[199] Elle fut envoyée à Marius par sa femme Julie, Plutarque, Marius, 17.

[200] Plutarque, Sylla, 4.

[201] Frontin, I, 2, 6 : Hostilia agitari.

[202] Plutarque, Sylla, 4.

[203] Plutarque, Marius, 14 (fin 104, lors de l’élection pour 103).

[204] Plutarque, Marius, 15.

[205] D’après le récit de Plutarque, cette construction aurait commencé après l’élection au quatrième consulat, dans l’hiver de 103-2, au moment oit il attendait les Barbares et installait son camp pour les recevoir.

[206] Voici en quels éléments se décompose le problème, si discuté, du canal de Marius : 1° le débouché clans la mer : sur ce point, aucun doute ne me parait possible, c’est à Fos, Fossæ Marianæ, Fossa Mariana (Mela, II, 78 ; Plutarque, Marius, 15 : Pline, III, 34 ; Itinéraire Antonin, p. 299 et 507, W. ; Table de Peutinger) ; 2° le secteur parallèle à la mer : je le crois marqué, selon toute vraisemblance, par la ligne des marais littoraux qui finissent a l’étang du Galèjon ; 3° le secteur qui rejoint le Rhône : ici j’hésite entre le tracé du Bras Mort, jusqu’en face l’île des Pilotes, à douze milles de l’embouchure actuelle, et le tracé des étangs et marais qui séparent le Rhône et la Crau, tracé suivi par le canal de Bouc et le célèbre canal de la Vidange ; cependant, étant donné qu’il ne s’agissait que de faciliter l’entrée, je préférerais le Bras Mort (déjà soupçonné par Bouche, I, 1664, p. 26), et, en tout cas, je doute fort que le canal ait débouché dans le Rhône en amont de Pile de la Gabare. — Il est possible qu’une étude approfondie des documents relatifs à la Vidange d’Arles (cf. de Dienne, Hist. du dessécheraient des lacs et marais, p. 265 et suiv.) apporte des renseignements nouveaux sur cette question. — L’entrée du canal était déjà difficile au temps d’Auguste (Strabon, IV, 1, 8), et je crois bien qu’il dut être négligé après la ruine de Marseille en 49 (p. 601-2). — Desjardins (dont l’opinion a varié) : 1° Aperçu hist. sur les embouchures du Rhône, 1866 ; 2° Nouv. Observations sur les Fosses Mariennes, 1870 ; 3° Gaule, I, p. 196 et suiv. (de Saint-Gabriel à Arles, et de là le tracé du canal de Bouc, puis deux branches, l’une débouchant au grau du Galéjon, l’autre à Fos) ; Saurel, Fossæ Marianæ, Marseille, 1865 (extr. du Répertoire des travaux de la Soc. de Stat., XXVII, 1864) ; Gilles : 1° Les Fosses-Mariennes, Marseille, 1869 ; 2° Encore les Fosses Mariennes, Marseille, 1873 ; Aurès, Nouv. Recherches sur le tracé, etc., 1873 (extr. des Mém. de l’Acad. du Gard) ; Bernard, dans le Répertoire... de la Soc. de Stat., Marseille, XXXII, 1871 (du grau du Galéjon au Bras Mort) ; Lenthéric, Le Rhône, II, 1892, p. 471 et s. ; Clerc, p. 75-122 (de Fos à l’étang Redon près de l’étang de Vaccarès en Camargue, débouché sur un bras disparu).

[207] Plutarque, Marius, 15.

[208] Plutarque, Marius, 15.

[209] Plutarque, Marius, 15.

[210] Cf. Salluste, Jugurtha, 64, 5 ; 65, 4.

[211] Plutarque, Marius, 16.

[212] Il semble qu’il l’apprit pendant son séjour à Rome à la fin de 103 (Plutarque, Marius, 15) : il s’agit probablement du passage des Pyrénées par les Cimbres.

[213] Plutarque, Marius, 17 ; Parallela, 20 ; Obsequens, 44 [104].

[214] Tite-Live, Ép., 67 (Obsequens, 43) : Reversique in Gallican in [sic mss.] bellicosis se Teutonis conjunxerant. Mommsen (II, p. 183) remplace bellicosis par Vellocassis ; on a songé aussi à Bellovacis (Müllenhoff, II, p. 289). Je doute que la source de Tite-Live ait connu les Bellovaques ou les Véliocasses : il est vrai que le mot a pu être ajouté par l’auteur latin. On peut songer aussi à in Belgica. Il est d’ailleurs fort possible que la réunion aux Teutons ait eu lieu vers Paris, Beauvais ou Rouen, et que l’installation des bagages sur la Meuse se rattache à cette concentration. Et ce nouveau détour des Cimbres nous explique pourquoi Marius, revenu précipitamment vers déc. 103 à la nouvelle de leur retour, ne vit plus reparaître les Barbares qu’en été.

[215] Marius devait avoir la même armée qu’à Verceil, 32.000 hommes (Plutarque, Marius, 25).

[216] Peut-être en Franche-Comté, d’où les Teutons pouvaient descendre vers la Provence, et les autres gagner la Suisse et le Brenner ; cf. Plutarque, Marius, 15. — Orose (V, 16, 9) et Florus (I, 38, 6) placent la dislocation après l’attaque du camp de Marius : l’un et l’autre ont dû mal comprendre le texte de Tite-Live, qui, semble-t-il, tout comme Plutarque, ne parle que des Teutons autour de ce camp (Ép., 68).

[217] Florus, I, 38 [III, 3], 6 ; Orose, V, 16, 9.

[218] Florus, ibid., 18 : Tertia Tigurinorum manas, qua quasi in subsidio Noricos insederat Alpium tumulos. Le mot subsidio semble indiquer que les Tigurins avaient été placés là pour couvrir une retraite, et en effet, c’est surtout par ces cols qu’une retraite est possible. C’est probablement à cette marche par le Norique que Plutarque fait allusion (Marius, 15), mais en l’appliquant aux Cimbres : car je doute fort qu’on ait pu attribuer au Norique les Alpes du Brenner.

[219] Cf. Strabon, IV, 6, 10.

[220] Plutarque, Marius, 15.

[221] Cf. Plutarque, Marius, 24.

[222] Florus, I, 38, 11.

[223] Florus, I, 38 [III, 3], 5 ; Cicéron, Pro lege Manilia, 20, 60.

[224] Marius attendit l’ennemi au confluent du Rhône et d’une rivière : mais Orose dit Isara, l’Isère. Ce n’est pas possible, ce doit être une de ces erreurs géographiques dont Orose est coutumier, la rivière en question ne peut être, ce me semble, que la Durance. Car : 1° le pays au nord de la Durance avait dû trop souffrir en 105 pour nourrir l’armée de Marius ; 2° vaincu, Marius perdait sa ligne de retraite ; 3° il établit son camp à proximité de la mer (Plutarque, Marius, 15) ; 4° on n’a pas l’impression que Marius, entre la levée du camp et la bataille d’Aix, ait fait une très longue marche. — On peut objecter en faveur de l’Isère que ce carrefour commande toutes les routes des Alpes, que Marius ne pouvait pas Il résulte du texte d’Orose (V, 16, 9 ; cf. Landolf, V, 84, 9, Mommsen) que deviner que les Barbares prendraient la route du sud, et que Florus et Orose mettent en présence du camp de Marius tous les Barbares, avant leur dislocation. Mais : 1° il établit son camp avant l’arrivée des Cimbres venus d’Espagne, et il pouvait croire qu’ils marcheraient vers le Bas Languedoc et le passage de Tarascon, ce qui était le plus naturel en venant des Pyrénées ; 2° où qu’il s’installât, il pouvait deviner que les Barbares l’attaqueraient d’abord ; 3° les textes de Florus et d’Orose sont suspects. Voyez là-dessus l’excellente discussion de Clerc, p. 65 et s. — Je crois donc qu’il faut chercher le camp παρά τώ 'Ροδανώ, πρός τήν θάλασσαν (Plutarque, Marius, 15), sur le passage de la grande route (παρήμειβον, 18), tout près de cette route (έγγύς, id.), dominant une vaste plaine (15), près du confluent de la Durance (Orose) : le plateau de Beauregard, à l’est de Barbentane, proposé par Clerc (p. 72-3), est, non pas l’emplacement certain, mais celui qui répond le mieux aux données du problème ; il domine les routes de Languedoc, de Provence, de la Durance et du Rhône, le pays environnant est d’une fertilité célèbre, et il suffit de parcourir le plateau pour se convaincre qu’il offrait une admirable assiette à un camp romain. — Le confluent de l’Isère est accepté par Mommsen (II, p. 184). Tous les autres écrivains placent le camp en Provence : en Camargue (Bouche, I, p. 420 ; de Haitze, éd. de la Revue Sextienne, p. 36) ; dans les terres basses du golfe de Fos (Statistique, p. 255) ; à Marignane près de l’étang de Berre (Pitton, p. 44) ; près des Alpines, à Saint-Remy (Gilles, Camp., p. 99 et suiv., etc. ; Dervieu, p. 9 ; de Duranti La Calade, Obs., p. 7) ; à Saint-Gabriel, Ernaginum, ce qui est l’hypothèse la plus vraisemblable après celle de Clerc (Desjardins, II, p. 320) ; sur un point quelconque de ces Alpines (Bérenger-Féraud, p. 413 et suiv.).

[225] Note précédente.

[226] Plutarque, Marius, 15-18.

[227] Plutarque, Marius, 16.

[228] Plutarque, Marius, 16 ; Polyen, VIII, 10, 1.

[229] Plutarque, Marius, 15 et 16.

[230] Plutarque, Marius, 15, comparé à Frontin, IV, 7, 5.

[231] Plutarque, Marius, 18 ; Orose, V, 16, 9 ; Tite-Live, Ép., 68 ; Florus, I, 38, 5.

[232] Orose, V, 16, 9.

[233] Plutarque, Marius, 18 ; cf. Orose, V, 16, 9.

[234] Plutarque, Marius, 18 ; Florus, I, 38, 6.

[235] Cela résulte de la rapidité et de la netteté des opérations qui vont suivre.

[236] Plutarque, Marius, 18 ; Orose, V, 16, 10.

[237] La mention de cette marche rapide et de ces chemins de traverse, chez Florus (I, 38 [III, 3], 7). Plutarque (Marius, 18) parle au contraire d’une marche à la suite des Barbares et de plusieurs campements près d’eux. Il est possible qu’il ait d’abord suivi les Barbares (p. ex. jusqu’à Tarascon), et qu’ensuite il ait pris les devants par d’autres routes (p. ex., s’ils ont suivi le sud des Alpines, qu’il ait marché par le nord). En tout cas, Romains et Barbares n’ont dû jamais demeurer très éloignés les uns des autres, puisque Marius, parti derrière l’arrière-garde, est arrivé à Aix le même jour que l’avant-garde. Le secteur traversé par les belligérants, entre le Rhône, la Durance, l’étang de Berre et Aix, a 75 kilomètres de longueur, 25 de largeur. — Le récit de Plutarque (Marius, 18) suppose au moins deux journées de marche, puisqu’il parle de plusieurs camps de Marius. — Cette marche de flanc a été bien notée par Clerc (p. 137 et suiv.), mais, je crois, démesurément développée par lui, de Barbentane à Lamanon au sud des Barbares, de là (de même que Tiran, p. 52-3, et Dervieu, p. 13) à Claps le long de Sainte-Victoire et au nord des Barbares, puis descente jusqu’à Pourrières : je ne peux croire que l’armée romaine ait pu suivre, avec ses convois, ces mauvais sentiers qui entourent Sainte-Victoire (outre les raisons qui militent en faveur d’Aix).

[238] Cela résulte de ce que Marius n’eut à combattre, le premier jour, que les Ambrons, et qu’il n’eut pas le temps de fortifier son camp.

[239] Marius, 18.

[240] Plutarque, Marius, 20.

[241] Τό πεδίον, Plutarque, Marius, 20 ; vallem fluviumque medium, Florus, I, 38, 8 ; campo, Orose, V, 16, 10.

[242] Aix et Entremont : il est possible que Marcellus, dans sa diversion, se soit appuyé sur ces deux places fortes.

[243] Les crêtes de cette chaîne, qui dominent le cours d’eau de plus de 150 mètres [174 m. au maximum], les pentes rapides, difficiles à gravir, qui plongent le plus souvent dans le lit de la rivière rendent assurément cette position très forte. L’eau manque sur les sommets. Vis-à-vis est placée la ville d’Aix avec ses sources thermales ; de Duranti, Obs., 1892, p. 22. Le choix du Montaiguet s’imposait encore plus, si, comme c’est possible, le principal chemin vers l’est, que devaient prendre les Barbares, passait au sud de l’Arc, par Meyreuil, Fuveau, Peynier et Trets. Dans ce cas, les Teutons étaient obligés de passer la rivière devant Aix, au pont actuel (très ancien passage), et ensuite de gravir le Montaiguet par le chemin (très ancien) de Meyreuil. Campé sur le Montaiguet, Marius leur coupait la route. Il y a, sur le plateau, des deux côtés de ce chemin, une assez bonne assiette de camp romain (vers la propriété Passerat, anciennement Jourdan ?). — Le Montaiguet a été indiqué d’abord par Pitton (p. 46), accepté par de Haitze (p. 38, Revue Sextienne), de Duranti La Calade (Obs., p. 22), Bérenger-Féraud (p. 469). — La Statistique place le camp du côté d’Entremont, au nord de l’Arc (p. 264), Castellan à Roquefavour, Gilles près des Milles.

[244] Orose, V, 16, 10 ; Plutarque, Marius, 18 et 19. Il semble résulter du récit de Plutarque (Marius, 19) que la colline commençait non loin des bords de l’Arc, ce qui est bien le cas du Montaiguet (note précédente).

[245] Contrairement à la presque totalité des érudits, je place les deux batailles au même endroit, et à Aix. — Que les deux combats aient eu lieu sur le même point, en vue du même camp, cela me parait résulter des faits suivants : 1° Plutarque ne dit nulle part que Marius ou les Barbares aient décampé, et il indique même le contraire (Marius, 20) ; 2° les détails sur la position des Romains sont les mêmes pour les deux combats (Plutarque, Marius, 18 ; 20) ; 3° tous les textes mentionnés plus bas ne donnent au combat qu’un seul nom, bataille d’Aix ; 4° Frontin, II, 4, 6 ; 5° Marius a voulu le combat là où il s’est engagé, et le champ de bataille qui lui a paru bon un jour ne pouvait lui paraître mauvais le lendemain ; 6° après le premier combat, il craignait d’être attaqué, son camp n’étant pas achevé (Plutarque, Marius, 20) : aurait-il déguerpi pour en bâtir un autre, les Barbares à ses trousses ? — Que ce champ de bataille se trouve près d’Aix, cela résulte des faits suivants : 1° l’accord et la précision des textes : Plutarque, Marius, 18 ; Florus, I, 38 [III, 3], 7 ; Tite-Live, Ép., 68 ; Velleius, II, 12, 4 ; Frontin, II, 4, 6 ; Aurélia Victor, De v. ill., 67 ; Sidoine, Carmina, 23, 13-9 ; Jérôme, Ép., 123, Migne, P. L., XXII, c. 1051 ; 2° les détails sur les eaux chaudes où se baignent les Barbares, près d’une rivière (Plutarque, Marius, 19), ne peuvent convenir qu’à Aix ; 3° il est question de domaines de Marseillais sur le champ de bataille (Plutarque, Marius, 21) : il ne faut donc pas trop l’éloigner de Marseille ; 4° comment Marius, si préoccupé d’approvisionner son armée, se serait-il éloigné de Marseille ? comment aurait-il laissé les Teutons lui couper la route de cette ville ? comment, en poussant jusqu’à Pourrières, se serait-il fermé la retraite en cas de défaite ? L’arrêt devant Aix, au croisement des routes d’Italie et de Marseille, me parait forcé. — Le seul auteur avec lequel nous soyons complètement d’accord est de Haitze, Histoire de la ville d’Aix [ms, de la Bibl. Méjanes, 1001], p. 49 de l’éd. de la Revue Sextienne : Les deux armées ne changèrent pas de poste.... Après une désignation si précise du lieu de cette bataille... c’est s’abuser que de le chercher ailleurs qu’aux portes d’Aix. — Les autres écrivains placent tous la seconde bataille dans la région de Pourrières (Raymond de Solier le premier, au XVIe siècle, mss. cités par Bérenger-Féraud, p. 233), quelques-uns y placent aussi la première (Papon, Tiran, Desjardins, Dervieu, Clerc) ; d’autres placent cette première près d’Aix (Bouche, Pitton, Statistique, Bouchon, Gilles, de Duranti La Calade, Bérenger-Féraud). L’hypothèse de Pertuis pour la première bataille (de Saint-Eutrope, etc.) ne mérite pas d’être discutée. Celle de Pourrières a contre elle, outre tous les détails fournis par les textes, l’éloignement des lignes de ravitaillement, de secours et de retraite, et le peu d’eau que renferme l’Arc. — Ce qui a déterminé presque tous les écrivains à choisir Pourrières, ce sont les ruines des soi-disant trophées de Marius (cf. Carte de l’État-Major, n° 233 : Arc de triomphe de Marius, ruiné [sic]) : mais ces ruines, qui n’ont jamais été vues que rasées, dès le XVIe siècle (cf. de Solier, ms. apud Clerc, p. 237), me paraissent absolument indéterminables (cf. de Gerin-Ricard, Bull. Arch., 1902, p. 36 et s. ; Clerc, p. 249 et s.). Toutes les étymologies qui rattachent les noms des localités voisines à la victoire de Marius (la montagne Sainte-Victoire [en réalité Venturi], Pourrières = campi putridi [en réalité Porreriæ]) sont insoutenables (de même que pour la route d’Hannibal) ; cf. Revue des Études anciennes, 1899, p. 50 et suiv. ; Clerc, p. 263 et suiv. — En revanche, je ne peux pas rejeter encore l’hypothèse de Montanari, qui voit dans les bas-reliefs d’Entremont des souvenirs de la bataille d’Aix (Montanari, Rivista di storia antica, X, 1906, p. 239).

[246] Marius, 19.

[247] Il voulut d’abord achever le camp, dit Plutarque (Marius, 18 et 19), mais les valets d’armée provoquèrent l’ennemi en allant chercher de l’eau dans l’Arc, et Marius consentit à ce que l’armée soutint le combat (Marius, 20) : mais il est bien probable qu’il voulait le combat aussitôt, Plutarque le dit lui-même (19), et, semble-t-il, Orose (V, 16, 10). — On reprocha aux metatores de Marius d’avoir choisi pour place du camp une colline sans eau (Frontin, II, 7, 12 ; cf. Orose, V, 16, 10). Plutarque dit qu’il l’avait voulu, pour obliger les soldats à se battre (Marius, 18 ; Florus ne sait que penser à ce sujet : Consultone id egerit imperator, an errorem in consilium verterit, dubium (I, 38, 8). Il est possible que le choix du camp ait été précipité, vu le voisinage ou l’arrivée immédiate des Barbares ; mais la position du Montaiguet me parait s’être imposée).

[248] C’est alors que Plutarque (Marius, 19) remarque que Ligures et Ambrons avaient le même cri de guerre, Άμβρωνες.

[249] Plutarque, Marius, 19 ; Orose, V, 10, 10. Le combat commença, je crois, après midi et finit à la nuit (Plutarque, Marius, 19-20). Il semble qu’ils aient franchi l’Arc sans utiliser de pont, à l’est sans doute du pont actuel.

[250] Plutarque, Marius, 20.

[251] Il est probable qu’il fallut achever le camp, lequel était encore, le soir du combat, άχαράκωτον καί άτείχιστον (Plutarque, Marius, 20).

[252] Plutarque, Marius, 20.

[253] Tout cela, d’après Plutarque, Marius, 20 ; d’après Orose (V, 16, 11), il y aurait eu, non pas un jour, mais deux jours d’intervalle entre les deux combats.

[254] Plutarque, Marius, 20 ; Polyen, VIII, 10, 2. Marcellus a pu faire le tour par Meyreuil, Tholonet et le vallon de la route de Vauvenargues. Il est possible qu’il ait rejoint Entremont et le castellum d’Aix. — Frontin (II, 4, 6) raconte que pour donner au détachement un aspect plus imposant, on y ajouta agasones lixasque armatos.

[255] Cf. Orose, V, 16, 11. Je placerais volontiers la bataille en septembre, avant les grandes pluies (Marius, 21) et après les élections consulaires (Marius, 22), qui avaient lieu en ce temps-là quelquefois en novembre, mais qui ont pu être avancées à cause du départ de Catulus pour les Alpes. Remarquez le rôle joué par la soif et la chaleur chez les deux adversaires dans les préliminaires de la bataille (Plutarque, Marius, 18 et 19). Cf. Pais, Riv. di storia antica, n. s., V, 1900, p. 185.

[256] Plutarque, Marius, 20-21. Il n’est pas question de l’Arc dans cette seconde bataille : peut-être ont-ils pu passer par un pont, à l’ouest de l’endroit où auraient attaqué les Ambrons.

[257] Plutarque, Marius, 21 ; Frontin, II, 4, 6.

[258] Orose, V, 16, 11.

[259] Orose, V, 16, 11 ; Plutarque, Marius, 21.

[260] Frontin, II, 9, 1 : ce qui explique peut-être le quarto die d’Orose.

[261] Plus de 100.000 morts ou prisonniers, Plutarque, Marius, 21 ; cf. Polyen, VIII, 10, 1 ; 200.000 morts, 80.000 prisonniers, 3000 survivants, Orose, V, 16, 12, Eutrope, V, 1, et Jérôme, p. 133, Schœne ; plus de 150.000 morts, Velleius, II, 12, 4 ; 200.000 morts, 90.000 prisonniers, Tite-Live, Ép., 68.

[262] Hypothèse de Clerc, p. 209.

[263] Orose, V, 16, 13 ; Florus, I, 38, 17 (place le fait après Verceil) ; saint Jérôme, Epist., 123 [91], 8, Migne, I = P. L., XXII, col. 1051.

[264] Plutarque, Marius, 24, parlant des rois des Teutons : Έάλωσαν γάρ έν ταΐς Άλπεσι [dans les défilés du Jura, au pas de l’Écluse ?] φεύγοντες ύπό Σηκουάνων.

[265] Florus, I, 38, 10 (fait prendre le roi in proximo statu) ; Eutrope, V, 1 ; Orose, V, 16, 12, dit qu’il fut tué. Sur le sens que nous donnons à transilire chez Florus, cf. Tite-Live, XXIII, 29, 5 : je n’en suis pas sûr, et il peut s’agir d’un exercice de voltige sur six chevaux.

[266] Plutarque, Marius, 21.

[267] Plutarque, Marius, 21 et 22.

[268] Plutarque, Marius, 22.

[269] Plutarque, Marius, 22 ; Tite-Live, Ép., 68.

[270] Il semble qu’il y ait eu un dépouillement régulier des cadavres et du butin (Appien, Celt., 14 ? ; Dion Cassius, XXVII, 94 ; cf. Plutarque, Marius, 21).

[271] Strabon, IV, 1, 8.

[272] Cf. Plutarque, Marius, 21.

[273] On ne peut, je crois, douter qu’ils n’aient pris la route du Brenner, de l’Adige et de Vérone : 1° le nom du fleuve : Άτισώνα (acc.), chez Plutarque, Marius, 23, et Apophthegmata, p. 202 d ; Athesim, chez Tite-Live, Ép., 68 ; Valère Maxime, V, 8, 4 ; Florus, I, 38, 12 ; ce nom ne peut convenir qu’à l’Adige ; 2° la description de la route, glaces, rochers, neiges épaisses, pont au passage important (Plutarque, 23), convient à l’Adige avant Trente ; 3° les textes formels de Florus (I, 38, 11 : Tridentinis jugis), d’Ampelius (22 : In saltu Tridentino ; 45, 2 : Tridentinas Alpes), de Frontin (IV, 1, 13 : Saltu Tridentino). — Il nous paraît donc difficile de comprendre pourquoi l’on a proposé, contrairement à l’opinion courante : 1° le col de Predil dans les Alpes Juliennes (Athesis pour Natiso, le fleuve d’Aquilée), Pais, Studi storici, I, fasc. 1 et 2, 1892 ; il a renoncé à son opinion, Rivista di storia antica, n. s., V, 1900, p. 185 et suiv. ; 2° le col du Simplon (Athesis pour Atosa, la Toce, affluent du lac Majeur), très ancienne opinion, maladroitement reprise ces derniers temps.

[274] Florus, I, 38, 11 (per hiemem) ; Plutarque, Marius, 23.

[275] Pour les chiens, Pline, VIII, 143 ; pour le reste, Florus, I, 38, 16.

[276] Orose, V, 16, 14 : Integris copiis.

[277] Plutarque, Marius, 23.

[278] Il y renonça, dit Plutarque (Marius, 23), parce qu’il eût été obligé de diviser son armée en plusieurs corps : sans doute par crainte des Tigurins.

[279] Que l’affaire se passe près de Trente (à Lavis ?), cela résulte des textes de Tite-Live, Ép., 68 ; Plutarque, Marius, 23 ; Apophthegmata, p. 202 d ; Florus, 1, 38, 12 ; Valère Maxime, V, 8, 4. — Rivoli, d’après Sadée, Bonner Jahrbücher, 1909, p. 100 et s.

[280] Ώσπερ οί γίγαντες, Plutarque, Marius, 23.

[281] Plutarque, Marius, 23.

[282] Plutarque, Marius, 23 ; Apoph., p. 202 d ; Florus, 1, 38, 12 ; Valère Maxime, V, 8, 4, etc. L’épisode raconté par Frontin (I, 5, 3) doit se rapporter à la tentative des Romains pour traverser l’ennemi. D’après un autre récit, la garnison se serait échappée (Pline, XXII, 11 ; Tite-Live, Ép., 68 ?) : ce récit doit provenir d’un annaliste romain, qui aura embelli les choses ; cf. Müllenhoff, II, p. 141-2.

[283] La date résulte de ce qu’on était en hiver, et de ce que Catulus est déjà proconsul (Tite-Live, Ép., 68). Plutarque place le désastre ού πολλαΐς ΰστερον ήμέραις après Aix (Marius, 23) : c’est au moins deux mois, je crois.

[284] Plutarque, Marius, 23 ; Florus, I, 38, 13 ; Orose, V, 16, 14 ; Dion Cassius, XXVII, 94.

[285] Il n’est nulle part question de villes prises.

[286] Lui-même passa par Rome (Plutarque, Marius, 24).

[287] Plutarque, Marius, 24 et 25.

[288] Ils ont dû, suivant la ligne du Pô vers l’ouest, aller au devant des Teutons, dont ils ignoraient le sort (Plutarque, Marius, 24).

[289] Plutarque, Marius, 24 et 25 ; Orose, V, 16, 14 ; Florus, I, 38, 13-14. L’endroit de la bataille résulte de Plutarque, Marius, 25 : Περί Βερκέλλας ; la localité est appelée campi Raudii, campus Reudius, Florus, I, 38, 14 ; Velleius, II, 12, 5 ; De viris ill., 67. On a proposé Vérone (cf., contra, Mommsen, II, p. 186), Brixellum près de Parme (Pais, Studi storici, I, 1892, p. 300 et suiv., qui a abandonné son opinion), etc.

[290] Je m’en tiens au récit de Plutarque (Marius, 25-6 ; cf. Polyen, VIII, 10, 3), plus clair, qui doit provenir de Posidonius ; le récit des Latins, plus favorable aux Romains, dissimule leurs fausses manœuvres, et doit provenir d’un annaliste (Orose, V, 16, 14-15 ; Florus, I, 38, 15 ; Frontin, II, 2, 8).

[291] Le troisième jour avant les calendes de sextilis, Plutarque, Marius, 26. Date officielle et non pas date julienne.

[292] Plutarque, Marius, 27 ; Orose, V, 16, 16-21 : Tite-Live, Ép., 68 ; Florus, I, 38, 14-18 (qui place ici l’épisode des prêtresses) ; Eutrope, V, 2 ; etc.

[293] Je donne les chiffres de Plutarque, Marius, 27 ; 140.000 morts et 60.000 pris, Orose, V, 16, 16 ; id., Tite-Live, Ép., 68 ; id., Eutrope, V, 2 ; plus de 100.000 pris ou tués, Velleius, II, 12, 5 ; 65.000 morts, Florus, I, 38, 14.

[294] Si l’on rapporte aux Helvètes le mot de Plutarque, Sylla, 4 : Τών έν ταΐς Άλπεσι βαρβάρων.

[295] Cf. César, De b. Germanie, I, 12, 5-7 ; 13, 2.

[296] Orose parle de 340.000 morts et. 140.000 esclaves, sans les femmes (V, 16, 21 ; cf. Paul, éd. Droysen, p. 85).

[297] On a supposé (Müllenhoff, II, p. 156-7) que les révoltés de Spartacus n’avaient aucun rapport avec les Cimbres et Teutons, et que c’étaient des esclaves razziés en Germanie par les marchands. Outre que la chose est invraisemblable, César (De b. Germanie, I, 40, 5) semble bien rattacher la guerre servile à celle des Cimbres et Teutons.

[298] Avec cette réserve que jusqu’en 58, à propos des Cimbres et des Teutons, on parlait toujours, non du péril germanique, mais du péril gaulois : voyez Cicéron, De prov. cons., 13, 32, appelant encore cette guerre bellum Gallicum.

[299] Plutarque, Marius, 27 ; Tite-Live, Ép., 68 ; Cicéron, De prov. cons., 13, 32.

[300] Cicéron, De prov. cons., 13-14, 32-34 ; César, De b. Germanie, I, 33, 4.