Pour étudier les boucliers qui étaient en usage à l'époque homérique, le mieux est de comparer les modèles qui s'offrent à notre examen. Parmi les ornements en relief des objets d'art découverts dans les tombeaux en puits de Mycènes, on remarque deux sortes de boucliers : l'un ovale, fortement bombé qui couvre le guerrier depuis le menton jusqu'aux pieds[1] ; l'autre également à peu près de la taille d'un homme et qui se rapproche de la forme quadrangulaire[2]. Le premier présente deux variantes : il est généralement, comme le bouclier béotien, plus récent, pourvu d'échancrures qui permettaient au guerrier de diriger ses coups à l'abri du danger ; une seule fois, le périmètre du bouclier n'offre aucune solution de continuité. On rencontre deux autres formes sur les vases peints, qui semblent appartenir à une période de la céramique relativement récente, que nous ont fait connaître surtout les fouilles de Mycènes. lin fragment de poterie, trouvé dans la citadelle sous les ruines des maisons de Cyclopes situées au sud des tombeaux en puits, nous montre quatre guerriers en marche, armés de boucliers qui ont environ les deux cinquièmes de la longueur du corps et sont échancrés en forme de croissant[3]. Sur un autre fragment d'espèce analogue, mis au jour à Tirynthe, nous voyons deux guerriers qui tiennent tendus devant eux des boucliers ronds tellement petits que leur diamètre atteint à peine la longueur de l'avant-bras[4]. Au contraire, les boucliers figurés sur les vases du Dipylon[5] rappellent en général ceux dont sont munis les Hittites combattant contre Rhamsès II sur les bas-relief d'Ibsambul. Ils auraient une forme complètement ovale s'ils n'avaient de chaque côté une échancrure en cercle, qui réduit à une surface très étroite la partie centrale du bouclier ; leur hauteur est à peu près celle de la moitié du corps. Le bouclier simplement rond est relativement rare sur les vases du Dipylon[6] et autres analogues[7] ; on le rencontre plus souvent sur les monuments ultérieurs. Il se voit sur le vase souvent cité d'Aristonophos[8], ainsi que sur les vases de Mélos[9] et de Rhodes[10]. Les plus anciens boucliers trouvés en Grèce et en Italie, ont une forme ronde ou à peine elliptique ; mais comme ils sont tous faits de plaques de bronze très minces, il est probable que c'étaient de simples ex-voto ou des offrandes funéraires[11]. Le diamètre de ces boucliers ronds ou un peu elliptiques varie habituellement entre le tiers et les deux cinquièmes de la longueur du corps. Il faut toutefois en excepter trois boucliers du vase d'Aristonophos. Les peintures de ce vase représentent un navire à gouvernail et un voilier immédiatement avant le combat[12]. L'équipage des deux barques est armé de boucliers ronds. Mais les hommes de la première portent un bouclier qui a la longueur ordinaire de la moitié du corps, tandis que ceux de la seconde en ont un qui va depuis les joues jusqu'au milieu des mollets. Toutefois cette peinture n'a qu'un intérêt secondaire pour notre étude ; d'abord parce que nous sommes ici en présence de l'équipage d'un navire, dont l'équipement est tout autre que celui des troupes de terre ; ensuite parce que, étant donnée l'exécution très défectueuse, il est probable que le peintre, pour plus de commodité, a grandi le cercle de ses boucliers, afin de s'épargner la peine de reproduire la partie du corps ainsi dissimulée. Sur les anciens vases attiques, sur ceux de Corinthe et de Chalcis, l'arme défensive la plus ordinaire est un bouclier circulaire dont le diamètre atteint environ les deux tiers de la longueur du corps. Parfois aussi on y remarque un bouclier ovale qui couvre le corps depuis le menton jusqu'aux genoux et qui mesure en longueur un peu plus du double de la largeur. Cependant ce bouclier est porté surtout par des guerriers de distinction qui combattent au premier rang[13]. Deux types analogues étaient, à la même époque, en usage chez les Assyriens[14]. Quel est celui des boucliers examinés jusqu'à présent dont se servaient les guerriers homériques ? Avant tout, pour répondre à cette question, il faut écarter les boucliers échancrés. Il est évident, en effet, que ces échancrures modifiaient considérablement les conditions de défense et d'attaque ; si les boucliers de ce temps-là en avaient été pourvus, les poètes les eussent certainement mentionnées dans leurs nombreuses descriptions de batailles. Il faut de même écarter le type quadrangulaire, car aucune description, aucune des épithètes, que nous allons examiner tout à l'heure, ne fait allusion à cette forme. Notre examen doit donc se borner au bouclier rond ou légèrement elliptique et au grand bouclier ovale. Nous verrons que ces deux espèces étaient simultanément en usage. L'άσπίς est le plus souvent accompagnée de l'épithète πάντοσ' έΐση[15]. Mais cette épithète ne nous renseigne guère sur la forme ; elle peut, en effet, signifier égal de tous côtés, c'est-à-dire rond ou bien recouvrant également tout le corps[16]. Or cette dernière interprétation peut s'appliquer aussi bien au bouclier rond qu'au bouclier ovale. La forme circulaire semble, au contraire, attestée par le mot κύκλος (cercle) qu'on rencontre dans la langue épique pour désigner la surface du bouclier[17], les couches dont il se composait[18] et les bandes ou zones qui constituaient sa surface[19] ; elle est, en outre, confirmée par l'épithète εΰκυκλος (orné de cercles ou de bandes circulaires)[20]. Le bouclier ovale a dû coexister à côté du bouclier rond. L'άσπίς est appelée dans un passage ποδηνεκής[21], c'est-à-dire descendant jusqu'aux pieds. Hector rentrant du champ de bataille, dans la ville de Troie, porte sur le dos un bouclier, doublé de cuir sur la bordure, qui lui bat la nuque et les chevilles[22]. Par conséquent, il y avait des boucliers qui avaient presque la longueur du corps. Il était, d'autre part, évidemment tout à fait inutile d'augmenter à proportion la largeur du bouclier ; car, trop large, il eût été difficile à mouvoir. Ces boucliers, qui avaient la hauteur de la taille d'un homme, ne pouvaient donc pas avoir une forme circulaire, mais ovale. Ils étaient probablement analogues à celui qu'on remarque sur un des cachets dé Mycènes. Nous avons déjà vu plus haut que les boucliers ronds du vase d'Aristonophos, dont le diamètre a presque la longueur du corps, ne pouvaient servir d'argument sérieux à notre thèse. De plus, une arme défensive aussi colossale ne cadre guère avec le tableau que les poètes nous font d'un champ de bataille. Parfois, il est vrai, l'Épopée nous dit que les héros souffraient sous le poids de leur bouclier[23]. Mais ce poids ne les empêche jamais de se mouvoir rapidement ni même de parcourir de grandes distances[24]. C'est ainsi qu'Achille poursuit au loin à travers champs Apollon sous les traits d'Agénor, pendant que les Troyens en déroute se sauvent derrière les murailles[25]. Achille et Hector s'enfuyant devant lui font trois fois le tour des murailles[26]. Ajax, fils de Télamon, en défendant les navires, saute d'un pont à l'autre, comme un écuyer conduisant quatre chevaux et s'élançant de l'un sur l'autre[27]. Très souvent les poètes font ressortir l'impétuosité des héros[28]. Tous ces mouvements sont impossibles, si l'on suppose le bras gauche armé d'un disque énorme dont la largeur équivaudrait à la longueur du corps. L'on arrive aux mêmes conclusions si l'on considère les données de l'Épopée sur les blessures et les différentes manières dont les guerriers se couvrent avec leur bouclier. Il nous suffira de rappeler à cet égard les passages les plus caractéristiques. Pendant qu'Énée, debout devant le cadavre de Pandaros et se couvrant avec son bouclier, tient sa lance en arrêt, Diomède lui lance une grosse pierre qui le blesse à la cuisse[29]. Si Énée avait eu un bouclier circulaire d'un diamètre équivalent à la hauteur du corps, la cuisse eût été naturellement préservée et une blessure à cet endroit eût été impossible. Du reste, dès que les guerriers se découvrent, ils sont blessés soit sous le bouclier, au ventre[30], soit au côté, à la poitrine[31] ou au flanc[32], soit enfin au-dessus du bouclier, à la poitrine ou aux épaules[33]. Toutes ces données supposent soit un bouclier rond de dimensions ordinaires, soit un bouclier ovale dont la largeur ne suffisait pas pour couvrir le corps dans toutes ces éventualités. Au contraire, l'expression ὑπασπίδια προποδίζων ou ὑπασπίδια προβιβάς[34], employée par les guerriers qui marchent à l'ennemi, prudemment cachés par leur bouclier, semble correspondre à un bouclier long et ovale[35]. Il en est de même des passages où le σάκος est comparé à une tour[36] ; de même que la tour cache la garnison, de même le bouclier protège le guerrier depuis le menton jusqu'à la cheville. Quoi qu'on en puisse dire, à cette catégorie appartient certainement l'άσπίς ποδηνεκής du Mycénien Périphétès qui tombe, en se retournant, parce qu'il s'est cogné contre le rebord du bouclier[37] ; il faut y joindre l'άσπίς d'Hector dont il vient d'être parlé et qui de son bord supérieur bat contre la nuque, de son bord inférieur contre les chevilles du héros[38]. On serait tenté de supposer que les mots άσπίς et σάκος servaient à distinguer les deux sortes de boucliers (rond et ovale). Mais cette hypothèse est inadmissible, si l'on songe aux habitudes de la langue épique ; les deux mots sont d'ailleurs employés dans plusieurs endroits comme synonymes. Qu'il nous suffise de faire observer à ce propos que Thélès appelle άσπίς le bouclier d'Achille, qui immédiatement après prend le nom de σάκος[39]. Voyons maintenant comment les boucliers étaient construits. Ils se composaient de plusieurs peaux de taureau cousues l'une sur l'autre et étaient généralement garnis de bronze à l'extérieur[40]. Le σάκος d'Ajax, fils de Télamon, était formé de sept peaux de taureau, recouvertes d'une plaque de bronze[41]. Celui de Teukros[42] et celui que porte Ulysse dans sa lutte contre les prétendants ont quatre couches de peau[43]. Pour fabriquer le bouclier d'Achille, Héphaïstos superpose cinq couches, dont les deux supérieures sont de bronze, celle du milieu en or, les deux inférieures en kassiteros[44]. Ce procédé qui rappelle la construction de nos cuirassés n'est évidemment qu'un effet de l'imagination du poète ; un bouclier composé de plusieurs plaques métalliques eût été complètement superflu, étant donnée la nature des armes offensives du temps, et aucun bras n'aurait pu manier une masse pareille. On peut en dire autant de l'άσπίς de Nestor qui, ainsi qu'Hector l'a appris, était tout en or y compris les poignées[45]. Cette description a peut-être été inspirée par la vue de boucliers dont la surface était garnie d'une plaque d'or, au lieu d'une simple plaque de bronze. C'est au centre du bouclier que résidait presque toute sa force de résistance : cela ressort de ce fait qu'Achille atteint l'άσπίς d'Énée sur le bord où la garniture de bronze et le cuir sont les plus minces[46]. Évidemment le diamètre des peaux superposées allait en diminuant graduellement de dessous en dessus ; de même l'épaisseur des garnitures de bronze diminuait du centre à la périphérie ; de là cet amincissement du bord du bouclier. Il en résulte qu'il y avait au centre de la surface un cercle formé par la couche extérieure la moins grande, puis venaient en dessous d'autres cercles concentriques plus grands, en sorte que chacun d'eux dépassait plus ou moins celui qui était placé dessus. Cette disposition, formant une sorte d'ornement, se retrouve dans plusieurs boucliers de bronze très anciens, de provenance italiote[47]. Au centre, à l'extérieur était placé l'omphalos[48]. C'était généralement une forte plaque de bronze, dont plusieurs spécimens sont parvenus jusqu'à nous[49]. Le bouclier d'Agamemnon[50] n'avait pas un omphalos mais vingt et un omphaloï dont vingt en kassiteros que le poète supposait sans doute répartis sur les cercles concentriques et un en kyanos, probablement un disque de bronze enduit de pâle de verre bleu ou de smalt. Il convient d'en rapprocher un bouclier de bronze trouvé dans le Danemark, dont le milieu est occupé par un assez gros omphalos pendant que d'autres, plus petits, sont disséminés tout autour sur la surface[51]. L'άσπίς τερμιόεσσα de Patrocle[52] était, si l'explication donnée par nous de cette épithète est exacte, un bouclier dont la bordure surtout sautait aux yeux. Cette bordure était-elle importante au point de vue ornemental ou simplement comme un détail de fabrication, c'est ce qu'on ne saurait dire au juste. De toute façon, il est tout naturel qu'on ait songé à consolider la périphérie puisque c'est à cet endroit que le bouclier était le plus mince[53]. Il sera question au chap. XXX de la triple bordure brillante dont Héphaïstos entoura le bouclier d'Achille[54]. La question de savoir comment on maniait le bouclier est intimement liée avec ce que nous savons sur la forme et les dimensions de cette arme. Mais rappelons tout d'abord les deux façons différentes dont le bouclier était rendu maniable chez les anciens. A notre connaissance, les boucliers les plus anciens n'ont qu'une poignée, mais point de lanières pour passer le bras (énarmes). A cette catégorie appartiennent les boucliers représentés sur les antiquités de Mycènes et qui ont presque la hauteur d'un homme. Si nous admettons, qu'ils étaient pourvus de lanières, celles-ci étaient naturellement placées au milieu de la concavité. Mais alors la hauteur démesurée du bouclier eût été non seulement inutile, mais sans aucun effet ; car, son centre se trouvant dans ce cas juste à la hauteur du coude, le bouclier aurait entièrement dégagé la partie inférieure du corps, dépassant de beaucoup la tète du guerrier qui, par suite, n'aurait pu rien voir. Cette interprétation est confirmée d'ailleurs par le cachet de Mycènes déjà cité maintes fois. Si l'on veut se rendre bien compte de la manière dont l'un des deux guerriers y tient le bouclier colossal, on reconnaitra aussitôt que la distance de l'épaule au centre de la concavité intérieure est beaucoup trop grande pour que le bras ait pu être plié et passer dans les lanières. Au contraire, la figure du cachet en question devient parfaitement compréhensible si nous admettons que le bras était tendu et la main passée dans une courroie placée au milieu du bouclier. Autant qu'on en peut juger par les monuments, les boucliers de tous les peuples orientaux, des Égyptiens[55], comme des Hittites, des Assyriens[56] comme des Phéniciens[57], n'étaient munis que d'une seule poignée de ce genre. Rappelons à ce propos un vase de Tirynthe, que nous avons mentionné plus haut. On y voit deux guerriers tenant chacun devant soi un petit bouclier circulaire. Rien que la petite dimension de ces boucliers exclut absolument l'hypothèse qu'ils aient pu avoir à la fois une poignée et des lanières. De plus, la façon dont le peintre a traité le bras gauche des guerriers prouve bien que l'avant-bras n'était point passé dans les énarmes, mais que la main saisit une sorte d'anse qu'il faut supposer au revers et au centre du bouclier. De même tous les boucliers circulaires en bronze qui proviennent d'anciennes tombes étrusques[58] et ombriennes[59], comme tous ceux de même métal trouvés dans l'Europe centrale et septentrionale[60], ne sont munis que d'une seule poignée[61]. Cette manière antique de manier le bouclier semble avoir été conservée[62] par les Spartiates jusqu'au troisième siècle avant J.-C. ; il est donc permis de supposer qu'elle était universellement adoptée par les peuplades les plus anciennes de la Grèce. Il est impossible d'admettre qu'il y ait jamais eu des boucliers sans aucune poignée. Hérodote[63] dit, il est vrai, qu'à l'origine, le bouclier n'était maintenu qu'au moyen d'un baudrier qui passait sur la nuque et sur les épaules. Mais il est évident que cet historien, en rapportant ainsi ce fait, n'avait pas une idée bien nette des usages antiques ou bien il ne s'est pas exprimé avec assez de clarté. A côté du bouclier à une seule poignée, il y en eut un autre qui se propagea peu à peu : il était pourvu de deux courroies dont l'une pour le bras et l'autre pour la main. C'était une innovation que les Grecs attribuaient aux Cariens[64]. De l'examen des monuments, que nous connaissons, nous sommes en droit de conclure que ce bouclier pourvu de lanières et d'une poignée apparaît pour la première fois sur les bas-reliefs d'Ibsamboul représentant la campagne de Rhamsès II contre les Hittites. Et ce ne sont pas les guerriers de nationalité égyptienne qui en sont armés, mais bien les Schardana, tribu qui semble issue d'Asie Mineure et qui servait comme légion étrangère dans l'armée égyptienne[65]. Mais ce bouclier a dû être introduit de très bonne heure en Asie, car on le reconnaît déjà sur des vases très anciens de Mélos[66] et de Rhodes. En tout cas, il fut, si nous ne nous trompons, dès le sixième siècle, l'arme défensive la plus ordinaire des armées grecques, celle de Sparte exceptée. Maintenant que nous connaissons les deux façons de manier le bouclier, passons à l'examen des principaux endroits de l'Épopée qui s'y rapportent. Le bouclier d'Idoménée était, dit le poète, pourvu de deux κανόνες[67] ; Hector a entendu dire que celui de Nestor était tout en or, y compris ses κανόνες[68]. Quelques savants anciens et modernes voient dans ces κανόνες des traverses de bois auxquelles était attaché le baudrier, ou courroie qui supportait le bouclier[69]. Mais il est évident que, dans une simple mention, un détail aussi insignifiant ne méritait pas d'être relevé. Il était bien plus naturel de faire ressortir le jeu des courroies qui facilitait le maniement du bouclier. On a essayé aussi de présenter les κανόνες comme des traverses qui auraient eu pour objet de distendre les peaux de taureaux dont se composait le bouclier[70]. Cette opinion n'est pas plus acceptable que la première ; en effet, ces traverses ne seraient alors qu'une particularité de construction qui ne pouvait rien ajouter à la caractéristique ni au prix du bouclier. Il est d'ailleurs douteux que la disposition dont il s'agit ici ait jamais été employée ; parmi les nombreux renseignements que l'Épopée donne sur les boucliers, il n'en est aucun qu'on puisse en toute assurance ou avec quelque vraisemblance appliquer à ces traverses. Enfin, il est dit expressément que le bouclier de Nestor et ses κανόνες étaient tout en or. Si l'on adoptait cette explication, il faudrait supposer, ce qui est inadmissible, que le poète a reporté sur le bouclier métallique qu'il imagine la disposition qu'il savait exister dans les boucliers en cuir. Toutes les difficultés disparaissent, au contraire, si nous admettons que les κανόνες étaient l'anse pour le bras et la poignée pour la main. Cette hypothèse semble confirmée rien que par ce fait que le nombre deux est expressément indiqué pour les κανόνες du bouclier d'Idoménée. Nous avons vu plus haut que déjà au quatorzième siècle avant J.-C. des boucliers à double anse avaient été en usage chez les Schardana, peuplade probablement originaire d'Asie Mineure. Il n'y a donc rien de surprenant qu'une arme défensive de ce genre ait été introduite à l'époque homérique chez les Grecs d'Asie-Mineure. Les preuves abondent dans l'Épopée que d'autres parties de l'équipement militaire, telles que l'umbo, l'aigrette, les jambières, qui passaient pour des inventions cariennes. étaient communément usitées chez les Ioniens du temps. Notre interprétation s'explique du reste aussi fort bien au point de vue linguistique. Si, en effet, le mot κανών vient, comme c'est probable de κάννη, primitivement κάνη (jonc)[71], son sens primitif serait tuyau ou bâton creux. Or ce sens convient parfaitement aux anses du bouclier ; des tuyaux métalliques étaient bien plus propres à cet usage que des bandes de métal qui auraient pu faire des entailles dans le bras et dans la main. D'après tout ce que nous venons de dire, les κανόνες nous paraissent avoir été l'anse double du bouclier[72]. Évidemment les boucliers de petites dimensions seuls étaient maniés au moyen de cette double poignée. Quant aux boucliers qui ont presque la hauteur d'un homme et que mentionne l'Épopée, on peut en dire ce qui a été dit plus haut à propos de ceux représentés sur les antiquités de Mycènes. Ces boucliers colossaux ne pouvaient être maniés qu'au moyen d'une poignée. A l'époque d'Homère, la poignée antique et la double poignée plus récente étaient simultanément en usage ; c'est ce qui explique pourquoi le poète fait ressortir le nombre deux des κανόνες du bouclier d'Idoménée. Il y avait à ce moment-là aussi des boucliers qui n'étaient munis que d'un seul κανών. Il nous reste à parler encore du baudrier ou courroie de soutien[73]. Elle était surtout nécessaire, pour le grand bouclier ovale, trop lourd pour que la main gauche tenant la poignée pût seule le diriger à l'aise. Dans le petit bouclier circulaire, cette courroie permettait surtout de laisser pendre le bouclier le long du corps, quand le guerrier ne s'en servait pas ; c'est un point sur lequel nous reviendrons plus bas. L'Épopée ne nous renseigne nullement sur la manière dont la courroie était attachée au bouclier. Deux boucliers de bronze, trouvés l'un dans un tombeau de Corneto, l'autre dans une tombe ombrienne[74], semblent avoir été pourvus de deux courroies qui se croisaient et dont les extrémités étaient engagées dans quatre anneaux ou sorte de boucles fixées à l'intérieur[75]. Mais tous les autres monuments, dont il faut à ce propos tenir compte dans notre étude, n'offrent qu'une seule courroie, conformément au singulier qui est, dans ce cas, toujours employé dans l'Épopée. Sur les boucliers égyptiens elle est attachée non loin du centre, à l'intérieur ; elle est portée obliquement en bandoulière, tantôt sur l'épaule gauche[76], tantôt sur l'épaule droite[77]. Cette courroie est également oblique dans les boucliers de deux chasseurs de lions, représentés sur la lame d'un poignard de Mycènes. Seulement ici elle est fixée plus haut et portée sur l'épaule gauche. C'est sur la même épaule que la fait reposer aussi Hérodote[78] dans la description qu'il fait du bouclier antique. Au contraire, le seul passage de l'Épopée qui fasse allusion à la position de cette courroie indique l'épaule droite : Diomède, blessé à cette épaule par Pandaros, souffre sous la pression du baudrier et soulève légèrement celui-ci pour sécher le sang qui coule[79]. Il est clair que cette courroie changeait de point d'appui selon les mouvements imprimés au bouclier[80]. Tout porte à croire que le guerrier, quand il s'apprêtait à combattre l'ennemi, tenait le bouclier droit devant lui[81] et qu'alors le baudrier reposait sur son dos. S'agissait-il de parer à gauche, la courroie glissait naturellement sur l'épaule droite, et sur la gauche, s'il fallait tourner le bouclier vers la droite. Le guerrier voulait-il frapper un coup ou lancer un trait, il était bien entendu forcé de dégager l'épaule droite du poids du bouclier et, par suite, rejeter la courroie sur la nuque. La même courroie servait aussi à laisser pendre le bouclier le long du corps. C'est ainsi que les guerriers, quand ils fuyaient, avaient l'habitude de rejeter en arrière le bouclier qui, pendu à la courroie, leur couvrait le dos[82]. Cette manœuvre est clairement désignée par les vers qui représentent la chute du Mycénien Périphétès[83]. Le bouclier d'Hector lui pendait également dans le dos au moment où le héros quittait le champ de bataille pour courir vers Troie[84]. D'ailleurs il est évident que le maniement du grand bouclier ovale, son poids fût-il allégé par le baudrier, n'était pas une besogne facile : il fallait même beaucoup de force et d'adresse pour diriger cette masse dans tous les sens, là d'où pleuvaient les coups et les traits ennemis[85]. On n'a pas besoin d'invoquer le témoignage de l'Épopée pour comprendre que la courroie, tendue par la pesanteur du bouclier, comprimait désagréablement les épaules des guerriers sous les rayons brûlants d'un soleil du midi ; la sueur coulait à flots, sur la poitrine et dans le dos des héros, et il est tout naturel que ceux-ci aient senti de temps à autre le besoin de se débarrasser du bouclier pendant la lutte et de se reposer[86]. C'est pour faire allusion aux efforts qu'il fallait déployer pour manier le bouclier que fut formée l'épithète ταλαύρινος[87] (portant le bouclier, qui résiste sous le poids du bouclier[88], p. ext. robuste), qui accompagne souvent Arès, le dieu de la guerre[89]. Telles sont les données essentielles et très probables sur les boucliers des principaux héros. L'Épopée mentionne bien encore les λαισήϊα comme une espèce différente des άσπίδες[90]. Mais leur épithète ordinaire πτερόντα prouve que, contrairement à l'άσπίς et au σάκος, ils étaient faciles à mouvoir. Les poètes ne mentionnent d'ailleurs le λαισήϊον que quand ils décrivent le choc des deux armées ennemies, et ne l'attribuent jamais à aucun guerrier qui n'est pas confondu dans les rangs et qui est une individualité. Nous pouvons donc en conclure que ces boucliers plus légers n'étaient pas l'arme des chefs, mais bien de la troupe. Le mot λαισήϊον semble avoir quelque parenté avec λάσιος, grossier[91]. Si cette hypothèse est juste, il est permis d'admettre que les boucliers ainsi nommés n'étaient point plaqués de bronze, mais faits de peaux grossières. Hérodote l'affirme pour les λαισήϊα des Ciliciens qui escortaient Xerxès[92]. |
[1] Tel est le bouclier du cachet d'or reproduit par Schliemann, Mykenæ, p. 202, n° 254 et p. 233, 313. — Voyez aussi le bouclier représenté sur une lame de poignard dans l'Άθήναιον, vol. X, p. 309 et suiv. A 1. — Milchhœfer, Die Anfœnge der Kunst, p. 145, n° 64. — Bull. de corresp. hellén., 1886, pl. II, 3.
[2] Voyez dans Mykenæ, p. 259, n° 335, et la lame de poignard que nous venons de citer.
[3] Schliemann, Mykenæ, p. 153, n° 213.
[4] Schliemann,
[5] Monum. dell' Inst., VIIII, pl. XXXIX, 1, pl. XL, 4. — Ann. dell' Inst., 1872, Tav. d'agg. I, 2. Évidemment les peintres ont voulu représenter des boucliers qui pendaient le long des côtes ou dans le dos.
[6] Jusqu'à présent on n'a constaté la présence de ce bouclier que sur deux vases ; Arch. Zeit., LXIII, 1885, p. 139.
[7] Furtwængler, Beschreibung der
berliner Vasensamml., p. 9-10, n° 56.
[8] Mon. dell' Inst., IX, pl. IV.
[9] Conze, Melische Thongefässe, pl. III.
[10] Verhandlungen der 23 Philologenversammlung
zu Hannover,
[11] Boucliers argiens légèrement elliptiques d'Olympie (diamètre 0,80 sur 1 m.) : Furtwængler, Die Bronzefunde aus Olympia, p. 79-80. Les modèles de provenance italiote sont toujours ronds. Ils sont tous reproduits dans le Mus. ital. di antichità classica, II, p. 102-108, 126, note 1. Par ex. boucliers de Préneste : Mon. dell' Inst., VIII, pl. XXVI, 4-6 (diam. 0,72, 0,58, 0,60). De Tarquinies : Mon. dell' Inst., X, pl. X, 1, Ann., 1874, p. 252 ; diam. 0,66. — De Cæré : Grifi, Mon. di Cere, pl. XI, I, 3. — Mus. Gregor., I, pl. XVIII-XX (le diamètre ici varie entre 0,825 et 0,925). — Pour l'Étrurie (provenance exacte inconnue) voyez Die Alterthümerversammlung in Carlsruhe, pl. IX (diam. 0,85). — De S. Anatolia di Narco (territoire de Spoleto) : Mus. ital. di ant. class., II, p. 102 ; diam. 0,51.
[12] Comparez Die Verhandl. der 35e Philologenversamml. zu Stettin, Leipzig, 1881, p. 168-170.
[13] Tel est le cas de la fameuse amphore de Chalcis dans sa composition centrale. C'est sans doute à un type de ce genre que font allusion les vers suivants de Tyrtée, XI, 23 :
A gauche, vos ronds boucliers,
A droite, la lance brillante.
[14] Layard, A second stries of the
mon. of
[15] Iliade, III, 347, 356 ; V, 300 ; VII, 250 ; XI, 61, 434 ; XII, 294 ; XIII,
157 160, 405, 803 ; XVII, 7, 517 ; XX, 274 ; XXII, 581 ; XIII, 818. Comparez Zeitschr.
für Alterthunsewissenschaft, 1836, p. 817-820.
[16] Ce dernier sens serait analogue à celui de άσπίς άμφιβρότη (Iliade, II, 389, XII, 402, XX, 281). L'allusion à un objet ovale serait confirmée par l'expression νήες έΐσαι, si, comme c'est probable, elle signifie des vaisseaux construits régulièrement. Comparez Philologue, XXIX, 1870, p. 195.
[17] Iliade, XII, 297 (en parlant de l'άσπίς de Sarpédon) : χρυσείῃς ῥάβδοισι διηνεκέσιν περὶ κύκλον. — Comparez notre chap. XXX au sujet de ce passage difficile.
[18] Iliade, XX, 280. — Ce passage veut dire : le trait vint traverser les deux couches qui étaient superposées à l'endroit frappé.
[19] Iliade, XI, 33.
[20] Iliade, V, 453, 797 ; XII. 426 ; XIII, 715 ; XIV, 428. Cette explication s'impose à cause de l'analogie avec l'άπήνη εΰκυκλος, qui indique un char orné de beaux cercles, c'est-à-dire de belles roues.
[21] Iliade, XV, 645.
[22] Iliade, VI, 117.
[23] Iliade, II, 388. V, 795. XIII, 709. XVI, 160.
[24] Iliade, VI, 514 ; XI, 465 et suiv. ; XIII, 754-755 ; XVII, 119, 189, 257.
[25] Iliade, XXI, 601-605.
[26] Iliade, XXII, 144-166.
[27] Iliade, XV, 676-686.
[28] Ils l'expriment le plus souvent par le mot έπορούω : Iliade, IV, 472 ; V, 432 ; XI, 256 ; XV, 520, 525, 579 ; XVI, 320 ; XXI, 144, 392. Ou bien par le verbe άΐσσω : Iliade, XV, 694 ; Odyssée, XXII, 90 ; ou έπαΐσσω : Iliade, III, 369 ; V, 98, 235, 323, 584 ; X, 345 ; XII, 191 ; XIII, 513, 546. Comparez aussi : Iliade, XIII, 158.
[29] Iliade, V, 300-306.
[30] Iliade, XI, 424.
[31] Iliade, XVI, 312, 400.
[32] Iliade, IV, 468.
[33] Iliade, XIV, 412 ; Odyssée, XXII, 279.
[34] Iliade, XIII, 156-158, 807 ; XVI, 609.
[35] En deux endroits (Iliade, XIII, 157 et 803) l'άσπίς a pour épithète πάντοσ᾽ ἐΐσην. Si, par conséquent, l'explication ci-dessus est juste, la question de savoir si cette épithète doit être traduite par circulaire ou par recouvrant tout le corps sera résolue en faveur de cette dernière traduction.
[36] Iliade, VII, 119 ; XVI, 485 ; XVII, 128.
[37] Iliade, XV, 645-648.
[38] Iliade, VI, 117.
[39] Iliade, XVIII, 458 et 478. Ce bouclier est appelé σάκος dans tous les autres passages, notamment : Iliade, XVIII, 608, 609 ; XIX, 372-379 ; XX, 258-261, 268 ; XXII, 290, 313.
[40] Voyez notamment : Iliade, XIII, 406 ; 803. XVII, 492. — Sur Iliade, XII, 294-297, comparez notre chap. XXX. Les expressions techniques désignant les couches de peau et de feuilles de métal sont : πτύχες (Iliade, VII, 247, XVIII, 481, XI, 269-272), κύκλοι (Iliade, XX, 280) et peut être aussi ίμάντες (Odyssée, XXII, 186). Il faut y ajouter encore l'adjectif τετραθέλυμνος, à quatre couches. Iliade, XV, 478, Odyssée, XXII, 122.
[41] Iliade, VII, 219. — Comparez VII, 245-258 ; XI, 545.
[42] Iliade, XV, 479.
[43] Odyssée, XXII, 122.
[44] Iliade, XVIII, 481 ; XX, 267.
[45] Iliade, VIII, 192. — Des boucliers d'or, chez les Syriens de Damas : Samuel II, 7, 8. Le roi Salomon fait fabriquer des boucliers votifs en or, grands et petits. Les Rois, I, 10, 16-17.
[46] Iliade, XX, 275.
[47] Mus. Gregor., I, pl. XVIII-XX. — Mon. dell' Inst., VIII, pl. XXVI, 4-6 ; X, pl. 1-2.
[48] Άσπίς όμφαλόεσσα : Iliade, IV, 448 ; VI, 118 ; VIII, 62 ; XI, 259, 424, 457 ; XII, 161 ; XIII 264 ; XVI, 214 ; XIX, 360 ; XXII, 110. Odyssée, XIX, 32. Σάκος έπομφάλιον : Iliade, VII, 266.
[49] L'omphalos de bronze, trouvé à Cervetri, collection de M. Brüls à Rome (diam. 0,25). Lorsque cette pièce fut achetée, on remarquait encore sur les bords des fragments de cercles de bronze. — L'omphalos du bouclier trouvé à Corneto (Mon. dell' Inst., X, pl. X, 1, 2) est double et se termine par une petite pointe. Est terminé par une forte pointe un bouclier rond en bronze découvert près d'Amathonte, dans l'île de Chypre, dans la même tombe que la coupe d'argent représentée dans Perrot et Chipiez, Hist. de l'Art, p. 871, fig. 639.
[50] Iliade, XI, 32.
[51] Atlas de l'archéologie du Nord, Copenhague, 1857, B V, 1. — Worsaae, Nordiske Oldsdger d. museum i Kjöbenhavn, p. 41, n° 203. — Conestabile, Sopra due dischi antico-italici, p. 21 (Mem. dell' acc. di Torino, série II, t. XXVIII).
[52] Iliade, XVI, 802.
[53] Iliade, XX, 275-276.
[54] Iliade, XVIII, 479.
[55] Voyez Rosellini, Monum. dell' Egitio, I, pl. 102-110.
[56]
Les Assyriens maniaient de la sorte non seulement les boucliers longs ovales
(Ex. Layard, Mon. of. Nineveh, pl. 69, 72 ; A second series of the
monum of Ninev., pl. 19, 29, 34, 36, 42), mais aussi le bouclier rond moyen
(Ex. Layard, Mon. of. Nin., pl. 29, 62, 63, 66, 68, 75, 76,
78, 79 ; A second series of the mon. of Nin., pl. 18, 20-22, 31, 39,
42).
[57] Voyez le cratère d'argent des Mon. dell' Inst., X, pl. XXXIII 4r.
[58] Mon. dell' Inst., X, pl. X, 1. Voyez aussi un bouclier de Vulci publié dans le Mus. gregor., I, pl. XXI, 4 ; il se peut qu'ici le dessinateur ait reproduit à dessein une seule poignée.
[59] Voyez le bouclier de S. Anatolia di Narco (près Spoleto), dans le Mus. ital. di antichità class., II, p. 102.
[60] Lindenschmit, Alterth. unserer heidn. Vorzeit, I, fasc. XI, pl. 1, 4, 5 ; III, fasc. VII, pl. II ; suppl. au vol. III, fasc. I, p. 16. - Comparez Kemble, Horœ ferales, pl. XI. - Genthe, Der etruskische Tauschhandel, p. 57.
[61] On rencontre également souvent sur des bronzes de Sardaigne un petit bouclier rond muni d'une seule poignée au milieu du revers, ex : Perrot et Chipiez, Hist. de l'art, IV, p. 66, n° 52, p. 67, n° 53, 54, p. 68, n° 57, p. 70, n° 60. De même sur le guerrier d'une stèle funéraire d'Ikonion en Lycaonie. Texier, Description de l'Asie Mineure, II, pl. 103, p. 148-149 ; Perrot et Chipiez, IV, p. 741, n° 359.
[62] Sur les bas-reliefs de Sparte, dans Le Bas, Voyage archéol. en Grèce, pl. 105, où il est facile de reconnaître que le guerrier qui est à droite du spectateur ne manie le bouclier qu'au moyen de la poignée.
[63] I, 171 : τέως δὲ ἄνευ ὀχάνων ἐφόρεον τὰς ἀσπίδας πάντες οἳ περ ἐώθεσαν ἀσπίσι χρᾶσθαι, τελαμῶσι σκυτίνοισι οἰηκίζοντες, περὶ τοῖσι αὐχέσι τε καὶ τοῖσι ἀριστεροῖσι ὤμοισι περικείμενοι.
[64] Les inventions que les anciens attribuent aux Cariens sont celles des lanières, des marques de boucliers, de l'umbo, des jambières et des aigrettes. Voyez Hérodote, I, 171. Strabon, XIV, c. 661. Schol. Iliade, VIII, 193 ; Schol. Thucyd., VI, 8 ; Étym. m., p. 489, 36 ; Étym. gud., p. 297, 41 ; Pline, Hist. nat., VII, 200.
[65] Rosellini, Mon. dell' Egitto, I, pl. CI. — Chabas, Études sur l'antiquité historique, 2° éd. p. 360. — Gaz. archéol., VII, 1881- 82, p. 135. Comparez Brugsch, Geschichte Aegyptens, p. 578 et Schliemann, Ilios, p. 823-826.
[66] Conze, Melische Thongefässe, pl. III.
[67] Iliade, XIII, 406.
[68] Iliade, VIII, 192.
[69] Hesychius, s. v. κανών. — Telle est aussi l'opinion de Friedreich (Die Realien in der Iliade, u. Odyssee, p. 367) ; mais il admet que l'une de ces sangles transversales servait à passer le bras et l'autre était une poignée.
[70] Ebeling, Lexicon Homer., au mot κανών, n° 1.
[71] Hehn, Kulturpflanzen und
Hausthiere, 3e éd. p. 265, 4e éd. p. 247.
[72] Quelques commentateurs anciens (Schol. Iliade, VIII, 195, Eustathe, p. 707, 58-61, p. 905, 51-53 ; Etym. m., p 489, 36, Etym. gud., p. 294, 41) reconnaissent bien dans les κανόνες une disposition qui sert à manier le bouclier ; mais ils se trompent quand ils supposent que cette disposition différait de celle dont l'invention est attribuée aux Cariens.
[73] Iliade, 11,388 ; V, 796 ; XII, 401 ; XIV, 404 ; XVI, 803 ; XVIII, 480. Les baudriers d'Agamemnon et d'Achille étaient άργύρεοι (Iliade, XI, 38 ; XVIII, 480), c'est-à-dire garnis d'argent.
[74] Mus. ital. di antich.
class., II, p. 102-104.
[75] Nous ne nous arrêterons pas à l'opinion émise dans le Museo ital., I, p. 104, d'après laquelle ces courroies auraient servi à saisir le bouclier, lorsque la main aurait lâché la poignée à la suite d'un coup.
[76] Wilkinson-Birch, The mannere of
the anc. Egyptians, I, p. 199, note 1.
[77] Wilkinson-Birch, p. 200, n° 25.
[78] I, 171.
[79] Iliade, V, 795-797. Comparez vers 98. Le passage où Hector frappe Ajax (Iliade, XIV, 404) laisse entière la question de savoir si la guige et la courroie du glaive étaient posées l'une sur l'autre ou si elles se croisaient au milieu de la poitrine.
[80] Iliade, VII, 238.
[81] C'est ainsi qu'Ajax tient son bouclier lorsqu'il sort des rangs achéens pour aller livrer le combat singulier avec Hector (Iliade, VII, 224). De même Sarpédon lorsqu'il s'élance vers l'enceinte des navires. Iliade, XII, 294. Comparez Iliade, XIII, 157, 802 ; XX, 162 ; XXI, 581 ; XXII, 313.
[82] Iliade, XI, 545.
[83] XV, 645-648.
[84] Iliade, VII, 117-118. Comparez les deux guerriers combattant sur un sardonyx trouvé dans un tombeau en puits de Mycènes (Schliemann, Mykenæ, p. 233, n° 213, notre fig. 145. — Les deux chasseurs de lions mentionnés plus haut (p. 419, fig. 151) ; les conducteurs de chars sur les vases du Dipylon, dans les Mon. dell' Inst., VIII, pl. LXXIX, 1, pl. XL, 4. — Ann. dell' Inst., 1872, Tav. d'agg., 1, 2 ; les guerriers en marche sur un fragment de vase trouvé à Mycènes, analogue à ceux du Dipylon (Mykenæ, p. 153, n° 213). — Les guerriers assyriens avaient coutume, quand ils étaient en marche, de porter le grand bouclier ovale dans le dos (Layard, A second series of the mon. of Nineveh, pl. 35) et le petit circulaire le long du côté (voyez Layard, A second series, pl. 29, 35). Le tireur d'arc figuré sur le monument des Néréides de Xanthos laisse pendre son bouclier le long du côté gauche (Mon. dell' Inst., X, pl. XIII, 4 ; Ann., 1875, p. 76).
[85] Iliade, VII, 238.
[86] Iliade, XIII, 709-711.
[87] Ce mot est dérivé probablement de ταλα-Ϝ-ρινο-ς. Curtius, Grundzüge der gr. Etym., 4e éd., p. 553. — Kuhn, Zeitschr. f. vergl. Sprachforsch., XVII, 1868, p. 225-226. Sur les opinions des savants anciens, voyez Lehrs, De Arist. stud. hom., 2e éd., p. 308-310.
[88] Comparez Hym. hom., VIII, 1.
[89] Iliade, V, 289 ; XX, 78 ; XXII, 267. — VII, 239.
[90] Iliade, V, 452 ; XII, 425. — O. Müller (Dorier, II, p. 241, note 2) a, le premier, émis cette opinion, souvent reproduite après lui, que les λαισήϊα πτερόεντα étaient des boucliers ronds munis en bas d'une sorte de tablier protecteur, semblables à ceux qu'on voit souvent sur les vases à figures rouges. Cette opinion a été victorieusement réfutée par Michælis (Annal. dell' Inst., 1875, p. 76).
[91]
Curtius, Grundzüge, 4e éd. p. 366, n° 537. — Dœderlein, Homer. Glossarium, p. 364-365.
[92] VII, 91.