QUATRIÈME VOLUME
Il existait au commencement de Que ces cités, la grande gloire du nom ionien, aient été
fondées par des émigrants venus de Euripide considère Ion[1], fils de Kreüsê et d’Apollon, comme le fondateur de ces dernières villes. Mais la forme la plus courante de la légende attribue cet honneur aux fils de Kodros, dont deux sont nommés spécialement, et correspondent aux deux plus grandes des dix cités ioniennes continentales, Androklos comme fondateur, d’Ephesos, Neileus de Milêtos. Ces deux villes sont toutes lés deux désignées comme fondées directement par Athènes. Les autres semblent plutôt être des établissements séparés, n’étant pas composés d’Athéniens et n’émanant pas d’Athènes, mais adoptant la fête ionienne caractéristique des Apaturia et contenant (en partie du moins) des tribus ioniennes et recevant des princes des familles kodrides à Ephesos ou à Milêtos, comme condition de leur admission à la fête confédérée Pan-Ionienne. Le poète Mimnerme attribuait la fondation de sa ville natale Kolophôn à des émigrants venus de Pylos dans le Péloponnèse, sous Andræmôn ; Teôs fut colonisée par des Minyæ d’Orchomenos, sous Athamas : Klazomenæ par des colons de Kleônæ et de Phlious (Phlionte), Phokæa par des Phokiens, Priênê en grande partie par des Kadmiens venus de Thèbes. Et quant aux îles puissantes de Chios et de Samos, il ne parait pas que leurs auteurs indigènes, Ion, le poète de Chios, ou Asius, le poète de Samos, leur attribuassent une population venant d’Athènes. Pausanias ne pouvait pas non plus comprendre parles poèmes d’Ion comment il se faisait que Chios eût fini parfaire partie de la confédération ionienne[2]. Hérodote spécialement insiste sur le nombre des tribus et des races grecques qui contribuèrent à fournir la population des douze cités ioniennes — Minyæ d’Orchomenos, Kadmeiens, Dryopiens, Phokiens, Molosses, Pélasges Arkadiens, Dôriens d’Epidauros, et plusieurs autres sections de Grecs. De plus il signale particulièrement les Milésiens, comme prétendant être du sang ionien le plus pur, et comme étant partis (lu Prytaneion d’Athènes ; donnant ainsi. évidemment à entendre qu’il croit que la majorité au’ moins des autres colons n’était pas venue du même foyer[3]. Mais le renseignement le plus frappant que nous donne Hérodote, c’est la différence de langage ou dialecte qui distinguait ces douze cités. Milêtos, Myous et Priênê, toutes situées sur le sol des Kariens, avaient un seul dialecte : Ephesos, Kolophôn, Lebedos, Teôs, Klazomenæ et Phokæa avaient un dialecte commun à toutes, mais distinct de celui des trois villes précédentes ; Chios et Erythræ présentaient un troisième dialecte, et Samos à elle seule un quatrième. L’historien ne se contente pas de signaler simplement cette quadruple variété de langage ; il emploie des termes très forts pour exprimer le degré de dissemblance[4]. Le témoignage d’Hérodote, quant à ces dialectes, est naturellement incontestable. Ainsi, au lieu d’une seule grande émigration ionienne, les assertions citées plus haut nous amènent plutôt à supposer un grand nombre d’établissements séparés et successifs, formés par des Grecs de sections différentes, se mêlant avec des Lydiens et des Kariens préexistants et modifiés par eus, et s’alliant dans la suite avec Milêtos et Ephesos pour former ce qu’on appelle l’Amphiktyonie ionienne. Comme condition de cette union, ils sont amenés à admettre au nombre de leurs chefs des princes de la gens ou famille des Kodrides, qui sont appelés fils de Kodros, mais que l’on ne doit pas pour cette raison supposer nécessairement contemporains d’Androklos ou de Neileus. Les chefs choisis par quelques-unes des cités étaient, dit-on, Lykiens[5], de la famille héroïque de Glaukos et de Bellerophôn : il y avait d’autres villes où les Kodrides et les Glaukides étaient chefs conjointement. Relativement aux dates de ces établissements séparés, nous ne pouvons donner aucun renseignement, car ils se trouvent au delà du commencement de l’histoire authentique. Nous voyons quelque raison pour croire que la plupart d’entre eux existaient quelque temps avant 776 avant J.-C. ; mais à quelle date commença la solennité fédérative unissant les douze cités, c’est ce que nous ignorons. Le récit d’Hérodote nous montre que ces colonies étaient composées d’un mélange de sections de Grecs, circonstance importante dans l’appréciation de leur caractère. Tel fut ordinairement le cas plus ou moins quant à toutes les émigrations. C’est pourquoi les établissements ainsi fondés contractèrent-ils tout de suite, généralement parlant, à la fois plus d’activité et plus d’instabilité que l’on n’en voyait chez ceux des Grecs qui restaient clans leurs foyers, et chez qui la vieille routine habituelle n’avait été détruite par aucun changement marquant soit de place, soit de relations sociales. Car clans une colonie récemment fondée il devenait nécessaire de changer la classification des citoyens, de les ranger ensemble clans d’autres divisions militaires et civiles, et d’adopter de nouveaux sacrifices caractéristiques et dé nouvelles cérémonies religieuses comme liens d’union entre tous les citoyens réunis. De plus, au premier début d’une colonie, il y avait à surmonter des difficultés inévitables qui imposaient à ses chefs la nécessité d’avoir de l’énergie et de la prévoyance, — plus particulièrement par rapport aux affaires maritimes, d’où dépendaient non seulement leurs rapports avec les concitoyens qu’ils avaient laissés derrière eux, mais encore leurs moyens d’établir des relations avantageuses avec la population de l’intérieur. En même temps, les nouveaux arrangements indispensables parmi les colons étaient loin de se faire toujours avec harmonie : la dissension et des divisions partielles se présentaient assez fréquemment. Et ce qui a été appelé la mobilité de la race ionienne, en tant que comparée avec la race dôrienne, doit être attribué dans une grande mesure à ce mélange de races et à ce stimulant extérieur provenant de l’expatriation. Car il n’y en a pas de traces en Attique antérieurement à Solôn ; tandis que, de l’autre côté, les colonies dôriennes de Korkyra et de Syracuse présentent une population non moins excitable que Ies villes ioniennes en général[6], et qui l’était beaucoup plus que la colonie ionienne de Massalia. Le remarquable esprit commercial qui, comme nous le verrous, caractérise Milêtos, Samos et Phokæa, n’appartient qu’à un faible degré à tout ce qui se rattache au caractère ionien. On représente toutes les villes ioniennes, excepté
Klazomenæ et Phokæa comme ayant été fondées sur quelques établissements
préexistants de Kariens, de Lélèges, de Krêtois, de Lydiens, ou de Pélasges[7]. Dans quelques
cas ces premiers habitants étaient soumis, tués ou chassés : dans d’autres
ils étaient acceptés comme compagnons de résidence, de sorte que les cités
grecques, ainsi établies, prenaient une teinte considérable de coutumes et de
sentiments asiatiques. Ce qu’Hérodote rapporte au sujet du premier
établissement de Neileus et de ses émigrants à 1llilêtos est remarquable à ce
point de vue. Ils ne prirent pas avec eux de femmes d’Athènes (dit l’historien),
mais ils trouvèrent des épouses dans les femmes kariennes de l’endroit, dont
ils avaient vaincu et mis à mort les maris et les pères ; et les femmes,
saisies ainsi par force, manifestèrent leur répugnance en s’engageant entre
elles par un serment solennel à ne jamais manger avec leurs nouveaux maris,
et à ne pas non plus les appeler par leurs noms personnels. Elles imposèrent
à leurs filles la même condition : mais nous ne savons pas combien de temps dura
cet usage. Nous pouvons soupçonner d’après le langage de l’historien, qu’il y
en avait encore des traces visibles de son temps dans les coutumes de famille
des Milésiens. La population de cette ville, la plus grande des cités
ioniennes, doit ainsi avoir été composée à moitié d’hommes de race karienne.
Il est à présumer que ce qui est vrai de Neileus et de ses compagnons se
trouverait également vrai de la plupart des colonies maritimes de Le culte d’Apollon Didymæos, aux Branchidæ près de Milêtos, — celui d’Artemis, près d’Ephesos, — et celui de l’Apollon Klarios, près de Kolophôn, semblent avoir existé chez la population asiatique indigène avant l’établissement de l’une ou de l’autre de ces trois cités. Maintenir ces droits locaux préexistants n’était pas moins conforme aux sentiments que profitable aux intérêts des Grecs. Les trois établissements acquirent tous une plus grande célébrité sous l’administration ionienne ; en contribuant à leur tour à la prospérité des villes auxquelles ils étaient attachés. Milêtos, Myous et Priênê étaient situées dans la plaine productive du fleuve Mæandros ou auprès d’elle ; tandis qu’Ephesos était de la même manière établie près de l’embouchure du Kaïstros, communiquant ainsi immédiatement avec la fertile bande de terre qui sépare le mont Tmôlos au nord d’avec le mont Messôgis au sud, et à travers laquelle coule ce fleuve : Kolophôn n’est qu’à un très petit nombre de milles au nord du même fleuve. Possédant les meilleurs moyens de communication avec l’intérieur, ces trois villes semblent avoir grandi plus rapidement que le reste ; et, avec file voisine de Samos, elles constituèrent à une époque reculée la force de l’Amphiktyonie Pan-Ionienne. La situation du territoire sacré de Poseidôn (où cette fête était célébrée) sur le côté septentrional du promontoire de Mykale, près de Priênê, et entre Ephesos et Milêtos, semble prouver que ces villes formaient le centre primitif autour duquel finirent par se grouper graduellement les autres établissements ioniens. Car ce n’était nullement une situation centrale par rapport à toutes les douze ; de sorte que Thalês de Milêtos, qui à une époque suivante recommandait une union politique plus intime entre les douze villes ioniennes, et l’établissement d’un gouvernement commun pour administrer leurs affaires collectives, indiquait Teôs[8] et non Priênê, comme le lieu convenable dans ce but. En outre, il semble que la fête Pan-Ionienne[9], bien que continuée encore dans les formes, avait perdu son importance avant l’époque de Thucydide, et avait fini en pratique par être supplantée par la fête des Ephesia, près d’Ephesos, où les cités de l’Iônia trouvaient un lieu plus attrayant pour leur réunion. Une île attenante à la côte, ou une langue de terre .avancée rattachée au continent par un isthme étroit et présentant quelque colline suffisante pour y élever une acropolis, semble avoir été considérée chacune comme la situation la plus favorable pour un établissement colonial grec. La plupart des cités ioniennes se conforment à l’un ou à l’autre de ces genres de lieux[10]. La cité de Milêtos, a l’apogée de sa puissance, avait quatre ports séparés, formés probablement avec l’aide de l’île de Ladê et d’un ou de deux îlots qui se trouvaient tout prés et vis-à-vis d’elle. L’établissement karien ou krêtois que les colons ioniens trouvèrent à leur arrivée et conquirent, était situé sur une éminence commandant la mer, et devint plus tard connu par le nom de la vieille Milêtos, à une époque où la nouvelle ville ionienne avait été étendue jusqu’au bord de l’eau et rendue maritime[11]. Le territoire de cette cité importante semble avoir compris à la fois le promontoire méridional appelé Poseidion et la plus grande partie du promontoire septentrional de Mykalê[12], s’étendant des deux côtés du fleuve Mæandros. La ville peu considérable de Myous[13] sur la rive méridionale du Mæandros, rejeton vraisemblablement formé par la séparation de quelques mécontents Milésiens sous un membre de la gens Nêlide nommé Kydrêlos, conserva longtemps son autonomie, mais fut à la fin absorbée dans l’unité plus considérable de Milêtos, son territoire marécageux ayant été rendu inhabitable par une plaie de moucherons. Priênê acquit plus d’importance qu’il ne lui en appartenait naturellement, par son voisinage immédiat avec le saint temple Pan-Ionien et par sa fonction d’administratrice des rites sacrés[14], dignité dont elle n’était probablement autorisée à jouir que par suite des jalousies de ses voisines plus considérables, Milêtos, Ephesos et Samos[15]. Les territoires de ces cités grecques semblent avoir été parsemés de villages kariens, probablement à l’état de sujets. Il est rare de trouver une pure colonie grecque établie à quelque
distance de la rager ; mais les deux villes asiatiques appelées Magnêsia sont
des exceptions à ce principe : — l’une située sur le côté méridional du
Mæandros, ou plutôt sur la rivière Lethæos, qui se jette dans le Mæandros ; l’autre
plus au nord, attenant aux Grecs Æoliens, sur le versant septentrional du
mont Sipylos, et près de la plaine de la rivière Hermos. La fondation de ces
deux villes est antérieure à la période historique. Le récit[16] que nous lisons affirme
qu’elles étaient des établissements des Magnêtes de Thessalia, formés par des
émigrants qui avaient passé d’abord en Krête, sur les ordres de l’oracle de
Delphes, et ensuite en Asie, où, dit-on, ils tirèrent les colons ioniens et
æoliens, récemment arrivés alors, d’une position pénible et dangereuse. A
côté de cette histoire, que l’on ne peut ni vérifier ni contredire, il est à propos
de mentionner l’opinion de Niebuhr, qui pense que ces deux villes de Magnêsia
étaient des restes d’une population primitive de Pélasges, parents des
Magnêtes de Thessalia, mais non émigrants de ce pays ; -- Pélasges qui, d’après
sa supposition, occupèrent et la vallée de l’Hermos et celle du Kaïstros,
avant les migrations æoliennes et ioniennes. Pour appuyer cette opinion, on
peut dire qu’il y avait des villes portant le nom pélasgique de Larissa, et
près de l’Hermos et près du Mæandros ; Menekratês d’Ælæa croyait que les
Pélasges avaient occupé jadis la plus grande partie de la côte ; et O. Müller
pense même que les Tyrrhéniens furent des Pélasges de Tyrrha, ville de l’intérieur
de Des villes ioniennes, avec lesquelles commence la connaissance
réelle que nous ayons de l’Asie Mineure, Milêtos[18] était la plus
puissante. Elle tirait sa célébrité non seulement de ses richesses
particulières et de sa propre population, mais encore du nombre
extraordinaire de ses colonies, établies principalement dans La colonisation d’Ephesos par Androklos semble se rattacher à l’occupation ionienne de Samos, autant que nous pouvons le reconnaître par les renseignements confus que nous trouvons. Androklos erra, dit-on, longtemps dans cette île, jusqu’à ce, que l’oracle daignât lui indiquer quel lieu particulier il devait occuper sur le continent. A la fin, l’indication étant donnée, il établit ses côlons à la fontaine d’Hypelæon et sur une portion de la colline de Korêssos, à une petite distance du temple et du sanctuaire d’Artemis, dont il respecta et reçut comme frères les habitants mêmes, tandis qu’il chassait pour la plus grande partie les, Lélèges et les Lydiens résidant à l’entour. La population de la nouvelle ville d’Ephesos fut divisée en trois tribus : — les habitants préexistants, ou Ephésiens propres, les Benniens et les Euônymeis, ainsi nommés (nous dit-on) du dème Euonymos en Attique[20]. La puissance d’Androklos fit de tels progrès, qu’il fut en état de conquérir Samos, et d’en chasser le prince Leôgoros. Des Samiens qui se retirèrent, une partie alla, dit-on, à Samothrace et s’y établit ; tandis qu’une autre partie devint maîtresse de Marathêsion près d’Ephesos, sur le continent voisin de l’Asie Mineure, d’où, après peu de temps, elle recouvra son île en forçant Androklos à retourner à Ephesos. Il parait cependant que, dans le compromis et le traité qui s’ensuivirent, ils cédèrent la possession de Marathêsion à Androklos[21], et se bornèrent à Anæa, district plus méridional, plus éloigné de l’établissement éphésien, et situé immédiatement vis-à-vis file de Samos. Androklos périt, dit-on, dans une bataille livrée pour la défense de Priènê, ville qu’il était venu secourir contre une attaque des Kariens. Son cadavre fut emporté du champ de bataille et enseveli près des portes d’Ephesos, où l’on montrait encore sa tombe it l’époque de Pausanias. Mais une sédition éclata contre ses fils après sa mort, et les mécontents fortifièrent leur parti en appelant des renforts de Tells et de Karina. La lutte qui s’ensuivit se termina par la déchéance de la race royale et par l’établissement d’un gouvernement républicain, — les descendants d’Androklos étant autorisés à conserver à la fois des privilèges honorifiques considérables et la prêtrise héréditaire de Dêmêtêr Eleusinienne. Les habitants nouvellement reçus furent enrôlés dans deux nouvelles tribus, faisant en tout cinq tribus, qui paraissent avoir existé pendant toute la durée des temps historiques à Ephesos[22]. Il parait aussi qu’un certain nombre de propriétaires fugitifs de Samos furent admis chez les Ephésiens et reçurent le droit de cité ; et la partie de la ville dans laquelle ils résidèrent acquit le nom de Samorna ou Smyrna, nom sous lequel elle était encore connue du temps du poète satirique Hippônax, vers 530 avant J.-C.[23] Tels sont les récits que nous trouvons relativement à l’enfance de l’ancienne Ephesos. Le fait de son accroissement et de ses considérables acquisitions de territoire, aux, dépens des Lydiens voisins[24], est du moins incontestable. Elle ne parait jamais avoir été ni très puissante ni très entreprenante sur mer. Un petit nombre de colonies maritimes devaient leur origine à ses concitoyens. Niais sa situation près de l’embouchure et de la plaine fertile du Kaïstros était favorable tant à la multiplication de ses dépendances dans les terres qu’à son commerce avec l’intérieur. Un despote nommé Pythagoras renversa, dit-on, par stratagème le gouvernement antérieur de la ville, à une époque quelconque avant Cyrus, et exerça le pouvoir pendant un certain temps avec une grande cruauté[25]. Il est digne de remarque que nous ne trouvons aucune trace de l’existence des quatre tribus ioniennes à Ephesos ; et cette circonstance rapprochée. du fait que ni Ephesos ni Kolophôn ne célébraient la fête ionienne particulière des Apaturia, est une indication entre autres que la population éphésienne n’avait qu’une faible communauté de race avec Athènes, bien que l’œkiste puisse avoir été de famille héroïque athénienne. Guhl s’efforce de démontrer, sur des raisons erronées, que les colons grecs à Ephesos étaient pour la plupart d’origine arkadienne[26]. Kolophôn, à environ quinze milles (24 kilom.) au nord d’Ephesos, et séparée du territoire de cette dernière ville par la chaîne escarpée de montagnes appelée Gallêsion, bien que membre de l’Amphiktyonie Pan-Ionienne, semble n’avoir pas été d’origine ionienne. Elle ne reconnaissait ni un œkiste athénien ni habitants athéniens. Le poète kolophonien Mimnerme nous dit que l’œkiste de la trille fut le Pylien Andræmôn, et que les colons furent des Pyliens venus du Péloponnèse, Nous quittâmes (dit-il) Pylos, la cité de Neileus, et nous passâmes sur nos vaisseaux dans cette Asie si désirée. Là, avec l’insolence d’une force supérieure, et en employant dès le commencement une cruelle violence, nous nous établîmes dans la charmante Kolophôn[27]. Cette description des premiers colons kolophoniens, présentée avec une simplicité homérique, jette une vive lumière sur le récit fait par Hérodote de la conduite de Neileus à Milêtos. L’établissement d’Andræmôn doit avoir été effectué l’aide de la force et par la dépossession des anciens habitants, laissant probablement leurs femmes et leurs filles en proie aux vainqueurs. La cité de Kolophôn paraît avoir été située à environ deux milles (3 kilom.) à l’intérieur ; elle avait un port fortifié appelé Notion, non pas réuni à elle par de longs murs comme le Peiræeus l’était à Athènes, mais complètement séparé. Il y avait des moments où ce port servait aux Kolopholliens de refuge, lorsque la haute ville était attaquée par les Perses venus de l’intérieur. Mais les habitants de Notion manifestèrent parfois des intentions d’agir comme communauté séparée, et des dissensions s’élevèrent ainsi entre eux et le peuple de Kolophôn[28] ; — tant il était difficile pour l’esprit grec d’entretenir un sentiment permanent d’amalgamation politique en dehors du cercle des murs d’une ville. Il est fort à regretter qu’il ne nous soit parvenu qu’un petit nombre de vers de Mimnerme, et absolument rien du long poème de Xénophane (composé vraisemblablement près d’un siècle après Mimnerme), sur la fondation de Kolophôn. Dans les brefs renseignements de Pausanias, il n’est fait nulle mention de cette violence que le poète natif de Kolophôn signale d’une manière si énergique dans ses ancêtres. Ils sont tirés plutôt des légendes du temple contigu d’Apollon Klarien, et de morceaux de poésie épique se rapportant à ce saint lieu, qui se rattachait au culte d’Apollon en Krête, à Delphes et à Thèbes. Le vieux poème homérique appelé Thêbaïs rapportait que Mantô, fille du prophète thébain Teiresias, avait été offerte, à Apollon et à Delphes comme offrande votive par les Epigoni victorieux : le dieu lui ordonna de se rendre en Asie, et elle arriva ainsi à Klaros, où elle épousa le Krêtois Rhakios. Le fruit de ce mariage fut le célèbre prophète Mopsos, qui, selon l’épopée hésiodique, l’avait emporté en habileté prophétique sur Kalchas, venu à Klaros après la guerre de Troie, en compagnie d’Amphilochos, fils d’Amphiaraos[29]. Ces contes prouvent l’ancienne importance du temple et de l’oracle d’Apollon à Klaros, qui semble avoir été en quelque sorte une émanation du grand sanctuaire des Branchidæ, près de Milêtos ; car on nous dit que le grand prêtre de Klaros était nommé par les Milésiens[30]. Pausanias avance que Mopsos chassa les Kariens indigènes et fonda la cité de Kolophôn ; et que les colons ioniens sous Promêthos et Damasichthôn, fils de Kodros, furent admis amicalement comme habitants additionnels[31] : récit émanant probablement du temple et très différent de celui des bourgeois kolophoniens du temps de Mimnerme. Il parait évident que non seulement le sanctuaire d’Apollon à Klaros, mais encore les établissements analogues au sud de l’Asie Mineure, à Phasêlis, à Mallos, etc., avaient leurs propres légendes touchant leur fondation (séparément de celles des diverses bandes de colons émigrants), dans lesquelles ils se rattachaient par, le lien le meilleur qu’ils pouvaient imaginer aux gloires épiques de la Grèce[32]. En longeant la côte ionienne dans une direction nord-ouest
de Kolophôn, -nous arrivons d’abord. à la petite : mais indépendante colonie
ionienne de Lebedos, — ensuite à Teôs, qui occupe le côté méridional d’un
isthme étroit, Klazomenæ étant placée sur le côté septentrional. Cet isthme,
vallée basse et étroite d’environ sis milles ( Le culte d’Athênê Polias à Erythræ peut probablement être rapporté à Athènes, et celui du Tyrien Hêraklês (dont Pausanias raconte une singulière légende) semblerait indiquer un mélange d’habitants phéniciens. Mais la grande proximité a laquelle Erythræ était de l’île de Chios ; et l’analogie marquée de dialecte qu’Hérodote atteste[35] entre les deux endroits, montrent que les éléments de la population doivent avoir été à peu près les mêmes dans les deux. Ion, le poète de Chios, mentionnait l’établissement d’Abantes venus d’Eubœa dans son île natale, sous Amphiklos, mêlés aux Kariens préexistants. Hektor, le quatrième descendant à partir d’Amphiklos, incorpora, dit-on, cette île dans I’Amphiktyonie Pan-Ionienne. C’est à Phérécyde que nous devons la mention du nom d’Egertios, comme ayant amené dans Chios une colonie mélangée ; et c’est par Egertios (bien qu’Ion, le poète indigène, ne paraisse pas l’avoir signalé) que ce logographe prouvait la connexion qui existait entre les habitants de Chios et l’autre groupe des colonies kodrides[36]. A Erythræ, on cite Knôpos ou Kleopos comme l’œkiste kodride, et comme s’étant procuré, en partie par la force, en partie de plein gré, la souveraineté de la colonie préexistante d’Habitants mêlés. Hippias, l’historien érythræen, racontait comment Knôpos avait été perfidement tué à bord d’un vaisseau par Ortygès et quelques autres faux partisans, qui, obtenant quelques auxiliaires du roi de Chios, Amphiklos, se rendirent maîtres d’Erythræ et y établirent une, oligarchie oppressive. Ils conservèrent le gouvernement quelque temps avec un mélange à la fois de licence et de cruauté, n’admettant qu’un petit nombre d’hommes choisis de la population dans les murs de la ville, jusqu’à ce qu’enfin Hippotês, frère de Knôpos, arrivant du dehors à la tête de quelques troupes, trouvât un appui suffisant de la part des mécontents parmi les Erythræens pour le mettre en état de renverser la tyrannie. Accablés au milieu d’une fête publique, Ortygès et ses compagnons furent mis à mort avec de cruelles tortures. Les mêmes tortures furent infligées à leurs épouses et à leurs enfants innocents[37], — degré de cruauté qui dans aucun temps n’aurait paru dans une communauté de Grecs européens ; même clans les dissensions meurtrières de parti qui déchirèrent Korkyra pendant la guerre du Péloponnèse, la mort ne fut pas aggravée par des tortures préliminaires. Aristote[38] mentionne l’oligarchie des Basilides comme ayant existé à Erythræ, et comme ayant été renversée par une révolution démocratique, bien qu’elle fût administrée avec prudence. A quelle période doit-on rapporter ce fait, c’est ce que nous ignorons. Klazomenæ fut, dit-on, fondée par un parti errant, soit d’Ioniens, soit d’habitants de Kleonæ et de Phlious (Phlionte), sous Parphoros ou Paralos ; et Phokæa par une bande de Phokiens sous Philogenês et Damon. Cette dernière ville fut construite à l’extrémité d’une péninsule qui formait une partie du territoire de l’æolienne Kymê ; les Kymæens furent amenés à la céder à l’amiable et à permettre la construction de la nouvelle ville. Les Phokiens demandèrent et obtinrent la permission de s’enrôler dans l’Amphiktyonie Pan-Ionienne ; mais la permission ne fut, dit-on, accordée qu’à la condition qu’ils adopteraient des membres de la famille kodride comme œkistes ; et en conséquence ils appelèrent d’Erythræ et de Teôs trois chefs appartenant à cette famille ou gens, — Deœtês, Periklos et Abartos[39]. Smyrna, dans l’origine colonie æolienne, établie par Kymê, tomba par la suite dans les mains ales Ioniens de Kolophôn. Un parti d’exilés de cette dernière ville, chassés pendant une dispute intestine, furent admis par lés Smyrnæens dans leur cité, — faveur qu’ils reconnurent en fermant les portes et en s’emparant de la place pour eux-mêmes, à un moment où les Smyrnæens étaient sortis en corps pour célébrer une fête religieuse. Les autres villes æoliennes envoyèrent des auxiliaires dans le but de rétablir leurs frères dépossédés ; mais ils furent forcés de se soumettre à un accommodement en vertu, duquel les Ioniens conservaient la possession de la ville, en rendant aux premiers habitants tous leurs biens mobiliers. Ces derniers exilés furent répartis comme citoyens dans les autres cités æoliennes[40]. Smyrna, après cela, devint complètement ionienne ; et les habitants, à une époque plus récente, si nous en pouvons juger par Aristide le Rhéteur, paraissent avoir oublié l’origine æolienne de leur ville, bien que le fait soit attesté et par Hérodote et par Mimnerme[41]. A quelle époque s’opéra le changement, nous l’ignorons ; mais Smyrna semble être devenue ionienne avant la célébration de la vingt-troisième Olympiade (688 ans av. J.-C.), où Onomastos le Smyrnæen gagna le prix[42]. Nous n’avons pas non plus de renseignements quant à l’époque à laquelle la cité fut reçue comme membre dans l’Amphiktyonie Pan-Ionienne ; car l’assertion de Vitruve est inadmissible, quand il dit qu’elle fut reçue à la demande d’Atta, le roi de Pergamos, à la place d’une ville qui" en faisait partie auparavant, appelée Melitê, exclue par les autres pour mauvaise conduite[43]. Nous ne pouvons pas croire davantage le renseignement de Strabon, qui annonce que la cité de Smyrna fut détruite par les rois lydiens, et que les habitants furent obligés de vivre dans des villages dispersés jusqu’à son rétablissement par Antigone. Un fragment de Pindare, qui parle de l’élégante cité des Smyrnæens, indique qu’elle a dû exister de son temps[44]. La ville d’Erie, près de Lebedos, quoique vraisemblablement autonome[45], n’était pas parmi les cités qui contribuaient au Pan-Ionion ; Myonnêsos semble avoir été une dépendante de Teôs, comme Pygela et Marathêsion l’étaient d’Ephesos. La ville de Notion, après avoir été colonisée de nouveau par les Athéniens pendant la guerre du Péloponnèse, semble être restée séparée et indépendante de Kolophôn ; du moins Skylax les mentionne comme deux villes, distinctes[46]. |
[1] Euripide, Ion, 15-16. Κτίστορ̕ Άσιάδος χθονός.
[2] Pausanias, VII, 4, 6.
Relativement à Samos et à ses habitants kariens primitifs, déplacés par Patroklês et Tembriôn à la tête d’émigrants grecs, v. Etymol. Mag., v. Άστυπάλαια.
[3] Hérodote, 1, 146.
Le ton polémique que prend Hérodote pour faire cette remarque est expliqué par Dalhmann, par la supposition qu’elle était destinée il réfuter certaines prétentions pleines de jactance du Milésien Hécatée (V. Baehr, ad loc., et Klausen, ad Hekatici Fragm. 225).
La preuve de l’Ionisme, suivant l’assertion d’Hérodote, est qu’une cité tire son origine d’Athènes et qu’elle célèbre la solennité des Apaturia (I, 147). Mais nous ne devons pas prendre ces deux preuves à la rigueur. Ephesos et Kolophôn étaient ioniennes, bien que ni l’une ni l’autre ne célébrassent les Apaturia. Et la colonie pouvait être formée sous les auspices d’Athènes, quoique les colons ne fussent ni natifs de l’Attique, ni même alliés par la race aux indigènes de ce pays.
[4] Hérodote, I, 142. Ephesos, Kolophôn, Lebedos, Teôs, Klazomenæ, Phokæa.
[5] Hérodote, I, 116.
[6] Thucydide, VI, 17, au sujet des Grecs Siciliens.
[7] V. Raoul Rochette, Histoire des Colonies grecques, IV, c. 10, p. 93.
[8] Hérodote, I, 170.
[9] Diodore (XV, 49) et Denys d’Halicarnasse (A. R., IV, 25) parlent tous les deux comme si la convocation ou la fête avait été formellement transférée à Ephesos, par suite du manque de sécurité des réunions prés de Mykale ; Strabon, au contraire, parle de la fête des Pan-Ionia comme si elle était encore de son temps célébrée dans l’endroit primitif (XIV, p. 636-638) par les soins des Priênéens. Il n’est pas probable qu’elle ait été formellement transférée : Thucydide (III, 104) prouve que de son temps la fête des Ephesia était en pratique le rendez-vous pan-ionien, bien qu’Hérodote ne semble pas l’avoir conçue comme telle, V. Guhl, Ephesiaca, part. III, p. 117 ; et M F. Hermann, Gottesdienstliche Alterthümer der Griechen, c. 66, p. 343.
[10] La situation de Milêtos est indiquée le mieux par Arrien, I, 19-20 ; V. celle de Phôkæa, d’Erythræ, de Myônnêsos, de Klazomenæ, de Kolophôn, de Teôs (Strabon, XIV, p. 614-645 ; Pausanias, VII, 31 2 ; Tite-Live, XXXVII, 27-31 ; Thucydide, VIII, 31).
[11] Strabon, XIV, p. 635.
[12] Strabon, XIV, p. 633. Hérodote, IX, 97-99. Strabon, XIV, p. 651.
[13] Strabon, XIV, p. 636 ; Vitruve, IV, 1 ; Polyen, VIII, 35.
[14] Strabon, XIV, p. 636-638.
[15] Thucydide, I, 116.
[16] Conon, Narrat., 29 ; Strabon, XIV, p. 636-647.
Le récit de Parthênius au sujet de Leukippos, chef τών δεκατευθέντων έκ Φέρης ύπ̕ Άδμήτου, qui vint dans le territoire éphésien et devint maître de la place appelée Kretinæon, par la perfidie de Leukophryê, fille de Mandrolytos, que ce soit la vérité ou une fiction, est une des indications d’une immigration thessalienne dans ces parages (Parthen., Narr., 6).
[17] Strabon, XIII, p. 621. V. Niebuhr, Kleine Historische Schriften, p. 371 ; O. Müller, Etrusker, Einleitung, II, 5, p. 80. La preuve sur laquelle est fondée la conjecture de Müller semble cependant extraordinairement faible, et l’identité de Tyrrhênos et de Torrhêbos, ou la confusion supposée de l’une avec l’autre, n’est nullement établie. On parle de Pélasges dans Trallês et Aphrodisias aussi bien que dans Ninoê (Steph. Byz., v. Νινόη), mais ce nom me semble destiné à n’offrir que des problèmes et des déceptions.
Relativement à Magnêsia sur le Mæandros, consulter
Aristote ap. Athenæ, IV, p. 173, qui appelle la ville une colonie de Delphes.
Mais l’établissement intermédiaire de ces colons en Krête, ou même la réalité
d’une ville quelconque appelée Magnêsia, en Krête, semble très contestable :
l’assertion de Platon (Log. IV, 702 ; XI, 919) ne peut guère être prise comme
une preuve. Cf. O. Müller, History of the
Dorians, b. II, c. 3 ; Hoeckh, Krêta,
b. III, vol. 1I, p. 413. Müller présente trop ces Sagen comme des faits réels : le culte d’Apollon à Magnêsia sur le
Mæandros (Pausanias, X, 32, 4) ne peut être considéré comme une grande preuve,
en considérant combien il s’étendait le long de la côte asiatique, depuis
La grande antiquité de cet établissement grec était reconnue du temps des empereurs romains ; V. Inscription n° 2910 dans Bœckh, Corpus Inscr.
[18] Ίωνίης πρόσχημα (Hérodote, V, 28).
[19] Strabon, XIV, p. 635. Ikaros ou Ikaria, cependant, parait, dans des temps plus récents, comme appartenant à Samos et servant seulement au pâturage (Strabon, p. 639 ; X, p. 488).
[20] Kreophylos ap. Athenæ, VIII, p. 361 ; Éphore, Fragm. 32, éd. Marx ; Stephan. Byz., v. Βέννα : v. Guhl, Ephesiaen, p. 29.
[21] Pausanias, VII, 4, 3.
[22] L’exposé d’Éphore ap. Steph. Byz., v. Βέννα, atteste au moins la présence des cinq tribus à Ephesos, que ses données relatives à leur origine et à leur histoire primitive soient bien fondées ou non. V. aussi Strabon, XIV, p. 633 ; Steph. Byz., v. Εύωνυμία. Karêne ou Karinê est en Æolis, près de Pitana et de Gryneion (Hérodote, VII, 42 ; Steph. Byz. Καρήνη).
[23] Steph. Byz., v. Σάμορνα ; Hesychius, Σαμονίν ; Athénée, VI, p. 277 ; Hippônax, Fragm. 32, Schneidewin ; Strabon, XIV, p. 633. Quelques-uns cependant disaient que le vicus d’Ephesos, appelé Smyrna, tirait son nom d’une Amazone.
[24] Strabon, XIV, p. 620.
[25] Bato ap. Suidas, v. Πυθαγόρας. Dans cet article de Suidas, cependant, il est dit que l’Éphésien Pythagoras renversa, au moyen d’un artificieux complot, le gouvernement de ceux qu’on nommait les Basilidæ. Or, Aristote parle (Politique, V, 5, 4) de l’oligarchie des Basilidæ à Erythræ. Il n’est guère vraisemblable qu’il y ait eu une oligarchie appelée du même nom et à Erythræ et à Ephesos : il y a ici quelque confusion entre Erythræ et Ephesos qu’il ne nous est pas possible d’éclaircir. Bato de Sinopê écrivit un livre περί τών έν Έφέσω τυράννων (Athénée, VII, p. 289).
[26] Guhl, Ephesiaca, cap. II, s. 2, p. 28. Le passage d’Aristide (Or. 42, p. 523) qu’il cite se rapporte non à Ephesos, mais à Pergamos, et au mythe d’Augê et de Têlephos ; cf. ibid., p.251.
[27] Mimnerme, Fragm. 9, Schneidewin ; ap. Strabon XIV, p. 634. Mimnerme, dans son poème appelé Nanno, nommait Andræmôn comme fondateur (Strabon, p. 633). Cf. Cette conduite avec le récit d’Odysseus dans Homère (Odyssée, IX, 40).
Mimnerme est, par rapport au temps, un peu antérieur à Solôn, 620-600 avant J.-C.
[28] Aristote, Politique, V, 2,12 ; Thucydide, III, 34.
[29] Hésiode, ap. Strabon, XIV, p. 643 ; Conon, Narrat., 6 ; Argument du poème appelé Νόστοι (ap. Düntzer), Epic. Græc. Frag. p. 23 ; Pausanias, IX, 33, 1.
[30] Tacite, Annales, II, 54.
[31] Pausanias, VII, 3, 1.
[32] V. Welcker, Epischer Kyklus, p. 235.
[33] Steph. Byz., v. Τέως ; Pausanias, VII, 3, 3 ; Strabon, XIV, p, 633 : Anacréon appelait la ville Άθαμβντίδα Τέως (Strabon, l. c.).
[34] Pausanias, VII, 3, 3. V. l’Inscription n° 3064 dans le Corp. Inscr. de Bœckh, qui énumère vingt-huit πύργοι séparés. C’est une liste d’archontes, avec le nom et la désignation civile de chacun : je ne remarque pas que le nom du même πύργος se rencontre jamais deux fois : il y a deux πύργοι, dont les noms sont effacés sur l’inscription. Dans deux autres inscriptions (n° 3065, 3066) se trouve Έχίνου συμμορία — Έχίναδαι — comme le titre d’une division civile sans spécification d’un Έχίνου πύργος ; mais on peut supposer avec raison que le πύργος et la συμμορία sont des divisions coïncidentes. Le Φιλαίου πύργος se présente aussi dans une autre inscription, n° 3081. Philæos est le héros athénien, fils d’Ajax, et l’éponyme du dême ou gens Philaidæ en Attique, qui existait aussi à Teôs, comme nous le voyons ici. Dans l’Inscription n° 3082, un citoyen est complimenté comme νέον Άθάμαντα, après le nom de l’ancien héros minyen. Dans le n° 3078, la tribu ionienne des Γελέοντες est nommée comme existant à Teôs.
Parmi les titres des tours, nous trouvons les suivants — τοΰ Κίδυος πύργου, τοΰ Κιναβάλου πύργου, τοΰ Ίέρυος πύργου, τοΰ Δάδδου πύργου, τοΰ Σίντυος πύργου : ces noms semblent être plutôt étrangers qu’helléniques. Κίδυς, Ίέρυς, Σίντυς, Δάδδος, sont asiatiques, peut-être kariens ou lydiens ; touchant le nom Δάδδος, cf. Stephan. Byz., v. Τρέμισσος ou Δάδας parait comme nom karien ; Loeckh (p. 651) exprime l’opinion que Δάδδος est karien ou lydien. Ensuite Κινάβαλος semble évidemment non hellénique, il est plutôt phénicien (Annibal, Asdrubal, etc.), bien que Bœckh (dans son Introductory Comment to the Sarmatian Inscriptions, Part XI, p. 109) nous dise que βαλος est aussi thrace ou gète — βαλος haud dubie Thracica aut Getica est radis finalis, quam tenes in Dacico nomine Decebalus, et in nomine populi Triballorum. Le nom τοΰ Χόθου πύργου, Χοθίδης, est ionien : Æklos et Kothos sont représentés comme œkistes ioniens en Eubœa. Un autre nom — Πάάρμις, τοΰ Σθενέλου πύργου, Χαλκδεϊος — fournit un exemple dans lequel l’épithète locale ou de la gens n’est pas tirée de la tour ; car Χαλκιδεϊς ou Χαλκιδεύς était la dénomination d’un village situé dans le territoire de Teôs. Quant à ce qui concerne quelques personnes, l’épithète de la gens est tirée de la tour et non, dans d’autres cas. Dans les Inscriptions n° 3065, 3066, il y a un vote formel de la Έχίνου συμμορία ou Έχίναδαι (les deux noms se rencontrent). Il est aussi fait mention du βώμος τής συμμορίας, et de la solennité annuelle appelée Leukhatea, vraisemblablement une solennité de la gens des Echinadæ, qui se rattache à la famille mythique d’Athamas. Comme analogie avec ces tours de Teôs, nous pouvons comparer les πύργοι de la colonie grecque d’Olbia dans le Pont-Euxin (Bœckh, Inscr., 2058), — elles faisaient partie des fortifications. V. aussi Dion Chrysostome, Orat. XXXVI, p. 76-77. Une vaste tour, appartenant à un simple particulier nommé Aglomachos, est mentionnée à Kyrênê (Hérodote, IV, 164).
[35] Hérodote, I, 142 ; cf. Thucydide, VIII, 5.
[36] Strabon, XIV, p. 633.
[37] Hippias ap. Athenæ, VI, p. 259 ; Polyen, VIII, 44, donne un autre récit touchant Knôpos. Erythræ, appelée Κνωπούπολις (Steph. Byz., v).
L’histoire racontée par Polyen au sujet du mot de l’oracle et du stratagème qui le suivit, et par lequel Knôpos se rendit maître d’Erythræ, représente cette ville comme puissante avant l’occupation ionienne (Polyen, VIII, 43).
[38] Aristote, Politique, V, 5, 4.
[39] Pausanias, VII, 3, 3. Dans Pausanias le nom est Abartos ; mais il devait probablement être Abarnos, l’éponyme du cap Abarnis dans le territoire Phôkæen. V. Stephan. Byz., v. Άβαρνίς. Raoul Rochette met Abarnus sans faire aucune remarque (Histoire des colonies grecques, liv. IV, c. 13, p. 95).
[40] Hérodote, I, 150 ; Mimnerme, Fragm.
[41] V. Raoul Rochette, Histoire des Colonies grecques, liv. IV, c. 5, p. 43 ; Aristide, Orat. 20-21, p. 260, 267.
[42] Pausanias, V, 8, 3.
[43] Vitruve, IV, 1.
[44] Strabon, XIV, p. 646 ; Pindare, Fragm. 155, Dissen.
[45] Thucydide, VIII, 19.
[46] Skylax, c. 97 ; Thucydide, III, 34.