ÉTUDE SUR LA PROPRIÉTÉ À SPARTE

 

CHAPITRE IV. — LA VIE PRIVÉE À SPARTE.

 

 

La famille était constituée à Lacédémone[1] suivant les mêmes principes fondamentaux que dans le reste de la Grèce. Les documents n'indiquent pas que les rapports entre l'époux et l'épouse entre le père et les enfants, y aient été sensiblement différents de ce qu'ils étaient ailleurs. Hérodote, qui parle si souvent et si volontiers de Sparte et qui était un si curieux observateur des usages intimes, ne signale jamais que l'état de famille des Spartiates s'éloignât de celui des autres Grecs. Ni Thucydide, ni Xénophon, ni Aristote ne font aucune remarque de cette nature. Xénophon dit même que Sparte ne diffère des autres cités par rien si ce n'est par sa parfaite obéissance aux lois[2].

A Sparte, comme partout, le mariage était un acte sacré, qui s'accomplissait suivant des rites. Plutarque rapporte, à la vérité, que l'époux devait enlever l'épouse, έγάμουν δε άρπαγής[3] ; mais il faut faire attention que dans la phrase suivante l'historien signale la νυμφευτρία, c'est-à-dire la femme qui conduisait la fiancée à son époux et qui dirigeait, à Sparte comme dans toute la Grèce, la cérémonie nuptiale ; la suite de la description de Plutarque montre bien qu'il s'agit de tout autre chose que d'un rapt. L'έγγύησις et la πομπή étaient en usage à Sparte comme dans les autres villes grecques[4]. L'enlèvement ou le simulacre d'enlèvement n'était pas autre chose qu'un de ces rites antiques dont Plutarque et ses contemporains ne comprenaient plus le sens. Denys d'Halicarnasse, qui était un peu archéologue, nous apprend, en effet, que l'enlèvement de l'épouse était l'un des vieux rites et l'une des formalités les plus remarquables du mariage grec[5]. Ce même rite se retrouve dans une grande partie de la race indo-européenne, et en particulier chez les Romains.

Il y a encore dans Plutarque un passage où il semble croire que le lien du mariage était peu respecté à Lacédémone, que l'adultère y était permis, que les femmes y étaient à tous, ainsi que les enfants[6]. Mais cela est démenti par un grand nombre de récits que l'on peut lire dans Hérodote, dans Xénophon et dans Plutarque lui-même. C'est ce dernier qui nous montre, dans un autre passage, la femme gardant la maison du mari, et qui nous parle des antiques devoirs du mariage à Sparte[7]. Qu'on lise chez le même écrivain les apophtegmes des femmes lacédémoniennes, et, sans être obligé de croire que toutes ces paroles soient authentiques, on reconnaîtra qu'elles n'auraient pas été inventées dans un pays où l'on n'aurait pas connu les devoirs du mariage. Dans maintes anecdotes nous voyons un mari ou un père agir et parler vis-à-vis de sa femme et de ses enfants comme eût fait un athénien. Et d'autre part on ne rencontre ni un récit ni une parole qui soit l'indice d'un état de promiscuité.

Les usages des anciens doivent être examinés sans faire acception de nos idées modernes. On sait qu'à Sparte le divorce était permis et pouvait même être ordonné au mari en cas de stérilité de la femme[8] ; c'était une règle générale dans l'antiquité ; elle tenait aux principes les plus sacrés de la famille et à l'obligation religieuse de la perpétuer. On voit aussi que, dans le cas d'impuissance du mari, la femme pouvait s'unir au plus proche parent de cet homme, surtout avec son frère[9] ; c'était une règle qui, dans un âge antique, avait été générale dans la race indoeuropéenne[10] ; elle existait encore dans Athènes au temps de Solon[11]. Il est d'ailleurs vraisemblable qu'elle n'était appliquée, à Sparte comme à Athènes, que dans le cas où une famille était menacée de s'éteindre. Quoi qu'il en soit, ces antiques prescriptions n'altéraient en rien le principe de la monogamie qui était la règle absolue à Sparte. Outre que cette vérité ressort d'un grand nombre d'anecdotes, elle est attestée en termes exprès par Hérodote, au sujet d'une exception qu'il signale. Il raconte que les éphores, ayant voulu contraindre un roi à renvoyer sa femme parce qu'elle était stérile, mais n'ayant pu l'obtenir de lui, imaginèrent l'expédient de l'obliger à épouser une autre femme tout en gardant la première ; le roi y consentit, et il eut alors, dit l'historien, deux femmes et deux foyers, ce qui était contraire à ce qui se passe à Sparte[12]. Quant à l'adultère, il y était réputé l'un des plus grands crimes, et il paraît, s'il faut en croire Plutarque, que les Spartiates aimaient à dire qu'il était inconnu chez eux[13]. Plusieurs faits de l'histoire montrent qu'il n'était pas plus inconnu à Sparte qu'ailleurs ; mais ils montrent en même temps qu'il y était réprouvé et puni. Les fils nés hors du mariage ou nés de l'adultère étaient exclus, non seulement de la succession paternelle, mais encore de tous les droits du citoyen[14].

La puissance paternelle était, à la vérité, très-restreinte par la puissance de l'Étal ; il n'en est pas moins vrai que le fils appartenait au père. Les enfants recevaient une éducation commune ; encore rentraient-ils chaque soir dans la maison paternelle, dans cette maison dont ils devaient un jour hériter[15]. Un trait curieux des mœurs antiques, qui nous a été conservé par Justin, montre que les Spartiates avaient, comme tous les Grecs, des tombeaux de famille[16], signe certain qu'à Sparte comme partout la famille était un groupe régulier et permanent d'âge en âge.

Il s'en fallait de tout que Sparte ignorât la vie privée. Chaque famille avait sa maison. Cette maison avait un foyer, comme chez tous les Grecs, c'est-à-dire un culte intérieur. Nous lisons dans Hérodote que Démarate rentrant chez lui, s'approche de son autel et invoque son dieu domestique, son ζεύς έρκεΐος[17]. Plutarque mentionne des sacrifices privés[18], comme il y en avait dans toute famille grecque ; ces sacrifices intimes supposent des fêtes domestiques, des anniversaires, toute la vie de famille des anciens. Aristote et Platon assurent que les femmes jouissaient à Sparte d'une plus grande liberté dans leurs maisons qu'elles n'en avaient dans les autres villes grecques[19]. Il y a surtout un passage curieux de Denys d'Halicarnasse où il compare les trois grandes cités, Rome, Athènes et Sparte, au point de vue de la vie privée ; or celle où la vie privée lui paraît avoir eu le plus d'indépendance est précisément Sparte : Toute infraction au bon ordre, dit-il, si elle est commise en un lieu public, est passible d'une peine ; mais l'État n'a nul souci de ce qui se fait dans les maisons ; la porte de la cour antérieure est la limite où commence la liberté de la vie[20]. Plutarque fait observer comme une chose exceptionnelle qu'Agésilas affectionnant les vieux usages, ne changea rien à ses repas, à ses bains, à la parure de sa femme, à son train de maison[21]. C'est donc que d'autres se permettaient le luxe intérieur et la parure pour leur femme. Il semble même que les dépenses de toilette, d'ameublement et de table, au moins pour les femmes, aient été poussées très-loin à Sparte[22] et peut-être dépassaient-elles celles des femmes athéniennes. Aristote ajoute que les femmes exerçaient à Sparte un grand empire, ce qui né se concilierait pas avec la pratique de la vie commune et ce qui suppose au contraire de fortes habitudes de vie intérieure[23].

Mais si la liberté était grande pour les femmes, elle était à peu près nulle pour les hommes. Ce qui distinguait le plus Lacédémone des autres cités grecques, c'est la discipline qu'elle imposait à ses citoyens. Encore y aurait-il de l'exagération à dire que cet assujettissement de l'individu à l'égard de la cité ait été une chose particulière à Sparte. Les prescriptions dont nous allons parler, telles que l'éducation en commun, les exercices gymnastiques, les devoirs de l'éphébie, les obligations imposées à chaque âge de la vie, tout cela se trouve dans toutes les villes grecques, et aussi bien chez les Ioniens et les Éoliens que chez les Dorions. Les différences n'étaient que dans la mesure. Partout, avec plus ou moins de rigueur, le principe était, suivant la formule que nous trouvons dans Platon, que le citoyen dût mettre son application à garder et à entretenir l'ordre établi pour tous par la cité, σζων τν κοινν τς πλεως κσμον[24]. Ce qui est particulier à Sparte, c'est que la discipline y fut plus sévère qu'ailleurs et s'y maintint plus longtemps.

Le citoyen de Sparte, n'avait pas le droit de faire le commerce, ni d'exercer un métier. Il ne lui était pas même permis de cultiver sa propre terre. Il lui était absolument défendu de mettre la main à aucun travail[25]. La règle était qu'il eût abondance d'inoccupation, άφθόνίαν οχολής, par quoi nous devons entendre qu'il était tenu de donner tout son temps et tous ses soins, non à ses intérêts personnels, mais à la cité.

Le Spartiate n'avait pas le droit de rester célibataire. Un châtiment très-rigoureux, l'άτιμΐα, frappait celui qui ne se mariait pas ; en outre, il était contraint par les magistrats, chaque année, de faire le tour de l'agora, en chantant un refrain où il était dit qu'il était puni avec justice pour avoir désobéi aux lois[26]. Une peine frappait même l'homme qui se mariait tard ou qui se mariait mal[27].

L'habillement était soumis à des règles, et il était le même pour les riches et pour les pauvres[28]. Le citoyen n'avait pas le droit de porter des bijoux[29], et une vieille loi, peu observée vraisemblablement, mais toujours rappelée d'année en année, lui ordonnait de se raser la moustache[30].

L'éducation de l'enfant n'appartenait pas au père. On n'était pas libre d'élever son fils chez soi, de l'instruire soi-même ou de lui donner un précepteur. Dès l'âge dé sept ans, les enfants étaient pris par l'État, distribués en classes et instruits en commun par des maîtres que la cité avait choisis[31]. Bien qu'il y eût des riches et des pauvres dans la société Spartiate, l'éducation était la même pour tous, et Aristote remarque qu'elle était celle qui eût convenu aux pauvres[32]. Elle se composait d'exercices gymniques et musicaux, tous également obligatoires et fixés invariablement par l'État. Au fond, cette éducation était la même que dans les autres cités grecques ; mais elle se distinguait par une sévérité excessive[33].

Après les exercices de l'enfance venaient ceux de l'éphébie. Les jeunes gens apprenaient le métier des armes, et ils l'apprenaient par la pratique, s'exerçant chaque jour, mangeant ensemble, dormant en commun[34], occupés à faire la garde ou à parcourir la campagne[35]. Ce temps d'apprentissage terminé, on était encore soldat, et le devoir militaire se prolongeait durant 40 années[36]. A la différence des autres cités grecques, on était soldat même en temps de paix ; tous les citoyens étaient distribués en petits groupes qu'on appelait des énomoties[37], et qui étaient composés d'hommes du même âge unis par un serment[38]. Plusieurs énomoties formaient un λόχος, quatre λόχοι une μοϊρα[39], et tous ces corps étaient commandés par des énomotarques, des léchages, des polémarques. Par ce système, le Spartiate était toujours à l'état de soldat, presque toujours en exercices militaires ou en expédition, toujours enserré entre des camarades[40], toujours sous les ordres d'un chef. Aussi les écrivains athéniens remarquaient-ils que Sparte ressemblait à un camp[41].

A cela se rattachait une particularité dont parle Plutarque, mais qu'il ne nous semble pas qu'on ait bien comprise ; on a supposé que le mari ne vivait pas dans la maison de sa femme et ne voyait celle-ci que quelques heures. Le passage de Plutarque est très-clair ; il ne parle que des hommes encore dans la jeunesse, lesquels avaient l'obligation, comme soldats, de vivre ensemble. Comme le mariage pouvait avoir lieu avant l'âge où cessait le service journalier, il ne fallait pourtant pas que les devoirs du soldat fussent suspendus, et le jeune époux ne pouvait que se dérober pour quelques heures à la caserne[42]. C'était seulement quand il avait donné trois fils à l'État qu'il était exempté des gardes : il l'était de tout service militaire quand il en avait donné quatre[43].

A Sparte, on ne laissait à personne la liberté de vivre à son gré ; chacun menait le genre de vie déterminé parla loi ; toutes les occupations avaient en vue l'État, et chacun devait bien se mettre dans l'esprit qu'il ne s'appartenait pas à lui-même, mais qu'il appartenait à la cité[44]. Voilà ce que nous disent les anciens ; mais ils ne nous disent nullement que la vie fût commune ou que le sol fût commun. Ce que nous voyons, dans ces règles si rigoureuses, c'était l'obéissance du citoyen à l'État, ce n'était pas le communisme. Le législateur de Sparte, quel qu'il fût, avait beaucoup moins 3oiigé à l'égalité qu'à la discipline, et l'erreur des écrivains qui sont venus plus tard a été de confondre cette discipline avec une égalité ou une communauté imaginaire, La discipline lacédémonienne n'empêchait ni la vie privée, ni la propriété individuelle, ni le luxe intérieur, ni l'inégalité des fortunes.

 

 

 



[1] Nous disons presque indifféremment Sparte et Lacédémone, Spartiates et Lacédémoniens. Ce n'est pas que les deux termes fussent exactement synonymes ; mais la distinction qu'il y avait entre eux a été exagérée jusqu'à l'inexactitude par quelques historiens modernes. Il n'est pas vrai que le nom de Spartiates, s'appliquant spécialement aux citoyens de race dorienne, celui de Lacédémoniens ou Laconiens désignât les indigènes vaincus. Ceux-ci sont ordinairement désignés dans les textes par les deux mots réunis περίοικοι Λακώνες. Quant au terme Λακεδαιμόνιοι il s'applique aux Spartiates ; il est même, bien plutôt que le mot Spartiate, le nom officiel du peuple. Dans les textes de traités de paix qui sont cités par Thucydide (V, 18 ; V, 23 ; V, 79 ; VIII, 18 ; VIII, 37 ; VIII, 58), c'est le terme Λακεδαιμόνιοι qui est employé ; ex. : V, 77. De même les Inscriptions désignent l'État Spartiate par les expressions ή πόλις τών Λακεδαιμονίων. (Corp. Insc. grœc., n° 1358, 1376, 1453.) Les historiens nous ont conservé plusieurs discours qu'ils disent avoir été prononcés dans les assemblées publiques de Sparte, et nous y voyons que l'orateur appelait ses concitoyens ώ Λακεδαιμόνιοι. (Hérodote, V, 92 ; Thucydide, I, 68, 76, 80, 86.) Hérodote dit indifféremment roi des Lacédémoniens (VI, 58), et roi des Spartiates (I, 65 ; VI, 59). Le mot Λακώνες lui-même est fréquemment employé comme synonyme de Λακεδαιμόνιοι et de Σπαρτιάται (Aristote, Politique, II, 6, 2 ; II, 6, 8 ; II, 6, 21, etc.) — Toutefois, à prendre les deux termes dans leur sens littéral, une distinction est visible ; géographiquement, chez Hérodote, Λακεδαίμων désigne la Laconie entière, et Σπάρτη la ville de Sparte. (Hérodote, VII, 234.) Politiquement, Λακεδαίμων désigne la cité, Σπάρτη la ville. Au point de vue des personnes, Λακεδαιμόνιοι désigne tous les membres libres de l'État lacédémonien, y compris les périèques de Laconie, et Σπαρτιάται est réservé aux seuls Doriens qui sont seuls citoyens complets ; un exemple de cela se voit dans Thucydide, IV, 38, où le mot Λακεδαιμόνιοι est appliqué à 280 hoplites parmi lesquels il n'y a que 120 Σπαρτιάται. A la fin, le mot Λακεδαιμόνιοι reste le nom officiel, mais Σπαρτιάται prend une signification honorable et aristocratique.

[2] Xénophon, Mémorables, IV. 4, 15.

[3] Plutarque, Lycurgue, 16.

[4] Plutarque, Lysandre, 36 ; Lycurgue, 16 ; sur le rôle de la νυμφευτρία, voir Pollux, III, 41.

[5] Denys d'Halicarnasse, Antiq. rom., II, 30, édit. Reiske, p. 301.

[6] Plutarque, Lycurgue, 15.

[7] Comparaison de Lycurgue et de Numa, c. 2. — Dans les apophth. lacon., Lycurgi, 20. — Isocrate dit aussi (Panathénaïque, 259) qu'il n'y a qu'à Sparte que l'on ne voit pas αίσχύνας γυναικών. Il est clair qu'il ne faut pas prendre ces assertions à la lettre ; elles attestent seulement que les autres Grecs n'attribuaient pas aux Spartiates un état de famille moins régulier que le leur.

[8] Hérodote, V, 39 ; VI, 61.

[9] Polybe, XII, 6, 8, édit. Didot, p. 608. Ce passage a été quelquefois interprété inexactement, parce qu'on n'a pas fait attention aux mots άδελφούς όντας qui précisent la pensée de l'historien. Schweighæuser traduit : Apud Lacedœmonios patrium est ut unam habeant uxorem tres viri... si fratres sint. — Cet antique usage, dont le souvenir était arrivé jusqu'à Polybe, était apparemment devenu rare dès le temps d'Hérodote qui n'en parle jamais. Xénophon et Plutarque en ont eu quelque vague notion ; ils parlent du mari vieux et impuissant qui serait tenu d'introduire un jeune homme près de sa femme.

[10] Lois de Manou, IX, 59 et 145.

[11] Plutarque, Solon, 20.

[12] Hérodote, V, 40.

[13] Plutarque, Lycurgue, 16, in fine.

[14] Strabon, VI, 3, 3. — Plutarque, Agésilas, 4. Cet exemple montre que le fils adultérin était exclu de la succession, même quand il n'y avait pas d'enfant légitime, et l'héritage passait alors aux collatéraux. — De même à Athènes, le νόθος n'héritait pas. (Démosthène, pro Phormione, 32 ; in Eubulidem, 63 ; Aristophane, Aves, 1642 et suiv.)

[15] Sur la vie des enfants dans la maison, voyez ce trait que Plutarque rapporte d'Agésilas jouant avec ses enfants (Plutarque, Agésilas, 26-26). — Antalcidas, dans un moment de danger, envoie ses enfants dans l'île de Cythère (Plutarque, Agésilas, 32).

[16] Justin, III, 5. Cf. Eschyle, Sept contre Thèbes, v. 914.

[17] Hérodote, VI, 67, 68.

[18] Plutarque, Lycurgue, 12.

[19] Aristote, Politique, XI, 6, éd. Didot, p. 511, 512. Platon, Lois, I, p. 637. C'est ce que dit aussi Denys d'Halicarnasse, II, 24. — Nous inclinons à croire que Platon, Aristote et Denys exagèrent quelque peu ; nous savons, en effet, que les Spartiates avaient, comme tous les autres Grecs, des magistrats chargés de surveiller les femmes ; mais il ressort au moins de ces textes que la surveillance était moins sévère qu'ailleurs, surtout dans l'intérieur des maisons. Nous rencontrerons plus loin des faits qui confirmeront encore cette vérité.

[20] Denys d'Halicarnasse, XX, 2 (XX, 13, édit Kiessling, t. IV, p. 167).

[21] Plutarque, Agésilas, 19.

[22] Aristote, Politique, II, 6 ; Platon, Lois, I, p. 637 ; VI, p. 781 ; cf. Plutarque, Agis. — Plutarque signale (Agésilas, 19) un des principaux objets de luxe, c'étaient des sièges sculptés κάναθρα dans lesquels les jeunes filles se faisaient porter aux processions. — Il faut noter toutefois qu'un fragment d'Héraclide contredit ou paraît contredire les assertions d'Aristote, de Platon et de Plutarque (Héraclide, dans les Fragmenta histor. Grœc., Didot, t. II, p. 211.) Peut-être Héraclide parle-t-il de l'état légal, Aristote et Platon de l'état réel ; peut-être aussi le luxe était-il interdit au dehors, mais permis dans la maison.

[23] Aristote, Politique, II, 6, Didot, p. 511 : εσ γυναικοκρατομενοι κα πολλ δικετο π τν γυναικν. Cette remarque ne s'applique pas seulement au temps de la décadence de Sparte ; car Aristote parle au temps passé et ajoute : έπί της άρχης άυτών, au temps où Sparte exerçait l'empire.

[24] Platon, Lois, VIII, p. 846. On a mal compris ce passage en rappliquant exclusivement aux cités doriennes. Platon dit cela du citoyen grec en général et non pas seulement du Spartiate ; c'est même dans la bouche d'un Athénien qu'il place cette maxime.

[25] Plutarque, Lycurgue, 24. Cf. Elien, VI, 6.

[26] Plutarque, Lycurgue, 15, Lysandre, 30.

[27] Plutarque, Lycurgue, 15.

[28] Thucydide, I, 6. Xénophon, resp. Laced., 7.

[29] Plutarque, Lycurgue, 9.

[30] Plutarque, Cléomène, 9, d'après Aristote.

[31] Plutarque, Lycurgue, 16.

[32] Aristote, Politique, IV, 7, éd. Didot, p. 653. Nous rencontrerons plus loin un fait qui contredit quelque peu cette assertion trop générale d'Aristote.

[33] Plutarque, Agésilas, 1.

[34] Plutarque, Apopht. laced. Lycurgi, 17.

[35] Aristote, Politique, II, 6,13, signale les φρουραι. Plutarque, Lycurgue, 28, et Platon, Lois, I, p. 633, et VI, p. 763 décrivent les expéditions nocturnes dans la campagne.

[36] Thucydide, V, 64. Xénophon, Helléniques, VI, 4, 17.

[37] Thucydide, V, 67-68 ; Xénophon, Helléniques, VI, 4, 12.

[38] Hésychius : ένωμοτία.

[39] Harpocration, d'après Aristote, v° μόρων.

[40] Isocrate, Panathénaïque, 217.

[41] Platon, Lois, II, p. 666. — Isocrate, Archidamus, 81. — Plutarque, Lycurgue, 24.

[42] Plutarque, apopht lac. Lycurgi, 17.

[43] Aristote, Politique, II, 6, 13, éd. Didot, p, 512. Élien, Hist. var., VI, 6.

[44] Plutarque, Lycurgue, 24.