Une heure après la signature de la capitulation de Sedan (2 septembre), les armées du prince royal de Prusse et du prince royal de Saxe recevaient l'ordre de marcher sur Paris, et, le 3, elles commencèrent leur mouvement. Le prince de Saxe était à droite et s'avançait par les trois routes de Creil, de Compiègne et de Soissons ; le prince de Prusse était à gauche et marchait par Attigny, Reims, Epernay, Montmirail, Coulommiers et Créteil, où il y eut un engagement le 17 septembre ; il passa la Seine près de Villeneuve-Saint-Georges sur plusieurs ponts de bateaux. Le prince de Prusse devait occuper la rive gauche de la Seine, le prince de Saxe la rive droite, et les deux armées se joindre à Argenteuil[1]. La solidité des armées allemandes, l'arrivée continuelle et rapide des réserves et de la landwehr, et l'anarchie dans laquelle la France était plongée, permettaient au général de Moltke d'assiéger Strasbourg et quelques autres places moins importantes, et en même temps d'investir Metz et l'armée du maréchal Bazaine, de bloquer Paris et de garder solidement ses communications avec l'Allemagne[2] : effort gigantesque, auquel à ce moment nous n'avions à opposer que la résistance de Paris. Quand les Prussiens investirent Paris, la défense était encore très-incomplète ; cependant on avait su mettre à profit le temps qu'ils avaient employé à la campagne de Sedan, et de grands travaux avaient été exécutés, sous la direction du général de Chabaud-la-Tour, par le génie militaire et le génie auxiliaire[3], pour fermer les portes de Paris, mettre en état le fossé et le glacis, et construire de nombreuses redoutes[4], — et par l'artillerie, sous la direction du général Guiod, pour mettre le rempart en état de défense, faire les embrasures, les plates-formes, les abris blindés, les traverses, les pare-éclats, les magasins, et mettre en batterie sur les remparts de la ville et des forts 2.700 pièces de siège, de place et de marine, approvisionnées à 400 coups par pièce. L'amiral Rigault de Genouilly avait fait venir des arsenaux de la marine des pièces à longue portée (7.500 m.) et 2.000 canonniers marins, pointeurs exercés et vigoureux soldats, qui furent l'âme de la défense. Des approvisionnements considérables furent rassemblés, d'une manière vraiment surprenante, dit un officier prussien, par les soins de M. Clément Duvernois et de l'administration de la guerre, dirigée par l'intendant Perrier, qui avait acheté, en France et en Angleterre pour 150 millions de vivres de toutes sortes[5]. Quand l'administration civile, après soixante-cinq jours de blocus, n'eut plus rien à donner à manger à la population de Paris, l'administration militaire lui fournit des vivres et la nourrit pendant soixante et onze jours[6]. M. Clément Duvernois avait réuni à Paris de grandes quantités de blé[7], de farine, de riz, d'avoine, le fourrages, 40.000 bœufs, 250.000 moutons, 6000 porcs. Paris renfermait 100.000 chevaux, 67.000 devaient être mangés[8]. La garnison se composait du 13e corps (Vinoy) et du 14e corps (Ducrot), ce dernier en voie de formation[9] ; de 100.000 mobiles de province, qui furent organisés en régiments et devinrent d'assez bons soldats[10] ; de 18 bataillons de la mobile de Paris, dont la plupart ne valurent jamais rien[11] ; de 2.000 canonniers marins ; de 8.000 fusiliers marins ; de 11.000 gendarmes, gardes de Paris, sergents de ville, pompiers, douaniers et gardes forestiers ; d'une division de cavalerie et de la gendarmerie à cheval ; de 124 batteries avec 800 bouches à feu. Le total de l'armée était d'environ 200.000 hommes, dont, au 19 septembre, plus des trois quarts n'étaient pas organisés et ne pouvaient être engagés contre l'armée prussienne avant un mois[12]. La défense disposait encore d'une flottille de 20 canonnières blindées. A ces forces on se plaît quelquefois à ajouter 360.000 gardes nationaux : si bien qu'en présence de ce total de 560.000 hommes vaincus par 200.000 Prussiens, le cri de trahison se fait entendre aussitôt. La garde nationale et les volontaires sont au nombre de ces choses chimériques auxquelles la naïveté publique, trompée par les déclamations des avocats et des journalistes, attribue une importance et une utilité qu'elles n'ont pas. C'est, dit-on, la nation armée et invincible, c'est le patriotisme indomptable, c'est la liberté victorieuse, et par-dessus tout, ce sont des baïonnettes intelligentes ! En réalité, la garde nationale est une foule inutile, quand elle n'est pas dangereuse. Le petit nombre st plein de bonne volonté, et le reste ne vaut rien ou peu de chose. Instrument révolutionnaire avant tout, la garde nationale est absolument impropre à faire la guerre : je dis la guerre sérieuse, dure, avec toutes ses obligations, ses fatigues et la discipline sévère qu'elle exige. Il y avait à Paris, sous l'Empire, 60 bataillons de garde nationale (40.000 hommes), inexpérimentés, mais bien composés et comprenant l'élite de la population. On pouvait augmenter cette force, l'instruire et lui faire faire d'abord un service de garde ; plus tard on aurait pu en tirer quelques bataillons de guerre, graves et assez disciplinés pour se rendre utiles devant l'ennemi. Mais le 4 Septembre voulut armer toute la population. De 60 bataillons la garde nationale fut portée à 266. Tout le monde y entra : étrangers, 25.000 repris de justice[13], 40.000 sectaires membres de sociétés secrètes, capables de tout, excepté d'aller au feu, vagabonds, drôles de toute sorte. Le plus grand nombre ne sut que boire et jouer au bouchon. L'organisation de la garde nationale, confiée aux mairies[14], fut faite de la manière la plus déplorable : non seulement on inscrivit, mais, ce qui était plus dangereux, on arma tout le monde sans examen, et les gredins eurent chacun plus d'un fusil. Les élections aux grades d'officiers produisirent dans beaucoup de bataillons les choix les plus indignes. La Commune organisait dès lors ses bandes et y plaçait ses affidés. Compter ces 360.000 hommes comme une force réelle, vouloir faire avec eux la sortie torrentielle, sont des apoplithegmes à l'usage des journaux et des clubs rouges, mais seulement à leur usage. En réalité, au mois de décembre, il y eut 80 bataillons de marche (40.000 hommes) formés, organisés et en état de faire, sinon un vrai service de guerre, du moins quelque chose de sérieux. En tout, le général Trochu n'avait pas plus de 250.000 hommes. Les corps francs, comme la garde nationale, se composaient de quelques corps bien recrutés et très-dévoués, mais surtout de maraudeurs. Les femmes voulurent aussi former des corps francs, et il fut question un moment de créer le corps des zouaves de rempart. Ce ne fut toutefois que pendant la Commune que les corps francs féminins s'organisèrent. Pendant le blocus, l'artillerie[15] et l'industrie privée, très-habilement employée par M. Dorian, fondirent 230 canons de 7 et fabriquèrent affûts, naissons, 230.000 obus, fusées à obus, boîtes à mitraille, poudre, cartouches et gargousses, wagons blindés, fusils à tabatière, chassepots, etc. Des ateliers pour la réparation des armes furent établis. Ces grands travaux furent dirigés par des commissions composées d'officiers d'artillerie et d'ingénieurs, et exécutés dans plusieurs grandes usines[16], dans les ateliers des compagnies de chemins de fer transformés en fabriques d'engins militaires, dans les ateliers créés au Louvre, dans les fonderies de l'industrie. Les matières nécessaires, le bronze, la fonte et le salpêtre, ne manquaient pas ; seul, l'acier faisait défaut : on s'en procura en fondant des outils. Plus on constate les ressources et l'activité du Paris industriel, plus on est affligé de le voir tombé dans les mains débiles et ineptes qui le dirigeaient depuis le 4 septembre. Les forts de Paris, construits il y a trente ans, à une époque où l'artillerie ne portait pas à plus de 1.600 mètres, ne peuvent plus actuellement défendre la ville contre un bombardement. La véritable ligne de défense de Paris se trouve aujourd'hui sur les hauteurs d'Orgemont, au nord ; sur les plateaux de la Jonchère, de la Bergerie, de Garches et de Saint-Cucufa, à l'ouest ; sur les hauteurs de Châtillon, de Fontenay-aux-Roses, de l'Hay, de Chevilly et de Thiais, au sud, et sur celle de Cœuilly, d'Avron, à l'est, et de Montmorency, au nord-est. Il aurait fallu pouvoir occuper et défendre toute cette ligne ; mais le général Trochu avait trop peu de soldats pour le faire, et, sauf Châtillon, qu'il essaya de conserver, il fut obligé de laisser les Prussiens s'emparer de toutes les positions dominantes[17] ; ils les occupèrent dès le premier jour, avec une connaissance des localités qui atteste de longues études antérieures. En possession de ces points, qu'ils couvrirent plus tard de batteries habilement placées, les Prussiens étaient les maîtres de la situation ; ils n'eurent qu'à investir étroitement la place, comme ils avaient fait à Metz, repousser les attaques que l'on dirigea contre eux et attendre que Paris capitulât. Le général Trochu, à qui allait échoir l'honneur de défendre Paris, n'était pas l'homme qu'il aurait fallu pour remplir une tâche pareille. Esprit critique avant tout, orateur éloquent et écrivain distingué, mais abusant de sa parole facile et agréable, comme de sa plume élégante, plein d'infatuation, le général Trochu manquait de cette énergie opiniâtre, brutale quelquefois, qui caractérisait le maréchal Pélissier et qui eût été indispensable pour défendre Paris, comme elle avait été nécessaire pour prendre Sébastopol. Le président du nouveau gouvernement n'avait aucune suite dans les idées : ainsi le 19 septembre, il croit que Paris va être enlevé ; le 9 et le 13 octobre, il affirme que Paris est invincible ; le 27, il déclare que ce n'est pas la France qui sauvera Paris, mais Paris qui sauvera la France ; puis le 12 novembre, il changeait d'avis et disait que la résistance de Paris sans armée de secours était une héroïque folie, qu'il fallait faire pour sauver l'honneur[18]. Les opérations du général Trochu furent toujours indécises, molles et décousues. Une attaque est-elle ordonnée, les positions sont-elles enlevées, aussitôt elles sont abandonnées et l'on bat en retraite. Le moral du soldat s'affaiblissait ainsi, en voyant l'inutilité des sacrifices qu'on lui demandait. A l'exception de la bataille de la Marne, les sorties se font sans énergie, parce que l'opinion du général était qu'il fallait se contenter de chicaner l'ennemi. Il était partisan de la guerre et s'opposait à toute idée de paix, tout en étant convaincu que la guerre en province et la résistance de Paris devaient être inutiles. Le projet d'aller à Rouen excepté[19], le général Trochu n'eut jamais d'idée bien arrêtée, et pendant qu'il préparait la mise à exécution de ce plan, les Prussiens eurent le temps de se fortifier autour de Paris d'une façon presque inexpugnable. Ces travaux de fortification accomplis, et la sortie de vive force devenue impossible, il n'y avait plus qu'une manière d'attaquer les Prussiens : c'était de choisir quelques points, Châtillon et Buzenval par exemple, d'assiéger ces positions pour les reprendre, de procéder par des travaux de contre-attaque et de rompre la ligne d'investissement en se servant de la pelle et de la pioche avant de lancer les troupes à l'assaut[20]. Seul, le général Tripier fit devant les forts du sud de grands travaux de contre-attaque, qui les garantirent contre toute tentative de l'assiégeant et qui pouvaient servir, si on avait voulu les continuer, à la reprise de Châtillon. Si la défense de Paris, au point de vue des sorties, a été médiocre, elle a été, en tant que défense éloignée, très remarquable et de beaucoup supérieure à l'attaque : car, à l'exception du choix des positions occupées pour investir et brider Paris, l'assiégeant n'a rien fait ; il s'est retranché et s'est défendu quand on l'a attaqué ; il a exécuté un bombardement inutile et a attendu quatre mois et demi que la famine ou l'émeute forçât la ville à se rendre. Cette longue inaction était une faute grave : car elle permettait à la France d'organiser de nouvelles armées, et il suffisait d'un succès sérieux. obtenu par l'une de ces armées pour obliger les Prussiens à lever le siège. Mais il est temps de sortir de ces généralités et de raconter l'histoire des événements, qu'elles serviront cependant à expliquer. Le général Ducrot[21] avait fait adopter au général Trochu l'idée de défendre les hauteurs de Meudon et de Châtillon, qui dominent de très-près les forts de la rive gauche et Paris même. Dès le 17, Ducrot, avec 40.000 hommes et 100 pièces de canon (14e corps), alla s'établir à Bagneux, Châtillon et Clamart. Le 19, il prit l'offensive et attaqua brusquement le prince royal de Prusse, qui, en se portant sur Versailles et Saint-Germain par la vallée de la Bièvre, lui prêtait le flanc. Si nous réussissions à nous maintenir sur les hauteurs de Meudon et de Châtillon, et à conserver la redoute de Châtillon, encore inachevée, nous restions maîtres d'une position essentielle, qui aurait empêché plus tard les Prussiens de bombarder la ville de Paris et qui rendait fort difficiles leurs communications entre Corbeil et Versailles, et menaçait leur situation à Versailles. A cinq heures du matin, le 14e corps s'ébranla ; Ducrot envoya une division au Petit-Bicêtre, à Villacoublay et à Vélizy, et occupa les crêtes des ravins de la Bièvre. De ces positions on pouvait écraser à coups de canon les colonnes de l'armée allemande dans la vallée de la Bièvre et arrêter leur marche. A peine la fusillade était-elle commencée, que 2.000 zouaves[22] lâchent pied, se sauvent honteusement et rentrent dans Paris en criant à la trahison. D'autres soldats sont entraînés par la panique et les suivent ; le reste des troupes hésite et se replie. Ne pouvant plus prendre l'offensive, le général Ducrot se replia sur Fontenay-aux-Roses et Clamart, comptant se tenir sur la défensive et voulant avec raison conserver ces hauteurs. Un combat sérieux s'engagea contre le 5e corps prussien tout entier et une division bavaroise ; à midi, le feu des batteries prussiennes était éteint. Mais une division rentra à Paris sans ordre[23], abandonnant le général Ducrot en plein combat. Il fallut dès lors renoncer à défendre les hauteurs, évacuer la redoute dé Châtillon, rentrer dans Paris et abandonner aux Prussiens des positions qu'on aurait dû conserver à tout prix. Ce combat, qui pouvait avoir des suites importantes, eut toujours cette conséquence de prouver à l'ennemi qu'il fallait renoncer à l'idée d'entrer à Paris sans coup férir, et de tenter contre les forts ou contre la ville une attaque de vive force. Le 23 septembre, le général Vinoy (13e corps) reprit le plateau de Villejuif et les positions des Hautes-Bruyères et du Moulin-Saquet ; on y éleva depuis de grandes redoutes, qui rendirent des services importants à la défense. Ce succès détruisit dans Paris l'effet déplorable produit par la fuite de quelques misérables au combat de Châtillon. Pendant ce temps, M. Jules Favre se rendait à Ferrières[24], le 19 septembre, et essayait d'ouvrir des négociations avec M. de Bismarck ; les exigences des Prussiens, qui demandaient dès lors l'Alsace et la Lorraine, furent repoussées par M. Jules Favre, et la guerre continua. M. Jules Favre avait déclaré que la France ne céderait ni un pouce de son territoire, ni une pierre de ses forteresses. On applaudit à cette déclaration, qui malheureusement devait rester vaine. Quelques jours avant l'investissement de la capitale, MM. Crémieux, Fourichon et Glais-Bizoin avaient été envoyés à Tours pour organiser la défense dans les départements ; ils formèrent la délégation de Tours (16 septembre). Elle fut complétée le 10 octobre par l'arrivée de M. Gambetta[25], qui fut à la fois ministre de la Guerre et de l'Intérieur, et dans la personne duquel se concentra toute l'autorité de la délégation. Le gouvernement de Tours se mit à l'œuvre et rassembla des troupes. A la même époque, M. Jules Favre chargeait M. Thiers d'aller à Londres, à Saint-Pétersbourg, à Vienne et à Florence, afin d'obtenir de ces divers cabinets une intervention en notre faveur ou un moyen d'entrer en négociation avec la Prusse. M. Thiers revenait à Paris lorsqu'éclata l'insurrection du 31 octobre ; nous reparlerons de lui tout à l'heure. Les Prussiens avaient cru, au début, qu'ils deviendraient facilement et vite les maîtres de Paris, en prenant tout de suite un fort. Nous pourrons nous contenter de prendre un fort, disait M. de Bismarck à M. Jules Favre, à Ferrières, et pas un d'eux ne peut résister plus de quatre jours. De ce fort nous dicterons la loi à Paris... Mais il nous sera peut-être plus commode de l'affamer. L'espoir des Prussiens fut déçu. Le génie, l'artillerie et la marine avaient mis Paris et les forts à l'abri d'un coup de main, et quant à assiéger un fort sans grosse artillerie, la chose était impossible. Les Prussiens paraissent avoir compté principalement sur l'appui que les Rouges ne manqueraient pas de leur donner, en renversant le gouvernement de la Défense nationale. M. de Bismarck disait encore à M. Jules Favre, à Ferrières : Si dans quelques jours nous n'avons pas pris Paris, vous serez emportés par un mouvement populaire. En effet, les révolutionnaires, comme l'avait annoncé M. de Bismarck, essayèrent, dès le 25 septembre, de s'emparer de l'Hôtel de Ville ; ils échouèrent et recommencèrent le 3 octobre ; ils échouèrent encore et revinrent à la charge le 8 octobre. Blanqui, Flourens, Cluseret et Millière arrivèrent avec leurs bandes à l'Hôtel de Ville pour y établir la Commune ; pour la troisième fois leurs tentatives avortèrent devant l'énergie du préfet de police, M. de Kératry[26]. Dès le lendemain, ne pouvant plus compter sur le renversement du gouvernement par les Rouges, M. de Bismarck fit faire des ouvertures indirectes à l'Hôtel de Ville par deux officiers américains qui rentraient à Paris ; il proposait un armistice pour toute la France, moins l'Alsace et la Lorraine, qui déjà, dans sa pensée, étaient annexées à l'Allemagne ; on ferait des élections et l'Assemblée se réunirait à Tours. M. Jules Favre refusa. Le 13, M. de Bismarck revint à la charge et fit faire de nouvelles communications par l'ambassadeur des Etats-Unis. Le général Trochu les fit repousser. L'armée prussienne avait compté qu'elle prendrait tout de suite un fort : elle s'était trompée ; elle avait compté sur le triomphe des Rouges : trois fois ils avaient échoué. Il lui était impossible, faute d'artillerie de siège et de munitions, d'assiéger Paris ; elle était réduite à entreprendre un long blocus, pendant lequel l'armée de Paris allait s'organiser et la guerre s'allumer dans toute la France ; Metz tenait encore et personne ne savait qu'il dût tomber sans combat. Devant une pareille perspective, pleine d'incertitudes et de dangers, l'ennemi demandait à traiter ; nous étions les maîtres alors, bien mieux qu'au lendemain de Sedan, de discuter les conditions de la paix : ses embarras et les complications de la nouvelle guerre qui allait commencer nous faisaient une situation dont on aurait pu profiter, si on n'avait été résolu à ne pas se laisser démembrer tant qu'on pourrait combattre. Dès ce moment, réduits à bloquer Paris, les Prussiens commencèrent à se fortifier sur les hauteurs qui formaient leurs lignes d'investissement, afin de repousser plus sûrement les sorties des Parisiens. En même temps ils furent obligés, pour faire vivre leur armée, forte d'environ 200.000 hommes, d'étendre leur rayon d'approvisionnement jusqu'à Evreux, Dreux, Chartres, Orléans, Rouen, Amiens, Beauvais, Saint-Quentin. L'occupation de ces villes forma autour de Paris comme une seconde ligne d'investissement. Au début, ce fut leur cavalerie qui fut chargée d'éclairer les routes de Paris à Orléans, à Chartres, à Dreux, à Evreux, à Rouen et à Beauvais. Ces détachements eurent de nombreux engagements avec les mobiles et les francs-tireurs, à Toury, à Épernon, Maintenon et Ablis, à Chérisy, à Pacy-sur-Eure, à Clermont et à Montdidier. Tout le pays fut parcouru et occupé, dévasté, saccagé ou écrasé de réquisitions et d'amendes ; partout ces troupes, sales et toujours ivres, commirent des actes de pillage et de meurtre ; elles violèrent les femmes à Ablon et incendièrent Mézières (22 septembre) et Ablis (9 octobre). Cette conduite barbare avait pour but de frapper de terreur nos campagnes et d'empêcher la guerre nationale de se développer. Ce fut le contraire qui arriva : l'exemple d'Ablis n'empêcha pas l'héroïque ville de Châteaudun de se défendre, le 18 octobre, contre l'attaque de la division du général de Wittich. Treize cents hommes, francs tireurs et gardes nationaux, les premiers commandés par le comte de Lipowski, les seconds par M. de Testanière, se défendirent toute la journée dans la ville barricadée ; mais le soir, les Prussiens s'emparèrent de Châteaudun, le brûlèrent au pétrole et y commirent les atrocités les plus sauvages. Pendant ce temps, Paris attaquait l'ennemi à plusieurs reprises, mais sans but bien arrêté et sans résultats. On livrait le 30 septembre le combat de Chevilly-l'Hay-Thiais, où le général Guilhem fut tué ; le 13 octobre, Vinoy s'emparait de Bagneux ; de là, il voulait marcher sur Châtillon, s'en emparer, s'y fortifier et s'y maintenir à tout prix ; mais on abandonna Bagneux. Le 21 octobre, Ducrot chassait les Prussiens de Rueil et de la Malmaison, et commençait ce jour-là la mise à exécution d'un projet dont nous parlerons tout à l'heure. Le 28 octobre, on surprit les Prussiens au Bourget et on enleva ce village, mais on le laissa reprendre le 30. Bien que ces combats eussent refait le moral de notre armée, ils étaient sans résultats et mécontentaient la population, qui croyait, non sans raison, que cette manière de défendre Paris était insuffisante. En effet, le général Trochu et le général Ducrot préparaient en secret un projet[27] sur lequel ils fondaient avec raison de grandes espérances et auquel ils sacrifiaient toute autre chose. Le général Trochu voulait faire sortir de Paris le général Ducrot avec une armée de 60.000 hommes, afin de ne pas immobiliser dans l'enceinte de la ville des forces aussi considérables que celles dont il disposait. Le général Ducrot, appuyé par les nombreuses redoutes établies dans la presqu'île de Gennevilliers, devait forcer le passage de la Seine à Bezons et gagner Pontoise par Cormeilles et Sannois ; l'enlèvement de ces hauteurs, encore peu fortifiées, devant être facilité par une diversion que ferait un corps de l'armée de Paris, qui se porterait de Saint-Denis sur Orgemont et Sannois. Arrivé à Pontoise, Ducrot se dirigera sur Rouen par les deux routes qui conduisent de Pontoise à Rouen et en longeant la Seine ; à Rouen, il établira son armée sur les plateaux de Boos et d'Oissel, position très-forte, couverte par l'Andelle et la Seine. L'armée prussienne, qui compte devant Paris à ce moment environ 200.000 hommes, sera obligée de se couper en deux : une partie se mettra à la poursuite de Ducrot et l'autre restera devant Paris. Si le prince royal envoie contre Ducrot des forces considérables, il dégarnit ses lignes d'investissement à tel point, que Trochu pourra les forcer ; s'il veut au contraire, ce qui est probable, conserver des forces suffisantes dans ses lignes, il ne pourra envoyer contre Ducrot que des forces trop inférieures en nombre pour pouvoir être victorieuses. Donc Ducrot a de grandes chances de succès. Une fois arrivé à Rouen, le général Ducrot se reliera à l'armée du Nord ; il recevra des renforts et formera une armée nombreuse, qui, s'appuyant aux places du Nord, se prolongera jusqu'à la Sambre et menacera les Prussiens sur leur flanc droit. La mer et la flotte assureront son approvisionnement en vivres, armes et munitions. Bref, on aura une forte armée en campagne, pouvant marcher ou essayer de marcher au secours de Paris, au lieu d'avoir des troupes enfermées dans Paris. D'un autre côté, une partie des troupes qu'on organise sur la Loire, au lieu de se concentrer à Orléans, s'étendra de Nevers à Belfort par le Morvan, Langres et Besançon, et devra agir sur le flanc gauche des Prussiens, en inquiétant et en attaquant sans relâche leurs lignes de communications. Dès la fin d'octobre ou le commencement de novembre, on ferait donc ce que Bourbaki a essayé de faire en janvier, quand il était trop tard. Le reste des troupes de la Loire et les nouvelles levées iront rejoindre Ducrot pour porter l'effectif de son armée à 200.000 hommes. Il ne faut pas oublier de dire que Metz tenait encore et que le prince Frédéric-Charles était retenu devant Metz ; que dès lors on n'avait affaire qu'à l'armée d'investissement de Paris. Que serait-il arrivé si ce projet eût été mis à exécution ? On peut répondre seulement qu'il était fort sage, bien conçu, bien étudié et qu'il avait des chances sérieuses de succès. Le combat du 21 était le commencement de sa mise à exécution. Les Prussiens, en se défilant du feu du Mont-Valérien, s'étaient emparés de la Malmaison et d'une partie du village de Rueil ; s'ils continuaient à s'avancer, s'ils devenaient les maîtres de Rueil et de Nanterre, ils se trouveraient établis sur le flanc gauche de notre armée quand Ducrot voudrait passer la Seine à Bezons : dès lors ce passage, la première opération du projet, était compromis. Le général Ducrot, avec 10.000 hommes et 120 bouches à feu, attaqua les Prussiens le 21 octobre. Après un vif combat, ils furent chassés de Rueil et de la Malmaison, repoussés jusqu'à Saint-Cucufa et la Jonchère, et pris, dans Versailles, d'une panique et d'une fureur de déménagement dont les habitants de cette ville conserveront longtemps le joyeux souvenir. Le projet du général Trochu allait donc s'exécuter vers le milieu de novembre, quand M. Gambetta, avec lequel le général Trochu ne communiquait que très-imparfaitement[28], annonça la victoire de Coulmiers, la marche de l'armée de la Loire sur Paris, demanda la coopération de l'armée de Paris et obligea ainsi le général Trochu à renoncer à ses desseins pour aller au-devant de l'armée de la Loire. La population de Paris était mécontente, disions-nous tout à l'heure, de la façon dont elle voyait le général Trochu soutenir la lutte et des continuelles reculades que faisait l'armée après chaque combat. Les partis révolutionnaires résolurent de profiter du mécontentement général pour renverser le gouvernement du 4 Septembre, et donner le pouvoir à leurs chefs. Tout puissants dans les clubs, dans plusieurs mairies, dans les faubourgs, et maîtres d'une partie de la garde nationale, les Rouges dominaient le gouvernement, entravaient son action, perpétuaient l'anarchie, paralysaient la défense et étaient ouvertement en relations quotidiennes avec l'ennemi. Cependant le gouvernement de la Défense nationale tolérait ou subissait ces rébellions et ces trahisons manifestes, parce que, porté au pouvoir, le 4 Septembre, en partie par ces gens-là, il dépendait d'eux et n'avait pas l'énergie de s'affranchir de ce joug honteux. Les chefs des partis révolutionnaires[29] avaient facilement recruté leur personnel parmi ces masses de déclassés et de bandits, de gredins et de repris de justice[30], qui fourmillaient dans le Paris impérial, devenu ville de luxe et de misère, et le foyer de toutes les corruptions ; ils trouvaient aussi de larges contingents chez les ouvriers, les petits bourgeois et les employés de toutes sortes, pervertis par la presse et les clubs. Aussitôt après la révolution du 4 Septembre, les meneurs se préparèrent à établir la Commune, mélange de la Commune jacobine de 1793 et des idées communistes modernes. En attendant l'occasion favorable, le parti créa, dans chaque arrondissement, des comités de défense, destinés à servir de centres où se traiteraient les affaires de la révolution sociale, qui seule préoccupait les chefs et leurs partisans. La guerre à outrance et les sorties demandées à grands cris n'étaient que des prétextes pour se préparer à la guerre sociale, la seule que la canaille voulût faire, parce que celle-là seule devait lui rapporter profit. La guerre contre l'ennemi n'était qu'un moyen pour armer et organiser en bataillons les bandes de la prochaine insurrection, pour s'emparer des mairies, partant de l'administration des quartiers insurrectionnels. Cet Etat qui se créait dans l'Etat avait donc son armée, forte d'au moins 100.000 hommes, soldés par la Ville[31], son administration, ses comités secrets, ses journaux, ses clubs, et disposait de la moitié de Paris. Les journaux révolutionnaires sont d'une violence inouïe, mais les clubs les dépassent encore. La trahison est à l'ordre du jour, et il faut se venger des traîtres : moyen commode pour prêcher sans relâche la proscription et le pillage des riches, l'incendie, le vol, l'assassinat, la révolte, la désertion, l'athéisme, l'adultère et les doctrines les plus cyniques. Je ne puis que renvoyer au livre de M. de Molinari[32] les lecteurs curieux de se renseigner sur l'amas immonde de folies, de bêtises, d'infamies sans nom qui se débitaient dans les clubs. Vers la fin du siège, les clubs se tinrent à huis-clos et devinrent de véritables sociétés secrètes, dans lesquelles on acheva de préparer la guerre sociale, que les Rouges annonçaient hautement devoir suivre immédiatement la guerre contre les Prussiens, à laquelle, on ne saurait trop le dire, ils refusaient de prendre part. Les clubs, en effet, défendent à leur public de s'inscrire dans les compagnies de volontaires ou dans les compagnies de marche, formées dans la garde nationale ; ceux qui en feront partie sont déclarés traîtres et vendus à la réaction. Pour expliquer une pareille défense, faite sous le feu de l'ennemi, on disait que le général Trochu voulait conduire les patriotes à l'abattoir. Les faits répondent aux doctrines. Les bataillons de faubouriens refusent de marcher à l'ennemi ou se sauvent aux premiers coups de fusil ; d'autres arrivent au rempart ou à la tranchée tellement ivres, qu'il faut les renvoyer à Paris ; le 201e bataillon, en pleine ivresse[33], pille l'église d'Issy et y commet les plus révoltants sacrilèges. L'immoralité et le cynisme des gens de Belleville étaient tels, que ceux de la Villette en étaient dégoûtés. Traduits devant la cour martiale et flétris pour leur lâcheté par le général Clément Thomas, les gredins l'ont assassiné le 18 mars. Beaucoup servaient d'espions aux Prussiens, et, sous prétexte d'aller à la maraude, communiquaient chaque jour et ostensiblement avec l'ennemi aux avant-postes ; ils lui apportaient les journaux de Paris, que le prince royal de Prusse et ses officiers lisaient régulièrement à Versailles, et lui faisaient connaître le mot d'ordre. Le général Trochu avait ordonné que les portes de Paris restassent ouvertes : maraudeurs, espions, entraient dans la place et en sortaient librement ! On ne peut expliquer la faiblesse du gouvernement à l'égard du parti révolutionnaire, qui trahissait, qui préparait la guerre civile et qui ne trouvait à l'Hôtel de Ville aucune résistance. Les étrangers ne comprenaient rien à cette conduite. Ce qui nous surprend, disait la Presse de Vienne, c'est que Trochu n'agisse pas avec plus d'énergie contre les émeutiers et ne les livre pas aux conseils de guerre. Sans un régime de fer établi dans Paris, le gouvernement provisoire est perdu. Mais le général Trochu ne croyait pas que l'on pût dompter la démagogie par la force matérielle : il persistait, malgré l'évidence, à ne lui opposer que la force morale, dont elle n'avait aucun souci ; il pensait que, si on engageait la lutte avec les factieux, le siège ne pourrait durer ; il voulait à tout prix éviter la guerre civile, et laisser ainsi libre carrière aux sectaires qui avaient organisé à Belleville une place d'armes où ils faisaient ce qu'ils voulaient, du haut de laquelle ils défiaient l'Hôtel de Ville, et dans laquelle ils se réfugiaient en cas de besoin, certains d'y trouver un abri assuré. C'était ce repaire qu'il eût fallu détruire. Il faut dire encore que le 4 Septembre avait fait disparaître la police, qu'il n'osait pas rétablir ; qu'il n'y avait aucun moyen de répression ; que la force armée était devant l'ennemi ; que l'ancienne garde nationale était désorganisée ; que la nouvelle était précisément la démagogie armée et enrégimentée, et que, devant la faiblesse et les craintes du gouvernement, les quelques hommes énergiques qui auraient été capables d'agir, se retirèrent ou perdirent confiance et laissèrent faire. Par exemple les cours martiales et les conseils de guerre acquittèrent sans exception tous les coupables qu'on fit passer devant eux. Les Prussiens comptaient toujours que la populace de Paris ferait enfin une révolution qui leur permettrait de devenir les maîtres de la ville. Ce soulèvement attendu par l'ennemi éclata le 31 octobre. Les prétextes étaient la mollesse du général Trochu contre les Prussiens, l'échec du Bourget, la nouvelle de la capitulation de Metz, qui indigna tout Paris, enfin, l'arrivée de M. Thiers, qui venait avec l'appui des puissances neutres, proposer à M. de Bismarck un armistice, pendant lequel on élirait une assemblée nationale, tous prétextes bien choisis pour exploiter encore une fois l'ineptie politique de la bourgeoisie parisienne et l'entraîner, comme d'habitude, à prendre part à une révolution dirigée contre elle. En effet, la population de Paris ne comprit rien à la proposition d'armistice appuyée par les neutres ; ignorante des formes de la diplomatie comme de toutes choses, et croyant tout savoir et tout comprendre, elle prit l'armistice pour une capitulation, s'en indigna et abandonna le gouvernement qui voulait commettre ce qu'on appelait une lâcheté. Tel était le résultat qu'on avait obtenu de l'intervention des foules dans l'exercice de la politique. L'insurrection du 31 octobre eut des conséquences déplorables ; mais, avant d'en parler, il faut s'arrêter un instant et raconter la fin de l'armée de Metz. |
[1] Au 19 septembre, les Prussiens avaient devant Paris les 4e, 5e, 6e et 11e corps prussiens, la garde, le 12e corps (Saxons), le 2e corps bavarois, la division wurtembergeoise, les 2e, 4e, 5e et 6e divisions de cavalerie : en tout 180.000 hommes et 622 canons. On voit immédiatement quelles eussent été nos chances, si l'armée de Sedan se fût repliée sur Paris. Plus tard, l'armée d'investissement reçut des troupes de remplacement et le 1er corps bavarois.
[2] A la fin d'octobre, les troupes d'étapes et de garnison chargées de garder les communications comptaient 85 bataillons (à 1.200 hommes), 33 escadrons et 9 batteries. Le soin de couvrir les communications fut confié aux gouverneurs généraux de l'Alsace, de la Lorraine, de Reims et de Versailles. Les voies ferrées servaient aux transports de l'armée prussienne depuis Berlin jusqu'à Lagny.
[3] Ingénieurs des ponts, et chaussées et des mines, et leurs agents.
[4] En même temps les révolutionnaires, qui s'occupaient de toute autre chose que de la guerre contre la Prusse, préparèrent aussi leurs fortifications pour le jour où ils livreraient bataille à l'ordre social. Ils organisèrent la commission des barricades, usine ténébreuse, dont les travailleurs et les meneurs se tenaient prêts à servir au premier signal les intérêts de la démagogie.
[5] Il s'agissait en effet de nourrir au moins 2.200.000 hommes, en comprenant l'armée et les réfugiés de la banlieue (200.000).
[6] L'administration militaire distribua 363 millions de rations de toute espèce : pain, biscuit, riz, viandes fraîches, conservées ou salées, morue, fromage, légumes conservés, vin, eau-de-vie, café, sucre, sel. — Au moment de l'armistice, les forts étaient encore pleins de vivres, qu'on abandonna en partie aux Prussiens, faute le moyens de transport.
[7] M. Clément Duvernois avait fait un approvisionnement extraordinaire de blé pour deux mois ; avec les approvisionnements ordinaires de la boulangerie, du commerce et des particuliers, on avait du pain pour quatre mois. Le gouvernement du 4 Septembre n'a jamais su au juste pour combien de temps il avait les vivres, ce qui a exercé une fâcheuse influence sur les opérations des armées de province.
[8] Voyez SARREPONT, Histoire de la défense de Paris, 1 vol. in-8°, p. 188 et suivantes.
[9] Ces deux corps ont été créés par Palikao.
[10] Ces 100.000 mobiles avaient été appelés à Paris et organisés par M. Chevreau, dernier ministre de l'Intérieur de l'Empire.
[11] Le plus grand nombre de ces bataillons était très-indiscipliné ; les hommes refusaient d'obéir, quelques-uns se livraient à les actes de pillage et de dévastation. Pour rétablir la discipline dans la mobile de Paris, M. Gambetta fit décider, le 19 septembre, qu'on procéderait à de nouvelles élections, afin d'enlever les prétextes aux malveillants, et l'on étendit cette mesure absurde à tous les bataillons de mobiles de province qui étaient à Paris. Le 20 septembre, malgré l'opposition du général Le Flô, on procéda aux nouvelles élections et l'on désorganisa les cadres de ces régiments, qui commençaient à peine à se former.
[12] Il faut avoir soin de dire que l'habile intendant militaire, M. Blondeau, se distingua par son activité à habiller, équiper et armer les troupes régulières, les mobiles et la garde nationale.
[13] Quelques-uns disent 40.000.
[14] Dont plusieurs étaient entre les mains du parti révolutionnaire ou de ses complices.
[15] Ancien atelier de Meudon.
[16] Celles de M. Cail entre autres.
[17] Si l'armée de Châlons fût revenue à Paris, on aurait pu défendre ces hauteurs et rendre le blocus ou le siège impossibles, et la guerre prenait une tout autre tournure. — Aujourd'hui toutes ces hauteurs sont fortifiées.
[18] Voir le rapport de M. Chaper sur les délibérations du gouvernement de la Défense nationale.
[19] Encore ce projet est-il du général Ducrot.
[20] Au 31 décembre, le gouvernement de la Défense nationale reconnaissait que l'ennemi s'était couvert d'ouvrages qu'il fallait assiéger, et que, pour faire des approches régulières, le temps manquait. Au 31 décembre, il était trop tard en effet ; mais pourquoi n'avoir pas commencé plus tôt ? (Rapport Chaper.)
[21] Arrivé le 15 à Paris.
[22] Engagés volontaires, qui n'avaient du zouave que la chechia et le nom.
[23] Le général Ducrot voulut faire passer devant un conseil de guerre le général qui commandait cette division ; il ne put l'obtenir de la faiblesse du général Trochu.
[24] Château de M. de Rothschild, où le roi de Prusse avait établi son quartier général.
[25] Sorti de Paris en ballon.
[26] M. de Kératry voulut faire arrêter ces complices des Prussiens ; mais le gouvernement n'osa pas et blâma M. de Kératry, qui donna sa démission le 11 octobre.
[27] Dont le général Ducrot était l'auteur.
[28] Il ne paraît pas qu'on se soit mis sérieusement d'accord à Paris et à Tours pour l'exécution de ce plan de sortie. Le général Trochu et M. E. Picard (Dépositions devant la commission d'enquête, p. 315 et 488) disent que le plan fut emporté à Tours par M. Ranc. M. Gambetta (Dépositions, p. 561) déclare que M. Ranc lui a en effet parlé d'un projet de sortie, mais sans détails. Or, il paraît certain que le général Trochu avait exposé ses projets en détail devant M. Ranc, avant que ce dernier montât en ballon le 14 octobre, et lui avait donné la mission verbale d'en informer M. Gambetta.
[29] Les partis révolutionnaires comprennent : 1° les Blanquistes, audacieux communistes, dont le but est de détruire complètement la société actuelle et qui ne reculent devant aucun moyen : ce parti comptait 50 ou 60.000 sectaires obéissant à Blanqui ; les Garibaldiens s'y rattachaient ; Flourens, Tibaldi, Sapia, Dombrowski, Millière, peuvent être cités parmi les principaux lieutenants de Blanqui ; c'est le parti blanquiste qui a fait le 31 octobre ; — 2° les Jacobins, parti politique, non communiste, dirigé par Delescluze, peu nombreux, mais redoutable par sa sauvage énergie ; — 3° l'Internationale, qui n'a commencé à jouer directement un rôle politique qu'après la capitulation de Paris, et qui alors s'est alliée avec les Blanquistes.
[30] Le général Trochu a fait, à la tribune, l'incroyable aveu que les mairies avaient distribué des fusils à 25.000 repris de justice.
[31] Les gardes nationaux touchaient 1 fr. 50 par jour ; s'ils avaient femme, 2 fr. 25.
[32] Les clubs rouges.
[33] L'ivrognerie prit des proportions effrayantes dans les classes populaires pendant le siège et surtout pendant la Commune.