DEUX JURÉS DU TRIBUNAL RÉVOLUTIONNAIRE

DEUXIÈME PARTIE. — LE CITOYEN TRINCHARD « HOMME DE LA NATURE »

 

CHAPITRE IV.

 

 

Jugement porté par Trinchard sur les événements du 9 thermidor. — La clameur publique le dénonce. — Il est arrêté et incarcéré à la maison d'arrêt de Port-Libre. — Il est au secret. — Procès de Fouquier-Tinville et de ses coaccusés. — Trinchard est fort malmené par l'accusateur public. -Il se défend en niant. — Il n'a pas été un homme sanguinaire. — Si l'un regarde comme solides ceux qui ont servi la Patrie, il est solide. — Le greffier Pâris, ami de Danton, le charge sans ménagements. — Son rôle au Tribunal est mis au jour. — « Un juré révolutionnaire n'est pas un juré ordinaire. » — Il renie Lescot-Fleuriot, son protecteur. — Il sauve sa tête. — Son existence de détenu errant de prison en prison. — Ses suppliques. — Son frère ne l'abandonne pas ; ses amis non plus. — Il est rendu à la liberté et à la tendresse de sa jolie épouse « temple de Vénus, déesse de l'Amour ». — Sous le Directoire, il est agent de la police secrète.

 

Les rêves d'avenir de Trinchard, lorsqu'il écrivait à Ploton, qu'il lui disait ses espoirs prochains, le plaisir qu'ils auraient à entretenir une petite correspondance d'amitié « au sein de leurs familles » ; la pensée « bien consolante » qu'il caressait de voir, un jour, leurs enfants « jouir du plésir de la liberté, fruit des travaux de leur pères », tout s'écroula brusquement le 10 thermidor.

Le 11, il écrit ce court billet à son frère — il ne veut pas paraître inquiet :

Au citoyen Trinchard, canonier.

« Mon fraire, Bouché te dira que je me porte bien. Je suis bien flaté que vous soiés ensemble. Les événemens qui vienne d'arriver doivet aprendre aux patriotes qu'il vaut mieux être l'ami de sa patrie que d'être jamais idolâtre des hommes, car la, patrie n'est pas capable de nous tromper et les hommes qui parlet tent de vertu sont tousjeour seux qui nous trompe avec le plus de perfidie.

« Ma femme se porte bien et te fais ses amitiés.

‘Salut et fraternité

« Ton fraire, TRINCHARD.

« Le 11 thermidor, 2e de la république une et indivisible[1] ».

 

Il avait des ennemis dans sa section. Au comité de Salut public, on l'en avait averti. La « clameur publique » le dénonça[2].

Le 10 thermidor, l'assemblée générale de la section du Muséum avait déclaré que Trinchard avait perdu sa confiance. Les motifs en étaient énumérés. « L'immoralité la plus vile, les passions les plus basses n'étaient rien en comparaison de la scélératesse insigne avec laquelle il perpétrait ses crimes ». Entièrement dévoué à Lescot-Fleuriot, son protecteur auprès de Robespierre, il se débarrassait aisément de la surveillance civique des patriotes de sa section en les faisant inscrire sur les listes de proscription que « l'infâme Robespierre » se faisait présenter par ses agents.

Juré au Tribunal révolutionnaire, il déclarait hautement qu'il ne s'agissait que d'être accusé pour être condamné. Il se glorifiait d'avoir voté seul contre des accusés que les autres jurés jugeaient innocents. Souvent même, il obligeait ses collègues à se ranger à son avis et répétait qu'on était plus embarrassé lorsqu'il n'y avait point de délit contre un prévenu que lorsqu'il y en avait, « parce qu'il fallait inventer un délit ».

Émule de Lumière, agent comme lui de Robespierre, de Fleuriot et d'autres de la même « clique », élevé par eux aux importantes fonctions de président de la Commission populaire, il copiait son attitude sur la leur. Il ne s'est occupé qu'à satisfaire ses vengeances personnelles et celles de ses amis.

Le 11 thermidor, en vertu d'un ordre donné, le jour même, par le comité de Sûreté générale, les membres du Comité révolutionnaire de la section du Muséum, Manus, Morisse, Bailleux, Sautter, se présentent au domicile de Trinchard, rue de la Monnaie, n° 19, au premier étage, pour le mettre en état d'arrestation. Ils demandent le président de la Commission populaire. Des voisins leur répondent qu'il n'y a personne. Immédiatement, ils requièrent un serrurie[3] qui appose une plaque sur la porte du logement. Mais une locataire, au deuxième étage, la citoyenne Madeleine Gaspard, femme de Claude Godiveau, apprend aux commissaires qu'il doit être à la Commission populaire et que sa femme est allée acheter des provisions.

Au moment où ces citoyens se disposent à se rendre au Muséum, la femme de Trinchard arrive. On lève la plaque apposée sur la porte du logement et la citoyenne est invitée à l'ouvrir.

Ils entrent et lui demandent où est son mari. Elle répond qu'il est à la Commission populaire où ils vont après avoir laissé la jolie femme du menuisier sous la garde de deux citoyens de la force armée.

A la Commission du Muséum, un garçon de bureau leur apprend que Trinchard vient de sortir. Mais, dans l'antichambre, ils le rencontrent. Trinchard les fait entrer dans son cabinet. Ils lui notifient l'ordre du comité de Sûreté générale et l'invitent à les accompagner chez lui pour la vérification de ses papiers.

Trinchard se rend aussitôt à cette invitation. Chez lui, les tiroirs et les casiers sont fouillés. Les membres du Comité saisissent sa correspondance et des notes prises par lui au cours des affaires où il a fait fonction de juré.

Ils lui demandent ses prénoms, lieu de naissance, profession et fortune. Il répond qu'il se nomme François Trinchard, qu'il est âgé de trente-trois ans, natif de Montpellier, menuisier de profession, président de la Commission populaire, qu'il ne jouit que des honoraires attachés aux fonctions de membre de cette Commission et du produit qu'il peut retirer de sa profession de menuisier[4].

En vertu des ordres donnés par le comité de Sûreté générale, il est mis en arrestation et incarcéré à la maison d'arrêt de Port-Libre où le concierge doit le tenir au secret[5]. Les scellés sont apposés sur ses papiers. Ceux qui sont considérés comme suspects sont apportés au Comité.

 

Le 13 thermidor, on reproduit contre Trinchard la dénonciation faite, cinq mois, auparavant par la citoyenne Françoise Seré au Comité d'épuration de la Société populaire du Muséum et qui dormait dans les cartons.

Traduit devant le nouveau Tribunal révolutionnaire, il y subit deux longs interrogatoires, les 6 germinal et 11 ventôse an III.

Durant les débats du long procès de Fouquier-Tinville et de ses vingt-trois coaccusés, Trinchard fut très malmené par l'accusation. Il nia énergiquement tous les faits d'inhumanité et d'immoralité qu'on lui reprochait. « Je prétends, dit-il, que, bien loin d'être un homme sanguinaire, ma conduite à la Commission populaire dément une telle assertion[6]. »

Comme Sezille, défenseur officieux, déclarait que l'ancien marquis de Montflabert, Leroy, surnommé Dix-Août, Trinchard, Prieur, Chrétien, Brochet et Ganney passaient pour être les jurés solides dans les grandes affaires et pour faire ce que Fouquier appelait familièrement ses feux de file, Trinchard déclara :

« Si on regarde comme solides ceux qui ont servi la patrie, je suis solide et je dois être regardé comme coupable[7]. »

Etienne Masson, ex-greffier du Tribunal, employé depuis le 9 thermidor au comité de Salut public, vint déclarer qu'il regardait Trinchard, Renaudin, Dix-Août, Châtelet, Gérard, Vilate et Prieur comme les plus « intrépides -chefs de file ».

 

Son rôle dans l'affaire Danton lui fut plus sévèrement rappelé. L'ancien greffier Pâris, dit Fabricius, le chargea sans ménagements. Ami de Danton, nommé par son influence à la place de greffier en chef du Tribunal, il avait témoigné son indignation lors du coup d'état judiciaire qui avait mis Danton et les dantonistes hors des débats. Même, on disait qu'il avait refusé de signer la minute du jugement. Révoqué six jours après la mort de son ami, il fut incarcéré.

 

Les accusations de Pâris sont formelles et précises. Elles viennent, par chocs successifs, sans violence apparente, redoutables en réalité, heurter l'épaisse solidité de ce juré « patriote ». Elles arrivent, l'une après l'autre, comme des vagues, submergeant ses moyens de défense qui sont toujours les mêmes : nier les faits ou affirmer son « humanité ».

Paris, dit Fabricius, dans l'exposé qu'il fait de l'organisation du Tribunal de la Terreur, est net, modéré, terrible. Il a l'air de faire un cours d'histoire pour les jurés du nouveau Tribunal. Il dit : « Le Tribunal étant composé en quatre sections, il devait y avoir un tirage de juges et de jurés. Au lieu d'un tirage c'était un triage qui se faisait ; cela se pratiquait surtout lorsqu'il y avait de grandes affaires à juger. Cela s'est pratiqué à ma connaissance dans l'affaire d'Hébert et Vincent et dans celle de Philippeaux, Camille, Danton et autres ; ce tirage fut fait par Fleuriot et Fouquier, dans la chambre du Conseil, en présence de plusieurs juges ; les jurés choisis étaient ceux que Fouquier appelait les solides, gens sur lesquels on pouvait compter : c'était Trinchard (il le nomma le premier), Renaudin, Brochet, Dix-Août, Prieur, Aubry, Châtelet, Didier, Vilate, Laporte, Gautier, Duplay, Lumière, Desboisseaux et Benard. Ces jurés, lorsqu'ils étaient de service, se rendaient le matin au cabinet de Fouquier où, souvent, étaient les juges de service ; là, il était question de l'affaire du jour ; c'était le mot d'ordre qu'ils allaient prendre ; de là, ils montaient à la buvette, ils se mettaient à la fenêtre pour voir passer Cl avec un plaisir barbare, les victimes qu'ils allaient immoler et contre lesquelles ils se permettaient des propos insultants ».

Il dit encore : « La parole fut ôtée à Danton. Herman et Fouquier entrèrent dans la chambre des délibérations et ordonnèrent aux jurés de se déclarer instruits. »

Herman nie. Paris reprend ; « Je le répète, Danton ne fut pas entendu, non plus que les autres accusés. On craignait même les témoins à charge ; un seul fut produit. Encore parla-t-il à la décharge de Danton. Il n'était pas aisé de trouver des témoins pour déposer contre de pareils hommes. »

Il dit enfin — et ses paroles semblent s'adresser non seulement au Tribunal devant lequel il dépose, mais encore à l'Avenir et à l’Histoire :

« Les jurés qui ont siégé dans l'affaire de Danton, Camille Desmoulins et autres sont Renaudin, Trinchard, Dix-Août, Ganney, Topino-Lebrun. »

Il ne nomme pas les autres.

 

Cambon, substitut de l'accusateur, démontre que Fouquier-Tin ville avait mis en jugement non seulement des paralytiques, mais encore un homme sourd, aveugle et en enfance, Durand-Pierre Puy-Deverine, âgé de soixante-neuf ans, ex-noble, ex-maître des comptes, guillotiné le 9 thermidor comme complice de la conspiration de Luxembourg.

Le gendarme Lhuillier vient attester que Trinchard, juré dans cette affaire, avait demandé à Puy-Deverine s'il était noble. Puy-Deverine, sourd, n'avait pas entendu et ne répondait pas. Trinchard lui avait demandé pourquoi il avait conservé des médailles sur lesquelles était la figure de Capet. La femme de Puy-Deverine avait répondu pour lui : « C'étaient des jetons à jouer, renfermés dans une bourse. » — « Les gens de votre caste sont toujours attachés à la royauté, avait répondu Trinchard : vous êtes coupable d'avoir laissé ces jetons à votre mari. »

— Le substitut Cambon : « Ceci nous rappelle les étiquettes en émail des vins de Bordeaux, de Champagne, de Bourgogne, trouvées chez un homme riche et que des juges, ignorants ou plutôt pervers, du Tribunal d'alors, traitèrent de signes de ralliement pour la chimère du fédéralisme ; comme ils prétendaient méchamment que des croix et des chapelets étaient des signes de ralliement de la Vendée ; ce qui fit périr une foule de religieuses et d'autres citoyens. »

— Trinchard : « J'ai fait mon devoir et ce que les lois m'ordonnaient et je croyais qu'outre les jetons il s'agissait de correspondances. »

— Un témoin : « Trinchard m'a dit : Nous ne cherchons pas des innocents, mais des coupables. »

— Trinchard : « Je nie ce propos. »

Enfin, poussé à bout, harcelé par l'accusation, par les témoignages, l'ancien juré s'écrie : « Un juré révolutionnaire n'est pas un juré ordinaire ; nous n'étions pas des hommes de loi, nous étions de bons sans-culottes, des hommes purs, des hommes de la nature. »

 

Il se défend d'avoir connu Robespierre. Il renie Lescot-Fleuriot, son protecteur. Il cherche à sauver sa tête.

Il y réussit. Le 17 floréal, bien que convaincu, à l'unanimité, d'être le complice des « manœuvres et des complots qui tendaient à favoriser les projets liberticides des ennemis du peuple et de la République », il est acquitté par le Tribunal. A la majorité de six voix, on reconnut qu'il avait « agi sans mauvaises intentions ».

Pourtant, il ne recouvre pas sa liberté. Comme il se trouvait, lors de sa mise en jugement, en état d'arrestation par ordre des comités de gouvernement, il est, en vertu d'un ordre du Tribunal, réintégré dans la maison d'arrêt où il avait été écroué.

Alors, commence pour lui une existence de détenu errant qu'on transfère, pendant quelques mois, de prison en prison. De Port-Libre, il passe, le 19 vendémiaire, an III, aux Anglaises de la rue de Lourcine, de là à Pélagie, enfin au Plessis, dans la maison de justice Egalité[8].

Mais il a des amis qui ne l'abandonnent pas. Son frère le canonnier ne néglige rien pour obtenir son élargissement.

Le 16 fructidor, an III, il s'adresse aux membres du Comité de Sûreté générale « avec la voix de l'amitié fraternelle et de l'humanité souffrante ». Les circonstances leur ont dicté, écrit-il, une cc mesure malheureuse » pour son frère : celle de le réintégrer dans une prison qu'il se « fait gloire de subir, par la douce espérance qui lui reste de pouvoir dire un jour qu'il ne l'avait pas méritée ». Mais ses affaires, son ménage sont dans un dépérissement cruel. Trinchard frère se porte garant des sentiments de l'ex-juré. Il s'offre même pour le remplacer. Peu lui importerait la privation de sa liberté s'il pouvait faire en sorte que celle de son frère fût consacrée au bonheur d'une femme et d'enfants qu'il chérit au-delà de toute expression.

Des prisons où il est détenu, Trinchard adresse mémoires sur mémoires aux membres du Comité de Sûreté générale, aux représentants de l'Hérault. Il s'ingénie à les intéressera sa cause.

Aux membres du Comité, il écrit de Pélagie, qu'uni à une jeune épouse qu'il aime tendrement, il menait la vie- la plus sobre et la plus retirée, tout adonné qu'il était à ses fonctions de juré, « le jour et une grande partie de la nuit ». A peine avait-il le temps de donner un « quart d'heure à ses repas ». Jamais ménage ne fut plus uni que le sien. Jamais homme ne fut plus cc réglé dans ses affaires ». Ses ouvriers, il les aimait comme lui-même. Il n'a jamais été lié avec Fleuriot et Lumière. On l'a calomnié. Jamais ces « individus » n'ont mis les pieds dans sa maison. Jamais il n'est entré dans les leurs. S'il a été juré au Tribunal, c'est que le sort l'a désigné.

« La Loi lui a dit : tu ne dois compte de ton opinion qu'à ta conscience et à l'Être Suprême. » Il a obéi à la loi. Bien loin d'avoir été l'agent de « l'infâme Robespierre », il en était l'ennemi. Quelques jours avant le 9 thermidor, c'est lui et Subleyras qui ont fait mettre en liberté de bons sans-culottes, membres du Comité révolutionnaire de l'Indivisibilité, arrêtés sur l'ordre de Robespierre. Ce n'est pas par un assemblage de mots plus ou moins méchants et qui ne respirent que la haine et la « vindication » qu'on peut perdre un patriote qui s'est « sacrifié » depuis le commencement de la Révolution.

De la prison du Plessis, il écrit aux représentants de l'Hérault pour les décider à intercéder en sa faveur. Il demande à être traité comme viennent de l'être les citoyens Duplay père et fils, ses compagnons d'infortune. La saison est rigoureuse. Il voudrait faire lever son secret, être transféré au Luxembourg « pour remettre un peu sa santé altérée, en respirant un air plus pur que celui qu'il respire ».

Il est stupéfait de se trouver encore en prison après avoir été acquitté. Il a neuf mois de détention et trente-huit jours de débats au Tribunal ! Pourquoi a-t-il été réincarcéré ? Il n'a rien compris, évidemment, à la réaction thermidorienne, ni à l'immense, à la violenté réprobation, au sentiment d'horreur dont lui et ses anciens collègues sont l'objet. La plupart d'entre eux ont payé de leur tête les crimes qu'ils ont commis contre l'Humanité. Lui, il vit. Il survit à l'écroulement du régime de terreur où il a joué un rôle. Et il ne s'étonne pas d'être encore vivant. Il s'étonne de ne pas être libre. Il gémit dans les fers. Il n'a été arrêté que par la provocation de quelques meneurs de sa section, dont plusieurs ont été mis depuis « en état d'arrestation pour avoir fait prendre des arrêtés liberticides ». Il espère que les députés considéreront sa position « ainsi que sa jeune et vertueuse épouse bientôt prête à accoucher, une- boutique abandonnée à des étrangers et n'ayant d'autre ressource que celle du travail de ses mains ». Il sait que ces représentants du peuple ont toujours été les amis, les pères, les défenseurs des « enfants de Montpellier D. Il attend d'eux qu'ils rendent « un patriote à la société, un mari à sa chère épouse et un ouvrier à l 'industrie[9] ».

« J'ai passé, écrivait-il aux membres du Comité de Sûreté générale, au creuset d'épuration le plus ardent et le plus redoutable ; mon jugement d'acquit, dont je joins ici une expédition, en est la preuve. Je réclame donc ma liberté. Citoyens représentants, j'ai eu le bonheur d'être père au moment même où la mort planait sur ma tête. Simple artisan et peu favorisé de la fortune, ma liberté assurera mon existence. Je n'en ferai usage que pour servir ma patrie, vivre en bon citoyen et respecter la Loi. »

La liberté fut rendue à cet « homme de la nature ». Le 19 vendémiaire an IV, le Comité de Sûreté générale arrêtait que François Trinchard, de Montpellier, acquitté le 17 floréal de l'année précédente, serait mis, sur-le-champ, en liberté et que les scellés seraient levés chez lui.

 

Pendant quelque temps nous perdons la trace de Trinchard. Un voile d'obscurité couvre la vie de l'ancien juré. Il semble vraisemblable qu'il chercha l'oubli sans plus prétendre à « servir sa patrie », — lorsqu'il fut rendu à la liberté, à l'amitié de son fidèle Ploton et à la tendresse de sa jolie épouse, « temple de Vénus, déesse de l'Amour ».

Mais, quelques mois après, le 23 ventôse, une note de Marné, attaché à la police secrète du Directoire exécutif, nous apprend que le Messager du Soir « l'arrangeait de la belle manière en le traitant de chef d'une police de terroristes. » Il en donne la raison : un de ses employés, Trinchard, était celui qui avait arrêté le rédacteur du Messager, M. Langlois[10].

Trinchard était devenu agent de la police secrète du Directoire.

Il accomplissait sa destinée.

 

FIN DE L'OUVRAGE

 

 

 

 



[1] Archives nationales, W, 500, pièce 13fi.

[2] Archives nationales, W, 500, pièce 141.

[3] Etienne Le Tanneur, demeurant rue Etienne, chez le citoyen Toffard.

[4] Archives nationales, W. 500, pièce 142.

[5] Archives nationales, F⁷ 3475³⁴.

[6] Procès de Fouquier. Bûchez et Roux, t. XXXIV. p. 464.

[7] Bûchez et Roux, t. XXXV, p. 75.

[8] Archives nationales, F⁷ 4475³⁴.

[9] Archives nationales, W, 500, pièce 127.

[10] Aulard, Paris pendant la réaction thermidorienne et sous le Directoire, t. III, p. 53.