I. Camp de Glorieux et de Regret. La pluie. La courée prussienne. Hostilité de la population. — II. Les officiers prussiens à Verdun. Les Verdunoises. Le prince royal et Mlle Morland. Conversations du témoin oculaire et du ferblantier Pierrot. — III. Conseil de guerre du 1er septembre à la côte Saint-Michel. Discours de Brunswick. Réponse des émigrés. Leur influence sur Frédéric-Guillaume. Hésitations de Brunswick. Sentiments de l'armée. La marche en avant est résolue. On écrasera d'un seul coup Dumouriez et Kellermann. — IV. Le plan de Brunswick. Tourner la position. Etape à Valmy. Dispositions. Hohenlohe-Kirchberg et le landgrave de Hesse aux Islettes. Démonstrations de Kalkreuth et de l'avant-garde prussienne. Rôle de Clerfayt.I. Le jour même où Dillon arrivait aux Islettes, l'armée prussienne passait la Meuse (5 sept.). Le général Köhler resta seul à Haudiomont avec dix escadrons et deux bataillons pour observer de loin la route de Metz et les mouvements de Kellermann. L'avant-garde de Hohenlohe occupa les hauteurs de Sivry-la-Perche, et envoya sa cavalerie, ses fusiliers, ses chasseurs à Bethelainville, à Dombasle, à Rampont : elle tenait ainsi la route de Clermont et de Sainte-Menehould. Le corps de Kalkreuth, qui campait, depuis le 31 août, à Sivry-la-Perche, se porta plus haut, sur la route de Varennes, le centre à Marre, la droite à Chatancourt et à Cumières, la gauche à Montzéville. Le gros de l'armée quitta le camp de Bras en trois colonnes ; deux passèrent la Meuse sur des pontons près de Charny et de la ferme de Wameaux, la troisième traversa Verdun, de la porte Chaussée à la porte de France. Les trois colonnes s'établirent en avant de Glorieux, de Regret et de Jardin-Fontaine qui forment ensemble un des faubourgs de Verdun. Le roi de Prusse et le due de Brunswick fixèrent leur quartier-général, le premier à Regret et le second à Glorieux[1]. Le corps de bataille garda cette position jusqu'au 10 septembre. Le temps restait sombre et pluvieux. Nos tentes, dit Gœthe, dont le régiment campait à Jardin-Fontaine, étaient dans l'état le plus lamentable ; les cordes se pourrissaient et se rompaient l'une après l'autre ; la toile battait la tête et les épaules du soldat[2]. La dysenterie, ou, comme on l'appelait dans le Verdunois, la courée prussienne, faisait de jour en jour des progrès. Le soldat mangeait imprudemment des pommes de terre et des raisins qui n'étaient pas encore mûrs. Bientôt la moitié des compagnies fut presque incapable de service ; on recourut vainement au poivre et au galanga ; tout le front de notre camp, écrit un témoin oculaire, était couvert d'excréments[3]. L'hôpital, installé dans une grande caserne, se remplissait de malades — 200 à 300 dans certains régiments — et les visiteurs n'en sortaient qu'avec un profond sentiment de tristesse et de dégoût[4]. Le grand parti qui devait se prononcer contre la Révolution, ne se montrait pas. La population attendait l'issue de l'entreprise ou ne cachait pas son affection pour le nouveau régime. On commençait à voir que les gens même qui n'aimaient pas le 10 août, haïssaient plus encore l'étranger et l'émigration. On acquérait la certitude que pas un soldat ne passerait dans le camp prussien. Les administrateurs de Bar-le-Duc, Ternaux et Gossin, que Brunswick avait mandés à Verdun, refusaient de signer les réquisitions qu'on leur présentait et répondaient à toutes les menaces qu'ils ne pouvaient ni ne devaient engager d'aucune manière leur conscience. Les patriotes, enfermés dans la citadelle de Verdun, criaient aux Prussiens, à travers les barreaux de leurs fenêtres : Nos ennemis se retireront, et bientôt nous serons libres. Le lieutenant Minutoli avait fait prisonniers, dans un village des environs, deux volontaires ; l'un d'eux monta sur une borne, harangua les habitants, et leur affirma que rien n'était perdu, que les Prussiens ne pourraient pénétrer dans le cœur du pays sans courir les plus grands risques. Tant de signes, remarque Minutoli, nous prouvaient malheureusement que la France n'était rien moins que royaliste[5]. II. Pourtant cette première semaine de septembre qui fut une halte en pleine invasion, ne laissa que d'agréables souvenirs aux officiers prussiens. Dès qu'ils avaient, après le service, quelques instants de loisir, ils venaient à Verdun et couraient la ville, tantôt achetant des dragées ou des liqueurs qu'ils envoyaient à leurs amis d'Allemagne[6], tantôt s'attablant dans les hôtels, tantôt causant de la guerre et de la Révolution avec les habitants. Ils buvaient avec plaisir le vin de Bar-le-Duc, ce petit vin de pays qu'on doit goûter sur place. Il fallait, à chaque repas, apporter avec soi sa fourchette et son couteau, mais la cuisine française était si bonne ! Ils regardaient volontiers les jeunes servantes de la Lorraine, vives, accortes, résolues. Ils admiraient la beauté des Verdunoises, et Gœthe rapporte qu'ils ne tarissaient pas en éloges sur la grâce de ces charmantes enfants. Elles ont, disait l'un d'eux, les cheveux et les yeux noirs, et la peau blanche comme la soie. Mais ce qui frappait surtout nos ennemis, c'était la dignité des Françaises, leur politesse aisée, leurs manières toutes pleines de simplicité et de pudeur. Les jeunes filles avaient une grande liberté ; on pouvait s'entretenir avec elles en l'absence de leurs parents, mais elles causaient avec autant de modestie et d'enjouement que si leur mère eût assisté à la conversation. Elles ne cherchent pas, raconte un officier, à briller par la toilette et ne semblent avoir aucune idée de coquetterie ; même dans les classes les plus pauvres de la société, elles savaient garder la réserve de leur sexe sans montrer le moindre embarras[7]. Le prince royal, se promenant un jour sur la grande route, rencontra des dames de Verdun qui venaient au camp prussien. Il lia conversation avec elles, mit pied à terre pour mieux causer, et, tenant son cheval par la bride, les accompagna quelque temps. Une blonde de dix-sept ans le charma par sa figure piquante et sa douceur ; il lui demanda la permission de la revoir. La mère, qui se nommait Mme Morland, n'osa refuser ; elle avait deux filles ; la cadette était celle qui plaisait au jeune prince ; l'aînée, mariée à un M. de la Platière, habitait Paris et eut la bonté, dit le futur Frédéric-Guillaume III dans ses Réminiscences, de me donner son adresse la veille de mon départ[8]. Le prince fit de fréquentes visites aux dames Morland qui demeuraient dans la rue de la Belle-Vierge ; c'est d'une fenêtre de leur appartement qu'il vit l'entrée de Monsieur à Verdun[9]. Au retour, il s'écarta de son chemin pour dire adieu à Mlle Morland, qui lui donna, comme souvenir d'amitié, quelques sous neufs de la République. Le prince les conserva, et lorsqu'il rédigea, dans les premières années de ce siècle, son journal de la campagne de 1792, il écrivit ces lignes où perce encore une tendre émotion : J'ai gardé ces pièces en l'honneur de Mlle Morland ; son souvenir m'offre constamment un vif intérêt, et je pense à cette époque avec reconnaissance et grand plaisir. Qui sait ce qu'elle est devenue, elle et sa famille ![10] D'autres officiers s'entretenaient avec les habitants. Le témoin oculaire raconte longuement ses conversations avec le ferblantier Pierrot qui demeurait aux Petits Escaliers. Ce ferblantier avait lu l'Essai sur les privilèges, de l'abbé Sieyès, le traité des Droits et des devoirs du citoyen, de Mably, et l'Essai du catéchisme national. Il dissertait avec l'officier sur la Révolution. Comme il arrive souvent aux contemporains, le Français et le Prussien attribuaient à de minces événements une importance excessive et ne saisissaient pas les causes profondes de ce grand mouvement. Pierrot possédait un exemplaire des Mémoires récemment publiés par Soulavie sous le nom de Maurepas ; il lisait à l'officier les passages relatifs au régiment de la calotte, à ses épigrammes, à ses chansons qui n'épargnaient personne. L'officier parlait à son hôte de l'affaire du collier qui lui semblait avoir une conséquence infinie[11]. Il discutait avec lui sur la meilleure forme de gouvernement. Pierrot lui soutenait qu'un homme ne doit pas exercer la puissance souveraine et que les élus de la nation ont seuls le droit de faire les lois ; la loi est un remède, disait-il, et ce remède ne peut être dicté que par les plus habiles de la nation, qui seuls connaissent le mal et la plaie. L'officier lui citait la Bible et saint Paul qui déclare que chacun doit obéir à l'empereur : Remarquez, ajoutait-il, qu'au temps de saint Paul régnaient les plus despotiques des Césars... — Je suis le très humble serviteur de votre Bible, répondait Pierrot, mais ce livre commence à passer de mode. Quant à votre Paul, il ne prêchait l'obéissance à l'empereur que pour éloigner des chrétiens tout soupçon de révolte ; mais je parie qu'il ne cherchait qu'à gagner du temps et qu'en secret il recommandait à ses disciples de ne pas prendre son précepte au pied de la lettre. La puissance souveraine repose sur le droit du plus fort qui n'est autre que le droit des tigres, ou sur le droit de la guerre que le vainqueur exerce contre les vaincus. Henri II pouvait user de ce droit à Verdun ; mais Louis XVI ne le pouvait pas, et il fit peut-être plus de mal aux Verdunois que n'en fit Henri II ; c'était un despote. — Qu'entendez-vous par un despote ? — C'est un homme qu'on nomme souverain et qui maltraite son peuple, malgré les lois de la nature ; tous nos Louis ont été des despotes. L'officier défendait Louis XVI et objectait à Pierrot que les ministres avaient abusé de la faiblesse du monarque. Eh bien ! répliquait le ferblantier jacobin, un despote est un malheur pour le pays, mais c'est un double malheur, s'il a le caractère faible, car l'État est en proie, non plus à un tyran, mais à une foule de tyranneaux. Grâce au ciel, nous n'avons plus de roi ! — Mais si nous rétablissons Louis XVI. — Jamais, s'écriait Pierrot, jamais la France De redeviendra un pays d'esclaves. Votre roi de Prusse est, dit-on, un brave homme ; mais je vois avec peine qu'il s'efforce de nous remettre sous le joug. Sachez-le bien, il lui est tout aussi impossible de restaurer Louis XVI que de régner lui-même sur la France[12]. III. Que faisait cependant le quartier général prussien durant ces précieux jours du 2 au 8 septembre que Dumouriez avait su mettre à profit avec tant de promptitude et de hardiesse ? Ou se rappelle le plan du circonspect Brunswick. S'emparer de Sedan qui deviendrait la principale place d'armes des alliés et le centre de leurs quartiers d'hiver, de Montmédy, de Mézières et de Givet, s'assurer une base solide d'opérations pour la campagne prochaine, tel était le dessein de Charles-Ferdinand[13]. Il voulait entreprendre une guerre de sièges, et non une guerre de campagne Il exposa ses intentions le 1er septembre, avant la reddition de Verdun, au camp de la côte Saint-Michel, dans la tente du roi, après le diner. Les princes de Hohenlohe, de Bade, de Nassau-Siegen, les émigrés Lambert et Pouilly, plusieurs autres officiers de l'armée prussienne assistaient à ce conseil de guerre improvisé. Brunswick déclara que depuis le 10 août, le parti royaliste, écrasé, ne pouvait plus servir la cause des alliés. Il se plaignit des émigrés qui tenaient si mal leurs promesses. Ils affirmaient que tous les espoirs et tous les cœurs se tournaient vers l'ancien régime. Mais on n'avait éprouvé partout que de la froideur et même de l'hostilité. Où étaient ces populations qui appelaient unanimement de leurs vœux secrets l'arrivée des alliés ? Où étaient ces paysans, ces habitants des villes qui n'attendaient que l'approche du roi de Prusse pour faire éclater hautement leurs sympathies monarchiques ; ces commandants de forteresses qui devaient se rendre au premier coup de canon ; ces troupes de ligne qui s'empresseraient de se ranger sous le drapeau des coalisés, dès qu'ils auraient franchi la frontière ? Et l'on voulait marcher sur Paris ! Je ne désire pas, ajouta Brunswick, pousser cette pointe téméraire[14], ni laisser derrière nous ou sur nos flancs plusieurs places importantes. Il montra qu'on devait donner aux opérations une direction systématique, que la saison était déjà fort avancée, que la pluie gâterait entièrement les routes et rendrait plus difficiles la marche des troupes et le transport des vivres, enfin que les maladies sévissaient déjà dans l'armée et la désoleraient de plus en plus, à mesure qu'elle pénétrerait dans l'intérieur de la France. Au lieu de s'engager en Champagne, sous les averses continuelles, dans des chemins rompus qui retarderaient les convois, il valait mieux se saisir de toutes les forteresses de la Moselle et de la Meuse. Pendant que les Hessois du landgrave et les Autrichiens de Hohenlohe-Kirchberg mettraient le siège devant Thionville et Metz, l'armée prussienne, une fois Verdun rendu, remonterait vers le Nord, parallèlement à l'Argonne, s'emparerait de Montmédy, de Sedan, de Mézières et, soutenue par Clerfayt, irait au-devant de Saxe-Teschen qui devait assiéger Lille et pousser jusqu'à Givet. Les Prussiens seraient ainsi couverts sur leurs flancs par deux armées autrichiennes ; ils prendraient à revers les places fortes du Nord ; ils passeraient l'hiver sur la rive droite de la Meuse et au printemps de 1793, après s'être reposés et avoir reçu des renforts, ils marcheraient à des conquêtes presque certaines. Le roi n'assistait pas à l'entretien. Aussi Brunswick s'exprimait-il avec chaleur et véhémence ; il parlait si haut que le prince royal l'entendit du dehors. Mais Lambert, Pouilly, Nassau-Siegen ne partageaient pas l'opinion du général en chef. Selon eux, il fallait percer dans le cœur du pays et refouler devant soi, sans leur laisser le temps de respirer, les troupes françaises qui tentaient de s'opposer au passage des alliés. Pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? La durée même de l'entreprise en augmentait les périls. On faisait une conquête, et toute conquête doit être rapide. Les places de la Meuse se rendraient elles aussi facilement que Longwy ? Avait-on la certitude de ne rencontrer devant les forteresses qu'une faible résistance ? Montmédy se défendrait peut-être avec vigueur. Sedan et Mézières, si mauvais que fussent leurs ouvrages et si imparfaits que fussent leurs remparts, n'ouvriraient peut-être pas leurs portes sur une simple démonstration. Il faudrait donc passer l'automne à investir et à prendre des villes ! Le plan du duc de Brunswick était conforme aux règles de la tactique ; mais, ajoutaient Nassau et ses amis, la guerre qu'avaient commencée les coalisés, n'était pas une guerre ordinaire ; dictée par la politique, elle devait s'inspirer uniquement de la politique, et non des principes de la stratégie. Laisser derrière soi les places fortes et les garnisons, se contenter de Longwy et de Verdun qui suffisaient pour rétablissement des magasins et, le cas échéant, pour la retraite, fondre sur la Champagne comme un torrent qui déborde et que rien ne peut contenir, dissiper l'armée française en une seule bataille dont le gain était assuré par la discipline des soldats et les talents de leur général, ne frapper qu'un seul coup, mais un coup décisif, remporter en rase campagne une de ces victoires éclatantes qui changent en un moment la face des choses, tel était le plan des émigrés[15]. Ce conseil de guerre dura plusieurs heures et, après une vive discussion, on se sépara sans avoir rien décidé. Mais Verdun se rendit le lendemain, et la capitulation de la seule forteresse qui barrait le chemin de la capitale, augmenta la confiance des audacieux. Le roi de Prusse crut désormais qu'avec sa petite armée il déciderait du sort de la France. Les plus glorieuses images s'offraient à sou esprit : une campagne rapide qui l'égalerait à Frédéric II, le rétablissement d'un trône renversé, la reconnaissance de Louis XVI et de Marie-Antoinette, les acclamations qui salueraient son entrée dans Paris. Il combattit le plan du généralissime. Les émigrés qui formaient ses entours, l'encourageaient dans sa résolution ; ils vantaient son esprit chevaleresque, ils exaltaient la générosité prussienne, ils répétaient que la guerre régulière et méthodique ne mènerait à rien. Nassau-Siegen affirmait que les troupes prussiennes étaient les meilleures qui fussent dans le monde, et que tout devait céder à leur approche. Le baron de Roll et le baron de Breteuil joignaient leurs excitations aux discours de Nassau. Breteuil représentait au roi de Prusse les dangers que courait Louis XVI ; il s'agissait, disait-il, de sauver à l'infortuné monarque et la couronne et la vie. Quelle gloire pour Frédéric-Guillaume de restaurer le descendant de Louis XIV, de le tirer de la captivité, de l'arracher à la mort dont les jacobins le menaçaient ! Quel beau spectacle il donnerait à l'univers ! L'Europe entière admirerait la grandeur d'âme du roi de Prusse. Mais il fallait se hâter ; on devait, dans l'intérêt même de la politique prussienne, aller droit à Paris. Si l'on perdait du temps, Louis XVI et le Dauphin seraient immolés par la populace, et le comte de Provence, devenu roi, verrait-il dans Frédéric-Guillaume un bienfaiteur ? Lui saurait-il gré de ses sacrifices ? Non ; il serait ingrat, il se souviendrait seulement que les alliés l'avaient réduit à ne jouer durant l'expédition qu'un rôle subalterne[16]. Frédéric-Guillaume déclara qu'on irait de l'avant ; il savait, rapporte Nassau-Siegen, les jours de Louis XVI en danger, et désirait que l'on marchât sur Paris dans l'espoir d'en imposer davantage aux factieux. Comme toujours, Brunswick n'osa contredire le roi, et abandonna son plan qui était le plus sage. A Verdun, comme à Coblenz et à Trêves, il maudissait l'influence de ces gentilshommes français dont les promesses enivraient Frédéric ; mais il n'avait pas le courage de la combattre[17]. Toutefois, il ne se soumit pas sur le champ à la décision
du monarque. Plusieurs jours s'écoulèrent avant que Charles-Ferdinand eût
adopté le parti qu'il désapprouvait au fond du cœur. Il n'avait encore aucune
nouvelle des mouvements de Dumouriez et de Kellermann. Il devinait que, s'il
marchait sur Châlons, les deux généraux se jetteraient sur ses derrières. Pouvait-on passer la Meuse, s'écrie un officier
d'état-major qui fut le confident de Brunswick, tant
qu'une armée française était à Sedan et une autre à Metz ? Ceux qui
prétendent qu'on devait se diriger sur l'Argonne, dès le lendemain de la
reddition de Verdun, ont appris l'art de la guerre chez les Iroquois ![18] Brunswick attendit donc les événements. En vain Kalkreuth, qui comprenait l'importance des Islettes, disait hautement que le succès de la campagne dépendait peut-être de l'occupation de ce défilé. En vain, il envoyait un aide de camp et l'émigré Valory demander au duc la permission de se rendre maitre du passage[19]. Brunswick résistait aux instances réitérées de Kalkreuth. Il promettait d'exécuter le plan du roi, mais, convaincu que son souverain se trompait, il cherchait à gagner du temps et, au lieu de presser le départ de l'armée, s'efforçait de le retarder. Il faisait passer les troupes sur la rive gauche de la Meuse, mais les tenait immobiles dans leur camp. Il regardait en arrière, et non en avant. Il sondait tous les chemins, excepté le grand chemin de Paris. Les Verdunois commençaient à croire que les Austro-Prussiens se borneraient à la guerre de forteresses ; je viens d'apprendre, écrivait Gossin le 7 septembre au directoire de Bar-le-Duc, que, quelque chose qu'il arrive, les troupes prussiennes séjourneront sur la Meuse. Les généraux français étaient du même avis ; si Brunswick voulait aller à Paris, mandait Kellermann au ministre de la guerre, il se serait mis en marche le même jour qu'il a eu Verdun[20]. On n'ignorait pas dans l'armée prussienne le débat qui s'était engagé au quartier-général sur cette grande question de la marche sur Paris. On confondait plaisamment les noms de Glorieux et de Regret qu'on déclarait prédestinés ; le hasard, disait-on, se plaît à ces coïncidences, il fait loger à Glorieux le roi ardent et avide de renommée, et à Regret le duc qui n'entreprend la guerre qu'à contre-cœur. Gœthe, voyant passer Frédéric-Guillaume et Brunswick, demandait ironiquement à ses amis quelle est celle de ces deux puissances qui prime l'autre, et laquelle décidera dans les cas douteux ?[21] Mais le parti de l'audace l'emportait sur le parti de la prudence. Nous voilà maîtres, écrivait le duc de Weimar, de la dernière forteresse qui pût arrêter notre course ; si les Français ne se présentent pas en rase campagne, ils sont perdus ; s'ils se présentent, ils n'en seront pas mieux lotis[22]. Dès le 4 septembre, les compagnons de Gœthe pensaient qu'il fallait s'avancer aussi vite que possible dans la direction de Paris, sans se soucier de Sedan et de Montmédy. Moi-même, avoue Gœthe, j'avais dans l'armée prussienne et le duc de Brunswick une confiance sans limites, et il mandait au conseiller Schmauss : nous laisserons Verdun derrière nous pour marcher contre les rebelles ; Paris en est venu à ce point de trouble et de folie que les deux partis béniront certainement la puissance qui y rétablira le repos, n'importe a quel prix[23]. Les officiers ne parlaient que du Palais-Royal et de ses plaisirs qui les dédommageraient bientôt de leurs fatigues. Les soldats se demandaient les uns aux autres combien il restait de lieues à faire jusqu'à Paris. Seuls, quelques vétérans hochaient la tête et rappelaient que les Français tenaient le même langage pendant la guerre de Sept-Ans et s'informaient a chaque pas s'ils étaient encore loin de Magdebourg et de Berlin[24]. Je suis très éloigné de croire, assurait le prince Auguste de Gotha, qu'on arrive à Paris sine vulnere et cœde ; ces messieurs comptent sans leur hôte[25]. La marche en avant fut résolue. Brunswick connaissait enfin les desseins de Dumouriez et de Kellermann ; il avait appris que le premier s'était porté de Sedan sur l'Argonne et que le second suivait la route de Toul et de Bar-le-Duc pour se réunir à son collègue. Désormais, comme disait Massenbach, il était facile de résoudre le problème. On avait hésité jusqu'alors à battre les deux généraux isolément, car, si l'on attaquait Dumouriez, Kellermann se jetait sur les derrières des alliés et coupait leurs communications avec Luxembourg et Trêves ; si l'on assaillait Kellermann, Dumouriez faisait la même manœuvre et s'emparait de Longwy. Mais les deux généraux français avaient quitté leurs positions ; on n'ignorait pas le chemin qu'ils avaient pris ; on savait que ni l'un ni l'autre ne pourraient désormais interrompre ou menacer les opérations de l'armée austro-prussienne, une fois qu'elle serait en pleine marche ; on était maître de ses mouvements. Les visages, rapporte Massenbach, se rassérénèrent et notre courage, un instant indécis, fut ranimé. Dumouriez et Kellermann, opérant leur jonction, tenteraient d'arrêter de concert les coalisés soit dans l'Argonne soit au passage de la Marne. Tant mieux ; les Français, ajoute l'officier prussien, nous faisaient la partie belle ; ils venaient se concentrer à notre portée et comme sous notre main ; on les écraserait d'un seul coup. Brunswick, a dit Peltier, se flatta de pouvoir terminer la campagne par un succès complet en resserrant les ennemis qui venaient tous se rassembler entre Clermont et Châlons ; il voulait détruire à la fois toutes leurs meilleures troupes[26]. Ce plan est longuement développé dans une missive en allemand, adressée par Esterhazy au référendaire Spielmann. Cet officier-général autrichien venait de rendre visite à Hohenlohe-Kirchberg et s'était entretenu à Luxembourg avec Lafayette prisonnier. Il écrivit, à son retour dans le Brisgau, ce qu'il avait vu et entendu. Sa lettre nous fait juger des sentiments de l'état-major et des projets qui s'agitaient dans les entours de Brunswick et de Frédéric-Guillaume ; elle nous découvre les espérances qu'échauffaient chez les Prussiens leurs premiers succès et les promesses inconsidérées de l'émigration ; l'avenir devait troubler ces belles combinaisons et déconcerter tous ces calculs, mais il est intéressant de les connaître. Je sais bien, dit à peu près Esterhazy, qu'on pourrait s'arrêter sur les bords de la Meuse et se contenter des avantages certains d'une première campagne. Mais la situation de Louis XVI est horrible et sans exemple ; elle nous force à passer par dessus tout et à prendre une résolution extrême. Il faut, ajoute l'Autrichien, mettre fin et à la guerre et aux horreurs de Paris, donner aux factieux le coup de grâce avant l'hiver, ne pas leur laisser le temps de revenir à eux-mêmes, enfin éviter une seconde campagne. Nous devons donc réunir toutes nos forces puisque l'ennemi réunit toutes les siennes et permettre même aux deux ailes de l'armée française, jusqu'ici séparées par les premiers coups de l'invasion, de se joindre l'une à l'autre. Nous devons marcher droit à l'adversaire, le serrer de près, le battre, le disperser, répandre jusque dans Paris la crainte et l'effroi. Sans doute les troupes des rebelles occupent de fortes positions et disposent d'une nombreuse artillerie ; mais elles sont désorganisées et n'ont que des généraux très médiocres ; elles ne tiendront pas, elles abandonneront l'Argonne et se replieront sur Châlons. Il est vrai qu'elles se grossiront de la masse des sans-culottes qu'on rassemble dans cette ville. Mais quelle triste ressource ! Le pays de Sainte-Menehould à Châlons n'est qu'une plaine où de pareilles armées ne peuvent se poster et affronter une attaque. Elles seront contraintes de refluer vers Paris ; elles tenteront de se défendre dans la capitale avec l'aide de la populace, et on rapporte que le nouveau gouvernement a fortifié Montmartre et garni les hauteurs d'un grand nombre de canons. Mais il sera facile d'affamer et les troupes et la population, car on sera maître des rivières, et les guerres précédentes nous ont appris qu'on peut aisément couper les vivres aux Parisiens[27]. IV. L'armée prussienne ne pouvait marcher sur Châlons et de là sur la capitale que par deux routes. La première passe par le défilé des Islettes et Sainte-Menehould ; la seconde, par Bar-le-Duc, Revigny-aux-Vaches et Vitry-le-François. Cette dernière route était celle que suivait Kellermann ; les Prussiens l'auraient rejointe soit à Bar, soit à Revigny, soit entre ces deux endroits, par Nixeville, Souhesmes, Ippécourt et Chaumont-sur-Aire. Brunswick pensa quelque temps à la prendre. Des officiers de l'état-major allèrent reconnaître le pays entre Verdun et Bar-le-Duc ; on les vit courir dans la campagne, tenant à la main leurs chapeaux dont les galons éclatants auraient trahi au loin leur présence[28]. Mais s'engager sur ce chemin, c'était s'éloigner des Pays-Bas autrichiens et de Clerfayt qui campait près de Stenay ; c'était alarmer Kellermann qui s'empresserait de se rejeter sur Toul et sur Metz ; or les Prussiens comptaient que Clairfayt formerait leur aile droite, et loin d'empêcher la jonction de Dumouriez et de Kellermann, ils voulaient la favoriser pour accabler l'armée française réunie. L'autre route qui menait de Verdun à Châlons par Sainte-Menehould, était bouchée, depuis que l'avant-garde de Dumouriez avait pris possession des Islettes. Le 7 septembre, Brunswick et le roi se rendirent à Clermont ; ils gravirent la hauteur ; ils virent au loin la côte de Biesme couverte de troupes ; ils apprirent, en questionnant des gens du pays, que les Français avaient déjà construit des retranchements et dressé des batteries. Le duc se repentit alors de n'avoir pas écouté les conseils de Kalkreuth. Mais il était trop tard. Il n'essaya même pas de s'emparer du passage. Il craignit de perdre trop de monde dans une attaque où son armée serait exposée au feu plongeant de l'artillerie française, et, désespérant d'emporter de vive force la position, il préféra la tourner. C'était la manœuvre favorite des Prussiens ; la position des Français est bonne, disait-on au quartier-général, mais on peut la tourner en trois marches, et on la tournera[29]. Dumouriez tenait, outre les Islettes, Grandpré, la Croix-aux-Bois et le Chesne-Populeux. On forcerait un de ces trois passages, et la prise d'un seul défilé entraînant la prise des deux autres, on franchirait l'Argonne en trois endroits différents ; on longerait la chaine des collines jusqu'à la hauteur des Islettes désormais impuissantes, et, comme un voyageur qui biaise lorsqu'il rencontre une barrière et ne s'écarte de sa route que pour la regagner plus loin, on rentrerait, après un détour de quelques lieues, dans le grand chemin qu'on avait quitté à Verdun, dans le chemin qui mène à Châlons et de Châlons à Paris. Le duc, consultant la carte, posait le doigt sur Valmy, près de Sainte-Menehould ; c'était là qu'il s'arrêterait pour ravitailler son armée ; il y serait le 15 ou le 16 septembre[30]. Il ne se doutait guère que ce village qu'il regardait comme une simple étape, serait le champ de bataille où l'armée française repousserait l'invasion prussienne, et que le nom de cette humble bourgade, où devait avoir lieu, contre toute prévision, le dénouement de la campagne, serait bientôt aussi fameux que celui de Leuthen et de Rossbach. Ce plan arrêté, Brunswick prit ses dispositions, mais, comme à son ordinaire, lentement, prudemment, sans déployer la hâte fébrile de Dumouriez et son infatigable activité. Même à cette heure décisive, il hésitait encore, semblait agir avec mauvaise grâce et faire une tâche déplaisante. A voir ses délais et ses atermoiements, on sent que sa raison, son bon sens, son instinct militaire le retiennent sur les bords de la Meuse. Il pourrait, par la célérité de ses mouvements, diminuer les risques qu'il prévoit ; il perd le temps en longs préparatifs ; au lieu de payer d'audace et de marcher résolument, il tergiverse et s'attarde. Il fit de Verdun le centre des ravitaillements de son armée. Il ordonna de cuire du pain pour neuf jours. Il laissa dans la citadelle une garnison de deux bataillons commandés par le général de Courbière[31]. Il réunit toutes les troupes dont il pouvait disposer. Je suis sûr, écrivait-il au major Tauenzien, le 7 septembre, que les armées ennemies se rassemblent entre Châlons et Sainte-Menehould et qu'elles ont des retranchements dans la forêt ; il est donc de la plus grande importance de rassembler toutes nos forces pour les en chasser[32]. Il assigna sa tâche et sa place à chacun de ses corps : les Hessois du landgrave et les Autrichiens de Hohenlohe-Kirchberg observeraient les Islettes, sans les attaquer, et s'empareraient de ce passage, dès que Dillon, tourné sur ses derrières, serait contraint de l'abandonner ; le gros des Prussiens marcherait sur Grandpré ; la cavalerie des émigrés se dirigerait vers le Chesne-Populeux ; les Autrichiens de Clerfayt, soutenus par Kalkreuth, forceraient le débouché de la Croix-aux-Bois. Hohenlohe-Kirchberg devait d'abord couvrir le flanc gauche de l'armée prussienne. Il avait franchi le Rhin à Mannheim (2 août), et, traversant la région qui forme aujourd'hui la Bavière rhénane, le sud de la province du Rhin et le grand-duché de Luxembourg, passant par Kaiserslautern, Hombourg, Merziget Remich, négligeant les deux places de Landau et de Sarrelouis, il venait d'entrer en France le 26 août, après une marche de trois semaines, et d'investir Thionville. Brunswick lui commanda, le 7 septembre, de se porter sur Clermont-en-Argonne avec le plus de troupes qu'il pourrait, de ne laisser devant Thionville que l'infanterie des émigrés et une faible division sous les ordres du feld-maréchal Wallis pour combler les vides que ferait son départ dans l'armée assiégeante, d'appeler sur la Moselle le corps autrichien que le général d'Erbach commandait à Spire[33], Hohenlohe-Kirchberg n'obéit qu'à regret ; il craignait, disait-il, et non sans raison, de laisser à l'ennemi les mains libres pour agir sur les derrières des alliés ; il valait mieux, selon lui, attaquer Metz et Sedan ; on obligerait ainsi les armées françaises à venir au secours de ces deux places ; on aurait l'occasion de donner bataille ; on prendrait ces deux importantes forteresses, en même temps que Thionville. Mais Brunswick répondit que des circonstances très pressantes rendaient la marche en avant nécessaire ; Hohenlohe-Kirchberg se rendit à Clermont-en-Argonne avec six bataillons et quatorze escadrons[34]. Les Hessois avaient franchi, le 30 août, la frontière française à Aubange ; ils devaient d'abord observer Montmédy et garder les communications entre Clerfayt et les Prussiens. Sur un contre-ordre de Brunswick, ils marchèrent sur Verdun et de la sur Clermont en-Argonne où ils se joignirent aux Autrichiens de Hohenlohe-Kirchberg. Tandis que les Austro-Hessois s'établissaient en face des Islettes et de la Chalade, l'armée prussienne ou, comme on la nommait, l'armée royale devait s'ébranler, avec les bagages et les fourgons de vivres, vers la trouée de Grandpré. Mais le mouvement essentiel était celui de Clerfayt. L'Autrichien était encore sur la rive droite de la Meuse dans le camp de Baalon ; il doit, d'après les instructions de Brunswick, passer la rivière, marcher sur Nouart et se porter au-devant des Prussiens à Romagne-sous-Montfaucon, presque à la même hauteur que Grandpré ; mais, après être resté deux ou trois jours à Romagne, afin d'abuser Dumouriez, il se rejettera brusquement vers le nord, reviendra sur Nouart, poussera rapidement jusqu'à Boult et se saisira du défilé de la Croix-aux-Bois. Eu même temps le corps de Kalkreuth et l'avant-garde de Hohenlohe attireront l'attention de Dumouriez par de vigoureuses démonstrations sur Grandpré ; Hohenlohe menacera Saint-Juvin, et Kalkreuth, le Morthomme ; mais ce dernier, en réalité, formera l'aile gauche de Clerfayt, lui prêtera l'appui de ses douze escadrons et secondera l'attaque de la Croix-aux-Bois. Tel est le plan de Brunswick : il donne, comme on disait depuis Louis XIV, des jalousies de tous côtés et inquiète l'adversaire sur tous les points ; mais, pendant qu'on tiraille sur la lisière de l'Argonne, pendant que ces fausses attaques font prendre le change à Dumouriez uniquement préoccupé de la défense des Islettes et de Grandpré, Clerfayt se jette sur la Croix-aux Bois et s'en empare. Ce plan imposait à l'Autrichien des marches et des contre-marches aussi fatigantes qu'inutiles : il était digne de la vieille école qui finassait toujours et craignait de prodiguer le sang des soldats, mais il s'exécuta presque à la lettre, avec une scrupuleuse exactitude. |
[1] Minutoli, der Feldzug, 144-148.
[2] Gœthe, Camp. de France, 58.
[3] J'ai trouvé l'expression de courée prussienne dans un acte du conseil général de la Meuse (arch. de l'hôtel de ville de Verdun, 18 mai 1793). Comparez le Témoin oculaire, I, 142 : Un émigré disait que cette vue lui faisait mal au cœur ; ce sont des accidents militaires, répondit un lieutenant prussien, et lorsqu'on ne peut ni les voir ni les sentir, on reste près de sa maman ; id., p. 198.
[4] Rémin. du prince royal, 155 : die Ruhr macht Fortschritte... trauriger und ekelhafter Anblick. Cet hôpital était l'ancien hôpital du roi ; il fallut bientôt établir un hôpital supplémentaire qu'on nomma l'hôpital ambulant, dans les bâtiments de l'ancien couvent de Saint-Airy (Registres de la ville de Verdun, 12 octobre).
[5] Moniteur du 8 septembre, lettre de Ternaux et de Gossin ; Laukhard, III, 139 ; Minutoli, Erinnerungen, 92-93 voir dans le volume précèdent (Invasion prussienne, 256-258) la douleur et l'irritation de la population verdunoise ; j'ajouterai à tous ces témoignages celui d'un officier anonyme du régiment de Romberg que je citerai désormais sous le nom de Gaudy qui doit être son vrai nom : in Verdun war die Stimmung nicht weniger als vorlheilhaft für die Verbundeten (Zeitschrift für Kunst, Wissenschaft und Geschichte des Krieges, 1843, IV, p. 11).
[6] Cf. Invasion prussienne, Verdun, 253, dès le soir de la capitulation, les officiers achètent liqueurs et dragées.
[7] Gœthe, Camp. de France, 44-46 ; Témoin oculaire, I, 144.
[8] C'est le cas de rappeler ici l'anecdote qu'on trouve partout (Gœthe, Camp. de France, 59) ; son hôte de Jardin-Fontaine remit à son domestique une lettre pour Paris, en ajoutant avec une ironie malicieuse tu n'iras pas jusque-là.
[9] Cf. Invasion prussienne, 288.
[10] Rémin., 154. D'après Mérat (Verdun en 1792, p. 122, note 1), Mlle Morland avait un frère qui fut colonel de cavalerie. C'est le Morland qui tomba mortellement blessé à la tête de son régiment dans une des charges de la bataille d'Austerlitz et dont la tombe existe encore dans le petit cimetière de Souilly, près de Verdun. Napoléon donna le nom du brave Morland à l'un des quais de Paris et maria sa jeune sœur à l'un des officiers de sa garde, le baron de Lassy.
[11] L'affaire du collier avait fait autant de bruit en Allemagne qu'en France ; elle frappa l'imagination de Gœthe, l'effraya, comme aurait fait la tête de Méduse et lui fournit le sujet de sa comédie du Grand Cophte ; cf. Camp. de France, 159-160, et les Conversations avec Eckermann, II, 184.
[12] Témoin oculaire, I, première partie.
[13] Cf. Invasion prussienne, 143. C'est ainsi qu'en 1812 Napoléon voulut un instant — et aurait dû — s'arrêter sur la Duna.
[14] ... in einer Spitze vorgehen, Rémin., 153.
[15] Rém., 153-154 ; rapport de Lecoq (Hausser, I, 371) ; lettre sur la vie de Dumouriez, citée par Massenbach, Mém., I, 324-325, et Massenbach, Mém., 47 ; cf. Fersen, II, 358 : le duc ne veut pas avancer avant la réduction de ces trois places (Verdun, Montmédy et Thionville), et Minutoli, Erinnerungen, 97 : ohne gehörig basirt zu sein.
[16] Cf. Invasion prussienne, 277 ; Massenbach, Mém., I, 96-97 ; Fersen à Breteuil, Fersen, II, 365 : Des étrangers, dit Massenbach (faisant allusion à Nassau), envoyés d'une souveraine dont les desseins politiques n'avaient d'autre but que l'Europe orientale et la ruine de l'état prussien, des étrangers dont la renommée militaire ne repose que sur les articles retentissants de journalistes gagés, ont décidé le passage de la Meuse et la marche sur Paris ; voir encore Manso, Gesch. des preuss. Staates, I, 245.
[17] Il ne voulait pas déplaire a Sa Majesté, dit Nassau-Siegen, et l'intérêt du courtisan fut plus fort que le devoir du général consommé (Feuillet de Couches, VI, p. 345).
[18] Massenbach, Mém., I, 54.
[19] Dampmartin. Mém., 295 ; Nassau-Siegen, Feuillet de Conches, VI, p. 346 ; Peltier, Dernier tableau de Paris, I, append. au n° 5, p. 84, notes.
[20] Lettre de Gossin, Bibl. de Verdun, Verdun-Révolution, II, p. 46 ; arch. guerre, Kellermann à Servan, 6 septembre.
[21] Massenbach, I, 49 ; Gœthe, Campagne de France, 25 et 56 ; Gaudy, 12.
[22] Lettre de Charles-Auguste à Einsiedel, 3 septembre (Düntzer, Gœthe und Karl August, II, 72).
[23] Gœthe, Camp. de France, 53 et 93 ; lettre à Schmauss, 10 septembre (Wagner, Archiv fur Geschichte deutscher Sprache und Dichtung, I).
[24] Témoin oculaire, I, 197-198 ; cf. Massenbach, Mém., I, 49 : die allgemeine Stimme.
[25] Gœthe-Jahrbuch, VI, p. 44 (art. de M. Suphan) sur Auguste de Gotha que Sömmerring nommait un archi-démocrate (Erzdemocrat, Hettner, Forster's Briefwechsel mit Sômmerring, 1877. p. 565), voir Invasion prussienne, 132.
[26] Massenbach, I, 55 : Peltier, 85 ;
Renouard, 170 ; Gebler, Osterreichische militärische Zeitschrift, 1833,
III, 71.
[27] Lettre d'Esterhazy à Spielmann, Vivenot, Quellen, II, 207-211.
[28] Massenbach, Mém., I, 57.
[29] Vivenot, Quellen, II, Esterhazy à Spielmann, 208.
[30] Breteuil à Fersen, Fersen, II, 366.
[31] Le bataillon des grenadiers de Brunswick et un bataillon de Wolframsdorf. Il n'est pas impossible qu'on ait laissé Courbière à Verdun pour se débarrasser d'un importun censeur ; voir sur Courbière Invasion prussienne, 116 et 145.
[32] Sybel, I, p. 554, note ; cf. Gebler, art. cité, p. 71 ; dès le 6, Brunswick écrivait que Dumouriez et Kellermann voulaient réunir toutes leurs forces et ensuite faire tête à l'attaque des alliés.
[33] Ce fut une faute, et une faute grave ; ces troupes autrichiennes couvraient le haut Palatinat et tout le moyen Rhin en même temps qu'elles tenaient en échec les forces de !a basse Alsace ; il ne resta plus à Spire que deux bataillons de Mayençais et le 5e bataillon de Giulay ; Custine défit aisément cette faible garnison.
[34] Vivenot. II, 193 ; Gebler, id., p. 71. Il donne la lettre de Brunswick die Umstände erheischen...