I. — Les traditions relatives aux trois tribus. Il faut examiner maintenant si cette conclusion ressort également de l’étude de l’histoire romaine, indépendamment des rapports que cette histoire peut offrir avec celle des autres peuples. Les anciens ne s’entendent pas très bien sur ce sujet. Tandis que Denys d’Halicarnasse montre le fondateur de Rome distribuant dès l’origine la population en trois tribus et trente curies[1], Cicéron[2], Tite-Live[3], Plutarque[4] voient dans cette organisation un effet du rapprochement des Latins de Romulus, des Sabins de Tatius et d’un troisième groupe sur la nationalité duquel ils ne sont point d’accord. En présence de ces assertions contradictoires, on ne sait à laquelle se ranger. Il est vrai que les Romains aimaient à se croire issus d’un mélange de races diverses. Le jour où ils prirent conscience de leur mission historique, cette tradition se trouva dans toutes les bouches. Elle devint le lieu commun des historiens, des orateurs, des hommes d’État[5]. 4n pouvait invoquer à l’appui la situation géographique de Rome, placée sur les confins des pays latin, sabin et étrusque. Mais, fondée ou non, cette tradition importe peu ici. Les étrangers admis dans la cité ont pu être versés dans les trois tribus, si elles existaient auparavant. C’est ainsi que Denys se représente l’entrée des Sabins[6]. Tite-Live lui-même ne se représente pas autrement celle des Albains[7]. Les noms des tribus n’apportent non plus aucune lumière. L’étymologie de Lucumo, proposée pour Luceres[8], n’a pas satisfait même les anciens. Tite-Live aime mieux confesser son ignorance par un aveu d’autant plus significatif qu’il est moins dans ses habitudes et dans celles de l’antiquité[9] ; car le même Tite-Live n’hésite pas, avec tous les historiens latins, à dériver Ramnes de Romulus ou Roma[10], étymologie aussi peu soutenable que la précédente. Celle de Titus Tatius pour Tities, Tatienses[11], est la seule qui ne soit pas grammaticalement absurde, mais elle n’apprend rien. Les efforts des modernes n’ont pas été beaucoup plus heureux que ceux des anciens. Si toutefois ils aboutissent à un résultat, c’est que les noms des tribus sont plutôt honorifiques, et n’indiquent, par suite, aucune diversité d’origine[12]. On a fait l’observation suivante[13] : Les membres de chaque tribu portent un nom générique, ce qui n’est pas le cas des membres de la curie. Il en est des tribus comme des gentes et des curies comme des régions de Servius. On dit les Ramnes, les Tities, comme les Cornelii, les Fabii, et un tel de la curia Veliensis ou Foriensis, comme un tel de la région Esquilina ou Collina. D’un côté, la tribu ou la gens n’est désignée que par le nom de ses membres. De l’autre, les membres de la curie ou de la région ne sont désignés que par le nom de la région ou de la curie. Les noms des régions et des curies sont géographiques[14]. Ils impliquent un lien administratif. Ceux des membres de la gens ou de la tribu supposent une communauté de race. Ils sont patronymiques ou ethniques. Les tribuns sont donc, comme les gentes, des agrégats naturels, et les curies, comme les régions, des créations purement artificielles. Les unes remontent à l’époque où les trois peuples qui devaient constituer la cité se trouvaient encore à l’état de dispersion. Les autres sont nées quand le législateur imposa à ces trois peuples, réunis en un même corps politique, des divisions administratives communes. Pour réfuter ce raisonnement, il suffit de rappeler l’exemple des trois tribus doriennes et des quatre tribus attiques. Elles offrent les mêmes traits qui viennent d’être relevés dans les tribus romaines et paraissent se distinguer des obes et des phratries comme celles-ci des curies. Pourtant, nul ne prétend qu’elles représentent trois ou quatre races hétérogènes ou simplement trois ou quatre petits états autrefois indépendants. Les Athéniens du moins ni les Doriens ne le pensaient, eux qui se les figuraient comme des rameaux détachés d’un même tronc[15]. Sans doute, elles ne descendaient ni d’Héraklès, ni d’Ion. Il est trop clair que ce sont là des fables imaginées pour expliquer des mots dont les anciens avaient cessé déjà de se rendre compte[16]. Mais ce n’est pas la fable qui importe. C’est la pensée qu’elle exprime et dont elle est sortie. Et cette pensée n’est pas douteuse. C’est que les tribus doriennes ou attiques existaient en germe dans la cité. C’est la cité qui leur a donné naissance en se fractionnant. Pourquoi n’en serait-il pas de même à Rome ? L’analogie avec Athènes paraîtra-t-elle contestable ? Se prévaudra-t-on des discussions toujours ouvertes sur le sens de ces vieux noms : Géléontes, Hoplètes, Ægicores, Argades, et sur le principe de cette classification[17] ? Mais que sait-on de plus des noms latins Ramnes, Tities et Luceres ? D’ailleurs, il reste les tribus doriennes dont les noms, bien que fort mystérieux, ne rappellent celui d’aucune profession, et ne permettent pas de penser au régime des castes. Ainsi, les ressemblances signalées entre la gens et la tribu ne supposent pas nécessairement une identité de nature entre les deux institutions. Mais la première a pu être dans une certaine mesure le modèle de la seconde et suggérer pour elle l’idée du héros éponyme[18]. Quant — aux groupes de moindre importance, tels que les obes, les phratries, les curies, s’il n’y a pas de dénomination commune pour ceux qui les composent, c’est peut-être seulement parce que ces groupes avaient une individualité moins tranchée qui se perdait dans l’unité plus vaste de la tribu. On cite la phrase de Tacite où il est dit que les sodales Titii ont été institués par le roi Titus Tatius pour assurer la perpétuité du culte sabin[19]. De la relation verbale qui paraît incontestable entre le nom des Titii et celui des Tities, on conclut que ces derniers étaient de nationalité sabine. Mais il faut remarquer que Varron, quand il dit un mot de ce collège, ne fait aucune allusion au caractère sabin de ses cérémonies[20]. On a donc le droit de se demander s’il n’y a pas lé une pétition de principe, en d’autres termes, si le culte des Titii était réellement sabin, ou s’il n’avait pas fini par passer pour tel, é cause du rapport entre les noms des Titii et des Tities et de l’opinion préconçue sur la nationalité de ces derniers. II. — Les agrandissements de la ville et le Septimontium[21]. Ce doute sera suffisamment justifié si l’on considère de prés la tradition sur laquelle repose cette opinion. Il est permis de ne pas insister sur la fable de l’enlèvement des Sabines et sur le récit de la guerre entre Romulus et Tatius[22]. Ce sont des détails dont on fait bon marché. Ils peuvent être faux sans que la tradition dont ils font partie cesse d’être vraie. Mais il en est autrement de l’établissement des Sabins de Tatius sur le Capitole et le Quirinal et de leur annexion à la ville de Romulus. C’est la tradition tout entière dont il ne reste rien si ce point, qui est essentiel, est lui aussi controuvé. Le moyen de s’en assurer, c’est de rechercher la suite des agrandissements de la ville. La première Rome n’a pas dépassé la limite du Palatin. Ce fut l’oppidum Palatinum[23], la Rome carrée ainsi nommée par Denys[24], Plutarque[25], Dion Cassius[26], Varron[27], Festus[28]. Il n’y a pas, dans cette vieille histoire, de fait mieux établi. Il était attesté, pour le Romain de la république, comme pour celui de l’empire, par une cérémonie aussi ancienne que la ville et qui dura jusqu’au triomphe du christianisme et au delà[29]. Le 15 février de chaque année, on voyait le collège des Luperci exécuter une course expiatoire autour de la ville palatine, en suivant l’antique pomerium[30], dont le tracé, toujours délimité avec soin à cet effet, est décrit avec le plus grand détail par Tacite[31]. Au témoignage des textes s’ajoute aujourd’hui celui des monuments, les fouilles de M. Rosa ayant découvert les restes d’une muraille qui ne peut être que celle de la forteresse du Palatin[32]. Après une période qui reste enveloppée dans une nuit profonde, on voit apparaître une Rome plus vaste dont le souvenir est évoqué par la fête du Septimontium, comme celui de la Rome du Palatin par la cérémonie des Lupercales. Cette fête, encore en honneur au temps de Tertullien[33], se célébrait sur les sept hauteurs dont cette Rome avait été formée[34], en commémoration, dit Plutarque, de l’adjonction de la septième[35]. Antistius Labeo, cité par Festus[36], en donne la liste. Ce sont : le Palatin, la Velia, le Fagutal, la Subura, le Germalus, l’Oppius, le Cælius, le Cispius. Cette liste compte un nom de trop, qui est, d’après M. Becker, le Cælius[37]. Il en donne deux raisons : 1° la mention du Cælius, entre l’Oppius et le Cispius, qui sont deux sommets de l’Esquilin[38], est suspecte. Mais à cela on peut répondre que l’ordre suivi, s’il y en a un, n’est pas géographique. Le Fagutal est séparé de la Velia par la Subura, et le Germalus, qui est voisin de la Velia, ne l’est point de la Subura ni de l’Oppius[39]. 2° il y a un autre texte de Festus où les hauteurs, participant à la fête du Septimontium, sont énumérées dans le même ordre, sauf le Cælius qui disparaît[40]. La deuxième raison vaut mieux que la première. Elle serait décisive s’il n’y en avait d’autres excellentes pour maintenir le Cælius et exclure la Subura[41]. La Subura d’abord n’est pas une hauteur. Le quartier désigné sous ce nom, dans la Rome historique, est une sorte de bas-fond compris entre les trois pointes du Quirinal, du Viminal et de l’Esquilin[42]. De plus, ce quartier, comme il résulte d’un texte de Junius Gracchanus, cité par Varron[43], était au-dessous de l’ancienne ville (sub antiqua urbe). Varron ajoute au-dessous du mur en terre des Carènes (sub muro terreo Carinarum). Or, les Carènes couvraient la pente nord-ouest de l’Oppius[44]. La Subura était donc séparée de l’Oppius par un mur, et au-dessous de la ville veut aussi dire au dehors. Mais cette ancienne ville dont parle Varron quelle est-elle ? On sait que la Subura était inscrite dans une des quatre régions urbaines de Servius[45]. L’ancienne ville, ce n’était donc pas la .ville de Servius, mais la ville antérieure, la ville du Septimontium, la seule, du reste, qui prit être qualifiée ainsi par Junius Gracchanus, un érudit du septième siècle[46], et même par Varron, qui écrivait son traité de la langue latine en 711 u. c. = 43 au plus tard[47], plus de trente ans avant l’institution des quatorze régions de la Rome impériale[48]. Ainsi, non seulement la Subura n’était pas une hauteur, mais il est démontré qu’elle était extérieure à la ville du Septimontium. C’est donc par erreur qu’elle figure sur la liste de Labeo. Ce nom s’est introduit à côté de celui du Cælius, il s’y est substitué, parce que le Cælius formait les trois quarts au moins de la région Suburane, ainsi nommée du quartier de la Subura qui en faisait partie[49]. Cette indication topographique, due également à Varron[50], suggère à M. Jordan[51] une hypothèse qui serait de nature à tout concilier et qu’il est permis de reprendre et de développer après lui. M. Jordan a été frappé d’une particularité qui avait passé inaperçue. Sur les quatre régions serviennes, il y en a trois, la Palatine, l’Esquiline, la Colline, dont les noms sont empruntés à la hauteur qui correspond, ou peu s’en faut, à leur superficie totale. D’où vient que, contrairement à cette règle, le nom de la quatrième rappelle, non pas le Cælius, mais le quartier relativement peu étendu de la Subura ? N’est-ce pas que ce nom de Subura, ou plutôt de Sucusa, s’appliquait primitivement à toute la région, qui fut, à partir de Servius, la région Sucusane ? Les régions serviennes, — on met à part la Colline, dont il sera question plus tard, — étaient issues d’anciens bourgs ou pagi, formant de jour en jour une masse plus compacte. La région Palatine n’était autre chose, dans le principe, qu’un pagus Palatinus destiné à devenir le noyau de la Rome future. En haut, la forteresse ; en bas, les groupes de maisons[52]. C’est ainsi que les historiens du siècle d’Auguste se représentaient encore ces antiques refuges des peuplades italiotes[53]. C’est l’idée qu’en donnent des ruines demeurées debout jusqu’aujourd’hui[54]. Le mot Palatines, désignant la hauteur de ce nom, est par lui-même significatif. Ce mot est un adjectif qui a fini par se substituer dans l’usage au substantif Palatium, en laissant tomber le mot pagus qu’il sous-entend. Il répond à Aventinus qui est notoirement dans le même cas, car l’existence d’un pagus Aventinus est attestée jusque sous Auguste[55]. C’est ainsi qu’on a dit les tribus Stellatina, Oufentina, Tromentina. La même observation concerne l’adjectif Esquilinus. Il vient d’ailleurs du mot Esquiliæ, qui a la forme d’un nom de ville (Urb-iliæ, Cut-iliæ) et qui est encore employé comme tel dans la langue classique (ire Esquilias)[56]. Quant au pagus Sucusanus, on peut se dispenser de conjectures. II est mentionné par Varron[57]. Palatium, Esquiliæ, Sucusa, voilà des noms dont l’étymologie est incertaine, mais qui différent nettement par la forme de ces trois autres : Cælius, Oppius, Cispius. Ils sont identiques, ces trois derniers, aux noms de trois gentes, dont ils rappellent la demeure dans la Rome patricienne. A ce titre, ils peuvent être considérés comme relativement modernes. Et de même que le Cispius et l’Oppius désignaient deux sommets de l’Esquilin, c’est-à-dire deux points du pagus Esquilinus, de même le Cælius ne désignait peut-être qu’une partie du pagus Sucusanus. Mais on avait gardé le souvenir du pagus Sucusanus, tandis qu’il n’existe aucune allusion au pagus Esquilinus ni au pagus Palatinus. Et pourtant il n’a été rien changé aux noms de Palatin et d’Esquilin, tandis que dans la Sucusa c’est le nom de Cælius qui a prévalu. Il est facile de rendre raison de cette bizarrerie apparente. Ce mot de pagus se disait exclusivement des agglomérations rurales ou suburbaines. A mesure qu’un pagus était annexé à la ville, il cessait de mériter ce nom. Le pagus Aventinus n’a subsisté si longtemps que parce que l’Aventin, tout en étant compris dans l’enceinte de Servius[58], avait été laissé en dehors des quatre tribus[59]. Il n’en fut plus question du jour où cette hauteur fut inscrite dans les quatorze régions d’Auguste, remplaçant les quatre tribus serviennes[60]. Le pagus Janiculensis[61], le pagus Montanus, situé sur l’Esquilin, hors la porte Esquiline[62], disparurent pour la même raison[63]. On comprend donc que le pagus Palatinus, le pagus Esquilinus et la majeure partie du pagus Sucusanus, ayant formé une même ville avant Servius, aient cessé dés lors d’être des pagi. Seul, le pagus Sucusanus ne fut pas supprimé tout entier, mais considérablement réduit et refoulé en quelque sorte du plateau dans la vallée. On en détacha l’extrémité qui longeait l’Esquilin, et on la sépara de la ville par le mur des Carènes. Ce fut un faubourg auquel demeura le nom de pagus Sucusanus, tandis que la partie urbaine prit celui de Cælius, qui prévenait toute confusion. Le pagus Sucusanus continua de s’appeler ainsi, jusqu’à ce que, ayant été annexé par Servius, il devint lui aussi un quartier de la ville, le quartier de la Subura[64]. Mais, même alors, les habitants de la Subura se souvinrent toujours qu’ils avaient été des pagani, car ils furent toujours exclus de la fête, célébrée par les habitants de l’antique Septimontium. Ce souvenir ne pouvait persister de même chez ces derniers. La fête, au lieu de leur rappeler le temps où ils avaient formé des pagi distincts, contribuait plutôt à le leur faire oublier. Il résulte de ce qui précède qu’il faut maintenir la Subura sur la liste d’Antistius Labeo. Mais, qu’on adopte ou non cette opinion, il- reste acquis que le Cælius faisait partie de la ville du Septimontium. Cette ville équivalait donc à l’ensemble figuré par les trois hauteurs du Cælius, de l’Esquilin, du Palatin. En d’autres termes, elle équivalait, sauf le pagus Sucusanus, à trois des quatre tribus créées par Servius : la Palatine, l’Esquiline, la Sucusane. Elle ne laissait en dehors que la Colline, comprenant le Quirinal et le Viminal, dont l’annexion, opérée en dernier lieu, constitua la Rome de Servius. Si le Septimontium formait une ville, il avait un pomerium. Les Romains n’en concevaient point qui en flat dépourvue. Il est vrai que ce pomerium n’est mentionné nulle part parmi ceux qui se sont succédé depuis Romulus jusqu’à Hadrien[65]. Il n’a pas été, comme celui de la ville palatine, respecté par la piété des générations. C’est que la ville palatine avait un caractère à part. Elle était le centre autour duquel les bourgades voisines s’étaient groupées, si bien que la fête des Palilia, qui était propre au Palatin, finit par être adoptée de Rome entière et considérée comme l’anniversaire de la fondation de la ville[66]. Aussi quand les habitants du Septimontium durent substituer un nouveau pomerium à l’ancien, loin d’effacer celui-ci, ils voulurent en perpétuer la mémoire, par une cérémonie confiée au zèle d’une des plus nobles familles de la cité[67]. Mais le nouveau pomerium n’avait pas les mêmes titres à la vénération publique. Il fut délaissé pour celui de Servius, comme celui-ci pour le pomerium de Sylla, avec cette différence que le pomerium de Servius, ayant subsisté durant des siècles et jusqu’en des temps pleinement historiques, il en est resté une idée très exacte. Au reste, les textes ne sont pas absolument muets sur celui ou ceux qui l’ont précédé. On lit dans Tacite : ... forumque et Capitolium non a Romulo, sed a Tito Tatio additum urbi credidere. Mox pro fortuna pomerium auctum[68]. Mox semble indiquer que dans la pensée de l’auteur il ne s’agit pas de l’extension attribuée à Servius, niais d’une ou de plusieurs autres qui ont suivi de plus prés. La ville du Septimontium, pour être enclose dans un pomerium, n’était pas protégée par une enceinte continue ; quelques points seulement étaient fortifiés : les Carènes, que garantissait leur mur en terre[69] ; le pagus Sucusanus, qui couvrait l’Esquilin[70] ; le Quirinal, où s’élevait le Capitole[71], et peut-être du côté de l’Etrurie le Janicule[72] et le mont Tarpéien. Ancus Martius avait, dit-on, creusé le fossé des Quirites, dont les historiens ne se rappellent guère que le nom[73], et construit sur l’Aventin un mur qui devait se relier un jour aux grands travaux entrepris par les Tarquins[74]. A l’intérieur, les trois anciens pagi conservaient sans doute leur physionomie particulière. La citadelle du Palatin était restée debout[75], ouverte aussi aux habitants de l’Esquilin et du Cælius. On ne sait si les restes de fortification découverts sur cette dernière hauteur et étrangers à l’enceinte de Servius appartiennent à la même époque[76]. Quand on considère cette ville composée de trois bourgades, on pourrait être toute de les identifier, l’une avec la tribu des Ramnes, l’autre avec la tribu des Tities, la troisième avec celle des Luceres. Mais ce serait une conjecture sans aucun fondement. II faut se résigner à ignorer l’emplacement des tribus primitives. II semble même qu’au point où nous sommes parvenu, elles n’existaient plus qu’à l’état de divisions politiques. La tradition montre, dès l’origine, les sanctuaires des trente curies réunis sur un même point, au lieu d’être dispersés par la ville[77]. Il est permis d’en conclure que, de bonne heure, les tribus, comme les curies, qui en étaient les subdivisions, ne représentèrent plus des quartiers distincts. C’est le même phénomène qu’on observe plus tard pour les tribus serviennes. Des deux côtés, il tient à une même cause, qui n’est pas seulement le mouvement naturel de la population. Car, si l’on admet que les habitants des pagi annexés ont été inscrits successivement et pêle-mêle dans les trois tribus préexistantes, il est clair que celles-ci ont dei perdre leur caractère g6ographique, tout comme les trente-cinq tribus quand elles ont reçu les vaincus de l’Italie et du monde entier[78]. De là vient que le sol romain n’a conservé aucune trace de sa distribution primitive. De là vient aussi que ce mot de tribu a pu, sans danger de malentendu, survivre à l’ancienne organisation et s’appliquer aux quatre régions de Servius. Quand Denys oppose aux tribus locales les tribus génétiques[79], il ne faut pas comprendre que les tribus génétiques n’ont pas été aussi des tribus locales, mais qu’elles avaient cessé de l’être depuis longtemps. III. — Réponse à quelques objections. Les notions fournies sur les agrandissements de Rome par la fête des Lupercales et celle du Septimontium sont les seules historiques. Pourtant, il y a des objections auxquelles il faut répondre avant de passer outre. M. Becker voit dans la fête du Septimontium le dernier vestige d’un passé plus ancien que la ville même de Romulus[80]. Ubi nunc Roma Septimontium nominatum ab tot montibus quos postea urbs muris comprehendit. Ainsi s’exprime Varron, laissant entendre, à ce qu’il semble, que le nom de Septimontium a précédé celui de Rome[81]. Quand cela serait, on n’aurait pas encore le droit de rejeter le Septimontium dans une période antérieure à la formation et aux premiers développements du bourg du Palatin. Car enfin, tout est mystérieux dans ce nom de Rome, dont le sens et l’origine échappent aux modernes comme aux anciens[82]. A quel moment ce nom fameux est-il apparu sur les lèvres humaines ? Sur quel point du sol a-t-il pris naissance pour s’étendre à tous les quartiers qui se sont ajoutés successivement à la ville des Quirites et pour l’embrasser tout entière ? Ni l’histoire ni la philologie ne le disent clairement. Mais quoi qu’on puisse penser sur ce sujet, Rome n’existe véritablement qu’à partir de Servius, comme Athènes à partir de Thésée. On comprend donc que Varron ait pu dire : Sur l’emplacement de la Rome actuelle, était autrefois le Septimontium. On le comprend d’autant mieux que cette inexactitude n’est pas la seule qu’on puisse lui imputer. Il n’y a pas lieu d’opposer les deux noms de Rome et de Septimontium. Septimontium n’est pas le nom d’une ville, mais d’une fête. Il désigne, ion pas les sept hauteurs où la fête se célébrait, mais la fête qui se célébrait sur les sept hauteurs. Varron ne l’ignorait point[83]. Aussi, quand il détournait ce mot de son sens véritable, c’était par une corruption dont il ne pouvait manquer de se rendre compte, bien qu’elle fait autorisée par l’usage. Mais l’a-t-il détourné, en effet ? Dans quel sens l’a-t-il pris au juste ? Que veut-il dire, au fond ? Il paraît difficile de raisonner sur un passage dont le texte est assez mal établi, et dont l’intention, ainsi qu’on le verra plus loin, demeure obscure. M. Becker invoque encore deux textes de Festus[84] et de Servius[85], d’où il ressort que le Septimontium a été habité par les Sicules et les Ligures qui en ont été chassés par les montagnards de Réate. Or, l’établissement des Sicules et des Ligures dans le Latium a précédé la fondation de Rome[86]. Sans contester cette tradition ni aucune de celles qui s’y rattachent, on se bornera à l’observation suivante. La ville du Septimontium exclut, outre la future région colline, les deux hauteurs de l’Aventin et du Capitole. Ce sont les mêmes hauteurs qui, bien que peuplées l’une et l’autre[87], ont été laissées en dehors de la ville de Servius[88]. Cette coïncidence est remarquable. Elle ne permet pas de voir dans le Septimontium autre chose qu’une des phases du développement de Rome. Quel hasard, en effet, si, par deux fois, le Capitole et l’Aventin s’étaient trouvés exclus de deux villes se succédant sur le territoire romain ! M. Jordan signale d’autres difficultés. S’il est vrai que les noms du Cispius et de l’Oppius sont comme celui du Cælius, et, par rapport aux noms du Palatin, de la Velia, etc., d’origine récente, la fête célébrée sur les hauteurs énumérées par Antistius Labeo ne remonte pas à une antiquité aussi lointains qu’on se plaît à le supposer[89]. L’objection aurait quelque valeur si les noms de Cispius, d’Oppius et de Cælius n’avaient jamais désigné que des familles plébéiennes. Mais on sait qu’il n’en est rien[90], et ainsi, ces trois hauteurs ayant emprunté leur nom chacune à une gens patricienne qui y était établie, ce fait a pu se produire dans la période la plus reculée de l’histoire de Rome. Quand donc on parle de l’origine récente de ces noms, il faut l’entendre d’une manière toute relative. La tradition place sous le règne de Tullus Hostilius l’arrivée du Tusculan Opiter Oppius[91], et elle fait de Cæles Vibenna tantôt un allié de Romulus, tantôt un compagnon de l’Etrusque Mastarna, le futur roi Servius Tullius[92]. On distinguait encore, au temps de Cicéron, entre les pagani et les montani. Cicéron se glorifiant d’avoir été rappelé d’exil par les vœux unanimes de ses concitoyens, associe à l’expression de sa reconnaissance tous ceux, grands ou petits, dont les efforts ont contribué à son retour : le Sénat, l’ordre équestre, et jusqu’à ces humbles corporations que l’on a bien voulu autoriser, pour que le pauvres gens de la ville eussent eux aussi leurs réunions et leurs simulacres d’assemblées : Nullum est in hac urbe collegium, nulli pagani aut montani — quoniam plebei quoque urbanæ majores nostri conventicula et quasi concilia quædam esse voluerunt — qui non amplissime de salute mea decreverint[93]. Festus cite le passage suivant d’une loi Sulpicia relative à la distribution des eaux : ... Montani paganive sitis aquam dividunto[94]. La date de la loi n’est pas connue[95]. Il résulte de là que cette distinction avait encore une réalité au dernier siècle de la république. Dès lors, il est évident qu’elle ne se rapporte pas à un état de choses antérieur à Servius et aboli par ce roi. Les pagani, ce sont les habitants des faubourgs extérieurs à la ville de Servius, les habitants du Janicule, de l’Aventin, etc. Les montani, qui leur sont opposés, ne peuvent être que les habitants qui résident à l’intérieur de la même ville. Mais voici une autre conséquence : Montani, Septimontium, ces deux termes sont inséparables. La fête du Septimontium est donc une fête de la ville de Servius, et les sept hauteurs où elle se célébrait sont celles qui étaient comprises dans l’enceinte à laquelle ce roi a attaché son nom. C’est la tradition conservée par Varron dans un texte qui contredit celui de Labeo[96]. Tel paraît être le raisonnement de M. Jordan, autant du moins qu’il est possible de s’en rendre compte[97]. Mais il se trompe pour n’avoir pas vu que ce mot de montani, appliqué à tous les habitants de la ville de Servius, n’a pu l’être que par une extension et une déviation du sens primitif[98]. La ville du Septimontium s’était accrue du Quirinal et du Viminal, lui ne formaient pas un mont, mais une colline (collis). Quelle que soit la raison de cette distinction, elle est très nette. Elle ressort du texte emprunté par Varron aux livres pontificaux dans le passage relatif aux Argées[99]. Le nom de montani convient donc fort mal aux habitants de ce quartier, qui devraient plutôt s’appeler collini. C’est ainsi, du reste, que l’on désigne les Salii du Quirinal (Salii Collini), par opposition à ceux du Palatin[100]. Toutefois, comme on avait pris l’habitude, au temps du Septimontium, de distinguer entre les pagani et les montani, comme d’autre part le mot pagani fut toujours d’un emploi légitime pour désigner la population suburbaine de la Rome nouvelle, ce mot entraîna l’autre, et l’on continua d’appeler montani tous les habitants de la ville, y compris même les collini. Mais le terme propre pour désigner les quartiers urbains, ce fut vici. Quintus Cicero écrit à son frère : Habeto rationem urbis totius, collegiorum omnium, pagorum, vicinitatum[101]. Les vicinitates avaient été organisées par Servius en corporations religieuses qui avaient leurs fêtes dites compitalia, répondant aux paganalia ou fête des pagi[102]. Cependant, rien n’avait pu faire oublier la fête qui se célébrait le onze décembre sur les sept sommets du Septimontium. Ce jour-là c’était l’ancienne ville qui reparaissait au milieu de la nouvelle. C’étaient les vrais montani dont l’association se reformait au milieu de ceux qui avaient usurpé leur nom. Notre raisonnement n’est juste qu’autant que le point de départ en est assuré. Et le point de départ c’est toujours la description du Septimontium, d’après Antistius Labeo. Il reste donc à examiner s’il est vrai qu’on puisse opposer à la tradition rapportée par cet érudit, une autre d’égale valeur émanant de Varron. Ce passage de Varron est le même que nous avons plusieurs fois déjà mis à contribution[103], et qui jette une si vive lumière sur la topographie de Rome et son histoire. Mais pris dans son ensemble, il offre d’assez grandes obscurités. Il débute par la phrase citée plus haut : Ubi nunc est Roma Septimontium nominatum ab tot montibus quos postea urbs muris comprehendit. Puis vient l’énumération des montagnes en question : E quis Capitolium dictum, etc. Ce sont, à première vue, le Capitole, l’Aventin, le Cælius, l’Esquilin, le Viminal, le Quirinal, le Palatin. Mais Varron lui-même dit des Esquilies qu’elles formaient deux montagnes appelées de leur ancien nom, dans les livres sacrés, Oppius et Cispius[104]. Le compte des sept montagnes, est donc dépassé. A plus forte raison, si l’on ajoute le Germalus et la Velia, que Varron nomme après le Palatin. Comment d’ailleurs oublier que l’opposition entre les montes et les colles n’est accusée nulle part plus fortement que dans ce texte de Varron Et l’on voudrait conclure de ce même texte que les colles, c’est-à-dire,le Quirinal et le Viminal, faisaient partie du Septimontium ! La vérité, c’est que Varron n’apprend rien sur ce sujet. Le souvenir du Septimontium lui revient au moment de passer en revue les hauteurs dont l’ensemble constitue la ville, mais il sort bientôt de son esprit pour faire place à d’autres pensées. A mesure qu’on avance dans la lecture, du passage ; on remarque qu’il est question’. de toute autre chose, des quatre régions de Servius et de la distribution des sanctuaires des Argées. Quant à la fête du Septimontium, il n’en est pas dit un mot. Le seul témoignage ancien est celui de Labeo, si formel et si précis qu’il n’est pas possible de le mettre en doute. Ce n’est pas que Varron se fasse du Septimontium une idée exacte. La seule phrase du commencement, — si toutefois nous la comprenons bien, — montre qu’il n’en est rien. Pour lui, les sept montagnes ce sont bien celles qui ont été encloses dans l’enceinte de Servius[105]. C’est une indication qu’il jette en passant, sans aller au fond, et sans la soumettre à un contrôle qui lui aurait fait toucher du doigt son erreur. Mais il parle, sans y faire attention, comme le vulgaire ; il est dupe d’une illusion partagée de tous. Il s’est produit là un phénomène singulier, et qui explique plus d’une notion fausse que l’on rencontre chez les historiens anciens. Ce nom de ville aux Sept Collines, éblouissant et sonore, était resté dans la mémoire et dans l’imagination des Romains et, encore qu’il fût toujours possible, grâce à la fête du Septimontium, de remonter au sens véritable, il avait fini par s’appliquer à la Rome de la république et à celle des empereurs, comme il s’appliqua plus tard à la Rome pontificale. Le vers si connu de Virgile[106] rend bien le sentiment public sur ce sujet, et cette sorte de superstition qui s’attachait à ce nom prédestiné. L’extension donnée au terme de montani aidait à la confusion, sans compter que, sur les sept montagnes, il y en avait quatre qui formaient les sommets ou les contre forts des trois autres et que le temps ou les travaux des hommes avaient amené le nivelage des moins importantes[107]. Ainsi, tandis que leur nombre restait fixe, la liste se modifiait à mesure que la ville s’étendait. Mais combien, parmi ceux qui répétaient ce nom avec une fierté patriotique, se rappelaient la réalité assez humble qu’il avait jadis exprimée Cette confusion d’idées est une des causes qui ont le plus contribué à fausser l’histoire des agrandissements de Rome. Strabon raconte que d’abord on fortifia le Capitole, le Palatin et le Quirinal. Ancus Marcius ajouta à ces hauteurs le Cælius et l’Aventin, et enfin Servius Tullius compléta la ville en y rattachant l’Esquilin et le Viminal[108]. La version de Denys est à peu près la même. Romulus, outre le Palatin, fortifie l’Aventin et le Capitole[109], puis, après l’incorporation des Sabins de Tatius, le Quirinal et le Cælius[110]. Restent, comme dans Strabon, le Viminal et l’Esquilin, qui sont annexés par Servius[111]. Tite-Live dit de ce dernier plus exactement qu’il ajouta à la ville le Quirinal et le Viminal, et qu’il agrandit les Esquilies[112], main plus haut il fait du Capitole la citadelle de la Rome de Romulus[113]. Il est à peine nécessaire maintenant de montrer la vanité de ces fables. L’Aventin était encore extérieur au pomerium du temps des empereurs[114]. La citadelle (Arx, Capitolium) fut d’abord établie sur le plateau du Quirinal, dans le voisinage du temple de Flore[115]. Elle ne fut transportée sur le mont Tarpéien qu’après que la construction de l’agger de Servius eut permis ce déplacement en couvrant ce côté de Rome, le plus abordable à l’ennemi[116]. La dédicace du temple de Jupiter Capitolin n’est même pas antérieure à la fondation de la république[117]. Pas plus que l’Aventin, le Capitole ne faisait partie des quatre régions urbaines de Servius[118]. A plus forte raison était-il étranger à la Rome du Septimontium et à celle de Romulus. Il se peut qu’il y ait eu sur cette colline, dès la plus haute antiquité, des chapelles expiatoires ouvertes aux condamnés, et justifiant la tradition de l’asile[119]. Il n’est même pas impossible, qu’on en ait de bonne heure fortifié un point. Mais c’est tout. Quant au Quirinal, il suffit de jeter les yeux sur une carte pour se convaincre qu’il n’a pas pu être annexé indépendamment du Viminal. Il n’a pas été annexé non plus avant l’Esquilin, dont les trois sommets sont comptés au nombre des hauteurs du Septimontium. Il est temps de conclure. L’annexion du Quirinal et du Viminal, opérée dans la dernière période de la royauté, n’a été pour rien dans le système des trois tribus qui était formé depuis, longtemps et qui même se trouvait déjà en pleine dissolution quand cette annexion s’accomplit. Par conséquent, s’il y a eu sur ces deux collines un établissement de Sabins, ces Sabins ne peuvent, en aucune façon, être identifiés avec la tribu des Tities. Il en est de même de ceux qui auraient occupé le Capitole. Quant à savoir si cet établissement a vraiment existé et d’où vient qu’il a été attribué au roi Titus Tatius ou, ce qui revient au même, à la tribu dont ce roi est le héros légendaire, c’est une question dont la solution importe peu ici. On en dira autant de cette question générale : Rome a-t-elle été à un moment quelconque de son histoire envahie et conquise par des Sabins ? Il suffit d’avoir montré que tous les récits qui prêtent aux Tities une nationalité différente de celle des autres tribus sont en contradiction formelle avec les données historiques positives. |
[1] II, 7.
[2] De Rep., II, 8.
[3] I, 13.
[4] Rom., 20.
[5] Sall., Catilin., 6. Florus, I, 1. Cie., pro Balb., 13. Tac., Ann., XI, 24. V. Schwegler, Röm. Gesch., I, p. 503. Amédée Thierry, Tableau de l’empire rom., c. I. Fustel de Coulanges, Cité antique, l. V, c. II, § 1.
[6] II, 46.
[7] I, 30.
[8] Varr., L. L., V, 55. Cic., De Rep., II, 8, etc. Cf. Plut., Rom., 20, et Paul Diac., p. 119.
[9] I, 13.
[10] Ibid. Cf. Varr, ibid. Cie., ibid. Plut., ibid.
[11] Ibid.
[12] Corssen, über Ausspr., II, p. 85, 2e édit.
[13] Genz, Das patricische Rom., p. 90.
[14] Cela est vrai de la plupart des curies, non de toutes. Par ex. la curia Rapta. V. Plut., Rom., 20. Denys, II, 47. Becker, Alterth., II, p. 32. Willems, Droit public, p. 35, 4e édit.
[15] V. Hermann, Lehrbuch der Griech. Antiq., I, § 16 et § 94.
[16] Bœckh, C. I. G., 3665, p. 929, col. 1.
[17] V. Hermann, o. c., § 94. Bœckh, C. I. G., 3665. Grote, Hist. grecque, trad. Sadoux, t. IV, p. 91.
[18] Voyez les dix tribus de Clisthène.
[19] Ann., I, 54.
[20] L. L., V, 85.
[21] V. Belot, Cheval. rom., I, p. 29-31, p. 399-403.
[22] V. Schwegler, Röm. Gesch., I, p. 468-478, et Belot, Cheval. rom., I, p. 30. — Les invraisemblances topographiques disparaissent s’il est faux, comme le prétend M. Jordan (Topogr., I, 1, p. 125, etc.), que les parties basses de la ville, le Forum, le Vélabre, la vallée Murcia, aient été recouvertes par les eaux jusqu’aux travaux d’assainissement des Tarquins. C’est là, d’après ce savant, une tradition exploitée par les poètes et imaginée par les grammairiens en quête d’étymologies. Il est bien vrai que ces étymologies n’ont aucune valeur ; mais la question est de savoir si ce sont les étymologies qui ont fait la tradition, ou si c’est la tradition qui a suggéré les étymologies. M. Jordan convient qu’elle est du moins vraisemblable, et, après l’avoir niée, il y revient p. 129 : Damit wird nun freilich... V. notre article : Recherches sur quelques gentes patriciennes, dans les Mélanges de l’École française de Rome, ann. 1882.
[23] Varr., L. L., VI, 34.
[24] II, 65. — Cf. I, 88.
[25] Rom., 9.
[26] Fr. 8, édit. Gros, I, p. 22.
[27] Solin, I, 17.
[28] P. 258. Il est vrai que Festus l’entend dans un sens plus étroit. Il confond avec le mundus. V. Jordan, Topogr., I, 1, p. 168, n. 26.
[29] Marquardt, Staatsverw., III, p. 427.
[30] Ibid., p. 424.
[31] Ann., XII, 21. — Cf. Aul. Gell., XIII, 14.
[32] Jordan, Topogr., I, 1, p. 172, etc.
[33] Tertull., De Idolatr., 10.
[34] Varr., L. L., V, 41.
[35] Quæst. rom., 69.
[36] P. 348.
[37] Alterth., I, p. 124.
[38] Ibid., p. 533-537.
[39] Ibid., passim.
[40] P. 310.
[41] Belot, Cheval. rom., I, p. 400.
[42] Becker, Alterth., I, p. 521.
[43] L. L., V, 48.
[44] Becker, Alterth., I, p. 522, etc. — V. Kiepert, Atl. antiq., IX.
[45] Varr., l. c.
[46] Teuffel, Litt. lat., 138.
[47] Teuffel, Litt. lat., 167.
[48] En 716 U. C. = 8, suivant Jordan, Topogr., I, 1, p. 302.
[49] Varr., l. c.
[50] L. c.
[51] Topogr., I, p. 178, 188.
[52] Cette disposition résulte de l’écart constaté entre la ligne du pomerium décrite par Tacite (Ann. XII, 24) et la muraille découverte par M. Ross. V. Jordan, Topogr., I, 1, p. 178.
[53] Denys, IV, 15.
[54] Mommsen, Hist. rom., trad. Alex., I, p. 52. — Cf. Marquardt, Staattverw., I, p. 4.
[55] Henzen, 6010.
[56] Jordan, Topogr., I, 1, p. 184, n. 55.
[57] L. c.
[58] Jordan, Topogr., I, 1, p. 231-232.
[59] Varr., L. L., V, 41-55.
[60] L’inscription qui nous fait connaître le pagus Aventinus (Henz., 6010) est antérieure à la transformation du vigintisexvirat en vigintivirat que M. Mommsen place en 731 U. C : = 20 av. J.-C. (Staatsr., I. p. 529). M. Jordan place l’institution des quatorze régions en 746 U. C. = 8. Elle a, du reste, l’orthographe des premières années d’Auguste (Borghesi, Bull. dell’ Inst., 1842, p. 104.
[61] C. I. L., I, 801, 802. V. Detlefsen, Bull. dell’. Inst., 1861, p. 48-63.
[62] C. I. L., VI, 3823. — V. Lanciani, Bull. della Commiss. arch. municip., 1875, p. 190-203. Ces inscriptions appartiennent toutes à l’époque républicaine. Il en est de même de l’inscription qui nous fait connaître deux pagi, dont l’emplacement ne peut être fixé (C. I. L., I, 804). Quoi qu’en dise M. Jordan (Topogr., I, 1, p. 278, n. 43), on ne connaît point de pagus Capitolinus. C’est peut être que le Capitole, tout en étant en dehors des tribus serviennes, était, enclos dans le pomerium (V. 2e partie, ch., I, $ 5). Sur le Collegium Capitolinorum, v. Mommsen, C. I. L., I, 805.
[63] V. Detlefsen, l. c., p. 53. — Cf. le pagus Augustus felix Suburbanus en dehors de Pompéi. Nissen, Pompeian., Stud., p. 379.
[64] C’est peut-être ce qu’il faut entendre par ces mots de Tite-Live : Auget Esquilias. I, 44.
[65] Jordan, Topogr., I, 1, p. 319, n. 17, et p. 324-327.
[66] V. Schwegl., Rom. Gesch., I, p. 444.
[67] La gens Quinctia. V. 2e partie, ch. I, § 5.
[68] Ann., XII, 24. Cf. Denys, IV, 13. — V. Jordan, Topogr., I, 1, p. 320 et 319, n. 17. Cf. p. 202, n. 1.
[69] Varr., L. L., V, 48.
[70] Fest., p. 309. — A moins cependant que la tradition rapportée par Verrius Flaccus n’ait été imaginée par lui ou quelque autre pour justifier l’étymologie Sucusa, succurere. Le rôle stratégique du pagus Sucusanus n’apparaît pas très nettement dans le texte de Festus.
[71] Varr., L. L., V, 158.
[72] T. L., I, 33. Denys, III, 45. — V. Jordan, Topogr., I, 1, p. 242, etc. Il ne peut être question que d’un poste avancé.
[73] T. L., I, 33. Fest., p. 254. Cf. Aurel. Vict., Vir. ill., 8. — V. Ampère, Hist. rom. à Rome, II, p. 26-27.
[74] T. L., l. c. Denys, III, 43. Flor., 4.
[75] Jordan, Topogr., I, 1, p. 172.
[76] Ibid., p. 179 et p. 206.
[77] Fest., p. 174. Varr., L. L., V, 155.
[78] M. Mommsen, remarquant que les chapelles des Argées forment trois couples dans les quatre régions de la ville de Servius, suppose que ces régions se subdivisaient en trois districts affectés aux trois tribus. C’est une conjecture. (Hist. rom., trad. Alex., I, p. 72).
[79] IV, 14.
[80] Alterth., I, p. 126. — Il est suivi par Ampère (Hist. rom. à Rome, I, p. 90, etc.). M. Mommsen (Hist. rom., trad. Alex., I, p 68) et M. de Rossi (Piante icon., p. 12) suivent Niebuhr (Hist. rom., trad. Golbéry, I, p. 114), pour qui la ville du Septimontium est la Rome intermédiaire entre Romulus et Servius Tullius.
[81] L. L., V, 41.
[82] V. Schwegl., Rom. Gesch., I, p. 419, etc. Jordan, Topogr., I, 1, p. 197, n. 76, et p. 200, avec la note 80. Reinach, Manuel de Philologie, p. 258, n. 3.
[83] L. L., VI, 24 : Dies Septimontium nominatus. — Cf. Festus, p. 340 : Septimontium dies appellatur. Plutarque, Quæst. rom., 69 : τόν δέ Σεπτιμούντιον άγουσιν. — Cf. Lydus, d’après Becker, Alterth., I, p. 123, n. 176.
[84] P. 321.
[85] En., XI, 317.
[86] Denys, I, 9, et alias.
[87] T. L., V. 50.
[88] Varr., L. L., V, 46-55. V. Jordan, Topogr., I, 1, p. 279-281.
[89] Topogr., I, 1, p. 199.
[90] V. Willems, Sénat, I, p. 57-58.
[91] Fest., p. 348.
[92] Varr., L. L., V, 46. Paul. Diac., p. 44. Tac., Ann., IV, 65. Disc. de Claude. col. 1, 12-25. Nipperdey, édit. de Tacite.
[93] Pro domo, 28.
[94] P. 340.
[95] V. Jordan, Topogr., I, 1, p. 461. Detlefsen, Bull. dell’ Inst., 1861, p. 63.
[96] L. L., V, 41-55.
[97] V. p. 199, p. 279, n. 44, p. 291.
[98] V. Mommsen, C. I. L., I, 802.
[99] L. L., V, 51. — V. Becker, Alterth., I, p. 563.
[100] Marquardt, Staatsverw., III, p. 411. Mommsen, Hist. rom., trad. Alex., I, p. 74.
[101] De petit. cons., 8.
[102] Denys, IV, 14, 15.
[103] L. L., V. 41-55.
[104] 50.
[105] Cf. Lydus, Frag. d’après Becker, Alterth., I, p. 123, n. 176.
[106] Georg., II, 535. En., VI, 783.
[107] Le Germalus ne se distingue pas aujourd’hui du Palatin. Le Fagutal, l’Oppius et le Cispius ne se remarquent guère sur le plateau de l’Esquilin. La Velia forme une éminence médiocre vers l’arc de Titus.
[108] V. III, 7.
[109] II, 37.
[110] 50.
[111] IV, 13.
[112] I, 44.
[113] 10, 11.
[114] Jusque sous Claude. Aul. Gell., XIII, 14.
[115] Varr., L. L., V, 158. Cf. Mart., V, 22.
[116] Sur la faiblesse de la position du Quirinal, v. Strabon, V, III, 7. Denys, IX, 68. Cie., de Rep., II, 6. — Les travaux entrepris sur le mont Tarpéien sont attribués à la même dynastie qui a annexé le Quirinal et l’a garanti par l’ay8er de Servius. Ce sont deux faits qui se correspondent. T. L., I, 38, 55. Denys, III, 69 ; IV, 59. Cie., De Rep., II, 20.24. — Tacite, plus logique que les autres historiens, fait sa part à Servius dans l’œuvre de la construction du Capitole (Hist., III, 72). — D’après Pline, c’est Tarquin le Superbe, auquel on fait honneur le plus souvent de ce dernier travail, qui a construit aussi l’agger du Quirinal (H. N., III, 9, édit. Detlefsen).
[117] T. L., II, 8. Denys, III, 69 ; V, 35. Plut., Publ., 15. Tac., l. c.
[118] V. Varron, L. L., V, 46-55. Jordan, Topogr., I, 1, p. 280, 281.
[119] Daremberg et Saglio, art. Asyle.