HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

TOME NEUVIÈME

LIVRE DIXIÈME

 

CHAPITRE PREMIER. — CONSTITUTION DE 1793

 

 

La Constitution, universellement et impatiemment attendue. — Projet girondin ; projet montagnard. — Caractères du premier ; Rationalisme et Individualisme ; caractères du second : Culte du Sentiment et Fraternité. — Pourquoi l’idée d'un Être suprême est absente du projet girondin et domine le plan montagnard. — Affinité secrète entre les divers aspects de toute conception de l'Esprit humain. — Le Panthéisme est la religion de qui croit à la solidarité humaine ; l’Athéisme, la religion de qui ramène tout à l’individu ; le théisme, la religion de qui n’adopte, de la solidarité humaine, que son côté moral, la Fraternité. — A quel point de vue se plaçait Robespierre en proclamant l’Être suprême. — Le projet montagnard, moins démocratique en apparence que le projet girondin, l’était davantage en réalité. — Les Montagnards opposés au système du Gouvernement du Peuple pur lui-même. — Contradictions de la Constitution de 1793 ; leur cause. — La Constitution de 1793, instrument de parti en même temps qu’exposé de principes. — Entretien de Baudin et de Barère sur la Constitution de 1793. — Rapport de Hérault de Séchelles. — Débats relatifs à la Constitution. — Elle est votée. — Ses vices. — La Constitution de 1793 inférieure à la Déclaration des droits de Robespierre. — Opposition des Enrayes. — Attaques des Girondins. — Pamphlet de Condorcet contre l’œuvre montagnarde. — On lui cherche un asile. — Madame Vernet et Condorcet. — La plupart de ceux qui ont voté la Constitution de 1793 sont morts ou ont été proscrits pour elle.

 

Défendre la Révolution ne suffisait, pas, il fallait l’organiser : la Convention sut pourvoir à tout. Depuis longtemps déjà, le soin de préparer une constitution nouvelle avait été confié à une commission de neuf membres, dont Condorcet faisait partie, et, après plusieurs mois de discussions savantes, celle commission avait présenté son projet.

Le plan de Condorcet renfermait jusqu’à treize titres, subdivisés en un très-grand nombre d’articles : l’ardente lutte engagée alors entre la Gironde et la Montagne lit ajourner l’examen d’un travail aussi considérable, mais sans le faire perdre de vue.

Condorcet, impatient, avait demandé la fixation d'un délai à l’expiration duquel une nouvelle Convention devait être convoquée, et la proposition, peu remarquée à Paris, avait été accueillie avec faveur dans les départements[1] : bientôt ce ne fut qu’un vœu, qu’un cri. Les esprits passionnés pour le culte de la justice se persuadaient volontiers que ses ennemis seraient invinciblement confondus le jour où elle éclaterait en vives formules ; et, quant aux âmes quêtant de discordes avaient lassées, elles soupiraient après l’avènement de la loi, comme devant ouvrir l’ère de la réconciliation générale et du repos.

Les systèmes se produisirent donc à l’envi. Sur le terrain où les passions continuaient de se heurter avec fureur, les idées vinrent se ranger en bataille. Chacun avait son plan de régénération sociale à proposer. Varlet publia le sien, en présence et sous les auspices de l'Être suprême, reconnu l’auteur de toutes les créations. Dans ce travail, qui témoignait à la fois, et d’un grand désordre d’esprit, et de quelques aspirations élevées, le fougueux élu de l’Évêché avait mêlé le bien et le mal d’une manière étrange ; il y faisait dériver du droit individuel de conservation la légitimité de la peine de mort appliquée au meurtrier, théorie digne du moyen âge, pitoyable retour à un passé plein de sang ; et, de la même plume, décrivait ces maximes, qui allaient au delà de l’utopie de l’abbé de Saint-Pierre : Les nations ne forment qu’une seule famille. — Il n’y a qu’un pouvoir, celui des nations souveraines. — Les autorités créées en sont des émanations, qui leur demeurent toujours subordonnées, etc., etc.[2]

Il serait trop long de rendre compte de tonies les publications qu’enfanta ce mouvement des esprits ; qu’il nous suffise de rappeler, comme hommage au génie cosmopolite de la Révolution française, qu’on vit figurer dans la lice plus d’un étranger, et, notamment, l’Anglais George Edwards[3]. Une pareille préoccupation voulait être respectée ; aussi la Gironde n’eut pas été plutôt vaincue, que les Montagnards s’empressèrent de reprendre le travail de la Constitution. Pour le mener à bien, on adjoignit aux membres du Comité de salut public cinq membres, qui lurent : Hérault de Séchelles, Ramel, Mathieu, Cou- thon, Saint-Just[4]. Les commissaires désignés avaient sous les yeux le plan de Condorcet ; ils le refirent dans l’espace de quelques jours. Le Comité de salut public amenda, accepta leur œuvre en une seule séance[5], et, le 10 juin, Hérault de Séchelles la soumit aux délibérations de l’Assemblée.

Reconnaissance formelle du principe de la souveraineté du peuple ;

Extension donnée aux élections populaires ; Egalité des droits politiques entre tous les citoyens ; Consécration des franchises de la pensée ; Unité du pouvoir législatif ; Renouvellement fréquent des fonctionnaires publics ; Eligibilité de tous à tous les emplois ; Rééligibilité indéfinie : Précautions contre l’abus de la force armée :

Tels étaient les points, très-importants, sur lesquels le plan montagnard s’accordait avec le plan girondin qu’avait présenté Condorcet.

Mais il suffit de rapprocher les deux projets pour être frappé des différences.

Et d’abord, en ce qui touche la forme, le travail girondin est sec, quoique diffus, et surchargé de détails réglementaires. Pas un mot qui y réponde à un battement de cœur : c’est l’œuvre par excellence du RATIONALISME.

Du plan montagnard, au contraire, on put dire qu’il était tracé en style lapidaire[6], tant le caractère en est monumental ! Et Sieyès fut autorisé, jusqu’à un certain point, à l’appeler une table des matières [7], tant la forme en est laconique ! Mais ce laconisme n’a rien d’aride. Oui ne reconnaîtrait la source où furent puisés des traits tels que ceux-ci : Est admis à l’exercice des droits de citoyens français tout étranger qui sera jugé par le Corps législatif avoir bien mérité de l’humanité. — Est Français tout étranger qui, domicilié en France depuis une année, adopte un enfant ou nourrit un vieillard. — Il y a oppression contre le corps social quand un seul de ses membres est opprimé. — Le peuple français donne asile aux étrangers bannis de leur patrie pour la cause de la liberté. Il le refuse aux tyrans[8]. N’y a- t-il pas là quelque chose du souffle de Jean-Jacques ? Et ces chaudes couleurs ne sont-elles pas empruntées à celle des deux philosophies du dix-huitième siècle qui était venue proclamer le règne du SENTIMENT ?

Descendez, en effet, au fond des deux projets : vous y trouverez en présence les deux doctrines dont l’avenir découvrira le lien, mais qui alors se considéraient comme ennemies : RATIONALISME et INDIVIDUALISME d’une part ; d'autre part, Philosophie du sentiment et FRATERNITÉ.

Avec quelle sollicitude le projet girondin énumérait et rassemblait les garanties propres à défendre l’individu contre la pression de la société ! Ecoutons Condorcet :

Les citoyens ne peuvent être distraits des juges que la loi constitutionnelle leur assigne.

— Nul ne peut être mis en état d’arrestation qu’en vertu d’un mandat des officiers de police, ou d’une ordonnance de prise de corps d’un tribunal, ou d’un décret d’arrestation du corps législatif, ou d’un jugement de condamnation à la prison.

— Toute personne conduite devant l’officier de police sera interrogée sur-le-champ, ou au plus lard dans les vingt-quatre heures, sous peine de destitution et de prise à partie.

— S’il y a lieu d’envoyer la personne détenue à la maison d’arrêt, elle y sera conduite dans le plus bref délai, qui, en aucun cas, ne pourra excéder trois jours.

— Le directeur du jury d’accusation sera tenu de le convoquer dans le délai d’un mois au plus tard, sous peine de destitution.

— Nul gardien ou geôlier ne peut recevoir ni retenir aucun homme qu’en vertu d’un mandat, ordonnance de prise de corps, décret d’accusation ou jugement, et sans que la transcription en ait été faite sur son registre.

— La maison de chaque citoyen est inviolable. Pendant la nuit, on n’y peut entrer qu’en cas d’incendie ou de réclamation de l’intérieur de la maison ; et, pendant le jour, qu’en vertu d’un ordre de l’officier de police.

— La liberté de la presse est indéfinie[9].

 

Ces garanties, si précieuses, le projet montagnard les passait-il sous silence ? Non, sans doute ; mais, outre qu’il se bornait à les énoncer d’une manière sommaire, il s’abstenait d’indiquer les moyens de les réaliser. On y lisait : La Constitution garantit à tous les Français l’égalité, la liberté, la sûreté, la propriété, le libre exercice des cultes, une instruction commune, des secours publics, la liberté indéfinie de la presse, le droit de pétition, celui de se réunir en sociétés populaires[10]. Déclaration trop vague, et qui ne contient rien sur la liberté individuelle, rien sur l’inviolabilité du domicile, rien sur les formes sacramentelles à suivre pour empêcher l’arbitraire ou l’abus des arrestations préventives.

Sous ce rapport donc, l’infériorité du projet montagnard était manifeste ; mais, où sa supériorité éclatait, c’était en ce qui se rattachait au dogme de la Fraternité humaine.

Ainsi les Montagnards et les Jacobins ne se contentaient pas de dire comme les Girondins : La liberté consiste à faire tout ce qui n’est pas contraire aux droits d’autrui[11] ; ils ajoutaient : Elle a pour règle LA JUSTICE[12].

Les premiers avaient mis à la charge de l’Etat les secours publics[13], et pas davantage ; les seconds écrivirent dans le pacte constitutionnel : La société doit la subsistance aux citoyens malheureux, soit en leur procurant du travail, soit en assurant des moyens d’exister à ceux qui sont hors d’état de travailler[14].

Les premiers avaient écarté le principe de la solidarité humaine ; les seconds le formulèrent en termes solennels[15], et, pour lui donner une consécration religieuse, l’associèrent à l’idée d’un ÊTRE SUPRÊME[16]...

Ici quelques remarques sont nécessaires.

Dans le cours de la Révolution mémorable dont nous écrivons l’histoire, il arriva certainement à plus d’un républicain honnête et sincère de pousser ce cri de la conscience révoltée : Dieu, qui permets le mal, tu ne saurais exister ! On avait tant abusé de la notion d’un être invisible, existant au-dessus et en dehors de l’humanité ! On lui avait tant fait sanctionner de crimes, a ce roi des rois ! Et la terre, qu’il épouvantait et abêtissait du haut de son trône fantastique, posé sur l’enfer, était devenue si lasse de le porter ! D’où vient donc que les Jacobins jugèrent indispensable d’écrire en tête du pacte social l’article fameux qui affirmait un Dieu personnel ? Si l’athéisme leur répugnait, parce que, niant l’âme universelle en même temps que la personnalité de Dieu, il tend à mettre un ramas d’hommes à la place de l’humanité, d’où vient qu’en vertu de cette affinité secrète qui fait de nos idées métaphysiques la contre-épreuve de nos croyances politiques ou sociales, ils ne poussèrent pas jusqu’au panthéisme ?

Ils disaient : Le souverain d’une nation, c’est l’universalité des citoyens.

Ils disaient : Le souverain de la terre, c’est l’universalité des peuples.

Pourquoi ne dirent-ils pas : Dieu est l’universalité des êtres ?

Ils avaient entrevu que chacun est dans tous, que l’humanité tout entière est dans chacun ; un pas de plus les eût conduits au panthéisme, qui est l’aspect religieux de la solidarité humaine : pourquoi s’arrêtèrent-ils à l’idée d’un Dieu personnel, c’est-à-dire existant en dehors de la nature et de l’humanité ?

Ah ! c’est que les Jacobins de 1793 n'avaient encore qu’une notion très-vague de cette identité des intérêts dont le mol fraternité exprime seulement le côté moral. Ces belles paroles qui, de la déclaration des droits formulée par Robespierre, passèrent dans le projet de Hérault de Séchelles : Il y a oppression du corps social quand un seul de ses membres est opprimé, ne suffisent pas pour prouver que Robespierre lui-même ait cru réalisable un ensemble d’institutions parfaitement en harmonie avec la hardiesse d’un tel principe. Tout cela était encore trop loin dans l’avenir, et les grands révolutionnaires de 1793, lorsqu'ils proclamaient le droit au travail, croyaient loucher aux dernières limites que pût atteindre, en sa plus généreuse audace, le vol de la pensée.

C’est pourquoi ils se bornèrent à affirmer un Être suprême.

Mais ils eurent soin — qu’on ne l’oublie pas — d’opposer l’Être suprême à ce bon Dieu au nom duquel tant d’atrocités avaient été commises dans le monde. Nous avons déjà cité ce que Camille Desmoulins écrivait spirituellement, à propos d’un arrêté de Manuel contre la procession delà Fête-Dieu : Mon cher Manuel, les rois sont mûrs, le bon Dieu ne l’est pas encore. — Notez que je dis le bon Dieu, et non pas Dieu, ce qui est bien différent[17].

Non : pas plus que Guadet, Robespierre ne croyait au Dieu que l’inquisition avait adoré à la lueur des bûchers et les genoux dans le sang ; au Dieu farouche que Saint- Cyran osait appeler juste, alors qu’il damnait de pauvres enfants jusque dans les entrailles de leurs mères[18]. La pensée de Robespierre, telle qu’il la développa lui-même, était celle-ci : Qu’y a-t-il entre les prêtres et Dieu ? Les prêtres sont à la morale ce que les charlatans sont à la médecine. Combien le Dieu de la nature est différent du Dieu des prêtres ! Je ne connais rien de si ressemblant à l’athéisme, que les religions qu’ils ont faites. A force de défigurer l’Être suprême, ils l’ont anéanti autant qu’il était en eux. Ils en ont fait tantôt un globe de feu, tantôt un bœuf, tantôt un arbre, tantôt un homme, tantôt un roi. Les prêtres ont créé un Dieu à leur image : ils l’ont fait jaloux, capricieux, avide, cruel, implacable ; ils l’ont traité comme jadis les maires du palais traitèrent les descendants de Clovis, pour régner sous son nom et se mettre à sa place... Le véritable prêtre de l’Être suprême, c’est la nature ; son temple, l’univers ; son culte, la vertu ; ses fêtes, la joie d’un grand peu pie rassemblé sous ses yeux pour resserrer les nœuds de la fraternité universelle... Prêtres, par quel titre avez-vous prouvé votre mission ?... Le sceptre et l’encensoir ont conspiré pour déshonorer le ciel et usurper la terre[19].

Ainsi Robespierre était loin d’admettre qu’il pût y avoir dans le ciel un modèle des tyrans terrestres. Mais, au lieu de rejeter Dieu purement et simplement, comme les Girondins, il voulait que les hommages rendus jusqu’alors au Dieu de l’iniquité le fussent désormais au Dieu de la justice : Eh ! que vous importent à vous, législateurs, les hypothèses diverses par lesquelles certains philosophes expliquent les phénomènes de la nature ? Vous pouvez abandonner tous ces objets à leurs disputes éternelles ; ce n’est ni comme métaphysiciens ni comme théologiens que vous devez les envisager ; aux yeux du législateur, tout ce qui est utile au monde et bon dans la pratique est la vérité. L’idée de l’Etre suprême et de l’immortalité de l’âme est un rappel continuel à la justice ; elle est donc sociale et républicaine[20].

Comment les Montagnards et les Girondins, c’est-à-dire des hommes qui poursuivaient d’une égale horreur les abus et les mensonges du passé, furent-ils conduits, sur un chapitre de cette gravité, à des conclusions différentes ? La réponse est facile.

Quel était le principe des Girondins ? l’individualisme pur. Quel était l’étal social qu’appelaient leurs aspirations ? un système bien combiné de garanties. Qu’un cadre fût construit où le fort et le faible, le riche et le pauvre, le savant et l’ignorant, se vinssent mouvoir aussi librement que possible, mais avec la diversité des chances liée à l'inégalité de leurs forces naturelles ou de leurs ressources acquises, l’idéal ries Girondins n’allait pas au delà. Donc, pas de despotisme à visage humain dans leur doctrine, mais aussi pas de protection sociale ; à chacun de pourvoir à sa propre destinée, dans sa sphère particulière et de son mieux ! S’il se trouvait que les fardeaux ne fussent pas proportionnés aux forces, tant pis pour les faibles ! Or, pourquoi ceux qui écartaient la notion d’un pouvoir tutélaire parmi les hommes auraient-ils admis celle d’un pouvoir tutélaire dans les cieux ? Celui-là sera bien près d’être athée, s’il est logique, qui, méconnaissant le lien mystérieux des êtres, ramène tout à I existence individuelle, comme celui-là sera volontiers panthéiste, qui, généralisant la vie, retrouve la sienne dans celle des autres.

Aussi Dieu est-il absent du travail de Condorcet. A qui les eût interrogés sur cette omission, les Girondins eussent probablement répondu, comme Laplace à Napoléon : Nous n’unions pus besoin de cette hypothèse.

Mais Robespierre et les Jacobins crurent en avoir besoin, eux, pour imprimer une haute sanction morale a 'l’idée que l’intervention d’un pouvoir actif et juste était acquise là où il y avait des faibles à protéger, des pauvres a nourrir, des malheureux à sauver, non pas seulement de l’oppression, mais de l’abandon. Ils savaient qu’au malade qui se retourne en gémissant sur son lit de douleur il importe peu d’apprendre qu'il a le droit d’être guéri, si on ne le guérit pas ; ils savaient que le droit de marcher, reconnu au paralytique, n’est que dérision de la part de qui ne lui tend pas la main ; ils savaient que la destruction de la misère a pour principal obstacle la misère même, despotisme plus terrible qu’aucun de ceux qui portent nom d’homme, et contre lequel c’est un triste préservatif que la doctrine glacée du chacun chez soi, chacun pour soi ; laissez passer, laissez faire.... laissez mourir !

Ils n’eurent garde, conséquemment, d’étendre à l’idée de protection la haine que l’idée de tyrannie leur inspirait, et, remontant, par une chaîne naturelle, de la nécessité d’une intervention sociale à celle d’une intervention divine, ils firent de la conception de l’Etre suprême le complément du dogme, encore imparfait dans leur esprit. de la Fraternité.

Sous le rapport politique, la différence n’était pas moins grande entre le projet de Condorcet et celui de Hérault de Séchelles, et elle présentait un caractère analogue.

En apparence, rien de plus démocratique que le plan girondin. La nation tout entière, divisée en assemblées primaires de quatre cent cinquante à neuf cents membres[21], y était appelée :

1° À élire directement les membres du Corps législatif[22], les administrateurs[23], les ministres[24] ;

2° A exercer droit de censure sur les actes des mandataires publics, et à provoquer, le cas échéant, soit la réforme d’une loi existante, soit la promulgation d’une loi nouvelle[25] ;

3° À nommer une Convention pour la réforme des lois constitutionnelles, par suite d’une initiative qu’il appartenait à chaque citoyen de prendre[26].

Condorcet aurait même voulu que tous les citoyens concourussent à la confection des lois[27] ; et c’est ce qu’il eût proposé, s’il n’eût été retenu par la crainte que l’éducation du peuple ne fût pas encore au niveau de l’exercice d’un pareil droit[28].

Chose remarquable ! le projet montagnard, eu égard au choix des personnes, accordait beaucoup moins à l’élection directe. Il appelait bien le peuple à élire directement les membres de la législation ; mais le choix des administrateurs et celui des ministres, il l’attribuait à des assemblées électorales de district et de département[29]. Le nombre des ministres étant fixé à vingt-quatre[30], l’assemblée électorale de chaque département nommait un candidat, et, sur la liste générale, le Corps législatif choisissait les membres du Conseil[31].

Etait-ce donc que, chez les Montagnards, le sentiment démocratique fût moins vif que chez les Girondins ? Non, certes ; ce qui était moins vif chez les Montagnards, c’était l’instinct du droit purement individuel. Le désir d’assurer à chacun, pris séparément, sa part directe de souveraineté, ne les aveuglait pas sur la nature des meilleurs procédés à suivre pour arriver au but suprême : l’affranchissement moral, intellectuel et social de la masse du peuple. Témoins indignés des effets d'une longue oppression, ils doutaient que les victimes eussent, abandonnées à leurs propres inspirations, la force de la secouer. Ils se défiaient de l’action que, dans nos campagnes, encore plongées en de si épaisses ténèbres, l’intrigue ne manquerait pas d’exercer sur l’ignorance, et le talent pervers sur la probité naïve. Ils ne voulaient pas qu’aux mains des riches, des beaux parleurs, des barons de l’industrie, des usuriers de village, des génies de chef-lieu, la souveraineté du peuple devint un moyen de mieux river ses chaînes, tout en les dorant. Ils ne faisaient point de la révolution à accomplir une affaire d’addition. C’est pourquoi ils eurent recours à l’institution des assemblées électorales de département, persuadés que, presque partout, ces corps intermédiaires seraient formés sous l’influence des sociétés jacobines de province, si promptes elles-mêmes à accepter l’initiative révolutionnaire de Paris.

Les Girondins ne s’y trompèrent pas. De là cette véhémente exclamation de Salles, dans le pamphlet qu’il lança en fuyant, comme les Parthes lançaient leurs flèches : Français, voulez-vous devenir la conquête de Paris ?[32]

Mais Paris, c’est la France en petit, ou plutôt, la France en grand.

Les Montagnards le comprirent bien ; et toutefois il se glissa dans leur œuvre une disposition qui semblait les faire plus girondins que les Girondins eux-mêmes. Ils écrivirent : Le peuple délibère sur les lois[33].

Quel sens attachèrent-ils à ces mots ? Entendaient-ils par là introduire dans le suffrage universel la confusion des langues, et du choc de quelque quarante mille parlements rivaux faire sortir la solution de tout problème ? Leur arriva-t-il d’oublier tout à coup avec quelle force ils avaient eux-mêmes attaqué, dans le débat sur l’appel au peuple, le régime des assemblées primaires, étendu outre mesure ? Car c’était Marat qui avait dénoncé l’exagération du suffrage universel comme le pire des maux[34].

C’était Robespierre qui avait dit, en plein club des Jacobins, et cela sans qu’une seule voix se fût élevée pour le contredire : Je ne connais pour un peuple que deux manières d’exister : ou bien qu’il se gouverne lui-même, ou bien qu’il confie ce soin à des mandataires ; nous, députés républicains, nous voulons établir le gouvernement du peuple par ses mandataires, avec responsabilité ; c’est à ces principes que nous rapportons nos opinions[35].

Oui, déconsidération et ruine du suffrage universel, égaré ;

Mutilation du souverain, sous couleur d’hommage à sa souveraineté ;

Immolation des minorités gardiennes du progrès à une majorité de hasard, irresponsable et contre laquelle il n’y aurait plus de recours ;

Guerre civile semée dans l’antagonisme d’une foule de petites assemblées locales où les oppresseurs du peuple seraient toujours présents, et d’où serait presque toujours absent le peuple opprimé ;

Déchéance intellectuelle de Paris ;

Décri de l’idée d’organisation, seule propre à affranchir les prolétaires ;

Disparition d’un lieu central de rendez-vous, ménagé aux opinions diverses, pour s’y mesurer, en présence de la nation entière, attentive à leurs débats ;

Substitution d’une myriade d’obscurs conciliabules à cette tribune haute et sonore d’où il fut donné à la Révolution d’envoyer sa parole aux extrémités de la terre :

Voilà ce que Robespierre, et Marat, et les Jacobins, avaient aperçu au fond de la théorie qui, sous le nom trompeur de gouvernement du Peuple par lui-même, ne fait que consacrer, en retendant à toutes choses, le despotisme du nombre[36].

Donc, en dépit de ces mots : Le peuple délibère sur les lois, mots échappés à la distraction des rédacteurs ou introduits par un calcul de popularité, la Montagne n’entendit nullement consacrer, au sein des assemblées primaires, la discussion des projets de loi présentés à leur assentiment. Cela est si vrai, que la Constitution de 1793 porte : Les suffrages sont donnés par oui et par non[37]. Il y a plus : Ducos et Penière ayant demandé que l’article exprimât formellement le droit qu’avait le peuple de discuter la loi, celle proposition fut repoussée, et l’on décida que la manifestation de la volonté populaire resterait confinée dans les limites de l’acceptation ou du rejet, formulés purement et simplement[38].

On ne saurait nier qu’il n’y eût en tout ceci une contradiction choquante. En principe, on semblait reconnaître au peuple le droit de délibérer sur les lois, et, en fait, on le lui interdisait ! Puis, que signifiait cette intervention par oui et par non qui faisait du peuple une machine à voler ? La belle souveraineté, vraiment, que celle qui, n’allant pas jusqu’au pouvoir d’amender la loi présentée, risque d'être étouffée entre deux syllabes ! Le respectable souverain que celui auquel on défend toute décision qui ne serait pas le oui ou le non qu’on lui demande ! Est-ce faire la loi que d’accepter ou rejeter une loi faite par d’autres ?

Encore si la Constitution de 1793 eût appelé le peuple à sanctionner de celle façon toutes les lois, ou du moins les plus importantes ! Mais non : le danger du système de la législation directe frappait si vivement les Montagnards, qu’ils eurent soin de diviser la matière des règlements généraux en deux catégories : l’une, comprenant ce qu’ils nommèrent les lois ; l’autre, embrassant ce qu’ils nommèrent les décrets. Les décrets, ils les affranchirent de la nécessité de la sanction préalable du peuple. Or, sous ce titre, que désigna-t-on ? La plupart des actes législatifs qui influent d’une manière décisive sur l’existence politique et sociale d’une nation. Furent compris, par exemple, sous le nom particulier de décrets, et soustraits conséquemment au contrôle populaire :

L’établissement annuel des forces de terre et de mer ;

L’introduction des forces navales étrangères dans les ports de la République ;

Les mesures de sûreté et de tranquillité générale ;

La distribution annuelle et momentanée des secours et travaux publics ;

Les ordres pour la fabrication des monnaies de toute espèce ;

Les dépenses imprévues et extraordinaires ;

Les mesures locales et particulières à une administration, à une commune, à un genre de travaux publics ;

La défense du territoire ;

La ratification des traités ;

La nomination et la destitution des commandants en chef des armées ;

La poursuite de la responsabilité des membres du Conseil, des fonctionnaires publics ;

L’accusation des prévenus de complots contre la sûreté générale de la République ;

Tout changement dans la distribution partielle du territoire français ;

Les récompenses nationales[39].

En d’autres termes, ce que la Constitution de 1793 retranchait du gouvernement direct du peuple par lui- même, c’était... le gouvernement presque tout entier ; car que ne pouvait-on faire entrer dans des articles aussi élastiques que ceux-ci : mesures de sûreté générale ; dépenses imprévues...

Il est vrai que, dans la catégorie beaucoup plus resserrée des lois, figuraient deux articles très-essentiels, savoir : la déclaration de guerre et les contributions[40]. Mais, comme nous le verrons plus loin, l’exercice du premier de ces droits entre les mains du peuple fut défini, lors du débat, dans un sens fort restrictif ; et le second, à force d’être impraticable, était évidemment illusoire. Comment faire répartir par des milliers d’assemblées primaires cet impôt direct dont la fixation n’est qu’un jugement entre les divers groupes de contribuables ? A part les inconvénients attachés, en pareille matière, à l’égoïsme local, comment croire possible ailleurs qu’au centre une opération de calcul qui repose nécessairement sur des relevés de produits antérieurs, sur des tableaux du prix des choses dans les différents pays, sur des observations approfondies touchant la marche du commerce et le mouvement des manufactures ? Supposer que tant de petites assemblées éparses arriveraient à évaluer uniformément la dépense annuelle, d’après la valeur des denrées, les devis de construction ou de fournitures, l’état des établissements publies et des magasins, quelle chimère ! La Montagne ne pouvait s’y méprendre. Il est donc manifeste que le peu qu’elle eut l’air d’accorder au système de la législation directe, c’est-à-dire à ce régime des assemblées primaires tant combattu par elle-même, lui fut comme arraché ; elle voulut ménager les susceptibilités départementales que, précisément à cette heure-là, les Girondins proscrits s’efforçaient de changer en révolte. Car, il ne faut pas l’oublier, la Constitution de 1793 fut comme rédigée au bruit du tocsin sonné, dans les trois quarts des villes de France, contre la prépondérance et l’initiative de Paris ; de sorte que les Montagnards se trouvèrent placés entre deux grandes craintes : s’ils paraissaient trop se délier du régime des assemblées primaires, ils prêtaient le flanc aux coups de la Gironde, et fournissaient un aliment très-actif à l’incendie qu’ils avaient hâte d’éteindre ; si, au contraire, ils égaraient le suffrage universel hors de sa sphère naturelle. 1 élection par le peuple des mandataires du peuple, ils offraient aux agitateurs royalistes des milliers de points de ralliement ; ils créaient, dans un pays déjà cerné par la guerre étrangère, d’innombrables foyers de guerre civile. Pour échapper à cette alternative, ils donnèrent à la province, théoriquement et en apparence, une part du pouvoir dont Paris conservait toute la réalité.

Et ce fut au point qu’ils introduisirent dans la Constitution l’article suivant : Quarante jours après l’envoi de la loi proposée, si dans la moitié des départements plus un, le dixième des assemblées primaires de chacun d’eux, régulièrement formées, n’a pas réclamé, le projet est accepté et devient loi[41]. Ici encore l’intention de paralyser le droit de sanction conféré au peuple était évidente. Aussi les Girondins s’empressèrent-ils de la signaler. Du fond de sa retraite, Salles écrivit : Ils laissent à la nation le droit dérisoire de s’expliquer spontanément, bien sûrs que cette masse immense ne se remuera jamais de celle manière, et qu’ils pourront, au milieu du silence général et forcé du peuple, agiter leur capitale ![42]

Au résumé, la Constitution du 1793, si on la considère sous le rapport politique, eut ce défaut, très-grave dans un exposé de principes, d’être en même temps un instrument de parti.

A ce sujet, Baudin, député des Ardennes, raconte que Barère, l’ayant un jour rencontré dans la cour des Tuileries, le prit à part et lui demanda ce qu’on pensait de la Constitution. Comme ils étaient près du perron par lequel on entrait dans le Comité de salut public : Est-il possible, répondit Baudin, qu’à la vue des degrés du trône — et il montrait du doigt le perron — je me hasarde à parler sans feinte à Votre Majesté ?Allons, vous plaisantez. — Nullement. — Je n’exerce ici aucun pouvoir ilue vous ne partagiez avec moi. — Voilà certes une grande erreur, surtout si vous en tirez la conséquence que je suis de part dans vos opérations. — Mais, enfin, que dit-on de la Constitution ? Baudin se mit à réciter la tirade de Sosie, lorsqu’il prévient Amphitryon que la vérité le choquera et finit par lui dire :

Où comme avec les grands d’ordinaire on en use.

Je mentirai, si vous voulez.

Cette plaisanterie ne parut pas amuser Barère, mais elle piqua sa curiosité, qui devint plus pressante. Eh bien, reprit alors Baudin, puisque vous insistez, je pense qu’il n’appartient qu’à vous de dire que la Constitution est écrite en style lapidaire ; j’avoue, moi, qu’elle est rédigée avec clarté, avec précision ; qu’elle séduira sous ces rapports. Vous ne manquerez pas de prétendre que les patriotes, entravés pendant huit mois, ont donné en quinze jours une Constitution, dès que les opposants ont été terrassés. Elle éblouira ceux qui ne réfléchissent pas : le nombre en est grand ! Reste à savoir si elle peut marcher, je vous attends là. Mais, telle qu’elle est, c’est, entre vos mains, un instrument infaillible de succès. C’est une torpille avec laquelle vous endormirez les départements[43].

Hérault de Séchelles avait présenté son rapport le 10 juin : le 11, la discussion s’ouvrit.

On a écrit que cette discussion ne fut que pour la forme ; que ceux des Girondins qui restaient dans l’Assemblée refusèrent de s’associer au débat : tout cela est inexact. On vit, au contraire, figurer dans la lice, et très-activement, Fermont, Ducos, Fonfrède, Mazuyer. Il est même à remarquer que, loin de repousser aucune mesure comme trop populaire, ils renchérirent, en plusieurs occasions, sur les tendances démocratiques du Comité de salut public[44]. Ils ne négligèrent rien, non plus, pour détourner l'accusation de fédéralisme qui pesait sur leur parti. Fonfrède combattit vivement le système de ces représentations nationales, qui penchent au fédéralisme[45]. Hérault ayant oublié dans son projet de définir le peuple, l’universalité des citoyens, ce fut le girondin Fayau qui proposa cette définition, comme propre à fermer toutes portes au fédéralisme[46].

Du reste, les modifications apportées par le débat au projet que le Comité de salut public avait adopté ne furent ni très-nombreuses ni très-profondes. Sur la question de savoir si, dans les assemblées primaires, le vole aurait lieu à haute voix ou au scrutin, au choix du votant, Danton ayant demandé la liberté du choix, afin que le riche pût écrire, et le pauvre parler, Ducos s’écria : Les Médicis étaient des marchands ; ils avaient dix mille volants à leurs ordres ; ils ont fini par être souverains. Mais l’Assemblée ne s’arrêta point à cet exemple, séduite peut-être par ce mot de Barère : On ne peut pas contester aux bons citoyens le droit d’être courageux[47].

Le projet de Hérault de Séchelles portail que les députés ne pourraient être recherchés, accusés, ni jugés en aucun temps, pour les opinions par eux énoncées dans le Corps législatif. Et en cas de trahison manifeste ?... Robespierre aurait voulu qu’on trouvât un moyen de les contenir ou de les punir. Question épineuse ! Tiendrait- on la liberté des votes sous le poids d’une menace continuelle ? Que deviendrait alors la dignité des représentants du peuple ? Convenait-il de mettre leur conscience à la torture ? Et puis, quel danger, si l’intrigue s’emparait du pouvoir de frapper ! Robespierre insista pour que cette matière, selon lui très-délicate, fût mûrement examinée, et qu’on cherchât un procédé de nature à rendre la responsabilité des mandataires sérieuse, sans néanmoins porter atteinte à leur liberté morale. Mais où Robespierre voyait une œuvre d’avenir, la plupart des Montagnards voyaient une œuvre de circonstance, et ils étaient pressés d’en finir : on passa outre[48].

Le même sentiment d'impatience lit laisser de côté un chapitre qui instituait un grand jury national, chargé de protéger les simples citoyens contre les membres de la législature et du Conseil exécutif. Vainement Robespierre s’efforça-t-il de faire comprendre l’importance de cette institution dont il avait donné le premier l’idée, il ne put rien obtenir[49].

Nous avons dit que, dans la Constitution de 1793, la déclaration de guerre est comprise au nombre des lois : celle disposition, appuyée par Thuriot et Philippeaux, fut combattue par Ducos et Danton. Ce dernier réclamait, pour le gouvernement, le droit de défendre la nation contre une attaque imprévue. Thuriot revenant à la charge : Eh bien, dit Danton, que le Corps législatif soit autorisé à porter les premiers coups si le salut de l’Etat l’exige, et que ce commencement d’hostilités n’empêche pas que le peuple soit convoqué pour se prononcer sur la continuation de la guerre. On décréta l’article, ainsi expliqué et amendé[50].

Il était dit, dans le plan de Condorcet, que, d’intervalle en intervalle, la révision de la Constitution aurait lieu par une Convention nommée ad hoc, laquelle se réunirait dans une autre ville que le Corps législatif ; et, à cet égard, le projet de Hérault de Séchelles ne différait pas de celui de Condorcet. Il y avait là un danger qui n’échappa point au regard perçant de Robespierre. Un peuple qui a deux représentations, fit-il observer, cesse d’être unique. Une double représentation est le germe du fédéralisme et de la guerre civile. Qu’on ne m’objecte pas que les deux assemblées auraient des fonctions différentes : l’une s’armerait de la Constitution existante ; l’autre, de cet intérêt plus vif que prend un peuple à ses nouveaux représentants ; la lutte s’engagerait ; la rivalité éveillerait des liâmes, et les ennemis de la liberté profileraient de ces dissensions pour bouleverser la République. Ces observations frappèrent tous les esprits ; Hérault de Séchelles déclara s’y ranger[51], et l’on décréta que la Convention, formée de la même manière que les législatures, en réunirait les pouvoirs[52].

Robespierre ne montra pas moins de sagacité politique, en défendant, contre Chabot, l’article qui conférait a des assemblées électorales, au lieu de l’abandonner au vote direct du peuple, le choix des administrateurs et des ministres. Thuriot et Levasseur ayant mis en relief l’inconvénient de donner aux corps administratifs un caractère de représentation qui les mettrait en quelque sorte sur un pied d’égalité avec le Corps législatif et tendrait par là au fédéralisme, Robespierre développa avec, beaucoup de force, surtout en ce qui touchait la nomination des ministres, la considération suivante : Si le Conseil exécutif lient ses pouvoirs de la même source que le Corps législatif, il en deviendra le rival, et le rival très-dangereux, ayant la force que donne l’exécution[53].

Dans la séance du 17 juin, Levasseur et Ducos avaient demandé qu’on exemptât de toute contribution ceux qui n’avaient que l’absolu nécessaire ; et cette exemption, dictée par une généreuse sympathie pour les pauvres, formait un des traits caractéristiques de la Déclaration des Droits de Robespierre[54]. Mais, en examinant de près les conséquences d’un semblable privilège, le grand homme d’État de la démocratie était arrivé bien vite à reconnaître que c’était là une noble erreur. Il le déclara en ces termes : J’ai partagé un moment l’erreur de Ducos ; je crois même l’avoir écrite quelque part ; mais j’en reviens aux principes, et je suis éclairé par le bon sens du peuple, qui sent que l’espèce de faveur qu’on lui présente n’est qu’une injure. En effet, si vous décrétez que la misère exempte de l’honorable obligation de contribuer aux besoins de la patrie, vous décrétez l’avilissement de la partie la plus pure de la nation, vous décrétez l’aristocratie des richesses, et bientôt, vous verriez ces nouveaux aristocrates, dominant dans les législatures, avoir l’odieux machiavélisme de conclure que ceux qui ne contribuent pas aux charges ne doivent point partager les bienfaits du gouvernement ; il s’établirait une classe de prolétaires, une classe d’ilotes... Ce qu’il y a de populaire et de juste, c’est le principe que la société doit le nécessaire à tous ceux de ses membres qui ne peuvent se le procurer par le travail. Je demande que ce principe soit consacré dans la Constitution, et que le pauvre qui, pour sa contribution, doit une obole, la reçoive de la patrie pour la reverser dans le trésor public[55]. C’est ce qu’on décida[56].

Tels furent les débats d’où sortit la Constitution de 1793. Ils ne durèrent que quelques jours, furent marqués par une extrême sobriété de paroles, et témoignèrent d’une grande hâte d’arriver au dénouement : ce dont il n’y a pas à s’étonner, lorsqu’on songe au théâtre de cette discussion et à sa date orageuse. Quelles préoccupations s’v mêlèrent ! Que d’incidents l’interrompirent ! Au milieu de ses graves travaux, il fallait que l’Assemblée s’occupât, tantôt de la Vendée, où les royalistes triomphaient ; tantôt du Calvados, soulevé par les Girondins. Chaque jour, quelque dépêche menaçante ou quelque nouvelle sinistre. De l’intérieur des départements, arrivaient des missives qui les montraient sur le point de prendre feu[57] ; Momoro, du fond de la Vendée, annonçait la prise de Saumur par les royalistes[58] ; Romme et Prieur (de la Côte-d’Or) écrivaient à la Convention pour lui rendre compte de leur arrestation à Caen.

Ce fut à l’occasion de cette lettre et d’un post-scriptum où Romme disait : Notre arrestation peut revêtir un grand caractère, si on nous constitue otages pour la sûreté des représentants détenus à Paris, que Gassuin osa insinuer, d’après le caractère de l’écriture, qu’on avait, forcé la main au signataire ; sur quoi Cambon s’écria : Vous vous trompez : Romme serait libre au milieu de toutes les bouches à feu de l’Europe[59].

Ce fut aussi à l’occasion des derniers articles de la Constitution qu’à ces paroles de Mercier : De tels articles s’écrivent ou s’effacent avec la pointe d’une épée. Avez-vous fait un pacte avec la victoire ? il fut répondu : Non, mais nous en avons fait un avec la mort.

Les uns nomment ici Bazire ; d’autres, Robespierre[60]. Eh ! qu’importe qui le poussa, ce cri sublime ? Levasseur, qui était là, dit qu’il fut poussé tout d’une voix par la Montagne[61]. Et, en effet, il est des mots qui ne se trouvent sur les lèvres d’un seul que lorsqu’ils se sont échappés du cœur de tous. La Constitution fut achevée le 25 juin. Comme on la mettait aux voix, une partie de l’Assemblée restant immobile, Billaud-Varenne, indigné, réclama l’appel nominal, pour apprendre enfin au peuple quels étaient, ses ennemis. C’eût été enlever au pacte fondamental qui venait de se conclure beaucoup de son autorité morale : Robespierre, plus habile, se contenta de dire d’un ton méprisant : Il faut croire que ces messieurs sont paralytiques ; et il fit passer à l’ordre du jour[62]. Ainsi qu’on devait s’y attendre, les députations affluèrent. Magistrats et simples citoyens accoururent en foule pour féliciter l’Assemblée : Dufourny, au nom des corps administratifs ; Pache et Chaumette, au nom de la Commune ; un juge, au nom des tribunaux de Paris ; un canonnier, au nom de ses camarades[63]. Billaud-Varenne, pour consacrer cette journée, voulait qu’on abrogeât la loi martiale : cette motion fut votée d’enthousiasme[64]. En ce moment, les officiers municipaux remplissaient la salle, et le peuple, se pressant aux portes, demandait à entrer : l’autorisation lui en fut accordée ; et, divisés en légions, précédés de tambours, les nombreux citoyens fini composaient le cortège défilèrent en criant : Vive la République ! Vive le 31 mai ! Vive la Montagne ![65]

Le soir, Paris prit ses habits de fête ; les canonniers se réunirent aux Champs-Elysées ; le peuple couvrit le Champ de Mars ; et, le lendemain, David rendit compte à la Convention des scènes émouvantes dont il avait été témoin[66].

Toutefois la Constitution de 1793 ne fut pas sans rencontrer des censeurs, même hors du camp des royalistes. Et il est certain qu’elle donnait prise à la critique sous beaucoup de rapports.

Au point de vue politique, on lui pouvait reprocher :

D’avoir déterminé, tantôt d’une manière contradictoire, tantôt d’une manière illusoire, les actes de la souveraineté du peuple ;

D’avoir accordé à celle souveraineté, ou trop, ou trop peu ; De n’avoir établi aucune institution de nature à garantir les citoyens contre la tyrannie des administrateurs ou des magistrats ;

D’avoir, en matière de procès civils, conservé les juges, sous le nom d’arbitres publies, au lieu de les remplacer, comme dans le plan de Condorcet, par des arbitres au choix des parties ;

De n’avoir pas suffisamment soustrait la liberté civile aux atteintes de l’arbitraire ;

D’avoir fait du Conseil exécutif, en le composant de vingt-quatre membres, une lourde machine qui risquait de nuire à la rapidité des affaires et de compromettre l’unité d’action ;

D’avoir, par oubli sans doute, fermé au pauvre les portes de la représentation nationale, en n’attachant aucune indemnité aux fonctions de représentant.

Au point de vue moral et social, la Constitution de 1793 avait le grave défaut d’assigner pour but à la Société le bonheur commun[67], sans ajouter que ce bonheur commun est dans l’accomplissement de la justice ; et, quant au principe de la fraternité humaine, combien la Constitution de 1793 restait en deçà des limites aperçues par Robespierre !

DÉCLARATION DES DROITS, PRESENTÉE AUX JACOBINS PAR ROBESPIERRE, LE 21 AVRIL 1793.

CONSTITUTION DU 24 JUIN 1793.

La propriété est le droit qu’a chaque citoyen de jouir et de disposer de la portion de biens qui lui est garantie par la loi.

Le droit de propriété est celui qui appartient à tout citoyen de jouir et de disposer, à son gré, de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie.

Le droit de propriété est borné, comme tous les autres, par l’obligation de respecter les droits d’autrui.

Il ne peut préjudicier, ni à la sûreté, ni à la liberté, ni a l’existence, ni à la propriété de nos semblables.

Toute possession, tout trafic, qui viole ce principe, est essentiellement illicite et immoral.

Nul genre de travail, de culture, de commerce, ne peut être interdit à l’industrie des citoyens.

Pour que les droits du peuple ne soient pas illusoires, pour que l’égalité ne soit pas chimérique, la société doit salarier les fonctionnaires publics, et faire en sorte que les citoyens qui vivent de leur travail puissent assister aux assemblées publiques, où la loi les appelle, sans compromettre leur existence et celle de leurs familles.

Les hommes de tous les pays sont frères, et les différents peuples doivent s’entr’aider, selon leur pouvoir, comme les citoyens du même état.

Le peuple français est l’ami et l’allié naturel des peuples libres.

Celui qui opprime une seule nation se déclare l’ennemi de toutes.

Il ne s’immisce point dans le gouvernement des autres nations. Il ne souffre pas que les autres nations s’immiscent dans le sien.

Ce rapprochement dispense de tout commentaire ; il montre assez que l’influence de Robespierre sur les ailleurs de la Constitution de 1793 ne lut pas entièrement exclusive de l’ascendant de Condorcet. L’article qui, dans l’œuvre montagnarde, fait de la propriété un droit absolu, invariable ; celui qui affranchit le commerce et l’industrie, jusqu’à les rendre indépendants de la morale ; celui qui consacre l’égoïsme national en proclamant le principe de non-intervention, portent l’empreinte de l’esprit girondin.

Aussi Robespierre était-il loin de regarder la Constitution comme un ouvrage fini : il le déclara en pleine séance des Jacobins, au moment de la présentation du rapport[68]. Mais, tout imparfaite qu’elle était, il la jugeait supérieure aux institutions morales et politiques des autres peuples[69] ; et, d’un autre côté, elle avait à ses yeux le mérite de mettre un terme à l’incertitude où avaient flotté jusqu’alors les destinées du peuple français[70]. Il fut d’avis qu’il fallait se rallier autour d’elle, sauf à la perfectionner[71] ; et tel fut le sentiment qui prévalut au club des Jacobins. Mais, depuis que les réunions de l’Evêché avaient acquis de l'importance, il s’était formé un parti qu’on désigna sous le nom d’Enragés : les Enragés, à la tête desquels figuraient Varlet, Leclerc et Jacques Roux, ne manquèrent pas de s’élever bruyamment contre la Constitution de 1793. Dans la soirée du 10, aux Jacobins, Chabot avait critiqué le travail de Hérault de Séchelles avec plus d’emportement que de succès. Le "25, Jacques Roux parut à la barre de l’Assemblée comme orateur d’une députation qui se prétendait envoyée parla section des Gravilliers ; et, dans ce style déclamatoire et violent qu’on prenait trop souvent alors pour le langage des hommes libres : Mandataires du peuple, dit-il[72], vous promettiez de faire cesser les calamités du peuple ; mais qu’avez-vous fait pour cela ? Vous venez de rédiger une constitution que vous allez soumettre à la sanction du peuple. Y avez-vous proscrit l’agiotage ? Non. Y avez-vous prononcé une peine contre les accapareurs et les monopoleurs ? Non. Eh bien, nous vous déclarons que vous n’avez pas tout fait. Vous qui habitez la Montagne, dignes sans-culottes, resterez-vous toujours immobiles sur le sommet de ce rocher immortel ? Prenez-y garde, les amis de l’égalité ne seront pas les dupes des charlatans qui veulent les assiéger par la famine, de ces vils accapareurs dont les magasins sont des repaires de filous... Députés de la Montagne, ne terminez pas votre carrière avec ignominie.

Les Montagnards complices des accapareurs ! protecteurs des noirs calculs qui affamaient le peuple ! Il n’y avait donc plus qu’à leur courir sus, à la grande joie des royalistes et des Girondins ! L’explosion fut terrible sur les bancs de la Montagne. Thuriot, Robespierre, Billaud-Varenne, Legendre, Collot-d’Herbois, Léonard Bourdon, vinrent tour à tour dénoncer dans le pétitionnaire un Tartufe de démagogie. L’acte constitutionnel pouvait présenter des lacunes ; qui le niait ? Mais, enfin, dans quel temps et dans quel pays en avait-on produit un semblable ? Était-ce pour en récompenser les auteurs qu’on appelait sur eux le déchaînement des colères nées de la faim ? Ce Jacques Roux était un ancien prêtre : Thuriot l’accusa de venir en aide aux fanatiques de la Vendée. Léonard Bourdon lui reprocha de ne flatter le peuple que pour l’égarer. Qu’on le chasse ! criait Legendre. Un des citoyens qui avait accompagné Jacques Roux déclara que la pétition qu’il venait de lire n’était point celle que lu section des Gravilliers avait adoptée. On admit les pétitionnaires aux honneurs de la séance, mais à l’exception de leur orateur, qui dut rester à la barre, puis se retirer[73].

Furieux, il court se plaindre au club des Cordeliers, dont il obtient l’adhésion pour l’adresse qu’il a lue dans l’Assemblée. Profitant de ce premier avantage, Leclerc taxe Danton de modérantisme, et conclut à ce que Legendre soit expulsé de la Société. Mais, sur ce point, le club se divise, et, à la suite d’un grand tumulte, décide que Legendre sera mandé pour rendre compte de sa conduite[74].

Pendant ce temps, les discours des Enrages se traduisaient en actes. Il y eut sur les ports des tentatives de pillage qui menacèrent l’approvisionnement de Paris ; à la Grenouillère et au port saint Nicolas, des hommes s’ameutèrent dans le but de forcer la distribution d’un bateau de savon à un prix au-dessous du cours. Une voiture de vingt-deux caisses de savon, pesant ensemble 4.200 livres, fut arrêtée par un attroupement à la barrière Saint-Lazare ; et ces désordres ne durèrent pas moins de trois jours[75].

Il devenait indispensable d’y aviser ; la Commune lança contre les agitateurs, qu’elle n’hésita pas à traiter de contre-révolutionnaires, un arrêté très-vigoureux[76]. A une députation de femmes qui exigeaient que le savon leur fût délivré à vingt sous la livre, Hébert répondit : Si on se livre à des excès, la contre-révolution est faite, et vous aurez un roi[77]. Cette ferme altitude des magistrats populaires et quelques arrestations ramenèrent le calme.

De leur côté, les Jacobins étaient intervenus. Indignés des manœuvres mises en usage pour égarer le club des Cordeliers, ils y envoyèrent douze commissaires, chargés d’éclairer les esprits sur la portée véritable et l’intention de l’adresse de Jacques Roux. Il essaya vainement de se défendre : on ne voulut pas même l’écouler, et il fut chassé du club des Cordeliers, comme un fanatique et un scélérat. Leclerc, accusé d’avoir provoqué les massacres dont la ville de Lyon avait été le théâtre, partagea le sort de Jacques Roux. Restait Varlet : on se contenta de décider qu’il serait soumis à un scrutin épuratoire, et ne pourrait assister jusque-là aux séances des Cordeliers[78].

On pense bien que, si la Constitution de 1793 déplut aux Enragés, elle ne plut pas davantage aux Girondins. Condorcet l’attaqua dans un pamphlet très-vif, dont la conclusion était : Tout ce qui est bon dans le second projet est copié du premier, on n’a fait que pervertir et corrompre ce qu’on a voulu corriger[79].

Ce trait était de ceux qui peuvent blesser la main qui les lance ; Condorcet le pressentit, et songea dès lors à s’assurer une retraite[80].

Il y avait, au numéro 21 de la rue Servandoni, une maison ordinairement occupée par des étudiants, et qu’avaient habitée deux jeunes amis de Cabanis et de Vic-d’Azir, nommés Pinel et Boyer. Cette maison appartenait à la veuve de Louis-François Vernet, sculpteur et proche parent des grands peintres de ce nom. Condorcet ayant été décrété d’arrestation dans la séance du 8 juillet, sur la dénonciation de Chabot, Pinel et Boyer vont trouver madame Vernet et lui demandent si elle consentirait à sauver un proscrit. Est-il honnête homme ? demande à son tour la dame provençale, femme au cœur chaud, à l’esprit décidé, et bienfaisante jusqu’à l’héroïsme[81]. Oui, madame, répondent les deux jeunes gens. En ce cas, qu’il vienne. — Nous allons vous dire son nom. — Vous me l’apprendrez plus tard. Pendant que nous discourons, il est peut-être arrêté. Et le soir, raconte l’illustre biographe de Condorcet, le proscrit allait confier son existence à une femme dont, peu d’heures auparavant, il ignorait le nom[82]. Mais il ne devait pas échapper longtemps, l’infortuné, au sort qui, partout et toujours, attend ces fous héroïques dont la vie s’emploie à servir le peuple ; et ceux-là devaient périr à leur tour, qui forcèrent Condorcet à se tuer, parce qu’eux aussi avaient osé travailler au bonheur des hommes. La majorité de ceux qui ont voté la Constitution de 1793 sont morts ou ont été proscrits pour elle[83]. Il est donc bien irrémissible, le crime d avoir voulu la justice !

 

 

 



[1] Biographie de Condorcet, par F. Arago, en tête des Œuvres de Condorcet, publiées par A. Condorcet-O’Connor et F. Arago, p. CXXIV.

[2] Déclaration des Droits de l'homme dans l'état social, par Varlet, électeur sans-culotte de la section des Droits de l'homme, dans la Bibliothèque historique de la Révolution, 795. 6. (British Muséum.)

[3] Idées pour former une nouvelle Constitution, dans la Bibliothèque historique de la Révolution, 795. 6. (British Muséum.)

[4] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 172.

[5] Biographie de Condorcet, par F. Arago, p. 125.

[6] Toulongeon, Histoire de France, 7e époque, in-4°.

[7] Toulongeon, Histoire de France, 7e époque, in-4°.

[8] Voyez le texte de la Constitution de 1793, dans le t. XXXI de l’Histoire parlementaire, p. 400-415.

[9] Voyez le texte du projet présenté par Condorcet, dans le t. XXIV de l’Histoire parlementaire, p. 106-154.

[10] Article 122 de l’acte constitutionnel dans la Constitution de 1793.

[11] Article 2 de la déclaration des Droits dans le projet de Condorcet.

[12] Article 6 de la déclaration des Droits dans le projet de Hérault de Séchelles.

[13] Article 24 de la déclaration des Droits dans le projet de Condorcet.

[14] Article 21 de la déclaration des Droits dans le projet de Hérault de Séchelles.

[15] Il y a oppression, etc. (Article 34 de la déclaration des Droits. (Projet de Hérault de Séchelles.)

[16] En présence et sous les auspices de l'Être suprême, le peuple français déclare, etc. (Préambule de la Constitution de 1793.)

[17] Tribune des Patriotes, n° 3.

[18] Il est certain, dit un jour Saint-Cyran à Fontaine, que le diable possède l'âme d’un petit enfant dans le ventre de sa mère. Mémoires de Fontaine, t. II, p. 79.

[19] Dans son célèbre discours sur les rapports des idées religieuses et morales avec les principes républicains, 18 floréal an II. Voyez l’Histoire parlementaire, t. XXXII, p. 372 et 373.

[20] Histoire parlementaire, t. XXXII, p. 365 et 366.

[21] Titre III, section I, art. 1.

[22] Titre VII, section I, art. 2.

[23] Titre IV, section II, art. 1.

[24] Titre V, section II, art. 1.

[25] Titre VIII, art. 1.

[26] Titre IX, art. 5.

[27] Il en avait recherché les moyens dans les Lettres d'un bourgeois de New-Haven.

[28] Voyez ce qu’il en dit dans sa brochure sur la Nécessité de faire vérifier la Constitution pur les citoyens. Bibliothèque historique de la Révolution, 795-796. (British Muséum.)

[29] Article 65 et 80.

[30] Article 62.

[31] Article 63.

[32] Examen critique de la Constitution, par Salles, député de la Meurthe, 795-796, dans la Bibliothèque historique de la Révolution. (British Muséum.)

[33] Article 10.

[34] Voyez, dans le volume qui précède, le chapitre sur l'Appel au peuple.

[35] Club des Jacobins, séance du 20 niai 1793. Voyez l'Histoire parlementaire, t. XXVII, p. 243.

[36] Nous renvoyons, sur ce point, le lecteur aux citations contenues dans le chapitre sur l’Appel au peuple. — Quant au résumé qu'on vient de lire, nous n’avons eu qu'à l'extraire textuellement de la brochure publiée par nous, sous le nom de République une et indivisible.

[37] Article 19.

[38] Voyez, dans le Moniteur, la séance du 13 juin 1793.

[39] Constitution de 1793, art. 53.

[40] Constitution de 1793, art. 54.

[41] Article 59.

[42] Examen critique de la Constitution, par Salles, dans la Bibliothèque historique de la Révolution, 795-790. (British Muséum.)

[43] Anecdotes et Réflexions générales sur la Constitution, par P. C. L. Baudin, député des Ardennes, p. 18 et 19, dans la Bibliothèque historique de la Révolution, 795-807. (British Muséum.)

[44] Mémoires de René Levasseur, p. 307. Édition de Bruxelles.

[45] Mémoires de René Levasseur, p. 291.

[46] Mémoires de René Levasseur, p. 289.

[47] Voyez le Moniteur du 14 juin 1793.

[48] Séance du 15 juin 1793.

[49] Mémoires de Levasseur, p. 300.

[50] Mémoires de Levasseur, p. 296.

[51] Mémoires de Levasseur, p. 305.

[52] Constitution de 1793, article 116.

[53] Séance du 15 juin 1793. Voyez le Moniteur.

[54] Article 15 de cette déclaration.

[55] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 208 et 209.

[56] Voyez la Constitution de 1793, art. 21 et 101.

[57] Séance du 11 juin 1793.

[58] Séance du 12 juin 1793.

[59] Séance du 14 juin 1793. Voyez le Moniteur du 17.

[60] C'est à ce dernier que le récit de Mercier semble attribuer cette réponse, sans toutefois le dire expressément.

[61] Mémoires de René Levasseur, p. 500.

[62] Anecdotes et Réflexions générales sur la Constitution, par Baudin, p. 20, dans la Bibliothèque historique de la Révolution, 795-807. (British Muséum.)

[63] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 209-212.

[64] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 212.

[65] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 209-212.

[66] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 213.

[67] Article 1.

[68] Séance des Jacobins du 10 juin 1793.

[69] Séance des Jacobins du 10 juin 1793.

[70] L’expression est de lui. Séance des Jacobins du 10 juin 1793.

[71] Séance des Jacobins du 10 juin 1793.

[72] Voyez le texte de cette adresse, reproduite in extenso, dans l'Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 216-218.

[73] Séance de la Convention du 20 au soir. — En rapprocher les détails du récit je Jacques Roux, dans le club des Cordeliers, tel que le donne le Républicain français, cité par les auteurs de l’Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 219.

[74] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 220 et 221.

[75] Voyez la Chronique de Paris, citée par les auteurs de l’Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 224 et 225.

[76] L'Histoire parlementaire, le donne en entier, t. XXVIII, p. 222 et 224.

[77] Chronique de Paris, n° CLXXXI, ubi supra.

[78] Compte-rendu du Républicain français, n° 228, reproduit dans l'Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 231.

[79] Biographie de Condorcet, par François Arago, en titre de ses Œuvres, publiées par A. Condorcet-O’Connor et F. Arago.

[80] Biographie de Condorcet, par François Arago, p. CXXXIII.

[81] Biographie de Condorcet, par François Arago, p. CXXXIII.

[82] Biographie de Condorcet, par François Arago, p. CXXXIII.

[83] Mémoires de René Levasseur, p. 316.