Lettre des dames patriotes de Nantes à Dumouriez. — Entrevue de Dumouriez avec la reine. — Dissimulation de Marie-Antoinette. — Tableau du Conseil des ministres. — Madame Roland mécontente. — Fête de la Liberté ; son vrai caractère. — Correspondance diplomatique de Dumouriez avec le Cabinet de Vienne. — Démission de M. de Noailles. — Il est décrété d'accusation. - Lettre de Louis XVI au roi de Bohême et de Hongrie, dictée par Dumouriez. — Démission de M. de Noailles retirée ; rapport du décret lancé contre lui. — Note officielle communiquée par M. de Cobentzel. — Erreur commise par plusieurs historiens, d'après les Mémoires de Dumouriez. — Visite du roi à l'Assemblée, le 20 avril ; il propose la déclaration de guerre à l'Autriche, en pleurant. — Enthousiasme guerrier des Français ; sa signification. — Etrange stratagème proposé par Brissot pour hâter le dénouement. — Séance du soir, le 20 avril. — La guerre est déclarée à l'Autriche ; cela voulait dire aux rois.Aussitôt après son avènement au ministère, Dumouriez reçut des dames patriotes de Nantes la lettre suivante, qui peint l'époque : Tu te souviens que nous t'offrîmes une couronne civique le jour où tu vins nous donner des preuves de ton patriotisme dans la Société des amis de la Constitution de Nantes. Tu la reçus, en disant que tu ne l'avais pas encore méritée, mais que tu ferais tout pour t'en rendre digne. Voici l'instant de la preuve : ou nous t'arracherons cette couronne que nous t'avons donnée, ou nous t'en donnerons une autre. Les citoyennes patriotes de Nantes[1]. A cet hommage menaçant, Dumouriez répondit avec une grande affectation de sensibilité, qu'accompagnait l'assurance d'un dévouement éternel à la cause du peuple. Il en coûte si peu aux sceptiques de promettre ! Selon l'aveu que Dumouriez lui-même en fait dans ses Mémoires, pourvu que la monarchie fût appuyée d'une constitution solide, peu lui importait laquelle ![2] Ce n'est pas qu'il ne se sentît alors disposé à se faire l'homme de la nation, s'il le pouvait en devenant l'homme du roi ; là lui paraissait être l'intérêt de sa fortune. Difficile aventure, dira-t-on, que de vivre à la cour, un bonnet rouge sur la tête ! Sans doute, mais la difficulté de l'entreprise irritait, dans Dumouriez, l'ambition du diplomate subtil et du hardi capitaine. Il n'eut pas de peine à séduire Louis XVI, dont il charma tout d'abord la bonhomie par son air de franchise, la rondeur de ses manières et le ton de ses dépêches. On ne m'a jamais montré rien de pareil[3], disait naïvement Louis XVI. Mais c'était la reine qu'il aurait fallu pouvoir gagner, et son aversion pour le nouveau ministre n'éclatait que trop par le soin qu'elle semblait mettre à l'éviter. Un jour, cependant, le roi le prévint que Marie-Antoinette désirait avoir avec lui une conférence particulière. Introduit, ainsi qu'il l'a raconté depuis, dans la chambre
de la reine, il la trouva seule, le visage très-animé, et se promenant à
grands pas. Dès qu'elle l'aperçut, elle alla vers lui d'un air majestueux et
irrité : Monsieur, vous êtes tout-puissant en ce
moment, mais c'est par la faveur du peuple qui brise bien vite ses idoles.
Votre existence dépend de votre conduite. On dit que vous avez beaucoup de
talent. Vous devez juger que ni le roi ni moi ne pouvons souffrir toutes ces
nouveautés, ni la Constitution. Je vous le déclare franchement ; prenez votre
parti. Dumouriez, ému d'un sentiment qui tenait de la compassion et du
respect, exprima le chagrin que lui causait cette confidence ; mais comme il
essayait de lier au maintien de la Constitution le salut de la famille royale
: Cela ne durera pas, prenez garde à vous,
interrompit avec colère et en haussant la voix la fille altière de
Marie-Thérèse. Madame, répliqua le soldat, j'ai plus de cinquante ans ; ma vie a été traversée de
nombreux périls, et en prenant le ministère, j'ai bien réfléchi que la
responsabilité n'était pas le plus grand de mes dangers. — Il ne manquait plus, s'écria-t-elle
douloureusement, que de me calomnier ! Vous semblez
me croire capable de vous faire assassiner. Et des larmes coulèrent de
ses yeux. Dumouriez, attendri, prononça quelques douces paroles propres à
calmer ce cœur aigri. Apaisée, en effet, elle s'approcha de lui, s'appuya sur
son bras ; et, après avoir ainsi retracé cette scène, Dumouriez ajoute : La fin de la conversation établit entièrement la confiance
de la reine[4]. Il le crut, et se trompa. Car, au moment où il la quittait, madame Campan étant entrée, la reine lui dit qu'elle venait de donner une audience à Dumouriez ; que, seul avec elle, il s'était jeté à ses pieds, protestant que, bien qu'il eût enfoncé le bonnet rouge jusque sur ses oreilles, il n'était ni ne pouvait être Jacobin ; qu'on avait laissé rouler la Révolution jusqu'à cette canaille de désorganisateurs qui, n'aspirant qu'au pillage, était capable de tout. Alors, suivant le récit de la reine rapporté par madame Campan, Dumouriez se serait élancé sur la main de Marie-Antoinette, l'aurait baisée avec transport, et se serait écrié : Laissez-vous sauver ! Telle fut la confidence faite à madame Campan par la reine, confidence dont la portée est dans ces mots qui la terminèrent : On ne peut croire aux protestations d'un traître[5]. L'homme le plus important du nouveau ministère après Dumouriez, c'était Roland. Porté au pouvoir par l'opinion publique, il n'eut garde de la négliger, et un des premiers actes de son administration fut la fondation de la Sentinelle, journal placardé en affiches, dont Louvet accepta la rédaction[6]. Quant à la vie intérieure des ministres girondins, madame Roland, l'Égérie de son mari, nous en a transmis le tableau dans une page pleine de piquants détails. Elle y montre les séances du Conseil ressemblant bien moins à des délibérations d'hommes d'Etat qu'à des causeries de compagnie[7]. Le roi y lisait la gazette, et prenait un malin plaisir à éluder les grands objets de politique, en détournant la conversation sur des objets particuliers. Était-il question de la guerre ? Il se mettait à parler voyages ; de négociations diplomatiques ? Il parlait histoire ou géographie. Tantôt il interrogeait Roland sur ses ouvrages ; tantôt, par une attention complaisante, il encourageait Dumouriez à lui conter des anecdotes ; si bien que le Conseil finissait par ne plus être qu'un café où l'on s'amusait à des bavardises[8]. Mais tel est l'empire qu'exerce, même sur des âmes républicaines, le prestige royal associé aux formes d'une familiarité habile, que Clavière et Roland, loin de réagir contre ce laisser aller, en goûtaient la douceur avec un enchantement ingénu. Mais madame Roland, l'esprit le plus viril du parti, résistait, se retranchai t dans une défiance systématique, s'indignait quelquefois. C'est pitoyable ! s'écriait-elle impatientée, lorsqu'au retour du Conseil son mari lui racontait ce qui venait de s'y passer[9]. Et c'était effectivement pitoyable, jamais les circonstances n'ayant été plus sérieuses, jamais la place publique n'ayant été plus menaçante. Au reste, elle était provoquée, cette fois, provoquée par les Feuillants, dont le triomphe ministériel des Girondins avait changé la modération en fureur. Pour que cette fureur se répandît, il ne fallait qu'une occasion : elle se présenta, et ils la saisirent avec un emportement extraordinaire. Parmi les Jacobins en évidence commençait à figurer un homme dont notre plume a déjà rencontré le nom : Collot d'Herbois. Ses yeux pleins d'une flamme sombre, sa chevelure crépue et d'un noir d'ébène, la puissance de son organe, sa déclamation théâtrale et la destinée du tribun écrite en quelque sorte dans les plis de son front, n'eussent pas suffi à lui créer une influence réelle sur une société aussi intelligente, que celle des Jacobins, s'il n'eût joint à ces avantages extérieurs un fonds de mérite relevé par beaucoup d'audace. Il avait été comédien, comédien ambulant ; et Lyon, qu'il devait un jour ensanglanter, l'avait vu parader en acteur médiocre sur les planches d'un théâtre. Mais, même en ses jours d'obscurité, une sorte de divination étrange, tout intérieure, l'avait maintenu au-dessus de son état[10]. Il était homme de lettres, d'ailleurs, et pouvait jouer ses propres pièces. De tous ceux qui s'étaient intéressés au sort des Suisses de Châteauvieux, nul n'avait, avec plus de passion que lui, travaillé à leur réhabilitation et préparé leur vengeance. Le décret d'amnistie rendu en leur faveur, ce fut lui qui le provoqua. Mais ni lui, ni les Jacobins, ni le peuple n'entendaient se contenter de si peu. Ce que l'opinion publique voulait pour les soldats de Châteauvieux, c'était une fête nationale, une fête religieuse qui effaçât jusqu'au dernier vestige de leurs chaînes de galériens, ranimât leurs âmes flétries, étouffât sous les cris d'une joyeuse multitude l'amer souvenir des discordes civiles, et changeât en hymnes d'éternelle pitié l'anathème dont, à Nancy, les sacrificateurs avaient frappé les victimes. Mais plus cette idée avait de grandeur, plus elle irrita les Feuillants. Roucher, le gracieux auteur du poème des Mois, fut un des premiers à protester, et en quels termes ! Nommé par sa section pour assister à la fête, J'accepte, dit-il avec une violence ironique, j'accepte à condition que le buste du généreux Désilles sera sur le char de triomphe, afin que le peuple contemple l'assassiné au milieu de ses assassins. Ces mots cruels furent le texte que développèrent à l'envi tous les écrivains royalistes ou feuillants. Affectant de ne voir dans la réhabilitation des soldats de
Châteauvieux qu'un outrage à Lafayette, qu'une malédiction lancée à la garde
nationale, qu'une glorification de la révolte, qu'une revanche des deux
sinistres victoires rem- portées par la bourgeoisie en armes au Champ de Mars
et à Nancy, ils poussèrent leur polémique au dernier degré d'emportement, et
s'attirèrent des répliques terribles. Justement, Marat, qui pendant quelque
temps s'était éclipsé, venait de reparaître sur la place publique, qui
retentit aussitôt de ses rugissements. Collot-d'Herbois avait cru bien faire
en opposant aux détracteurs des Suisses de Nancy de longs raisonnements sur
la légalité de leur résistance : Marat le traita de rhéteur pusillanime ; il lui reprocha son
verbiage ; il affirma qu'il était faux que les soldats de Châteauvieux
eussent obéi à la loi, mais que c'était leur gloire de l'avoir foulée aux
pieds. Il n'avait, quant à lui, qu'un regret, c'est que ces braves n'eussent point passé au fil de l'épée, et
Bouillé, et son état-major, et ses satellites, puis ne fussent pas venus dans
la capitale punir de mort le despote et tous les pères conscrits[11]. Comment
rappeler ces noires querelles, et oublier qu'André Chénier y compromit sa
muse : Salut, divin triomphe, entre dans nos murailles, Rends-nous ces guerriers illustrés Par le sang de Désille, et par les funérailles De tant de Français massacrés. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Un seul jour peut atteindre à tant de renommée, Et ce beau jour luira bientôt ! C'est quand tu conduiras Jourdan à notre armée, Et Lafayette à l'échafaud[12]. Or, tandis qu'André Chénier burinait ainsi ses colères et celles de son parti, Marie-Joseph, son frère, se chargeait, pour le compte du parti opposé, de la composition des morceaux de poésie, inscriptions, devises, etc., qui entraient dans le programme de la fête ! De son côté, Gossec tenait sa musique toute prête, et David s'était chargé des dessins[13]. Ce fut la veille de Pâques que les quarante soldats de Châteauvieux arrivèrent à Versailles, venant des galères de Brest. Il y avait dans l'accueil qu'ils reçurent un mélange d'enthousiasme et d'attendrissement qui les émut jusqu'au fond du cœur. Menés, le soir de leur arrivée, à la représentation de Brutus, ils furent conduits, le lendemain, au Jeu de paume, par les Jacobins de la ville. Et là commença leur marche triomphale. Des femmes du peuple, chargées de branches de lauriers, formaient la tête du cortège, précédant la pique d'honneur du faubourg Saint-Antoine. Venaient ensuite les vieillards et les enfants qui s'étaient armés pour la patrie ; puis, toutes vêtues de blanc, quatre-vingt jeunes filles qui portaient dans leurs mains des chaînes figurant celles qui avaient meurtri les bras des pauvres galériens que maintenant on vengeait. Eux-mêmes ils tenaient des sabres forgés avec leurs fers, et s'avançaient les derniers, ayant au milieu d'eux Collot d'Herbois, leur défenseur. On leur offrit un banquet ; on les combla de bénédictions ; et, quand ils se mirent en route pour Paris, on eût dit que la ville de Versailles s'ébranlait tout entière, impatiente de les suivre. De chaque campagne circonvoisine, les villageois étaient accourus et grossissaient le cortège. Quelques gens à voiture, étrangers à la fête, se hâtèrent, dit le journal de Prud'homme[14], de céder le milieu du chemin au peuple, qu'ils en écartaient jadis à coups de fouet. Pendant ce temps, grands débats à l'Assemblée pour savoir si on admettrait les Suisses de Châteauvieux aux honneurs de la séance. L'agitation fut extrême. Gouvion, dont le frère avait été tué à Nancy dans les rangs de la garde nationale, s'écria : Me réserve-t-on pour être le témoin des honneurs rendus aux assassins de mon frère ? Cependant, sur les vives instances de Couthon, l'admission
est décrétée. Les quarante soldats étaient déjà sur le seuil de l'Assemblée.
Elle les reçoit, au bruit d'applaudissements qui trois fois se renouvellent.
Mais le peuple qui les accompagne demande à entrer, lui aussi : place au
peuple ! Et en effet, voilà qu'une immense foule se met à défiler devant
l'Assemblée, dans un désordre qui n'avait rien de menaçant, et n'avait pas
encore désappris le respect. Nous avons tant crié
déjà Vive la Liberté ! Vive la Constitution ! dit, en passant devant
le président, l'orateur habituel du faubourg Saint-Antoine, Gonchon, que nous en sommes enroués. Il tenait à la main une
pique surmontée d'un bonnet rouge, et avertit l'Assemblée qu'on faisait
fabriquer dix mille piques de plus. Mais il se hâta d'ajouter : Elles sont forgées pour vous défendre[15]. Le soir, tout le faubourg Saint-Antoine fut illuminé. C'était au 15 avril[16] qu'avait été fixé le jour de la fête, qu'on décora de ce beau nom qui en agrandissait le caractère : FÊTE DE LA LIBERTÉ. Pélion, comme maire de Paris, publia un arrêté où la prohibition de paraitre en armes ce jour-là dans les rues s'appuyait sur de nobles motifs, noblement exprimés : Convaincu que nul signe de contrainte ne doit comprimer les généreux épanchements du peuple ; qu'il est temps de lui montrer qu'on l'estime ; que les fêtes de la Liberté doivent être libres comme elle, etc. Mais tant de sagesse ne fit qu'enflammer la fureur des Feuillants, et la veille même du jour attendu, un de leurs meneurs, Dupont de Nemours, fit répandre à Paris, par milliers, un pamphlet adressé à Pétion, et dont ce seul trait fera juger la violence : Quoi ! pour mieux honorer les assassins, vous voulez désarmer tous les frères d'armes des assassinés ![17] Disons aussi qu'à ces mensongères et calomnieuses alarmes un aliment semblait fourni par certaines provocations, dont l'extrait suivant donnera une idée. Dans son journal ordurier, qu'il faut bien citer quelquefois pour être juste, malgré le dégoût qu'on en éprouve, Hébert écrivait : Je crois apercevoir madame Veto à travers sa jalousie comme le jour de la fête de Voltaire !... Les voila, s'écriera-t-elle, ces victimes échappées à ma rage. En vain mon fidèle Blondinet (Lafayette), d'accord avec son cousin Bouillé, aura-t-il manigancé le massacre de Nancy ; en vain m'aura-t-il promis de faire expirer sur la roue tous ces Suisses rebelles à mes volontés, et qui refusent de massacrer le peuple de Paris, ce peuple que j'abhorre, et dont tant de fois j'ai juré inutilement la perte : tous mes projets sont évanouis. Ô bienheureuse Médicis, que ne suis-je née dans ton siècle ! Les poignards du fanatisme m'auraient vengée des outrages que j'éprouve ; mais, hélas ! aujourd'hui, que me servent mes millions ? A quoi m'ont réussi tous les coups de chien que j'ai prémédités ! Voilà, f.....e, n'en doutez pas, les gentillesses qui sortiront de la g..... de madame Veto, quand elle contemplera la fête que nous préparons aux Suisses de Châteauvieux ; mais, pour la faire crever de dépit, il faut nous surpasser dans cette journée. Dans l'ancien régime, quand il naissait un louveteau, c'était un remue-ménage de b.....e dans Paris ; ce n'étaient que fontaines de vinaigre, que cervelas de cheval, et la famille Veto, qui faisait alors son jouet du peuple, quoiqu'il fût son souverain, l'humiliait tant qu'elle pouvait ; mais, f.....e, le peuple a repris sa revanche, c'est à nous maintenant de faire danser les rois[18]. Aux piques, f.....e, braves sans-culottes ! aiguisez-les pour exterminer les aristocrates qui osent broncher. Que ce beau jour soit le dernier de leur règne. Nous n'aurons de repos que quand la dernière tête d'aristocrate sera tombée[19]. Mais le peuple laissa passer, sans y prendre garde, ces appels meurtriers. La fête, dont Tallien avait rédigé le programme[20], et où pas un fusil ne brilla, fut de tout point admirable. Sur l'immense ligne qui de la Bastille s'étend jusqu'au Champ de Mars, on vit un cortège composé de près de trois cent mille hommes se ranger docilement devant un épi de blé qu'on leur présentait en guise de baïonnette[21]. Reconnaissance filiale à l'égard des initiateurs du progrès, culte des souvenirs antiques associé à la passion des idées nouvelles, élan des âmes vers la liberté, la liberté de tous les peuples de la terre, tout cela se retrouva dans le choix des symboles adoptés. C'était l'esprit du temps, et jamais il ne se révéla d'une manière plus touchante et plus naïve. A un groupe formé de citoyens appartenant aux trois grandes nations libres, étaient confiés les drapeaux de l'Angleterre, des États-Unis et de la France, réunis en signe d'alliance par des rubans tricolores. Les bustes de Franklin, Sidney, Jean-Jacques, Voltaire, images vraiment saintes, passèrent devant tous, portés avec vénération par des citoyens des divers pays qui avaient produit ces grands hommes. On eut l'idée magnanime de réconcilier dans la commune douleur ceux qui, à Nancy, avaient été poussés à se combattre : cette réconciliation était figurée par deux cercueils que réunissait la légende : Bouillé et ses complices sont seuls coupables[22]. Suivait, sur un char de forme antique, la statue de la Liberté, tenant pour sceptre une massue, ayant sur la tête une couronne de fleurs, et à ses pieds un autel où, en son honneur, brûlaient des parfums[23]. Le cortège se mit en marche vers midi, et parmi les milliers de spectateurs qui du haut des fenêtres lui envoyaient les marques d'une adhésion passionnée, on cita Beaumarchais qui, au moment où l'on atteignait l'emplacement de la Porte Saint-Antoine, parut sur son balcon et se mit à battre des mains[24]. Au Champ de Mars, la statue de la Liberté fut descendue ; les soldats de Châteauvieux, courbés sous le glorieux fardeau, l'allèrent placer sur l'autel de la patrie, puis se mêlèrent à la foule. Alors, ce ne furent plus que transports, chants civiques, rondes joyeuses, par où se termina cette fête que pas un accident ne troubla, que pas un cri de haine ne vint attrister, et dont Brissot put dire avec vérité que le peuple en fut l'ordonnateur, l'exécuteur, l'ornement et l'objet[25]. Mais elles sont rares, dans la vie des révolutions, les douces journées : le lendemain, la lutte recommençait entre les passions, et, pour comble, l'Europe entière s'embrasait. Dans des Mémoires écrits par lui longtemps après les événements, loin du sol natal, sous l'empire de préoccupations évidemment modifiées, et avec le désir de plaire aux dominateurs du jour, Mémoires pleins de verve militaire, de jeunesse et de feu, mais aussi pleins d'erreurs calculées ou de réticences, Dumouriez se défend d'avoir poussé à la guerre[26]. Les faits abondent qui démentent cette assertion. Et, comment cela eût-il été possible ? Dumouriez n'était-il point par excellence l'homme de l'orage et des combats ? Ne cherchait-il pas un emploi à son génie ? N'était-ce pas du souffle même de la guerre que le ministère dont il faisait partie venait de naître ? Et l'amour de la popularité ne disait-il rien à son cœur, alors que d'un bout à l'autre de la France, ce nid de guerriers, six cent mille volontaires[27] se levaient, demandant une épée ? Sans doute, ce fut par la voie des négociations qu'il alla au champ de bataille, forcé qu'il était de ménager la conscience craintive de Louis XVI. Mais quel ton que celui de ses dépêches ! Dans celle qu'il avait adressée à M, de Noailles le 19 mars, il ne se bornait plus à faire du désarmement des émigrés la condition du maintien de la paix, il exigeait la réduction des troupes que l'Autriche entretenait dans les Pays-Bas. Les armées, disait-il avec beaucoup de hauteur, ne contiennent pas les peuples quand ils veulent être libres : Gênes en est un exemple pour la maison d'Autriche[28]... De plus, Dumouriez donnait à entendre, ce qui était effectivement son opinion, que l'alliance entre la Prusse et l'Autriche était un compromis sans durée possible, un inceste politique, et que le concert des puissances ne pouvait manquer de cesser, soit pendant, soit après la guerre, laissant le chef de la maison d'Autriche isolé, épuisé de finances et de troupes[29]. Ces fières prédictions, ces menaces, la disposition des esprits dans les Pays-Bas dévoilée à demi, le souvenir de l'insurrection des Génois rappelé, la demande d'une réponse prompte, catégorique, dernière, tout cela devait naturellement offenser la fierté du Cabinet de Vienne, tout cela c'était la guerre grondant sous des paroles de paix. Dumouriez traçait bien véritablement autour du jeune successeur de Léopold le cercle de Popilius. Aussi Noailles désespéra-t-il d'obtenir par ce moyen une modification quelconque aux déclarations précédentes du prince de Kaunitz. Le sort de Lessart l'avait d'ailleurs frappé d'épouvante. Au lieu de remettre ses nouvelles lettres de créance, il envoya sa démission à Dumouriez. Était arrivée à Paris, dans l'intervalle, la première note officielle envoyée de Vienne depuis la mort de Léopold. Elle annonçait, dans un style tranchant et dur, que le nouveau souverain partageait, eu égard à la situation de la France, les sentiments de son prédécesseur, et se terminait par une sortie contre la faction sanguinaire et furieuse qui s'acharnait de plus en plus à détruire toute espèce d'autorité, de lois, de principes[30]. Irrité du ton de cette note, irrité de la démission de M. de Noailles, Dumouriez court chez le roi, lui retrace le tableau de la situation et de ses propres périls, le presse de tout dire à l'Assemblée, l'engage à s'adresser directement au roi de Bohême et de Hongrie[31], et lui fait signer la lettre suivante : Monsieur mon frère et mon neveu, la tranquillité de l'Europe dépend de la réponse que fera Votre Majesté à la démarche que je dois aux grands intérêts de la nation française, à ma gloire et au salut des malheureuses victimes de la guerre dont le concert des puissances menace la France. Votre Majesté ne peut pas douter que c'est de ma propre volonté et librement que j'ai accepté la Constitution française ; j'ai juré de la maintenir, mon repos et mon honneur y sont attachés ; mon sort est lié à celui de la nation, dont je suis le représentant héréditaire, et qui, malgré les calomnies qu'on se plaît à répandre contre elle, mérite et aura toujours l'estime de tous les peuples. Les Français ont juré de vivre libres ou de mourir : j'ai fait le même serment qu'eux. M. de Maulde, que j'envoie en ambassadeur extraordinaire auprès de Votre Majesté, lui expliquera les moyens qui restent pour empêcher et prévenir les calamités de la guerre qui menace l'Europe. C'est dans ces sentiments, etc., etc. Signé LOUIS. Muni de cette pièce, manifestement écrite sous sa dictée[32], Dumouriez, le 14 avril, se rendit à l'Assemblée législative, à laquelle il fit connaitre ses dépêches à M. de Noailles, la démission de ce dernier, et la lettre du roi. Immédiatement, presque sans débat, l'impression des documents fut ordonnée, et l'ambassadeur de France à Vienne décrété d'accusation[33]. Le lendemain, de Maulde allait partir, lorsqu'on reçut un second courrier de M. de Noailles, qui, s'étant ravisé sur sa démission, avait rouvert la négociation avec le Cabinet de Vienne[34]. L'ambassadeur mandait que le prince de Kaunitz se montrant fort peu accessible, il s'était vu réduit à s'adresser au vice-chancelier de cour et d'État, le comte de Cobentzel ; que celui-ci avait entrepris de justifier sa cour sur les vues hostiles qu'on lui supposait, mais de façon à prouver que le plan de l'Autriche était d'élever, sans toutefois déclarer la guerre, des exigences qui la rendissent inévitable. Et c'est ce qui ne résultait que trop clairement, en effet, des trois points spécifiés à M. de Noailles par M. de Cobentzel : 1° La satisfaction des princes possessionnés ; 2° La satisfaction du pape pour le comtat d'Avignon ; 3° Les mesures que la France jugerait à propos de prendre, mais qui fussent telles que le gouvernement eût une force suffisante pour réprimer ce qui pouvait inquiéter les autres États. Ici quelques-uns de nos prédécesseurs ont commis une grave erreur historique ; sur la foi des Mémoires de Dumouriez, ils ont prétendu que des trois conditions spécifiées par M. de Cobentzel, la dernière était : Le rétablissement de la monarchie sur le pied du 23 juin 1789 et de la déclaration de Louis XVI, par conséquent le rétablissement de la noblesse et du clergé comme ordres. Cela est tout à fait inexact. Le texte du document communiqué d'une manière officielle à l'Assemblée, dans la séance du 19 avril, est tel que nous venons de le reproduire[35]. Emporté par son désir de prouver qu'en déclarant la guerre à l'Autriche, il n'avait fait que subir une loi dont l'Autriche seule créa la fatalité, Dumouriez, dans ses Mémoires, falsifie les termes de la note de M. de Cobentzel ; et certes, il n'en avait nul besoin pour avoir le droit de s'écrier : En vérité, quand le ministère de Vienne aurait dormi trente-trois mois depuis la séance royale... il ne pouvait proposer des conditions qui fussent plus incohérentes avec la marche qu'avait prise la Révolution[36]. Le fait est que lorsque, le 19 avril, l'Assemblée apprit, de la bouche du ministre des affaires étrangères, que l'Autriche osait demander la restitution des terres de l'Alsace aux princes allemands, celle d'A vignon au pape, et, quoique en termes ambigus, le renversement de la Constitution, il y eut je ne sais quelle unanimité de dédain sous laquelle l'indignation même disparut comme étouffée. Le décret d'accusation contre M. de Noailles fut retiré, et chacun ne songea plus qu'à la guerre. Le 20 avril, l'Assemblée venait d'entrer en séance, lorsqu'un huissier parut, criant : Messieurs, voilà le roi ! Louis XVI arrivait effectivement, accompagné de tous ses ministres. Aussitôt tous les députés se lèvent et restent debout. Le roi va prendre la place que le règlement lui assigne, puis s'assied. Les députés l'imitent. Une foule innombrable, répandue de grand matin dans toutes les avenues de la salle, s'était emparée des couloirs, avait envahi les tribunes publiques, et refluait jusque dans l'intérieur. L'agitation des âmes, difficilement contenue, se trahissait d'une manière expressive dans le jeu des physionomies. Louis XVI paraissait triste et abattu. Dumouriez, au milieu d'un silence passionné, lut le rapport d'où allait sortir une des plus formidables guerres qui aient jamais éclaté parmi les hommes. Il peignit à grands traits la situation, énuméra les griefs de la France, rappela comment l'Autriche avait encouragé les complots de l'émigration, s'indigna de l'insolence de l'étranger venant nous demander compte de la façon dont il nous plaisait de disposer de nos destins, et rejetant sur l'ennemi tout le tort de l'agression, toute la responsabilité du sang qui allait couler, conclut à la guerre[37]. Alors le roi, d'une voix dont il s'efforçait de dominer le
tremblement, dit : Vous venez d'entendre le rapport
qui a été fait à mon conseil : ses conclusions y ont été adoptées
unanimement. J'en ai moi-même adopté la détermination ; elle est conforme au
vœu plusieurs fois exprimé de l'Assemblée nationale. J'ai dû épuiser tous les
moyens de maintenir la paix ; maintenant... maintenant...
Ici, il s'arrêta, oppressé, et lorsqu'il prononça ces derniers mots : Je viens vous proposer formellement la guerre contre le
roi de Hongrie et de Bohême, ses yeux se remplirent de larmes[38]. Bien que la proposition royale fût conforme au vœu de l'Assemblée, de froids et rares applaudissements l'accueillirent, parce qu'on n'y vit, de la part de Louis XVI, que l'effet de la contrainte[39]. Bigot de Préameneu, qui présidait, répondit au roi, en termes laconiques, que l'Assemblée allait délibérer sur la proposition, et la séance fut suspendue, pour être reprise le soir même. Un mouvement général, immense, emportait Paris. Il s'abandonnait avec une ivresse, qui eut ses aveuglements mais sa grandeur, à l'idée du droit se faisant jour à travers le monde, fièrement, vaillamment, à coups d'épée. La philosophie en marche sous la casaque du soldat, le sort des idées nouvelles confié au courage, la Liberté à cheval sur un canon, tout cela c'était, en attendant les jours calmes, le génie même de la France. Les Girondins ne se possédaient pas de joie. Quant à Brissot, il avait voulu la guerre avec tant de délire, qu'on lui avait entendu proposer de déguiser quelques soldats en houlans autrichiens, et de leur faire faire une attaque nocturne sur quelques villages français, de façon à précipiter le dénouement[40]. Mais les peuples étaient-ils suffisamment préparés à recevoir la lumière ? Cette manière de la leur porter ne leur serait-elle pas une offense ? Mal interprétée par leur ignorance ou leur orgueil, notre initiative, sous la forme militaire, ne les irriterait-elle pas, au lieu de les gagner ? Se jeter dans une guerre où des millions d'hommes vont se heurter contre des millions d'hommes, c'est se laisser aller dans un abîme dont jamais nul regard n'atteignit le fond ; c'est s'élancer éperdu dans ce royaume de la mort, où il n'y a de certain que les ténèbres : qui donc calculerait ce qui est incalculable ? Qui oserait juger d'avance que, la lutte se prolongeant, la brutale exaltation des camps ne prévaudrait pas à la longue sur le saint enthousiasme de la pensée ; que, la discipline finissant par écraser de son niveau de plomb l'élan des âmes vers la justice, la victoire même n'aboutirait pas à ramener l'ère odieuse des Césars ; ou bien, que, les périls s'accumulant, la Révolution ne serait pas poussée à se faire un rempart de sa fureur, à frapper de la hache aussi bien que de l'épée, à se défendre au dedans à force de bourreaux comme au dehors à force de soldats..... jusqu'à ce qu'enfin, après s'être assise d'épuisement sur le bord de la fosse gigantesque creusée pour tant de victimes, la liberté y fût précipitée à son tour ? — Ces objections ne pouvaient avoir pour nos pères la force qu'elles tirent, à nos yeux, des événements qui ont suivi. Ils se dirent que le danger trempe les cœurs ; ils crurent noblement que, de la part d'un pays tel que la France, le dévouement guerrier était un devoir ; ils se bercèrent du magnanime espoir que de toutes les nations armées contre nous plusieurs s'empresseraient de nous tendre les bras, dès qu'elles liraient sur nos drapeaux : Point de conquête ! Pour tous les hommes la liberté ! D'ailleurs, depuis que Robespierre avait ouvert le débat sur la guerre, la question avait bien changé de face. Léopold le temporisateur n'était plus ; et l'avènement des Girondins au pouvoir, le jacobinisme affiché par Dumouriez, avaient porté, comme on l'a vu, le Cabinet de Vienne à jeter à la Révolution un défi qu'il ne lui était pas désormais possible de laisser tomber sans déshonneur. Le doigt de la fatalité était là. Donc, le 20 avril, vers six heures du soir, l'Assemblée se forma, non pas avec le recueillement que semblait comporter une décision de laquelle allait dépendre le sort de tous les États de l'Europe et celui de plusieurs générations, mais, au contraire, avec une fougue, avec un enthousiasme extraordinaires. La source et Daverhoult-eurent beau demander du temps pour l'examen ; sur un mot de Mailhe, leurs motions dilatoires furent brusquement écartées. Le Feuillant Pastoret, chose assez remarquable, éleva le premier la voix en faveur de la guerre. Tout autre fut la conclusion de Becquey, orateur du même parti. Calme au milieu de tant d'esprits emportés, il mit beaucoup de courage à combattre les inspirations du courage. Mais son talent ne répondit pas à la dignité de son attitude. Il eut l'imprudence de dire que la France courait le risque de voir tous les rois de. la terre se liguer contre elle. Oh ! que c'était mal connaître la France que de prétendre lui faire peur d'une guerre à proportions héroïques ? Guadet déclara ironiquement qu'après un tel discours, il n'y avait plus de doute possible sur la nécessité de la guerre, Décrétons-la, sans désemparer, s'écrie Mailhe. Nous la voulons, ajoute Aubert-Dubayet, et dussions-nous périr tous, le dernier de nous prononcerait le décret. De formidables applaudissements partirent de tous les points de la salle, de toutes les tribunes. Le mot de trahison possible, tombé des lèvres de Bazire, ne trouva point d'écho. La voix de Mathieu Dumas, qui voulut appuyer Becquey, fut étouffée sous les murmures. L'entraînement général était devenu irrésistible. Mais ce qui en marque bien le grand caractère, c'est le manifeste que lut, à cette occasion, Condorcet. Rien de plus grave comme style, rien de plus noble comme pensée. En réponse à la note de la Cour de Vienne, il y était dit : Qu'est-ce donc que cette faction qu'on accuse... d'avoir conspiré pour la liberté universelle du genre humain ? C'est l'humanité tout entière. Vergniaud proposa une nouvelle fédération nationale pour consacrer religieusement la terrible détermination qu'on allait prendre. Mais l'Assemblée n'avait, en ce moment, qu'une idée, qu'un désir, qu'une passion. Le décret suivant présenté par Gensonné, au nom du comité diplomatique, fut voté avec transport[41] : L'Assemblée nationale, délibérant sur la proposition formelle du roi, considérant que la Cour de Vienne, au mépris des traités, n'a cessé d'accorder une protection ou- verte aux Français rebelles, qu'elle a provoqué et formé un concert avec plusieurs puissances de l'Europe contre l'indépendance et la sûreté de la nation française ; Que François Ier, roi de Hongrie et de Bohême, a, par des notes des 18 mars et 7 avril dernier, refusé de renoncer à ce concert ; Que malgré la proposition qui lui a été faite par la note du 11 mars 1792, de réduire, de part et d'autre, à l'état de paix, les troupes sur les frontières, il a continué et augmenté des préparatifs hostiles ; Qu'il a formellement attenté à la souveraineté de la nation française, en déclarant vouloir soutenir les prétentions des princes allemands possessionnés en France, auxquels la nation française n'a cessé d'offrir des indemnités ; Qu'il a cherché à diviser les citoyens français, et à les armer les uns contre les autres, en offrant aux mécontents un appui dans le concert des puissances ; Considérant enfin que ce refus de répondre aux dernières dépêches du roi des Français ne lui laisse plus d'espoir d'obtenir, par la voie d'une négociation amicale, le redressement de ces différents griefs, et équivaut à une déclaration de guerre ; Déclare qu'il y a urgence ; L'Assemblée nationale déclare que la nation française, fidèle aux principes consacrés par sa Constitution, de n'entreprendre aucune guerre dans la vue de faire des con- quêtes, et de n'employer jamais ses forces contre la liberté d'aucun peuple, ne prend les armes que pour la défense de sa liberté et de son indépendance ; que la guerre qu'elle est obligée de soutenir n'est point une guerre de nation à nation, mais la juste défense d'un peuple libre contre l'injuste agression d'un roi ; Que les Français ne confondront jamais leurs frères avec leurs véritables ennemis ; qu'ils ne négligeront rien pour adoucir le fléau de la guerre, pour ménager et conserver les propriétés, et, pour faire retomber sur ceux-là seuls qui se ligueront contre sa liberté tous les malheurs inséparables de la guerre ; Qu'elle adopte d'avance tous les étrangers qui, abjurant la cause de ses ennemis, viendront se ranger sous ses drapeaux et consacrer leurs efforts à la défense de sa liberté ; qu'elle favorisera même, par tous les moyens qui sont en son pouvoir, leur établissement en France ; Délibérant sur la proposition formelle du roi, et après avoir décrété l'urgence, décrète la guerre contre le roi de Hongrie et de Bohême[42]. Ainsi fut prise cette décision qui allait pour longtemps ébranler le monde. Mais que la postérité s'en souvienne à jamais ! la pensée de l'Assemblée, la pensée de la France, Merlin de Thionville venait de l'exprimer dans ces belles paroles : VOTONS LA GUERRE AUX ROIS ET LA PAIX AUX NATIONS. |
[1] Le Patriote français, n° 991.
[2] Mémoires de Dumouriez, t. II, liv. III, chap. VI, p. 150.
[3] Mémoires de Dumouriez, t. II, liv. III, chap. VI, p. 143.
[4] Mémoires de Dumouriez, t. II, liv. III, chap. VI, p. 165.
[5] Mémoires de madame Campan, t. II, chap. xx, p. 202 et 205. — M. Michelet passe ces deux scènes sous silence. M. de Lamartine raconte fort au long la première, en copiant Dumouriez ; et, faute sans doute d'avoir connu la seconde, il commet cette grave erreur : Une confidence intime s'établit entre la reine et le général. Voyez Histoire des Girondins, t. I, p. 405. Édition de Bruxelles, Wouters frères.
[6] Mémoires de madame Roland, t. I, p. 82. Edition P. Faugère. Paris, 1864.
[7] Mémoires de madame Roland, t. I, p. 69.
[8] Mémoires de madame Roland, t. I, p. 250-251.
[9] Mémoires de madame Roland, t. I, p. 251.
[10] Biographie universelle, au mot COLLOT D'HERBOIS.
[11] L'Ami du Peuple, n° 637.
[12] Voyez la satire entière dans Buchez et Roux, Histoire parlementaire, t. XIV. p. 119.
[13] Voyez le programme complet de la Fête de la Liberté, dans le Père Duchêne, à la suite du n° 122.
[14] Révolutions de Paris, n° 144.
[15] Séance du 9 avril 1792.
[16] M. Michelet commet une erreur de date, lorsqu'il dit, liv. VI, chap. VI, p. 418, de son Histoire de la Révolution, que les soldats de Châteauvieux arrivèrent de Brest à Paris, le 30 avril.
[17] Histoire parlementaire, t. XIV, p. 87.
[18] Les grands préparatifs du Père Duchêne, n° 120, dans la Bibliothèque historique de la Révolution. — PÈRE DUCHÊNE. — 1039, 40, 1. British Museum.
[19] Les grands préparatifs du Père Duchêne, n° 122.
[20] Il se trouve plus complet que partout ailleurs, à la suite du n° 122 du Père Duchêne.
[21] Révolutions de Paris, n° 144.
[22] Dans son journal, Brissot, à la place de ces mots, met ceux-ci : Bouillé seul était coupable. Est-ce que par là Brissot aurait entendu innocenter Lafayette ? — Voyez le Patriote français, n° 971.
[23] Voyez le programme, signé Tallien, Tombe, Leroy, Despainville.
[24] Révolutions de Paris, n° 144.
[25] Le Patriote français, n° 981.
[26] Voyez, dans les Mémoires de Dumouriez, tout le chapitre premier du liv. IV, t. II.
[27] Discours de Guadet aux Jacobins, séance du 26 mars 1792. Voyez le Journal des débats des Amis de la Constitution, à cette date.
[28] Mémoires tirés des papiers d'un homme d'État, t. I, p. 291.
[29] Mémoires tirés des papiers d'un homme d'État, t. I, p. 290 et 291.
[30] Mémoires tirés des papiers d'un homme d'État, t. I, p. 279.
[31] François, successeur de Léopold, n'avait pas encore été couronné empereur. En cette dernière qualité, il prit le nom de François II. Comme roi de Hongrie et de Bohême, il s'appelait François Ier.
[32] Mémoires tirés des papiers d'un homme d'État, t. I, p. 323 et 524. — On devine bien pourquoi, dans ses Mémoires, t. II, p. 204, Dumouriez dit : Le roi fit une lettre parfaitement raisonnée et toute de sa main à l'empereur. Au reste, cette lettre, parfaitement raisonnée, Dumouriez ne la donne pas.
[33] Séance du 14 avril 1792.
[34] Mémoires de Dumouriez, t. II, p. 205.
[35] Voyez la séance du 19 avril 1792, dans l'Histoire parlementaire, t. XIV, p. 26. — C'est, du reste, la version qu'on trouve, et dans les Souvenirs de Mathieu Dumas, t. II, p. 117, et dans les Mémoires tirés des papiers d'un homme d'État, t. I, p. 322.
[36] Mémoires de Dumouriez, t. II, p. 206.
[37] Voyez le texte de ce rapport, soit dans l'Histoire parlementaire, t. XIV, p. 27-37, soit à la suite du IIe volume des Mémoires de Dumouriez, lettre F des Éclaircissements historiques.
[38] Mémoires tirés des papiers d'un homme d'État, t. I, p. 333.
[39] Mémoires tirés des papiers d'un homme d'État, t. I, p. 333.
[40] Étienne Dumont, Souvenirs sur Mirabeau, chap. XXI, p. 411.
[41] Sept membres seulement votèrent contre, qui furent : Théodore Lameth, Jaucourt, Becquey, Mathieu Dumas, Baërt, Hua et Gentil.
[42] Voyez pour cette mémorable séance du 20 avril, l'Histoire parlementaire, t. XIV, p. 37-63 ; les Mémoires tirés des papiers d'un homme d'État, t. I, p. 334-341 ; et les Souvenirs de Mathieu Dumas, t. II, p. 120-127.