LOUIS XVII, SA VIE, SON AGONIE, SA MORT

TOME PREMIER

DOCUMENTS ET PIÈCES JUSTIFICATIVES

 

IX. — INHUMATION DE LOUIS XVI. — ARCHIVES NATIONALES

 

 

PROCÈS-VERBAL.

 

Le vingt-un janvier mil sept cent quatre-vingt-treize, l'an deux de la République française.

Nous, soussignés, administrateurs du département de Paris, chargés de pouvoir par le conseil général du département, en vertu des arrêtés du conseil exécutif provisoire de la République française, Nous sommes transportés à neuf heures du matin en la demeure du citoyen Picavez, curé de Sainte-Madelaine, lequel ayant trouvé chez lui, nous lui avons demandé s'il avait pourvu à l'exécution < :es mesures qui lui avaient été recommandées la veille par le conseil exécutif et par le département pour l'inhumation de Louis Capet. Il nous a répondu qu'il avait exécuté de point en point ce qui lui avait été ordonné par le conseil exécutif et par le département, et que le tout était à l'instant préparé.

De là, accompagnés des citoyens Renard et Damoureau, tous deux vicaires de la paroisse de Sainte-Madelaine, chargés par le citoyen curé de procéder à l'inhumation de Louis Capet, nous nous sommes rendus au lieu du cimetière de ladite paroisse, situé rue d'Anjou-Saint-Honoré, où étant, nous avons reconnu l'exécution des ordres par nous signifiés la veille au citoyen curé, en vertu de la commission que nous avions reçue du conseil général du département.

Peu après a été déposé, dans ledit cimetière, en notre présence, par un détachement de gendarmerie à pied, le cadavre de Louis Capet, que nous avons reconnu entier, dans tous ses membres, la tête étant séparée du tronc. Nous avons remarqué que les cheveux du derrière de la tête étaient coupés, et que le cadavre était sans cravate, sans habit et sans souliers. Du reste il était vêtu d'une chemise, d'une veste piquée en forme de gilet, d'une culotte de drap gris et d'une paire de bas de soie gris. Ainsi vêtu, il a été déposé dans une bière, laquelle a été descendue dans la fosse qui a été recouverte à l'instant.

Le tout a été disposé et exécuté d'une manière conforme aux ordres donnés par le conseil exécutif provisoire de la République française.

Et avons signé avec les citoyens Picavez, Renard et Damoureau, curé et vicaires de Sainte-Madelaine.

PICAVEZ, RENARD, DAMOUREAU, LEBLANC et DUBOIS.

 

Deux mois plus tard, l'acte de décès de Louis XVI fut consigné en ces termes dans les registres de l'état civil de la commune de Paris. Les mots soulignés forment le cadre imprimé.

 

Acte de décès.

Du lundi dix-huit mars mil sept cent quatre-vingt-treize, l'an second de la République, acte de décès de Louis Capet, du vingt-un janvier dernier, dix heures vingt-deux minutes du matin, profession dernier roi des Français, âgé de trente-neuf ans, natif de Versailles, paroisse Notre-Dame, domicilié à Paris, tour du Temple, marié à Marie-Antoinette d'Autriche ; ledit Louis Capet, exécuté sur la place de la Révolution, en vertu des décrets de la Convention nationale, des quinze, seize, dix-neuf et vingt dudit mois de janvier, en présence : 1° de Jean-Antoine Lefèvre, suppléant du procureur général syndic du département de Paris, et d'Antoine Momoro, tous deux membres du directoire dudit département et commissaires en cette partie du conseil général du même département ; 2° de François-Pierre Sallais et de François-Germain Ysabeau, commissaires nommés par le conseil exécutif provisoire à l'effet d'assister à ladite exécution, et d'en dresser procès-verbal, ce qu'ils ont fait ; et 3° de Jacques-Claude Bernard et de Jacques Roux, tous deux commissaires de la municipalité de Paris, nommés par elle pour assister à cette exécution. Vu le procès-verbal de ladite exécution dudit jour vingt-un janvier dernier, signé Grouvelle, secrétaire du conseil exécutif provisoire, envoyé aux officiers publics de la municipalité de Paris, cejourd'hui, sur la demanda qu'ils en avaient précédemment faite au ministre de la justice ; ledit procès-verbal déposé aux archives de l'état civil.

PIERRE-JACQUES LEGRAND, officier public.

 

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La Révolution croyait avoir ainsi anéanti jusqu'au dernier vestige de la royauté. Après avoir renversé le Roi, tué l'homme, elle s'efforçait de détruire jusqu'au cadavre. Dans cet acharnement il y avait un secret pressentiment de son impuissance. Les éternités révolutionnaires durent peu ; la royauté, à jamais abolie, n'avait pas dit son dernier mot en France, et la terre elle-même, malgré la complicité corrosive de la chaux, devait rendre un jour à une solennelle réparation et aux caveaux de Saint-Denis les dépouilles du Roi martyr.

Dès le 22 mai 1814, une information faite, en exécution des ordres du Roi Louis XVIII, par M. le chancelier de France, avait — sur les dépositions des sieurs :

François-Silvain Renard, ancien vicaire de la Madeleine, domicilié rue Caumartin, n° 12,

Antoine Lamaignère, juge de paix du premier arrondissement de Paris, rue de la Concorde, n° 8,

Jean-Richard-Eve Vaudremont, greffier du juge de paix du premier arrondissement, rue de la Concorde, n° 8,

Dominique-Emmanuel d'Anjou, ancien avocat, rue d'Anjou, n° 48,

Et Alexandre-Etienne-Hippolyte, baron de Baye, maréchal des camps et armées du Roi, —

Avait, dis-je, déterminé, d'une manière précise, la place où reposaient, dans le cimetière de la Madeleine, les dépouilles du Roi Louis XVI et de la Reine Marie-Antoinette.

On lit dans le Moniteur du 21 janvier 1815 :

 

Paris, le 20 janvier.

CHANCELLERIE DE FRANCE.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Le dix-huit janvier dix-huit cent quinze, nous soussignés Charles-Henri Dambray, chancelier de France, commandeur des Ordres du Roi, accompagné de M. le comte de Blacas, ministre et secrétaire d'Etat au département de la Maison du Roi, de M. le bailli de Crussol, chevalier des Ordres du Roi, pair de France, de M. de la Fare, évêque de Nancy, premier aumônier de S. A. R. Madame duchesse d'Angoulême, et enfin de M. Philippe Distel, chirurgien de Sa Majesté, commissaires nommés avec nous par le Roi pour procéder à la recherche des restes précieux de Leurs Majestés Louis XVI et de la Reine Marie-Antoinette, son auguste épouse ;

Nous sommes transportés, à huit heures du matin, à l'ancien cimetière de la Madeleine, rue d'Anjou Saint-Honoré, n° 48.

Entrés dans la maison attenante à laquelle le cimetière sert aujourd'hui de jardin, ladite maison occupée par le sieur Descloseaux, qui avait acheté précédemment ledit cimetière, pour veiller lui-même à la conservation des restes précieux qui s'y trouvent déposés ; nous avons trouvé ledit sieur Descloseaux avec le sieur Danjou, son gendre, et plusieurs personnes de sa famille ; lesquels nous ont conduits dans l'ancien cimetière, et nous ont indiqué de nouveau la place où ledit sieur Danjou nous avait déclaré qu'il croyait pouvoir assurer que les corps de Leurs Majestés avaient été déposés, ainsi qu'il est constaté par l'information que nous avons faite le vingt-deux mai dernier. Ayant ainsi reconnu de nouveau le côté du jardin où nous devions faire les recherches qui nous étaient prescrites, nous les avons commencées par celles du corps de Sa Majesté la Reine, afin d'arriver plus sûrement à découvrir celui de Sa Majesté Louis XVI, que nous avions lieu de croire placé plus près du mur du cimetière du côté de la rue d' Anjou.

Après avoir fait faire par des ouvriers, du nombre desquels se trouvait un témoin de l'inhumation de la Reine, une découverte de terre de dix pieds de long sur cinq à six de largeur et cinq ou environ de profondeur, nous avons rencontré un lit de chaux de dix ou onze pouces d'épaisseur, que nous avons fait enlever avec beaucoup de précaution, et sous lequel nous avons trouvé l'empreinte bien distincte d'une bière de cinq pieds et demi ou environ de longueur, ladite empreinte tracée au milieu d'un lit épais de chaux, et le long de laquelle se trouvaient plusieurs débris de planches encore intacts.

Nous avons trouvé dans cette bière un grand nombre d'ossements que nous avons soigneusement recueillis ; il en manquait cependant quelques-uns qui, sans doute, étaient déjà réduits en poussière ; mais nous avons trouvé la tète entière, et la position où elle était placée indiquait d'une manière incontestable qu'elle avait été détachée du tronc. Nous avons trouvé également quelques débris de vêtements, et notamment deux jarretières élastiques assez bien conservées, que nous avons retirées pour être portées à Sa Majesté ainsi que deux débris du cercueil ; nous avons respectueusement placé le surplus dans une boîte que nous avons fait apporter en attendant le cercueil de plomb que nous avons commandé. Nous avons également mis à part et serré dans une autre boîte la terre et la chaux trouvées avec les ossements, et qui doivent être renfermées dans le même cercueil.

Cette opération faite, nous avons fait couvrir de fortes planches la place où se trouvait l'empreinte de la bière de S. M. la Reine, et nous avons procédé à la recherche des restes de S. M. Louis XVI.

Suivant à cet égard les premières indications qui nous avaient été données, nous avons fait creuser, entre la place où le corps de la Reine avait été trouvé et le mur du cimetière sur la rue d'Anjou, une large ouverture de douze pieds de longueur et jusqu'à douze pieds de profondeur, sans rien rencontrer qui nous annonçât le lit de chaux indicatif de la sépulture du Roi. Nous avons par là même reconnu la nécessité de creuser un peu plus bas, et toujours dans la même direction ; mais l'approche de la nuit nous a déterminés à suspendre le travail et à l'ajourner jusqu'à demain.

Nous sommes, eu conséquence, sortis du cimetière avec les ouvriers que nous y avions amenés ; nous en avons soigneusement fermé la porte en en prenant les clefs, après avoir retiré les deux caisses susmentionnées, que nous avons portées dans le salon du sieur Descloseaux, après les avoir scellées d'un cachet aux armes de France ; lesdites caisses, recouvertes d'un drap mortuaire, ont été entourées de cierges, et plusieurs ecclésiastiques de la chapelle de Sa Majesté sont arrivés pour réciter pendant la nuit, autour de ces précieux restes, les prières de l'Eglise.

Le directeur général de la police, que nous avons mandé, a été chargé de placer une garde à la porte et autour du cimetière, et nous avons ajourné à demain 19, à huit heures du matin, la suite de nos opérations, dont nous avons arrêté et signé le présent procès-verbal, qui l'a été également par le sieur Descloseaux, propriétaire du terrain, et par le sieur Danjou, son gendre. Fait et clos à Paris, les jour et an que dessus.

Le chancelier de France, signé DAMBRAY ; BLACAS D'AULPS ; BAILLI DE CRUSSOL ; A. L. H. DE LA FARE, évêque de Nancy ; DISTEL ; DESCLOSEAUX ; DANJOU.

 

Le dix-neuf janvier dix-huit cent quinze, nous nous sommes de nouveau transportés au cimetière ci-dessus désigné, où nous sommes entrés à huit heures et demie du matin avec les ouvriers que nous avions mandés pour continuer les travaux commencés.

Lesdits ouvriers ont ouvert en notre présence une tranchée profonde de sept pieds, un peu au-dessous de la tombe de S. M. la Reine et plus près du mur du côté de la rue d'Anjou. Nous avons découvert à ladite profondeur quelques terres mêlées de chaux et quelques minces débris de planches indicatifs d'un cercueil de bois. Nous avons fait continuer la fouille avec plus de précaution ; mais au lieu de trouver un lit de chaux pure comme autour du cercueil de la Reine, nous avons reconnu que la terre et la chaux avaient été mêlées à dessein, en telle sorte cependant que la chaux dominait beaucoup dans ce mélange, mais n'avait pas la même consistance que celle trouvée dans notre opération d'hier ; c'est au milieu de cette chaux et de cette terre que nous avons trouvé les ossements d'un corps d'homme, dont plusieurs, presque entièrement corrodés, étaient près de tomber en poussière : la tête était couverte de chaux, et elle se trouvait placée au milieu de deux os de jambes, circonstance qui nous a paru d'autant plus remarquable que cette situation était indiquée comme celle de la tête de Louis XVI dans l'information que nous avons faite le 22 mai dernier.

Nous avons recherché soigneusement s'il ne restait aucune trace de vêtements, sans pouvoir en découvrir, sans doute parce que la quantité de chaux étant beaucoup plus considérable, avait produit plus d'effet.

Nous avons recueilli tous les restes que nous avons pu recueillir dans ces amas confus de terre et de chaux, et nous les avons réunis dans un grand drap préparé à cet effet, ainsi que plusieurs morceaux de chaux encore entiers.

Quoique la place où ce corps avait été découvert fût celle où plusieurs témoins oculaires de l'inhumation nons avaient déclaré que le corps de Sa Majesté avait été déposé, et que la situation de la tête ne nous laissât aucun doute sur le résultat de notre opération, nous n'avons pas laissé encore de faire enlever à vingt-cinq pieds de distance jusqu'à dix ou douze pieds de terre, pour chercher s'il n'existait pas de lit complet de chaux qui nous indiquât une autre sépulture du Roi aussi positivement que celle de la Reine. Mais cette épreuve surabondante nous a convaincus plus complètement encore que nous étions en possession de ces restes précieux.

Nous les avons renfermés avec respect dans une grande boîte que nous avons ficelée et scellée d'un cachet aux armes de France, nous avons ensuite apporté cette boîte dans le même salon où les restes de S. M. la Reine avaient été déposés hier, afin que les ecclésiastiques déjà rassemblés pussent continuer autour des deux corps les prières de l'Eglise, jusqu'au moment qui sera fixé par le Roi pour leur placement dans des cercueils de plomb et le transport desdits cercueils à l'église royale de Saint-Denis.

De tout quoi nous avons rédigé et écrit le présent procès-verbal, qui a été signé par les mêmes commissaires et témoins que dans notre séance d'hier, et en outre par M. le duc de Duras, pair de France, premier gentilhomme de la chambre de Sa Majesté, par M. le marquis de Dreux-Brézé, grand maître des cérémonies de France, qui ont assisté à nos opérations d'aujourd'hui, et par M. l'abbé d'Astros, vicaire général de l'Eglise de Paris, l'un des administrateurs du diocèse, le siège vacant, qui s'est réuni à nous pour la présente exhumation.

Fait et clos à Paris, rue d'Anjou, n° 48, à quatre heures du soir, les jour et an que dessus.

Le chancelier de France, signé DAMBRAY ; BLACAS D'AULPS ; BAILLI DE CRUSSOL ; A. L. H. DE LA FARE, évêque de Nancy ; le duc de DURAS ; le marquis de BRÉZÉ ; l'abbé D'ASTROS ; DESCLOSEAUX ; DANJOU ; DISTEL.

 

Le vingt janvier dix-huit cent quinze, à deux heures après midi, nous nous sommes rendus, suivant les ordres du Roi, dans la maison du sieur Descloseaux, rue d'Anjou, n° 48, où, étant arrivés, nous avons trouvé réunis les mêmes commissaires qui avaient assisté à nos précédentes opérations, et les personnes que le droit de leurs charges ou l'ordre du Roi y avaient rassemblées pour être présentes au placement dans les cercueils de plomb des restes précieux de LL. MA1. Louis XVI et de la Reine Marie-Antoinette, déposés dans un salon de ladite maison, dans des caisses ficelées et cachetées, savoir : les commissaires du Roi dont les noms suivent :

M. le comte de Blacas, grand maître de la garde-robe du Roi, ministre et secrétaire d'Etat au département de sa maison ;

M. le bailli de Crussol, pair de France, chevalier des Ordres du Roi ;

M. de la Fare, évêque de Nancy, premier aumônier de S. A. R. MADAME, duchesse d'Angoulême ;

Et en outre, M. le duc de Duras, pair de France, premier gentilhomme de la chambre de Sa Majesté ;

M. de Noailles, prince de Poix, pair de France, capitaine des gardes du corps de Sa Majesté, ayant été de service auprès de S. M. Louis XVI jusques et y compris le 10 août 1792.

En présence desquelles personnes nous avons examiné les boîtes ci-dessus mentionnées, dont nous avons reconnu les cachets sains et entiers ; et après les avoir rompus, nous avons procédé à la translation des précieux restes, desdites boites dans les cercueils de plomb préparés à cet effet.

Les dépouilles mortelles de S. M. Louis XVI ont été placées dans un grand cercueil avec plusieurs morceaux de chaux qui avaient été trouvés entiers, et le long desquels paraissaient quelques vestiges des planches du cercueil de bois ; le cercueil de plomb a ensuite été recouvert et soudé par les plombiers que nous avions mandés, et sur le couvercle a été posée une plaque de vermeil doré avec cette inscription :

ICI EST LE CORPS DE TRÈS-HAUT, TRÈS-PUISSANT ET TRÈS-EXCELLENT PRINCE

LOUIS XVI DU NOM,

PAR LA GRÂCE DE DIEU ROI DE FRANCE ET DE NAVARRE.

 

La même opération a été faite en présence des mêmes personnes à l'égard des restes de S. M. la Reine Marie-Antoinette, et le cercueil qui les soutient pareillement recouvert et soudé par les mêmes plombiers, avec cette inscription :

ICI EST LE CORPS

DE TRÈS-HAUÏE, TRÈS-PUISSANTE ET TRÈS-EXCELLENTE PRINCESSE MARIE-ANTOINETTE-JOSESPHE-JEANNE DE LORRAINE,

ARCHIDUCHESSE D'AUTRICHE,

ÉPOUSE DE TRÈS-HAUT, TRÈS-PUISSANT ET TRÈS-EXCELLENT PRINCE

LOUIS, SEIZIÈME DU NOM

PAR LA GRÂCE DE DIEU ROI DE FRANCE ET DE NAVARRE.

 

Les deux cercueils ont ensuite été replacés sous le drap mortuaire, en attendant l'époque fixée par' le Roi pour le transport-à Saint-Denis des deux corps.

De tout quoi nous avons fait et clos le présent procès-verbal, qui a été signé avec nous par les personnes ci-dessus dénommées, ensemble par le sieur Descloseaux, propriétaire de la maison, et le sieur Danjou, son gendre.

A Paris, les jour et an que dessus.

Le chancelier de France, signé DAMBRAY ; BLACAS D'AULPS ; BAILLI DE CRUSSOL ; A. L. H. DE LA FARE, évêque de Nancy ; le duc de DURAS ; NOAILLES ; prince DE POIX ; DESCLOSEAUX ; DANJOU.

 

Certifié conforme à la minute déposée aux archives de la chancellerie de France :

Le secrétaire général de la chancellerie de France et du sceau, membre de la Légion d'honneur,

Par ordre de Monseigneur le chancelier,

LE PICARD.

 

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Le Moniteur du lundi 23 janvier 1815 donne sur la cérémonie des obsèques du Roi et de la Reine les détails suivants :

 

Paris, le 22 janvier.

Tous les régiments de la garnison de Paris ont pris les armes à sept heures du matin, et sont venus border la haie depuis la rue d'Anjou-Saint-Honoré jusqu'à la barrière Saint-Denis.

MONSIEUR est parti à huit heures du matin du château des Tuileries, avec Monseigneur le duc d'Angoulême et Monseigneur le duc de Berri, s'est rendu chez M. Descloseaux et a posé la première pierre du monument qui doit être élevé sur l’endroit où proposaient les corps du Roi Louis XVI et de la Reine sa femme.

Les restes précieux de Leurs Majestés, qui avaient été déposés dans leurs cercueils, ont été portés sur un char funèbre par douze gardes de la manche de la compagnie écossaise des gardes du corps du Roi. Le cortège s'est mis en marche dans l'ordre suivant :

Un détachement de gendarmerie, fort en avant, ouvrait la marche.

Venait ensuite un escadron de hussards du régiment du Roi, ayant en tête son colonel et les trompettes du régiment.

Les compagnies de grenadiers et voltigeurs du régiment du Roi et de la Reine, infanterie légère et infanterie de ligne, portant l'arme sous le bras gauche, marchaient en colonne serrée, ayant avec elles leurs drapeaux et musiques, et en tête leurs colonels.

M. le gouverneur de la première division militaire avec l'état-major général.

Un demi-escadron de la garde nationale de Paris à cheval.

Un détachement de la garde nationale à pied.

M. le lieutenant général comte Dessolle avec l'état-major de la garde nationale.

Un demi-escadron de grenadiers à cheval de la garde du Roi, le capitaine et les officiers à leur tête.

Trois carrosses du Roi à huit chevaux, dans lesquels les principaux officiers des princes.

Un demi-escadron de mousquetaires de la seconde compagnie et un demi-escadron de mousquetaires de la première, leurs officiers en tête avec leur musique.

Un demi-escadron de chevau-légers de la garde du Roi avec leurs trompettes et timbales, les officiers en tête.

Huit carrosses du Roi à huit chevaux, dans lesquels étaient les personnes désignées par Sa Majesté pour faire partie du cortège.

Le carrosse dans lequel étaient MONSIEUR, Monseigneur le duc d'Angoulême et Monseigneur le duc de Berri.

Quatre hérauts d'armes à cheval.

Le roi d'armes à cheval.

Le grand maître, le maître et les aides des cérémonies à cheval.

Quatre chevau-légers.

Deux écuyers du Roi à cheval.

Les capitaines des quatre compagnies rouges aux petites roues du char.

Le char.

Six gardes du corps de la manche à droite et à gauche tout auprès du char ; trente Cent-Suisses sur les ailes, le capitaine à cheval à leur tête, accompagnant jusqu'à la barrière Saint-Denis.

En l'absence du grand écuyer, l'écuyer commandant les écuries du Roi à cheval.

Le capitaine des gardes du corps.

Les officiers derrière lui.

Un escadron des gardes du corps du Roi derrière leurs officiers.

Un demi-escadron de gendarmes de la garde du Roi fermant la marche des troupes de la maison de Sa Majesté.

Un détachement des gardes du corps de MONSIEUR.

Le carrosse du corps de MONSIEUR.

Celui de Monseigneur le duc d'Angoulême.

Celui de Monseigneur le duc de Berri.

Un demi-escadron de la garde nationale à cheval.

Un escadron de dragons du Roi.

Une batterie d'artillerie de campagne se trouvait à la barrière de Saint-Denis, où elle attendait le convoi, qu'elle a suivi en tirant un coup de canon par minute.

Le régiment des chasseurs du Roi bordait la route de Paris à Saint-Denis.

Le 12e régiment d'infanterie légère occupait Saint-Denis avec trois escadrons de hussards du Roi et une seconde batterie d'artillerie.

La garde nationale de Saint-Denis était sous les armes sur la place de l'Abbaye.

Toutes les troupes avaient le crêpe au bras.

Les tambours et instruments étaient voilés de serge noire. Les drapeaux et étendards avaient des crêpes.

Un recueillement profond et religieux régnait parmi la foule, qui s'était portée sur les endroits où devait passer le cortège.

Le cortège arrivé devant l'abbaye, à Saint-Denis, les corps du Roi et de la Reine ont été retirés du char par les gardes de la manche, portés par eux à l'église, reçus par tout le clergé, et présentés à M. l'évêque d'Aire officiant, par M. l'évêque de Carcassonne, nommé pour représenter le grand aumônier. Ils ont été ensuite placés dans le catafalque élevé au milieu du chœur de l'église.

MONSIEUR, Monseigneur duc d'Angoulême, Monseigneur duc de Berri, après s'être retirés un moment dans leur appartement, sont rentrés à l'église, suivis des Princes et Princesses du sang.

Les places étaient disposées de la manière suivante :

MONSIEUR, Monseigneur duc d'Angoulême, Monseigneur duc de Berri, princes du grand deuil ; Monseigneur le duc d'Orléans, et Monseigneur le prince de Condé occupaient les premières stalles hautes à droite dans le chœur. S. A. R. madame la duchesse d'Orléans, madame la duchesse de Bourbon, et mademoiselle d'Orléans, princesses du grand deuil, occupaient les stalles hautes vis-à-vis. Après les princes étaient deux stalles vides, et, dans les quatre hautes stalles suivantes, M. le comte Barthélémy, M. Lainé, M. le maréchal duc de Dalmatie, ministre de la guerre, M. le maréchal duc de Reggio, ministre d'Etat, qui avaient été nommés par le Roi pour porter les quatre coins du poêle, au moment où l'on conduirait les cercueils à la tombe.

Dans les stalles hautes et basses, à droite et à gauche, étaient placées des députations de la cour de cassation, de la cour des comptes, du conseil de l'Université, de la cour royale, du corps municipal et du tribunal de première instance.

Le chœur était occupé par les grands et principaux officiers de la maison du Roi et de celles des princes, par quatre des ministres de Sa Majesté et par les personnes que le Roi avait nommées pour être du cortège.

L'empressement général de rendre les derniers devoirs au Roi Louis XVI et à la Reine sa femme, et le respect pour leur mémoire, avaient attiré à Saint-Denis un grand nombre de MM. les maréchaux de France, de MM. les membres de la chambre des pairs et de la chambre des députés, de MM. les grands-croix de l'Ordre de Saint-Louis, de MM. les grands cordons de la Légion d'honneur, de MM. les lieutenants généraux et maréchaux de camp, qui ont été placés également dans le chœur, ainsi que M. le lieutenant général comte Dessolle, major général des gardes nationales du royaume, avec l'état-major et M. le lieutenant général comte Maison, gouverneur de la première division militaire avec l'état-major général.

Sa Majesté, qui n'avait pas douté des sentiments qui se sont manifestés, avait ordonné au grand maître des cérémonies de faire réserver des places à tous ceux de ces messieurs qui se présenteraient individuellement.

La gouvernante des Enfants de France, les dames du palais de la Reine femme du Roi Louis XVI, et les dames de MADAME, duchesse d'Angoulême, occupaient des bancs à gauche et près du catafalque.

Quatre cents des demoiselles filles de membres de la Légion d'honneur qui habitent l'ancienne abbaye de Saint-Denis étaient placées sur des banquettes dans la croisée du chœur près de l'autel.

Le service divin a commencé.

Les princes et les princesses du grand deuil ont été, suivant l'usage, conduits par les officiers des cérémonies à l'offrande, après laquelle l'oraison funèbre a été prononcée par M. l'évêque de Troyes.

Après les absoutes, les corps du Roi et de la Reine ont été descendus dans le caveau.

Des salves d'artillerie ont annoncé le matin le départ du convoi, et se sont renouvelées pendant le service à Saint-Denis et au moment de l'inhumation.

 

FIN DES DOCUMENTS ET PIÈCES JUSTIFICATIVES DU TOME PREMIER