HISTOIRE DE FRANÇOIS II

 

CONCLUSION.

 

 

François II ne voulut jamais le mal, Ancillon le dit, et je l'admets ; mais comme il laisse l'autorité compromise, alors que de chaque côté catholiques et protestants prennent les armes au moindre mécontentement, alors que se produit le revirement subit d'une faveur déclarée envers le roi de Navarre menacé de mort, alors que la gloire militaire de François de Guise semblait primer non-seulement la jeunesse inexpérimentée, mais encore la faiblesse physique et intellectuelle du monarque !

Personnellement, François II exerça peu d'influence. Impressionnable comme les natures maladives, il ressentit vivement les contrariétés et les atteintes à son pouvoir, mais n'eut jamais assez de calme et d'autorité sur lui-même pour apprécier sainement et juger avec sang-froid de quel côté se trouvaient la raison d'État et l'intérêt du pays, et pour pencher vers ceux qui dépassaient le moins la mesure et restaient dans le vrai de la situation. Placé sous l'empire d'une femme jolie, mais trop jeune encore, quoique douée d'une précoce maturité d'esprit, pour oser gouverner dans un pays qui n'était pas le sien, même en l'absence des passions qui l'aveuglèrent plus tard, le Roi obéit à l'impulsion des princes de Guise, oncles de Marie Stuart, et suivit avec docilité les inspirations de leur politique. La lutte se passa définitivement au-dessus de sa tête, entre les Guises et les Bourbons comme chefs, entre les catholiques et les protestants comme partis, sa mère allant des uns aux autres, mais se rangeant encore du côté des plus forts, c'est-à-dire du côté des princes Lorrains.

Si les deux partis ont cherché à gouverner sous son nom, cependant, en somme, tant qu'il fut vivant, ce fut finalement le parti catholique qui l'emporta, comme il l'emportera sous Charles IX, sous Henri Ill, sous Henri IV.

Faut-il conclure de là que, sans sa mort, le protestantisme était étouffé sous les mesures vigoureuses prises par les Guises, et que de la sorte la Saint-Barthélemy devenait inutile[1] et disparaissait de nos annales ? C'est presque l'opinion d'un contemporain, de Michel de Castelnau : Beaucoup de catholiques, écrit-il au chapitre XII du livre III de ses Mémoires, estimèrent lors que si la puissance du duc de Guise et ses frères eust continué armée de celle du Roy, comme elle avoit esté, les protestants eussent eu fort à faire ; c'est aussi l'avis de Frédéric Ancillon[2]. Mais cette opinion est très-contestable, car s'il est vrai que le début du règne de Charles IX constitue pour les réformés, et par une réaction naturelle, un instant de répit, néanmoins ils se trouvaient déjà trop nombreux et trop constitués à la mort de François II, on pourrait presque dire à celle de Henri II, pour disparaître ainsi, et disparaître surtout sous des mesures violentes qui fournissent un aliment à une croyance nouvelle. Si au lieu d'être contestable, cette opinion se trouvait exacte, si l'on pouvait lui affecter aujourd'hui un autre caractère que celui d'une supposition, d'une conjecture, il faudrait reconnaître dans la marche des événements le prononcé du jugement.

Sous le peu d'influence du Roi dont nous venons de retracer le règne, et malgré les passions qui s'agitent, enhardies par sa faiblesse, après avoir été soulevées par l'arbitraire des Guises, il se produit un fait trop peu remarqué : le pays se gouverne. Assurément il n'existe aucune pondération entre les factions, mais la situation devient presque constitutionnelle, en ce sens qu'elle laisse, dans plusieurs assemblées, s'émettre les doléances et les avis de chacun, éclaire ainsi sur les besoins politiques et matériels de la France et prépare, sinon la bonne entente, au moins l'apaisement qui signale les premiers jours du règne suivant. Dans ces assemblées, le Tiers État figure comme dans les États généraux et y apporte son opinion.

A la mort de François II, on pouvait cependant espérer que les guerres civiles ne prendraient pas d'extension, et qu'un sixième de la population, devenu protestant, n'oserait lever bannière contre les cinq autres sixièmes restés catholiques[3]. Mais pour cela, il fallait avant tout qu'aucun mécontent n'empruntât le drapeau de la Réforme ; il fallait aussi que la royauté devînt résolue et franche dans ses actes, les grands modestes et préférant l'intérêt général au leur, les magistrats conciliants et non agressifs, la populace moins passionnée. Si ces conditions se remplissent, la France pourra encore, sous le sceptre de Charles IX, vivre en paix et fondre ses diverses provinces dans un même esprit, celui de l'amour d'une patrie grande et unie.

Malgré l'avantage offert par le règne de François II de laisser le pays exprimer ses besoins et éclairer le pouvoir, comme ce fait se produisit par la pression des événements, il n'en faut pas faire honneur à ce monarque. Faut-il cependant, en raison de sa faible participation au gouvernement, dire qu'il a récolté ce qu'il a semé ? Non ; il faut plutôt le plaindre, car il a hérité de la situation laissée par son prédécesseur, et, personnellement, il se trouvait à peu près condamné à la nullité.

En effet, mal engendré par son père, mal élevé par sa mère, mal doué par la nature, il était désigné pour être une victime et n'a compté que peu de moments heureux. Comme compensation, il y en a toujours une, il a évité par sa mort les soucis d'une royauté en naufrage, ainsi que les malédictions s'attachant au nom de son successeur. Ces temps de la Réforme sont terribles : les monarques qui les ont traversés passablement sont ceux qui ont adopté la religion nouvelle ; les autres en ont souffert : Charles-Quint lui-même et son fils Philippe II ; et en France, Henri II et ses trois fils. Henri IV seul a prospéré, mais c'était un homme, supérieur, qui sut profiter de la facilité de la France à se relever[4], et encore il a été tour à tour catholique et protestant ; il a appartenu aux deux partis et les a commandés tous deux.

Quant à François II, on en parle non pour ses actes personnels, car on en cite à peine, mais parce qu'il a été roi. Si son père avait vécu quelques années de plus, il ne l'eût sans doute pas été, car sa santé ne le destinait pas à une longue carrière. Assurément, dans les vues de la Providence, avoir régné un an et demi, avoir possédé Marie Stuart dans toute la séduction et la pureté de sa première jeunesse, séduction qui frappa la cour le jour de son mariage[5], et avoir échappé à l'horrible responsabilité de diriger la Saint-Barthélemy, suffisait bien à ce que méritaient ce corps chétif et cet esprit endormi, car, si le duc de Guise et Michel de l'Hospital ont fait l'éloge de ses facultés, il faut ranger ces louanges parmi les obligations officielles[6].

Concluons que pour lui, qui a peu vécu, peu régné, l'histoire ne saurait être un châtiment, mais 'elle l'est pour les autres personnages qui ont pris part au drame de son règne et y ont commis des fautes. Montrons-le.

La France, si nous la personnifions, en vient à ne plus savoir ce qu'elle veut, et, à force d'avis et d'opinions de diverses sortes, manque de périr.

Catherine de Médicis porte la peine de son absence de toute conviction ; c'est trop en effet, même pour sa situation. On comprend que l'outrecuidance des Guises, la butorité du connétable, les complots des Bourbons, les discussions de la bourgeoisie, l'aient amenée à n'aimer personne, quitte à n'inspirer, elle aussi, aucune affection, pas même à ses demoiselles d'honneur, dont elle sacrifiait la jeunesse et la beauté à ses intrigues politiques ; mais elle aurait pu conserver une foi religieuse ou morale plus accusée ; elle ne garda complète que sa foi en la royauté, et fit tout pour la sauver.

Les Guises portent la peine de leur ambition démesurée, de leur parti pris d'embarrasser toutes les affaires et de semer à leur profit le trouble et la désunion dans le royaume, surtout de leur manque de tenue et de respect envers la race royale[7], qui blesse à la longue et soulève l'opinion publique, encore peu habituée à formuler et à produire ses vœux.

La noblesse, depuis la cessation des guerres d'Italie, qui l'ont distraite de la révolte sous les règnes précédents, ne donne plus l'exemple de respecter le Roi, n'est plus respectée à son tour ; elle perd tout prestige et s'habitue de plus en plus à une déplorable facilité d'appeler aux armes du moindre grief, ce qui doit la perdre : non que la noblesse française n'ait eu souvent l'esprit factieux, mais parce que cet esprit, indisciplinable, révolutionnaire, augmentait alors qu'il ne pouvait trouver un contrepoids dans le Tiers État à peine né et mal constitué encore. Ainsi suicidée de ses propres mains, par l'inconséquence de vouloir que ses vassaux lui fussent soumis, sans dépendre elle-même des princes et du Roi, cette noblesse était destinée à disparaître plus rapidement que dans les autres États de l'Europe.

Ainsi chacun est châtié, et personne ne réussit : un succès quelconque eût fondé probablement un gouvernement fort et durable. Ce résultat est mérité, car chacun, à quelque parti qu'il appartienne, a été violent, cruel, a dépassé le but. Les catholiques ont poussé la persécution avec un acharnement sans borne, et souvent ont frappé des coups inattendus et furtifs ; les protestants ont rêvé l'abolition de la religion catholique et toutes les églises exclusivement livrées à leur culte ; personne ne voulait accepter la situation telle qu'elle était : les réformés en se contentant d'être une minorité, les catholiques en reconnaissant qu'il était difficile, en face de l'Allemagne et de l'Angleterre devenues protestantes, de ne pas tolérer en France l'exercice contrôlé de la nouvelle religion.

Cette lutte, que l'on prolongeait ainsi de gaieté de cœur, par esprit personnel, chacun voulant avoir raison, au risque d'abattre la royauté et de compromettre la France, cette lutte ne constituait pas une simple rébellion, une insubordination de la noblesse considérée encore comme une corporation féodale ; elle était politique, sous une apparence religieuse ; c'étaient les factions qui se faisaient la guerre au nom et sous le prétexte de la religion, la faction des princes du sang s'agitant sous le drapeau protestant, et la faction des Guises dissimulant ses projets et son ambition derrière la bannière de la majorité, derrière la bannière catholique[8]. Dans cette lutte, l'esprit d'examen apparaît entamant l'esprit d'autorité, c'est-à-dire que déjà l'on n'accepte plus un ordre royal, et le souverain dont il émane, non-seulement on le discute, on lui applique le scalpel, et, dès qu'on a découvert ses défauts, on fait pleuvoir sur lui et contre lui une foule de moqueries et de calomnies. Telle sera dès lors la triste situation de celui qui occupera un trône ; il expiera, sous les jugements inconsidérés et envieux, l'honneur de gouverner, et s'il est plus en vue, il sera plus lapidé ; les petits se vengeront d'une longue oppression ; ils seront longtemps de l'avis de La Fontaine[9] : Notre ennemi c'est notre maître[10], jusqu'au jour où de nouveaux barbares envahiront leur pays et les réduiront sous le joug.

Toutefois, si la royauté se trouve ainsi percée à jour, il se forme un parti qui la soutiendra, sans être entièrement pour elle, un parti qui veut concilier le principe d'autorité et le principe d'examen, l'autorité d'un seul avec le contrôle de la nation, qui veut amener une entente des trois Ordres, défendre l'unité du royaume et conserver la religion catholique comme plus conforme au caractère national. Ce ne sont pas des seigneurs désireux de conserver leurs privilèges, dût la monarchie périr ; ce ne sont pas des protestants dont les tendances sont en général républicaines, qui poussent à l'avènement de la démocratie, et se servent pour cela d'une arme nouvelle et terrible, la presse[11], ce sont les politiques, hommes modérés et de sens, qui voyaient juste, mais devançaient leur époque. La création de ce parti indique mieux encore combien la lutte entre les partis reposait sur des divergences politiques.

Remarquez d'ailleurs dans quel cercle vicieux les catholiques tomberaient si la lutte avait été purement religieuse : les Guises ne seraient plus coupables ; ils auraient agi par conviction pour la conservation de la religion catholique ; et pourtant la plupart blâment leur ambition, leur âpreté au pouvoir, leur arrogance vis-à-vis de ces faibles Valois, tige affaiblie et penchée de notre antique race capétienne, leur sourde hostilité contre la famille des Bourbons, destinée à succéder à la maison de Valois. C'est qu'ils visaient plus haut que le rétablissement de l'unité de foi, ils songeaient à s'en faire un titre et à se grandir tellement qu'ils pussent aspirer au trône. Vireur 4e leur part : dans une monarchie, le personnage le plus élevé par sa naissance, ses honneurs, ses fonctions, doit être le premier à obéir ; et s'il le fait, l'exemple descendant de haut, chacun obéira, et la machine sociale marchera merveilleusement.

Pour le moment, transportons-nous par la pensée dans un autre milieu et à une autre époque : Supposons un gouvernement régulier, ayant à sa tête une intelligence droite et hors ligne, et se trouvant subitement en présence d'une nouveauté mauvaise ou qu'il croit telle. Comment cette intelligence devra-t-elle agir en présence de cette difficulté et pour extirper l'innovation ? Deux moyens se présentent, la force et la douceur ; lequel emploiera le chef honnête, sincère, voulant le bien de l'humanité et se mettant au-dessus des partis pris de tradition et autres ? La force, nous l'avons vu dans ce livre, mène à la violence, à la cruauté, et souvent elle produit pour les esprits faibles un attrait nouveau, irrésistible, celui du fruit défendu ; pour les esprits vigoureux, l'appât de la résistance et de la bravade. Il adoptera donc les moyens de douceur ; mais ceux-ci, dira-t-on, de concession en concession, conduisent à une défaite volontaire, à l'acceptation de la nouveauté, et finalement, de la sorte, celui qui gouverne ne dirige plus ; l'impulsion naît de la volonté du premier novateur venu. Non ; la douceur ou tolérance, restreinte par une fermeté pondérée et accompagnée d'un grand esprit de justice, peut encore circonscrire l'innovation et lui imposer, dans l'intérêt général, des bornes raisonnables ; et puis, ne l'oublions pas, c'est qu'en effet c'est bien successivement, à pas comptés, et par des élans imprévus venant de ci et de là que la civilisation continue, que la race humaine accroit son cercle de puissance, domine de plus en plus la nature et augmente notre quantité de jouissance et de bonheur ; donc, en politique comme en religion, les opinions, les idées, les efforts de chacun, dirigés par de grands hommes, ou tout au moins par des chefs d'école, même quand ces opinions, idées et efforts se trouveraient contraires aux avis de ceux qui gouvernent, amènent en réalité une entente définitive qui constitue la décision nationale à laquelle tous, gouvernés et gouvernants, ont concouru.

Cette réflexion posée, et elle peut servir à mieux comprendre l'Histoire de François II, terminons en recherchant à quelle cause, plus encore qu'à l'inhabileté ou à la méchanceté des personnages, il faut attribuer les malheurs de ces temps.

Tout dépendit de la mort de Henri II.

Si ce monarque, tué à quarante ans[12], avait vécu vingt ans de plus, il aurait sans doute mieux gouverné que ses fils, malgré les difficultés qui surgirent, et malgré l'impatience du repos qui caractérise notre nation. Puis il aurait eu pour successeur non François II, qui serait mort sans doute jeune, mais Charles IX, âgé de plus de trente ans, élevé à son école, mûri par ses conseils et l'expérience des affaires, et se dirigeant lui-même, non gouverné par des ambitieux ou par une femme, qui prirent la place d'un premier prince du sang pusillanime et incapable.

Quelle différence !

La mort de Henri II, vu l'extrême jeunesse de ses enfants, vu également sa soudaineté qui l'empêcha de prendre aucune disposition et de pourvoir à l'administration de son royaume après lui, cette mort fut un malheur[13] infligé à la France par la Providence, et, dans des circonstances pareilles, peu d'États s'en seraient tirés sans troubles intérieurs.

Ajoutons que, dans ce malheur, le mal eût été moins grand, si François II, au lieu d'avoir seize ans à son avènement en avait eu vingt-cinq, c'est-à-dire fût né dès la première année dû mariage de Catherine de Médicis avec le Dauphin — depuis Henri II —, vers le mois d'août 1534. L'histoire n'a pas à examiner si cette naissance tardive des enfants de Henri II provient d'un léger défaut de conformation chez ce monarque, ou du naturel des femmes de la race des Médicis qui sont tardives à concevoir[14], comme nous l'apprend Brantôme, assez courtisan pour excuser son monarque au détriment d'une princesse étrangère[15] ; ce sont là des questions de physiologie. En effet, François II, arrivé au trône à vingt-cinq ans, eût sans doute mieux dirigé les affaires de la France, car un prince à cet âge représente un homme d'au moins trente ans dans toute autre carrière ; il est vrai que cette probabilité ne peut se poser qu'en admettant chez ce prince une bonne et vigoureuse santé. Alors ce jeune monarque fût devenu père, et la conséquence se trouve facile à tirer. Son fils eût été à la fois l'héritier du trône de France par son père, et l'héritier des trônes d'Écosse et d'Angleterre par sa mère. Quels changements dans l'histoire du XVe siècle ! Les tristes fautes et la mort courageuse de Marie Stuart, demeurée en France, dans cette France qu'elle chérissait[16], n'auraient pas eu lieu ; notre pays, plus fermement gouverné, eût moins navigué à l'aventure ; et si l'Écosse, abandonnée à elle-même, se fût donnée à l'Angleterre, par conformité de religion, elle revenait plus tard au roi de France.

Ainsi la France fut frappée et punie, non-seulement par la brusque mort de Henri II, mais par la naissance tardive de sa postérité et par la triste santé de son successeur, par la stérilité du mariage de ce dernier avec Marie Stuart, acte d'une grande portée politique, dont les conséquences eussent pu être ressaisies, si la jalousie de Catherine de Médicis n'avait pas empêché le séjour en France, comme douairière, de la jeune reine devenue veuve, et empêché ainsi son mariage probable avec Charles IX : Louis XII avait bien épousé la veuve de Charles VIII, afin de conserver la Bretagne au royaume ; pourquoi Charles IX n'eût-il pas épousé sa belle-sœur pour conserver à la France le royaume d'Écosse et l'expectative du royaume d'Angleterre ?

On le voit une seconde fois : en tout ceci les événements devinrent plus forts que les volontés ; ils déjouèrent les projets les mieux combinés, ceux qui, dans l'ordre naturel des choses, devaient s'accomplir. C'est un fait permanent dans la vie des États comme dans la vie des individus, fait dont la constatation incombe à l'historien et constitue l'un de ses devoirs.

 

FIN DE L'OUVRAGE

 

 

 



[1] On la pressent à la lecture du sermon prononcé par l'archevêque de Narbonne (Simon Vigor), en 1568, le lendemain de la bataille de Saint-Denis, pour la fête de saint Martin, le patron des guerriers. Lisez entre autres les arguments : — On coupe un membre pourry de peur qu'il n'infecte les autres, et les Huguenots prennent le prétexte du bien public pour piller et envahir le royaume de France, dans les Sermons catholiques de ce prédicateur ; édition Christi et Erar, Paris, chez Gueffier, 1587, tome II, p. 358 et 360.

[2] Tableau des révolutions du système politique de l'Europe, depuis la fin du XVe siècle, troisième période, chapitre XX ; édition Anselin, Paris, 1823, tome II, p. 143.

[3] C'est le calcul de VOLTAIRE, disant : La sixième partie de la France était calviniste sous François II, comme le tiers de l'Allemagne, au moins, fut luthérien sous Charles-Quint. Essai sur les mœurs, chapitre CXXXVIII. Ce calcul nous semble exagéré ; nous le citons, parce qu'il montre combien le gouvernement des Guises avait jeté de gens dans le parti protestant.

[4] Il arriva toujours que lorsque le royaume paraissait à moitié vaincu, après de grandes défaites, des territoires perdus, après la captivité des principaux seigneurs et capitaines, et même des parents du roi, la France se redressa plus forte que jamais ; elle repoussa les attaques ; elle fit trembler ses vainqueurs. Telle est la force, telle est la fortune de ce royaume, qu'il se crée lui-même d'autant plus de ressources que la nécessité est plus urgente. Relation de l'ambassadeur vénitien Michel Suriano.

[5] Brantôme s'en fait l'écho à deux reprises dans la Vie de Marie Stuart. Voyez ses Dames illustres.

[6] Le duc de Guise dit, à l'assemblée de Fontainebleau, que le Roi élevé sous les yeux de la Reine-mère, princesse aussi sage qu'habile, donnait les plus grandes espérances d'un règne heureux, que soutiendroient de vertueuses maximes. (Voyez DE THOU, p. 533.) Dans un Discours sur l'instruction de François II, l'Hospital s'écrie : Comme le visage plein de grâce et de majesté de notre jeune prince plaît d'avance à tout le monde. Jamais on ne vit un monarque aussi grand. Michel SURIANO dit également dans sa Relazione (1561) : François II... qui usait vraiment de l'autorité royale.

[7] Vis-à-vis de ses conjurés, La Renaudie les accusait même de vouloir la destruction de la maison royale. Suivant REGNIER DE LA PLANCHE, les Guises renvoyaient l'accusation et répondaient à François II leur disant : Je voudrais que vous fussiez pour un temps hors d'ici, afin de voir si c'est à vous ou à moi qu'on en veut. — Sire, vous ne sauriez vivre une heure après notre partement (départ) ; la maison de Bourbon ne songe qu'à exterminer la maison royale. Les règnes de Charles IX et de Henri III justifient à ce sujet les Bourbons, comme plus tard le règne de Louis XV justifie le régent.

[8] Sous le règne de François II, et durant la minorité de Charles IX, il s'agissait de savoir qui, des Guises, des princes du sang, ou de Catherine de Médicis, serait maitre du royaume. Tableau des révolutions du système politique de l'Europe, par ANCILLON, chapitre XIX.

[9] Ce fabuliste a des rudesses de pensée et de style qui se rencontrent uniquement chez lui. Quelle fine opposition, montrer sous Louis XIV un ennemi dans son maitre, dans son roi ! Ni Racine, ni Boileau n'auraient osé en dire autant. Sans approuver toutes les morales des fables de La Fontaine, il y aurait à étudier cet écrivain sous le rapport des principes qu'il émet, plus au hasard assurément que de propos délibéré.

[10] Le Vieillard et l'Âne, fable VIII du livre VI.

Et que m'importe donc, dit l'âne, à qui je sois ?

Résignation grosse d'orages, mais qui sent moins encore la rébellion qu'elle ne présage l'asservissement, sinon pour l'individu isolé, au moins pour le groupe, la société dont il fait partie.

[11] Par mille libelles.

[12] Quarante ans, trois mois, onze jours : le règne de ce monarque dura douze ans et trois mois.

[13] Henri II mort, le mariage de François II avec Marie Stuart, en mettant les Lorrains au pouvoir, au détriment des princes du sang, devint un second malheur, mais secondaire, qui prouve les inconvénients pouvant résulter des noces d'un prince avec une parente de ses sujets.

[14] Catherine de Médicis avait été mariée à quatorze ans.

[15] Mais naturalisée française avant son mariage.

[16] Et où son souvenir est encore vivant, comme le témoigne la légende relative à Roscoff, et d'après laquelle ce lieu, où elle a débarqué en arrivant en France, porte bonheur aux jeunes filles. Charmante localité, port pittoresque en effet, pays favorisé, qu'un courant chaud de la mer, arrivant des régions intertropicales, dote d'une température exceptionnelle et d'une rare fertilité. On a Mi une chapelle à l'endroit où débarqua Marie Stuart ; la tradition veut que la jeune fille qui ramasse un peu de la poussière de cette chapelle et la jette par-dessus un rocher, envoie ainsi au loin ses pensées d'amour et rencontre un fiancé qui, le cœur touché par le contact d'un grain porté par la brise, est attiré vers Roscoff et vient tôt ou tard la demander en mariage.