La paix faite, une action devait primer toutes les autres, celle de se porter sous les murs du Havre de Grâce et de s'emparer de cette place. Catherine de Médicis pensait ainsi ; elle n'eut pas de repos que cette idée patriotique ne fût réalisée. On ne saurait assurer avec Bodin[1] que la présence des Anglais en France, menaçant l'intégrité du territoire national, ait porté seule les deux partis à la paix et contribué ainsi à la concorde, dans le but de se ruer sur l'ennemi commun ; il y avait pour cela trop de passions en jeu, et les Anglais pouvaient devenir des alliés pour l'un des deux camps. Mais il est certain que cette reprise d'une ville française dut séduire les esprits élevés, et que sa réalisation incombait au gouvernement comme un devoir, en raison de sa responsabilité vis-à-vis des contemporains et vis-à-vis de la postérité. Ordre fut transmis au maréchal de Brissac de tenir ses forces prêtes, en sa qualité de plus ancien maréchal ; il s'y conforma et vint sans délai poser les prémices du siège. Le 20 juillet, le connétable parut au camp en compagnie de deux maréchaux et de plusieurs chevaliers de l'ordre, prit le commandement et tint immédiatement conseil. La place du Havre, sise à l'embouchure de la Seine, ne datait pas de loin, ayant été bâtie par François Ier. Les rues en étaient droites et sans obstacles, la forme générale carrée ; à chaque angle s'élevait tin grand bastion doué de défenses intérieures, de façon que les courtines fussent bien battues. A l'entrée du port se trouvait en outre une grosse tour, solidement bâtie, ouverte également dans le pied pour mieux battre les navires voulant pénétrer de force, lesquels restaient aussi en butte aux coups d'une autre tour, sise en face et appelée la tour du Vidame. Des portes, à l'entrée de deux bassins, y maintenaient l'eau à marée basse et permettaient de conserver les bâtiments toujours à flot. Pour empêcher les cailloux et gravier (nous dirions aujourd'hui le galet) de combler la gueule du Havre, c'est-à-dire l'entrée du port, on avait planté en biais, en avant des tours, de gros pilotis formant éperon, et encore fallait-il néanmoins souvent désobstruer le chenal[2]. Le comte de Warwich occupait le Havre avec 6,000 Anglais ; il avait fait partir la population et avait saisi les navires stationnés sur la côte normande, afin d'empêcher la France de dresser une flotte et de la conduire contre la flotte anglaise destinée à mitrailler cette cité. Couper la seule source d'eau douce amenant des eaux dans la place fut le premier soin des assiégeants, en sorte que, privés des eaux de Vitenval, les assiégés se virent obligés d'épuiser les provisions de leurs citernes, puis de tout cuire à l'eau de mer ; en outre, leur habitude de boire de la bière ne convenait pas à ce climat, et ils négligèrent de nettoyer les rues ; en sorte que bientôt la maladie s'empara d'eux, et la putréfaction des corps, s'ajoutant aux causes délétères existant déjà, la porta à un degré voisin de la peste. Le connétable profita de cette circonstance pour les sommer de se rendre, mais Warwich répondit que la reine d'Angleterre les avait placés là pour garder la ville, et qu'ils ne la rendraient que sur son commandement exprès. Un fait, singulier, c'est que le chef de l'armée française avait prescrit à des capitaines de s'avancer avec son héraut, de façon à reconnaître l'état de la palissade et des retranchements, et que, loin de s'en fâcher, les Anglais apportèrent des flacons de vin et des coupes pour faire boire ces officiers[3]. Aussitôt la réponse de Warwich, les Français battirent à outrance la tour du Guet ; le résultat fut tel que les assiégés brûlèrent deux moulins à vent qui s'y trouvaient et commencèrent à rétrograder. Une tour terminait leur palissade ; on s'en empara, on s'y logea, mais non sans peine. En même temps une plate-forme fut adossée à la palissade, et quatre pièces d'artillerie y prirent position. Le feu de ces pièces étonna fort l'ennemi, comme le constata le maréchal de Brissac lui-même, accouru au point dangereux malgré une atteinte de goutte. Une vingtaine d'Anglais quitta aussitôt la ville dans une barque et gagna les navires en rade ; ceux-ci cherchèrent à s'approcher de terre, sans doute pour permettre à la garnison de s'échapper, mais ils furent reçus à coups de canon, car la rive avait été armée par les assiégeants. Déjà, en effet, Warwich voyait le fâcheux de sa situation. Un émissaire envoyé par l'ambassadeur de la reine Elisabeth avait été arrêté par les Français ; après plusieurs jours de préparatifs, l'artillerie tonnait toujours contre la tour du Guet et le boulevard (bastion) Sainte-Adresse ; en quatre jours la tranchée avait avancé de mille pas, sur une jetée n'offrant point assez de terre pour remplir les gabions, et où l'usage des sacs à terre ou des fascines, en un mot d'objets d'un transport difficile, était d'un usage continuel. Aussi le chef anglais, se voyant forcé en moins de six jours, fit-il dire au connétable que l'autorisation de traiter relativement à l'évacuation de la place lui était enfin venue d'Angleterre : le maréchal de Montmorency reçut la mission de s'entendre avec lui et parvint à l'extrémité de notre tranchée, laquelle touchait le fossé des fortifications, au moment où s'effectuait une sortie ; notre envoyé prit part à cette escarmouche et contribua, par son exemple, à refouler les ennemis, qui perdirent assez de monde. Ce coup de main terminé, et les signaux faits, les parlementaires anglais arrivèrent à nos premiers postes ; une trêve provisoire ayant été conclue jusqu'à leur retour, ils furent amenés auprès du connétable. Les premières paroles de ce dernier portaient sur ce point essentiel et toujours vrai : Vous avez pu voir en notre camp des seigneurs protestants mêlés aux seigneurs catholiques, et le prince de Condé lui-même ne pas s'épargner dans les tranchées ; tous les Français sont donc unis aujourd'hui pour le service du roi et le bien commun de ce royaume ; vous n'avez plus rien à espérer de la différence de religion, car la France est unie politiquement, et devant sa puissance entière il vous est impossible de résister. Rendez le Havre. Les envoyés répondirent gracieusement et demandèrent, après les premiers pourparlers, à retourner prendre langue auprès de leur chef, auquel le connétable envoya par leur entremise des provisions et des rafraîchissements. Ils revinrent le lendemain à 7 heures du matin, le feu de nos batteries ayant continué durant la nuit et le fossé ayant été sondé. Le connétable fut au bout de nos tranchées à cette même heure, accompagné d'officiers qui continuaient d'observer et de reconnaître, le point de l'attaque ayant déjà été arrêté ; là on convint d'une trêve nouvelle pendant les négociations, et il fallut quelque peine pour obliger de part et d'autre les arquebusiers de la respecter. Le chef de l'armée française se montra, suivant son habitude, rude dans ses conditions, et comme les Anglais priaient alors le maréchal de Brissac d'intercéder pour eux, avant que celui-ci n'eût répondu : Ne vous adressez pas à d'autres qu'à moi, dit Anne de Montmorency ; seul dans le camp je dispose de la puissance nécessaire pour vous accorder ou vous refuser un article de capitulation. La place fut remise aux troupes de France avec toute son artillerie, ses munitions, ses navires, en tant que ces objets étaient d'origine française, ainsi que sa grosse tour ; les vaincus laissèrent quatre otages désignés par le connétable ; les prisonniers faits des deux côtés reçurent leur délivrance sans rançon. La garnison eut six jours francs pour déloger et emporter ses effets, et plus en cas de vent contraire et de mauvais temps ; les navires anglais pouvaient quitter librement le port. Cette convention fut signée le 28 juillet 1563, et par les otages comme par les parlementaires. L'un d'eux remplissait à la fois les deux conditions ; on rappelait, suivant les chroniqueurs contemporains, le capitaine Pellehan ou Pellan. Le jour même bon nombre d'Anglais quittèrent la ville, et peu après[4], singulière coïncidence, un renfort de 1.800 Anglais arrivait en rade, porté sur 60 vaisseaux ; il faut se dire, il est vrai, que jetés dans une place affamée et empestée, ces nouveaux soldats, malgré les approvisionnements qui les accompagnaient, eussent été une gêne autant qu'un secours. Le mestre de camp Sarlabos prit, à la date du 31 juillet, l'évacuation étant alors complète, le commandement de la place, qu'il a conservé longtemps ; il disposait comme garnison de six enseignes à pied. A ce siège du Havre se rattache un grand projet, mis en
avant par Catherine de Médicis, et seulement exécuté sous Louis XIV, celui
d'un hospice pour les gens de guerre blessés. Le passage des Mémoires
de Michel de Castelnau[5] est trop formel
pour ne pas le reproduire : Alors le roy et la reyne
sa mère, dit ce consciencieux chroniqueur, après avoir rendu grâces à Dieu de
ce bon et heureux succès, prirent résolution avec le connestable de donner
divers contente-mens aux gens de guerre, tant capitaines que soldats, qui
avoient esté blessez, et leur faire donner quelque argent, avec promesses
d'autres bienfaits, quand l'occasion s'en offriroit. Et proposa la reyne,
mère du roy, de faire un hospital, fondé de bonnes rentes et revenus, pour
les soldats estropiez, et ceux qui le seroient dès lors en avant au
service du roy. — Et se firent beaucoup de
belles délibérations, qui furent bientôt oubliées, après que l'armée fut
rompue et séparée, et Leurs Majestés éloignées. Avant le siège du Havre, le maréchal de Brissac s'était rendu sous Orléans pour remplacer le duc de Guise pendant qu'on laissait en Normandie le maréchal de Vieilleville ; mais ce dernier, demeuré seul gouverneur de cette province, le rejoignit bientôt pour opiner dans le conseil, puis fut envoyé à Metz. Malgré cette double disparition de deux chefs éminents, il restait encore des forces catholiques dans diverses places normandes ; Castelnau notamment commandait le château de Tancarville. Il demanda qu'on le relevât de cette fonction, afin de licencier 82 chevau-légers ainsi que les gens de pied qui ne lui étaient plus nécessaires et dont, l'entretien l'endettait, car, pour la solde sortant des coffres royaux, il n'y fallait plus compter régulièrement. On lui promit de l'indemniser et on le chargea, avec sa cavalerie légère, de se rendre sur le chemin de Rouen afin d'y arrêter l'ambassadeur d'Angleterre Smith, en raison de ce que l'ambassadeur de France à Londres se Trouvait gardé à vue ; quant au précédent ambassadeur, cause de la rupture de la paix avec la reine Elisabeth et nommé Trokmarton, il était revenu en France sans un sauf-conduit du roi, et il ne pouvait justifier d'aucun motif pour jouir et sans doute mésuser de sa liberté. Castelnau s'expliqua avec ce dernier, et, vu sa violence, le fit immédiatement conduire sous escorte au château de Saint-Germain en Laye. Le véritable ambassadeur Smith prit mieux la chose, avoua qu'il devait porter le poids des fautes de l'autre, et se montra prêt à se rendre où l'on voudrait ; en même temps il insinua qu'il savait les moyens d'amener la paix entre deux royaumes si voisins et qui ne pouvaient rester longtemps en guerre. Aussi ordre fut-il transmis à Castelnau de lui laisser quelque liberté, de l'amener avec lui à Paris et même à Meulan où se trouvait la cour. Le jeune roi, âgé de quatorze ans, venait d'être déclaré majeur (17 août) par le parlement de Rouen[6], acte précipité, mais politique, dont le parlement de Paris se trouva mécontent surtout parce qu'il fut ainsi frustré de faire lui-même cette déclaration qui compte toujours dans un règne. La reine mère semble avoir voulu par cet acte indiquer sa tendance à ressaisir le pouvoir, car elle se passait ainsi de la coopération du parlement le plus influent ; elle semblait en même temps regarder ce parlement comme composé en partie de conseillers hérétiques, dont l'avis n'était plus à prendre. Et de fait, afin de porter les conseillers professant la religion calviniste à se démettre de leur emploi (car on n'osait les révoquer de peur d'une sédition), on aggrava l'obligation de ne pas faire l'exercice de cette religion dans un lieu de résidence royale, en contraignant ceux qui voulaient assister à un prêche, non-seulement de se rendre dans un lieu voisin, où la cour ne demeurait pas, mais de résider à l'avenir dans ce lieu. On s'imaginait, remarque Varillas, qu'ils ne se pourroient résoudre à professer le calvinisme en secret pendant toute leur vie, et qu'ils aimeroient mieux se défaire de leurs charges, pour aller demeurer aux lieux où il y avoit des prêches, si l'ambition ne les disposoit à changer de religion. Ce fut un faux calcul, car déjà le parti protestant possédait un moyen plus direct de faire écouter ses plaintes et ses causes de griefs, celui de l'appel aux armes. D'ailleurs, si Catherine de Médicis avait fait décider la majorité du roi son fils au début, et non à la fin de sa quatorzième année, différence essentielle sur laquelle les jurisconsultes discutaient volontiers, les précédents de notre histoire n'étant pas suffisamment explicites, c'est qu'elle espérait demeurer nonobstant maîtresse du pouvoir, et cependant ôter tout prétexte aux princes du sang de vouloir prendre une trop grande prépondérance fondée sur l'enfance du roi et l'incapacité légale qui en résultait. Après la tenue du lit de justice de Rouen, le roi visita plusieurs localités voisines de cette ville ; il se rendit par exemple à Pont-Audemer ; son entrée dans cette cité fut célébrée par une cérémonie pour laquelle un nommé Nicolas Deconteville peignit des armoiries et des génies[7]. Une création nouvelle, celle du régiment des Gardes, peut être rangée parmi les mesures adoptées par Catherine de Médicis pour fortifier l'autorité royale. Elle répondait d'ailleurs assez à l'humeur guerrière de Charles IX, signalée par Davila, ou du moins à ce que l'on pouvait croire tel, car jeune encore il avait été nourri dans les camps, et ses premiers jeux s'étaient écoulés au milieu des péripéties sanglantes de la guerre civile. Elle assurait surtout au roi une garde permanente, alors que les exigences des huguenots avaient contraint la reine mère à réduire l'infanterie de France à ce qu'elle était sous Henri II, savoir les bandes de Picardie, les bandes de Piémont, deux colonels généraux et deux mestres de camp. La cour était à Saint-Romain, venant du Havre, accompagnée des bandes ou régiments (ce mot nouveau commençait à poindre) de Richelieu et de Charry ; le premier se mourait des blessures reçues au siège ; le second, brave gentilhomme et bon catholique recommandé par Montluc, son compatriote et son ancien chef dans les guerres du Piémont et dans les guerres civiles de Guyenne, semblait un excellent appui ; c'est à lui que Catherine confia le nouveau corps formé de 8 enseignes, dont 4 appartenaient à son régiment et 4 au régiment de Richelieu. Le nom de ce corps fut d'abord enseignes de la garde du roy ; sous Henri III seulement il se changea en la dénomination plus connue de gardes françaises[8]. Le parti protestant manifesta son mécontentement de cette institution, non-seulement par des plaintes et de secrets préparatifs de guerre, mais par un acte répréhensible que les apparences mettent à son passif, l'assassinat du mestre de camp Charry. C'était une perte, car il s'était montré vaillant soldat en maintes occasions, notamment au combat de Ver, à la tête des arquebusiers à cheval du parti catholique, et ses enseignes de fantassins, avant de servir auprès du roi, jouissaient de la plus belle réputation[9]. La politique de Catherine de Médicis commence donc à s'accentuer : par la prise du Havre, elle purge le royaume de France de la présence des Anglais ; par la proclamation de la majorité du roi, elle diminue l'influence des princes du sang ; par la création des gardes du roi, elle soustrait la personne de Charles IX à la possibilité d'un enlèvement et ne la laisse plus à la merci d'une émeute. Evidemment dans ces actes divers apparaît le conseil sage et avisé du chancelier ; il se voit mieux encore dans les efforts tentés par la reine mère pour priver les protestants de leurs chefs, du prince de Condé et des deux frères Coligny, afin de pouvoir le mieux miner et dissoudre quand ce parti n'aurait plus que des bras sans tête, et que diverses citadelles récemment construites par ses ordres, comme celle de Lyon, le tiendraient mieux en bride. Ces efforts se tramaient au milieu des plaisirs de la cour. La reine mère, suivant le génie italien, savait entremêler la gaieté aux négociations sérieuses, masquer ces dernières sous une joie d'emprunt. Il y eut par exemple, en 1564, de nombreux divertissements à Fontainebleau ; le prince de Condé y assista et se montra habile dans les courses et jeux de bagues, toujours gai, toujours prévenant. On cite, comme épisode de ces fêtes, un combat figuré de douze Grecs contre douze Troyens ; la lutte avait lieu pour la beauté d'une dame, et Michel de Castelnau comptait parmi les Grecs. Le roi et le duc d'Anjou délivrèrent ensuite de belles prisonnières gardées dans une tour par d'affreux géants. Si l'on joint à ces fêtes divers dîners exquis, on aura une idée du luxe, mêlé de galanterie, que Catherine de Médicis excellait à déployer et dans lequel, mère peu soucieuse à ce sujet, elle lançait ses fils encore jeunes. C'est qu'elle aimait le pouvoir avant tout, et se plaisait à nouer l'intrigue. Etait- ce chez elle pure sécheresse de cœur, ou sentiment de vengeance contre les hauts personnages qui l'avaient dédaignée sous Henri II et François II ? était-ce intuition politique et conviction qu'il fallait sauver avant tout la monarchie, et cela par tous les moyens, comme nous l'avons indiqué dans notre chapitre Ier de l'Histoire de François II ? Toujours est-il qu'au milieu des préoccupations que lui causait la reconstruction du pouvoir royal dont elle ne désespérait pas, elle se mit à s'occuper d'une double alliance qui importait à la fois à la politique étrangère et à la politique intérieure de la France ; elle entreprit la négociation de deux mariages, celui de Charles IX avec la reine d'Angleterre, celui de sa fille Marguerite avec le jeune fils de la reine de Navarre ; le premier intéressait la France en lui assurant un héritier, et le second rapprochait du trône le premier prince du sang. La reine Elisabeth d'Angleterre comptait trente printemps ; le projet d'union semblerait donc bizarre, si l'on ne savait combien chez les princes les mariages sont commandés par les intérêts généraux, si l'on ne se rappelait la haine de Catherine pour Marie Stuart, qui cessait d'être héritière du trône d'Angleterre du moment que la reine Elisabeth devenait mère. Le résultat fut différent de celui rêvé par la veuve de Henri II. Elisabeth répondit (1564) qu'on lui faisait honneur, mais ajouta : Mon bon frère le roy très chrestien est trop grand et trop petit. Par trop grand, elle voulait dire trop puissant pour quitter son pays et venir habiter l'Angleterre ; par trop petit, elle entendait trop jeune. C'était une réponse adroite et qui ne la brouillait point avec un monarque auquel elle venait, en signant la paix, d'envoyer l'ordre de la Jarretière. Les seigneurs anglais présents à l'entrevue obtenue par Michel de Castelnau pour porter cette proposition à la reine Elisabeth de la part de la cour de France, confirmèrent à cet ambassadeur les bonnes dispositions de leur pays pour la France, mais l'assurèrent que le duc d'Anjou, étant libre de sa personne, conviendrait mieux pour ce mariage. On eût pu répondre que le duc d'Anjou comptait quinze mois de moins que son frère, mais la négociation en resta là pour le moment, et, si elle fut reprise plus tard dans cette même dernière condition, ce fut pour la forme et saris espérance de réussir. Toutefois le lecteur s'apercevra que l'espoir d'une couronne luit déjà pour le duc d'Anjou ; deux autres espoirs de même nature surgiront pour lui, et il les réalisera. Nous mettons en dehors celui de devenir roi d'Ecosse, car s'il surgit en ce moment, dans la tête de Michel de Castelnau, l'idée de le donner pour époux à Marie Stuart, cette idée ne pouvait convenir à la reine mère[10]. Le mariage de la princesse Marguerite avec le prince de Béarn ne fut décidé que six ans plus tard, en 1571, mais il paraît que le projet en remonte à 1564, c'est-à-dire au moment où la future comptait douze ans d'âge comme le futur. Au milieu d'une cour corrompue, et avec les dispositions naturelles de Marguerite de Valois, il était sage de s'y prendre de bonne heure ; on fiançait d'ailleurs parfois à cet âge, mais il n'en fut rien cette fois. Ce qui justifie ce projet, c'est l'intention arrêtée de la reine mère d'enlever au parti protestant ses différents chefs ; or, le jeune Henri appartenait à ce parti et semblait destiné à servir de lieutenant à son oncle le prince de Condé. Catherine de Médicis songea bientôt à un autre mariage, celui de Charles IX avec la princesse Elisabeth, seconde fille de Maximilien, roi des Romains, de Bohême et de Hongrie. Cette union se réalisa en effet, nous le dirons plus loin, lorsque notre récit atteindra la paix conclue en l'année 1570 ; mais nous possédons un témoignage irrécusable d'un pourparler relatif à cet important objet. Dès 1562 M. de Vieilleville, depuis maréchal de France, ambassadeur auprès de l'empereur, propose à ce souverain de marier sa petite-fille Elisabeth avec son maître ; sur la demande naturelle qui lui est faite, il déclare n'avoir pas mission officielle d'en parler, mais s'attache à démontrer les avantages de ce mariage, et l'empereur les prend en telle considération qu'il fait venir sa petite-fille, et que celle-ci, en signe de remercîment, car elle ne parlait pas français, se laisse embrasser[11]. Deux ans après, Ferdinand Ier quittait cette terre, et le père de la future de Charles IX devenait Maximilien II. Un autre témoignage est celui de Castelnau, qui nous dit, sous la rubrique de 1556 : La reyne chercha l'alliance de l'une des filles de l'empereur, qu'elle obtint quatre ans après[12]. La période pacifique qui nous occupe ne fut pas exempte de troubles et d'émeutes. Il y en eut à Crevant près Auxerre ; entrons à ce sujet dans quelques détails. Parmi les localités hostiles à l'exécution de l'édit d'Amboise, sans doute par esprit d'opposition contre le gouvernement et pour protester contre le peu de persévérance de la reine mère à combattre des rebelles en armes, la cité d'Auxerre fut une des premières. Pareille résistance devenait illégale depuis l'enregistrement (Tu traité de paix, et peu opportune au moment où Catherine de Médicis cherchait à détruire le parti protestant en lui enlevant son élément politique dans la personne des seigneurs qui le commandaient ; mais la passion ne raisonne guère, et il existait alors trop peu de moyens de publicité pour que le système de la régente se répandît et fût approuvé par l'opinion catholique. Quoi qu'il en soit, quand on examina dans quel lieu du bailliage d'Auxerre les protestants pouvaient tenir leurs assemblées religieuses, ni le faubourg de Saint-Amatre, ni le village de Saint-Georges, distant d'une lieue, ni la petite ville de Saint-Bris, éloignée de 2 lieues, ne purent leur être concédés, tant les réclamations des catholiques se produisirent vives. Après un an de débats, on choisit Crevant, sis à 4 lieues ; les réformés réclamèrent à leur tour contre cette désignation et aussi contre les injures dont on les abreuvait journellement. Il se produisait inversement parfois dans la campagne des attaques contre les catholiques. C'était, on le voit, une situation tendue ; il suffisait d'une étincelle pour faire éclater une collision, et, en effet, au début de juin 1564, un engagement eut lieu à l'endroit même du prêche, assez violent pour que des morts restassent de part et d'autre sur le terrain du combat. D'Andelot réclama contre l'attaque dont les réformés avaient été l'objet ; aussitôt une lettre royale, datée du 19 juin, sembla lui donner raison, disant : Mon intention est que mon édict sur la pacification soit sincèrement gardé et observé. Néanmoins l'effet produit fut à peu près nul, même après une missive du prince de Condé qui insistait encore et à laquelle il fut gracieusement répondu. Toutefois les protestants d'Auxerre obtinrent une compensation : on toléra dès lors l'exercice de leur culte au faubourg Saint-Amatre. L'état d'hostilité entre catholiques et protestants, ces derniers étant peu nombreux, mais se soutenant mieux, se continua dans l'Auxerrois, entretenu par la présence de d'Andelot au château de Tanlay[13], de l'amiral de Coligny à Chatillon-sur-Loing, et du prince de Condé à Noyers[14]. L'émeute de Crevant ne fut pas la seule. En Guyenne et en Périgord des troubles surgirent, suscités par l'animosité des deux partis. Les chefs catholiques, contre lesquels on était aux aguets, furent obligés de s'armer et d'opposer au besoin la force à la violence ; ils le firent avec l'autorisation du gouverneur et prièrent Montluc d'avertir la cour de cette situation. Toutefois cela ne s'aggrava pas, puisque Montluc ne touche pas ce point en tête du livre VI de ses Commentaires et se borne à marquer ses pressentiments, nés des démarches secrètes des protestants, et le peu de créance que la cour y donnait. Il est certain que des deux partis on avait des sujets de plainte, et que la pacification rencontrait plus d'un obstacle pour sa mise en pratique. Les catholiques arguaient des obstacles mis par leurs adversaires à laisser les ecclésiastiques jouir de leurs bénéfices et assister leurs ouailles ; les protestants demandaient à ne pas être emprisonnés pour chanter des psaumes hors de leurs assemblées, à ne pas orner leurs maisons pour le passage des processions, à ne contribuer ni pour les confréries, ni pour les pauvres, ce que l'autorité royale concéda, prescrivant même aux commissaires des quartiers des villes de tendre les façades des maisons des réformés en leur lieu et place. De semblables plaintes se produisaient fréquemment, et par leur multiplicité jetaient de l'indécision dans les rouages officiels. Ces symptômes fâcheux se reproduisirent pendant un voyage que Catherine fit entreprendre à Charles IX et qui attira l'attention : ce voyage dura deux années, servit à l'instruction du jeune roi et le fit voir aux populations. Donnons-en une idée. La cour prit par Bar-le-Duc, où elle vit la duchesse de Lorraine, la princesse Claudine, sœur de Charles IX. De là Catherine de Médicis négocia avec le duc de Wittemberg et les autres chefs des troupes allemandes qui avaient secouru les protestants, voulant les attirer au service du roi, mais en vain ; ils promirent seulement de ne pas aider le parti protestant, si l'on ne violentait pas les consciences de leurs coreligionnaires. Guillaume de Saxe et Charles de Bade firent exception et acceptèrent les offres royales. De Bar, la cour se rendit à Lyon, puis dans le Dauphiné ; à Valence, le roi prescrivit de construire une nouvelle citadelle, suivant en cela l'exemple que sa mère lui avait déjà donné pour Lyon. Au château de Roussillon, Charles IX eut avec le duc de Savoie une entrevue et l'exhorta à se mettre en garde contre les coups des calvinistes. Les Avignonnais firent, par ordre du pape, une belle réception au roi de France ; dans cette ville se trouva un vice-légat et un ministre du Saint-Père avec lequel s'ouvrirent des pourparlers. Si nous en croyons Davila, et il était bien informé, comme l'un des hommes de la reine mère, le gouvernement de France s'y montra merveilleusement disposé en faveur de la papauté et promit l'introduction des stipulations entières du concile de Trente, et même la destruction de l'hérésie, mais en expliquant qu'il fallait en tout cela observer de nombreux tempéraments pour éviter le renouvellement de la guerre civile ; qu'on devait avant tout songer à rétablir les finances du royaume, et qu'il fallait choisir l'heure favorable pour chaque mesure. Charles IX passa ensuite dans la Provence. On était au commencement de 1565. Il traversa par Arles, où les enfants de la famille du Laurens, neveux de son médecin Castellan, lui récitèrent des vers. Dans d'autres villes il prit part aux divertissements du carnaval. En arrivant à Toulouse le jeune roi trouva grand nombre de gens venant lui adresser leurs plaintes ; pourtant en général, lorsqu'il fallut articuler ses griefs, chacun se montra plus circonspect sur les lieux qu'il ne l'avait été à distance, soit par écrit, soit de vive voix. Parmi ses visiteurs citons Blaise de Montluc, alors âgé de soixante-cinq ans[15], lequel s'exprime ainsi dans ses Commentaires : Je fus baiser les mains à Sa Majesté, laquelle me fist plus honorable accueil que je ne meritois. Le Frère nous apprend que ce guerrier célèbre avait eu soin de se présenter bien suivy et accompagné, et qu'il fut favorablement recueilly et caressé, non-seulement par le roi, mais par la reine et les princes. Aucun s'avança de le blasmer, ajoute cet écrivain[16], non sans quelque estonnement du roy neatmoins à qui on l'auoit estrangement dépeinct : donnant à penser Monluc par ses asseurez portemens à plusieurs : que l'envie de sa vertu plus que ses fautes, l'avoient faict blasmer devant Sa Majesté. L'éloge est direct et ne peut que relever Montluc dans l'opinion des biographes. De Toulouse, la cour se rendit à Mont-de-Marsan et y séjourna, attendant qu'on lui notifiât l'arrivée de la reine d'Espagne à Bayonne. Il était naturel que, passant aussi près des Pyrénées, la reine mère et le roi désirassent voir leur fille et sœur ; cependant les protestants s'inquiétèrent de ce rapprochement avec la cour d'Espagne, exclusivement catholique et fort rude, sous la main de Philippe II, dans l'emploi de ses moyens. Leur inquiétude surgit-elle de ce qu'on venait de leur faire signer une adhésion à une ligue, nommée confédération du roi, par laquelle on s'engageait sous serment à défendre la royauté ? Cette mesure avait été prise afin de faire avorter la formation qui se tramait d'une ligue secrète, projet dont Montluc venait d'avertir la reine mère[17]. En quittant Mont-de-Marsan, la cour se rendit à Bordeaux (9 avril) et visita cette ville, d'où elle s'achemina vers Bayonne, après une station assez prolongée. Pendant cette station, signalée par des fêtes, avec sauvages 2[18], un livre, l'Antiquité de Bovrdeavs et de Bovrg, avait été présenté au monarque par le principal (sic) du collège et aussitôt publié ; il ne renfermait aucun plan[19]. La dédicace finissait ainsi : Que Diev face vostre France tant heureuze, Sire, qu'elle puisse voir vn iour, qu'auecque ce beau titre de sage, qu'elle bailla jadis à cellui de vos predecesseurs rois, qui a esté compté le cinquiesme de vostre nom, vous aiés atteint et outre passé la grandevr du premier Charles. Le roi envoya au-devant de la reine d'Espagne son frère Henri[20] et une foule de seigneurs du plus haut rang ; cette suite se rendit par Saint-Jean-de-Luz (9 juin), sur le territoire espagnol, du côté d'Iran, puis amena la reine catholique à la frontière de France, où Charles IX et sa cour l'attendaient. Le séjour des deux cours à Bayonne fut marqué par un festin magnifique, donné dans l'île d'Aiguemau, sur l'Adour, par Catherine de Médicis, en une salle de verdure ovale, pourvue le long de son pourtour d'une série d'enfoncements gracieux, contenant chacun une table ronde pour douze personnes ; des troupes de bergères, habillées or et satin, les unes à la poitevine, les autres à la champenoise, celles-ci en Bretonnes, celles-là en Provençales, servirent le repas, et, quand le service fut terminé, une bande joyeuse de satyres et de nymphes dansa un prodigieux ballet, que malheureusement une abondante pluie d'orage vint clore promptement[21]. De Bayonne, la cour alla visiter la reine de Navarre ; obligation fut imposée à celle-ci de rétablir la religion catholique dans les lieux de son obéissance comme religion légale, conformément aux divers édits. Au retour, Charles IX prit par Nérac, Angoulême[22] et la Rochelle ; Blaise de Montluc l'accompagna jusque dans cette ville, d'où il fut congédié avec recommandation de faire observer l'édit de pacification. A peine revenu dans son gouvernement, Montluc reconnut combien les huguenots étaient déjà avancés dans leurs préparatifs de guerre, amassaient des armes et se groupaient ; il en avertit plusieurs fois la reine mère, qui ne le voulait croire ; enfin il lui envoya un contrôleur des guerres, nommé Martineau, puis un de ses secrétaires, appelé Boery, et, d'après la déclaration de ces deux émissaires, la cour se dirigea hâtivement de la Saintonge sur Angers (8 novembre) et Moulins. En effectuant son retour, principalement dans l'Aquitaine, le jeune roi de France aperçut tant d'églises pillées, de monastères ruinés, d'objets religieux brisés et épars sur les routes, tant de tombes profanées qu'il éprouva un profond dégoût et en conçut probablement de l'animosité contre les protestants : Davila nous rapporte cette impression. On a beaucoup reproché ce mouvement à Charles IX, mais mettons-nous à sa place. Qu'étaient les huguenots pour lui ? une secte dont l'existence en France n'était pas nécessaire, et qui pourtant voulait posséder la même puissance[23] que les catholiques ; qui traquait depuis six ans l'autorité royale, afin de grandir ses chefs à ses dépens ; qui avait été cause des malheurs du règne de son frère François II, qui récemment avait essayé de l'enlever lui-même et de lui inculquer de force sa religion. Pareille menace, dont il avait failli devenir victime, soulevait son âme, lorsqu'elle lui revenait en mémoire, et la vue de ces ruines amoncelées la lui rappelait, car elle lui dévoilait une inconséquence, celle de l'intolérance à son égard chez des hommes réclamant pour eux la liberté de conscience. Nous insistons sur cette impression ; elle a été relevée, il est vrai, mais à un autre point de vue ; pour nous, elle explique comment Charles IX, sous le coup d'une pareille constatation, a pu se montrer plus accessible aux propositions de la grande exécution nommée la Saint-Barthélemy. Au commencement de 1566, s'étant arrêté dans la ville de Moulins, ce monarque tint une assemblée pour le règlement de ses affaires. Les plus grands seigneurs, les présidents et les principaux conseillers des parlements de France y assistèrent. Le roi prononça un discours pour expliquer comment, à la suite d'un long voyage dans les diverses provinces de France, il avait recueilli des demandes et des plaintes dont il était utile de tenir compte pour l'apaisement des passions et des mécontentements. L'assemblée examina ces diverses requêtes, et il en résulta l'ordonnance de Moulins ; elle a trait à la réforme de la justice. Ce fut également à Moulins que la reine mère s'efforça de réconcilier les deux maisons de Guise et de Chastillon ; il y avait certes en cela une idée politique, mais elle fut assez mal prise des deux côtés, et Henri de Guise notamment, ne pouvant sans doute chasser de sa pensée l'idée que son père avait succombé à l'instigation peut-être de Coligny, ne se rendit aux réunions, dans lesquelles l'entente fut officiellement conclue, que pour ne pas déplaire à ses tuteurs. Une telle paix ne pouvait être de longue durée ; elle ne le fut pas plus, en effet, que la paix publique. Mais revenons à l'ordonnance de Moulins, datée de février 1566, quoique enregistrée le 23 juillet suivant, et donnons-en un aperçu sommaire : Pour obvier à la mauvaise observation des ordonnances, les infractions aux anciennes seront signalées par les juges dans un rapport spécial adressé au Parlement, et ce dernier fera lecture publique des nouvelles tous les six mois. Suivant la gravité des faits signalés par les juges et les maîtres des requêtes en chevauchée[24], le roi ordonnera les séances des grands jours qu'il jugera convenable. — Nulle nomination de conseiller au Parlement ne se fera sans un examen qui constate la qualité et prudhomie du candidat. — Afin de réduire le nombre des juges et leur assigner de bons gages, il n'y aura qu'un siège présidial, composé de six juges, en la ville capitale de chaque bailliage et sénéchaussée. — Nos sièges présidiaux ne feront plus deux jugements sur une cause, mais la jugeront ensemblement, qu'elle soit du cas de l'édit en dernier ressort, ou sujette à ressort en un parlement. — Il est défendu à tout juge de rien prendre des parties, sinon ce qui leur est permis par nos ordonnances. — Nos prévôts de Paris, baillis et sénéchaux de nos provinces seront de robe courte, gentilshommes, et iront résider sous trois mois clans leur province, sinon nous déclarons leurs offices vacants. — Les pouvoirs de tous gouverneurs de nos pays, comparés à ceux de nos baillis et sénéchaux, seront réglés par les ordonnances du feu roi Louis XII et de notre très -honoré seigneur et père le roi Henri ; nos gouverneurs ne pourront accorder aucune lettre de grâce, rémission et pardon, ni lever aucun denier en nos pays. — Défendons à nos sujets de recéler aucun accusé, sous peine d'encourir la même punition que cet accusé. — Enjoignons à nos officiers de faire étroitement garder les édits de pacification. — Ceux qui résisteront en leurs maisons et châteaux contre notre justice et refuseront obéissance, auront leurs maisons et châteaux démolis, et perdront tout droit de justice sur lesdits lieux. — Le haut justicier qui ne punira pas une violence sera privé de sa justice et ses juges déchus de leur état. — Il est défendu, sous peine de la vie, d'outrager un officier faisant acte de judicature, et nous entendons qu'il ne soit expédié de lettres de grâce d'un tel outrage. Et si par impétuosité aucune estoit accordée, ne voulons y avoir aucun égard[25]. — Le juge du domicile sera tenu de renvoyer le délinquant au lieu du délit, s'il en est requis. — Les causes et procès criminels des gens d'église, nobles et officiers, introduits en première instance en nos cours, seront instruits et jugés en la grand'chambre. — Nos juges instruiront et jugeront en tous cas les délits privilégiés contre les personnes ecclésiastiques, et nul ne pourra jouir du privilège de cléricature s'il n'est constitué es ordres sacrés, et pour le moins sous-diacre ou clerc actuellement résidant. — Afin de réprimer les excès et voies de fait qui se commettent en ce royaume, nous voulons que les prévôts des maréchaux, vice-baillis et vice-sénéchaux, ou leurs lieutenants, connaissent des cas à eux attribués en dernier ressort par nos édits, contre toutes personnes, de quelque qualité qu'elles soient. Lesdits officiers feront leurs chevauchées par les champs et y vaqueront continuellement, sans séjourner aux villes, sinon pour occupations légitimes et nécessaires. — En raison de la fréquence des troubles publics, nos juges présidiaux instruiront et jugeront sans appel au nombre de sept, pour cette année seulement, toutes matières d'excès commis avec force, port d'armes, assemblées illicites, contre toutes personnes de leur province, et ce jusqu'à sentence de mort exclusivement, auquel cas voulons estre déféré à l'appel qui sera interjetté par le condamné. Cette prescription, contenue dans l'article 47 de l'ordonnance, est la seule qui soit transitoire et exceptionnelle. Une disposition particulière complète ce que l'ordonnance d'Orléans avait fixé relativement aux substitutions, et les restreint au 4e degré. Continuons notre extrait de l'ordonnance de février 1566. Les deniers et biens perdus par les mineurs dans les jeux de hasard pourront être répétés par lesdits mineurs, leurs pères, mères, tuteurs et curateurs ou proches parents, et voulons leurs biens leur être rendus et employés à leur profit, afin d'éviter leur ruine et destruction. — Les maires, échevins, consuls et administrateurs des villes n'auront plus l'exercice des causes civiles, attribuées à nos juges ordinaires ou à ceux des hauts justiciers, mais continueront l'exercice du criminel et de la police, ce à quoi ils vaqueront incessamment et diligemment. —Dans les villes où les corps et communautés n'ont pas la police, les habitants éliront par quartier un ou deux d'entre eux, qui auront la charge d'administrer la police et tout ce qui en dépend, et qui auront pouvoir d'ordonner et de faire exécuter jusqu'à la valeur de 60 sols en une fois ; en ce qui excédera la puissance susdite, dont les titulaires seront renouvelés par année ou par semestre, les juges habituels conserveront la police des localités dont il s'agit. — Les pauvres de chaque ville, bourg ou village seront nourris et entretenus par ceux de la ville, bourg ou village dont ils sont natifs, sans qu'ils puissent vaguer et demander l'aumône ailleurs qu'au lieu duquel ils sont. La mendicité n'était donc pas interdite comme aujourd'hui, mais circonscrite par la localité et renfermée dans son cercle naturel ; c'était déjà beaucoup, car au moins on connaissait mieux les pauvres que l'on devait assister, ainsi que leurs bons et leurs mauvais penchants ; on savait donc mieux comment leur venir en aide, s'ils se trouvaient véritablement hors d'état de travailler. D'ailleurs ces pauvres sont astreints, par l'article 73 de l'ordonnance qui nous occupe, à produire un certificat du maire, échevin, consul ou marguillier de leur paroisse, pour être admis dans un hôtel-Dieu ou une maladrerie. L'article 76 rappelle que pour obtenir et exercer un bénéfice il faut être domicilié et compétent ; c'est une répétition d'un point sur lequel ont déjà porté les précédentes ordonnances, soit de ce règne, soit du précédent. Sur la remonstrance à nous faite de la part d'aucuns de nos parlements, admonestons et néanmoins enjoignons à tous archevêques et métropolitains, -bailler leurs vicariats à personnes constituées en dignités ecclésiastiques, résidant dans le ressort de nos parlements, pour y avoir recours quand besoin sera, et sous peine de saisie de leur temporel. Les deux articles suivants réglementent ce que nous appelons aujourd'hui le régime de la presse ; ils sont plus explicites et autrement formels que l'article 26 de l'ordonnance d'Orléans, lequel concerne uniquement l'impression des almanachs. Article 77. Défendons très étroitement à tous nos sujets d'écrire, imprimer et exposer en vente aucuns livres, libelles ou écrits diffamatoires et convicieux contre l'honneur et renommée des personnes, sous quelque prétexte et occasion que ce soit. Et déclarons dès à présent tels scripteurs, imprimeurs et vendeurs, et chacun d'eux, infracteurs de paix et perturbateurs du repos public, et comme tels voulons estre punis des peines contenues en nos édits. Enjoignons à nos sujets qui ont tels livres ou écrits, de les brusler dedans trois mois, sur les peines de nos dits édits. Article 78. Défendons aussi à toutes personnes que ce soit, d'imprimer ou faire imprimer aucuns livres ou traitez sans nostre congé et permission, et lettre de privilège expédiée sous nostre grand scel ; auquel cas nous enjoignons à l'imprimeur d'y mettre et insérer son nom et le lieu de sa demeurance, ensemble ledit congé et privilège, et ce sur peine de perdition de biens, et punition corporelle. L'un des derniers articles prescrit aux hôteliers de tenir à la porte principale de leur hôtellerie un tableau spécial avec inscription des ordonnances relatives à leur état, et du prix des vivres[26], et, s'ils ne s'y conforment, les amène à une amende de 50 livres pour chaque infraction ; et, à cet effet, les juges et officiers doivent visiter ou faire visiter souvent, chaque jour même, les hôtelleries pour estre informez et ouir les plaintes et contraventions aux ordonnances, afin d'y pourvoir promptement. Enfin, il est rappelé par l'ordonnance de Moulins que la réception de nouveaux procureurs est interdite, que les parents ne peuvent siéger dans la même cour, que les blasphèmes sont défendus. Cette ordonnance[27] donna lieu à plus d'une observation, et il fallut avoir égard à celle du parlement de Paris, pour en obtenir l'enregistrement et la publication, aux termes mêmes de son article 2 ; on le fit dans une déclaration, datée du 15 juillet 1566, laquelle fit droit en même temps aux remontrances dirigées contre l'ordonnance d'Orléans. Lesdites remontrances portaient sur des points de droit et avaient trait à des décisions relatives aux magistrats eux-mêmes, comme on peut en juger par l'aperçu suivant, qui complétera notre extrait de l'ordonnance elle-même : L'examen exigé de tous les conseillers, à nommer ou déjà nommés, sera maintenu. — La résidence, devenue obligatoire pour les baillis ou sénéchaux, le sera seulement à partir du 31 décembre 1566, terme extrême et dernier[28]. — En ce qui concerne les remontrances du clergé sur les cas privilégiés contre les personnes ecclésiastiques, la déclaration accorde deux mois pour présenter de nouvelles explications. Pour la confection de l'inventaire des biens d'un prisonnier, les prévôts des maréchaux, vice-baillis et vice-sénéchaux appelleront, à peine de privation de leurs offices, deux proches voisins de la maison où il aura été arrêté, ou l'un des officiers du lieu, pour y assister et signer ledit inventaire. — Afin de mieux faire à l'avenir les preuves de tonsures et professions de vœu monachal, quand besoin sera, il sera établi et déposé au greffe du juge ordinaire un registre de la profession monachale. — La distribution des incidents à la barre se fera sur requêtes présentées par les parties, par les présidents de nos parlements, qui, pour ce faire, s'assembleront à certains jours. — Touchant les procureurs, nous permettons aux présidents de nos cours de parlement de s'associer à quatre conseillers pour aviser jusques à quel nombre il pourrait être requis d'augmenter le nombre des procureurs reçus avant l'édit de l'an 1559[29]. Nous mentionnerons, pour terminer ce qui concerne la justice dans cette période, que son respect diminuait et semblait menacé, au moins dans la capitale du royaume, puisqu'une déclaration du 5 août 1567, rendue à Compiègne, portait que dans chacun des quartiers de Paris cent bourgeois armés seraient choisis pour prêter appui à la justice. L'ordonnance de Moulins, et la déclaration complétive dont il vient d'être question, ne sont pas les seules dispositions législatives appartenant aux temps traités en ce chapitre ; nous rappellerons par exemple : 1° La déclaration[30] qui défend de recevoir un domestique s'il ne présente, en offrant ses services, un certificat de son ancien maître. Cette déclaration a son importance : elle insiste sur l'utilité pour l'État d'une bonne et loyale administration des maisons privées, laquelle ne peut avoir lieu si les serviteurs les volent et les pillent ; elle prescrit donc à tout chef de famille de n'en recevoir aucun sans ladite certification, et veut en revanche qu'on ne donne congé à un domestique sans lui bailler aussi acte de l'occasion de son congé ; enfin elle menace le serviteur d'être puni comme vagabond s'il voyage sans être muni de cette pièce. 2° L'édit[31] qui ordonne la démolition de toutes saillies et ôte-vents[32] des maisons de Paris, édit confirmatif de l'article 96 de l'ordonnance d'Orléans, dont nous avons cité le texte précédemment[33]. Nous avons signalé l'inquiétude causée aux protestants par l'entrevue de Bayonne, la reine mère ne pouvant puiser dans ses rapports avec l'Espagne que des sentiments hostiles à leur parti. Cette inquiétude s'aggrava par la préparation d'une armée composée de Siciliens, de Napolitains, de Milanais, ainsi que de chevau-légers espagnols, que le duc d'Albe formait en Piémont pour mener dans les Pays-Bas. Les réformés essayèrent de parer à ce danger en incitant d'une part les habitants des Pays-Bas à s'opposer par les armes à l'entrée de cette armée sur leur territoire, ce que ceux-ci n'osèrent faire, et aussi en effrayant la cour de France sur le danger d'un voisinage aussi puissant ; car, les Pays-Bas une fois vaincus, il pouvait se faire que les Espagnols fussent tentés par le désir de profiter des circonstances pour démembrer la France[34] ; mais le gouvernement français ne pouvait se préoccuper d'un danger aussi lointain, quand il avait dans son sein des ennemis également acharnés et capables, ils l'avaient prouvé, de recourir pour triompher l'appui d'une puissance étrangère. Les divisions devenaient plus grandes entre les personnages des sphères gouvernementales. Il en existait dans la famille même du connétable, dont les deux fils, tous deux maréchaux, tenaient pour des partis différents : l'aîné, le maréchal de Montmorency, pour la maison de Châtillon ; le second, le maréchal d'Amville, pour les princes de Lorraine. Le connétable finit par se trouver embarrassé de cette situation, et une grande indécision en résulta dans sa conduite. Cette hostilité entre frères se reproduisait plus rudement encore entre concitoyens, en sorte que la masse flottait indécise et inquiète, tandis que les passionnés s'agitaient et s'apprêtaient à profiter des éventualités sombres qu'on entrevoyait. Parmi ces derniers il faut, ranger le prince de Condé et l'amiral. Le premier réclama la lieutenance générale, et comme on la lui refusa, pour la donner au duc d'Anjou, frère du roi, ce qui était prudent, vu que plusieurs fois le chef passé, et sans doute le chef futur des protestants, avait trahi et combattu la cour, il se montra plus hostile encore et prêt à lever à nouveau l'étendard de la révolte. Le second, qui aimait à se poser en chef et en arbitre, s'était rendu une fois au Parlement[35], de sa propre autorité et mission, acte insolite s'il en fut, là avait présenté plus d'une remontrance, et cru pouvoir promettre aide aux Parisiens pour maintenir la paix dans la capitale et éloigner les maux qui les menaçaient. La cour de France s'était alarmée d'une pareille tentative ; on empiétait en effet sur ses prérogatives en agissant de son propre mouvement, et les lambeaux de son pouvoir pouvaient passer ainsi peu à peu entre les mains des grands ; toutefois elle n'osait rien dire, et si elle songeait à se défendre et même à se venger, c'était plutôt par des coups cachés. Evidemment l'amiral de Coligny avait agi ainsi pour irriter la reine mère qu'il voyait abandonner les protestants après les avoir flattés. Peut-être avait-il aussi été l'instigateur de la singulière[36] opposition faite par le maréchal de Montmorency à l'entrée dans Paris du cardinal de Lorraine, accompagné des gardes armés dont il pouvait marcher entouré, suivant une autorisation royale ; cette entrée — le ridicule à part, car évidemment le cardinal abusait de ses gardes — ne déplaisait certes pas aux Parisiens, qui se montrèrent toujours catholiques, et c'était jouer pièce autant à la royauté, qui avait récompensé les services du cardinal par ce privilège, qu'offenser la maison de Guise. Admettons que ces symptômes alarmants aient été effacés en partie par la réconciliation conclue à la suite de l'assemblée de Moulins ; ce fut un moment fort court. D'autres symptômes surgirent, et, comme tous influèrent sur la prochaine rupture entre les partis, il nous les faut mentionner encore. La reine de Navarre, mécontente que l'on eût empêché le mariage de sa nièce, Françoise de Rohan, avec le duc de Nemours, quitta la cour en arguant le prétexte que l'on avait voulu arrêter un ministre réformé coupable d'avoir prêché chez elle. D'Andelot accusa publiquement le duc d'Aumale d'avoir voulu se défaire de lui par la main d'un capitaine nommé Attin ; cette accusation tomba devant l'interrogatoire subi par ce dernier, retenti à cet effet prisonnier. Ces disputes éclatant de ci, de là, entre les grands, montraient un état d'irritation secret ; des mots on devait passer aux actes, et les armes allaient jouer leur rôle. Ace moment où la deuxième guerre civile éclate, on ne peut nier cependant que le gouvernement n'ait fait plusieurs tentatives de conciliation ; il est utile de mettre ce point de vue en lumière, afin d'indiquer comment il a fini par être poussé à bout, Plusieurs fois dans ce chapitre nous avons vu la reine mère chercher à calmer les colères et à rapatrier les esprits les plus violents. On peut également prouver l'intention du gouvernement d'essayer une franche et loyale observation des édits de pacification. En passant à Nérac, le roi Charles IX recommande de choisir les magistrats de la ville moitié parmi les protestants, moitié parmi les catholiques. Blaise de Montluc cherche à maintenir la balance égale entre les deux religions, ayant soin de faire pendre tous ceux qui transgressaient l'édit de pacification, qu'ils soient catholiques ou protestants. Quand les deux religions, dit-il, virent que les uns ny les autres ne pouvoient avoir d'asseurance de moy s'ils transgressoient, ils se commencèrent à entr'aymer et à se fréquenter[37]. Et il ajoute : Voy-là comme j'entretins la paix l'espace de cinq ans en ce pays de Guyenne entre les uns et les autres ; et croy que si tout le monde eust voulu faire, sans se partialiser d'un costé ny d'autre, et rendu la justice à qui la méritoit, nous n'eussions jamais yen tant de troubles en ce royaume[38]. Il y a du sens dans cette réflexion : la justice chez l'autorité, la modération chez les partis, eussent pu ramener le calme et la prospérité dans le pays ; mais, gouvernement ou sujets, est-on jamais sage ? le fut-on surtout à cette époque ? et à qui incombe la plus grande part de responsabilité ? Nous dirons plus tard notre opinion sur ce grave sujet. |
[1] De la République, livre V, chapitre V.
[2] La carte de Normandie empruntée à l'atlas de Mercator porte Villerville sur la côte opposée, comme point situé vis-à-vis du Havre, et place cette localité à l'embouchure d'un très-petit cours d'eau coulant encre Honfleur et la Touque : on sait que Trouville occupe l'embouchure de cette dernière rivière, mais cette ville n'existait pas, croyons-nous, à la fin du XVIe siècle, même à l'état de village. Il s'agit évidemment de Villerville-sur-Mer, et sans doute l'auteur du XVIe siècle écrit Villeville, non par une mauvaise orthographe, non par une lettre omise, mais parce que c'était bien la forme première et l'origine du nom de cette localité, ou tout au moins sa prononciation à cette époque. Quoi qu'il en soit, le très-petit cours d'eau en question coule entre Villerville et Vasoui.
[3] Moyen détourné de faire croire à un peu d'abondance chez eux ; c'est une répétition d'un fait fréquent, que l'on retrouve jusque dans l'antiquité. Lisez à ce sujet notre mémoire sur les Imitations militaires.
[4] LE FRÈRE dit le soir même de la capitulation, CASTELNAU deux ou trois jours après.
[5] Livre V, chap. IV.
[6] Charles IX avait atteint sa majorité le 26 juin.
[7] Chaque armoirie fut payée, suivant sa grandeur, de 7 sous 6 deniers à 5 sous, chaque génie 5 sous ; ce mémoire, acquitté par Deconteville, se trouve encore dans les archives de Pont-Audemer.
[8] Histoire de l'ancienne infanterie française, par le général SUSANE, t. I, p. 155.
[9] Il n'y a pas de soldats en France qui surpassent les Gascons s'ils sont bien conduits, et mesmement les enseignes du capitaine Charry, lesquelles depuis le roy honora tant, qu'il les print de sa garde, et les retient encores a present que Monsieur de Strozzi en a la charge, apres la mort meschante du capitaine Charry, assassiné à Paris. Commentaires de MONTLUC, livre V, édition du Panthéon littéraire, p. 274.
[10] Mémoires de Castelnau, livre V, chap. IX, X, XI.
[11] M. de Vieilleville fut esbahy que la princesse se presenta pour le baiser. Ce qu'il reffusa de la lere offre avec une grande revereuce. Mais, elle en faisant instance, il obeist, disant qu'il luyavoit baisé la bouche par honneur, et le plus grand qu'il receust de sa vie, et qu'il luy baisoit semblablement les mains en signe de perpetuelle obeissance et très humble service. Mémoires de Vieilleville, par VINCENT CARLOIX, livre VIII, chap. liv. En 1562, la princesse Elisabeth comptait huit ans.
[12] VI, 2.
[13] A 9 kilomètres de Tonnerre.
[14] A 20 kilomètres de Tonnerre.
[15] On peut le supposer né avec le siècle.
[16] 1584, t. I, p. 217.
[17] Début du livre VI des Commentaires.
[18] C'était la mode alors. L'Amérique venant d'être découverte, on exhibait des sauvages, des Brésiliens surtout amenés en France à la suite de l'expédition de Villegagnon. (Voyez un chapitre de la 2e édition de notre Histoire de François II.)
[19] L'édition parue neuf ans plus tard est préférable ; voici son titre exact : l'Antiquité de Bovrdeavs et de Bourg, présentée au roi Charles neufiesme, le treiziesme jour du mois d'auril, l'an mille cinq cens soixante et cinq à Bovrdeavs, et l'hors premièrement publiée, mais depuis reucuë et augmentée, et a ceste autre impression enrichie de plusieurs figures, par son aucteur ELIE VINET, in-4°, à Bovrdeavs, par Simon Millanges, rue Saint-Iamme, près la maison de la ville, 1574. Dix ans plus tard, l'Antiquité de Saintes et Barbeziers a paru chez le même éditeur et par le même auteur.
[20] Les chroniqueurs du temps disent Henri duc d'Orléans ; il l'était en effet, après avoir été duc d'Angoulême, son frère Charles IX lui ayant successivement abandonné ces titres, le second en devenant héritier du trône, le premier en prenant la couronne. Ce prince était né duc d'Anjou, et est plus connu sous ce titre, tant qu'on ne peut l'appeler ni le roi de Pologne, ni le roi de France Henri III.
[21] Mémoires de Marguerite de Valois, édition de M. GUESSARD, p. 9.
[22] On commençait alors ce nom de ville par un E, témoin ce petit factum : Engovlesme, à Poitiers, par ENGUILBERT DE MARNEF, 1567, in-4° de 15 feuillets non numérotés,
[23] C'est le mot de Charles IX à Condé en 1567, avant la deuxième guerre civile : Hier vous étiez à peine soufferts, aujourd'hui vous voulez être égaux, demain vous nous chasserez pour être seuls.
[24] Nous dirions aujourd'hui en tournée.
[25] Singulière disposition que d'entraver par avance le droit de grâce inhérent à la souveraineté, son plus bel apanage, et de l'entraver pour des cas inconnus ; ici l'exagération se trahit elle-même.
[26] A en juger par les usages actuels (on se rappelle la lutte soutenue par l'auteur des Guides-Conty à l'effet d'indiquer aux voyageurs les prix réels des hôtels où ils descendaient), cette prescription n'existe plus en Europe. Existe-t-elle même encore à la Martinique et à la Guadeloupe, colonies françaises où la Cour de cassation déclarait en 1827 l'ordonnance de Moulins applicable ?
[27] Parmi les signataires de l'ordonnance de Moulins, on remarque le prince dauphin ; il s'agit du fils du duc de Montpensier, lequel épousa, en 1566, la fille unique du marquis de Mézières.
[28] Il y eut, par la déclaration du 11 décembre 1566, une nouvelle prolongation de ce délai, pour une année au total.
[29] Les articles dont nous ne faisons pas mention se rapportent à l'action et à la police intérieure des divers tribunaux.
[30] Rendue à Toulouse le 21 février 1565.
[31] En date du 29 décembre 1564 ; publié à Montpellier.
[32] Par corruption auvents. — L'étude comparative des expressions du XVIe siècle avec celles du XIXe serait instructive. On disait par exemple non un infanticide, mais le parricide d'un enfant nouveau-né : voyez p. 1277 de la Nouvelle et cinquième edition du Recueil d'arrests notables des cours souveraines de France, par JEAN PAPON, conseiller du roy et son lieutenant général au bailliage de Forests, à Lyon, par Iean de Tovrnes, imprimevr du roy, 1569.
[33] Chapitre II de ce premier livre, p. 41.
[34] Mémoires de Castelnau, livre VI, chap. II et III.
[35] A la fin de 1565.
[36] Le prince de Condé la blâma. Voyez Histoire de François II, p. 25.
[37] Les catholiques, ayant violé la trêve ou l'édit à Casteljaloux, furent jetés dans la tour de Magneheuf, prison de cette ville. Le commandeur de cours voulut délivrer ces prisonniers, mais Jeanne d'Albret écrivit à Xaintrailles, de Nérac, le 19 avril 1564 : Montez à cheval, tout incontinent celle lettre reçue, pour vous en aller audit Casteljaloux, et là, étant arrivé, appelez les magistrats et consuls et autres gens de bien de ladite ville, faites faire le guet aux portes, afin que le susdit n'exécute son entreprise ; faites de votre pouvoir telle résistance que l'autorité en demeure au roi, à la conservation de ses edits, à moi et à justice, sous peine d'être responsable des prisonniers et s'en prendre à vous s'il vient faute.
[38] Fin du livre V des Commentaires.