Les dernières persécutions du troisième siècle

APPENDICE H — NOTE SUR L’EMPIRE GALLO-ROMAIN.

 

 

Le tableau rapide du règne du Posthume et de ses successeurs fera comprendre l’appui qu’aurait assuré à la civilisation romaine menacée l’existence d’un empire d’Occident, formé de la Bretagne, de la Gaule et de l’Espagne.

Au commencement du règne de Valérien, M. Cassianus Latinius Postumus avait été placé près de Gallien pour l’assister dans le gouvernement et la défense des Gaules. L’empereur le préféra pour cette mission à Aurélien, dont la dureté peu conforme à l’esprit du temps eût exaspéré l’âme molle et la nature vicieuse du prince[1]. Plus conciliant, Posthume était aussi bon général et aussi habile politique. Je vous l’envoie, écrivait l’empereur aux municipalités transalpines, parce qu’il est tout à fait digne de la sévérité gauloise. Lui présent, ni le soldat ne manquera dans les camps, ni le droit au forum, ni la justice dans les tribunaux, ni la dignité dans les curies. Si un tel homme trompait mon espoir, personne désormais ne mériterait confiance[2]. Les légions et le peuple se souvinrent de ces paroles, lorsque Gallien eut quitté la Gaule pour aller repousser une invasion d’Alemans en Italie, et qu’au même moment arriva la nouvelle des revers, peut-être déjà de la captivité de Valérien. Entre Gallien absent, dont chacun connaissait les faiblesses, et le soldat courageux, le magistrat plein de fermeté, grand dams toute la conduite de sa vie[3], qui défendait la province et venait de venger par une victoire sur les Germains les aigles humiliées en Orient, le choix n’était pas douteux. Les légions du Rhin, fières de leur général, les peuples des cités gauloises, dont la nature est de ne pouvoir supporter les princes légers, prodigues, et dégénérés de la vertu romaine[4], donnèrent la pourpre à Posthume[5]. Malheureusement cette élection fut précédée du sac de Cologne, où résidait sous la tutelle d’un gouverneur impopulaire le César Saloninus, fils de Gallien. Livré aux soldats, le jeune prince fut mis à mort. J’hésite à rendre Posthume responsable d’un meurtre qui enlevait de ses mains un otage précieux : ni l’homme, au jugement d’un historien, n’était capable de ce crime[6], ni le politique n’était capable de cette faute.

En acceptant la pourpre offerte par les armées de Germanie et les cités des Gaules, Posthume, qui prétendait rester le collègue de Gallien, ne se mettait pas à la tête d’un mouvement de revendication patriotique et de scission violente. Depuis le mur de Sévère jusqu’au détroit de Gadès, Rome demeurait maîtresse incontestée. Sa religion, ses institutions, ses mœurs étaient acceptées par des populations fières, intelligentes, fatiguées d’une orageuse indépendance, heureuses de se mouvoir en paix dans les cadres grandioses et souples d’une organisation sociale où les libertés les plus étendues accordées aux cités et aux provinces compensaient amplement l’absence, à peine sentie, des libertés politiques. Les druides n’attisaient plus dans les âmes, comme il y a deux siècles, le souvenir des gloires éteintes, prêchant la haine des conquérants, poussant Civilis et Sabinus à dresser contre Rome un éphémère empire des Gaules[7] ; l’empire fondé par Posthume, et destiné à durer quatorze ans, eut au contraire pour lien l’amour de la civilisation romaine. Seule la nécessité de défendre l’Occident contre la barbarie germanique porta les soldats et le peuple à transformer en Auguste le président des Gaules et le chef de la frontière du Rhin ; transformation facile, puisque, sous Valérien, au proconsul de la Narbonnaise, aux préteurs de la Lyonnaise, de l’Aquitaine, de la Belgique, des deux Germanies parait avoir été substitué un gouverneur unique[8], commandant non. seulement aux quelques cohortes disséminées dans les Gaules, mais encore aux huit ou neuf légions établies à demeure sur les bords du Rhin[9]. L’autorité du nouveau souverain fut aisément acceptée des contrées voisines, où les peuples, bien que moins exposés aux incursions ennemies, sentaient la faiblesse et l’éloignement du pouvoir central : les légions de Bretagne et d’Espagne jurèrent fidélité à Posthume[10], et les cohortes auxiliaires qui défendaient contre les Pictes le mur d’Hadrien prirent le nom de Posthumiennes[11]. Une véritable confédération occidentale se forma sous le sceptre du vaillant empereur, moins pour menacer Rome que pour la protéger et la couvrir.

Dans cette union de trois grandes contrées, l’hégémonie de la Gaule s’imposait aisément. Non seulement la révolution qui avait porté au trône un nouveau souverain s’était. faite chez elle, mais encore la Gaule seule joignait aux mœurs et aux institutions romaines pleinement acceptées une sève nationale assez puissante encore pour les soutenir et les vivifier. La Bretagne, d’abord entamée difficilement par l’esprit latin, avait fini par s’en laisser pénétrer : les classes supérieures n’y parlaient plus le celte ; resserrée entre les murailles qui au nord la séparaient de la barbarie, et les flots qui l’isolaient du reste du monde, la partie de l’île soumise aux Romains subissait sans contrepoids l’influence de leur civilisation, que représentaient dans un territoire relativement restreint de nombreux fonctionnaires civils et plusieurs légions. Aussi, bien qu’entrée tardivement dans l’Empire, et d’abord hésitante, finit-elle par se livrer à lui sans réserve : Rome abandonnera plus tard la Bretagne, la Bretagne, d’elle-même, n’abandonnera jamais Rome[12]. L’Espagne s’était donnée avec une égale docilité. Cette fière contrée, si belliqueuse naguère, et destinée à le redevenir, avait, au contact du monde romain, perdu toute vertu guerrière. Elle ne retrouvait d’énergie que pour refuser aux empereurs les hommes nécessaires au recrutement des légions[13]. Dans la péninsule ibérique, les grandes villes se comptaient par centaines[14] : les agitations de la vie municipale, les spectacles, les élections, toutes les énervantes douceurs de la civilisation impériale suffisaient à leurs habitants. Excepté dans quelques régions montagneuses du Nord, toute trace avait disparu de la langue et des dieux nationaux[15]. La Gaule gardait du passé une mémoire plus fidèle. L’élément celtique s’était marié chez elle à l’élément romain, sans se laisser pourtant absorber tout entier. Les villes étaient cinq ou six fois moins nombreuses qu’en Espagne[16] : les populations rurales, les vieux groupes indigènes, gardaient la prépondérance, et conservaient, avec la langue[17], les usages et les cultes locaux. Au troisième siècle, il se faisait même en Gaule une sorte de retour vers le passé ou d’évolution vers l’avenir, qui n’altérait en rien, d’ailleurs l’attachement aux institutions impériales. C’est ainsi que beaucoup de cités gauloises reprenaient le nom de leur peuple, abandonnant leur nom latin[18]. C’est ainsi encore que Lyon, création artificielle d’Auguste[19], voyait diminuer son influence au profit de Trèves, devenue le quartier général des autorités militaires, et de Bordeaux, dont l’importance commerciale et littéraire grandissait chaque jour : le nouvel empire aura tour à tour ces deux villes pour capitales. Le centre de la fabrication monétaire se déplaçait aussi : l’atelier de Lyon avait suffi jusque-là ; mais pendant l’empire gaulois de nouveaux ateliers s’ouvrent : nous connaissons des billons de Posthume frappés à Cologne[20], et l’on cite des pièces des trois métaux frappées à Trèves[21]. En un mot, la Gaule était demeurée vivante, sans être moins romaine : on comprend qu’elle ait entraîné dans son mouvement les deux autres contrées occidentales, dont l’originalité s’était davantage émoussée au contact de la civilisation.

Si l’on en croit Trebellius Pollion, Posthume éleva aussitôt à la dignité de César, puis d’Auguste, son fils[22], qui exerçait dans la Gaule Narbonnaise un commandement militaire. Malgré cette charge, dont l’avait depuis plusieurs années investi Valérien, le second Posthume était fait surtout pour la vie civile et les arts de la paix. Il représentait, par là, un des côtés les plus brillants de la civilisation gallo-romaine. La Gaule est la patrie des orateurs. Elle fournit non seulement à la Bretagne[23], mais à l’Italie et à Rome les plus beaux parleurs de l’école et du forum[24]. L’enseignement de la rhétorique, lés exercices pratiqués de déclamation, considérés par les anciens comme la préparation la plus efficace à la politique et au barreau, florissaient sur tous les points de cette’ terre privilégiée, aux bords du Rhône et de la Méditerranée comme aux environs de la Garonne et du Rhin. Le jeune Posthume fut un des célèbres rhéteurs de son temps. On ne sait où il avait étudié. Probablement il ne fréquenta point les écoles de Bordeaux ou d’Autun : la rhétorique, ou, comme dit un poète, l’art de Quintilien, était enseignée avec succès aux bords de la Moselle[25] : tout porte à croire qu’il fit ses études à Trèves, où son père résidait probablement avant d’être appelé à l’empire. Il était si habile dans l’art de la déclamation, rapporte son biographe, que plusieurs de ses controverses ont été attribuées à Quintilien[26]. De nombreux critiques voient en lui l’auteur des dix-neuf déclamations mises sous le nom de Quintilien, et qui n’appartiennent certainement ni au temps ni au style de ce maître de la littérature latine. Ce sont, comme toutes les pièces de ce genre, des plaidoyers imaginaires, roulant sur des questions de fait ou de droit, ordinairement fort puériles. Cependant, quelques traits semblent vivants et personnels. Les questions sociales paraissent inquiéter l’auteur. Il parle sans cesse du riche et du pauvre[27]. Les sourdes révoltes qui grondent déjà au cœur des prolétaires gaulois, et feront prochainement éruption dans le soulèvement des Bagaudes, semblent avoir été devinées par le jeune déclamateur. Si on nous refuse la loi, le forum, le juge, nous serons poussés aux armes. La guerre commencera, et la colère tiendra lieu de droit. La faiblesse est opprimée ; la plèbe, soumise à la domination de quelques-uns, gémit dans une triste servitude. Cependant les pauvres souffrent. Il est facile de nous nuire, mais il nous est plus facile encore de nous venger. En vain tu te crois fort, appuyé sur tes richesses : si je ne tiens pas à vivre, nous sommes égaux[28]. Le tableau tracé par l’orateur ressemble à ceux que burinera plus tard le crayon enflammé de Salvien : les riches étendant outre mesure leurs champs, les pauvres contraints à se mettre dans leur dépendance[29]. On voit se former ces immenses villas gallo-romaines, que l’invasion barbare trouvera peuplées de colons et de serfs, amenés par la misère[30]. Déjà il est question de présents périodiques faits par le pauvre au riche pour en être épargné ou protégé[31] : le mot recommandation[32], destiné à prendre un jour un sens juridique, se lit dès lors. Autant que l’on peut conjecturer sur des indices aussi légers, Posthume le Jeune, s’il eût vécu et régné, aurait voulu étudier de près les tristes problèmes que, sous des formes diverses, l’égoïsme humain[33] pose dans tous les temps, et dont le christianisme seul offre au monde la solution.

Une autre déclamation attribuée au jeune rhéteur contient une chaleureuse invocation à la mère Rome, aux enseignes militaires, aux aigles victorieuses[34]. Ces aigles défendirent intrépidement, sous Posthume, la frontière du Rhin contre les Barbares. Trébellius Pollion atteste l’immense amour que lui portaient les nations gauloises, parce que, ayant repoussé les invasions germaniques, il avait rendu à l’Empire romain sa sécurité première[35]. Un écrivain postérieur dit de même qu’il restitua aux provinces ruinées leur ancien aspect[36]. C’est bien ce qu’expriment les médailles, montrant la Gaule à genoux devant son restaurateur [37], représentant celui-ci sous les traits ou en compagnie du dieu à la fois romain et gaulois-Hercule, dompteur des monstres[38], célébrant le retour de Neptune, c’est-à-dire les victoires de la flotte romaine sur les pirates qui infestaient le cours du Rhin ou la mer du Nord[39], louant les soins donnés parle souverain à là santé des armées, en un temps où la peste ravageait l’Italie et l’Orient[40]. Pour la première fois depuis longtemps, Rome put reprendre l’offensive : Posthume pénétra chez les Germains, et construisit des forteresses sur leur territoire[41]. Le Rhin, faible obstacle aux invasions[42], redevenait une frontière : une médaille montre le grand fleuve appuyé sur son urne, couché dans ses roseaux, protégeant un navire et veillant majestueusement au salut des provinces[43]. Posthume put prendre sans mensonge le titre de Germanique[44], et passer fièrement avec ses légions sous les arcs de triomphe qui paraissent lui avoir été élevés en quelques points de la Gaule[45].

Tant de gloire ne désarmait pas Gallien. Ni le père en deuil, ni le souverain jaloux ne pardonneront jamais à Posthume. Pour le combattre, Gallien s’unit à un compétiteur beaucoup plus dangereux, dont il reconnut le pouvoir et se fit un allié. Après la chute de deux Césars éphémères, Ingenuus et Regalianus, un autre général, Aureolus, avait été proclamé Auguste par les légions du Danube, à une date qu’il est difficile de déterminer[46]. Digne de la pourpre, comme la plupart des généraux nommés par Valérien[47], Aureolus fut plus heureux que ses deux prédécesseurs. Gallien, ne pouvant pas le vaincre, conclut la paix avec cet inquiétant rival, qui dominait par la Rhétie le nord de l’Italie. La condition de la paix fut une alliance offensive contre Posthume. La guerre, portée en Gaule, se poursuivit avec des fortunes diverses. Posthume dut appeler à son aide ces Barbares d’outre-Rhin, auxquels il avait inspiré le respect de ses armes : on nomme des Francs parmi les auxiliaires enrôlés sous ses drapeaux[48]. Malgré leur secours, il eût peut-être succombé, si Aureolus avait profité des occasions. Mais laissé seul par Gallien, qui avait couru en toute hâte à Byzance châtier une révolte, puis à Rome[49] pour y célébrer avec une pompe extraordinaire les jeux décennaux, l’empereur illyrien combattit mollement son collègue des Gaules ; Aureolus eût craint de rendre, en abattant Posthume, Gallien trop puissant. Celui-ci, impatient, peut-être se défiant de son allié, passa de nouveau les Alpes. Les opérations devinrent plus actives : Posthume, acculé, s’enferma dans une place forte. Mais, en l’assiégeant, Gallien fut blessé : avec son ordinaire mobilité d’esprit, il abandonna l’entreprise commencée, et revint à Rome : Aureolus ne tarda pas à rentrer en Illyrie. Pendant cette guerre, Posthume, ne trouvant probablement dans son fils qu’un collègue nominal, fit Auguste le Gallo-Romain Victorinus, très populaire dans les camps et dont les qualités politiques et militaires eussent été, dit-on, de premier ordre si l’extrême licence de sa vie n’avait gâté tant d’heureux dons[50].

On peut attribuer à la jalousie excitée par ce choix la révolte où succomba Posthume. A peine sorti de la campagne laborieusement soutenue contre Gallien, il eut à combattre les légions de Mayence soulevées par Lollianus ou Lælianus[51], — peut-être l’ancien proconsul de Lycie, qui eut un rôle dans la persécution de Valérien[52]. Victorieux, Posthume entra dans Mayence. Se souvenant du lamentable sac de Cologne, il refusa le pillage à son armée. Les soldats mécontents se soulevèrent contre lui. Le vieil empereur et son fils périrent dans une sédition. Les Gaulois, toujours avides de révolutions[53], proclamèrent Lælianus. Celui-ci voulut aussitôt justifier son élévation : il porta la guerre sur le territoire germanique. A son retour, il fut défait par Victorinus : ses propres soldats l’égorgèrent. L’empire gaulois restera pendant quelques années encore le boulevard de la civilisation romaine contre les Barbares, mais l’ère des pronunciamientos est ouverte.

Une seule personne parvint à maintenir, au milieu de ces désordres, le prestige de l’autorité. Ce ne fut pas Victorinus, malgré sa valeur. Dans les époques de décadence, l’influence des souverains diminue avec leur vertu ; mais quelquefois une femme, demeurée plus pure ou plus fière, saisit les rênes échappées aux mains débiles des politiques, et les peuples, frappés de respect, se laissent conduire par elle. Les magnats de Hongrie voulaient mourir pour leur roi Marie-Thérèse ; les légions de Germanie décernèrent à la mère de Victorinus le titre de Mère des camps[54]. Les monétaires de Trèves frappèrent des pièces d’or, d’argent, de bronze à son effigie[55] : on possède des aurei de Victorinus où le portrait parfaitement individuel, de Victorina apparaît au revers, déguisé sous les attributs de Rome ou de la Victoire[56]. C’est elle qui fut le véritable empereur de ces temps troublés. Refusant la pourpre[57], elle en revêtit ses élus, et força les légions à s’incliner devant eux. Après l’assassinat de Victorinus, immolé avec son jeune fils à Cologne par des soldats révoltés, Victorina, imposant silence à sa douleur, fit accepter aux armées un officier de fortune, M. Aurelius Marius, ancien forgeron, que des actions d’éclat avaient illustré, le même probablement qui défit sous les murs d’Aix les hordes allemandes de Chrocus. Puis, Marius ayant été à son tour assassiné après un règne de quelques mois[58], Victorina fit accepter aux légions le sénateur Tetricus, depuis dix ans gouverneur d’Aquitaine[59]. Le choix était hardi. Donner un fonctionnaire étranger au métier des armes[60] pour empereur à des soldats qui, en quelques mois, venaient d’égorger successivement quatre généraux, c’était leur dire que l’anarchie militaire durait trop, et que si l’empire gaulois ne voulait pas périr, il devait rentrer au plus tût dans les voies d’un gouvernement régulier. L’élément civil reprenait la prépondérance : le centre politique des Gaules, qui depuis longtemps avait cessé d’être à Lyon, s’éloignait maintenant de Trèves pour se fixer à Bordeaux[61].

L’élévation de Tetricus précéda de peu de mois la mort de Gallien et la proclamation de son successeur Claude. Celui-ci, meilleur politique et plus vrai patriote, s’abstint d’intervenir dans les affaires intérieures de l’empire gaulois. La patience presque sympathique avec laquelle il souffrait en Orient la domination de Zénobie montre qu’il eût été capable de supporter aussi, à l’autre extrémité du monde romain, la souveraineté fondée par Posthume. Malheureusement l’anarchie continuait d’y régner. De plusieurs côtés les populations commençaient à tourner les yeux vers Rome. Les historiens ne donnent pas de renseignements sur le mouvement qui détacha peu à peu de la confédération occidentale l’est de l’Espagne ; mais on trouve des inscriptions en l’honneur de Claude à Barcelone[62], à Valence[63], à Saetabis (Jâtiva)[64], à Sagonte[65]. L’est de la Gaule remuait aussi : Lyon paraît être restée fidèle à l’empire gallo-romain[66], mais une autre grande ville du bassin du Rhône, Autun, venait de se révolter. Fidèle à la neutralité, Claude laissa Tetricus écraser après sept mois de siège la ville rebelle, qui ne cessait d’implorer son secours[67]. Il se contenta de former un corps d’observation dans la Narbonnaise, afin d’être prêt à tout événement.

La politique d’Aurélien fut tout autre. Le successeur de Claude avait cependant éprouvé la puissance des Barbares : on se souvient des prières solennelles qu’il implora du sénat, alors qu’il était près de Milan aux prises avec les Juthunges. Son premier acte de gouvernement montre l’impression profonde que cette invasion lui avait laissée. Depuis longtemps Rome était une ville ouverte : à demi ruinée, l’antique enceinte de Servius Tullius entourait seulement le centre de la cité, laissant en dehors de toute protection plusieurs des régions les plus riches et les plus peuplées, comme le Champ de Mars, le Pincio, une partie de l’Esquilin, le Janicule, et le quartier commerçant qui va des pentes de l’Aventin au Tibre[68]. Tant que l’Empire tint les Barbares à distance, la population n’avait point eu l’idée du péril. Mais aujourd’hui les peuples germaniques pénétraient jusqu’au cœur de l’Italie ; même sur cette terre privilégiée les légions n’étaient plus invincibles, et Rome, à peine remise de récentes frayeurs, se sentait à la merci d’un coup de main. Aurélien, de l’avis du sénat, commença la construction d’une enceinte fortifiée doublant à peu près le périmètre des murailles primitives[69], et donnant à la ville quinze kilomètres de remparts[70]. Rome pourra désormais respirer à l’aise, dans cette armure dont pendant tant de siècles elle avait su se passer ! L’Empire avouait ainsi sa décadence, et renouvelait cet aveu dans toutes les provinces exposées aux incursions des Barbares. La seconde moitié du troisième siècle voit beaucoup de villes, jadis ouvertes et confiantes, se hérisser de tours, s’envelopper de remparts, se resserrer entre des murs d’enceinte, aussi bien en Italie, en Mésie, en Asie Mineure que dans les diverses parties des Gaules. Détail qui montre la hâte avec laquelle sont faits ces travaux : dans les murailles de la fin du troisième siècle, plus fortes par leur masse que par le dessin stratégique de leurs contours, on retrouve encastrés des tronçons de colonnes, des fragments de corniches, des dalles tumulaires, des statues, des marbres ornés d’inscriptions[71]. Ce qui faisait la gloire et la splendeur de la cité d’autrefois sert à la défense de celle d’aujourd’hui. Une telle situation semblait de nature à donner au prince des conseils modérés. Mais Aurélien, grand homme de guerre, avait en politique des vues courtes, des idées étroites et obstinées. Il ne sut pas imiter la réserve gardée par Claude à l’égard des monarchies qui s’étaient élevées, comme des boulevards, à l’orient et à l’occident de l’Empire. Il ne comprit pas quelle force leur alliance eût donnée au souverain de Rome, obligé de renoncer aux conquêtes, et dont l’unique mission serait désormais de défendre la civilisation contre les Barbares. Aussi aveugle que Gallien, et malheureusement plus puissant que lui, Aurélien mit son orgueil à rétablir, coûte que coûte, une violente et précaire unité.

Il rencontra en Gaule la complicité la plus coupable et la plus inattendue. Tetricus avait montré du courage tant que vécut Victorina[72] : après la mort de la Mère des camps, son caractère indolent prit le dessus, et l’ancien sénateur, aspirant après la molle vie de Rome et les tranquilles discussions de la curie, trouva lourde la pourpre dont une main de femme l’avait revêtu. La turbulence des soldats et du peuple l’effraya. Déserteur de son devoir et de son rang, il invoqua secrètement l’appui d’Aurélien. Celui-ci franchit les Alpes, et rencontre près de Châlons l’armée gallo-romaine. Pendant le combat, Tetricus, échappant aux siens, passe avec son fils à l’ennemi. Privées de chef, les vaillantes légions qui depuis quatorze ans défendaient l’Occident contre toutes les attaques furent vaincues[73]. Après être resté quelque temps en Gaule et avoir reçu la soumission de l’Espagne et de la Bretagne, Aurélien revint à Rome avec Tetricus. Les Pères conscrits eurent l’humiliation de voir un ancien sénateur, un consulaire, suivre à pied, en habit gaulois, le char du triomphateur[74]. Ce fut son seul châtiment. Tetricus recouvra son rang et ses biens. Une mosaïque de sa maison du Cælius le représenta recevant des mains d’Aurélien les insignes sénatoriaux, et offrant en échange un sceptre et une couronne au destructeur de l’empire gaulois[75]. Un tel homme était né pour servir : aussi accepta-t-il avec joie l’administration d’une province italienne[76]. Mon collègue et mon camarade, lui dit familièrement Aurélien, il y a plus d’honneur à administrer une partie quelconque de l’Italie qu’à régner au delà des Alpes[77]. Cette parole peindra mieux que toutes nos réflexions l’aveuglement politique du vainqueur et l’abjection du vaincu.

 

 

 



[1] Vopiscus, Aurelianus, 8.

[2] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 2. — M. Mommsen, Römische Geschichte, t. V, p. 150, croit cette lettre inventée par Trebellius Pollion, ainsi que le titre de Transrhenani limitis dux et Gallix præses donné à Posthume et celui de tribunus Vocontiorum donné à son fils, d’après le même annaliste. Je ferai observer que Pollion, si pauvre historien qu’il soit, vivait moins d’un demi-siècle après les faits. Les érudits qui se sont occupés de l’histoire si peu connue de Posthume, tels que Bréquigny, Amédée Thierry, De Witte, Champagny, Duruy, E. Desjardins, acceptent son témoignage sur ces divers points.

[3] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 2.

[4] Id., Gallieni duo, 4.

[5] L’enchaînement vraisemblable des faits conduit à supposer que la captivité de Valérien fut l’occasion du soulèvement de la Gaule et de l’élection de Posthume. Cette hypothèse est confirmée par Trebellius Pollion, d’après lequel Posthume n’aurait eu que sept ans de règne (Triginta tyranni, 2). Mais Eutrope (Brev., IX), suivi par Orose (VII, 22), lui attribue dix ans de règne, et l’on possède des médailles commémorant sa dixième année de puissance tribunitienne (Eckhel, t. VII, p. 440). Celle-ci ne peut avoir dépassé 267, puisque non seulement Posthume, mais ses successeurs éphémères Lælianus, Victorinus, Diarius, périrent avant Gallien, mort lui-même en 268 : par conséquent, si l’on suit Eutrope, on doit faire remonter à 258 au plus tard le commencement du règne de Posthume. C’est l’opinion de la plupart des érudits modernes (cf. Héron de Villefosse, Revue archéologique, mai 1879, p. 263, 264). Je lui préfère cependant le chiffre donné par Trebellius Pollion, qui permet de faire coïncider l’élection de Posthume avec la captivité de Valérien, arrivée vers 259 ou 260. L’hypothèse est beaucoup plus vraisemblable. Le témoignage des médailles n’est pas décisif contre elle ; Tillemont suppose (Histoire des Empereurs, t. III, p. 702, 703, note II sur Gallien) que celles qui commémorent le neuvième et le dixième tribunat de Posthume peuvent avoir été forgées sur l’autorité d’Eutrope.

[6] Quod ejus non convenit moribus. Trebellius Pollion, Trig. tyr., 2.

[7] Imperium Galliarum. Tacite, Hist., IV, 54, 59.

[8] E. Desjardins, Géographie historique de la Gaule romaine, t. III, p. 259.

[9] Ibid., p. 403 ; cf. pl. V.

[10] Corpus inscriptionum latinarum, t. II, 4919, 4943 ; L. VII, 1150, 1152, 1160, 1161. — Ce fait résulte des textes et des inscriptions ; mais on a cru à tort en voir une preuve dans des médailles (De Witte, 30, 30a, 31) représentant des soldats jurant fidélité à Posthume, avec les légendes EXERCITVS VAC ou VAC (interprétée armée des Vaccéens, en Espagne), EXERCITVS VSC (interprétée armée d’Isca Siturum, aujourd’hui Caerleon on Usk, en Angleterre). Probablement ces inscriptions sont mal gravées, et signifient seulement EXERCITVS AVG, qui se lit sur la médaille toute semblable publiée dans De Witte, n° 32. Eckhel avait déjà, t. VII, p. 442, soupçonné une maladresse des monétaires.

[11] La cohors I Ætia Dacorum, qui gardait le douzième poste militaire du mur d’Hadrien, s’appelle à cette époque Posthumiana ; voir Corpus inscriptionum latinarum, t. VII, 820, 822 ; cf. 823.

[12] Cf. Mommsen, Römische Geschichte, t. V, p. 176, 177.

[13] Spartien, Hadrien, 12.

[14] Quatre cents cités importantes, et deux cent quatre-vingt-treize moindres. Pline, Nat. hist., III, 3, 4.

[15] Mommsen, Römische Geschichte, p. 68.

[16] Quatre-vingt-onze civitates au temps de Ptolémée, c’est-à-dire au milieu du second siècle : quatre-vingt-dix-neuf, en y joignant celles des trois petites provinces des Alpes. E. Desjardins, Géographie historique de la Gaule romaine, t. III, p. 365-367.

[17] Mommsen, Römische Geschichte, t. V, p. 91, 96. — Voir le recueil d’inscriptions gauloises en caractères latins et grecs, publiées par M. Héron de Villefosse dans le Bulletin monumental, 1878-1879, et l’énumération plus complète donnée par le même savant, Bulletin de la société des antiquaires de France, 1884, p. 189, 241-243. Voir encore une curieuse figurine de Vénus, en terre cuite, avec inscription gauloise, trouvée dans une tombe gallo-romaine de Caudebec ; Bull. de la commission départementale des antiquités de la Seine-Inférieure, 1886, p. 308-311.

[18] Ainsi, Andomatunum redevint Lingones, Augustoritum s’appela Lemovices, etc. Cf. Duruy, Histoire des Romains, t. V, p. 443 ; Desjardins, Géographie historique de la Gaule, t. III, p. 475, 476. La même réaction eut lieu pour les individus : sur un marbre funéraire de Bordeaux on voit le fils d’un père qui portait un nom romain reprendre un nom celtique ; Camille Jullian, Inscriptions romaines de Bordeaux, n° 2.

[19] La colonie de Lyon fut fondée dès l’an 43 avant notre ère ; mais sous Auguste seulement elle devint la métropole civile et religieuse des Gaules.

[20] Le revers offre la figure de la Monnaie personnifiée, avec la légende Col. Cl. Agrip., et la date du quatrième consulat de Posthume. F. Lenormant, La monnaie dans l’antiquité, t. II, p. 222 ; Ch. Robert, Dissémination et centralisation de la fabrication monétaire des Gaules, dans la Revue archéologique, décembre 1885, p. 331 ; Mowat, les Ateliers monétaires en Gaule, principalement de Posthume à Tetricus, dans Revue de numismatique, 1895.

[21] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 30.

[22] Cependant, on ne connaît pas de monnaies certaines de Posthume Jeune. Le fait a paru singulier à Eckhel (t. VII, p. 447) et aux érudits plus récents, qui ont mis en doute l’association de Posthume jeune à l’empire. Eckhel se demande même si Posthume eut vraiment un fils. C’est pousser loin le scepticisme. Deux médailles publiées par M. de Witte, n° 11 et 12, portent au revers trois tètes, une de l’ace au milieu, deux de profil de chaque côté : le savant numismate y reconnaît la femme de Posthume au milieu, son fils à droite, sa fille à gauche, p. 7 du texte descriptif. Il convient de remarquer, d’ailleurs, que plusieurs des pièces attribuées à Posthume père peuvent appartenir à Posthume fils ; c’est ainsi qu’il est impossible de distinguer entre les monnaies latines représentant Gordien I et Gordien II ; voir Ch. Robert, Nouvelles observations sur les noms des deux premiers Gordiens, dans la Revue archéologique, 1881, p. 40 ; cf. Cohen, Description historique des monnaies romaines depuis pompée jusqu’à la chute de l’Empire d’Occident, t. V, p. 60 et 75.

[23] Juvénal, Satires, XV, 111.

[24] Voir la lettre de Pierre Pithou au président de Thou, en tête de son édition des Déclamations de Quintilien, Paris, 1580, reproduite dans le Quintilien de Lemaire, t. V, p. XX et suiv.

[25] Ausone, Moselle, 400-401.

[26] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 3.

[27] Déclamations, VII, IX, XI, XIII, XIV, XV.

[28] Déclamations, XIII, Apes pauperis, 11.

[29] Ibid., 13.

[30] Ibid., 2.

[31] Déclamations, XIII, 13.

[32] Ibid.

[33] Voir ibid., 8, de belles paroles sur les esclaves.

[34] Déclamations, III, Pro milite.

[35] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 2.

[36] Orose, VII, 22. Le grand nombre des bornes milliaires au nom de Posthume et de ses deux successeurs indique l’ouverture ou la restauration de nombreuses voies. Voir Decombe, Esperandieu et Robiou, dans Ann. de la Société archéologique d’Ille-et-Vilaine, 1892 ; cf. Revue historique, mars-avril 1893, p. 322.

[37] RESTITVTORI GALLIARVM. De Witte, 256-261.

[38] Très souvent la tête de Posthume est, sur les médailles, accolée à celle d’Hercule. Sur d’autres pièces, tête de Posthume au droit, et d’Hercule au revers. Parmi les appellations données à ce dieu, HERCVLI ROMANO AVG. Ibid., 107-109.

[39] NEPTVNO COMITI. Ibid., 170. NEPTVNO REDVCI. Ibid., 171-173 b. — La classis germanica avait diverses stations sur le cours inférieur du Rhin ; les principales étaient Spire, Mayence, Andernach, Bonn, etc. L’arsenal était à Mayence. Voir Hermann Ferrero, L’ordinamento delle aimate romane (Turin, 1878), p. 181, et Iscrizioni e riserche nuove intorno all’ ordinamento delle armate Bell’ impero romano (Turin, 1884), p. 62.

[40] Image d’Esculape, avec la légende SALVS EXERCITI. De Witte, 283, 284.

[41] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 5. — A ces victoires en pays germains peuvent se rapporter les pièces avec l’inscription HERCVLI DEVSONIENSI et HERCVLI MAGVSAIO ; De Witte, 73-77, 90, 98, 99 ; voir le commentaire d’Eckhel, t. VII, p. 443 ; et Desjardins, Géographie historique de la Gaule, t. I, p. 398.

[42] Quantulum enim amnis obstabat, disait déjà Tacite, De mor. Germ., 28.

[43] Eckhel, t. VII, p. 445, et De Witte, 287-293.

[44] De Witte, 66, 331 et suiv. ; Corpus inscr. lat., t. II, 4919, 4943. — Posthume prit ce titre dès la première année de son règne, peut-être en souvenir des victoires remportées avant d’être empereur : une borne milliaire, trouvée près d’Auxerre, sur le bord de la voie qui va d’Autun à Troyes, donne à Posthume le nom de GER. MAX., et porte en tête les indications : TR. P. COS. II. Revue archéologique, mai 1879, p. 267.

[45] De Witte, 38, 39, 40, 41 ; sur le fronton, FELICITAS ou FELICITAS AVG.

[46] En 261, selon Trebellius Pollion, en 267, selon Zonare. Voir Tillemont, Histoire des Empereurs, t. III, p. 705, note VI.

[47] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 9.

[48] Id., Gall., 7.

[49] Ibid. — A cette rapidité de mouvements parait faire allusion une médaille de Gallien, représentant au revers Pégase ailé, avec la devise ALACRITATI. Eckhel, t. VII, p. 406 ; Cohen, Descript. des monnaies imp., Gallien, n, 738 ; Mowat, Mémoires de la Société des antiquaires de France, 1879, p. 170, 178.

[50] Une monnaie de Victorinus, portant l’indication de la légion IV Flavia, cantonnée ordinairement en Mésie, et dont le nom se lit aussi sur les monnaies de Gallien (Eckhel, t. VII, p. 402 et 451), a fait supposer à M. de Witte (Revue de Numismatique, 1861) et d’après lui à M. Duruy (Histoire des Romains, t. VI, p. 437) que Victorinus était un général de l’armée de Gallien, qui, embrassant avec une partie de ses troupes la cause de Posthume, fut pris par celui-ci pour collègue. Mais il est probable que la monnaie de Victorinus fait simplement allusion à des détachements de la légion qui y est nommée, amenés par Gallien en Gaule lors des expéditions qu’il conduisait en personne contre les Germains au commencement de son règne, et restés depuis lors dans ce pays. Cf. F. Lenormant, la Monnaie dans l’antiquité, t. II, p. 370-372.

[51] Lollianus, d’après Trebellius Pollion (Gall., 12 ; Trig. tyr., 4) ; Aurelius Victor (De Cæs., 38) ; Eutrope (Brev., IX). Les monnaies lui donnent toutes les noms de Cornelius Ulpius Lælianus ; Eckhel, t. VII, p. 449 ; De Witte, Recherches, pl. XXXI, 1.7, et Revue de Numismatique, 1861, p. 206-210.

[52] Certamen SS. Leonis et Paregorii, dans Ruinart, p. 611.

[53] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 2.

[54] Ibid., 30.

[55] Cæsi sunt ejus nummi ærei, aurei et argentei quorum hodieque forma exstat apud Treviros. Ibid.

[56] F. Lenormant, La monnaie dans l’antiquité, t. II, p. 381 ; De Witte, pl. XXX, 77, 78, 90, 91.

[57] Quum ipsa per se fugiens tanti ponderis molem. Trebellius Pollion, Trig. tyr., 30.

[58] Les historiens si défectueux de cette époque, Trebellius Pollion, Aurelius Victor, Eutrope, lui donnent trois ou même deux jours de règne. Cela est impossible, car de nombreuses monnaies furent frappées à son effigie ; M. de Witte en publie onze, pl. XXXI.

[59] Aurelius Victor, De Cæsaribus, 33, 14, dit que Tetricus était gouverneur d’Aquitaine ; Trebellius Pollion prétend que Tetricus avait gouverné toutes les Gaules, jure præsidiati omnes Gallias rexerat, ce qui est peu probable.

[60] Voir dans De Witte, pl. XXXII, 1, le grand médaillon d’or de Tetricus ; dans ses riches atours impériaux, le nouveau souverain a l’air d’un magistrat, nullement d’un militaire.

[61] Eutrope, Breviarium, IX, 10.

[62] Corpus inscriptionum latinarum, t. II, 3505.

[63] Ibid., 3737.

[64] Ibid., 3619.

[65] Ibid., 3834.

[66] Cf. Vopiscus, Proculus, 2.

[67] Eumène, Panég., 4. — Tetricus se considérait comme le collègue de Claude ; monnaie représentant au droit la tête de Tetricus, au revers celle de Claude ; De Witte, pl. XLIV, 3.

[68] Ainsi s’explique le mot de Zosime, I, 49, disant que Rome, avant Aurélien, n’avait pas de murailles.

[69] Un grand nombre de tombeaux se trouvèrent ainsi enfermés dans l’intérieur de la ville, contrairement aux anciennes lois : le caveau des Scipions, la pyramide sépulcrale de Caius Sextius, le mausolée d’Auguste, beaucoup de colombaires et d’humbles sépultures. Cf. Bullettino di archeologia cristiana, 1871, p. 76, 77.

[70] Quinquaginta prope millia (pedum). Vopiscus, Aurelianus, 39. Cf. Jordan, Topographie der Stadt Rom in Alterthum, t. I, p. 341 et suiv.

[71] Cf. Duruy, Histoire des Romains, t. VI, p. 387, 444 ; Perrot, De Galatia provincia romana, p. 165 ; la description de Bordeaux au quatrième siècle par C. Jullian, Ausone et son temps, dans Revue historique, janvier 1892, p. 6 (mais M. Jullian croit que la transformation des villes ouvertes de la Gaule en villes fermées date de l’an 300 ; voir Inscriptions romaines de Bordeaux, t. II, p. 298) ; le plan de Nantes (enceinte de l’an 300) dans Léon Maître, Géographie historique et descriptive de la Loire-Inférieure, t. I ; cf. Revue historique, mars 1895, p. 348.

[72] Monnaies portant Tetricus et posthume, Tetricus et Victorinus, pour affirmer l’unité et la perpétuité de l’empire des Gaules ; De Witte ; pl. XLIV, 1, 2.

[73] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 23 ; Vopiscus, Aurelianus, 32 ; Aurelius Victor, De Cæsaribus, 35 ; Eutrope, Brev., IX, 13 ; Eumène, Paneg. ad Const., 4 ; Orose, VII, 23.

[74] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 29 ; Vopiscus, Aurelianus, 34.

[75] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 24.

[76] Le même historien, ibid., 23, dit que Tetricus fut nommé par Aurélien correcteur de toute l’Italie. Aurelius Victor, De Cæsaribus, 35, lui attribue la correcture de la Lucanie seulement ; cf. Épitomé, 35, et Eutrope, Brev., IX, 13. Mommsen, Römische Staatsrecht, t. II, p. 1040, note 3, et Marquardt, Röm. Staatsverwaltung, t. I, 2e éd., p. 229, acceptent la version de Trebellius Pollion. M. Camille Jullian, les Transformations politiques de l’Italie sous les empereurs romains, p. 172, soutient au contraire celle d’Aurelius Victor, et admet avec Borghesi, Œuvres, t. V, p. 415, 416, et De Rossi, Bullettino di archeologia cristiana, 1874, p. 82, qu’Aurélien divisa l’Italie en plusieurs provinces. Tetricus put être appelé officiellement corrector totius Italiæ, regionis Lucaniæ, conformément à la formule que nous voyons en usage pour d’autres régions ; cf. Corpus inscriptiorum latinarum, t. VI, 1418, 1419. Trebellius Pollion aurait pris à la lettre la première moitié du titre, en négligeant la seconde.

[77] Sublimius habendum partem Italiæ regere quam trans Alpes regnare. Aurelius Victor, Épitomé, 35.