Les dernières persécutions du troisième siècle

CHAPITRE IV — LA CHUTE DE VALÉRIEN ET LE PREMIER ÉDIT DE TOLÉRANCE.

 

 

I. — La chute de Valérien.

La pensée de la justice divine soutenait les chrétiens au milieu de leurs souffrances. Ils sentaient que le colosse qui les opprimait avait des pieds d’argile, et que la pierre détachée de la montagne[1] l’abattrait tôt ou tard. Les persécuteurs tombaient déjà l’un après l’autre. La chute de Dèce avait été lamentable ; Gallus, pour avoir marché quelque temps dans les voies de Dèce, avait tristement fini ; et déjà Valérien penchait vers la ruine. De toutes parts se faisaient entendre les bruits avant-coureurs d’un désastre. On se rappelle qu’au moment de recevoir la mort, des martyrs d’Afrique avaient annoncé des invasions, des pestes, des famines, des tremblements de terre, une mystérieuse captivité[2]. C’était prédire les dernières années de Valérien. Le récit en appartient à l’histoire des persécutions, car, selon les lieux, ces calamités furent aux chrétiens une occasion d’héroïsme ou de défaillance, et la catastrophe qui les termina renferme une leçon terrible pour les persécuteurs de tous les temps.

Dans leur extase, les martyrs de Lambèse avaient cru voir des cavaliers blancs, portés par de blancs coursiers, dont on entendait le galop sonore et les sauvages hennissements[3]. Ces paroles font probablement allusion aux tribus Kabyles qui, vers 258 ou 259, ravagèrent la Numidie. Enveloppés comme aujourd’hui dans leurs burnous flottants, montés sur leurs petits chevaux sans bride, à l’épaisse crinière[4], les cavaliers blancs accouraient de la seconde chaîne de l’Atlas et des chotts salés de Tubon[5], ou descendaient tumultueusement des montagnes de Fer[6] : quatre cheiks les conduisaient[7], dont l’un, Farazen, était la terreur des Romains. La défaite de ce hardi partisan put seule mettre fin à l’invasion[8] ; la ferveur avec laquelle, dans ce même camp de Lambèse où avaient péri tant de martyrs, le légat Decianus remercia de la victoire Jupiter et tous les dieux[9] montre l’effroi qu’avait ressenti ce magistrat cruel en voyant si vite accomplie la prédiction de ses victimes.

Des invasions autrement redoutables dévastaient au même moment les rivages opposés de la Méditerranée, ici versant de nouveau le sang chrétien, ailleurs châtiant les villes où jadis il avait été répandu. Valérien était toujours dans l’Orient, qu’il ne devait plus quitter ; son fils Gallien, chargé de défendre l’Occident, venait de se porter du Rhin sur le Danube, quand le roi des Alemans Chrocus profita de son absence pour entrer en Gaule[10]. La haine de la civilisation, sentiment inné chez le Barbare[11], faisait de Chrocus l’ennemi de toute grandeur : il s’attaquait avec la même joie aux édifices du paganisme[12] et à la foi des chrétiens. On put juger de son fanatisme lorsque, passant avec ses troupes au pied du Puy de Dôme, il aperçut les sommets couronnés par les immenses constructions du temple de Mercure Dumias[13]. Bientôt, sur l’ordre du Germain, les épaisses murailles, les marbres, les mosaïques, la colossale statue du dieu, s’abîmèrent dans les flammes[14]. Descendues de la montagne, les hordes allemandes dévastèrent les environs de Clermont[15], anéantirent des industries florissantes[16], massacrèrent de nombreux habitants. Si saint Austremoine a été vraiment, comme le raconte Grégoire de Tours, envoyé dans ces contrées vers 250, une importante Église dev1 ait y exister vingt ans plus tard. On dit que des chrétiens furent massacrés, en haine de la foi, par les envahisseurs. Grégoire de Tours cite Victorin, ancien ministre inférieur du temple de Mercure Dumias, converti et martyrisé en même temps que Cassius, Antolianus, Liminius[17]. Des traditions, malheureusement confuses, indiquent d’autres martyrs. Si Privat, évêque de Mende, fut victime de l’invasion de Chrocus, et non d’une invasion plus récente, sa mort donna dès lors aux populations épouvantées une belle leçon de patriotisme et de foi[18]. On raconte que, surpris par les Barbares en dehors du camp retranché où s’étaient enfuis les habitants, il refusa d’abord de trahir ses concitoyens, puis, sommé de sacrifier aux sauvages divinités du Nord, il opposa aux exigences des vainqueurs un second refus : battu de verges, il mourut, au bout de quelques jours, des suites de ces violences[19].

Cependant la tempête qui s’était abattue sur la Gaule touchait à sa fin. Chrocus et ses bandes, attirés comme tous les Barbares du Nord par les pays du soleil, se mirent en marche vers l’Italie : une armée romaine les détruisit sous les murs d’Ail[20]. Un autre orage fondit alors sur une contrée voisine, jusque-là protégée par son éloignement du monde germanique : des Francs envahirent l’Espagne, saccagèrent Tarragone, où venaient de périr pour le Christ Fructueux, Augure et Euloge, ruinèrent un grand nombre de villes, parcoururent pendant douze années la Péninsule épouvantée, puis, s’emparant de vaisseaux romains, passèrent en Afrique, où l’histoire les perd de vue[21]. Tel était l’empire, à cette heure tragique. On dirait une terre vide. Les peuples le traversaient comme une caravane traverse un désert. Cependant toute résistance n’avait pas cessé dans les provinces occidentales ; Gallien[22] et surtout Aurélien[23], l’un de ses meilleurs capitaines, remportaient encore des victoires en Italie et en Illyrie ; le sénat, retrouvant un élan de patriotisme, prescrivait une levée en masse[24]. Dans l’Orient, le spectacle est plus triste les Barbares font autant de ruines, mais les peuples, ne se sentant pas défendus, s’abandonnent aux envahisseurs. Valérien assiste, inerte et morne, à l’écroulement de sa fortune.

Les Borans de l’Euxin et les Goths du Danube envahirent successivement le nord de l’Asie romaine, et le dévastèrent tout entier, entrant sans coup férir dans les places fortes,pillant le Pont, la Cappadoce et la Bithynie[25]. L’invasion des Alemans en Gaule avait ajouté un chapitre glorieux à l’histoire des martyrs : les incursions des Goths et des Borans nous font, hélas ! assister à une défaillance des chrétiens. La révélation inattendue de la force des Barbares et de l’impuissance de l’empire avait frappé de stupeur les populations du littoral asiatique, jusque-là si riche et si bien gardé. Parmi les maisons pillées, les temples incendiés, à la vue des garnisons romaines en fuite, elles s’étaient prises à douter d’un régime qui laissait voir tout à coup son irrémédiable fragilité. Puisque le lendemain n’est pas fissuré, pourquoi ne pas jouir du jour présent ? puisque la civilisation ne peut plus défendre les siens, pourquoi ne pas se mettre avec les ennemis de la civilisation ? Des bandes de pillards se formèrent dans le Pont : les uns se joignaient aux Barbares, d’autres glanaient où les envahisseurs avaient moissonné. Parmi ces transfuges se trouvèrent des chrétiens, dont la foi imparfaite n’avait pas résisté au désordre social produit par l’invasion[26]. L’apôtre du Pont, Grégoire le Thaumaturge, fut averti. Un cri d’indignation s’échappa de son âme. C’est en évêque, mais c’est aussi en Romain qu’il frappe des peines canoniques les déserteurs de la religion et,du patriotisme, ceux qui, en ces jours de deuil et de larmes, se sont réjouis dans l’espoir de gagner quelque chose à la ruine commune,... ceux qui, profitant du trouble, ont ravi le bien d’autrui, envahi et pillé les maisons, et se sont conduits à l’égard de leurs frères comme des Goths ou des Borans,... ceux qui ont poussé l’inhumanité Jusqu’à retenir en esclavage des captifs échappés à l’ennemi,... ceux qui, oubliant qu’ils sont citoyens du Pont et chrétiens, se sont enrôlés parmi les Barbares, et ont trempé les mains dans le sang de leurs compatriotes[27].

Des traits d’une autre nature consolent l’historien attristé de ces trahisons. Au milieu du troisième siècle, la guerre fut un des moyens dont se servit la Providence pour répandre la foi parmi les Barbares[28]. Sur leurs vaisseaux chargés des richesses de la Bithynie, les Goths, sans le savoir, rapportaient l’Évangile. Il y avait des chrétiens et des prêtres parmi les captifs qui ramaient à leur bord. Les conquérants, qui dans une autre occasion s’étaient montrés sensibles aux vertus des fidèles[29], paraissent cette fois encore les avoir traités avec douceur. Les prisonniers prêchèrent hardiment le Christ. En les voyant soigner les malades, en assistant aux miracles obtenus du ciel par une ardente charité, beaucoup parmi les vainqueurs sentirent leur âme s’ouvrir à de nouvelles. croyances. Des Goths s’agenouillèrent aux pieds de leurs captifs et reçurent d’eux le baptême. Une petite Église, promptement florissante, se forma entre le Danube et le Dniester[30].

La retraite des Goths avait été causée par un mouvement de Valérien, qui d’Antioche s’était porté vers la Cappadoce[31]. Victorieux sans avoir combattu, l’empereur revint en Syrie, conduisant une armée débandée, dont le passage fit presque autant de mal que les Barbares[32]. De telles troupes n’étaient point préparées à soutenir le choc du terrible ennemi qui, à cette heure même, accourait du fond de l’Orient. Sapor, héritier des desseins de son père Artaxerxés, voulait faire rentrer sous la domination des Sassanides tous les pays jadis possédés par Cyrus, et, pendant le règne de huit empereurs, n’avait cessé de menacer l’Asie romaine[33]. Depuis plusieurs années maître de l’Arménie[34], où il avait porté la guerre sainte et rétabli le culte du Feu, le roi des rois[35], à qui la possession de ces hauts plateaux montagneux donnait la clef des contrées environnantes, s’avançait maintenant en Mésopotamie. Les vastes plaines qui s’étendent de l’Euphrate aux premiers contreforts de l’Arménie furent toujours le champ clos où se heurtèrent la Perse et l’empire. Nisibe, Carrhes, tant de fois prises et reprises, tombèrent aux mains de Sapor[36]. Valérien se porta au-devant de lui, avec des soldats fatigués d’avoir deux fois traversé la Cappadoce. La peste, qui n’avait pas cessé depuis plusieurs années, prenait à ce moment une terrible intensité : à Rome, en Achaïe, des milliers de personnes mouraient en un seul jour[37]. Le fléau fit des ravages dans le camp impérial. L’épuisement causé par la maladie ne demeura probablement pas étranger à la catastrophe qui survint. Quelles en furent les causes immédiates ? Les historiens rapportent des versions différentes : elles se complètent plus qu’elles ne se contredisent, et peuvent être aisément conciliées. Trebellius Pollion assure qu’un général, chargé par Valérien du commandement, se laissa volontairement vaincre, chose facile avec des troupes sans vigueur et sans discipline[38]. Saint Denys d’Alexandrie nomme le traître : c’est le mauvais génie de Valérien, l’ennemi des chrétiens, l’instigateur de la persécution, Macrien, devenu, par une juste dispensation de la Providence, l’auteur de la chute après avoir été celui du crime[39]. A la suite de la défaite, l’empereur essaya de traiter. Sapor exigea une entrevue. Un bas-relief de Persépolis montre le souverain de Rome à demi prosterné, tendant vers le Barbare des mains suppliantes : Sapor, à cheval, la tiare en tête, la main sur la garde de son épée, écoute, superbe[40]. L’empereur était venu peu accompagné : on le saisit, au mépris de la foi jurée[41]. Alors commença pour le persécuteur la plus humiliante captivité[42], pendant laquelle il dut bien des fois envier le sort de Dèce, qui, châtié comme lui, avait eu du moins la consolation de mourir en soldat.

Sapor, suivi de son prisonnier qui lui servait, dit-on, de marchepied pour monter à cheval, entra en Syrie : un traître, Cyriadès[43], guidait son armée vers Antioche. Ville de luxe et de plaisir, Antioche n’avait pas suspendu ses fêtes accoutumées. On raconte que le peuple était assemblé au théâtre, regardant ces fameux mimes syriens auxquels Rome dut tant de corruption[44], quand une femme, qui jouait dans la pièce ; leva tout à coup les yeux et s’écria : Je rêve, ou voici les Perses ![45] L’ennemi avait en silence gravi le Silpius, et couronnait l’enceinte qui court sur ses crêtes. Bientôt les flèches persanes volèrent dans le théâtre[46], et une ville de cinq cent mille âmes, merveilleusement fortifiée, tomba aux mains des Barbares sans avoir été défendue. En présence dé Valérien prosterné, Sapor donna la pourpre au traître Cyriadès[47], et contraignit la garnison à prêter serment à ce fantôme de souverain[48]. Les historiens romains n’ont pas osé raconter une telle scène, et les écrivains chrétiens eux-mêmes la taisent : seuls les bas-reliefs de la Perse en ont gardé le souvenir[49].

Après avoir ravagé le nord de la Syrie, Sapor franchit les défilés de l’Amanus, prit Tarse, et s’empara de Césarée, dont les habitants, emmenés en captivité, furent rachetés par les aumônes qu’envoya de Rome le pape Denys[50]. Les Perses, dit Zosime, se seraient facilement rendus maîtres de l’Asie romaine, s’ils n’avaient été pressés d’aller jouir chez eux de leur victoire et d’y porter leur butin[51]. Quand la Cappadoce et la Lycaonie eurent été dépouillées, le roi sassanide reprit la route de Ctésiphon. D’innombrables chariots remplis de butin, de longues files de prisonniers l’accompagnaient : ces malheureux obtenaient à peine de quoi manger, et, une fois par jour, étaient conduits en troupeau à l’abreuvoir[52]. Parmi eux marchait un empereur. La monde asservi par Rome prenait pour la première fois sa revanche de tant d’insolents triomphes, de tant de rois suivant le char impérial dans les rues de la ville éternelle, et menés aux gémonies pendant que le triomphateur montait au Capitole. Les chefs de l’Église avaient le cœur trop haut pour se réjouir d’un deuil national ; mais ils ne pouvaient méconnaître l’arrêt de la justice divine. Pour avoir obéi aux conseils de Macrien et persécuté les justes, écrit saint Denys d’Alexandrie, Valérien fut livré aux outrages et aux opprobres, selon la parole du Seigneur à Isaïe : Ils ont choisi leurs voies, ils ont accompli les abominations résolues dans leur cœur. Et moi je ferai d’eux un jouet, et je punirai ainsi leurs crimes[53]. Soixante ans plus tard, un empereur, jetant ses regards en arrière, s’écriera dans une assemblée d’évêques : Ô Valérien, qui ne fus pas moins cruel que Dèce pour les serviteurs de Dieu, tu as manifesté aux yeux de tous sa juste vengeance, lorsque tu suivais ton vainqueur avec des chaînes sur ta pourpre et tes ornements impériaux, ou lorsque par ordre de Sapor on t’écorchait pour faire de ta peau l’éternel trophée de ton infortune ![54] Telle fut la fin de Valérien : il traîna pendant plusieurs années chez les Perses une vie sans honneur et sans espoir : après sa mort, sa peau, tannée, teinte en rouge, fut suspendue dans un temple, hideux trophée que l’on voyait encore au quatrième siècle[55].

 

II. — L’édit de Gallien.

La leçon ne fut pas perdue pour Gallien. A peine sur le trône[56], il fit cesser la persécution, et, avec plus de hardiesse qu’aucun de ses prédécesseurs, assura aux chrétiens un régime de tolérance légale qui eût pu devenir la paix définitive à laquelle aspirait l’Église. La docilit6 de Gallien â de bons conseils, mais la faiblesse et l’inconséquence de sa conduite, expliqueront ce que cet acte eut d’excellent et les causes qui l’ont empêché de donner tous ses fruits.

Depuis un demi-siècle les femmes étaient toutes-puissantes au Palatin. Vertueuses ou dépravées, elles dirigeaient de leur salon le mouvement des esprits. L’épouse de Gallien, gardant je ne sais quoi de discret et de contenu où se reconnaît la Romaine de race, semble de la famille intellectuelle des princesses syriennes qui jouèrent un si grand rôle sous les Sévères. Comme Julia Domna, son charme sérieux attire et retient près d’elle les philosophes[57] ; plus même que Mammée[58], elle sentira un jour la beauté du christianisme. C’est d’abord vers la philosophie qu’elle se tourna. Conservant sur l’esprit de son infidèle époux un pouvoir depuis longtemps perdu sur son cœur[59], Salonine lui avait fait naguère accueillir Plotin, l’auteur des Ennéades, qui, grâce à elle, fut sur le point de fonder en Campanie la ville de philosophes rêvée par Platon[60]. La pensée de se retirer du monde, pour vivre sans devoirs publics ni intérêts privés, était bien conforme aux tendances découragées d’un siècle qui marchait à sa fin, pliant sous les calamités de toute sorte. On en a fait un grief aux chrétiens : c’est aux philosophes que convient ce reproche. Le préteur Rogatianus, disciple de Plotin, néglige par amour de la philosophie l’administration de son bien, ne veut plus ni maison ni esclaves, refuse de se rendre au sénat et de remplir sa charge[61]. Éloignons-nous du forum et de l’existence commune, écrit Porphyre[62]. Ce second fondateur du néoplatonisme vint à Rome retrouver Plotin. Le commerce de tels hommes, l’attrait de leurs doctrines, qui s’accordaient aux sentiments de son âme fière et blessée, suffirent pendant quelque temps à consoler Salonine ; et peu à, peu l’acheminèrent à des vérités plus hautes. Plotin avait étudié onze ans près du chrétien Ammonius Saccas, dont l’enseignement lui avait laissé une empreinte ineffaçable[63]. Porphyre écrira plus tard quinze livres contre les chrétiens, qui seront comme le prélude de la persécution de Dioclétien ; mais en ce moment il songe plutôt à les imiter, et à transformer les sensuelles légendes du paganisme en un mysticisme pur, raisonnable et pieux. Tous deus s’arrêtèrent au seuil de la pleine lumière beaucoup de leurs disciples, curieux aussi des dogmes évangéliques[64], passèrent outre, et sortirent chrétiens de leur école[65]. Telle fut, semble-t-il, la marche suivie par Salonine : elle traversa la philosophie pour arriver à l’Évangile, dès le règne de Valérien. Sa conversion, ignorée du public, mais indiquée sur quelques médailles par un signe discret[66], ne put rester inconnue de Gallien. A peine devenu maître de l’empire, il voulut donner satisfaction à une femme dont les vertus honoraient le trône. L’émotion causée par la fin tragique de Valérien lui fit prêter une oreille favorable aux conseils ou aux prières de l’impératrice[67]. Naguère il avait été sur le point de livrer une ville campanienne aux expériences sociales d’un groupe de philosophes : il consent aujourd’hui à donner droit de cité aux amis chrétiens de Salonine, à une société qui n’a pas d’expériences à faire et qui compte déjà deux siècles de durée.

Telle est, croyons-nous, l’influence à laquelle obéit Gallien. Probablement il ne lui résista pas beaucoup, car aucun document ne l’avait montré prenant une part personnelle aux violences de son père contre les chrétiens. Le texte des lois de pacification ne nous est point parvenu ; mais Eusèbe, qui lut les pièces originales, en a conservé la substance[68]. L’empereur ordonnait de cesser la persécution et de restituer les biens ecclésiastiques. Il effaçait ainsi toute trace de la guerre déclarée par Valérien aux associations chrétiennes, et reconnaissait à l’Église les droits sans lesquels une société religieuse ne peut subsister, celui de prier librement, celui de posséder les biens nécessaires au culte, à la sépulture et aux aumônes[69]. Plusieurs constitutions furent publiées dans ce but. D’abord un édit général rendit en ternies exprès la liberté de leur ministère aux chefs des Églises et à tous les membres du clergé[70]. Puis des rescrits réglèrent les détails d’exécution de l’édit. Ces rescrits paraissent avoir été de deux sortes. Les uns furent adressés collectivement aux évêques de chaque province, pour les remettre en possession des lieux religieux, c’est-à-dire des édifices consacrés aux assemblées chrétiennes, que le fisc avait saisis et peut-être vendus[71]. D’autres rescrits furent envoyés à quelques prélats, pour leur rendre l’usage des cimetières[72] ; ceux-ci avaient été seulement occupés, et probablement ne l’avaient pas été partout : la persécution cessant, ils retournaient de plein droit au corps des fidèles et au collège des frères[73].

Bien que les documents ne le disent pas, l’édit fit probablement d’autres restitutions. La persécution n’avait pas seulement amené la confiscation ou le séquestre des biens ecclésiastiques ; on se rappelle que les propriétés d’un grand nombre de chrétiens avaient été dévolues au fisc. C’était l’application du droit commun, qui prononçait la confiscation des biens appartenant aux proscrits ou à ceux qui encouraient une sentence capitale[74]. Le second édit de Valérien aggrava la mesure, en ce qui concernait les chrétiens de distinction et les Césariens : pour eux, la confiscation fut de plein droit, par voie administrative, avant même le procès et la sentence. A l’égard des fidèles qui ne rentraient pas dans ces catégories, la règle générale restait en vigueur, et la peine capitale entraînait la confiscation des biens. Il est probable que l’édit de Gallien, qui rétablissait l’Église dans ses droits de propriétaire, y rétablit également les chrétiens, au moins pour les biens que le fisc n’avait pas aliénés. Un trait de la vie de saint Félix, mort, croyons-nous, sous Gallien[75], parait l’indiquer. Quand la paix eut fait rentrer l’épée au fourreau[76], Félix revint à Nole. Jadis propriétaire de grands domaines, de terres, de maisons, il avait tout perdu en confessant la foi. La paix restaurée lui permettait de revendiquer ses possessions héréditaires[77] ; mais il ne voulut pas demander à la justice ce que la confiscation lui avait ravi[78]. Beaucoup l’y engageaient, entre autres la riche et pieuse veuve Archelaïs : elle le pressait de faire valoir ses droits[79], afin, de recouvrer des richesses qu’il pourrait distribuer en aumônes. Mais lui, souriant de cette sollicitude, se contentait des biens célestes. Il se fit colon, et, sans serviteur, vécut en cultivant de ses mains trois arpents qu’il avait loués. Ce pauvre volontaire, qui trouvait encore moyen de secourir les indigents, termina ainsi sa vie, ou plutôt échangea une vie mortelle contre une éternité bienheureuse[80]. Les sollicitations repoussées par saint Félix montrent qu’il eût pu rentrer dans son patrimoine, si un désintéressement sublime ne l’avait empêché de faire valoir ses droits. L’édit accordait donc aux confesseurs des moyens légaux d’are indemnisés de la confiscation[81]. C’était une conséquence de l’amnistie[82].

Les bienfaits de l’édit se firent promptement sentir à Rome. Le siège de saint Pierre était resté vacant pendant une année après le martyre de saint Sixte. On se rappelle que six diacres avaient été immolés en même temps que celui-ci, et que le premier diacre, Laurent, avait suivi au bout de trois jours son chef et ses frères. Du mois d’août 258 au mois de juillet 259, la persécution trop violente empêcha de donner un successeur à saint Sixte. La même situation s’était présentée sous Dèce après le martyre de saint Fabien, et l’on avait vu les prêtres et les diacres administrer l’Église de Rome pendant un intérim de dix-huit mois[83]. Mais entre la mort de Sixte et la nomination de son successeur ce furent les prêtres seuls qui prirent le gouvernement[84] : tous les diacres avaient péri ! Aussi, contrairement à l’usage d’élever le premier diacre au rang suprême, le prêtre Denys[85] fut-il élu quand le ralentissement de la persécution permit de remplacer le glorieux pontife qui avait teint de son sangla chaire épiscopale. Quelques mois s’écoulèrent entre cette élection et l’édit de pacification promulgué par Gallien[86]. Denys se hâta de profiter de la loi nouvelle, et eut la joie de recouvrer tout le patrimoine de l’Église romaine. Il donna, dit son biographe, des églises aux prêtres, et constitua les cimetières[87]. Ces paroles font clairement allusion au rétablissement des deux ordres de propriétés ecclésiastiques restitués par des rescrits successifs de Gallien, et montrent le Pape confiant d’abord à des prêtres les édifices religieux rendus à l’Église, puis réglementant de nouveau l’administration des cimetières après que le séquestre, qui durait depuis trois ans, eut été levé.

Signé par un meilleur souverain, l’édit qui s’exécutait si facilement à Rome et en Italie eût pu avoir l’effet qu’aura plus tard l’édit de Milan. Riais le caractère indolent et la mauvaise politique de Gallien lui ôtaient les moyens d’imposer sa volonté. Soldat courageux et même bon capitaine sur les champs de bataille, il n’est plus dans l’intervalle des guerres qu’un enfant cruel et vicieux. Hors de Rome, il sait combattre ; quand il se retrouve au milieu des délices de Rome, toute autre chose le laisse indifférent. Amusons-nous, disait-il, pendant qu’il perdait l’empire du monde[88]. Il ne retrouve l’énergie qu’à contresens, pour lutter contre les événements d’où sortirait le salut, détourner pour longtemps la politique romaine de sa direction naturelle, et s’user en de vains efforts.

Les faits, cette voix confuse de la Providence dont il faut savoir discerner le sens, parlaient cependant plus clairement que jamais. Les Barbares pressaient l’Empire de tous côtés, et les peuples, qui ont parfois l’intuition des vérités méconnues par les politiques, comprenaient qu’à tant d’ennemis il fallait plusieurs adversaires : un seul prince, fût-il aussi énergique et vigilant que Gallien était oublieux et mou, ne pouvait de Rome se porter sur tant de points menacés. Aussi voyons-nous la monarchie impériale se fractionner d’elle-même : une puissante confédération se forme à l’Occident sous Posthume, à l’Orient sous Odenath et Zénobie, et çà et là en Illyrie, en Pannonie, en Afrique, en Asie Mineure surgissent d’éphémères royautés, indices des courants nouveaux qui entraînent les peuples. Sans doute le bon sens ne permettait pas de diviser à l’infini l’unité romaine ; mais, après avoir facilement écrasé quelques aventuriers, Gallien pouvait assurer la frontière du Rhin en reconnaissant l’empire des Gaules, réunir sous une main ferme les provinces asiatiques en s’alliant avec l’empire naissant de Palmyre, et faire dès lors la monarchie tripartite que Dioclétien fondera vingt ans plus tard. Gallien aima mieux repousser toutes les avances, et fatiguer les légions à des luttes fratricides. 11 ne sut pas être, en politique, un Dioclétien ; c’est pour cela qu’il n’eut pas l’autorité nécessaire pour devenir, en matière religieuse, un Constantin.

Si, au lieu d’un prince impuissant[89] et jaloux, l’édit de pacification avait eu pour auteur un clairvoyant politique, appuyé sur un collègue en Occident, un autre en Orient, et capable d’imposer à tous l’obéissance, le résultat eût pu être différent, la paix religieuse avancée d’un demi-siècle, des flots de sang épargnés au monde. Mais l’homme manqua aux circonstances et le pouvoir à la volonté. L’Église reprit possession de ses biens là où Gallien restait le maître ; l’édit s’exécuta même dans des provinces qui s’étaient déclarées indépendantes, mais dont les chefs aspiraient à entretenir de bons rapports avec le souverain de Rome ; ailleurs son autorité fut rejetée et la persécution continua.

 

III. — Les chrétiens sous les trente tyrans.

On a donné le nom des trente tyrans aux usurpateurs qui s’élevèrent sous Gallien : en réalité, ils ne furent ni trente ni tyrans. Ce mot ne saurait convenir au vaillant général que choisirent les armées de Germanie et les cités gauloises en apprenant la captivité de Valérien[90]. La nécessité de défendre l’Occident contre les Barbares les porta seule à. transformer en Auguste le chef qui depuis plusieurs années administrait avec une autorité presque souveraine les vastes contrées bornées à l’est par le Rhin et les Alpes. Mais rien ne fut changé à la forme du gouvernement. Les pères conscrits rassemblés près de Posthume à Trèves ne différèrent ni par les insignes, ni par les traditions et le langage de ceux qui entouraient Gallien à Rome[91]. Des monnaies portant au droit l’effigie de Posthume gardèrent au revers le type de Rome éternelle[92]. Il y eut un empereur romain en Gaule, non un empereur gaulois. Ainsi s’explique comment les provinces les plus attachées à Rome, comme la Bretagne et l’Espagne, se rangèrent sans hésiter sous le sceptre du nouvel Auguste[93].

Ni sous Posthume, ni sous son meurtrier Lollianus, ni sous Victorinus, Marius, Tetricus, qui régnèrent pendant que gouvernait la fière et courageuse Victorina[94], les chrétiens ne furent inquiétés. Aussi longtemps que dura l’empire gallo-romain, c’est-à-dire de Gallien à Aurélien, aucun fait de persécution n’est rapporté pour la Gaule, la Bretagne ou l’Espagne. Les empereurs qui se succédèrent dans ces contrées avaient assez de défendre le Rhin contre les Germains, les Alpes contre Gallien ; pas plus que leurs peuples ils ne montrèrent une dévotion exclusive et jalouse pour le culte officiel. En Gaule particulièrement, les vieilles religions indigènes subsistaient de concurrence avec lui, et s’y laissaient malaisément absorber. Les campagnes gardaient la prépondérance ; la langue, les croyances, mille dévotions, populaires se maintenaient, attestées par le grand nombre des divinités topiques[95] : en bien des lieux on consultait encore les druides et l’on parlait celte[96]. Même dans les sanctuaires des villes, d’étranges figures mêlaient souvent leurs formes monstrueuses aux lignes élégantes des dieux enfantés par l’art de la Grèce et de Rome[97]. De là quelque tiédeur pour ceux-ci, et, hormis dans les grandes cités, peu de haine contre les réfractaires. Ne peut-on croire que les chrétiens furent aussi protégés par le souvenir de l’énergie et du dévouement qu’ils avaient montrés pendant l’invasion de Chrocus ? A défaut même de l’équité ou de la reconnaissance, la politique eût obligé à les bien traiter, car les empereurs des Gaules cherchèrent toujours à se faire accepter de Gallien pour collègues, et, dans cette pensée, étendirent probablement son édit à tous les pays de leur domination[98].

La même tolérance exista sans nul doute dans les provinces danubiennes, où, après la chute de deux tyrans éphémères, un ancien général de Valérien, l’ambitieux Aureolus, avait pris la pourpre. Gallien, renonçant à le vaincre, reconnut cet inquiétant rival, qui menaçait par les Alpes Rhétiennes le nord de l’Italie : l’alliance d’Aureolus contre les princes gaulois fut le prix de cet accord[99]. L’allié temporaire de Gallien dut, au moins jusqu’au jour où A se révoltera de nouveau, garder aussi la paix religieuse.

Pendant que les Églises jouissaient du repos en Italie et en Afrique, où régnait Gallien, dans les provinces d’Aureolus et dans les États gouvernés par Posthume ou ses successeurs, la persécution durait en Orient. Tout entier à sa lutte impolitique contre l’empire gaulois, Gallien ne s’occupait guère de ces lointaines contrées. De braves gens, cependant, combattaient pour lui, et avaient été sur le point de changer en désastre la retraite des Perses. Le fantôme d’empereur installé par eut à Antioche fut brûlé vif[100] ; le préfet du prétoire, Balliste, battit leurs troupes alourdies par le butin et les prisonniers, et s’empara même du harem de Sapor[101] ; Odenath, prince de Palmyre, les poursuivit jusqu’à Ctésiphon[102]. Ce guerrier demi-barbare, qui joignait à la chevaleresque fierté de l’Arabe un respect superstitieux pour la civilisation romaine, s’était fait le champion de Valérien captif : on ne sait quel aurait été le résultat de son initiative hardie, si la nouvelle de l’usurpation de Macrien ne l’avait rappelé. Celui-ci, après une feinte résistance[103], venait de recevoir de l’armée d’Asie l’autorité suprême, ou plutôt de donner la pourpre à ses deux fils Macrien le jeune et Quietus, se réservant de gouverner sous leur nom[104].

L’insatiable et cruel Macrien au pouvoir, c’était la guerre civile et la persécution. Quand saint Denys, se fiant à l’édit de Gallien, rentra de son exil de Colluthion, il trouva Alexandrie en armes, l’immense Corso bordé de portiques[105] changé en une vaste solitude, les bassins et les canaux remplis de sang[106], la population diminuée de moitié[107] : là c’est le désert, ici c’est la mer Rouge[108], écrit l’évêque, qui ajoute : Aller d’Orient en Occident est plus facile que de passer d’un quartier d’Alexandrie à un autre[109]. Aux approches de Pâques (261) il ne put communiquer avec les fidèles que par écrit[110]. Pendant que les partisans et les adversaires de Macrien se battaient en Égypte, la persécution de Valérien continuait dans les provinces soumises à la domination de son ancien conseiller. On ne s’apercevait pas en Asie que la paix venait d’être partout ailleurs rendue aux Églises. L’armée elle-même était inquiétée. La situation qui lui était faite se montre par le trait suivant, que nous a conservé Eusèbe[111].

Un officier chrétien, appartenant probablement à l’une des quatre légions de Syrie[112], se trouvait à Césarée de Palestine. Il s’appelait Marinus, et avait rang d’optio ou sous-centurion. Une place de centurion devenant vacante dans la légion, son rang le désigna pour l’obtenir[113]. Mais un rival le dénonça, disant que le cep de vigne ne pouvait appartenir à un homme qui adorait le Christ et ne sacrifiait pas aux empereurs. Traduit devant un juge (militaire ou civil ?) nommé Achée, Marinus s’avoua chrétien. Le magistrat lui donna trois heures pour prendre parti. Comme il sortait du prétoire, l’évêque de Césarée, Theotecne, vint à sa rencontre. Le prenant par la, main, l’évêque, tout en causant, le conduisit à l’église[114]. Arrivés devant l’autel[115], Theotecne souleva légèrement la chlamyde du soldat, et lui montrant d’une main l’épée suspendue à son côté, de l’autre l’Évangile[116] : Entre les deux, choisis, dit-il. Sans hésiter, Marinus saisit le livre sacré. Attache-toi donc à Dieu, continua l’évêque, et, fortifié par sa grâce, obtiens ce que tu as choisi. Va en paix. Comme le soldat sortait de l’église, il trouva le héraut qui l’appelait[117]. Les trois heures étaient passées. Marinus, ramené devant le tribunal, confessa de nouveau sa foi, d’un accent plus ferme et plus vif[118]. Conduit sans délai au supplice, il mourut intrépidement[119]. Mais, comme toujours, sa mort, loin d’abattre les chrétiens, excita leur courage. Au moment où il venait d’expirer, un homme, le visage fier, sortit de la foule. C’était un sénateur romain, décoré du titre d’ami des empereurs[120], et appartenant probablement à la grande famille des Asterii[121] : selon toute apparence, on doit reconnaître en lui le clarissime Asterius dont parlent les Actes des saintes Seconde et Rufine, immolées sous Valérien. Les assistants s’écartèrent respectueusement sur son passage, car il était célèbre non seulement par sa noblesse, mais encore par ses vertus et ses miracles[122] : redoutable aux puissances infernales, il avait un jour fait cesser d’étranges prestiges, qui s’accomplissaient dans le petit lac de Panéas, au-dessous des sources du Jourdain[123]. Pendant que païens et chrétiens rappelaient ce souvenir, Asterius s’approcha du soldat martyrisé, enveloppa le corps d’étoffes précieuses, et, le chargeant sur ses épaules, l’emporta aux yeux de tous jusqu’au lieu de la sépulture[124].

On peut juger, par ces faits, de l’état des Églises en Orient. Dans certains lieux, l’édit de Gallien avait reçu un commencement d’exécution ; c’est ainsi que Denys put rentrer dans Alexandrie et Theotecne recouvrer le sanctuaire chrétien de Césarée. Ailleurs, la restitution des biens ecclésiastiques dut être arrêtée par l’usurpation de Macrien. Enfin, le sang des martyrs coulait jusque dans l’armée, où Macrien, s’il eût vécu, n’aurait sans doute pas souffert un soldat ou un officier chrétien. Mais une inquiète ambition ne lui laissa pas le loisir d’aller jusqu’au bout de ses desseins. Oubliant que la seule raison de son empire était la défense de l’Orient, il ne craignit pas de passer en Europe et de marcher sur Rome[125]. Ses troupes l’abandonnèrent dès le premier combat : il périt en Thrace avec son fils aîné[126], pendant que son second fils était tué dans Émèse, qu’assiégeait Odenath au nom de Gallien[127].

La joie avec laquelle les chrétiens d’Orient saluèrent la chute de Macrien montre la crainte qu’il leur inspirait, le mal qu’il leur avait fait déjà. Après avoir trahi un empereur, combattu un second, il a été rapidement enlevé, avec toute sa race, écrit Denys d’Alexandrie. Gallien fut donc proclamé du consentement de tous : empereur à la fois ancien et nouveau, qui précéda l’usurpateur et qui lui succède. Ainsi a dit le prophète Isaïe : Voici que ce qui était au commencement est venu, et ce qui maintenant se produira est nouveau. Car, de même qu’un nuage se plaçant devant le soleil intercepte pour un temps ses rayons et paraît à sa place ; puis, quand le nuage a passé ou s’est dissipé, le soleil reparaît de nouveau ; ainsi Macrien, qui s’était proposé lui-même et avait usurpé l’empire de Gallien : il n’est plus, comme auparavant il n’était pas ; mais Gallien demeure, semblable à soi-même, et tel qu’auparavant. La royauté, rajeunie, purifiée, prend une fraîche vigueur : on la voit, on l’entend, elle est partout[128]. La date de la chute de Macrien est clairement marquée par l’évêque d’Alexandrie : Je veux de même contempler les années de notre empereur. Car je vois que les impies, qui un instant ont paru célèbres, se sont évanouis en peu de temps. Mais le très religieux empereur, vraiment ami de Dieu, après avoir régné sept ans accomplis, est entré maintenant dans la neuvième année de son règne, pour laquelle nous célébrerons des fêtes[129].

Denys ne parlerait pas en termes plus enthousiastes d’un empereur chrétien : Constantin sera loué sur ce ton. Gallien, cependant, ne fit jamais profession de christianisme ; mais ce langage confiant et tendre laisse supposer que le très religieux empereur, vraiment ami de Dieu, se livrait tout entier aux influences chrétiennes ; bien que le nom de Salonine ne soit pas prononcé, il se lit entre les lignes. Les fidèles avaient raison de se réjouir, car Gallien, promulguant de nouveau pour l’Orient les mesures qui mirent fin à la persécutions en Occident, ordonna, dès le lendemain de la défaite de 1lacrien, la restitution aux évêques asiatiques ou égyptiens des lieux religieux que le règne de l’usurpateur n’avait pas encore permis à l’Église de recouvrer. A cette occasion paraît écrite la lettre suivante, rapportée par Eusèbe : L’empereur César Publius Licinius Gallien, pieux, heureux, Auguste, à Denys, Pinna, Demetrius, et autres évêques. Je veux que mes bienfaits s’étendent à tout l’univers, et que tous respectent les lieux religieux. Vous pouvez donc agir selon les termes de mon rescrit, sans que nul ait le droit de vous nuire. J’ai depuis longtemps accordé ce qu’il vous est permis de faire. Aurelius Cyrenius, procurateur du fisc, se conformera à mes ordres[130]. On ne s’étonnera pas si les fidèles attendaient impatiemment l’expiration de la neuvième année de Gallien pour célébrer à leur manière les fêtes décennales. Leurs temples étaient ouverts partout, et ils pouvaient librement aller au pied des autels offrir au Dieu tout-puissant leurs vœux pour l’empereur.

La joie des chrétiens d’Égypte fut bientôt troublée. Le préfet Émilien, qui, sous Valérien, exila saint Denys[131], avait à peine eu le temps de proclamer de nouveau Gallien dans Alexandrie, quand lui-même fut contraint de prendre la pourpre. Menacé par une émeute, il ne trouva que ce moyen de sauver sa vie[132]. Gallien était accoutumé à perdre des provinces ; mais il fallait cette fois faire acte, d’énergie, car l’ancien préfet d’Égypte arrêtait dans les ports la flotte chargée de blé[133], et Rome eût pu être affamée[134]. Le brave Théodote fut envoyé contre les rebelles[135]. Un curieux épisode de la lutte va montrer la faveur dont jouissaient les chrétiens près du général de Gallien, faire voir en même temps la vanité des calomnies qui les représentaient comme fuyant par principe les charges publiques, et la charité avec laquelle ils se portaient médiateurs dans les discordes civiles.

Grâce à l’effort concerté de deux fidèles, qui s’entremirent entre le peuple d’Alexandrie et les légions romaines, la plupart des partisans d’Émilien purent échapper à la mort. Alexandrie possédait alors deux hommes d’une charité sans bornes et d’une grande valeur intellectuelle : Eusèbe, qui devint plus tard évêque de Laodicée, Anatole, destiné à le remplacer sur ce siège. Anatole surtout occupait parmi les lettrés d’Alexandrie une situation considérable. Nul ne songeait à lui disputer le premier rang : il était calculateur, astronome, géomètre et physicien en même temps que rhéteur, dialecticien et philosophe. Les Alexandrins voyaient en lui un second Aristote ; à leur demande, il ouvrit une école pour y enseigner les doctrines du Portique[136] : Jamblique fut, dit-on, un de ses auditeurs[137]. Bien que chrétien, Anatole avait reçu de ses concitoyens les plus grands honneurs : il était devenu le chef du sénat d’Alexandrie[138]. En cette qualité, il se vit obligé de suivre avec tous les sénateurs le tyran Émilien, qui se trouva bientôt bloqué dans le Bruchium[139]. La famine ne tarda pas à s’y faire sentir. Malgré la rigueur du blocus, Anatole parvint à se mettre en rapports avec Eusèbe, demeuré dans la partie de la ville soumise aux Romains, et traité avec le plus grand respect par leur général[140]. Par son entremise, un sauf-conduit fut obtenu pour les assiégés. A cette nouvelle, Anatole convoqua le sénat d’Alexandrie. Soumettez-vous, faites la paix avec les Romains, dit-il à ses collègues. L’orgueil des sénateurs se révolta contre ce conseil. Au moins, poursuivit le magistrat chrétien, laissez sortir les femmes, les enfants, les vieillards. A quoi bon leur infliger les tortures de la faim ? Renvoyons les bouches inutiles, conservons ce qui nous reste de blé pour les hommes, pour les jeunes gens, capables de défendre la cité. L’avis parut bon, et, peu à peu, devint le salut de tous. Anatole réussit à faire évader tous les chrétiens et une foule de païens, revêtus d’habits de femmes. Arrivés au camp des Romains, les fugitifs, sans distinction de culte, étaient reçus par Eusèbe, qui prodiguait à ces malheureux presque morts de faim tous les secours de la charité. Émilien, abandonné de beaucoup de ses partisans, finit par tomber aux mains de Théodote[141].

Pendant que l’empire improvisé par Macrien s’écroulait dans les déchirements ‘de la guerre civile, après avoir usé deux empereurs en moins de quatre ans, un autre empire, destiné à jeter un grand éclat, naissait en quelque sorte de ses ruines, et faisait rayonner sur la limite des déserts d’Arabie la gloire du nom romain.

Malgré son titre de colonie[142], Palmyre, la Thadmor de Salomon, avait toujours été pour Rome une vassale plutôt qu’une sujette[143] : les désordres du troisième siècle lui rendirent l’autonomie. Ville libre, elle devint peu à peu ville souveraine. Avec son sol conquis non sur la mer, mais sur le désert[144], ses caravanes traversant comme des flottes les océans de sable, sa dynastie de princes marchands dont le titre grandit avec le pouvoir[145], l’oasis palmyrénienne, au troisième siècle, est la Hollande de l’Orient. Les temples, les palais, de longues colonnades portant inscrits pêle-mêle des noms de négociants et de rois[146], attestent la richesse non moins que la puissance de la capitale du désert. Tout le trafic de l’Orient passe dans ses murs[147]. Assise au point d’intersection de deux grandes voies, elle reçoit par Tyr, Damas, Petra les marchandises de la Méditerranée et de l’Arabie, par Antioche celles de l’Asie romaine, et les échange sur l’Euphrate et le Tigre contre les produits de la Mésopotamie, de l’Arménie et de l’Inde. Mais ces grandes voies commerciales sont aussi des voies militaires[148] : quand les circonstances feront de Palmyre non seulement l’entrepôt, mais la citadelle de l’Orient, tout sera préparé d’avance : un réseau de routes stratégiques existera, et les caravanes auront tracé le chemin aux armées.

Ainsi s’explique la rapidité avec laquelle Odenath pénétra deux fois au cœur de l’empire des Perses. En récompense de ses victoires, Gallien reconnut la souveraineté qu’il exerçait de fait sur une partie de l’Orient latin, et lui donna le titre d’empereur, chef des Romains[149]. Il en faisait ainsi une sorte de collègue, et l’associait à sa politique religieuse, seule possible, du reste, dans un État commerçant où des hommes de toute race et de toute croyance apportaient les idées en même temps que les marchandises. Aussi la rupture de Gallien[150], en 264, avec la veuve d’Odenath, qui s’était proclamée reine, puis Auguste[151], ne fit point cesser la tolérance. La souveraine de Palmyre avait, du reste, l’âme assez haute pour comprendre la grandeur de la politique inaugurée sous les auspices de Salonine.

Homme par le cœur, selon le mot d’un historien[152], Zénobie fut, par la grâce comme par la vertu, la femme la plus accomplie de son temps. On louait sa beauté brune, l’éclat de ses yeux noirs, la blancheur de ses dents comparables à des perles ; quand elle passait a cheval devant ses troupes, le casque posé sur cette tète charmante, le bras nu comme une Amazone, sa robe de pourpre serrée à la taille par une ceinture de pierreries, c’était une éblouissante vision[153]. Mais les qualités morales l’emportaient encore sur les dons extérieurs. Économe et magnifique, sévère et clémente[154], l’épouse d’Odenath rappelait, par les délicatesses de sa chasteté conjugale, l’idéal si élevé que les premiers chrétiens se faisaient du mariage[155]. Zénobie n’était pas chrétienne, cependant ; mais, comme beaucoup de femmes supérieures du troisième siècle, elle parait avoir été touchée des beautés de l’Évangile, avoir pris connaissance de ses dogmes et puisé à la source de pureté qui jaillit de sa morale. Les Juifs, nombreux dans la commerçante Palmyre[156], répandaient autour d’eux l’idée monothéiste. Si vraiment le secrétaire et le confident de Zénobie, le rhéteur Longin, composa le traité du Sublime[157], il était familier avec les beautés de la littérature hébraïque, admirait Moïse et les psaumes[158] : il initia probablement sa royale maîtresse à cette poésie grandiose et simple, que l’âme d’une Orientale devait goûter. Longin, d’ailleurs, à Alexandrie, avait suivi avec Plotin et Origène les leçons d’Ammonius Saccas, et, comme beaucoup de néoplatoniciens, mêlait peut-être aux doctrines de l’école des réminiscences de l’Évangile. Mais, plus que Longin, un chrétien célèbre de cette époque, éloquent et séduisant entre tous, dut exercer sur la politique religieuse de la Palmyrénienne une influence considérable. Paul de Samosate, né dans la Commagène, au bord de l’Euphrate, était presque son compatriote. Il avait vu le jour à la frontière de cet ancien royaume d’Édesse où le christianisme, introduit de très bonne heure, se mélangea vite d’éléments orientaux. Son rôle près de Zénobie parait, à certains égards, analogue à celui de Bardesane, au siècle précédent, près des princes chrétiens de l’Osrhoène[159]. Évêque d’Antioche, investi en même temps, par la faveur de la souveraine, d’une haute charge financière, Paul menait dans son Église la vie fastueuse d’un magistrat et d’un homme du monde[160]. Ses doctrines, semi-chrétiennes, semi-juives[161], étaient faites pour plaire à la religion vague et flottante de Zénobie. Une telle femme, assistée de pareils conseillers, ne pouvait être une princesse orthodoxe ; mais elle devait, au moins autant que Gallien, tolérer, favoriser même les chrétiens. Aussi voyons-nous les Églises d’Asie rester en possession de leurs immeubles : Paul de Samosate occupe à Antioche la maison épiscopale[162].

Si l’on se place à ce moment pour juger les résultats de l’édit de Gallien, on pourra croire au succès définitif. La paix religieuse est partout, dans les États qui lui obéissent comme dans ceux auxquels il fait la guerre. Pourtant son œuvre est à la veille de périr. Gallien avait trop peu d’autorité personnelle pour en imposer la continuation à ses successeurs, et sa politique extérieure, acceptée par eux, devait en amener la ruine. A peine, luttant contre son infidèle allié Aureolus, Gallien était-il tombé sous les murs de Milan, que la persécution recommençait avec Claude en Italie. Bientôt les armes d’Aurélien détruiront successivement l’empire de Posthume et celui de Zénobie, derniers asiles de la tolérance. Nous allons voir le sang des martyrs couler de nouveau dans le monde romain violemment ramené à l’unité.

 

 

 



[1] Daniel, II, 34.

[2] Passio SS. Jacobi, Mariani, 22, dans Ruinart, p. 231.

[3] Passio SS. Jacobi, Mariani, 22, dans Ruinart, p. 231.

[4] Voir Bartoli, la Colonne Trajane, pl. XLVII ; Frœhner, ibid., pl. L.

[5] Les Bavares. Inscription de Lambèse ; Corpus inscriptionum latinarum, t. VIII, 7924. Cette tribu doit être identifiée aux Babari transtagnenses d’une inscription de Cherchell, ibid., 9324 ; transtagnenses désigne leur résidence au delà des chotts salés, salinæ tubunenses. Cf. Mommsen, Römische Geschichte, t. V, p. 640, note.

[6] Les Quinquegentans. Inscription de Lambèse. Une autre inscription, de 304, Corp. inscr. lat., t. VIII, 8836, nous apprend que les Quinquegentans résidaient aux environs de Tupusuctu (Tiklat), à peu de distance de Rougie. Tupusuctu était dans la Mauritanie Sitifienne, mais tout à fait sur les confins de la Mauritanie Césarienne, au pied du Djurdjura, c’est-à-dire des montagnes bordant la Grande Kabylie. Cf. Mollendorf, Appendice au Mémoire sur les provinces romaines de Mommsen, trad. Picot, p. 62.

[7] Inscription de Lambèse. Sur l’obéissance religieuse des Kabyles pour leurs chefs, voir Tertullien, Apologétique, 24, et saint Cyprien, Quod idola dei non sint.

[8] Inscription de Lambèse, et inscription d’Auzia (Aumale) pour la statue élevée le 26 mars 260 à l’officier romain qui l’avait vaincu ; Corp. inscr. lat., t. VIII, 9047.

[9] L’inscription de Lambèse est dédiée par le légat Decianus I O M CETERISQVE DIIS DEARVSQ IMMORTALIB, en actions de grâces pour l’invasion repoussée. De cette inscription et de celle qui est citée à la note précédente, nous avons tiré le récit de cette invasion , jusqu’ici négligée des historiens.

[10] Grégoire de Tours, Historia Francorum, I, 30. Des écrivains postérieurs, Frédégaire, Ammoin, Sigebert, font de Chrocus un roi des Vandales, et placent l’invasion au cinquième siècle. Avec les Bollandistes, les auteurs de l’Histoire de l’Église gallicane, t. III, p. 39, Denys de Sainte-Marthe, Gallia christiana, t. I, p. 137, Tillemont, Mémoires, t. IV, art. et notes sur saint Privat, je suis l’opinion de Grégoire de Tours, et je renvoie pour les raisons à l’appui à la dissertation de Cuper dans les Acta SS., août, t. IV, p. 433-436.

[11] Ozanam, les Germains avant le christianisme, p. 372.

[12] Grégoire de Tours, l. c.

[13] Découvert et identifié en 1873 ; voir Desjardins, Géographie historique de la Gaule romaine, t. I, p. 106-108.

[14] Grégoire de Tours, l. c. Dans son article sur le grand Temple du Puy de Dôme, M. Paul Monceaux adopte pour la destruction du temple la date indiquée par Grégoire de Tours ; Revue historique, mars-avril 1888, p. 273.

[15] Sur la prospérité de l’Auvergne à cette époque, voir Monceau, p. 263.

[16] On place à ce moment la violente et soudaine destruction des poteries de Lezoux, près de Clermont, qui couvraient de leurs ateliers une ligne de douze kilomètres. Voir Plicque, Gazette archéologique, 1881, n° 1 ; Héron de Villefosse, Bulletin de la Société des antiquaires de France, 1883, p. 205, 210 ; Monceau, Revue historique, 1888, p. 270. M. Héron de Villefosse fait remarquer que les monnaies trouvées au milieu des fabriques incendiées de Lezoux ne descendent pas plus bas que les règnes de Valérien et de Gallien ; cette observation confirme la date attribuée par Grégoire de Tours à l’invasion de Chrocus.

[17] Grégoire de Tours, De gloria confessorum, 30 ; Historia Francorum, 1, 20, 29, 31. Cf. Acta SS., février, t. 1, p. 769 ; mars, t. III, p. 769 ; mai, 1. 1V, p. 494. Le martyrologium Gallicanum de Du Saussay, cité par Bollandus, Acta SS., février, t. I, p. 769, parle de six mille deux cent trente-six martyrs. Nous ne savons quelle est la source de ce renseignement, par conséquent quelle est la valeur de ce chiffre. Mais son énormité seule ne serait pas une raison pour le rejeter. Le compte rendu de la Société des missions étrangères indique, au Tonkin et dans l’Annam, dix missionnaires, douze prêtres indigènes, soixante catéchumènes, trois cents religieuses, trente mille chrétiens massacrés en 1885 ; plus deux cent cinquante églises ou chapelles, deux séminaires, quarante écoles, soixante-dix résidences de missionnaires, dix-sept orphelinats, treize couvents et cinquante mille maisons de chrétiens incendiés on démolis.

[18] J’avais cru pouvoir, dans une précédente édition, ranger parmi les victimes de l’invasion de Chrocus Ausone , évêque d’Angoulême, et Didier, évêque de Langres. Mais il semble démontré aujourd’hui que ces deux évêques périrent dans une invasion des Vandales, au cinquième siècle. Voir Duchesne, l’Origine des diocèses épiscopaux dans l’ancienne France, dans Mémoires de la Société des antiquaires de France, t. I, 1889, p. 347, 365 ; cf. Fastes épiscopaux de l’ancienne Gaule, t. I, 1894, p. 8, 22. En particulier, pour saint Didier, consulter Roussel, Nouvelles études sur le diocèse de Langres et ses évêques, 1889 ; il résulte de ses recherches : 1° que l’évêché de Langres n’a été établi que dans les premières années du quatrième siècle ; 2° que saint Didier, troisième évêque, n’a été martyrisé que vers 407, sous les Vandales ; 3° que le catalogue des évêques de Langres (Hæc sunt nomina Ép. Lingonensium, Senator I episcopus, Justus II, sanctus Desiderius III, etc.) n’offre pas de lacunes. Cf. Rivière, dans Études religieuses, partie bibliographique, 1891, p. 468-471.

[19] Grégoire de Tours, Historia Francorum, I, 32.

[20] L’officier qui commandait les Romains s’appelait Marius, selon Ammoin, Hist. Franc., III, 1, ou Marianus, selon Frédégaire et Sigebert. C’est probablement le même qui dans quelques années deviendra empereur en Gaule ; Tillemont, Mémoires, t. IV, art. sur saint Privat. Cette identification confirme encore la date que nous assignons à l’invasion de Chrocus et aux martyres dont elle fut cause.

[21] Aurelius Victor, De Cæsaribus ; saint Jérôme, Chron. ; Orose, Adv. pag. historia, VII, 22, 41 ; Ausone, Ép. XXXV, 59, 60.

[22] Saint Jérôme, Chron. ; Orose, VII, 22 ; Zonare, XII, 26.

[23] Vopiscus, Aurelianus, 10, 13, 15.

[24] Zosime, I, 37. C’est probablement alors que Gallien, dans un sentiment de défiance, interdit aux sénateurs le service militaire ; Aurelius Victor, De Cæsaribus, 33.

[25] Zosime, I, 31-35 ; Jornandès, De rebus Geticis, 20.

[26] On se rappelle la rapidité avec laquelle se convertit la région du Pont où résidait Grégoire le Thaumaturge, les chutes nombreuses dont elle fut témoin pendant la persécution de Dèce, l’enthousiaste retour d’un grand nombre lors de la peste, les ménagements avec lesquels l’évêque était encore obligé de traiter la religion vacillante de ses ouailles (voir Histoire des persécutions pendant la première moitié du troisième siècle, 2e édit., p. 260, 432 ; et plus haut, chap. I). Ces circonstances expliquent dans une certaine mesure l’infidélité de quelques chrétiens au moment de l’invasion.

[27] Saint Grégoire le Thaumaturge, Epistola canonica, 2-8.

[28] Sozomène, Hist. Ecclés., II, 6.

[29] Voir plus haut, chap. I.

[30] Sozomène, l. c. ; Philostorge, Hist. Ecclés., II, 5. D’une famille originaire de la Cappadoce et transplantée par la guerre chez les Goths naquit, en 311, Ulphilas, destiné à être leur premier évêque. Au quatrième siècle, la semence jetée d’une rive à l’autre de l’Euxin avait donné tous ses fruits : saint Basile invoque en faveur de la foi catholique le témoignage des Barbares qui vivent au delà du Danube. Ép. 220.

[31] Zosime, I, 36.

[32] Zosime, I, 36.

[33] Voir Histoire des persécutions pendant la première moitié du troisième siècle, 2e édit., p. 232.

[34] Zonare, XII, 23.

[35] Corpus inscriptionum græcarum, 4675, 4676.

[36] Cf. Trebellius Pollion, Triginta tyranni, 14.

[37] Trebellius Pollion, Gallieni duo, 5.

[38] Trebellius Pollion, Valeriani duo, 3.

[39] Saint Denys d’Alexandrie, lettre à Hermammon, dans Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 23.

[40] Bas-relief de Nakeh-Roustem au-dessous du tombeau des rois. Environs de Persépolis.

[41] Zosime, I, 36.

[42] Aurelius Victor, Épitomé ; Trebellius Pollion, Valeriani duo, 3 ; Lactance, De mort. persec., 5 ; Constantin, Oratio ad sanctorum cœtum, 24 ; Eusèbe, De vita Constantin, IV, 11 ; Orose, VII, 22 ; Pierre le Patrice, Excerpta de legationibus, dans le Corp. hist. Bys., 1648, p. 26.

[43] Ou Mariadès. Cf. le continuateur de Dion, dans les Fragm. hist. Græc., t. IV, p. 192, éd. Didot.

[44] Juvénal, Satires, III, 62 ; Stace, Silves, I, V, 72.

[45] Ammien Marcellin, XXXIII, 5. Cf. Libanius, Discours à Théodose sur la nécessité de venger Julien.

[46] Le théâtre et les principaux édifices publics sont situés sur les pentes du Silpius, dans la cité primitive bâtie par Antiochus Épiphane. Voir un bon plan d’Antioche ancienne, dans Fouard, Saint Pierre et les premières années du Christianisme, p. 210.

[47] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 1 (en corrigeant l’erreur de l’historien, qui met l’usurpation de Cyriadès avant la prise de Valérien). — Sapor fit frapper un denier d’or à l’effigie du nouvel Auguste ; voir Lenormant, la Monnaie dans l’antiquité, t. II, p. 386.

[48] Flandin, la Perse ancienne, planches XXXIII, XLIX ; Rawlinson, The seventh oriental monarchy, planche à la page 607.

[49] L’ordre des événements de cette époque est diversement rapporté par les historiens. La plupart mettent l’invasion de la Syrie, la prise d’Antioche, l’usurpation de Cyriadès, avant la captivité de Valérien. Leur récit est suivi par Tillemont, Histoire des Empereurs, t. III, p. 405. Cependant Zonare, XII, 23, place ces faits après la captivité de Valérien, et Ammien Marcellin, qui donne les détails de la prise d’Antioche, la met sous Gallien, c’est-à-dire à l’époque où Valérien était aux mains des Perses. Cette opinion, confirmée par les bas-reliefs persans, est seule vraisemblable. On ne peut admettre qu’un méprisable aventurier comme Cyriadès ait été proclamé empereur dans Antioche, si Valérien avait été encore en Asie à la tête d’une armée. Gibbon, Decline and fall of the Rom. emp., c. X, M. Duruy, Histoire des Romains, t. VI, p. 418-421, suivent le récit de Zonare et d’Ammien.

[50] Le souvenir de ses bienfaits vit toujours parmi nous ; nous possédons encore les lettres qu’il envoya pour consoler et ‘soutenir l’Église de Césarée, en même temps qu’il adressait ici l’argent nécessaire au rachat de nos frères emmenés par les Barbares. Saint Basile, Ép. 70. Zonare se trompe donc en disant (XII, 23) que tous les habitants furent massacrés.

[51] Zosime, I, 27. — Sur la composition de l’armée persane, peu propre aux longues expéditions, voir Hérodien, Hist. Rom., VI ; Ammien Marcellin, XVI, 12 ; XXIII, 6 ; Zonare, XII, 23.

[52] Zonare, l. c.

[53] Saint Denys d’Alexandrie, lettre à Hermammon, dans Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 10 ; cf. Isaïe, LXVI. 3, 4.

[54] Constantin, Oratio ad sanctorum cœtum, 24.

[55] Constantin, l. c. ; Lactance, De mort. persec., 5 ; Pierre le Patrice, Excerpta de legat., p. 26. — La captivité de Valérien est de 260 au plus tard, et plus probablement de 259. On possède des lois marquées de son nom, qui portent la date de 260 ; l’indication de sa huitième année de puissance tribunitienne, correspondant d cette date, se lit encore sur des médailles (Eckhel, Doctr. numm. vet., t. VII, p. 378) ; les monnaies alexandrines de Valérien sont datées par les années de son principat jusqu’en 260 (Mowat, Mémoires de la Société des antiquaires de France, 1879, p. 200). Mais probablement on continua de considérer Valérien comme empereur après sa captivité (Eckhel, p. 387) et même jusqu’à sa mort, arrivée vers 261 ou 262.

[56] Il avait quarante-deux ans, et depuis sept ans était associé à l’empire.

[57] Voir Histoire des persécutions pendant la première moitié du troisième siècle, 2e édit., p. 70.

[58] Ibid., p. 188.

[59] Cf. Tillemont, Histoire des Empereurs, t. III, p. 685, note VI sur Valérien.

[60] Porphyre, Vita Plotini. 12. Cf. Jules Simon, Histoire de l’école d’Alexandrie, t. I, p. 208.

[61] Porphyre, Vita Plotini, 17.

[62] Porphyre, De abstinentia, 1.

[63] Porphyre, dans le livre III de l’ouvrage qu’il composa contre les chrétiens, affirme qu’Ammonius devenu philosophe abandonna le christianisme (fragment cité par Eusèbe, Hist. Ecclés., VI, 19, 7). Cette assertion est réfutée par Eusèbe (ibid., 19, 9, 10) et saint Jérôme (De viris illustribus, 55), qui citent les ouvragés composés par Ammonius pour la défense de la religion chrétienne. Cependant on s’est demandé si Eusèbe ne confond pas avec Ammonius Saccas un autre Ammonius, auteur d’un Diatessaron, et vivant encore de son temps. Ce qui l’a fait supposer, c’est que Porphyre et Longin disent que le philosophe Ammonius n’écrivit pas, tandis qu’Eusèbe cite de lui plusieurs ouvrages.

[64] Le néoplatonicien Gentilianus Aurelius, bien que païen, et traitant saint Jean de barbare, le cite pour montrer l’identité du verbe avec le Αόγος platonicien ; Eusèbe, Præparatio evangelica, XI, 18, 19.

[65] Saint Augustin, Ép. 56, ad Dioscorum.

[66] Médailles de Salonine ; au droit, buste de l’impératrice, SALONINA AVG. ; au revers, l’impératrice assise, AVGVSTA IN PACE ou AVG. IN PACE. Ces médailles furent frappées du vivant de Salonine, avant 265 ; Revue de Numismatique, 1857, p. 71, 243-245. La formule IN PACE ne se rencontrant que sur des tombes chrétiennes (et par exception sur quelques tombes juives), M. de Witte en conclut au christianisme de Salonine (Mémoire sur l’impératrice Salonine, dans les Mémoires de l’Académie de Belgique, t. XXVI (1852), et du Christianisme de quelques impératrices romaines, dans Cahier et Martin, Mélanges d’archéologie, t. III, p. 173 et suiv.). Cette conclusion me paraît vraisemblable, bien qu’elle ait été combattue par Cavedoni (Sopra l’imp. Salonina, dans l’Album Giornale tell. e di belle arti, Rome, 1852, p. 93-94, 127-128, 132-135), A. de Barthélemy (Revue de Numismatique, 1853, p. 64), le P. de Peis (Nuovo Bull. di arch. crist., 1896, p. 153), et que Kraus (Munzen, dans Real-Encykl. der christl. Alterth., t. II, p. 435,) croie à une sorte de syncrétisme religieux de Salonine plutôt qu’à une conversion formelle.

[67] M. Duruy, Histoire des Romains, t. VI, p. 410, note 5, hésite, comme Kraus, à croire au christianisme formel de Salonine ; il estime qu’elle chercha la paix de la conscience et du cœur dans une sorte de compromis entre l’Évangile et les doctrines néoplatoniciennes ; mais il pense qu’elle inclina Gallien à traiter favorablement les chrétiens, et obtint de lui l’édit de tolérance.

[68] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 13.

[69] Gallienus stopt the persecution, and gave legal sanction to the Church body. Bickersteth Birks, art. Martyrs, dans Smith, Dictionary of christian antiquities, p. 1124.

[70] Mot à mot, aux magistrats du Verbe. Eusèbe, l. c.

[71] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 13.

[72] Ibid. Cf. saint Denys, lettre à Germanus, dans Eusèbe, VII, 11, 10.

[73] De Rossi, Roma sotterranea, t. I, p. 200.

[74] Digeste, XLVIII, XX, De bonis damnatorum. — Voir Humbert, articles Bona damnatorum et Confiscatio, dans le Dictionnaire des antiquités, t. I, p. 724, 1440. — Cf., pour la persécution de Dèce, Eusèbe, Hist. Ecclés., VI, 2, 13, à propos de la condamnation du père d’Origène ; pour la persécution de Valérien, saint Cyprien, Ép. 80 ; pour les autres persécutions, les textes hagiographiques cités par Edmond Le Blant, les Actes des martyrs, § 47, p. 117.

[75] Voir Ruinart, p. 257 ; Tillemont, Mémoires, t. IV, note I sur saint Félix.

[76] Saint Paulin de Nole, XVI, 215.

[77] Ibid., 256-259.

[78] Ibid., 263.

[79] Ibid., 270-272.

[80] Saint Paulin de Nole, XVI, 272-299.

[81] Les lois du temps de l’empire donnent quelquefois à la grâce prononcée par le souverain le titre de restitutio ira integrum ; Callistrate, au Digeste, XLVIII, XIX, 27. Un délai était quelquefois imparti aux intéressés pour faire valoir leurs droits ; Pline, Ép., X, 64, 65.

[82] J’emploie ce mot dans le sens français ou grec, en rappelant qu’il n’a pas d’équivalent latin.

[83] Voir Histoire des persécutions pendant la première moitié du troisième siècle, 2e édit., p. 298.

[84] Liber Pontificalis, Xystus II ; voir Duchesne, t. I, p. 156, note 2.

[85] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 7, 6.

[86] L’élection du pape saint Denys est du 22 juillet 259 ; voir Duchesne, le Liber Pontificalis, Introduction, p. CCXLVIII.

[87] Liber Pontificalis, Dionysius. Voir Duchesne, Introduction, p. C, et p. 157, note 3 ; De Rossi, Roma sotterranea, t. I, p. 205 ; t. II, p. 97, 377 ; t. III, p. 526 ; Rome souterraine, p. 132.

[88] Trebellius Pollion, Gallieni duo, 16, 17, 21.

[89] Gallien tremblait devant la mauvaise humeur de ses généraux, au point de leur envoyer des présents pour les apaiser ; Trebellius Pollion, Claudius, 17. Médailles de Gallien, avec cette légende, peut-être ironique : GALLIENAE AVGVSTAE ; Eckhel, Doctrina numm. vet., t. VII, p. 411. Dans les Césars, Julien fait entrer Gallien au banquet des dieux avec une robe de femme ; éd. Spanheim, p. 92.

[90] Sur la date de l’élection de Posthume, voir Appendice H.

[91] La note S. C., senatus consulto, se lit fréquemment sur les monnaies de bronze frappées sous Posthume et ses successeurs ; Eckhel, t. VII, p. 445. Les autres empereurs provinciaux de l’époque dite des trente tyrans n’émirent pas de monnaies semblables. Cela tient à ce que les monnaies de bronze impériales ne se frappaient qu’à Rome et à Antioche, par ordre du sénat ; seul de ces empereurs, Posthume constitua un sénat, investi des mêmes attributions que celui de Rome. Cf. Lenormant, la Monnaie dans l’antiquité, t. II, p. 410.

[92] De Witte, Recherches sur les empereurs romains qui ont régné dans les Gaules au troisième siècle de l’ère chrétienne, Posthume, n° 264-266. Les successeurs de Posthume conservèrent ce type : Victorinus, ibid., 77, 78 ; Tetricus, 114.

[93] Voir l’Appendice H, Note sur l’empire gallo-romain.

[94] Ibid.

[95] E. Desjardins, Géographie historique de la Gaule romaine, t. II, p. 513-514 ; J. Sacaze, Épigraphie de Luchon (cf. Bulletin critique, 1880, p. 94). Voir aussi des observations de M. Flouest dans Bulletin de la Société des antiquaires de France, 1887, p. 239.

[96] Vopiscus, Aurelianus, 44 ; Carinus, 14.

[97] Voir De Witte, dans la Revue archéologique, 1852 ; p. 561 ; Alexandre Bertrand, le Dieu tricéphale gaulois, ibid., décembre 1875, p. 383 ; l’Autel de Saintes et les Divinités gauloises, ibid., juin 1880, p. 339 ; juillet, p. 1 ; août, p. 70 ; les Divinités gauloises à attitude bouddhique, ibid., juin 1882, p. 321 ; les Deux Divinités gauloises de Sommérécourt, ibid., septembre 1884, p. 301 ; Gaidoz, le Dieu assis les jambes croisées, retrouvé en Auvergne, ibid., p. 299 ; Héron de Villefosse, dans le Bulletin de la Société des antiquaires de France, 1879, p. 147 ; Gaidoz et Mowat, ibid., 1880, p. 267-270, 275-282.

[98] On a cru reconnaître le travail de monétaires chrétiens dans quelques pièces de Tetricus, portant au revers soit une étoile en forme de croix, soit un X, soit un homme nu et une femme vêtue, debout de chaque côté d’un arbre, soit un lièvre courant, symbole représenté sur quelques monuments chrétiens ; De Witte, Recherches, Tetricus, 61, 248, 250, 251, 270. Mais ces détails n’ont rien de probant ; la croix ou le X peuvent être soit de simples ornements, soit des sigles monétaires, l’homme et la femme debout représentent probablement la dispute de Neptune et de Minerve (cf. Beulé, Monnaies d’Athènes, p. 393) plutôt qu’Adam et Ève, et enfin le lièvre courant (voir Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, p. 426) n’est pas un symbole exclusivement chrétien.

[99] Voir Appendice H.

[100] Miller, Hist. Græc. Fragm., t. IV, p. 191.

[101] Zonare, XII, 23.

[102] Zosime, I, 22 ; Trebellius Pollion, Trig. tyr., 14 ; Pierre le Patrice, Excerpta ex legat., p. 25, 29.

[103] Voir le discours, plein de rouerie, de Macrien dans Trebellius Pollion, Trig. tyr., 11.

[104] Zonare, XII, 23.

[105] Saint Denys d’Alexandrie, lettre à Hiérax, dans Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 21, 4. Cf. Lumbroso, l’Egitlo al tiempo dei Greci e dei Romani, 1882, p. 137.

[106] Saint Denys, l. c.

[107] Le nombre des individus de quatorze à quatre-vingts ans inscrits sur les registres de l’institution alimentaire ne s’élevait pas au-dessus du chiffre des hommes de quarante à soixante-dix ans qui naguère avaient pris part aux distributions. Ibid., 9.

[108] Ibid., 4.

[109] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 3.

[110] Ibid., 1.

[111] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 15, commence par ces mots le récit du martyre de Marinus. Tillemont place comme nous cet épisode sous Macrien : Autant, dit-il, qu’on en peut juger par conjecture, cela arriva en 261 ou 262, dans le temps que Macrien, l’ennemi déclaré de l’Église, était maître de l’Orient. Mémoires, t. IV, art. X sur la persécution de Valérien.

[112] IV Scythica, XVI Flavia, IV Ferrata, X Fretensis.

[113] Eusèbe, VII, 15, 2.

[114] Eusèbe, VII, 154.

[115] Ibid.

[116] Ibid. — Ce passage est intéressant : c’est la description la plus complète que nous possédions, pour cette époque, de l’église, de l’autel placé au fond du sanctuaire, du livre des Évangiles qui y était conservé.

[117] Ibid. — Sur le rôle du héraut dans les procès criminels, voir Histoire des persécutions pendant les deux premiers siècles, p. 311.

[118] Ibid.

[119] Ibid.

[120] Eusèbe, VII, 16. — Sur le titre d’ami des empereurs, voir Histoire des persécutions pendant les deux premiers siècles, 2e édit., p. 355.

[121] Eusèbe le nomme Άστύριος ; Rufin traduit Asterius.

[122] Les vieillards les racontaient encore an temps d’Eusèbe.

[123] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 17.

[124] Ibid., 10. — On ne sait si cet acte intrépide fut puni de mort : Rufin l’affirme, et après lui plusieurs martyrologes ; Eusèbe, bien instruit cependant des traditions de son Église de Césarée, ne le dit pas. Cf. Tillemont, Mémoires, t. IV, note X sur la persécution de Valérien.

[125] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 11.

[126] Ibid., 2 ; Zonare, XII, 23.

[127] Trebellius Pollion, Gall., 3.

[128] Saint Denys d’Alexandrie, lettre à Hermammon, dans Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 23, 1, 2, 3.

[129] Ibid., 4.

[130] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 13.

[131] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 11.

[132] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 21.

[133] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 21.

[134] L’Italie ne produisait plus depuis deux siècles au moins le blé nécessaire à sa consommation. Les provinces le donnaient en tribut. Le blé d’Égypte nourrissait Rome pendant quatre mois, au rapport de Josèphe, De bello judaico, II, 16.

[135] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 21, 25. Cf. Gall., 4.

[136] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 32, 6.

[137] Eunape, Vitæ sophistarum, Jambl. — Voir la note de Valois sur Eusèbe, l. c.

[138] Eusèbe, ibid., 9. — Alexandrie avait reçu de Sévère le jus bouleutarum (Spartien, Severus, 17), rarement accordé aux villes égyptiennes. Cf. Histoire des persécutions pendant la première moitié du troisième siècle, 2e édit. p. 69.

[139] Le Bruchium était un quartier fortifié, séparé de la ville par un mur, et contenant le palais des Ptolémées, le musée, le temple de César. Voir le plan d’Alexandrie, dans Duruy, Histoire des Romains, t. III, p. 333. — Dans toutes les luttes qui ensanglantèrent Alexandrie, cette forteresse fut la retraite d’un des belligérants : César, avec quatre mille légionnaires, y avait jadis tenu tête à toute l’armée égyptienne et aux trois cent mille Alexandrins : deux fois encore, au troisième siècle, sous Claude et sous Aurélien, le Bruchium sera assiégé. Mais le siège dont nous parlons ne peut être confondu avec l’un ou l’autre de ces derniers ; les détails donnés par l’historien sur le rôle joué dans le siège par son homonyme Eusèbe, qui ne devint qu’après évêque de Laodicée, et prit part en cette qualité au premier concile tenu contre Paul de Samosate vers 264, ne permettent pas de placer l’épisode que nous racontons à une époque plus tardive que cette année même, date de la rébellion d’Émilien. Voir Tillemont, Histoire des Empereurs, t. IV, p. 469 et 471, note X sur Gallien.

[140] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 32, 8.

[141] Émilien fut envoyé à Rome, où Gallien, suivant l’usage antique, le fit étrangler en prison. Trebellius Pollion, Gall., 4 ; Trig. tyr., 25.

[142] Colonia juris italica. Digeste, L, XV, 1, § 5 ; De Vogué, Syrie centrale, inscr. sémitiques, n° 15 ; Waddington, Voyage archéologique, inscriptions, 2606 a, 2607, 2629. Duumvirs de la colonie, Waddington, 2597, 2598, 2601, 2606 a, 2607 ; De Vogué, p. 18. Cf. Marquardt, Römische Staatsverwaltung, t. I, p. 415.

[143] Mommsen, Römische Geschichte, t. V, p. 425 et suiv.

[144] Restes de conduits souterrains et d’énormes réservoirs en pierre de taille, assurant l’irrigation d’un sol aujourd’hui privé de végétation ; ibid., p. 429.

[145] Corpus inscr. græc., 457 ; Waddington, 2603, 2621 ; De Vogué, 21, 23.

[146] Waddington, 2589, 2590, 2596, 2599, 2606-2610. Cf. Mommsen, l. c., p. 428, note 2.

[147] Un tarif en grec et en araméen, récemment découvert à Palmyre, contient à la fois des droits de douane, d’octroi et de transit. De Vogué, Acad. des inscriptions, 3 novembre 1882, 16 mars et 11 mai 1883 ; Cagnat, Revue de philologie, avril 1884, p. 135-144.

[148] Cinquante-deux postes de soldats romains s’échelonnaient entre Damas et Palmyre (Duruy, Histoire des Romains, t. VI, p. 80) ; d’autres forteresses bordent une route secondaire qui de Bostra se dirige vers cette ville, à travers une solitude désolée (Marquardt, Römische Staatsverwaltung..., t. I, p. 414) ; certainement les chemins se prolongeant de Palmyre à l’Euphrate n’étaient pas moins protégés (Mommsen, Römische Geschichte, t. V, p. 80).

[149] Gallieno et Saturnino consulibus, Odenathus, rex Palmyrenorum, obtinuit totius Orientis imperium. Trebellius Pollion, Gall., 10. Sur des monnaies, Odenath porte le titre d’IM(perator) D(ux) R(omanorum), ou d’ΑΥΤ(οxράτωρ) Σ(τρατηγός) ΡΩ(μαιών) ; F. Lenormant, la Monnaie dans l’antiquité, t. II, p. 378 ; Mommsen, Römische Geschichte, t. V, p. 433, note 2. — Reçut-il le titre d’Auguste ? Voir sur cette question controversée Mommsen, l. c. ; Lenormant, p. 379, 382, 383.

[150] Trebellius Pollion, Gall., 14.

[151] Βασίλισσα. Inscriptions de Palmyre : Waddington, 2611, 2628. L’inscription qui lui donne le titre de Σεβαστή, Augusta, paraît du temps de Claude ou d’Aurélien, mais ce titre peut avoir été pris dés le règne de Gallien ; Corp. inscr. græc., 4503 b. ; cf. Lenormant, la Monnaie dans l’antiquité, t. II, p. 379.

[152] Zosime, I, 44.

[153] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 29.

[154] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 29.

[155] Trebellius Pollion, Trig. tyr., 29.

[156] De Vogué, Syrie centrale, inscr. sémitiques, 7, 15, 65, etc. Cf. Duruy, Histoire des Romains, t. VI, p. 80 ; Champagny, les Césars du troisième siècle, t. III, p. 65, 66.

[157] Sur les raisons qui font douter que le traité du Sublime soit de Longin, voir Jules Simon, Histoire de l’École d’Alexandrie, t. II, p. 53-58.

[158] Du Sublime, ch. VII.

[159] Voir Histoire des persécutions pendant la première moitié du troisième siècle, p. 173.

[160] Lettre du concile d’Antioche à Denys et à Maxime, dans Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 30, 8. — Procurator ducenarius, charge fiscale donnant aussi des attributions administratives et même judiciaires ; sous Dèce, c’est d’un procurator ducenarius que l’évêque libellatique Martial obtint un certificat de sacrifice ; voir saint Cyprien, Ép. 67 ; cf. Histoire des persécutions pendant la première moitié du troisième siècle, 2e édit., p. 326.

[161] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 28.

[162] Eusèbe, Hist. Ecclés., VII, 30, 19.