RÉCITS DE L’HISTOIRE ROMAINE AU Ve SIÈCLE

 

CHAPITRE III — EXPÉDITION CONTRE GENSÉRIC.

 

 

Aventures de l’impératrice Eudoxie et de ses filles. - Genséric veut donner Olybrius pour empereur de l’Italie. - Défaite de la flotte romaine près de Carthage. - Ricimer fait assassiner Marcellinus.

468 - 469

Un grand malheur attaché aux gouvernements faibles, c’est qu’ils ne s’appartiennent pas à eux-mêmes amis, ennemis, voisins, tout le monde se croit le droit d’intervenir dans leurs affaires domestiques, de se jouer de leurs institutions, de leur dicter jusqu’au choix des maîtres qui les régissent. Ce malheur, Rome l’éprouvait après l’avoir fait sentir si longtemps et si rudement au reste de l’univers. C’était aujourd’hui le tour des Barbares de faire des césars à la pointe de l’épée chez cette maîtresse des nations qui avait fait et défait tant de rois barbares. Plusieurs fois, depuis moins d’un siècle, les Francs, les Alamans, les Burgondes, surtout les Goths s’étaient arrogé ce droit insolent, soit en opposant dans les Gaules des tyrans de leur façon aux empereurs légitimes, soit en faisant proclamer par intimidation dans le sénat les candidats qu’ils préféraient. On avait vu tout récemment encore l’empereur Avitus se munir du suffrage des Visigoths avant d’aller briguer en deçà des Alpes ceux de Rome et de l’Italie. Il n’y eut pas jusqu’au plus implacable ennemi du nom romain, Genséric, jusqu’au peuple le plus acharné à la destruction de l’empire, les Vandales, qui ne prétendissent aussi lui choisir un maître : prétention d’autant plus odieuse dans la circonstance que le titre invoqué par Genséric en faveur de son protégé dérivait du sac de Rome.

Le Vandale Ghiseric ou Gheiseric, que nous nommons communément Genséric, bâtard d’une esclave et d’un roi, petit, laid et boiteux[1], meurtrier de sa belle-sœur et de ses neveux, qu’il avait fait jeter dans une rivière une pierre au cou, polir se débarrasser de toute compétition de famille, Genséric était, parmi les Barbares et suivant les idées politiques du Ve siècle, un homme de génie[2]. Au souffle de cet Annibal germain, Carthage avait repris ses deux vieilles passions ; l’amour de la piraterie et la haine de Rome. Excitée par la barbarie vandale, la barbarie indigène, s’était réveillée sur le sol africain, et l’oeuvre des Romains s’éteignait rapidement. Et ce n’était pas seulement aux hommes civilisés, aux fils des colons de l’Italie, que Genséric avait déclaré la guerre ; il la faisait aux villes elles-mêmes ; enlevant leurs portes, démantelant leurs murailles, détruisant leurs monuments ; et tenant perpétuellement suspendues sur elles les menaces de pillage ou d’extermination. Aussi leurs habitants se dispersaient, les uns passaient la mer, les autres se réfugiaient dans les montagnes ; plusieurs grandes cités restèrent désertes. Le catholicisme partageait avec la civilisation ces haines féroces de Genséric et de son peuple, qui eussent voulu l’écraser d’un seul coup, afin de le remplacer par l’arianisme. La persécution vandale rappela aux catholiques épouvantés. les ères maudites des Decius, des Galérius et des Néron. Ce furent pour les églises des profanations inouïes et sauvages, pour les prêtres des martyres inconnus. Les Italiens virent un jour aborder dans un de leurs ports un navire à demi consumé que le vent poussait devant lui : on y trouva, revêtu de ses habits pontificaux, l’évêque de Carthage lancé en pleine mer sur un brûlot par les Vandales, et sauvé par la tempête. Sans la vitalité surhumaine dont se montra douée dans ses périls la grande église des Cyprien et des Augustin, cette civilisation originale et féconde de l’Afrique romaine, mélange d’éléments latins et puniques, qui avait brillé d’un si vif éclat sur le christianisme et sur les lettres, disparaissait sans retour.

Tel était au dedans le gouvernement de Genséric. Au dehors, la nouvelle Carthage devint, grâce à lui, aussi redoutable que l’ancienne : on ne navigua plus en sûreté dans les mers de l’Italie et de la Grèce ; et aucun port ne fut à l’abri de ses insultes. Les îles Baléares, la Corse, la Sardaigne, la Sicile elle-même, soumises par ses flottes reprirent le pavillon carthaginois comme au temps d’Amilcar[3]. On eut dit que l’histoire du monde remontait le cours des siècles ; mais Genséric donna un spectacle que les siècles précédents n’avaient point vu, celui d’une armée partie de Carthage campant sur le Forum et maîtresse de Rome pendant quatorze jours[4].

La foi vandale valait d’ailleurs la foi punique, si même elle ne la surpassait point en astuce. Nul roi barbare ou civilisé ne fut plus fourbe que Genséric ; c’est là le caractère de sa supériorité sur ses contemporains et sa gloire dans la tradition germaine : Il était, dit Jornandès, sobre de paroles et profond de pensées, calculateur incomparable quand il s’agissait de provoquer les nations, toujours prêt à semer des germes de discordes et à susciter des haines. A la fourberie réduite en système, il joignait une avarice insatiable ; l’or était sa seule passion, gagner son seul désir, entasser sa seule volupté. Tout autre sentiment lui était inconnu ; on vantait sa tempérance, et il ne céda jamais ni à la pitié ni à l’amour[5]. C’est cette froideur naturelle, cette absence d’entraînements et de faiblesses, cette impassibilité dans la destruction, qui firent comparer Genséric à une divinité malfaisante et lui valurent le renom du plus grand des Barbares[6].

Si la grandeur de ces sombres héros du Ve siècle consistait dans leur séparation de l’humanité, Genséric serait effectivement au-dessus d’Attila, qui , après fout, avait les penchants bons ou mauvais d’un homme, chez qui l’orgueil nourrissait la passion de la guerre, qui ravageait le monde pour le plaisir de vaincre, d’humilier ses ennemis, de rendre son nom redoutable, de sentir les nations sous ses pieds. Ces instincts dans le roi des Huns dominaient l’amour du pillage et du vol ; il avait l’âme d’un conquérant sauvage, Genséric celle d’un pirate[7]. Le premier eût voulu posséder l’univers, le second le dépouiller. Les cruautés du fils de Moundzukh et ses dévastations avaient souvent pour mobiles la vanité, le besoin de frapper les imaginations : s’il eût pris Rome, il n’en aurait fait qu’un monceau- de cendres ; il en aurait déraciné jusqu’aux fondements, heureux d’attacher son nom à la ruine d’une ville qui osait se dire éternelle ; mais il suffit de la prière d’un prêtre pour l’arrêter[8]. Aucune prière ne fléchit Genséric aux portes de Rome, et quand il s’y fut introduit furtivement à l’aide de la trahison, il ne la détruisit point, il la pilla à loisir, chargeant sur sa flotte jusqu’aux portes de bronze et au toit des temples, puis il regagna précipitamment l’Afrique comme un voleur qui met à l’abri son larcin. Lorsqu’en 450 il vint proposer au roi des Huns de se jeter en commun sur l’Italie, il choisissait bien son allié. Attila aurait revendiqué pour son lot la gloire des batailles et de l’épouvante, Genséric l’argent.

Dans le butin emporté de Rome par les Vandales, figurait celle qui leur en avait ouvert les portes, Eudoxie, femme de Maxime et veuve de Valentinien III. Le pirate l’emmenait avec ses deux filles, Eudocie et Placidie[9], non pour les dérober au juste ressentiment. d’une ville qu’elles n’avaient pas craint de sacrifier à leurs vengeances domestiques, hais pour tirer d’elles plus tard une bonne rançon[10] ; car il supposait que veuve et nièces d’empereurs, et petites-filles du grand Théodose, elles devaient posséder des biens considérables soit en Occident, soit en Orient. La même idée de spéculation lui fit emmener aussi et réduire en captivité tout ce qu’il put saisir dans Rome de jeunes filles et de jeunes garçons appartenant à des familles patriciennes, entre autres Gaudentius, fils de l’illustre et infortuné Aetius[11].

Quoique mère de deux enfants nubiles, Eudoxie était encore dans tout l’éclat de cette beauté fatale qui lui valut l’amour et les folles confidences de Maxime, et Attila, si elle fût tombée entre ses mains, l’aurait envoyée probablement sur les bords de la Théisse grossir le troupeau de ses concubines ; mais Genséric ne lui accorda pas un regard. Il eut soin de marier, dès son débarquement à Carthage, l’aînée des deux princesses à son fils Hunéric[12], qui devait être son successeur ; puis il calcula par quel moyen il obtiendrait des Romains la dot de sa bru et le rachat des deux autres. En vertu du principe que le bien de l’esclave est la chose du maître, il se mit à réclamer aussi les propriétés d’Aetius au nom de Gaudentius, son captif[13]. Entrant en pourparlers, d’un côté, avec le sénat de Rome, de l’autre avec l’empereur d’Orient, il déclara que si l’on tardait, à restituer ce qu’on lui retenait contre tout droit, il irait le reprendre, l’épée et la torche en main, dans tous les ports d’Italie et de Grèce[14]. Payer au Barbare cette sorte de tribut ou le lui refuser et lui laisser en compensation l’impératrice et sa fille non mariée, étaient deux actes d’une égale ignominie : Rome préféra le second, qui du moins la vengeait ; mais l’héritier du trône d’Orient ne put rester insensible au malheur de la postérité de Théodose[15]. Il essaya tout pour obtenir amiablement la liberté des princesses : il offrit à Genséric son alliance et la paix, il le menaça d’une expédition en Afrique ; mais avances ou menaces, rien ne toucha le Vandale : Que nous fassions la paix ou la guerre, répondait-il imperturbablement, il me faut la dot de ma belle-fille avec la rançon de sa mère et de sa sœur.

Ces débats durèrent sept ans : ce furent sept années de désastres pour le commerce du monde entier[16]. Enfin une nouvelle combinaison, sortie du génie de Genséric, mit fin à la captivité d’Eudoxie et de sa seconde fille. Celle-ci, lorsqu’elle habitait encore la maison paternelle et qu’elle n’était qu’un enfant, avait été fiancée à un jeune Romain de l’illustre maison des Anices, nommé Olybrius[17]. Rien n’égalait en noblesse cette fière maison Anicia, de qui l’on avait pu dire qu’en prenant au hasard parmi ses membres, on trouvait toujours un consul[18] : mais la bravoure n’était plus au Ve siècle l’attribut des noms patriciens, et quand les troupes vandales entrèrent dans Rome, Olybrius, au lieu de protéger sa fiancée ou de partager les infortunes d’une famille qui allait être la sienne, quitta la ville et s’enfuit à Constantinople[19]. Il paraît pourtant qu’ils s’aimaient, et Placidie garda en Afrique un souvenir fidèle de son fiancé. Confident de cet amour, Genséric se mit, en relation avec Olybrius et le prit pour intermédiaire des réclamations qu’il adressait à l’empereur Léon, lui promettant la liberté et la main de Placidie, si, par ses bons offices, il le mettait en possession des biens de la sœur. Olybrius s’employa tout entier à cette négociation, qui réussit par son entremise. On liquida ce qui restait de la succession de Valentinien III et de Grata-Placidia, soit en Orient, soit en Occident ; les biens immeubles furent vendus, on joignit au produit de cette vente tout ce qu’il y avait encore de meubles, d’étoffes, de bijoux, d’objets d’art appartenant à cette maison, et le tout, transporté par un navire romain à Carthage, fut livré au roi des Vandales en échange de l’impératrice et de sa fille. Eudoxie reçut à Byzance un accueil digne de son ancienne condition, et Placidie épousa Olybrius[20].

Alors s’ouvrit le second acte de cette tragi-comédie qui se jouait entre Genséric et l’empire romain. A peine les noces d’Olybrius et de Placidie venaient-elles de se terminer, que des messagers arrivèrent de Carthage à l’empereur Léon et au sénat de Rome. Les lettres dont ils étaient porteurs conseillaient aux deux gouvernements de choisir pour empereur d’Occident Olybrius, voisin de la pourpre par sa noblesse et gendre du dernier césar héritier du nom de Théodose ; d’ailleurs, ajoutait Genséric[21], il est par sa femme le beau-frère de mon fils, et avec lui vous aurez la paix. Que si vous le refusiez, quoique le plus noble d’entre vous, par quelle raison agiriez-vous de cette manière, sinon parce qu’il est mon parent. Il me resterait alors à venger l’insulte que vous m’auriez faite gratuitement. On pense bien qu’un double refus suivit ce message impudent soit à Constantinople, soit à Rome ; Genséric accomplit sa menace, et les déprédations vandales recommencèrent de plus belle[22]. La Méditerranée fut infestée de pirates enlevant les plus gros navires qui osaient s’exposer, pénétrant dans les moindres recoins, et criant à ceux qu’ils pillaient et brûlaient : Faites Olybrius empereur d’Occident ! C’était le temps des grands embarras de l’Italie, Majorien venait d’être assassiné, et Sévère, à peine assis sur le trône impérial, commençait à chanceler déjà. A sa mort, Genséric redoubla de sollicitations, tandis que le lâche Olybrius, qui était entré dans ses vues, semait l’argent à pleines mains pour se créer un parti. Jamais le monde n’avait assisté à un plus déplorable spectacle : deux rois barbares, l’un généralissime des troupes romaines, l’autre le plus cruel ennemi de Rome, bloquant pour ainsi dire le sénat par terre et par mer pour lui dicter la loi, et l’un lui refusant, l’autre lui imposant un empereur. Ricimer et Genséric se retrouvaient en présence avec leur haine de race et leur inimitié héréditaire[23], et se disputaient le droit de disposer du trône des césars, comme naguère la possession d’Aléria ou d’Agrigente.

On ne peut douter que la honte d’une pareille situation n’eût influé sur les résolutions de la ville de Rome, lorsqu’en 466 elle supplia Léon de lui choisir un empereur ; Ricimer, de son côté, coupa court aux intrigues d’Olybrius en agréant le choix fait par Léon. Dans cet état de choses, la première pensée des deux princes, le premier désir des deux empires fut de s’affranchir d’une odieuse dépendance ; car Genséric, avec la connivence de Romains encore plus odieux que lui, pouvait empêcher tout ordre, tout gouvernement de s’établir en Occident. Léon aurait tenté à lui seul une descente en Afrique, si le bon accord heureusement revenu et l’amitié personnelle d’Anthémius ne lui eussent garanti le concours de l’Italie[24].

On prépara donc en commun une expédition dans laquelle naturellement le premier rôle échut à l’empire d’Orient, comme au plus riche, au mieux fourni de vaisseaux et de soldats, et à celui qui avait eu l’idée de la guerre. A l’aspect des armements qui s’exécutaient de toutes parts, on ne craignait pas de proclamer cette expédition la plus formidable qu’on eût jamais vue clans les eaux de la Méditerranée[25]. En effet, au jour marqué pour le départ de la flotte orientale, le port de Constantinople, réputé le plus vaste de l’ancien monde, réunissait onze cent treize navires de haut bord, montés par sept mille marins et disposés pour recevoir, soit immédiatement, soit en route, à des stations déterminées, une armée de plus de cent mille hommes[26]. Quarante-sept mille livres pesant d’or venant des contributions publiques, et dix-sept mille tirées de l’épargne du prince, outre sept cent mille livres d’argent étaient destinées par Léon aux dépenses de la campagne[27] : le gouvernement occidental, suivant toute apparence, devait pourvoir aux frais de sa flotte et clé son armée. Ce ne fut pas tout : Léon eut l’habileté d’intéresser le petit état de Dalmatie à une entreprise que ne pouvait répudier sans crime et sans honte aucune province de l’empire, fût-elle actuellement séparée, si elle avait conservé dans sa scission une ombre de sentiment romain.

L’histoire de ce petit état, démembré de la Romanie occidentale, est assez curieuse pour que nous nous y arrêtions quelques instants. Durant les troubles qui suivirent en Italie la mort d’Aetius, un des officiers dévoués à ce grand général, Marcellinus[28], dont il a été déjà question, secouant l’obéissance de Valentinien qu’il ne voulait plus servir, se retira en Dalmatie et entraîna cette province dans sa révolte[29]. On ignore d’ailleurs quel lien existait entre Marcellinus et la Dalmatie, s’il était lui-même Dalmate, s’il avait administré ce pays connue gouverneur militaire, ou si sa renommée seule lui avait attiré l’attachement d’une nation belliqueuse et fière, car Marcellinus joignait à la droiture du caractère les talents d’un général consommé, et beaucoup d’Occidentaux voyaient en lui le vrai successeur d’Aetius. Sous ce chef habile et résolu, la Dalmatie, séparée de la communauté romaine et constituée en état indépendant, sut se faire respecter de son ancienne métropole[30].

Cet homme, en révolte contre le gouvernement de l’Italie, avait au fond le cœur tout romain ; il le montra sous les règnes d’Avitus et de Majorien en venant se joindre aux expéditions alors dirigées contre les Vandales. Sa présence en Sicile fut même signalée par quelques exploits brillants[31] ; mais Ricimer le repoussait toujours. Ricimer, son ancien compagnon d’armes et, son ennemi, s’interposait entre le gouvernement romain et lui chaque fois qu’ils voulaient se rapprocher, et le chef dalmate mécontent se retira au milieu de son peuple, décidé à oublier cette Rome dont un Barbare écartait les Romains. Pourtant Léon réussit à l’apaiser[32] ; Marcellinus consentit à faire partie de la nouvelle expédition ; il livra sa flotte, sa petite armée, sa personne, pour le service de l’empereur d’Occident, et reçut en récompense le titre de patrice[33]. Ricimer n’osa pas s’opposer de vive force à des arrangements que tout le monde semblait désirer, mais il en conçut une sourde et profonde colère : laisser s’introduire dans les affaires du gouvernement occidental un homme d’un tel mérite et d’une telle popularité, c’était abdiquer son pouvoir, et il se promit bien de ne le pas souffrir longtemps. Il s’abstint, sous divers prétextes, de toute coopération personnelle à la guerre qui allait s’ouvrir ; Anthémius l’imita. Empereur et patrice restèrent donc en Italie face à face, occupés de leurs communes affaires, et uniquement soucieux, l’un de veiller sur son trône, l’autre d’observer son maître.

La voix publique en Occident décernait à Marcellinus la conduite de la guerre ; mais les intrigues du palais de Constantinople ; et peut-être au fond l’orgueil des Orientaux, ne tardèrent pas à la démentir. Sur les marches du trône d’Orient se trouvait un personnage nommé Basilisque, frère de l’impératrice Vérine, femme de Léon, esprit épais et infatué de lui-même, qui, favorisé par le hasard dans quelques commandements importants, se regardait comme le premier général de l’empire, et répétait complaisamment que Léon sans lui aurait cessé de régner. A force de se croire ainsi la sauvegarde du trône, il en vint à y convoiter une place, à ne voir que disgrâce et noire ingratitude dans les honneurs dont il était comblé, et à se rapprocher des ennemis de l’empereur[34]. Le frère de l’impératrice devint le confident, l’instrument, le complice de quiconque haïssait le prince ou conspirait dans l’ombre contre son autorité. L’empire de Constantinople, comme celui de Rome, avait alors un tuteur en la personne d’Aspar, barbare alain ou goth (les historiens ne sont pas d’accord), patrice d’Orient et généralissime des armées impériales. L’influence que cette haute position lui donnait, Aspar, lors du décès de l’empereur Marcien, l’avait mise au service de Léon, qui lui dut incontestablement la couronne[35] : nous dirons plus tard à quelles conditions.

La bonne intelligence ne fut pas de longue durée entre le protégé et le protecteur, et Aspar prit vis-à-vis de son nouveau maître une attitude arrogante qui se changea peu à peu en hostilité déclarée. Heureux de trouver pour ses intrigues un point d’appui dans la famille impériale, il stimula les rancunes et l’ambition de Basilisque. La guerre qui allait commencer pouvait, en cas de réussite, jeter un grand éclat sur le règne de Léon et fortifier, sa puissance personnelle, ce qui cadrait mal avec les desseins du Barbare : aussi désirait-il qu’elle ne réussît point, et il ne trouva rien de mieux, pour la faire échouer, que d’en procurer le commandement à Basilisque. Des ressorts mis enjeu avec adresse, surtout la vanité de l’impératrice Vérine, aiguillonnée à propos, menèrent le petit complot à bonne fin, et malgré les répugnances de Léon, Basilisque fut nommé généralissime. Il en reporta naturellement le mérite à Aspar, lequel exigea de lui pour récompense qu’il ménageât par tous les moyens possibles les Vandales et leur roi[36]. Feignant de ne voir dans cette guerre si nationale qu’une querelle religieuse, suscitée par la ferveur catholique de Léon, il recommandait à Basilisque de ne point pousser à bout une nation arienne[37]. Je suis arien comme les Vandales, lui disait-il, et je sais de bonne part que ce commencement de persécution contre nos croyances a pour but moi et les miens ; si l’empereur est vainqueur en Afrique, sa fureur se tournera bientôt contre nous. Appuyées sur ce singulier raisonnement, les recommandations d’Aspar n’en étaient pas moins absolues et impératives, et Basilisque dut promettre de ménager l’ennemi qu’il était chargé de combattre. Aspar s’en remettait pour le reste à l’ignorance et à la cupidité bien connues du généralissime ; il s’en remettait aussi à l’habileté de Genséric, auquel il opposait un aussi indigne adversaire. La nomination de Basilisque rejeta donc Marcellinus au second rang ; mais Anthémius le chargea du moins de la conduite des troupes occidentales.

Le plan de campagne concerté entre les deux empires était d’ailleurs hardiment conçu. La flotte occidentale, formant l’aile droite de l’expédition, devait, sous la conduite de Marcellinus, partir d’Italie, descendre clans l’île de Sardaigne, en chasser les Vandales[38], et rallier ensuite sur les eûtes de la Sicile le gros de la flotte orientale. Celle-ci se partageait en deux divisions dont la moins forte, composant l’aile gauche et confiée à un officier de grande expérience nommé Héraclius, devait toucher au port d’Alexandrie, y prendre les garnisons de l’Égypte, de la Thébaïde et de la Cyrénaïque, et attaquer ensuite Tripoli[39] qu’on espérait enlever sans combat. Une fois maître de la place, Héraclius laissant ses vaisseaux à l’ancre dans le port, marcherait par terre sur Carthage[40], pendant que Basilisque, avec la division principale, menacerait cette ville du côté de la mer, en combinant son mouvement avec la marelle de son collègue.

L’exécution fut prompte et décisive aux deux ailes. Marcellinus, heureusement débarqué en Sardaigne, eut bientôt balayé l’île de ce qu’elle contenait de Vandales[41] et rétabli le drapeau romain. Non moins heureux dans son coup de main sur Tripoli, Héraclius enleva la ville et vit accourir à lui, d’un bout à l’autre de la province tripolitaine, les anciens sujets romains et les indigènes attachés aux souvenirs de Rome[42]. Basilisque de son côté, avec l’escadre du centre, dispersa la flotte vandale qui voulut couvrir contre lui l’approche de la Sicile : tout semblait assurer la victoire aux Romains. Genséric lui-même le crut ; saisi d’une terreur panique, il courut se renfermer dans le port de Carthage, où rien d’ailleurs n’était prêt pour soutenir un siège. Si Basilisque l’avait suivi, si des troupes de débarquement, profitant du premier moment de surprise, étaient venues montrer aux Carthaginois les aigles romaines, la ville se rendait[43] ; Genséric semblait s’y attendre. Plongé dans un morne abattement, il promenait au loin ses regards, interrogeant la pleine mer, au moment où les voiles de Basilisque parurent à l’horizon ; lorsqu’il les vit s’éloigner de la direction de Carthage et pousser au large du côté de l’orient, le roi vandale sentit qu’il était sauvé. Avec l’espérance se réveillèrent en lui la ruse, l’audace et les ressources inépuisables de son génie[44].

La ville de Carthage était bâtie, comme on sait, au fond du vaste golfe que forment, à gauche le cap Zibib, alors nommé promontoire d’Apollon, à droite le cap lion, qu’on appelait Hermœum, c’est-à-dire promontoire de Mercure. A l’ouest de ce dernier, dans une anse voisine de sa pointe, une petite ville consacrée jadis à Mercure dont elle portait encore le nom, offrait aux navires un mouillage d’étendue médiocre et de plus exposé aux vents les plus dangereux de ces parages. Du bourg de Mercure à Carthage, on comptait deux cent quatre-vingts stades, environ quatorze de nos lieues. C’est dans ce mouillage que Basilisque vint jeter l’ancre[45], soit par impéritie, soit peut-être par une prudence excessive dans la circonstance actuelle, afin de s’enquérir de la marche d’Héraclius et de sonder par lui-même les dispositions des habitants. Il était à l’ancre depuis quelques heures seulement, lorsque arriva dans son camp un officier vandale porteur d’un message de Genséric. Le message était humble et semblait respirer le plus complet abattement : Le roi des Vandales, repentant des offenses qu’il avait faites aux Romains, promettait, disait-il, de se soumettre à l’empereur Léon et de vivre en paix avec lui ; mais, tout en se reconnaissant vaincu, il devait consulter son peuple sur les conditions de la paix : quelque délai était nécessaire pour prendre à cet égard un parti, et il demandait à Basilisque cinq jours de trêve, au bout desquels il lui ferait connaître la résolution commune[46]. L’envoyé, prenant ensuite à part le général romain, lui remit, au nom de son maître, une somme considérable[47], qui était comme une première marque de la reconnaissance du roi, un premier acheminement vers une paix que les Vandales paraissaient souhaiter avec ardeur. Basilisque se souvint des instructions d’Aspar, et l’armistice fut conclu.

Il passa les cinq jours de trêve dans la plus complète inaction, jouissant d’avance d’une victoire qui lui coûtait si peu, et se proposant bien de ménager encore Genséric dans le débat des conditions de la paix. Étudier le pays, se mettre en relation avec les habitants, il n’y songea plus. S’il s’enquit du sort d’Héraclius et de sa division, on l’ignore ; mais assurément il ne chercha pas à savoir ce qui se passait du côté de Carthage, car la moindre information à ce sujet l’eût tiré de sa quiétude. II était en effet question, dans la grande métropole des possessions vandales, non de soumission, mais d’attaque. Genséric réparait à force ses navires, disposait des brûlots, ramassait dans cette intention les moindres barques de la côte, armait tous ses sujets vandales ou maures[48], et la confiance qu’il avait recouvrée lui-même par le succès de sa ruse animait jusqu’au dernier de ses soldats. Habile à prévoir les variations de temps ordinaires dans ces contrées, il avait calculé que la direction du vent, jusqu’alors favorable aux opérations d’une flotte venant. sur Carthage, ne tarderait pas à changer au désavantage des Romains[49], qui étaient à l’ancre dans une crique peu spacieuse et mal garantie.

Sa prévoyance ne fut pas trompée. Dans la cinquième journée de la trêve, le vent changea brusquement, et se mit à souffler avec force de Carthage sur le promontoire de Mercure. Aussitôt le roi vandale fit appareiller, et à la tombée de la nuit il sortit du port avec deux flottes, la première de vaisseaux de haut bord, bien fournis d’armes et garnis de troupes, la seconde de petits navires et de barques sans équipage et remplis de matières combustibles, l’une remorquant l’autre[50]. Ils s’avancèrent ainsi avec précaution et dans le plus grand silence comme pour une surprise, précaution d’ailleurs superflue, car Basilisque n’avait ni vedette de terre, ni garde de mer, et quand les Vandales approchèrent du port de Mercure, l’armée romaine, campée sur ses vaisseaux, était plongée dans le sommeil[51].

Au signal donné par Genséric, la flotte vandale se range en demi-cercle, et les brûlots, détachés de leurs amarres, sont livrés à la mer et aux vents qui les portent sur la flotte romaine. Les premiers vaisseaux atteints par le feu le communiquent aux autres ; les voiles et les cordages s’enflamment, et la lueur d’un immense incendie éclaire tout à coup le golfe et la pleine mer. Cette lueur sinistre tire les Romains de leur assoupissement. En un instant, les ponts sont encombrés par une foule désordonnée ; on se presse, on se heurte, des cris de surprise et d’épouvante se mêlent au sifflement du vent et au pétillement, du bois qui s’embrase[52]. Dans ce mouillage trop étroit pour une si vaste flotte, les vaisseaux romains, serrés et comme collés les uns aux autres, ne peuvent se mouvoir et manoeuvrer pour éviter le péril. En vain marins et soldats, s’encourageant au travail, repoussent avec des perches les brûlots que le flot amène, l’incendie éclate du côté où l’on ne songe pas à le combattre. Dominé par une peur aveugle, chacun pourvoit à son salut sans s’inquiéter de celui des autres : tout vaisseau romain atteint de la flamme est coulé bas sans plus de pitié qu’à brûlot ennemi[53]. L’escadre vandale mit le comble à la confusion en s’avançant jusqu’à la portée du trait et faisant pleuvoir sur cette flotte en désarroi une grêle incessante de dards et de flèches. Le feu, l’eau, le fer assaillent de tous côtés les Romains, qui n’ont plus que le choix de leur mort.

Basilisque, détrompé de ses rêves, parvint à s’enfuir à la faveur de l’obscurité ; plusieurs l’imitèrent[54] ; d’autres, plus courageux, affrontèrent la ligne des Vandales et la rompirent après une lutte désespérée. Au nombre de ceux-ci se trouvait le lieutenant de Basilisque, Jean, surnommé Daminec[55], homme comparable aux anciens Romains, et fait pour accomplir les plus grandes choses, si le sort lui eût donné un autre chef. Enveloppé par les vaisseaux africains, il les attaque lui-même à l’abordage, tue ce qui lui résiste et culbute les Vandales à la mer ; mais le nombre croissant des ennemis le force à la retraite, et il voit le navire qu’il monte envahi à son tour par les Barbares. Dans cette extrémité il s’approche du bord tout en combattant, et, d’un regard jeté en arrière, il semble sonder l’abîme béant sous ses pas. En vain le second fils de Genséric, nommé Ghenz ou Ghenzo, qui se trouvait là et avait admiré le courage du Romain, devinant sa pensée, lui crie d’une voix forte d’arrêter, qu’il lui garantit la vie sauve[56]. La vie ! répond celui-ci avec dédain ; sache que Jean ne tombera jamais vivant entre les mains des chiens ! Cela dit, il s’élance tout armé dans la mer et disparaît[57]. Les fugitifs se rallièrent en Sicile ; mais quand Basilisque passa en revue ce qui lui restait d’hommes et de vaisseaux, on constata que la flotte et l’armée étaient réduites de plus de moitié[58].

Tout n’était pourtant pas perdu ; Marcellinus venait d’arriver de Sardaigne en Sicile avec la flotte d’Occident, et sous son habile direction la guerre pouvait renaître. Les Occidentaux, habitués à compter beaucoup sur ce général, objet de l’affection populaire, se berçaient peut-être de cette espérance, quand un officier de ses troupes, qui l’approchait souvent, lui tendit une embûche et le tua[59]. On prétendit que cet homme était un familier de Ricimer chargé d’observer son chef, et dé démontrer au besoin par un coup de poignard que l’armée occidentale n’avait confiance que dans le Suève ; et que toute expédition non ordonnée ni conduite par lui était sûre d’échouer. Si l’on en croit les historiens, cette nouvelle mit le comble à la joie de Genséric ; elle suffit également pour arrêter la marche d’Héraclius sur Carthage. Le prudent général évacua la Tripolitaine, où il n’avait plus rien à faire, et l’armée d’Anthémius rentra en Italie[60].

Ainsi se termina cette entreprise, commencée sous de si beaux auspices et pour une si juste cause. La perte de soixante mille soldats, les ressources de l’État dissipées, une dette accablante pour les populations de l’Orient et l’avilissement du nom romain, voilà quel en fut le résultat. Basilisque, rentré en fugitif à Constantinople, n’osa ni paraître devant l’empereur, ni se montrer en publie ; il alla se cacher comme un coupable dans l’asile de Sainte-Sophie[61]. Un grand exemple eût été nécessaire en de si grands maux, et Léon le devait aux ambitieux et aux lâches dont les intrigues troublaient son règne ; mais l’impératrice Vérine intervint encore, et Basilisque en fut quitte pour aller vivre tranquillement en Thrace, clans la ville d’Héraclée, où il put, rêver de nouvelles lâchetés et se prêter à de nouveaux complots.

En Occident, les Barbares, qu’avait d’abord intimidés cet immense appareil, ainsi que le bon accord rétabli entre les deux moitiés de la Romanie, reprirent toute leur audace. On en vit en Espagne un exemple singulier. Les Suèves, qui étaient venus témoigner de leur attachement à l’empire par une ambassade solennelle au moment des préparatifs de la campagne, n’eu eurent. pas plus tût connu l’issue, qu’ils se jetèrent sur Lisbonne, dont un habitant leur ouvrit les portes[62] ; puis ils envoyèrent en Italie comme leur ambassadeur chargé de les justifier, le traître qui leur avait livré la ville[63]. C’était un défi insolent qu’ils adressaient à Rome dans ses revers. À l’intérieur de l’empire, et surtout en Italie, la disparition de Marcellinus acheva de dissiper les illusions dont on se berçait depuis deux ans. La main invisible qui venait de frapper l’homme destiné peut-être à sauver Anthémius était évidemment la même qui avait dirigé le poignard contre Majorien et préparé le poison de Sévère. Ricimer était toujours là, terrible, implacable ; rien n’avait changé en Occident.

 

 

 

 



[1] On y trouve son nom sous les formes de Gizerichus, Geiserichus, Gensericus, Γεζέριχος, Γινζέριχος. — Statura mediocris et equi casu claudicans. Jornandès, R. Gel., c. 36.

[2] Procope, Bell. Vand., 2, 5. — Jornandès, c. 36.

[3] Vict. Vil., l. I, p. 5. — Cf. Procope, Bell. Vand., I, 5. — Sidoine Apollinaire, Panégyr. Anthem., Carm., II. — Cassiod., Variar., IV. Epist. Theodor.

[4] Procope, I, 5. — Evagr., Hist. ecclés., II, 7, p. 298. — Cf. Tillemont, Hist. des Empereurs, tom. VI.

[5] Jornandès, R. Gel., 36.

[6] Procope, Hist. Goth., III, 1.

[7] C’est, en effet, le nom qu’on lui donnait. Cf. Sidoine Apollinaire, Panegyr. Anthem., Carm., II, c. 354.

[8] Prosp. Aquit. Chron. ad ann. 452. — Voir mon Histoire d’Attila, tom. I, c. 7, p. 221.

[9] Procope, Bell. Vand., I, 5. — Prisc., Excecpt. leg., c. 7. Ed. Nieb. — Evagr., Hist. ecclés., II, 7. — Idat., Chron., p. 41.

[10] Procope, ibid.

[11] Idat. Chron, ad. ann. 455.

[12] Procope, Bell. Vand., I, 5.

[13] Idat. Chron., p. 41. — Prisc. Excerpt. legal., c. 42.

[14] Prisc., ibid.

[15] Evag., Hist. ecclés., II, 7.

[16] Prisc., Excerp. legat., c. 42. — Procope, Bell. Vand., I, 5.

[17] Procope, Bell. Vand., I, 2. — Il résulte des faits de l’histoire qu’elle n’était que fiancée ; ce fut plus tard qu’elle se maria à Constantinople, par les soins de Marcien.

[18] Claudien, Cons. Olyb. — Evag., Hist. ecclés., II, 7.

[19] Evag., ibid.

[20] Prisc., Exc. leg., c. 42. — Procope, Bell. Vand., I, 5. — Evag., Hist. ecclés., II, 7. — Idat. Chron., p. 41.

[21] Procope, Bell. Vand., I, 5.

[22] Ibid.

[23] Sidoine Apollinaire, Carm., II.

[24] Procope, Bell. Vand., I, 6.

[25] Ibid.

[26] Ibid.

[27] Ibid. — Suid., p. 1126. — Evag., Hist. eccl., II, 16.

[28] On trouve le nom de ce personnage sous les deux formes, Marcellinus et Marcellianus.

[29] Procope, Bell. Vand., I, 6.

[30] Ibid.

[31] Ibid.

[32] Ibid.

[33] Marcell., Com. Chron.

[34] Procope, Bell. Vand., I, 6. — Theophan., p. 100.

[35] Procope, Bell. Vand., I, 6. — Jornandès, Regn. success., 14. — Theodor. Lect., Hist. eccl., I. — Theophan., p. 100. — Zonare, p. 40. — Manass., p. 58.

[36] Procope, Bell. Vand., I, 6.

[37] Procope, ub. sup. — Théod. Lect., Hist. eccl., I. — Théophan., p. 110.

[38] Procope, Bell. Vand., I, 6.

[39] Ibid.

[40] Ibid.

[41] Ibid.

[42] Procope, loc. cit. — Theophan., p. 101. — Suid., p. 1196.

[43] Procope, Bell. Vand., I, 6.

[44] Procope, ub. sup. — Theophan., p. 101. — Candid., p. 18. — Jornandès, Regn. success., 14.

[45] Procope, Bell. Vand., I, 6.

[46] Ibid.

[47] Ibid.

[48] Ibid.

[49] Ibid.

[50] Ibid.

[51] Theophan., p. 100.

[52] Procope, Bell. Vand., I, 6.

[53] Ibid.

[54] Zonare, p. 42. — Manass., p. 60.

[55] Procope, Bell. Vand., I, 6. — La chronique de Malala lui donne le surnom de Domonicus, Δαμονιxος.

[56] Procope, Bell. Vand., I, 6.

[57] Ibid.

[58] Cf. Theophan., p.100. — Zonare, p. 42. — Manass., p. 60. — Cedren., p. 330.

[59] Procope, Bell. Vand., I, 6. — Marcell. Comit. Chron. — Cf. Phot., Biblioth., c. 242, p. 1048.

[60] Procope, Bell. Vand., I, 6. — Cedren., p. 330. — Theophan., p. 100. — Evagr., Hist. eccl., II, 16.

[61] Procope, Bell. Vand., I, 6.

[62] Idat., Chron., p. 43. — Isidore, Chron. Goth., p. 44.

[63] Idat., Chron., p. 45. — Ce traître se nommait Luside.