HISTOIRE GÉNÉRALE DE NAPOLÉON BONAPARTE

GUERRE D'ITALIE. - TOME SECOND

 

CHAPITRE XIV.

 

 

Politique de Bonaparte et du Directoire envers les états d'Italie. — Français assassinés en Piémont. — Alliance projetée avec la cour de Turin Évacuation de Livourne. — Gênes ferme ses ports aux Anglais et traite avec la République française. — Traité de paix avec Naples et Parme. — Le pape suspend l'exécution de l'armistice. — Négociation de la paix rompue. — Intrigues et prédications à Rome contre les Français. — Bonaparte offre sa démission au Directoire. — Il reçoit des pleins pouvoirs. — Ses efforts pour sauver la cour de Rome.

 

Obtenir de l'intérieur des renforts, se faire des auxiliaires en Italie, en révolutionnant les peuples, paralyser les états dont les dispositions étaient hostiles ou équivoques, en faisant avec eux des traités de paix ou d'alliance, ou en les amusant par des négociations, jusqu'à ce que le moment de la vengeance fût arrivé : telle était la politique de Bonaparte, tels étaient les moyens par lesquels il se mettait en état de repousser avec gloire la nouvelle irruption que méditait l'Autriche. Je crois imminent, et très-imminent, mandait-il au Directoire[1], que vous preniez en considération la situation de votre armée en Italie ; que vous adoptiez un système qui puisse vous donner des amis, tant du côté des princes que du côté des peuples. Diminuez vos ennemis.

Il faut le suivre, ainsi que le Directoire, dans les vues qu'ils avaient sur ces divers états.

Chaque jour les mauvaises intentions de la cour de Turin devenaient plus évidentes. Un club d aristocrates conspirait au sein même de la capitale. Une Vendée, dont le noyau était de 1,600 hommes, était organisée, moitié dans la vallée d'Aoste, et moitié sur le col de Tende. Le but principal était de tuer en détail les soldats français. On les assassinait dans ces passages qu'ils traversaient sur la foi du traité ; les assassins allaient vendre à Turin les armes et les vêtements de leurs victimes. Leurs chefs étaient des hommes connus ; les brigands recevaient une solde de vingt sous par jour ; leurs armes et leurs munitions leur avaient été délivrées des magasins royaux. Enfin les patriotes piémontais qui s'étaient prononcés pour la France étaient encore persécutés.

Par le traité de paix, la République devait continuer à occuper la partie du Piémont qui avait été laissée à l'armée par l'armistice. Pour faire quelque chose d'agréable au roi, Bonaparte lui en avait rendu le gouvernement civil et militaire, avec la condition expresse que les routes seraient gardées, et les convois escortés par les troupes sardes.

Malgré ses bonnes dispositions pour le roi de Sardaigne, Bonaparte ne pouvait fermer les yeux sur ces excès, ni garder le silence ; il lui en adressa directement ses plaintes. Il accusa les officiers royaux de voir l'assassinat des Français, sinon avec plaisir, du moins avec indifférence ; il pria le roi de donner l'ordre de placer des corps respectables de troupes pour la sûreté des routes et l'escorte des convois ; de faire remettre entre les mains du commandant militaire à Coni, cinq brigands qui avaient été arrêtés par les Français à Borgo-San-Dalmazzo ; et que les gouverneurs s'employassent loyalement à faire arrêter les brigands en quelqu'endroits qu'ils fussent trouvés[2]. Le général en chef adressa sa lettre au ministre des affaires étrangères, pour qu'il la remît au roi ; il lui mandait :

Je ne suis point diplomate, monsieur, je suis militaire : vous pardonnerez ma franchise. Sur différents points des états de S. M., les Français sont assassinés, volés. Partout, sous les yeux des garnisons et des corps de troupes, l'on se porte, tous les jours, à des excès qui paraissent non-seulement tolérés, mais même encouragés par le Gouvernement.

Je vous demanderai donc une explication simple :

1° Le roi ne doit-il pas être tenu de réparer les pertes faites en conséquence des délits qui se commettent sur son territoire contre les Français, lorsque ces délits se commettent en plein jour et par des corps soldés de deux ou trois cents personnes ?

2° Le roi a-t-il, avec 25.000 hommes sous les armes, assez de forces pour contenir dans ses états des brigands, et faire respecter les lois de la justice, de l'humanité et des traités ?

On ne juge les hommes, monsieur, que par leurs actions ; la loyauté du roi est généralement connue ; cependant on se trouve bien forcé de penser qu'il est des raisons de politique qui portent à encourager, ou du moins à tolérer des atrocités aussi révoltantes.

J'ai écrit à S. M. elle-même. Je vous prie de lui présenter ma lettre. Le gouvernement français ne fera rien ouvertement ni secrètement qui tendrait à détruire ou à affaiblir l'effet du gouvernement du roi sur ses peuples ; vous n'ignorez pas cependant combien cela serait facile. Le jour où vous voudrez sincèrement détruire les brigands qui infestent notre communication de Coni à Barcelonnette, ils n'existeront plus[3].

Le Directoire avait une autre inquiétude. Il trouvait dangereux, lorsqu'on reprendrait les opérations militaires, de laisser les troupes piémontaises en supériorité de forces en Italie, et croyait convenable d'engager le roi de Sardaigne, par la concession de quelques avantages, à faire marcher 15.000 hommes de concert avec l'armée française. Il autorisait donc le général en chef à traiter de cet objet avec la cour de Turin, s'il y voyait des avantages, et a lui donner toutes les garanties nécessaires pour sa sûreté. Si cette négociation n'avait pas de suite, le Directoire pensait qu'il serait bien utile de s'assurer du désarmement du Piémont, ainsi qu'il avait été stipulé dans le traité de paix, afin de ne laisser derrière l'armée française aucun sujet d'inquiétude qui pût la distraire de ses mouvements[4].

Au col de Tende, le général Garnier, commandant une colonne mobile, poursuivait les barbets. C'étaient, non des voleurs isolés, mais des corps de 4 à 500 hommes. Il faisait fusiller ceux qui tombaient entre ses mains. Ils sortaient du régiment provincial de Nice que le roi avait licencié. Le général en chef proposa au Directoire de former un corps particulier de tous les habitants des Alpes-Maritimes qui, au moment de la guerre, se trouvaient engagés dans ce régiment et dans le corps franc, et de déclarer qu'ils ne reprendraient leurs droits de citoyens qu'après avoir servi deux ans sous les drapeaux de la République. Bonaparte ne se bornait point à ces palliatifs. Il en revenait toujours à son idée favorite, une alliance avec Gênes ou le Piémont. Il envoya donc à Turin Poussielgue, secrétaire de légation à Gênes, sonder les dispositions du cabinet. Il avait même désiré conférer avec le ministre des affaires étrangères ; mais cette entrevue ne put s'arranger[5]. Le Directoire approuva cette démarche et autorisa le général en chef à promettre au roi de Sardaigne un dédommagement dans une petite portion du Milanais, ou dans une partie des fiefs impériaux ; mais ce dédommagement devait être aussi peu considérable que possible, et sans garantie, pour ne pas, dans la suite, entraîner de graves inconvénients et éloigner l'époque de la paix, objet le plus chèrement désiré de tous les vrais amis de la patrie[6].

Quant aux soldats niçards licenciés, le Directoire opposait au général, comme il l'avait déjà fait en pareille circonstance, la constitution et les lois formelles qu'on ne pouvait pas se permettre d'enfreindre ; cependant, comme il sentait qu'il serait extrêmement difficile d'exterminer ces soldats licenciés, auxquels on ne pouvait accorder la faculté de revenir dans leur département, et qu'il fallait diminuer le plus possible les hordes de barbets, il pensait que le gouvernement provisoire de la Lombardie pouvait les prendre à sa solde ; ce fut le parti que prit Bonaparte.

Mais la cour de Turin se montra plus exigeante qu'on ne l'avait cru. Elle ne demanda pas moins que la Lombardie, pour fournir 8.000 hommes, ou plutôt 5.000, car Bonaparte pensait qu'il n'y en aurait jamais davantage. Il trouva cette prétention exagérée dans un moment où l'on avait fait la paix avec Gênes et Naples. Il pensait que la cour de Turin gagnait déjà beaucoup à faire une alliance avec le gouvernement français, sûre d'effacer par là de l'esprit de ses sujets le mépris que leur inspirait pour elle le traité de paix qu'elle avait conclu. Il autorisa Poussielgue à donner des espérances vagues d'obtenir quelque faveur à la paix générale, à offrir même les fiefs impériaux ou un équivalent du côté de la rivière de Gênes[7].

Le roi Victor-Amédée mourut, laissant, dit un écrivain, un royaume esclave et mutilé qu'il avait reçu libre et intact, un trésor épuisé, qu'il avait trouvé florissant, une armée vaincue qui lui avait été léguée victorieuse ; son amour immodéré de la guerre perdit son pays. Charles-Emmanuel, prince bigot et valétudinaire, monta sur le trône ; il notifia son avènement le 16 octobre à ses grands et chers amis les membres du Directoire.

Les mémoires de Napoléon[8] accusent le Directoire d'avoir entravé la conclusion de l'alliance avec le roi de Sardaigne, de n'avoir pas voulu comprendre la sagesse et la profondeur do la politique du général en chef de l'armée d'Italie, et de s'être toujours laissé entraîner par le désir de révolutionner le Piémont. Il résulte au contraire de tous les documents, depuis les instructions du Directoire avant l'ouverture de la campagne de l'an IV, jusqu'aux dernières de ses lettres ci-dessus rapportées, qu'il voulut constamment cette alliance. Il est vrai qu'après le traité avec Naples et lorsque la position militaire de la France en Italie fut affermie par la défaite d'Alvinzi, cette alliance ne parut plus au Directoire aussi nécessaire. Cependant il n'en persista pas moins à ce qu'elle fût conclue, afin d'arriver plus promptement à, une paix générale et de consolider en Europe l'opinion de la loyauté du gouvernement français dans les traités de paix partiels qu'il avait conclus. On fut même d'accord avec le roi sur cette alliance. Il ne restait plus qu'à rédiger les articles du traité ; le Directoire chargea de cette rédaction le général en chef, afin que Poussielgue, auquel le Directoire donnait des pleins pouvoirs, n'eût plus qu'à les convertir en traité officiel[9]. Qui en empêcha donc la conclusion définitive ? Bonaparte le fait lui-même assez clairement entrevoir dans la lettre qu'il écrivit au Directoire, le 8 nivôse. Le citoyen Poussielgue, mandait-il, vous a rendu compte de l'issue de la négociation avec Turin. Il paraît que ces gens-là ne peuvent pas s'accoutumer au nouvel ordre de choses. Le nouveau roi met de l'ordre dans ses finances, se captive ses sujets, et je ne doute pas qu'il n'espère, par la continuation de la guerre, pouvoir jouer de nouveau un rôle. Je crois que notre politique à l'égard de ce prince doit consister à maintenir toujours chez lui un ferment de mécontentement et surtout à bien s'assurer de la destruction des places du côté des Alpes.

L'alliance manqua par la faute de la cour de Turin, par ses prétentions exagérées d'indemnités en Italie, de compensations pour Je territoire qui avait été le prix de sa paix avec la France, enfin par sa mauvaise foi, car lorsqu'il ne s'agissait plus que de signer le traité, elle ne voulut plus qu'une alliance offensive[10].

Quoique dans l'opinion du général en chef le grand-duc de Toscane fut absolument nul sous tous les rapports, le général Serrurier écrivait de Livourne qu'on y faisait aussi des armements. Ce prince qui, par ses dispositions personnelles, était en effet le moins à craindre, désirait l'évacuation de ce port. Le Directoire autorisa le général en chef à la consentir, à condition que la plus exacte neutralité y serait observée et qu'on ferait expier au grand-duc par de l'argent les traitements hostiles que les Français y avaient éprouvés, et la préférence ouverte qui y avait été accordée aux Anglais et aux émigrés.

Cet arrangement devait être d'autant plus utile que les troupes qui seraient retirées de Livourne serviraient à renforcer l'armée[11]. Le général pensait qu'une fois maître de la Méditerranée on devait exiger du commerce de Livourne cinq ou six millions au lieu de deux qu'il offrait pour la valeur des marchandises confisquées sur les Anglais. Le Directoire autorisa Bonaparte à en faire la demande quand les circonstances seraient favorables[12].

Trois bataillons étaient employés à l'occupation de Livourne. Pour un objet aussi secondaire c'était sans doute un sacrifice. Mais on y laissa d'abord la 57e demi-brigade qui avait beaucoup souffert et avait besoin de repos.

Manfredini montra de l'habileté et de l'activité pour les intérêts de son maître qui lui dut alors la conservation de ses états. Trois ou quatre conventions de peu d'importance furent signées entre le général en chef et ce ministre.

Les circonstances n'avaient pas permis à Bonaparte de se porter de sa personne sur Gênes, comme il l'avait annoncé au Directoire. Spinola, envoyé de cette république, continuait à Paris à négocier et à corrompre.

Gênes flottait, incertaine et craintive, entre les puissances belligérantes, lorsque le vice-amiral Nelson, par un acte de violence, la força à se jeter entre les bras de la France. Un de ses navires débarquait sur la plage de Saint-Pierre-d'Arena des armes et des fournitures pour l'armée d 'Italie ; Nelson sortit du port de Gênes avec un gros vaisseau et une frégate, et s'empara du navire. Faypoult demanda vivement pour première réparation que tous les ports de la République fussent fermés aux Anglais. Le grand et le petit conseil adoptèrent cette mesure et la justifièrent par un manifeste où ils récapitulaient toutes les injures que l'État avait eu à endurer de l'Angleterre. Gênes éluda de répondre aux autres demandes de Faypoult, telles que la remise de tous les vaisseaux anglais mouillés dans ses ports, et chargea Spinola de presser la conclusion d'un arrangement définitif. Bonaparte résolut alors de se porter sur Gênes. Le 16 vendémiaire, Faypoult devait présenter une note au sénat, et Bonaparte faire son opération conformément aux ordres du Directoire, de manière à pouvoir à l'avenir compter sur le Gouvernement ; car il nous faut, répétait-il[13], pour allié, le roi de Sardaigne ou la république de Gênes.

Le secret de ce coup de main ne fut pas bien gardé ; des négociants en eurent connaissance, prirent l'alarme, quittèrent la ville avec grand fracas pour se mettre en sûreté, et se réfugièrent à Milan, répandant le bruit que les Français allaient bombarder Gênes. La mine était éventée ; mais par une lettre ostensible, adressée à Berthier, Bonaparte lui prescrivit de donner l'ordre aux fugitifs de sortir sur-le-champ de la Lombardie et de retourner à Gênes, ayant à cœur, disait-il[14], d'ôter aux malveillants les moyens d'inquiéter le brave peuple de Gênes, auquel l'armée d'Italie avait des obligations essentielles, tant pour les blés qu'il avait procurés dans les moments de détresse, que pour l'amitié que de tout temps il avait témoignée à la République, ce peuple ayant des droits plus particuliers à sa protection dans le moment où il venait de fermer son port aux Anglais, et de chasser le ministre de l'empereur qui avait fomenté la rébellion des fiefs impériaux.

Mais les Génois ne prirent pas le change. Les collèges s'assemblèrent et se mirent en garde contre une surprise. Ils avaient en leur pouvoir l'artillerie française de Saint-Pierre d'Arena, et connaissant la faiblesse des moyens qu'on pouvait employer contre la ville, ils se préparèrent à faire résistance. Les revers des armées d'Allemagne avaient eu, en Italie, un effet moral qui équivalait à une diminution des forces de la France ; on y savait qu'elles n'étaient pas en réalité ce qu'il fallait pour garder i30 lieues de pays, quand Mantoue tenait encore, quand les Barbets organisaient une Vendée italienne, quand Rome prêchait la croisade, et ne remplissait pas les conditions de l'armistice, quand les succès des Autrichiens en Allemagne pouvaient leur permettre de faire descendre une troisième armée dans le Tyrol. Dans cet état de choses, lorsqu'on savait que le ministre des relations extérieures traitait lui-même à Paris l'affaire des Gênois avec Spinola, lorsqu'ils venaient de fermer leur port aux Anglais, lorsque l'arrêté du Directoire du 20 messidor avait trois mois de date et que tant d'événements majeurs avaient eu lieu depuis, devait-on tenter une entreprise aussi hasardée sans de nouveaux ordres exprès ou formels ? Faypoult pensait que ce serait courir le risque de compromettre la gloire de l'armée, de son général, et les intérêts de la République[15]. Bonaparte, qui avait mandé au Directoire que l'alliance avec Gênes ou Turin était nécessaire, n'eut pas de peine à se rendre à toutes ces considérations. Il pensa qu'au milieu de peuples en fermentation la prudence voulait qu'on se conciliât celui de Gênes jusqu'à nouvel ordre[16]. Il insista même encore pour qu'on traitât avant un mois avec Gênes ou Turin[17]. Cette résolution vint d'autant plus à propos que, dans ce moment, le Directoire concluait un traité avec cette république. Pour que les engagements contractés avec les Génois ne fussent pas violés, il se hâta d'en prévenir le général en chef qui lui répondit[18] : Je vous fais mon compliment du traité souscrit avec Gênes ; il est utile sous tous les rapports. Par ce traité, les ports de la république de Gênes restèrent fermés aux Anglais. Il ne pouvait plus leur être fourni ni vivres ni munitions ; dans le cas où ils lui déclareraient la guerre, elle devait être secourue par la France. Tous procès politiques étaient annulés, et les bannis rappelés ; la république s'obligeait à payer deux millions et à en prêter deux autres ; au moyen de quoi tous les griefs de la France étaient mis en oubli.

Tandis que le prince Pignatelli négociait la paix à Paris, le pape pressait la cour de Naples d'entrer dans la ligue dont il se faisait le chef en Italie. Elle répondit d'abord qu'elle ne le pouvait pas, parce qu'elle traitait sérieusement de la paix avec la France. Cependant, peu de jours après, cette cour qui n'avait aucune politique stable envoya à Rome le marquis Del Vasto pour conclure un traité d'alliance, et n'en continua pas moins ses négociations avec le Directoire. Elle n'avait en vue que de paraître redoutable pour obtenir de meilleures conditions, et elle accroissait l'apparence de ses forces par son union avec le pape[19]. En effet, le roi de Naples pouvait porter 25 à 30.000 hommes sur le Pô, en même temps que les Autrichiens auraient recommencé les hostilités ; il en serait résulté pour Bonaparte un surcroît d'embarras ; il désirait donc la paix avec cette puissance. Cependant si la circonstance de l'évacuation de la Méditerranée par les Anglais portait le Directoire à ne pas vouloir faire la paix, le général en chef conseillait d'amuser encore quelque temps le roi de Naples, et demandait dans tous les cas à être instruit de l'état des négociations, afin de pouvoir mettre la main sur les 2.400 hommes de cavalerie napolitaine qu'il ne perdait pas de vue[20]. Mais dans ce moment même le Directoire avait signé la paix. Le traité du 17 brumaire (7 novembre) rétablissait les rapports d'amitié entre les deux nations. Le roi de Naples n'accordait à la France que les droits dont les autres États jouissaient chez lui. Il s'engageait à rester neutre pendant la guerre. Un traité de commerce devait être conclu ; la paix était commune à la république batave.

Depuis l'armistice accordé au duc de Parme, on était satisfait de sa conduite. On n'avait pas encore fait la paix avec lui, et ses États étaient occupés par les Français ; mais la République étant alliée du roi d'Espagne, on se proposait de bien traiter un prince de sa maison. Bonaparte regardait son alliance comme d'un bon secours, et jugeait politique de lui donner le Mantouan à la paix générale. Il conseillait au Directoire de faire connaître cette intention à l'ambassadeur d'Espagne, pour que le duc de Parme en fût instruit, et que cela l'engageât à rendre des services à l'armée. Il ne lui paraissait point indifférent que le duc fournît un de ses régiments de 7 à 800 hommes, parce que cela rendrait un pareil nombre de Français disponibles, et que les habitants du duché regarderaient comme leur cause celle de la République. Il se proposait d'employer ce corps devant Mantoue, ou pour l'escorte des convois et des prisonniers, dont les Français s'acquittaient fort mal ; car sur 4.000 prisonniers, ordinairement il s'en sauvait mille, mais surtout à cause de la faiblesse des escortes. Le général en chef désirait aussi que le duc de Parme lui fournît un bataillon de pionniers fort de 800 hommes[21]. Le Directoire paraissait disposé à lui faire de grands avantages, mais il s'était fait un principe de ne rien changer, jusqu'au moment de la paix générale, à l'existence politique des États de l'Italie. Il fut d'avis d'ajourner la question du Mantouan, et il autorisa le général en chef à traiter avec le duc pour le contingent de troupes, sans prendre d'engagement pour une cession de territoire, et sans aucune garantie formelle[22].

Bonaparte ne perdait pas une occasion de témoigner au duc des égards et de la considération. Il se plaignit de quelques employés de l'armée ; le général en chef lui répondit[23] : L'intention du Gouvernement est de faire tout ce qui pourra être agréable à V. A. R. Elle me trouvera, dans toutes les circonstances, prêt à lui donner les secours et les forces dont elle pourrait avoir besoin. Si des employés de l'armée se conduisent mal, j'invite V. A. R. à les faire arrêter. Lorsqu'ils sont dans ses États, ils doivent s'y comporter avec la décence et le respect qui est dû à l'autorité du prince. Lorsque V. A. R. voudra m'en tenir instruit, je les ferai sévèrement punir. Il donna au commandant français à Plaisance l'ordre de se conduire en conséquence.

Un traité de paix fut conclu à Paris le 15 brumaire (5 novembre) entre le duc de Parme et la République sur la base de la neutralité ; le duc n'y fut pas mal traité ; il ne perdit rien ; la France n'obtint que quelques avantages commerciaux.

En approuvant l'armistice accordé par Bonaparte à la cour de Rome, le Directoire avait été d'avis de traîner en longueur la négociation de la paix, persuadé que de nouveaux succès militaires mettraient la République en situation d'imposer au pape des conditions plus favorables pour elle. Le Directoire avait exigé de lui, comme préalable, la déclaration que des ennemis communs ayant surpris à sa religion des brefs qui, par leurs principes, et leurs effets, étaient contraires aux droits des nations, il les désapprouvait et les révoquait. C'étaient des anathèmes contre la" République ses lois et les prêtres constitutionnels. Le pape convoqua une congrégation de cardinaux ; elle jugea qu'en conscience il ne pouvait faire cette déclaration sans quelques réserves pour la conservation de la foi. M. d'Azara et Cacault représentèrent en vain qu'il ne s'agissait que du temporel ; il fut décidé que le pape enverrait à Florence, près des commissaires du Gouvernement, un plénipotentiaire, M. Galeppi, pour obtenir la paix, et M. d'Azara fut prié de l'accompagner[24].

Les commissaires du Gouvernement présentèrent d'abord un traité en 60 articles comme sine qua non. Le général en chef ne fut point consulté pour cette négociation ; elle ne réussit pas. Le gouvernement papal, se croyant détruit et anéanti par le traité qu'on lui proposait, le rejeta en ces termes : Sa Sainteté, avec les conditions exprimées dans le traité envoyé par le Directoire, ne peut nullement entrer en négociation. Non-seulement les conférences furent rompues, mais la cour de Rome refusa d'exécuter l'armistice, sous prétexte que le Directoire avait déclaré qu'à défaut d'acceptation du traité tout rentrerait dans l'état de guerre. Le pape ne s'occupa donc plus que de mesures défensives, d'armements et d'alliances. Le paiement de la contribution de guerre, l'enlèvement des objets d'art furent interrompus ; seize millions qui étaient en marche pour être versés au trésor de l'armée retournèrent à Rome en triomphe, et les commissaires français chargés de recevoir les objets d'art sortirent de cette ville sous prétexte d'aller faire un voyage à Florence. Cependant la France s'en tenait à l'armistice ; son ministre continuait de rester à Rome. On ne faisait aucune démonstration hostile contre le pape ; et lui-même annonçait dans ses actes publics qu'il ne se regardait pas comme en état de guerre. Néanmoins il négociait une alliance avec Naples dont l'armée était sur les frontières de l'État romain, tandis que Naples, de son côté, continuait à Paris ses négociations, prête également à maintenir la paix ou à tenter les chances de la guerre, suivant les circonstances. Un homme, ennemi acharné de la France où il était né, maître et fléau de Naples, sa patrie adoptive, ministre et général, Acton, ourdissait ces intrigues et précipitait Rome et Naples vers leur ruine. A Rome, on échauffait les tètes par des discours, des mandements et des manifestes. On fanatisait le peuple par des prédications. Le cardinal Maury se distinguait dans ce genre de guerre. Les Français ne pouvaient rester à Ancône et à Civita-Vecchia. On provoquait des dons patriotiques pour la guerre ; on dépêchait des diplomates à Vienne ; les envoyés de France et d'Espagne étaient- fuis ou évités. On arrêtait, on incarcérait les individus suspects de favoriser les Français, et comme jacobins des gens de bon sens qui disaient que le pape courait à sa ruine[25].

Telle était la politique du pape et du roi de Naples réunis contre la France lorsqu'ils espéraient voir arriver les Autrichiens victorieux, divisés et se trahissant en secret pour traiter séparément avec la République lorsque Cet espoir les abandonnait et qu'ils avaient peur. Enfin le pape poussa le délire jusqu'à enjoindre par un manifeste expédié à toutes les cours, aux évêques, aux curés, aux magistrats, d'encourager les peuples à prendre les armes, et de les exciter encore par le tocsin. Bonaparte écrivit au pape[26] : J'ai l'honneur de communiquer à V. S. un manifeste qui circule dans la Romagne, afin de savoir s'il est officiel ou publié par les ennemis de la religion et de Votre Sainteté.

Le pape ne désavoua pas le manifeste ; mais il le représenta comme une simple mesure défensive que justifiait assez la crainte où il était que son refus de signer le traité qui lui avait été proposé ne. lui attirât la guerre. C'était par le même motif qu'il avait suspendu l'exécution de l'armistice.

Voulant bien attribuer les fautes essentielles qu'avait commises le cardinal Mattei, archevêque de Ferrare, aux circonstances difficiles et nouvelles pour lui dans lesquelles il s'était trouvé ; mais espérant réellement tirer parti de ce prélat pour amener la cour de Rome à des sentiments pacifiques, Bonaparte le renvoya dans son diocèse. Assurez, lui manda-t-il[27], tous les ministres du culte et les religieux des différentes congrégations de la protection spéciale que je leur accorderai, toutes les fois cependant qu'ils ne se mêleront pas des affaires politiques des nations.

On savait que le pape ne pouvait fournir à la coalition que 10.000 hommes de troupes les plus misérables ; mais il comptait sur 30.000 Napolitains. La brouillerie avec Rome était impolitique au moment où une armée autrichienne, commandée par Alvinzi, se rassemblait sur la Piave et dans le Tyrol. Bonaparte fut tellement piqué de ce contretemps et de ce qu'on l'avait laissé tout-à-fait étranger à cette affaire, qu'il donna sa démission au Directoire. La négociation avec Rome, lui écrivait-il[28], a été mal conduite ; il fallait, avant de l'entamer, qu'elle eût rempli les conditions de l'armistice. On ne devait pas surtout choisir l'instant où l'armée était dans le Tyrol. Il fallait avoir à l'appui un corps d'armée à Bologne. Cela nous coûte quinze millions dont une partie était déjà à Rimini, et tous les chefs-d'œuvre de l'Italie. Rome arme et fanatise les peuples ; son influence est incalculable. On a très-mal fait de rompre avec cette puissance ; cela tourne à son avantage. Si j eusse été consulté surtout cela, j'aurais retardé la négociation de Rome comme celle de Gênes et de Venise. Toutes les fois que votre général en Italie ne sera pas le centre de tout, vous courrez de grands risques. On n'attribuera pas ce langage à l'ambition ; je n'ai que trop d'honneurs, et ma santé est tellement délabrée que je crois être obligé de vous demander un successeur. Je ne peux plus monter à cheval ; il ne me reste que du courage, ce qui est insuffisant dans un poste comme celui-ci.

Persuadé d'avance que sa démission ne serait pas acceptée, Bonaparte n'attendait que le moment où les Anglais, chassés de Corse, auraient évacué la Méditerranée, pour prendre avec Rome un ton convenable. Il espérait obliger ces gaillards-là à restituer l'argent qu'ils avaient fait rétrograder[29].

Ce moment ne tarda pas à arriver. Bonaparte reçut, le même jour, la nouvelle que l'étendard tricolore avait été arboré en Corse. Le délire étrange du pays où vous êtes, manda-t-il à Cacault[30], ne sera pas long. Il y sera porté un prompt remède. Cette folie passera comme un rêve ; ce qui restera, ce sera la liberté de Rome et le bonheur de l 'Italie. Restez toutefois à votre poste. L'intention du Gouvernement est qu'on mette les gens dans leur tort.

En effet, d'après la paix avec Naples et avec Gênes, la bonne harmonie apparente qui régnait avec le roi de Sardaigne, la délivrance de la Corse et la présence de 18 vaisseaux de guerre et 10 frégates de la république française dans la Méditerranée, Bonaparte n'attendait plus que le moment de se lancer sur Rome et d'y venger l'honneur national. Sa grande affaire était de gagner du temps ; son intention était, lorsqu'il entrerait sur les terres du pape, de le faire en vertu de l'armistice, pour prendre possession d'Ancône, et de là il serait mieux en état d'aller plus loin, après avoir mis ordre à ses derrières. Enfin, écrivait-il à Cacault[31], le grand art est actuellement de jeter réciproquement la balle pour tromper le vieux renard.

Afin d'y parvenir plus sûrement, ou plutôt parce qu'il voulait sincèrement la paix ou qu'il croyait en avoir besoin, le général en chef se rendit à Ferrare le 30 vendémiaire, et descendit chez le cardinal Mattei, archevêque de cette ville, avec lequel il eut des conférences, et qu'il chargea d'aller porter au pape des paroles pacifiques. La mission du cardinal était tracée avec autant de dignité que de franchise dans cette lettre (30 vendémiaire) :

La cour de Rome a refusé d'adopter les conditions de paix que lui a offertes le Directoire ; elle a rompu l'armistice, et, en suspendant l'exécution des conditions, elle arme, elle veut la guerre, elle l'aura ; mais avant de pouvoir, de sang froid, prévoir la ruine et la mort de ces insensés qui voudront faire obstacle aux' phalanges républicaines, je dois à ma nation, à l'humanité, à moi-même, de tenter un dernier effort pour ramener le pape à des sentiments plus modérés, à son caractère et à la raison. Vous connaissez, monsieur le cardinal, les forces et la puissance de l'armée que je commande : pour détruire la puissance temporelle du pape, il ne faudrait que le vouloir ; allez à Rome, voyez le Saint-Père, éclairez-le sur ses vrais intérêts, arrachez-le aux intrigants qui l'environnent, qui veulent sa perte et celle de la cour de Rome. Le gouvernement français permet encore que j'écoute des négociations de paix ; tout pourrait s'arranger. La guerre, si cruelle pour les peuples, a des résultats terribles pour les vaincus ; évitez de grands malheurs au pape : vous savez combien je désire finir par la paix une lutte que la guerre terminerait pour moi sans gloire comme sans périls. Je vous souhaite, monsieur le cardinal, dans votre mission, le succès que la pureté de vos intentions mérite.

 

Instruit que le pape avait refusé le traité, le Directoire ne savait pas que la négociation était rompue ; il ordonnait donc à ses commissaires de la prolonger ; car quoique, fort de la paix qu'il avait conclue avec Naples, il crût pouvoir châtier l'opiniâtreté du pape, considérant d'un autre côté la prise de Rome comme une opération grande et délicate dans la situation des choses, il s'en rapportait au général en chef pour saisir le moment qu'il jugerait le plus favorable à cette expédition[32].

Pendant ce temps-là arrivaient ses plaintes et sa démission. Le Directoire, loin de lui nommer un successeur, lui donna le pouvoir plein et exclusif de négocier et conclure avec Rome un nouvel armistice, et même d'arrêter les articles d'un traité de paix, et l'autorisa de nouveau, dans le cas où le pape s'y refuserait, à marcher sur Rome pour s'en emparer, toutefois après que Naples aurait ratifié son traité de paix et qu'on serait assuré de sa neutralité[33].

Jusqu'ici on avait vu. Bonaparte, dans des proclamations à son armée, annoncer hautement la liberté à Rome, et la vengeance au Vatican, et, dans sa correspondance, tantôt prédire la ruine du gouvernement papal, tantôt jaloux de le sauver par la paix. Ce dernier sentiment prévalut chez lui dès que le Directoire lui eut donné de pleins pouvoirs. Le guerrier qui s'attaquait avec audace aux formidables armées de grands rois ne pouvait se résoudre à combattre le chef de l'Église que d'un souffle il pouvait renverser. Le pape n'était pas vaincu après la défaite de ses méprisables soldats ; ce n'était pas là que résidait sa puissance. Bonaparte en était convaincu, et, dès ce moment comme pendant le cours de sa vie, il chercha à se concilier un ennemi sur lequel il n'espérait pas obtenir un triomphe durable par la force des armes. Il chargea donc Cacault de faire des ouvertures au cardinal secrétaire d'état, et de se servir du cardinal Mattei pour parler directement au pape ; de lui signifier que le général en chef était chargé par le Directoire de terminer toute espèce de différend, soit par une nouvelle négociation, soit par les armes. Il offrait au Saint-Père un moyen honorable de sauver encore son honneur et le chef de la religion. Vous pouvez, ajoutait-il[34], l'assurer de vive voix que j'ai toujours été contraire au traité qu'on lui a proposé, et surtout à la manière de négocier. J'ambitionne bien plus d'être le sauveur du Saint-Siège que d'en être le destructeur. Vous savez vous-même que nous avons toujours eu des principes conformes, et, moyennant la faculté illimitée que m'a donnée le Directoire, si l'on veut être sage à Rome, nous en profiterons pour donner la paix à cette belle partie du monde, et tranquilliser les consciences timorées de beaucoup de peuples.

Dans le fond, Cacault ne voulait pas la ruine du chef de l'Église ; mais prenant trop à la lettre les intentions hostiles de Bonaparte, et fatigué de la politique insidieuse de Rome, il voulait dépouiller le pape de ses États. Suivant lui, ils se prêtaient à une subdivision en trois républiques : celle de Bologne et Ferrare ; celle de Pérouse avec la Romagne ; et celle de Rome jusqu'à la Méditerranée. Cela pouvait se faire en laissant le pape, chef de l'Église universelle, résider où il voudrait, comme prêtre avec sa cour de prêtres, et comme pontife de la manière dont 'il résidait à Rome, avant qu'aucune donation des Français l'eût rendu souverain d'un territoire. L'établissement de la liberté et de bonnes républiques depuis Milan jusqu'au royaume de Naples, était sans doute ce qui pouvait le mieux assurer les intérêts de la France en Italie, et contenir d'un côté le roi de Naples, et l'Allemagne de l'autre[35]. Ce rêve, qu'il ne serait pas orthodoxe d'appeler celui d'un homme de bien, fut aussi celui de Napoléon lorsqu'il fut parvenu à la suprême puissance.

Il était notoire que Naples avait fait sa paix avec la République, et la cour de Rome l'ignorait, ou feignait peut-être de ne pas le savoir, attendant toujours son salut de la cour de Vienne qui, comme le roi des Deux-Siciles, se jouait de sa crédulité. Il est curieux de voir, dans la lettre suivante de M. d'Azara au cardinal secrétaire d'état, l'obstination aveugle du pape et de ses conseils, et le ton plaisant de bonhomie avec lequel cet ambassadeur s'efforçait de les éclairer sur leurs dangers.

Je ne conçois pas, écrivait-il (1er brumaire), comment jeudi vous ignoriez la conclusion de la paix de Naples que je vous ai tant prédite. Je ne devrais pas donner ces nouvelles à un ministre qui n'a pas la faculté d'entrer en explication avec un pauvre pestiféré ; mais mon cœur est faible et aime ses amis, même lorsqu'ils sont ingrats, parce qu'il les suppose trompés et disposés à s'éclairer.

Je suis très-obligé au pape de la lettre qu'il m'a écrite ; je vois que, malgré la mauvaise influence, il conserve de l'amitié et de la bonté pour moi. Faites-moi le plaisir de le remercier beaucoup de ma part, et assurez-le que je suis bien loin de l'exposer au désagrément que pourrait lui donner mon retour à Rome. Je sais ce dont sont capables de sots frénétiques : ils peuvent faire brûler le palais d'Espagne, détruire mes meubles, et se livrer à tous les excès à mon égard ; mais ils ne parviendront jamais à troubler la paix de ma conscience, qui est pure, et qui croit mériter l'estime : et non des proscriptions.

Je ne dois pas m'ériger en conseiller, lorsque, vous en avez tant ; mais pour dernier testament de l amitié je vous dirai qu'un moment peut vous sauver, moyennant, quelque sacrifice ; mais, le moment passé, la ruine sera entière. Si la défiance dans vos forces, si vos armements vous rassurent, conclamatum est !

Mettez-moi aux pieds de Pie VI, et assuriez-le que je suis son ami et hon son adulateur. Pour vous, éminentissime secrétaire, j'aurais bien envie de vous battre, et ensuite de manger une dinde aux truffes avec vous. Adieu. Je vous donne ma bénédiction.

 

Le pape reçut d'abord fort mal le cardinal Mattei, parce qu'il avait une mission pacifique ; mais le Saint-Père changea de ton quand il sut que le roi de Naples avait ratifié son traité de paix avec la République. Alors les Romains accusèrent Naples de perfidie et de trahison. D'un autre côté, le roi d'Espagne, dont le pape avait sollicité la médiation, tout en protestant de son attachement au Saint-Siège, répondit qu'il ne pouvait pas se mêler de ses affaires temporelles et qu'il lui conseillait de v prendre le parti le plus prudent et le plus sûr. Rome se trouva donc abandonnée à elle-même au milieu des vaines fureurs qu'elle avait déchaînées.

 

 

 



[1] Lettre du 17 vendémiaire (8 octobre).

[2] Lettre du 5e jour complémentaire, an IV (21 septembre).

[3] Lettre du 5e jour complémentaire, an IV (21 septembre).

[4] Lettre du 4e jour complémentaire, an IV (20 septembre).

[5] Lettre de Bonaparte au Directoire, 11 vendémiaire an V (2 octobre).

[6] Lettre du 20 vendémiaire (11 octobre).

[7] Lettre à Poussielgue, 4 brumaire (25 octobre).

[8] Montholon, tom. III, page 420.

[9] Lettre du Directoire à Bonaparte, 1er nivôse (21 décembre).

[10] Lettre du Directoire à Bonaparte, 18 nivôse (7 janvier 1797).

[11] Lettres du Directoire, 11 et 24 vendémiaire, an V (2 et 15 octobre).

[12] Lettres des 26 vendémiaire et 7 brumaire an V (17 et 28 octobre).

[13] Lettre de Bonaparte au Directoire, 11 vendémiaire an V (2 octobre).

[14] Lettre de Bonaparte au Directoire, 11 vendémiaire an V (2 octobre).

[15] Lettre de Faypoult à Bonaparte, 16 vendémiaire (7 octobre).

[16] Lettre du Directoire, 17 vendémiaire (8 octobre).

[17] Lettre au Directoire, 20 vendémiaire (11 octobre).

[18] Lettre du 3 brumaire (24 octobre).

[19] Lettres de Cacault à Bonaparte, 15, 16, 19, 20 vendémiaire an V (6, 7, 10, 11 octobre).

[20] Lettre du 28 vendémiaire (17 octobre).

[21] Lettre du 11 vendémiaire (2 octobre).

[22] Lettre du 20 vendémiaire an V (11 octobre).

[23] Lettre du 11 brumaire an V (1er novembre).

[24] Lettre de Cacault à Bonaparte, 12 fructidor (29 août).

[25] Lettres de Cacault à Bonaparte, 3, 8, 9, 15, 16, 19 vendémiaire (24, 29, 30 septembre, 6, 7, 9 octobre).

[26] Lettre du 15 vendémiaire (6 octobre).

[27] Lettre du 14 vendémiaire an V (5 thermidor).

[28] Lettres des 11 et 17 vendémiaire an V (2 et 8 octobre).

[29] Lettre au Directoire, 26 vendémiaire an V (17 octobre).

[30] Lettre à Cacault 26 vendémiaire an V (17 octobre).

[31] Lettre du 3 brumaire an V (24 octobre).

[32] Lettre du 24 vendémiaire an V (15 octobre).

[33] Lettre du 27 vendémiaire an V (18 octobre).

[34] Lettre du 7 brumaire (28 octobre).

[35] Lettre de Cacault à Bonaparte, 8 brumaire (29 octobre).