Les rapports de l’État romain avec les États qui possèdent l’autonomie dépendante rentrent dans le domaine des relations extérieures et ils ne s’en distinguaient sans doute pas à l’époque ancienne. En ce sens, ils ont été compris dès le principe dans la sphère d’action du sénat, dont l’autorité sur les relations extérieures a déjà été exposée. Lorsque plus tard l’alliance de Rome d’abord avec le Latium, puis avec l’Italie, et enfin avec les États extra-italiques qui n’étaient pas sujets se transforma en hégémonie et l’hégémonie elle-même en gouvernement, le gouvernement des États compris dans l’empire, quoique constituant en fait une partie de l’administration intérieure, resta néanmoins théoriquement compris dans le département des relations étrangères, et par conséquent dans la compétence du sénat et de ses présidents. Les consuls qui avaient quitté Rome et par suite la présidence du sénat, les préteurs qui exerçaient des fonctions hors de Rome en Italie ou dans les provinces, étaient, par rapport aux États autonomes qui faisaient partie de l’empire[1], en Italie ou au dehors, dans la situation de généraux et de gouverneurs d’une puissance amie. Lorsqu’il s’agissait exclusivement de l’exécution des traités, par exemple de la fourniture des contingents, ils pouvaient se mettre en relations directes avec les cités dépendantes. Mais l’immixtion des Romains clans le gouvernement des cités autonomes consiste pour une bonne part en empiètements allant au delà des traités, c’est-à-dire en mesures extraordinaires, qui impliquent la coopération du sénat. La soumission des cités fédérées, en particulier de celles d’Italie, non pas, comme les citoyens et les sujets, aux différents magistrats romains, mais directement au pouvoir central de Rome était une des assises du gouvernement du sénat[2]. Lorsque ce fut modifié pour l’Italie à la suite de la guerre sociale, on ne fut plus également bien loin de cette émancipation de la magistrature en face du sénat qui a finalement conduit au Principat. Nos sources ne nous donnent pas une vue suffisante des innombrables et diverses relations distinctes qui doivent nécessairement avoir existé entre la puissance souveraine et les cités fédérées dans le sein de la confédération italique, notamment pendant la période qui va de la guerre contre Pyrrhus à la guerre sociale. Nous devons exposer ici, dans la mesure de nos connaissances, en ce qui concerne le sénat, les différences qui existent entre les États autonomes faisant partie de l’empire et les États pleinement indépendants ; en particulier, les modifications apportées au droit d’échanger des ambassadeurs pour les cités dépendantes ; leur droit de se plaindre à la puissance suzeraine des torts qui leur sont faits, qu’ils viennent du côté de Rome ou de l’extérieur ; les plaintes adressées par d’autres États à la puissance suzeraine à raison des actes de la cité autonome ; l’échange de bons offices fédéraux ; l’intervention des Romains dans les dissensions intestines de la cité fédérée ; les plaintes et les interventions des Romains motivées par l’infraction au traité ; l’immixtion des Romains dans l’administration intérieure de la cité alliée ; l’interprétation et la limitation par la puissance suzeraine de l’autonomie accordée par elle. — Nous y réunirons les quelques remarques qui peuvent être faites sur les relations du sénat et des cités italiques de citoyens. Leur pseudo-autonomie se rapproche quant aux résultats de l’autonomie véritable. Sans doute l’autorité du gouvernement romain n’était pas la même en Italie sur les cités de citoyens que sur les cités fédérées, et elle était plus forte sur les premières que sur les secondes : non seulement la juridiction propre des cités de citoyens était limitée ; même au point de vue administratif, les consuls et le sénat doivent nécessairement avoir sur elles, en droit, les mêmes pouvoirs que les gouverneurs sur les cités de citoyens des provinces[3]. Mais, en fait, les consuls et le sénat restreignent infiniment moins l’indépendance des cités de citoyens que les gouverneurs ne font dans lies provinces ; leurs magistrats et leur sénat administrent en Italie leurs affaires intérieures à peu près comme feraient ceux de cités autonomes. Et par conséquent c’est ici qu’il convient d’étudier l’autorité administrative supérieure exercée par les consuls et le sénat sur les villes de citoyens. 1. Nous avons déjà remarqué que les cités autonomes appartenant à l’empire ne jouissent pas, sur le pied d’égalité qu’impliquerait l’institution, du droit international d’échanger des ambassadeurs avec Rome fondé sur l’autonomie. Le gouvernement romain reçoit bien des ambassadeurs de l’État dépendant ; mais en règle, il ne lui en envoie pas[4]. Il se procure les informations dont il a besoin, non pas exclusivement[5], mais habituellement, en citant à Rome (evocatio) les personnes qu’il convient[6], selon les cas, des hommes isolés, ou dans les monarchies dépendantes, le prince, dans les villes dépendantes, les autorités[7], pour fournir les renseignements nécessaires au magistrat et éventuellement au sénat. Cette façon de procéder a un double résultat : elle accentue la dépendance en évoquant au siège de la puissance suzeraine toutes les affaires existant entre elle et la cité dépendante ; elle restreint l’influence des commissions du sénat et elle réserve la décision à son assemblée plénière dans une mesure plus large que ne le permet l’envoi d’ambassades chargées de prendre des informations. Les représentants des cités autonomes italiques ainsi appelés à Rome pendant la guerre d’Hannibal ne furent pas reçus par le sénat et furent même internés à Rome en attendant la livraison des fournitures demandées aux villes : les deux actes constitueraient, dans les relations internationales proprement dites, une violation du droit des gens ; mais, en présence de la condition hybride des villes italiques, il n’y avait là exclusivement qu’une action sévère contre des membres coupables de l’État ; de même la défection de la ville autonome italique de Fregellæ ne fut pas considérée comme l’explosion d’une guerre proprement dite, mais comme une insurrection civile[8]. — Nous avons déjà noté que l’honneur accordé aux ambassadeurs de s’asseoir dans les fêtes parmi les membres du sénat fut retiré, sous le Principat, à ceux des villes de l’empire. Le droit d’échanger avec Rome des ambassadeurs ne peut pas plus avoir appartenu, au sens propre, aux cités italiques de citoyens quo le droit de paix et de guerre. Ni la protection spéciale accordée par le droit des gens aux ambassadeurs[9], ni le logement gratuit, ni les présents d’hospitalité[10] ne s’accordent avec la condition des villes non autonomes, que ce soient des cités de citoyens ou des cités sujettes. En revanche, les cités non autonomes ne peuvent avoir été dépourvues du droit d’adresser au gouvernement des communications par des représentants députés dans ce but, le gouvernement ne peut pas non plus l’avoir été de celui d’appeler devant lui des représentants de ces cités ; et les deux choses se sont souvent produites pour les cités italiques de citoyens. Du temps de la République, ces députations étaient en général envoyées au sénat[11]. La dyarchie du Principat s’exprime dans le fait que les députés envoyés des villes italiques paraissent légalement devant le sénat, dans le domaine administratif duquel l’Italie est comprise au sens propre[12], mais qu’ils sont également reçus par le prince en vertu de sa haute autorité administrative concurrente[13]. 2. Lorsque une cité ou une principauté faisant partie de l’empire a été lésée du fait des Romains, non seulement les voles de droit lui sont ouvertes, si la lésion peut donner lieu à une pareille poursuite, mais elle peut aussi adresser une plainte au sénat ; cette plainte n’est à la vérité correcte que dans les cas où la protection judiciaire de droit commun ne peut s’appliquer ou ne suffit pas, ce qui ne se présente guère pour les dommages causés par un non magistrat[14]. Pour le surplus, le droit de plainte n’est pas limité légalement et il peut être exercé contre tout magistrat, même durant ses fonctions[15]. On peut par cette voie aussi bien formuler toute autre plainte qu’en particulier réclamer contre la violation des droits d’autonomie de la cité réclamante, par exemple de ses immunités en matière de garnison[16] et d’impôt[17]. — La cité qui fait partie de l’empire peut se plaindre au sénat, dans les mêmes formes, d’un autre État également compris dans l’empire ou indépendant ; au second cas, c’est d’autant plus naturel que la cité dépendante s’est dépouillée au profit de Rome de son propre droit de porter les armes[18]. — Si à l’inverse l’État qui fait partie de l’empire est accusé d’une violation du droit soit par une cité romaine de, citoyens ou de sujets, soit par un État de l’empire ou de l’extérieur, on peut également, outre la voie judiciaire devant les tribunaux propres de l’État accusé[19], prendre celle de la plainte au sénat. Ln ce sens, le gouvernement romain doit répondre de tous les actes des États qui sont dans sa dépendance, c’est-à-dire ou les réparer ou en prendre la responsabilité l’indépendance du royaume de Numidie par rapport à Rome a été prononcée par un plébiscite afin de couper court aux réclamations des États voisins[20]. — Le gouvernement romain remplit en pareil cas les fonctions d’arbitre[21] ; si la cité indépendante mêlée à l’affaire ne se soumet pas à sa décision, c’est un cas de guerre. La décision doit avoir été rendue par le sénat lui-même, lorsque cela a été possible[22] ; cependant il peut déléguer cette fonction, et le règlement des contestations de limites est en général renvoyé à des magistrats appropriés[23] ou même, puisqu’un arbitrage n’est pas un véritable acte de judicature, à des particuliers[24]. — Le sénat peut aussi intervenir comme arbitre entre deux cités de citoyens, et il l’a encore fait entre des cités italiques de ce genre sous Néron, mais après que l’empereur saisi la premier lui eut renvoyé l’affaire[25]. 3. Des bons services d’alliance amicale n’ont pas manqué d’être demandés de part et d’autre. En présence de calamités publiques, la puissance suzeraine est sûrement venue au secours des villes atteintes plus de fois que ne nous le rapportent nos sources[26]. En sens inverse, le sénat a aussi réclamé leur assistance et il l’a fait plus d’une fois sur le ton d’un mandat impératif. Telles sont les invitations à participer aux fêtes générales de supplication ou d’actions de grèse célébrées pour la ligue commune des villes italiques[27], et surtout les demandes de se charger de la garde des prisonniers de guerre qu’on ne désirait pas incarcérer dans les prisons romaines[28]. C’est dans la même forme que le culte de Bakchos fut, en 563, interdit dans toute l’Italie avec cette réserve que l’autorisation spéciale d’y procéder devrait cure demandée au sénat de Rome, également de toute l’Italie, semble-t-il[29]. C’est dans cette forme que la défense des sacrifices humains fut pareillement rendue pour l’Italie par le sénat, en 657[30]. Les comices, qui auraient pu légalement sanctionner de telles dispositions, n’ont probablement pas été consultés parce qu’on avait de bonnes raisons d’hésiter à les mêler à la police religieuse. 4. L’intervention du sénat peut être sollicitée au cas de discordes survenues dans le sein d’une ville fédérée. Les autorités constituées et en outre les personnes liées à Rome par une relation personnelle d’amitié ont en principe seules qualité pour la demander. Mais, en face de discordes intérieures, le sénat doit avoir tranché la question de qualité d’après les circonstances politiques de fait et avoir, le cas échéant, admis devant lui même des personnes isolées des cités alliées, quoique d’ailleurs il n’ait certainement pas écouté tous les individus qui pouvaient être mécontents de leurs autorités locales[31]. On ne doit guère avoir refusé d’écouter les localités attribuées, lorsqu’elles avaient des plaintes à formuler contre leur chef-lieu. En général, le sénat déléguait, pour aplanir ces différends, des commissaires désignés par lui, fréquemment les Romains de distinction auxquels leurs droits héréditaires de patronat donnaient sur la ville dont il s’agissait une sorte de juridiction domestique[32]. Lorsque les circonstances l’ont rendu nécessaire, l’ordre a été rétabli par les armes[33]. — Les villes italiques ont encore déféré de telles affaires au sénat sous le Principat[34]. 5. La puissance suzeraine a qualité pour faire des représentations à la cité fédérée qui ne se conduit pas conformément au traité et pour en demander compte soit à la cité elle-même, soit à chacun de ses citoyens. En général, ce pouvoir compris dans l’hégémonie du sénat est exercé par les magistrats sur son mandat. Le fondement de cette intervention est dans le principe que la cite alliée qui viole son traité, ou pareillement celui quelconque de ses citoyens qui le viole peut être traité comme un ennemi par les Romains. La discussion du point de savoir si le traité a été violé se rapproche fréquemment d’une procédure criminelle ; mais c’est une procédure administrative qu’il y a là[35], et les maux qui sont infligés aux cités ou aux particuliers regardés comme plus ou moins coupables de violation du traité ne sont pas, au point de vue juridique,des peines, mais des molestations telles que celles auxquelles on peut recourir administrativement contre les non citoyens, en progressant du simple blâme jusqu’à l’imposition de contributions extraordinaires, à la destruction de la ville et au meurtre des adversaires, conformément au droit de la guerre. La forme la plus douce dans laquelle ce droit d’hégémonie puisse être exercé en face de la cité autonome dépendante est celle de la réprimande[36], pour recevoir laquelle les représentants de la ville peuvent, ainsi que nous avons déjà remarqué, être appelés à Rome et cités devant le sénat, si toutefois elle n’envoyait pas des ambassadeurs à Rome pour la justifier sans attendre une convocation en forme, comme c’était sans doute en fait l’habitude. — Mais on ne s’en tient pas aux blâmes et aux excuses. Lorsque, durant la guerre d’Hannibal, un certain nombre de cités italiques de droit latin refusèrent l’envoi des contingents qu’elles devaient, les Romains regardèrent cette violation évidente des devoirs produits par l’alliance comme anéantissant cette dernière ; car ils ne se contentèrent pas de réclamer en sus d’autres contributions majorées à leur gré ; ils restreignirent essentiellement et définitivement l’autonomie des cités coupables[37]. La jonction accomplie ou projetée de la cité alliée à une puissance en guerre avec Rome, et en général toute tentative d’elle-même ou de citoyens isolés pour se détacher de la puissance souveraine et rétablir son indépendance[38] légitimaient, de la part de Rome, dans la conception romaine, soit les mesures de précaution autorisées par le droit de la guerre, en particulier la demande d’otages[39], soit la déclaration que l’alliance est dissoute et l’application dans toute la rigueur des lois de la guerre, selon lesquelles l’État ennemi était voué à la destruction et chacun de ses citoyens à la hache du bourreau[40]. En face des droits extrêmes que le gouvernement romain avait ainsi contre la cité infidèle au traité, sans distinguer ni entre les personnes ni selon la gravité des fautes, et toujours d’après son appréciation unilatérale, l’usage qu’il en a fait en pratique peut communément, ainsi que font les Romains, être désigné comme l’exercice d’un droit de grâce. La question du traitement à infliger à une cité alliée coupable ou soupçonnée de défection n’a jamais été soumise aux comices[41]. Mais généralement le magistrat ne statue pas non plus seul en pareil cas[42]. C’est le gouvernement de Rome qui prescrit les informations nécessaires d’après les circonstances[43] et qui rend la décision définitive. Ou bien les consuls et le sénat rendent aux villes leur droit d’alliance[44] et ils peuvent, le cas échéant, restreindre en même temps leur territoire[45] ou leurs droits. Ou bien ils le leur refusent, comme c’est arrivé ; après la guerre d’Hannibal, pour les villes du Bruttium. Les instructions ainsi faites ont toujours un caractère individuel ; il dépend du gré de la puissance suzeraine de décider si la cité elle-même doit être considérée comme complice et être punie en cette qualité[46] : mais les citoyens qui n’ont pas pris part à l’acte incriminé et qui se sont retirés à la suite de cet acte restent toujours indemnes[47], tandis que le droit de la guerre suit son cours contre ceux qui ont amené ou médité la violation de traité[48]. La procédure ainsi dirigée contre les personnes isolées ne se distingue en rien de la procédure capitale ordinaire suivie contre les non citoyens[49], et par suite le sénat en charge communément non pas des commissaires, mais les magistrats. Des faits analogues se sont produits pour les cités de citoyens, notamment pour celles munies du demi-droit de cité ; ainsi par exemple leurs magistrats sont appelés devant le sénat pour y recevoir des remontrances[50]. Mais légalement elles ne sont pas traitées de la même façon. Si leurs membres qui ont abandonné Rome[51] ou sont suspects de l’avoir fait[52] sont traités selon les lois de la guerre, il en est de même pour tous les autres citoyens. Quant à la collectivité, le sénat peut lui imposer des déchéances convenables, par exemple, déterminer comme il veut la résidence de ses membres[53] ; mais les comices seuls peuvent leur enlever le droit de cité. 6. La puissance suzeraine ne s’immisce pas dans les affaires intérieures des cités appartenant à l’empire ; c’est de l’essence de l’autonomie dépendante, comme le contrôle exercé par elle sur l’accomplissement des devoirs fédéraux et le maintien par ses soins de la fidélité des alliés. Le gouvernement romain a en général respecté ce principe, surtout dans l’administration de l’Italie ; il y a bien provoqué à sa guise des remaniements de l’organisation intérieure au moment de la conclusion du traité ; mais il l’a ensuite respectée telle qu’elle était. La sûreté publique de la péninsule a donc été confiée aux villes fédérées, chacune dans son étroit territoire, et il n’y a pas eu légalement à ce point de vue d’autorité administrative supérieure jusqu’à la guerre sociale. En conséquence, les crimes qui mettaient la sûreté publique en danger par leur généralité et leurs ramifications, les associations religieuses d’une couleur criminelle, les empoisonnements, les vols de grands chemins, ne pouvaient être convenablement réprimés par les autorités compétentes. En particulier, lorsque en pareille occasion des mesures administratives extraordinaires revêtant plus ou moins la forme de poursuites criminelles étaient prescrites dans le territoire de Rome, toujours par le sénat, il a sans doute été plus d’une fois absolument nécessaire d’agir de mémé dans les territoires confédérés. On doit avoir d’abord prié les différentes villes alliées de faire usage de leur juridiction dans ce sens. Mais de pareilles invitations n’étaient pas des remèdes suffisants au défaut d’unité et à énergie. Aussi le gouvernement romain a-t-il adopté l’opinion, commode au moins pour lui, selon laquelle de pareils crimes considérés comme des menées dirigées contre l’hégémonie romaine peuvent être assimilés par le sénat aux crimes politiques, la pseudo-justice, qui est, dans les derniers crimes, appliquée aux individus, étant, même dans ces crimes non politiques, exercée par les détenteurs romains de l’imperium[54]. 7. Le pouvoir d’aggraver les obligations qui pèsent sur un État autonome, ou de restreindre ses droits, ou à plus forte raison de lui enlever l’autonomie qui lui a été une fois concédée[55] appartient aux comices, en tant qu’ils possèdent ou tout au moins revendiquent le pouvoir législatif par rapport aux cités latines et aux cités italiques en général ; il n’appartient pas au sénat[56]. Mais le sénat tranche en dernier ressort les doutes soulevés sur l’étendue des prestations dues par les cités autonomes[57] et en général sur les conditions de leur alliance[58]. Il statue également sur les droits des cités italiques de citoyens[59]. Le sénat est, pour partie, autorisé par la loi même qui les concède à suspendre à titre isolé les droits accordés : nous en avons un exemple relativement à la dispense de recevoir des troupes romaines en quartier d’hiver, mais il en est ainsi même lorsque cela n’est pas spécifié dans le titre, et le sénat a, par exemple, étendu de cette façon la juridiction du gouverneur à des villes autonomes[60]. Ici aussi l’on peut affirmer que les lignites de la prière fondée sur l’alliance amicale et de l’ordre basé sur l’hégémonie se confondent sous plus d’un rapport. |
[1] Pour l’administration de l’Italie, il est indifférent, en droit public, qu’il existe ou non des commandements militaires romains, et il est encore plus indifférent que ces commandements se trouvent actuellement ici ou là, que les deux consuls ou un seul ou aucun commande en Italie, qu’il y ait ou qu’il n’y ait pas là de commandement prétorien à côté du leur. L’existence d’un commandement effectif, d’une armée, n’est pas légalement nécessaire. Dans la période ancienne, il n’y en avait pas durant les mois d’hiver et il n’y en a que par exception en Italie dans la période postérieure à Sulla. Le droit potentiel au commandement, qui existe toujours, le droit de former l’armée, réside, quand il n’y a pas de commandement effectif, dans la magistrature supérieure de Rome et se transforme immédiatement, en cas de besoin, en commandement effectif. La terminologie romaine, dans laquelle provincia désigne primitivement le commandement d’une armée et plus tard un département judiciaire d’outre-mer, obscurcit la compréhension exacte d’institutions en elles-mêmes parfaitement claires ; il serait avantageux de s’habituer à traduire provincia Ligures par commandement de l’armée de Ligurie et provincia Sicilia par gouvernement de la Sicile.
[2] Voir le tableau des moyens d’action du sénat décrit par Polybe, 6, 13.
[3] La compétence administrative appartenant au gouvernement de Rome sur les cités italiques de citoyens doit nécessairement s’être étendue très loin. Nous connaissons, au temps de l’Empire, des ordonnances de blâme (Tacite, Hist. 4, 25), des interventions militaires (Tacite, Ann. 13, 48), des dissolutions d’associations illégales (Tacite, Ann. 14, 17), des interdictions de certains jeux pour une série d’années (loc. cit.), auxquelles s’adjoint encore l’autorité judiciaire attribuée au sénat sous le Principat en matière criminelle (Tacite, Ann. 13, 48. 14, 17. Hist. 4, 45). Le sénat de la République se serait difficilement comporté de la sorte à l’encontre d’une cité fédérée, et, en le faisant, il aurait commis une usurpation, tandis que les décisions rapportées ne sont que l’exercice du gouvernement.
[4] C’est pourquoi Polybe, 6, 13, ne fait figurer les ambassades du sénat qu’à l’extérieur de l’Italie.
[5] On rencontre des ambassades de Rome envoyées à des villes italiques, quand les Romains formulent une prière et non pas un ordre, par exemple celle envoyée aux Tiburtins pour leur demander la restitution des musiciens mutinés (Tite-Live, 9, 30, 6 ; le peuple ne figure pas dans l’autre version Plutarque, Q. R. 55, et Ovide, Fast. 6, 651 et es.) ; mais elles sont rares et ont dû le devenir de plus en plus dans le cours du développement.
[6] Ce droit de citation à Rome est un criterium de la sujétion. Il est assurément issu de la condition transitoire des vaincus. Lorsque après la défaite de Persée, la commission romaine fit inviter les hommes les plus considérés de la Grèce à se présenter devant les tribunaux romains pour qu’une instruction fût faite sur leur participation à la guerre (Polybe, 30, 43, 6 ; Tite-Live, 45, 31, 9), les Hellènes étaient sujets (Pausanias, 7, 16, 10) ; lorsque César cita devant lui les frère et sœur royaux d’Égypte pour statuer sur leurs prétentions au trône, l’Égypte était sujette (César, B. c. 3, 108). Quand ce droit de citation devient stable, le vaincu se transforme en sujet.
[7] Tant que la confédération latine existe, ses deux préteurs et les decem primi de son conseil sont appelés à Rome ; après sa dissolution, on appelle pour chaque ville ses magistrats supérieurs et les dis premiers membres de son conseil (Tite-Live, 29, 15, 5). César, B. c. 1, 35 (cf. Strabon, 4, 1, 5, p. 179). Suétone, Tib. 32.
[8] V. tome I, la théorie du Commandement militaire, sur le bellum justum comme condition du triomphe.
[9] Ce n’est pas sans raison que Cicéron fait ressortir, De har. resp., 16, 31. 35, relativement an crime commis contre les ambassadeurs des gens de Chios et d’Orestis, la liberté des deux cités.
[10] Si, au temps de Plutarque, Q. R. 43, qui le sait certainement par expérience personnelle, l’Ærarium de Rome ne fournit plus les ξένια, ύπό πλήθους τών άρικνουμένων, le motif donné est difficilement exact, ou tout au moins il n’est pas le seul ; ils n’étaient pas dus légalement aux envoyés d’États non autonomes.
[11] A la vérité, les cités de citoyens italiques ont aussi envoyé leurs représentants ailleurs sur la demande du consul. Ainsi par exemple le consul Antoine en Campanie evocavit litteris e municipiis decem primos et IIII viros (Cicéron, Ad Att., 10, 13, 1).
[12] Le conseil communal de Puteoli, d’une part, et la plèbe, de I’autre, envoient respectivement des représentants au sénat avec des plaintes réciproques (Tacite, Ann. 13, 18). Le sénat cite devant lui des députés à la suite des mauvais traitements subis par un sénateur dans la ville étrusque de Senia (Tacite, Hist. 4, 45 ; cf. tome III, la théorie du Consulat, sur la juridiction criminelle des consuls de l’empire). A l’occasion de la régularisation du cours du Tibre, une série de villes italiques portèrent leurs plaintes au sénat (Tacite, Ann. 1, 79).
[13] Néron renvoie au sénat les Nucerini qui lui portent leurs plaintes contre les gens de Pompéi (Tacite, Ann. 14, 17 ; cf. tome III, la théorie du Consulat, sur les consuls comme instance d’appel).
[14] Les cités n’ont guère formulé de plaintes devant le sénat romain contre d’autres actes que contre ceux accomplis par des magistrats de Rome ou des délégués de Rome. Si les députés de la ville libre d’Apollonidea se plaignent au sénat d’un marchand romain établi chez eux (Cicéron, Pro Flacco, 32, 79), la demande tend malaisément à une intervention contre le particulier, d’autant plus que tout ce que le sénat pourrait faire en pareil cas, ce serait d’inviter le magistrat devant qui devrait être formée l’action à faire son devoir. Théoriquement le droit de plainte au sénat peut n’avoir pas été limité ; mais sûrement il n’avait d’effet que lorsque le droit d’agir n’existait pas ou n’était pas efficace. Si l’on ne pouvait obtenir justice par les voies légales, la plainte était formée contre le magistrat en jeu pour déni de justice.
[15] Lorsque le préteur M. Furius désarme les Cénomans en 507, ceux-ci se plaignent au sénat, qui, après avoir fait instruire l’affaire par le consul, leur donne raison et enlève son département au préteur. Dans un autre cas, lors des mauvais traitements infligés aux Statielli par le consul M. Popillius en 581, le sénat intervient sans réclamation des victimes (Tite-Live, 42, 7).
[16] Une application dans Tite-Live, 32, 2, 5.
[17] Parmi les plaintes contre les fermiers des impôts citées dans le chapitre Règlement des travaux du Sénat, § IV, notes 64 et 65, on peut rattacher à cela celle de la ville autonome de Tyros et peut-être celle des Oropiens en considération de l’ami du peuple romain qui conduit leur ambassade. Cependant Adramytion, quoique étant une ville sujette, a adressé une plainte semblable au sénat.
[18] Telles sont, dans Polybe, 6, 13, les demandes des villes italiques réclamant une protection militaire, φυλακή, qu’il faut entendre en première ligne de la garnison que les Romains ne pouvaient placer dans les villes alliées contre leur volonté. Tite-Live, 43, 1, 5, sur l’an 583. c. 17, 1, sur l’an 585. Bell. Afric., 97. De pareilles plaintes pouvaient naturellement être aussi formées par des cités de citoyens ou de sujets.
[19] Cette première voie a dû généralement suffire pour les contestations entre particuliers de deux cités différentes ou entre une cité et un étranger qui ne lui appartenait pas.
[20] Val. Max. 1, 2, 6.
[21] C’est l’idée contenue dans la διάλυσις de Polybe.
[22] Nous n’en avons pas d’exemples.
[23] Telle est la délimitation opérée en vertu d’un sénatus-consulte, par des proconsuls Romains, entre Ateste, d’une part, et Patavium et Vicetia, de l’autre, en 613 (ou 638. C. I. L. V, 2491) et 619 (C. I. L. V, 2490). Les trois villes doivent avoir été alors fédérées. La délimitation opérée par le proconsul L. Mummius peu après la destruction de Corinthe entre la cité sujette de Messène et la ville libre de Sparte (Tacite, Ann. 4, 43 ; Dittenberger, Syll. n. 240) est de même nature.
[24] Une contestation de territoire existant entre la ville fédérée de Pisæ et la colonie de citoyens romains de Luna fut tranchée, en 580, par une commission de cinq sénateurs (Tite-Live, 45, 13, 11) ; une autre entre les villes fédérées de Nola et de Naples par un commissaire sénatorial (Cicéron, De off. 1, 12, 33 ; d’où Val. Max. 7, 3, 4). Dans la contestation de limites entre Sparte et Messène déjà mentionnée, les Milésiens rendirent après Mummius une sentence, qui existe encore, sur L’invitation d’un sénatus-consulte qui leur fut remis par le préteur Q. Calpurnius C. f. (Tacite : Permisso publice arbitrio). Après eux le gouverneur d’Achaïe Atidius Geminus et sous Tibère le sénat lui-même statuèrent encore sur ce procès séculaire (Tacite, loc. cit.). Si la paix d’Hannibal mit Carthage avec Rome non pas seulement dans une relation d’amitié mais dans des liens d’autonomie dépendante, comme semble impliquer la fourniture de navires ex fœdere (Tite-Live, 30, 4), il faut encore citer ici la contestation de limites survenue entre Carthage et Masinissa, que cette ville soumit au sénat en 572 et que les arbitres romains renvoyèrent au sénat après en avoir fait l’instruction (Tite-Live, 40. 17, rapproché de 31, 02).
[25] Après une rixe survenue à Pompéi dans des jeux de gladiateurs, entre les Pompeiani et les Nucerini, (ejus) rei judicium princeps senatui, senatus consulibus permisit (Tacite, Ann. 14, 17).
[26] En 532, un magistrat investi de l’imperium fut envoyé en Apulie pour combattre le fléau d’une invasion de sauterelles en enrôlant les hommes soumis au service (Tite-Live, 42, 10, 7). On s’est certainement souvent adressé au sénat à la suite d’incendies ou d’inondations considérables ; la βοήθεια de Polybe se rapporte sans aucun doute avant tout à cela. Mais cette activité du gouvernement romain, fort éloignée de la grande politique, a pour ainsi dire complètement disparu de notre tradition qu’il ne peut servir à rien de compléter avec des raisonnements a priori.
[27] Des fêtes générales de cette espèce sont étendues non seulement aux citoyens qui habitent hors de Rome (les agrestes : Tite-Live, 22, 10, 8 ; per omnia fora conciliabulaque : Tite-Live, 40, 37, 3), mais aux cités fédérées elles-mêmes (Tite-Live, 1, 28, 8. 40, 19, 5).
[28] Nous avons déjà remarqué que le sénat remettait souvent les prisonniers et les otages sous la garde des villes italiques. On trouve nommées comme lieu de détention, principalement Alba du lac Fucin (C. I. L. IX, p. 370) et en outre Tibur (Tite-Live, 30, 45, 4), Carsioli (Tite-Live, 45, 42. 5), Iguvium (Tite-Live, 45, 43, 9), Cales, Teanum (Tite-Live, 26, 14, 9), Norba, Signia, Ferentinum, Setia (Tite-Live, 32, 2, 4. c. 26, 5. 18), les villes du Latium en général (Tite Live, 9, 42, 10), toutes des cités autonomes dont les magistrats pouvaient mieux assumer une telle obligation que ceux des cités de citoyens. Naturellement les villes pouvaient protester, comme Spoletium l’a fait avec succès (Tite-Live, 45, 43, 9). — On proposa aussi de tenir les complices de Catilina enfermés dans les petites villes d’Italie (Salluste, Cat. 51, 42). L’empereur Aurélien est encore représenté comme écrivant dans sa prétendue lettre à Zénobie (Vita, 20) : Deditionem præcipio... ut illic, Zenobia, cum tuis agas vitam, ubi te ex senatus amplissimi sententia conlocavero.
[29] Tite-Live, 39, 14, 7 : Edici præterea et per totam Italiam edicta mitti, ne quis qui Bacchis initiatus esset coisse aut convenisse sacrorum causa velit. L’édit lui-même dit : Bacas vos ne quis adiese velet ceivis Romanus nece nominus Latini neve socium quisquam, nisei pr. urbanum adiesent et règle l’intervention du sénat.
[30] Pline, 30, 1, 12.
[31] C’est à cela qu’il faut rapporter en première ligne la mention faite par Polybe, 6, 13, de l’ίδιώτης dans une corrélation directe avec la διάλυσις. Le citoyen d’une cité alliée n’avait pas le droit d’échanger des ambassadeurs avec Rome ; mais le magistrat qui faisait la relatio pouvait introduire qui il voulait devant le sénat.
[32] Denys, 2, 11. Toutes les cités appartenant à l’empire avaient un tel patron, atteste Appien, B. c. 2, 4, par corrélation directe aux Allobroges. La sentence arbitrale (sententia) rendue en 637 par les deux Minucii Rufi, ex senati consulto, sur le litige de la cité de Genua et de ses lieus attribués (C. I. L. I, 199) en est un exemple ; ces Minucii sont les descendants de Q. Minucius Rufus consul en 537 par lequel les Ligures furent soumis à Rome. La colonie de Sulla Puteoli soumet également ses différends intérieurs au fils de Sulla et à ses autres patrons (Cicéron, Pro Sulla, 11), à la vérité sans qu’il soit fait mention du sénat. Sur l’ordre du sénat, la colonie de citoyens d’Antium reçoit son statut communal de ses patroni et la ville libre de Sicile Halæsia reçoit le sien, en 659, du préteur en exercice à Rome C. Claudius Pulcher assisté de tous les descendants alors présents à Rome du conquérant de Syracuse patron des Siculi romains (Cicéron, Verr. l. 2, 49, 122). Naturellement le sénat a aussi pu attribuer ce rôle à d’autres personnes : Sulla, qui mit un terme aux discordes intérieures de Puteoli par l’établissement de nouvelles institutions, sans doute en vertu d’un mandat du sénat (Plutarque, Sull. 37), n’était pas descendant d’un des fondateurs de la ville et n’en a peut-être reçu le patronat, qui passa par succession à son fils, qu’à la suite de ce mandat.
[33] Tite-Live, 41, 27, 3. Il faut aussi comprendre de la sorte la répression des insurrections d’esclaves opérée par des magistrats romains dans les territoires italiques (Tite-Live, 32, 26. 33, 36, 2. 39, 29, 8. e. 41, 6, etc.)
[34] Tacite, Ann. 13, 48.
[35] Cela se manifeste particulièrement en ce que ce sont tout à fait habituellement les cités contre lesquelles il n’y a pas de procédure criminelle possible qui sont frappées de ces dommages légaux.
[36] C’est là l’έπιτίμησις de Polybe (6, 13). Un exemple classique est celui de la réponse adressée par le sénat vers l’an 593 à une ambassade d’excuses des Tiburtins (C. I. L., I, n. 201) : Quod Teiburtes v(erba) f(ecistis) quibusque de rebus vos purgavistis, ea senatus animum advortit ita utei æquom fuit... postquam vostra verba senatus audivit, tanto magis animum nostrum indoucimus ita utei ante arbitrabantur de eieis rebus af vobeis peccatum non esse. C’est précisément à cela que se rapporte le discours prononcé au sénat du temps des Gracques peu avant la défection de Fregellæ par le Frégellan L. Papirius pro Fregellanis colonisque Latinis (Cicéron, Brut. 46, 170).
[37] Tite-Live, 29, 15. Elles durent désormais envoyer leurs listes de recensement aux censeurs et furent soumises à l’impôt civique romain. Elles profitèrent elles-mêmes de ce que cet impôt ne fut plus levé depuis l’an 587.
[38] C’est ce que Polybe (6, 13), désigne par les mots προδοσία et σονωμοσία, et les Romains habituellement par le mot conjuratio.
[39] Pendant la guerre d’Hannibal, des otages furent demandés à Tarente, Thurii (Tite-Live, 25, 71), Arretium (Tite-Live, 27, 21, 6).
[40] L’État allié, qui a fait défection ou qui même a seulement été reconnu coupable de violation de l’alliance ; est légalement sur le même pied que l’État qui n’est lié à Rome par aucun traité ou qui est en guerre avec elle. Pratiquement le prisonnier carthaginois est naturellement mieux traité que le prisonnier locrien ou brettien.
[41] La déclaration de guerre est de la compétence des comices, mais non la question de savoir comment le droit de guerre doit être mis en exercice. Au surplus, Il est probable que, depuis la consolidation de la confédération italique, la défection d’une ville italique n’a plus été considérée comme un cas de guerre et qu’on l’a traitée comme une guerre civile. Cf. tome I, la théorie du Commandement militaire, sur le bellum justum comme condition du triomphe.
[42] La conduite de Scipion à l’égard des Locriens passés du côté d’Hannibal et de nouveau soumis par les armes, dans Tite-Live, 29, 8, est paradigmatique : Scipio... de auctoribus supplicium sumpsit bonaque eorum alterius factionis principibus (qui se sont séparés d’eux après la défection et sont chez les Romains : c. 6, 5. 8) ob egregiam fidem adversus Romanos concessit : publice nec dare nec eripere se quicquam Locrensibus dixit : Romam mitterent legatos, quam senatus æquum censuisset, eam fortunam habituros. Il n’y a pas besoin d’autres témoignages.
[43] Cela se manifeste surtout dans la façon d’agir des Romains à l’égard des Italiotes dans les dernières années de la guerre d’Hannibal. Tite-Live, 28, 10, sur l’an 50. Ces instructions (judicia) continuent encore sous les consuls des années 530 (Tite-Live, 29, 36) et 531 (Tite-Live, 30, 26, 12). Tite-Live, 30, 24, 4, sur l’an 551. 32, 1, 7.
[44] Appien, Hann. 61, où il décrit la justice criminelle d’exception organisée contre les Brettiens. Tite-Live, 27, 23, 2. 29, 21, 7.
[45] Par exemple Tite-Live, 8, 14, 9 : Tiburtes Prænestinique agro multati. Tite-Live, 10, 1, 3 : Frusinates tercia parte agni damnati, quod Hernicos ab eis sollicitatos compertum, etc.
[46] On se demande fréquemment, surtout à l’époque ancienne, si les membres de cités fédérées pris dans l’armée ennemie s’y sont joints de leur propre initiative ou sur la provocation de leur cité (Tite-Live, 6, 13, 7 : Manifesta fides, publica ope Volscos hostes adjutos, cf. c. 6, 4. c. 10, 7. c. 17, 7, et beaucoup d’autres textes). C’est une habitude qui se suit à travers toute l’Antiquité de représenter après la défaite la guerre comme la faute de citoyens isolés et d’en rejeter la responsabilité du peuple sur eux, comme elle fut rejetée par exemple après la défaite des Privernates sur Vitruvius Vaccus (Tite-Live, 8, 20), après celle des Samnites sur Brutulus Papius (Tite-Live, 8, 39). Les Carthaginois discutent également, avant la guerre d’Hannibal, s’ils doivent livrer Hannibal ou prendre la responsabilité de la publica fraus (Tite-Live, 21, 10, 6).
[47] Cela se manifeste surtout clairement dans la façon dont sont traités les Privernates : la peine frappe les membres du conseil qui ne se sont pas retirés après la défection. En pareil cas, on ne s’occupe jamais que des citoyens considérés et non des egentes atque humiles (Tite-Live, 8, 19, 14).
[48] Tite-Live, 10, 1, 3, après les mots rapportés note 45 : Capitaque conjurationis ejus quæstione ab consulibus ex senatus consulta habita virgis cæsi ac securi percussi. 29, 36, 1 : Multi nobiles Etrusci, qui aut ipsi ierant aut miserant ad Magonem de populorum suorum defectione, primo præsentes erant condemnati, postea conscientia sibimet ipsi exilium consciscentes cum absentes damnati essent, corporibus subtractis bona tantum, quæ publicari poterant, pigneranda pœnæ præbebant.
[49] Cela se révèle surtout en ce que la confiscation des biens est là toujours liée avec la peine de mort. Il est caractéristique que les Samnites, en livrant aux Romains Brutulus Papius on du moins son cadavre, leur remettent aussi ses biens (Tite-Live, 3, 33, 14). Comme pour toute autre condamnation capitale, l’exécution peut, à la suite d’une grâce, être remplacée par la vente en esclavage avec femmes et enfants, par l’incarcération pour un temps indéfini, ou par la confiscation totale ou partielle de la fortune, ainsi qu’il est exposé en détail pour les Campaniens dépouillés de leur droit de cité (Tite Live, 26, 34). La procédure criminelle romaine ne distingue pas entre l’étranger fait prisonnier, celui convaincu de violation d’un traité à l’encontre de Rome et celui reconnu coupable d’un meurtre commis sur le territoire romain.
[50] Tite-Live, 3, 4 : Cum defectionem parari (de la prétendue colonie de citoyens d’Antium) delatum ad senatum esset, datum negotium est consulibus, ut principibus coloniæ Romam excitis quærerent, quid rei esset... introducti a consulibus ad senatum... responderunt ad interrogata. Le récit lui-même n’est pas historique.
[51] Tite-Live, 8, 34, 4. Après la prise de Capua, le proconsul Q. Fulvius Flaccus fit exécuter tous les membres du sénat de la ville qui avaient été faits prisonniers et n’ouvrit qu’après l’exécution la lettre du sénat provoquée par son collègue qui le priait de les envoyer à Rome (Tite-Live, 26, 15).
[52] Tite-Live, 9, 25, sur l’an 440 : Capuæ... occultæ principum conjurationes factor. De quibus cum ad senatum relatum esset... quæstiones decreta dictatoremque quæstionibus exercendis dici placuit. Cette relation n’a jusque-là tout au moins rien de choquant. Il n’en est pas de même du récit selon lequel le sénat aurait, en 320, institué une commission de trois membres pour statuer sur les Fidénates pris parmi les Véiens ennemis et désignés là comme citoyens romains (Tite-Live, 4, 30, 5) ; car de tels jugements sont ailleurs toujours confiés à des magistrats.
[53] Tite-Live, 4, 30, 6. 8, 44, 5. c. 20, 8. 26, 34, 6 (cf. 28, 46, 6). Des restrictions de la liberté moins énergiques atteignent ceux des Campaniens qui ne se trouvaient, lors de la prise de la ville, ni dans la ville ni dans le camp romain.
[54] Selon Polybe, 6, 13, les φαρμακεΐαι et les δολοφονίαι commises en Italie rentrent dans la compétence du sénat de Rome. Les relations de pareilles mesures extraordinaires faites par les annales visent le territoire de Rome, sur lequel les Romains possèdent légalement la juridiction, même à l’encontre des étrangers qui s’y trouvent. Mais la raison en est probablement uniquement leur négligence habituelle de ce qui ne concerne pas directement les Romains. Les instructions provoquées par les Bacchanales ont été évidemment étendues par les magistrats romains aux territoires des alliés (Tite-Live, 39, 3. c. 41, 5), et des instructions comme celles provoquées par le vol du temple de Perséphone à Locres (Tite-Live, 31, 12 rapproché de 29, 21, 4) et les meurtres du Bruttium (Cicéron, Brut. 22) ne peuvent avoir été faites autrement.
[55] Le retrait de l’autonomie provoqué par l’abus fait des privilèges ne peut être établi que depuis l’Empire. Il n’est pas expressément question du sénat à ce sujet. Cependant, lors de la transformation de la Lycie en province, les ambassadeurs lydiens apparaissent dans la curie (Dion, 60, 17).
[56] Font naturellement exception les droits accordés par le sénat à une pareille cité avec la clause : Tant qu’il plaira au sénat et au peuple. C’est par une illégalité pure et simple ou tout au moins en vertu du pouvoir législatif attribué au sénat dans la période postérieure à Sulla, que le sénat décida, sur la proposition de L. Philippus, consul en 663, quas civitates L. Sulla pecunia accepta ex senatus consulto liberarisset, ut ex rursus vectigales essent neque iis pecuniam, quam pro libertate dederunt redderemus, sur quoi Cicéron, De off. 3, 22, 87, fait ensuite la remarque : Piratarum melior fides quam senatus.
[57] Ainsi le sénat confirme, en 555, aux Gaditans leur droit établi par traité de ne pas recevoir de garnison romaine (Tite-Live, 32, 2, 5), et le sénat statue, en 559, sur le point controversé de savoir si le droit de cité romaine est acquis au citoyen d’une cité latine compris dans la déduction d’une colonie de citoyens.
[58] Cicéron, Ad Q. fr. 2, 9 [11], 2. Lorsque, en 584, la question de la liberté des Byzantii est soumise au vote dans le sénat romain (Cicéron, Verr. 2, 31, 76), il s’agit sans doute d’un litige de ce genre.
[59] C’est ainsi que la question de l’exemption du service militaire des colonies maritimes vient devant lui. La condition juridique des cités sujettes qui se rencontrent anciennement à titre isolé en Italie dépend aussi de la décision du sénat ; ainsi celle des Bruttiens (v. tome I, la théorie des Appariteurs, sur les Bruttiani) et, depuis que le droit de cité leur ont été retiré par une loi, des Campaniens (Tite-Live, 26, 34. 28, 46, 6. 38, 28, 4. c. 36).
[60] Cicéron, Pro Flacco, 32, 78 : Decrevit Flaccus... in liberos (contre un habitant de la ville libre d’Apollonidea en Lydie) : num aliter censuit senatus ? L’orateur fait lire le sénatus-consulte. A la vérité, la juridiction sur les villes libres voisines de la province pouvait aussi être attribuée au gouverneur par une loi, comme elle fut attribuée à Pison sur celles de Grèce et de Macédoine par la loi Clodia (Cicéron, De domo, 9, 23 ; De prov. cons. 4. 7 ; In Pis. 16, 37).