III. L’AUTORISATION DES DÉPENSES. Les recettes du peuple romain et par conséquent la situation financière générale de l’État dépendent essentiellement de grandes questions de politique intérieure et extérieure qui ne sont financières qu’en seconde ligne. Ces recettes et cette situation ont été, à l’époque du plein développement du gouvernement du sénat, en particulier depuis la suppression de l’impôt civique, fixées avec un degré de stabilité qui n’a été atteint dans aucun autre État pendant des siècles, le peuple romain a, peut-on dire, vécu de ses rentes. Le sénat, qui réglait ces revenus, a, comme nous l’affirment des témoignages exprès[1], assis encore plus directement sa domination sur son droit de disposer des deniers publics c les dépenses de l’État sont, même à cette époque, sujettes à fluctuations et dépendent directement de résolutions d’ordre financier. Nous allons essayer, dans la mesure où nous le permet une tradition très défectueuse, d’exposer les règles suivant lesquelles le sénat autorise les dépenses. La cité romaine est plus ancienne que son ærarium ; la place de l’Ærarium doit, dans les institutions primitives, avoir été tenue par les troupeaux publics qui allaient paître à côté ; de ceux des particuliers sur les prairies de l’État. Mais la fondation de la chambre du cuivre du peuple remonte à un temps immémorial, et on en a également fort tôt banni le cuivre pour n’y plus admettre que l’or et l’argent. Le métal monnayé ou non monnayé qui se trouve dans le trésor de la cité est soumis à un pouvoir d’administration des magistrats et dû sénat, qui se ramène ici, contrairement à ce qui à lieu pour les autres biens de l’État, à un pouvoir d’aliéner. Mais il ne peut être question de pouvoir d’aliéner que lorsque la dépense n’est pas prescrite par une loi, car le droit d’autoriser une dépense n’appartient qu’à celui qui possède également le droit de la défendre. Partout où il peut se réaliser, c’est selon ce principe qu’est administré le trésor de l’État romain. C’est d’abord à lui que se rattachent les efforts faits pour rendre l’administration du trésor étrangère aux dépenses nécessitées par des institutions publiques légalement permanentes. On le voit en matière religieuse et en matière militaire. Les dépenses relatives au culte public n’incombent certainement pas, à l’époque la plus ancienne, au trésor public ; les animaux nécessaires aux sacrifices sont pris dans le bétail du peuple[2], et l’institution du sacramentum remplit aussi la son office, tandis que les constructions et les travaux nécessaires sont accomplis par la corvée ou par des mains serviles. Plus tard, les dépenses religieuses furent, ainsi que nous avons remarqué, assurées par des fondations, au prix d’une diminution du patrimoine de l’État, de telle sorte que l’on pouvait considérer comme un excédent volontaire de dépenses ce que l’Ærarium pouvait encore payer en sus du produit des immeubles affectés à ce service. La solde régulière due à la cavalerie permanente fut mise de la même façon à la charge d’une catégorie particulière de contribuables qui furent en retour exemptés de l’impôt dû au trésor. Il est pourvu aux dépenses permanentes du peuple par une diminution de son patrimoine ou de ses recettes, et elles sont ainsi absolument soustraites à l’autorisation des magistrats et du sénat, afin que la caisse de l’État soit tout entière soumise à cette autorisation. C’est en vertu de la même idée, parce que la loi dispose des biens de l’État, mais non de ses deniers, qu’elle transforme bien les terres publiques en propriétés privées, mais qu’elle ne prescrit pas de paiements. Sans doute, cela n’est vrai que pour la période dans laquelle le peuple souverain respecte les barrières constitutionnelles qui ne peuvent lui être imposées par la lettre de la loi ; mais il n’est pas méconnaissable que ces barrières ont pendant longtemps été rigoureusement respectées et qu’elles ont encore eu une efficacité dans les siècles postérieurs. La magistrature et le sénat ne sont pas légalement obligés de faire des paiements avec les fonds du trésor. La solde de l’infanterie est à la vérité et a probablement toujours été à la charge du trésor[3] ; mais le service de fantassin n’est pas permanent et la décision sur la formation de l’armée, qui entraîne assurément l’approbation du paiement de la solde, n’émane pas du peuple, mais des magistrats et du sénat. Ce n’est peut-être point par hasard que la solde de l’armée n’a, autant que nous sachions, jamais été réglée par une loi et l’a, selon toute apparence, toujours été par un acte administratif. La règle nous apparaît dans une déconcertante nudité pour les fonds accordés aux censeurs par le sénat en vue de l’entretien des édifices publics et d’autres services durables : les dépenses ainsi autorisées sont, par une contradiction manifeste avec leur caractère de nécessité permanente, désignées légalement du nom de crédits facultatifs ultro tributa[4] ; par conséquent, chaque vote de pareils crédits réserve expressément le droit théorique de les refuser. Les exceptions confirment la règle. Il y a sans doute des dispositions législatives qui mettent à la charge de l’Ærarium le paiement d’une somme fixe ou qui prescrivent des actes qui ne pourront être accomplis qu’au moyen d’une somme correspondante. Mais elles appartiennent à une époque relativement récente et elles sont dans leur ensemble d’ordre secondaire. Tel est spécialement le cas des exceptions de la première catégorie. Il n’arrive guère qu’une loi prescrive, à titre permanent ou isolé, aux chefs de l’Ærarium, le paiement d’une somme déterminée, de manière à mettre purement et simplement le peuple comme débiteur en face d’un magistrat ou d’un particulier. Peut-être est-ce arrivé plus tût que partout ailleurs pour les fonds supplémentaires destinés aux frais des fêtes publiques. Tandis que ces fêtes étaient à l’époque ancienne fixées à chaque fois et que par corrélation la dépense supplémentaire était autorisée à chaque fois, elles devinrent elles-mêmes permanentes, à une époque postérieure, qui ne se place certainement pas avant l’établissement de l’édilité curule et qui se place peut-être seulement plus tard, et les fonds complémentaires à fournir pour elles par le trésor aux magistrats qui les organisaient le devinrent du même coup[5]. Il en a été de même du traitement des employés subalternes. Sans aucun doute il était fixé, à l’époque ancienne, à chaque fois par un contrat particulier entre le magistrat qui engageait l’appariteur et l’appariteur qu’il engageait, mais la loi de Sulla sur les questeurs, et d’autres avant elles ont probablement fixé légalement non seulement le nombre des appariteurs, mais les appointements de chacun[6], et le paiement de ces appointements est par suite devenu, en dehors du choix des personnes, une charge fixe pour l’Ærarium. Ces exceptions n’ont pas une grande étendue[7]. C’est dans l’agonie de la République que des gouverneurs reçurent, comme César, consul en 695, par la loi Vatinia et comme les consuls de l’année suivante Pise et Gabinius, en même temps que leur gouvernement, une indemnité fixe d’équipement payable par l’Ærarium[8]. Le paiement de ces sommes fixées par la loi et soustraites au droit du sénat et des magistrats d’autoriser les dépenses n’a, selon toute apparence, été prescrit ni par une décision des magistrats et du sénat, ni même par un simple décret des magistrats ; le bénéficiaire pouvait, en justifiant de ses titres, s’adresser directement aux chefs de l’Ærarium[9]. Les dispositions législatives, qui, sans supprimer le droit du sénat et des magistrats d’accorder les fonds, y apportent une restriction en prescrivant dés opérations qui ne peuvent titre accomplies sans concession de fonds à celui qui y procède, qui par conséquent imposent aux autorités maîtresses du trésor la décision d’une pareille concession, mais leur laissent le soin d’en fixer le montant, ont été beaucoup plus fréquentes et ont eu une bien plus grande portée. Elles sont cependant elles-mêmes peu connues à l’époque ancienne. Il faut citer là au premier rang l’allocation aux magistrats en fonctions hors de la ville de leurs frais de voyage et des frais assimilés, dont l’indemnité des gouverneurs est l’exemple le plus important[10]. Dans le dernier siècle de la République, on doit ajouter notamment les lois relatives aux distributions obligatoires de blé. Les autorités mises à la tête de l’Ærarium sont chargées d’appliquer ces lois ; mais ce sont elles qui prononcent sur les voies et Ies moyens[11] et, dans les limites tracées par la loi, sur le montant de l’allocation. Par exemple, la loi frumentaire Terentia Cassia de l’an 681, qui fixa les prix de vente des blés, laissa au sénat la détermination de la quotité et des modalités des achats[12], et, lorsque la cura annonæ fut conférée à Pompée par une loi en 697, le sénat exécuta la loi en lui donnant l’année suivante un mandat de quarante millions sur le trésor[13]. Si nous passons maintenant aux rapports dans lesquels sont la magistrature et le conseil de la cité quant à l’administration de son trésor, cette administration est, sous la Royauté, directement royale. Les clefs du trésor sont entre les mains du roi ou de celui à qui il les confie, et le roi, qu’il soit à Rome ou au dehors, a la faculté de retirer ou de faire retirer des fonds de l’Ærarium. Mais l’usage de consulter le sénat peut avoir existé là dès le principe aussi bien que pour la déclaration de guerre ou pour la levée de l’armée. L’Ærarium populi Romani, sur lequel ne sont pas payées les dépenses légalement arrêtées, a plutôt le caractère d’un trésor de réserve que celui d’une caisse de dépenses courantes ; et, si le sénat peut et doit être consulté sur tous les actes extraordinaires, c’est, autant que nous pouvons nous replacer au point de vue des temps primitifs, toujours un acte extraordinaire que de retirer quelque chose du trésor. La République a pris à ses chefs les clefs du trésor. Elles sont entre les mains de deux magistrats nommés d’abord par les consuls et bientôt par le peuple, des deux questeurs[14]. Mais les questeurs ne sont que des instruments. Ils font les paiements, mais ils ne les font pas de leur propre volonté, ils les font sur l’ordre des autorités Compétentes. Le droit d’autoriser les dépenses est par conséquent, sous la République romaine, le droit d’autoriser les questeurs à payer. Les magistrats supérieurs de la République peuvent n’avoir pas été à l’origine plus liés par le sénat dans leur exercice de ce droit que les rois ne l’étaient par lui quand ils voulaient puiser directement au trésor. Même après que la nomination des questeurs eut passé au peuple, ils demeurèrent leurs auxiliaires et restèrent obligés d’obéir à leurs ordres[15], absolument comme la position occupée par les tribuns militaires en face des généraux ne fut pas altérée par leur élection par les comices. Même dans ce domaine, le consultum a certainement été autrefois un conseil. Mais il a probablement acquis de bonne heure une force obligatoire générale en ce qui concerne le trésor : la règle selon laquelle l’assentiment préalable du sénat est nécessaire pour que le magistrat ordonne le paiement s’y est probablement établie de bonne heure. Et le droit d’allouer des fonds est par là passé au sénat. Mais il y a une différence essentielle selon que le sénat accorde des fonds à un magistrat qui peut lui-même adresser des ordres de paiement au questeur et qui demande seulement pour cela l’autorisation du sénat ou que la somme est soldée par l’Ærarium au bénéficiaire exclusivement en vertu du sénatus-consulte. La première catégorie comprend uniquement les allocations que le consul demande pour lui-même au sénat pendant qu’il est à Rome et qu’il ordonne au questeur de lui verser après avoir obtenu l’assentiment du sénat. Ce genre d’allocation est le plus ancien et le plus simple, et il a une étendue d’application très large. Tant qu’il n’y a pas eu d’autres magistrats quo les consuls et les questeurs, le magistrat qui ordonnait le paiement a forcément été, pour ainsi dire, toujours le même qui le recevait. Les sommes d’argent dont les consuls avaient besoin pour les expéditions projetées, doivent en général avoir été demandées par eux-mêmes au sénat, avant leur entrée en campagne, et le sénat doit les avoir votées comme toutes les autres dépenses militaires[16], après quoi ils les touchaient eux-mêmes des questeurs. La somme à dépenser peut avoir été allouée de la même façon au consul pour toutes les opérations qu’il avait à accomplir ou à faire accomplir. Tandis que, pour la seconde catégorie de dépenses, une limitation formelle était usitée et peut-être nécessaire, nous connaissons des allocations destinées aux consuls du temps de Cicéron, dans lesquelles le but seul est précisé et où la fixation de la somme est laissée à la discrétion des consuls[17], et la résolution a donc pu être rédigée de cette façon. Cependant il n’y a aucune raison d’admettre que le sénat n’ait pas également pu limiter à un chiffre la somme allouée au consul lui-même. La seconde catégorie comprend toutes les allocations votées, sous la présidence du consul, pour d’autres personnes que lui et en général toutes celles qui sont votées sous la présidence du préteur urbain[18] ou d’un tribun du peuple, au sujet desquelles il est d’ailleurs à remarquer que ni le premier ni le second ne peuvent guère se trouver dans le cas de toucher pour leur propre compte des fonds à l’Ærarium[19]. Dans tous ces cas, le magistrat ordonnateur du paiement est différent de celui qui le reçoit. Cette forme d’allocation des fonds tire probablement son origine de ce que, si les consuls étaient absents de Rome, le pouvoir de donner aux questeurs des ordres de paiement ne leur restait pas, mais était exercé jusqu’à leur retour, avec le concours symétrique du sénat, par le préfet de la ville et depuis les lois liciniennes par le préteur urbain. Si le droit de relation qui a plus tard été accordé aux tribuns, s’est, quoique nous n’en ayons d’ailleurs aucune preuve positive, étendu aux votes de crédits, ils ont nécessairement acquis en même temps, comme l’auspication, le droit d’ordonner, avec l’assentiment du sénat, au questeur de payer. Au contraire, lorsque le consul proposait un vote de crédit, il en était en général en même temps, à l’époque ancienne, le bénéficiaire, et, d’après l’usage que nous aurons à étudier plus loin, selon lequel on mettait au net à chaque cens la situation de l’Ærarium et on employait à des constructions publiques ou à d’autres dépenses analogues les sommes considérées comme disponibles, il en a forcément été ainsi de ces frais de construction eux-mêmes : les consuls qui procédaient au cens, ont dû nécessairement, à l’époque ancienne, proposer au sénat d’en autoriser le versement à eux-mêmes. Mais les choses ont changé à la suite de la séparation de la censure et du consulat opérée au début du IVe siècle. Les nouveaux censeurs n’ayant pas reçu le droit de relation, la proposition continua à être faite par les consuls ; mais désormais les fonds de construction furent demandés par eux ou par ceux qui les représentaient à Rome pour les censeurs. Un mandat sur l’Ærarium pouvait ainsi être donné, aussi bien qu’aux censeurs, à toute autre personne, magistrat ou non magistrat. Le paiement des présents d’hospitalité faits aux ambassadeurs étrangers a constamment été prescrit par le sénat de cette façon[20]. Les diverses allocations ainsi votées sont d’ordinaire et peut-être nécessairement limitées dans le sénatus-consulte lui-même, non pas précisément à un chiffre fixe, — on rencontre l’attribution aux censeurs des recettes totales d’une année ou d’un semestre[21], — mais cependant de façon que le bénéficiaire soit mis en état d’obtenir des questeurs la somme qui lui est allouée, sans qu’une autre détermination de son montant soit faite par le magistrat qui présidait. Selon que le magistrat qui ordonne au questeur de payer le fait pour lui-même ou pour un autre, sa situation juridique est différente. Le sénat a été plus libre en face de la proposition du consul d’ordonnancer le paiement de fonds de construction, depuis que le consul a fait cette proposition pour d’autres. La compétence financière des magistrats supérieurs a été principalement restreinte par le fait que les paiements relatifs à des buts non militaires leur ont été retirés des mains. Le caractère obligatoire du vote sénatorial des crédits a probablement été reconnu par les consuls plus facilement et plus tût en face d’autres personnes qu’ils ne l’eussent fait s’il s’était agi d’eux-mêmes. Selon toute apparence, l’allocation des fonds par le sénat n’a, quand le- consul la demandait pour lui-même, jamais complètement perdu son caractère consultatif. C’est l’idée de Polybe, lorsqu’il met le droit de disposition du consul sur le trésor à côté de celui du sénat[22]. L’ordre de paiement du magistrat, sans lequel le questeur ne peut faire aucun paiement, est par conséquent un décret convenu par le consul ou le préteur, ou peut-être aussi le tribun avec le sénat et son insinuation parle questeur est probablement l’acte étudié plus haut, dans lequel le magistrat qui a fait le sénatus-consulte le porte officiellement à la connaissance des questeurs et en provoque l’enregistrement. Au reste, et bien qu’il ne nous ait été transmis aucun témoignage à cet égard, il est néanmoins possible que, lorsque un retard eût été périlleux ou qu’il, s’agissait des sommes peu importantes, le magistrat en droit d’obtenir du sénat un vote de fonds, ait pu, même sans sénatus-consulte, prescrire le paiement. Il se peut fort bien que cela soit arrivé, lorsque une décision antérieure du sénat entraînait nécessairement l’allocation des crédits et que la fixation de leur montant résultait naturellement de la coutume, et cela a nécessairement été fréquemment le cas pour l’allocation des frais de solde et pour les sommes nécessaires à la célébration des fêtes publiques. Ce n’est pas ici le lieu d’exposer quelle était la gestion du trésor public chez les Romains, et on ne pourrait le faire convenablement qu’en étudiant en même temps tout le système financier de Rome. Cependant quelques observations sur les principes qui la dominent dans la période où prévaut le gouvernement du sénat ne seront pas déplacées. Dans l’Antiquité, toute politique financière se fondait, par suite du faible développement du crédit public, sur la constitution d’une forte caisse de réserve. C’est là, comme nous l’avons déjà dit, ce qu’est l’Ærarium dans son caractère primitif. A l’époque la plus ancienne, il a des recettes ordinaires dans les revenus des immeubles du peuple ; mais il n’a pas, en temps de paix et dans les conditions normales, de dépenses ordinaires, et le résultat nécessaire devait donc être une accumulation. Naturellement ce mode de gestion du trésor ne pouvait pas être maintenu en face de guerres permanentes, ni plus largement en face du développement de l’État. La loi de 397 de Rome établissant un impôt sur les affranchissements a probablement été rendue dans le but direct et en tout cas a été appliquée dans la pensée d’en séparer le produit des autres recettes de l’Ærarium, afin de le garder converti en or pour des cas de besoin extrême, et il a été fait usage de cette dernière réserve au VIIe siècle, après la bataille de Cannes[23]. Le trésor se trouva de même vidé par la guerre sociale et la guerre civile qui la suivit. En dehors de ces cas exceptionnels, l’Ærarium du peuple romain, dont l’encaisse nous est indiqué comme se montant, en l’an 697, à 69.640.000 sesterces en or et à 13.616.920 sesterces, en argent monnayé ou non monnayé[24], a, selon toute apparence, été constamment bien garni jusqu’au moment où César le vida en 705[25]. A côté de cette thésaurisation théorique et pratique, fonctionne, également en théorie et en pratique, l’usage constant d’employer les encaisses du trésor dans l’intérêt du peuple, d’ailleurs exclusivement sous la forme de construction de rues, routes et édifices[26]. Le lustrum des censeurs est pris pour période financière, en ce sens qu’à chaque renouvellement du cens il est présenté au sénat un tableau des recettes et des dépenses de l’État depuis le cens précédent et que, s’il y a un excédent, un sénatus-consulte est rendu pour déterminer dans quelle mesure cet excédent doit être maintenu dans le fonds de réserve ou mis à la disposition des nouveaux censeurs aux fins qui viennent d’être indiquées[27]. Nous ne sommes pas en état de déterminer le rapport respectif dans lequel les deux ordres d’emploi ont été aux diverses époques. Il résulte déjà de là que l’autorisation des dépenses trouvait sa limitation dans le montant de l’encaisse du trésor[28]. L’ordre de paiement devait rester étranger aux recettes à venir et se restreindre à l’argent qui se trouvait dans la caisse, à la pecunia præsens[29]. Il n’est même pas fait d’exception quant aux mandats qui ne doivent venir à échéance que plus tard ; même pour les vœux, le montant des frais était, à l’époque ancienne, fixé dès le moment où ils étaient faits et était mis de côté pour être conservé à part, jusqu’à ce qu’en 554, les pères de la ville ne résolussent de séparer la formation du vœu de la fixation de ses frais et de leur ordonnancement[30]. Ce parait avoir été une règle générale de distraire, aussitôt que possible, de la caisse totale les fonds destinés à un service religieux et de les conserver à part[31]. Dans les adjudications qui courent indéfiniment, l’allocation de fonds se limite toujours à l’année courante, pour laquelle les sommes à échoir sont mises, au commencement de l’année, à la disposition des censeurs ou des magistrats qui en font les fonctions[32] ; mais, lorsque les censeurs adjugent, à titre extraordinaire, des constructions nouvel-les, ils doivent, au moins en principe, prendre le montant total des frais, à quelque époque qu’ils doivent échoir, sur la somme qui leur a été allouée[33]. C’est ainsi par exemple que le montant du devis de la construction de l’aqueduc Marcien, s’élevant à une somme de 180 millions de sesterces, fut alloué, en totalité, en 610, au préteur qui en était chargé[34]. — Des adjudications ont été faites à crédit, avec l’assentiment du sénat, dans des périodes de gène[35] et le censeur Appius Claudius entreprit ainsi ses grandes constructions, en 442, sans le consulter[36]. Mais le sénat fut rarement amené à s’écarter essentiellement du principe[37] et des empiétements de la magistrature tels que celui d’Appius ne se sont pas reproduits. Le droit de disposer de l’Ærarium était trop bien le fondement du pouvoir du sénat, pour que, depuis que ce pouvoir existait, le sénat n’eût pas sûrement refusé sa ratification en pareil cas, et par suite, il n’y aurait eu pour des opérations de ce genre ni entrepreneurs ni magistrats. Celui qui a le droit de réclamer à l’Ærarium le paiement promis peut le recevoir lui-même ou déléguer à un tiers le droit de le recevoir (attribuere)[38], et c’est la dernière procédure qui est en général suivie pour les sommes mises à la disposition des censeurs[39]. — Mais l’Ærarium peut aussi ou faire le paiement comptant (solvere, erogare), ce qui a toujours lieu à Rome[40], ou le faire par délégation (attribuere), notamment en ce sens que les sommes d’argent qui sont dues au peuple et qui doivent être recouvrées par les questeurs sont considérées comme faisant partie du trésor et que la délégation d’un débiteur du peuple à un créancier du peuple équivaut au paiement de ce dernier. Les recettes du peuple venant en général des compagnies fermières des diverses provinces et les dépenses militaires de l’époque récente étant faites par les gouverneurs des mêmes provinces, le mouvement des deniers publics se réalisait principalement, dans la période républicaine, sous forme de délégation aux gouverneurs des créances que I’État avait dans les provinces[41]. Naturellement tous les paiements ont lieu dans un but déterminé et le magistrat est responsable de l’observation de ce but, les magistrats obligés à rendre compte ayant à justifier de l’emploi conforme des fonds, ceux dispensés de rendre compte étant obligés à rendre le reliquat et punissables seulement s’ils sont poursuivis par quelqu’un qui les convainc de n’avoir pas employé les fonds à leur destination[42]. Mais, à s’en tenir aux limites de nos connaissances assurément fort défectueuses, les titulaires de l’imperium et notamment les censeurs reçoivent les sommes nécessaires à l’exercice de leurs fonctions sans spécialisation plus détaillée et ils satisfont à leurs obligations en employant les fonds conformément à leur destination générale. Le pouvoir exécutif romain, a sous ce rapport, toujours conservé un arbitraire qui est dans la contradiction la plus énergique avec le système d’allocation de crédits présentement en usage. S’il reste un excédent sur la somme allouée au général pour la solde, il ne revient très probablement pas par là même à l’Ærarium, et le général peut en disposer pour d’autres dépenses militaires[43]. Quant aux marchés permanents en fait contractés par les censeurs à la charge du peuple, aux importants marchés relatifs à l’entretien des édifices publics et aux autres adjudications permanentes médiocrement importantes qui sont relatives à d’autres objets religieux ou publics[44], la somme allouée de censure en censure, mais demeurant approximativement égale, constituait tin minimum auquel pouvaient s’adjoindre des sommes plus ou moins considérables en vue de grosses réparations extraordinaires ou de constructions nouvelles. Sauf pour la seule construction de temple faite par les censeurs qui nous soit connue, qui était en dehors de la compétence propre de ces magistrats et pour laquelle leur mandat et les fonds nécessaires leur furent donnés par un sénatus-consulte spécial[45], il n’est jamais question d’allocations séparées affectées d’une part aux réparations et d’autre part aux constructions nouvelles, qui d’ailleurs eussent été pratiquement difficiles à distinguer radicalement, on encore moins à des travaux particuliers. Selon toute apparence, les différents objets étaient bien pris en considération pour mesurer le taux des frais, mais le montant en était totalisé dans une somme unique concédée aux censeurs[46]. Par suite, l’exécution des entreprises indiquées était laissée en fait à leur discrétion, d’autant plus qu’ils ne rendaient aucun compte, et il est impossible qu’il n’y ait pas eu des restrictions ou des extensions apportées aux devis présentés. |
[1] Polybe, 6, 13, reconnaît en peu de mots la puissance du sénat sur les recettes ; puis il expose en détail sa puissance sur les dépenses. Cicéron, In Vat., 13, 36.
[2] V. tome III, la théorie du Grand Pontificat, sur l’arca pontificum et ses recettes.
[3] Si, comme il est très vraisemblable, les créances d’impôt, dont le produit était affecté à la solde étaient dans la mesure du nécessaire attribuées au soldat avant que le paiement de la solde ne frit fait par l’Ærarium lui-même, l’Ærarium a, de tout temps, payé la solde des fantassins ; car peu importe que ce paiement soit fait en espèces ou par voie de cession de créance. L’importance politique du transfert du paiement de la solde à l’Ærarium réside directement en ce que les revenus des biens de l’État et les produits du butin forent désormais revendiqués en première ligne pour y pourvoir, tandis que jusqu’alors ils tombaient dans la caisse de réserve et le sénat n’en concédait pour la solde que ce qu’il voulait.
[4] V. tome IV, la théorie de la Censure, sur les ultro tributa.
[5] V. tome I, les premières pages de la théorie des Émoluments des magistrats.
[6] V. tome I, la section des apparitores, sur leur traitement. Selon la loi de Sulla sur les questeurs, les questeurs engagent leurs viatores et ainsi de suite ex lege plebeive scito, et les appariteurs engagés en plus en vertu de cette loi reçoivent tantundem mercedis que ceux engagés en vertu des lois anciennes.
[7] On peut avoir procédé de même pour les appointements des vestales et des curions, s’ils étaient payés par l’Ærarium lui-même et non par des caisses spéciales.
[8] Cicéron, In Val. 15, 36. Sur l’indemnité de guerre de Pison et Gabinius, cf. tome I, la théorie des Émoluments des magistrats, sur le vasarium.
[9] Dans le sénatus-consulte de 743 (qu’il faut regarder comme une sorte de loi), les chefs de l’Ærarium sont expressément invités à payer les appariteurs indiqués par les curatores aquarum. On semble avoir procédé de même relativement à tous les magistrats en droit d’avoir des appariteurs et des serviteurs salariés. La présentation doit être considérée comme une notification et non comme un ordre de paiement, les magistrats qui la font n’étant pas en général compétents pour donner un pareil ordre.
[10] V. tome I, la théorie des Émoluments des magistrats, sur l’indemnité des dépenses.
[11] C’est à cela que se rapporte le denier des questeurs Piso et Cæpio avec la légende ad fru(mentum) emu(ndum) frappé vraisemblablement en 654 (R. M. W. p. 560 = tr. fr. 2, p. 385). Nous ne savons rien de plus précis ; nous sommes d’ailleurs peu renseignés sur les magistrats par lesquels a été fait le partage des grains au VIIe siècle.
[12] Cicéron, Verr. 3, 10, 163. c. 75, 174.
[13] Cicéron, Ad Q. fr. 2, 5, 1. Drumann, 4, 513.
[14] V. tome III, la théorie du Consulat, sur le droit de disposer des caisses publiques et des biens de l’État. Nous avons traité, dans la théorie de la Dictature, au sujet des rapports du dictateur avec le sénat, de la prétendue restriction à laquelle seraient soumis les pouvoirs financiers du dictateur : par opposition à ceux du consul. On peut la défendre en ce sens que le dictateur est en général en fonction hors de Rome et par suite y est aussi dénué des pouvoirs financiers que l’est le consul en campagne ; mais peut-être vient-elle exclusivement d’une anecdote mal comprise.
[15] V. tome III, la théorie du Consulat, loc. cit.
[16] J’ai précédemment limité à tort cette idée à la période postérieure à Sulla.
[17] Selon les propositions de sénatus-consultes relatifs à la construction de monuments commémoratifs faites par Cicéron (Phil. 9, in fine. 44, in fine), le sénat prie les consuls d’en faire affermer la construction parles questeurs ou de l’affermer eux-mêmes, puis à l’ordonner aux questeurs (imperare) de payer le montant des soumissions aux entrepreneurs. La décision rapportée dans Tite-Live, 39, 19, 7, est une invitation semblable adressée par le sénat aux consuls d’user de leurs pouvoirs d’ordonnateurs ; le consul a nécessairement aussi prescrit aux questeurs de payer les primes ainsi promises aux dénonciateurs.
[18] Les sénatus-consultes relatifs aux, présents d’hospitalité faite aux ambassadeurs montrent de la manière la plus claire que l’ordre de paiement pouvait aussi être adressé au questeur par la préteur urbain ; ils autorisent le président & prescrire Je paiement au questeur, évidemment sans qu’il importe que ce président soit un consul ou un préteur.
[19] Tel est le seul motif de la différence des situations occupées en face de l’Ærarium par le consul et par le préteur urbain qui le représente (V. tome III, les théories du Consulat et de la Préture).
[20] Dans tous les sénatus-consultes de cette espèce, le président est prié d’inviter le questeur à payer.
[21] V. tome IV, la théorie de la Censure, à la section des Ultro tributa, sur l’objet des marchés des censeurs. Le sénat décide également de dépenser pour accomplir les vœux après la défaite dé Persée autant qu’après celle d’Antiochus (Tite-Live, 43, 16, 8).
[22] V. tome III, la théorie du Consulat, sur le droit de disposer du trésor public. Interpréter restrictivement les mots de Polybe πλήν είς τούς ύπάτους, comme ne se rapportant qu’à des paiements accessoires, ne serait pas seulement en contradiction avec le texte ; ce serait surtout inconciliable avec les intentions’ de Polybe qui ne s’occupe pas de menus détails archéologiques. Il est impossible qu’il ait sons ce rapport attribué une situation spéciale au consul parce qu’il aurait pu, par exemple, faire acheter sans sénatus-consulte les animaux dont il avait besoin pour ses sacrifices ; ce qui d’ailleurs aurait dû sans doute être permis alors à tous les présidents.
[23] Tite-Live, 27, 10, 11.
[24] Pline, H. n., 33, 3, 55. R. M. W., p. 401 = tr. fr. 2, p. 114.
[25] Les plaintes fréquentes sur l’inopia ærarii se rapportent évidemment aux recettes et dépenses courantes, sans égard au fonds de réserve considéré comme inviolable.
[26] Quoique tout le système des routes et constructions soit dirigé par le sénat, il n’apparaît pas encore au sens propre comme constructeur dans la période antérieure à Sulla. C’est le populus qui y est sans doute constamment regardé comme tel. Ensuite la reconstruction du Capitole confiée à un curateur spécial est faite de senatus sententia (C. I. L. VI, 1313. 1314). L’ara du Palatin sei deo sei deivæ élevée aussi par un préteur de senati sententia (C. I. L. VI, 110) et la construction faite vers 683 par un préteur ex s. c., C. I. L. VI, 3275, appartiennent au même temps. L’inscription de 632 (C. I. L. VI, 1366 : C. Fannius M. f. cos. de sena. sen. dedit) se rapporte à une offrande votive. Les témoignages d’écrivains relatifs à des constructions faites en vertu de sénatus-consultes n’entrent pas en ligne de compte dans cette question de forme.
[27] V. tome IV, la théorie de la Censure, à la section des ultro tributa, sur l’objet des marchés des censeurs.
[28] Les fonds entrés dans l’Ærarium à titre de mutuum (cf. tome I, la théorie des Actes conclus entre l’État et un citoyen, suries actes générateurs d’obligation) sont naturellement compris dans l’état de la caisse.
[29] V. tome IV, la théorie de la Censure, sur les formes dans lesquelles les censeurs obligent le peuple.
[30] Selon Tite-Live, 31, 9, le sénat résout de promettre à Jupiter pour l’heureuse issue de la guerre en perspective avec la Macédoine un présent qui sera alors déterminé. Le grand pontife P. Licinius Crassus, juris pontificii peritissimus (Tite-Live, 30, 1, 5), s’y oppose : Negavit ex incerta pecunia vovere [licere : ex certa voveri] debere, quæ (Mss. : quia) pecunia non posset in bellum usui esse seponique statim deberet nec cum alia pecunia misceri ; quod si factum esset, votum rite solvi non posse. Mais le collège des pontifes, auquel on soumet la question de savoir si posset recte votum incertæ pecuniæ suscipi, décide contre son chef posse rectiusque etiam esse et l’acte est ainsi accompli avec la clause tanta pecunia, quantum tunc cum (votum) solveretur senatus censuisset. Totiens (Bamb. : octiens) ante ludi magni ex certa pecunia voti erant, ajoute l’annaliste, tum primum ex incerta. On agit postérieurement de même : Tite-Live, 36, 2, 4. 42, 28, 9.
[31] Dans le statut de Genetiva, c. 69, les magistrats sont invités à ne pas prendre l’argent à payer aux redemptores des adjudications religieuses, sur l’argent, quam pecuniam ex h. l. [ad e]a sacra, quæ in colonia aliove quo loto publice fiant, dari adtribui oportebit. Il faut donc que les questeurs aient commencé leurs opérations de caisse en mettant de côté les fonds destinés aux dépenses religieuses prévues de l’année : — On peut rapprocher de cela le dépôt des fonds des repetundæ fait à l’Ærarium, in fiscis (Lex repetund. lignes 57-69).
[32] La preuve en est dans le c. 69 du statut de Genetiva (v. tome IV, la théorie de la Censure, à la section des Ultro tributa, sur les formes dans lesquelles les censeurs obligent le peuple). Les marchés du peuple tenant jusqu’au lustre suivant (v. tome IV, la même théorie, sur la période lustrale) et par conséquent n’ayant pas de terme fixe, il était impossible de déposer d’avance la somme a payer en vertu de chacun. C’est pourquoi ces contrats sont regardés comme étant d’abord faits pour un an et on applique à leur prolongation le principe de la relocatio.
[33] Le contrat relatif à une construction nouvelle est un contrat unique quoique les paiements puissent s’étendre à plusieurs années. La relocatio n’y est pas applicable.
[34] Fenestella, dans Frontin, De aqu. 7.
[35] V. tome IV, la théorie de la Censure, à la section des Ultro tributa, sur les formes dans lesquelles les censeurs obligent le peuple.
[36] Diodore, 20, 36. Il est parfaitement croyable de lui qu’il ait fait dépendre ce résultat du refus de ratification du sénat.
[37] Les arrérages non échus des redevances des sociétés fermières peuvent avoir été fréquemment délégués d’avance aux gouverneurs, comme cela nous est rapporté pour l’an 620.
[38] Cicéron, Verr. 3, 71, 165, distingue ainsi la pecunia publica ex ærario erogata et celle ex vectigialibus populi Romani ad emendum frumentum attributa et le statut de Genetiva, c. 69, parle de pecuniam solvere attribuere.
[39] V. tome IV, la théorie de la Censure, à la section des Ultro tributa, sur les formes dans lesquelles le censeur oblige le peuple. Dans le compte des censeurs, C. I. L. VI, 3824, les paiements faits par eux sont exprimés par la formule : Pecunia adtributa est.
[40] Cicéron, Verr. l. 1, 13, 34.
[41] Le gouverneur verse en province contre la constitution de sûretés les fonds qu’il veut envoyer à Rome (Cicéron, Ad fam. 2, 17, 4). D’autre part, il y reçoit les sommes qui lui sont destinées (Cicéron, Ad fam. 3, 5, 4, écrit peu après son arrivée dans sa province : Pr. k. Sext. puto me Laudicea fore : perpaucos dies dam pecunia accipitur, quæ mihi ex publica permutatione — c’est-à-dire par la transformation de la créance de l’Ærarium en une créance du gouverneur — debetur, commorabor ; deinde iter faciam ad exercitum. Ad Att. 5, 4, 2). Dans ce but, le gouverneur reçoit une délégation sur les sociétés fermières (Cicéron, Verr. 1. 3, 70, 164). En 650, on refuse au second Africain de lui faire payer à l’Ærarium les fonds de son commandement d’Espagne, et il reçoit une délégation sur les recettes espagnoles, à échoir postérieurement (Plutarque, Apopht. imp. Scip. min. 15). Ces sociétés payaient pendant le temps intermédiaire, des intérêts (que Verrès s’appropria illégalement : Cicéron, loc. cit.) ou en obtenaient la remise de la faveur du sénat (Cicéron, Verr. 3, 72, 118).
[42] V. tome II, la théorie de la Responsabilité des magistrats.
[43] On peut sans doute demander au magistrat qui rend ses comptes une spécialisation et des pièces justificatives (v. tome II, la même théorie, sur la reddition de compte). Mais cela n’a rien de commun avec la question dont il s’agit ici.
[44] Par exemple, pour les sonneries de trompettes qui annoncent les comices par centuries, pour la fourniture des chevaux de courses des jeux publics. Cependant les cas qui nous sont connus sont très restreints ; des adjudications comme celle de la nourriture des oies du Capitole et de la peinture de la statue de Jupiter Capitolin peuvent avoir été traitées comme des accessoires de l’entretien du temple.
[45] Tite-Live, 36, 36, 4 rapproché de 29, 37, 2. V. tome IV, la théorie de la Censure, à la section des ultro tributa, sur l’interdiction aux censeurs des dédications et des constructions de temples.
[46] V. la même section, sur les constructions nouvelles dans la capitale. Nous ne possédons pas de preuves directes de cette procédure. Mais le silence complet des sources relativement à une spécialisation impérative ou à des votes de fonds consécutifs ne comporte pas d’autre explication. Si les fonds affectés aux censeurs sont souvent désignés comme destinés à leurs constructions (par exemple, dans Polybe, 6, 13 et dans Tite-Live, 39, 4.4, 5. 40, 46, 16. 41, 16, 2), cela s’explique facilement par le fait que leurs autres marchés s’effacent devant leurs marchés de construction.