LE DROIT PUBLIC ROMAIN

LIVRE DEUXIÈME. — LES MAGISTRATURES.

LE PRINCIPAT.

 

 

L’ADMINISTRATION DES PROVINCES IMPÉRIALES.

La puissance proconsulaire, en vertu de laquelle l’empereur prend l’administration de provinces isolées, de la même façon que les ex-consuls et préteurs recevaient leurs départements provinciaux, est différente de sa puissance proconsulaire générale, dérivée de son commandement en chef exclusif. Cette dernière, la véritable base de la puissance impériale, s’étend nécessairement à tout l’empire et est nécessairement viagère ; l’autre est bien, en fait, liée à la puissance impériale, mais, d’une part, elle est limitée à une partie de l’empire et, d’autre part, elle a d’abord été revêtue par Auguste, sinon conformément à ce qui était ailleurs la règle pour le proconsulat, selon le principe de l’annalité, au moins pourtant avec un terme fixe. Le système militaire établi par Auguste en 727, comme devant être le système définitif, impliquait, d’une part, le transfert au général de l’État du commandement des troupes dans tout l’empire et, d’autre part, l’attribution au sénat de tous les gouvernements provinciaux[1]. Le régime qui a fonctionné, sous les empereurs de la dynastie Julienne, pendant un certain temps pour l’Illyricum et plus longtemps pour l’Afrique, la combinaison du gouvernement de province sénatorial et du commandement impérial des troupes devait, lors de l’organisation définitive, être étendue à toutes les provinces où il y avait des troupes. Cependant Auguste garda alors, à titre transitoire, pour dix ans encore, l’administration immédiate de quelques provinces demandant particulièrement un régime militaire ; puis cette administration lui fut maintenue en fait pendant toute sa vie par des prolongations répétées[2], et ensuite elle fut immédiatement prise à vie par Tibère et après lui par tous ses successeurs.

Les provinces dont le prince prenait l’administration lui étaient positivement cédées, c’est-à-dire que la propriété du sol était transférée du peuple à l’empereur[3]. Il faut se rappeler en face de cette façon de procéder, que la cession a d’abord été faite à titre temporaire et concordait par là avec les habitudes romaines[4]. Une translation fiduciaire de la propriété sous l’obligation de la retransférer, à l’expiration du terme fixé au gouvernement provincial, est parfaitement conciliable avec le caractère de magistrature du principat. A cela s’ajoutait que le rendement des impôts fournis par les premières provinces conférées à l’empereur était probablement inférieur aux dépenses qu’elles nécessitaient et indubitablement inférieur à l’ensemble des charges militaires assumé par la cassette de l’empereur ; au point de vue financier, la cession ne causait donc au peuple aucun préjudice. Mais le but était évidemment d’écarter toute espèce de contrôle et toute comptabilité, car il ne pouvait en être question, du moment que c’était comme propriétaire que le prince recevait les redevances de ces provinces.

Les provinces dont Auguste conserva l’administration directe en 727, lors de la fondation du principat, étaient la Gaule, la Syrie et l’Espagne citérieure[5]. Nous avons déjà expliqué, dans lé chapitre des Gouverneurs de provinces, la manière dont le prince a administré ces provinces et celles qui sont venues s’y adjoindre, au moyen de ses légats, eux-mêmes munis d’un imperium proprétorien propre ; nous avons aussi montré là dans quelle mesure générale le prince a exercé ses pouvoirs d’administration par intermédiaire ou se les est réservés ; nous avons montré encore que la part d’autorité du sénat sur ces provinces se manifestait seulement en ce que les représentants de l’empereur et les officiers supérieurs étaient nécessairement pris parmi ses membres. Nous pouvons seulement ajouter ici que, bien que le prince puisse aussi exercer son autorité proconsulaire générale dans les provinces du sénat, le gouvernement qu’il possède de certaines provinces n’est aucunement dépourvu de conséquences juridiques spéciales. Ainsi, il arrive que, de même que le proconsul prononce à titre de peine l’expulsion de sa province, l’empereur interdise le séjour dans toutes ses provinces[6]. Le principe selon lequel l’appel de la sentence du légat impérial va de droit et exclusivement devant l’empereur, tandis que celui de la sentence du proconsul peut aller devant les consuls et le sénat et doit même régulièrement aller devant eux, a certainement eu aussi son importance pratique.

Le territoire soumis à l’administration directe de l’empereur a aussi été soumis pour le recrutement à un régime différent de celui de l’Italie et des provinces des gouverneurs sénatoriaux. Le prince avait sans doute, en vertu de, son commandement exclusif, le droit exclusif, d’enrôler ou de congédier des soldats dans tout l’empire. Mais il n’a pas fait un usage étendu des enrôlements forcés en Italie et dans l’ensemble des provinces sénatoriales, peut-être parce qu’il lui fallait pour cela constitutionnellement le concours du sénat. Au contraire, dans le territoire soumis à l’administration impériale, le recrutement figure parmi les fonctions régulières des gouverneurs. C’est probablement pour cela que le recrutement figure parfois dans le titre des proconsuls sénatoriaux et jamais dans celui des légats provinciaux de l’empereur. En revanche, on ne trouve mentionnés que dans les provinces sénatoriales des dilectatores subalternes de rang équestre préposés à des circonscriptions particulières[7]. En particulier les auxilia formés de non citoyens, à peu près la moitié des forces militaires totales, sont exclusivement formés dans les provinces de l’empereur, tandis que l’Italie et les provinces sénatoriales ne pouvaient, dans la mesure où on leur demandait des soldats, s’en voir demander que pour les troupes de la capitale et les légions[8]. Il a aussi été formé dans certains territoires soumis à l’administration impériale, par exemple en Rætie et en Arménie mineure, une milice locale qui fut d’abord employée uniquement dans la province, mais qui a plus tard joué un rôle comme troisième élément de l’armée à côté des légions et des auxilia[9].

Une autre différence entre l’ancienne administration sénatoriale et celle de l’empereur se manifeste dans l’institution du recensement provincial. Le droit de procéder au cens est, sous le principat, avons-nous vu, un droit réservé à l’empereur ; mais il est peu exercé par lui dans les provinces du sénat ; au contraire, il joue un rôle important dans l’administration impériale. Naturellement, c’est surtout vrai du premier cens fondamental fait dans les territoires nouvellement annexés à l’empire. L’organisation définitive du système des impôts dans le territoire des Gaules soumis par César, a occupé, pendant les quarante années de gouvernement pacifique d’Auguste et encore après sa mort, tant l’empereur personnellement que les princes de sa famille envoyés là par délégation spéciale[10]. La province de Judée fondée en l’an 6 après J.-C. a pareillement été soumise aussitôt au cens[11], et la même chose a sûrement eu lieu dans tous les territoires annexés à l’empire. Mais on n’en a aucunement terminé avec le cens après son premier établissement, dans les territoires soumis à l’administration impériale. Quoiqu’on ne trouve pas de vestiges d’une révision se répétant à intervalles fixes et que, selon toute apparence, les gouverneurs ne se soient pas régulièrement occupés du cens, les empereurs ont parfois procédé eux-mêmes personnellement à cette tâche[12], parfois chargé les gouverneurs de l’accomplir[13], parfois aussi confié le cens d’une province à des fonctionnaires propres, tantôt de l’ordre sénatorial[14], tantôt de rang équestre[15] ; le cens des cités ou des groupes de cités isolés étant ensuite au-dessous d’eux dirigé par des officiers de rang équestre détachés dans ces fonctions ou par des commissaires n’appartenant pas à l’armée[16]. Cela doit être en rapport avec la différence dont il vient d’être parlé pour le recrutement. L’enrôlement se faisant, dans les provinces sénatoriales, exclusivement dans les villes, pour les légions, les listes municipales pouvaient en général suffire là pour y procéder. Mais une pareille base a sans doute souvent manqué pour le recrutement des auxilia et les officiers chargés du census devaient sans doute le faire précisément en vue directe du dilectus.

Enfin, le système d’imposition impérial diffère en principe de celui que la République récente a transmis à l’administration sénatoriale[17]. Quand le gouvernement républicain percevait d’une cité sujette isolée, une somme d’argent annuelle une fois fixée, le stipendium, ce qui avait toujours existé en Espagne et en Sardaigne et ce qui devint ensuite de plus en plus général, il laissait le recouvrement de cette somme à la cité qui la lui devait ; si, par conséquent, il y avait besoin d’une répartition, tributum[18], entre ses citoyens, c’était l’autorité locale et non pas le gouvernement romain qui la prescrivait. L’administration impériale, au contraire, levait partout elle-même le tributum, c’est-à-dire une quote-part de la fortune de chaque contribuable, s’élevant ou s’abaissant avec le montant de cette fortune[19]. Le caractère direct de l’impôt impérial se révèle partout et notamment dans le fait que la détermination du montant de la fortune était faite par le gouvernement impérial ; il suffit de rappeler à ce sujet les cinq classes établies pour cette raison entre les fonds de terre en Pannonie à raison de leur qualité[20]. Ce n’est qu’à cette condition qu’on peut comprendre la lenteur et le sérieux du cens des nouvelles provinces gauloises ; si Auguste s’était contenté, comme César, d’imposer à chaque cité un tribut fixe, il n’aurait pas eu besoin pour cela de quarante ans. La diversité de dénomination du sol, la désignation des fonds provinciaux situés dans le territoire administré par le sénat du nom d’ager stipendiarius et de ceux situés dans le territoire administré par le prince du nom d’ager tributarius[21] ; prouve que le tributum, c’est-à-dire l’imposition directe, a d’abord été introduit seulement dans les provinces impériales, ce qui n’exclut pas la possibilité que, dans le cours des temps, le gouvernement du sénat se soit plus ou moins approprié ce système, qui finalement est devenu général et a supplanté l’ancien. Le passage de l’imposition indirecte des sujets à leur imposition directe a été une des institutions organiques du principat et une de ses innovations les plus profondes.

 

 

 



[1] Le poète contemporain le souligne avec raison par les mots : Redditaque est populo omnis provincia nostro.

[2] Dion, 53, 13, sur l’an 727. c. 16. En 736 pour 737-741 Dion, 54, 12, pour 742-746 : Dion, loc. cit., en 756 pour 757-766 : Dion, 55, 12, en 766 pour 767 et ss. : Dion, 56, 28. Dion ajoute (55, 6. 12. 56, 28) qu’Auguste fit mine à l’époque récente de vouloir résigner l’autorité à l’expiration du délai. Quoiqu’il limite expressément le terme à certaines provinces, c’est en partie par sa faute que les modernes, tout en reconnaissant naturellement la différence de l’imperium proconsulaire général et du spécial, n’ont pas reconnu que le premier a été dés le principe permanent et que le second a commencé par être affecté d’un terme extinctif.

[3] Gaius, 2, 21. Il y a peut-être déjà une trace de cette cession chez Denys. Il distingue les terres conquises par Romulus en qualité de bien royal des terres publiques proprement dites (3, 1) ; en cette qualité, ces biens passent, après la mort de Romulus, à Numa, et après la mort de celui-ci, à Tullus qui les partage viritim et se contente de sa fortune paternelle. Ce langage n’eut pas été correct pour lés jurisconsultes du temps de la République, mais il l’était probablement pour Capito et ses pareils. Les jurisconsultes de la République pouvaient bien aussi mettre en face les uns des autres des agri publici et des agri regii, et considérer les derniers comme τών άεί βασιλέων κλήσις ; mais ils ne pouvaient le faire que dans le sens où l’immeuble des vestales est distingué de l’ager publicus ; les agri regii eux-mêmes étaient δημοσία κτήσις, bien qu’ils eussent une destination durable et que notamment l’assignation ne put leur être appliquée dans l’ordre habituel des choses. Il a été naturel que les théoriciens du droit public d’Auguste sortissent de là pour admettre une propriété foncière liée à la fonction royale et privée au point de vue du droit. — La propriété de l’empereur sur le solum tribularium est assurément une théorie du droit public (Hirschfeld, Unters. p. 10), tout comme la propriété de l’État sur le solum stipendiarium ; mais c’est précisément pour cela qu’elle demande d’autant plus une construction juridique.

[4] La remise de la propriété, en particulier de la propriété du soi, à temps est familière au droit romain sous le nom de fiducia, non seulement dans un but de nantissement, mais afin de mieux assurer la conservation de la chose, à titre de dépôt renforcé (Gaius, 2, 60). L’idée d’après laquelle un pareil transfert aurait été contenu dans l’acte de 727 pour les dix années prochaines, est beaucoup plus vraisemblable que celle admise dans ma première édition, selon laquelle ce transfert aurait été inventé seulement par la théorie postérieure.

[5] La Gaule comprenait alors tout le territoire qui a plus tard été divisé en Narbonensis, tres Galliæ et duo Germaniæ. La Cilicie et Cypre faisaient alors également partie de la Syrie. Le grand nombre des provinces impériales postérieures vient à la fois du partage de celles-là, d’échanges avec le sénat et du classement parmi les provinces impériales de toutes celles acquises depuis 727.

[6] Ainsi Auguste interdit à Cornelius Gallus sa maison et ses provinces (Suétone, Auguste, 66. Dion, 53, 23), mesure au sujet de laquelle il faut, d’ailleurs, se rappeler que de pareilles restrictions de la liberté n’étaient encore, en ce temps lé, aucunement des peinés au sens légal.

[7] Nous connaissons jusqu’à présent seulement trois exemples par les inscriptions, le dilectator per Aquitanica[e] XI populos de l’inscription de Lyon ; Boissieu, p. 246, du temps d’Antonin le Pieux, un εμφθείς έπί στρατολογίαν άπό 'Ρωμ[αίων] είς τήν αύτήν έπαρχείαν, c’est-à-dire en Thrace (Madeos, Bull. de Corr. hell. 4, 507) et l’inscription mal transmise de Malaga, C. I. L. II, 1970 ; dans laquelle il semble se trouver un dilectator Augusti sans indication de district. Tous sont des fonctionnaires équestres de rang inférieur ; des fonctions de ce genre peuvent avoir été conférées très souvent, malgré leur rare mention sur des inscriptions. C’est à de pareils personnages que Paul fait allusion, Digeste, 4, 6, 35, pr. : Qui mittuntur ut milites ducerent aut reducerent aut legendi cura[m age]rent, rei p. causa absunt. L’existence de dilectatores sénatoriaux n’a pas été jusqu’à présent établie ; l’inscription C. I. L. V, 865, n’a été rapportée à ceci que par la restitution fausse de Renier (Mélanges d’épigraphie, p. 81) admise à tort par moi ; la pierre portait plutôt censitori per Africam Mauretaniasque. Renier a méconnu la différence essentielle des fonctionnaires chargés du recrutement en Italie et dans les provinces et a été conduit par là à des conclusions fausses.

[8] Hermes, 19, 44 et ss.

[9] V. des développements plus détaillés, Hermes, 22, 568 et ss.

[10] Tite-Live, 134 : Cum ille (Auguste en 727, immédiatement après avoir pris le pouvoir régulier) conventum Narbone egit, census a tribus Galliis quas Cæsar pater vicerat, actus. Dion, 53, 22. — Nero Drusus en 742 : Tite-Live, 138. 139 ; discours de Claude : Cum a[b] censu novo tum opere et inadsueto Gallis ad bellum avocatus esset. — Germanicus, dans les dernières années d’Auguste et les premières de Tibère : Tacite, Ann. 1, 31. 33. 2, 6, où sont nommés deux de ses officiers employés par lui.

[11] L’extension par l’évangéliste Luc de ce cens sur πάσαν τήν οίκουμένην, est une erreur concevable de la part d’un provincial. Le cens de Quirinius ne se restreignit pas à la nouvelle province de Judée, mais s’étendit aussi à la Syrie, dit Josèphe, Ant. 18, 1, 1 : Quirinius..... arriva en Syrie où l'empereur l'avait envoyé pour rendre la justice dans cette province et faire le recensement des biens, et confirme l’inscription citée note 16. Auguste a probablement prescrit pour la Syrie et les pays voisins, comme pour les Gaules, un recensement fondamental.

[12] Frontin, Stratagème, 1, 1, 8.

[13] De même que sous Auguste les gouverneurs de Gaule et de Syrie avaient été chargés des affaires du cens, on en chargea parfois les gouverneurs par la suite. La commission extraordinaire relative au cens d’une province ressort clairement chez le leg. Aug. pro pr. provic. Galat. Phryg. Pisid. Lycaon. Paphlag., item ad census Paphlaq. (Antioche de Pisidie, Eph. ep. V, 1345 = C. I. L. III, suppl. 6819). En conséquence (ainsi que me fait remarquer Hirschfeld) les censiteurs qui sont en même temps legati Auqusti pro pr. peuvent avoir été des gouverneurs chargés d’un pareil mandat spécial. Se rapportent à cela C. I. L. VI, 1333 : Leg. Auq. pr. pr. censitor provinciæ Lugdunensis ; C. I. L. X, 6658 : Leg. Aug. p. p. ad census provinciæ Lugdunensis ; C. I. L. XIV, 2928 : Ejusdem — de Trajan — legatus pro pr. provinciæ Aquitani[æ] censuum accipiendorum ; C. I. L. II, 4121 : Leg. Aug. prov. H(ispaniæ) c(iterioris), item censitor H(ispaniæ) c(iteioris). Le procurator Auggg. a censibus de Césarée en Maurétanie, C. I. L. VIII, 9370, est aussi le gouverneur ordinaire de la province, puisqu’il a un sous-officier pour strator et qu’il est appelé præses et l’addition a censibus (qui fait défaut sur sa seconde inscription C. I. L. VIII, 9049) ne peut désigner une seconde magistrature, puisque l’inscription n’indique pas le cursus honorum. C’est donc un gouverneur auquel le cens a été confié à titre exceptionnel et qui ajoute pour cette raison a censibus à son titre, comme le duumvir se nomme en pareil cas IIvir quinquennalis.

[14] Tacite, Ann. 44, 46, sur l’an 61. Ce ne sont probablement pas des gouverneurs, mais des commissaires spéciaux. Tels sont probablement aussi les consulaires Inscr. Helv. n. 115 ; C. I. L. II, 4121, C. I. L. V, 7183 ; et en outre les prætorii, C. I. L. VI, 332 et C. I. L. XIV, 3593. Cf. C. I. L. X, 3852.

[15] C. I. L. V, 7784. Herzen, 6948 = C. I. L. XIV, 3599. C. I. L. X, 680. C. I. L. XIV, 4250). C. I. Gr. 3751 ; de même dans l’inscription égyptienne, Handb. 5, 215, note 6 = tr. fr. 10, 271, note 3. C. I. Gr. 3497. Quand les tres provinciæ Galliæ élèvent un monument à un personnage comme primo umquam eq(uiti) R(omano) a censibus accipiendis (Henzen, 6944), cela se rapporte à de pareils mandats embrassant des provinces entières.

[16] Convenius : Censitor [conve]ntus Cæ[saraugusta]ni (C. I. L. VIII, 7070). — Groupes de cités : tribun militaire de légion espagnole at census accipi[en]dos civitatium XXIII... Vasconum et Vardulorum (Henzen, 5209 = C. I. L. VI, 1463). 44 civitates africaines. C’est aussi sans doute à cet ordre qu’appartient le tribun militaire qui censum egit in provinc. Gallia Aquitanica (Henzen, 6945). — Cités isolées : le censitor provinciæ Lugd(unensis), item Lugd(unensium) consulaire déjà cité note 14, chez lequel il faut remarquer la distinction. Tribun militaire... censitor civitatis Remorum fæderatæ (C. I. L. XII, 1855). Tribun militaire jussus Quirini censum egi Apamenæ civitatis millitum homin(um) civium CXVII (Eph. ep. IV, p. 538). Préfet de cohorte censitor civium Romanorum coloniæ Victricensis quæ est in Brittannia Camaloduni (Orelli, 208 = C. I. L. XIV, 3955). Préfet de cavalerie censitor Brittonum Anavion[ensium] (Henzen, 6947). — L’adjutor at tenus provinciæ Lugdunensis (Orelli, 2156 = C. I. L. XII, 408 ; cf. Henzen, 6549) se rapporte saris doute aussi à cela. — Il ne faut pas confondre avec ces fonctionnaires provinciaux les directeurs du bureau impérial a censibus.

[17] Les dîmes qui sont levées en Sicile sont assurément des prestations faites directement par les sujets à l’État romain ou à ses mandataires ; le déficit est ici supporté par l’État et non par la cité imposante. Cette contribution en nature est en ce sens semblable au tributum impérial ; mais elle n’est jamais désignée de ce nom, au moins sous la République.

[18] Le tributum est la contribution en argent imposée par l’État à ses citoyens. En tant qu’on vise par là une recette de l’Ærarium de Rome, est un tributum l’impôt romain sur les citoyens et naturellement dans les autres États l’impôt qui y existe (Tite-Live, 33, 46, 9). Le stipendium, au contraire, est la solde et par suite l’argent levé pour la payer, d’où qu’il vienne, donc aussi bien l’impôt des citoyens en tant qu’il sert à payer la solde que la contribution levée dans le même but sur l’ennemi vaincu. Par suite, au point de vue romain, l’argent remis parles sujets aux Romains peut bien être appelé stipendium, mais non tributum à l’époque de la République, puisqu’il est payé par la caisse communale et ne vient pas d’une répartition romaine. La République ne connaît pas d’argent payé directement par les sujets isolés à Rome en vertu d’une répartition faite par Rome et par suite ni Cicéron, ni César, ni en général, les auteurs anciens n’emploient le terme tributum pour désigner les prestations des sujets ; ce n’est pas tant le mot qui a changé de sens que le système qui a changé.

[19] Peu importe pour l’organisation du cens que cette quote-part elle-même soit variable ou fixe. Mais Suétone, Auguste, 40, dit expressément, que si un tributarius fait défaut, la recette du fisc est diminuée.

[20] Hyginus, Grom. p. 205. Marquardt, Handb. 5, 220 et ss. = tr. fr. 10, 219 et ss.

[21] Gaius, 2, 21 (d’où Théophile, sur les Inst. 2, 1, 40). Cf. 2, 7. Dans notre littérature, Gaius est seul à faire ressortir la différence de sens de tributarius et stipendiarius. Quand les deux expressions se trouvent ailleurs en opposition (Digeste, 7, 1 ; 7 ; 2 ; Fr. Vat. 289) ou isolées (Frontin, Grom. Ed. Lachmann, p. 5. 35 ; Velleius, 2, 39. Pétrone, c. 57 ; Suétone, Auguste, 40), on ne voit pas la distinction. Les deux termes sont devenus peu à peu positivement synonymes (Digeste, 50, 16, 27, 1 : Stipendium... etiam tributurn appellari Pomponius ait), tout comme ærarium et fiscus se confondirent peu à peu.