LE DROIT PUBLIC ROMAIN

LIVRE PREMIER. — LA MAGISTRATURE.

HONNEURS VIAGERS DES MAGISTRATS.

 

 

II. — HONNEURS ATTACHÉS À LA MAGISTRATURE ET AU TRIOMPHE FICTIFS (ornamenta).

Il s’attache, avons-nous vu, soit à l’exercice de la magistrature, soit à la célébration du triomphe, des honneurs politiques importants et enviés : le droit de siéger au sénat ; la détermination de la classe dans laquelle on y vote ; le droit de se présenter à des magistratures plus élevées ; le jus imaginum ; le droit de paraître aux fêtes publiques dans le costume officiel qu’on a anciennement porté ; le droit aux funérailles de magistrat. La réalisation de ces conséquences légales en dehors de leur cause génératrice, par voie de faveur particulière ou de fiction légale, n’est pas absolument étrangère à la République ; mais cependant elle ne s’y présente que dans des limites étroitement restreintes. Ce n’est que sous l’Empire que la concession fictive des droits honorifiques des magistrats s’est développée comme une institution en forme[1].

Les concessions de ce genre qu’on rencontre à l’époque ancienne, se restreignent à des honneurs isolés, nettement définis, concédés à des personnes déterminées. Ce n’est que l’époque récente qui connaît la concession générale des droits attachés à une magistrature déterminée à des personnes qui n’ont pas revêtu cette magistrature. Elle admet deux degrés dans cette fiction : la concession complète de tous les droits politiques ou honorifiques qui résultent de la magistrature dont il s’agit, et la concession des seuls droits honorifiques à l’exclusion des droits politiques. Dans la langue technique, la première est désignée comme l’incorporation dans l’une des classes hiérarchiques du sénat (adlectio inter prætorios, par exemple), la seconde comme l’attribution du rang d’une de ces classes (ornamenta prætoria, par exemple). Le triomphe faisant naître pour les triumphales exclusivement des droits honorifiques, et pas de droits politiques, il y a bien des ornamenta triumphalia ; mais il n’y a pas de catégorie politique correspondante.

Il sera traité ailleurs du classement inter prætorios, etc. Au point de vue du droit, il n’y a absolument aucune différence entre le quæstorius véritable et l’adlectus inter quæstorios ; ils sont tous deux sur le même pied, soit pour le droit de se présenter aux fonctions, soit pour le droit de vote au sénat, et naturellement aussi pour tous les droits honorifiques ; si bien que nous n’avons ici rien de spécial à dire sur cette catégorie. Nous pouvons seulement rappeler dès maintenant que cette institution, corrélative aux ornamenta, bien qu’elle y soit opposée, s’est développée à peu près à la même époque : le plus ancien exemple de son fonctionnement qui nous soit connu est l’adlectio du jeune César inter quæstorios, en 711.

Il en est autrement pour la seconde catégorie. L’idée qui réside dès le principe dans la concession des ornamenta, c’est que l’on donne la forme sans le fonds, l’apparence sans la réalité[2]. Le droit spécial de se présenter aux fonctions publiques attaché à la magistrature en jeu et le droit de siéger au sénat qui peut s’y lier sont exclus de cette concession[3] ; mais au contraire elle comprend, d’abord, si le gratifié est à un autre titre déjà en possession du droit de voter au sénat, le droit de le faire dans. la classe hiérarchique de la magistrature, ensuite le droit de paraître avec les insignes de cette magistrature aux fêtes publiques et dans les circonstances analogues, et d’être enterré avec eux. Il nous faut exposer ces règles en détail.

I. Les ornamenta n’ont pas d’influence sur le droit de se présenter aux magistratures. Celui qui reçoit les ornamenta prætoria ne voit pas modifiée par là sa capacité ou son incapacité de revêtir la préture[4]. Par suite, les ornamenta n’entrent pas en ligne de compte dans le calcul des magistratures. Auguste et Séjan, par exemple, ne comptèrent pas, lorsqu’ils arrivèrent plus tard au consulat, les ornements consulaires qui leur avaient été antérieurement accordés. Ce n’est que depuis Sévère que l’on s’est parfois écarté de cette règle[5].

II. Il est notoire que le droit de siéger au sénat n’est pas compris dans les ornamenta ; nous avons à peine besoin de rappeler que, dans les cas de beaucoup les plus nombreux, ils sont concédés é des personnages qui ne sont pas sénateurs et qui ne veulent ou ne peuvent l’être, et que, lorsque le contraire se présente, le droit de siéger au sénat[6] se fonde toujours sur un titre distinct des ornamenta.

III. Quand celui qui possède le droit de suffrage au sénat reçoit les ornamenta d’une classe hiérarchique supérieure, ou que, comme il peut aussi arriver, un non sénateur reçoit en même temps le droit de suffrage et un rang[7], le rang auquel il vote se déterminé désormais par la nouvelle classe[8]. Il était logique de traiter le droit de vote lui-même comme un droit essentiellement politique et de voir au contraire plutôt un droit honorifique dans son exercice à un certain rang. Mais l’ensemble des exemples connus montre en outre que c’est bien ainsi que l’on procédait en fait. En particulier, les relations multiples et circonstanciées de la réception de César au sénat, en 711[9], emploient constamment comme synonymes les expressions consulari loco sententiam dicere, consularis locus, consularia ornamenta. Dion indique également comme l’effet des honneurs prétoriens accordés à Germanicus qu’il avait le droit de voter au sénat après les consulaires, c’est-à-dire en tête des prætorii[10]. — Un sénateur qui recevait les ornamenta se trouvait donc, pour la brigue des magistratures et pour le vote au sénat, dans des classes hiérarchiques différentes. Par exemple, César, en 711, aurait, d’après les résolutions du sénat, dû voter comme consulaire et se présenter, comme questorien, aux nouvelles magistratures[11], et M. Marcellus entra au sénat de la même façon en 730[12]. — Le rang dans l’intérieur de la classe était, pour les ornati sententia comme pour les adlecti, en première ligne .déterminé par la disposition spéciale, et nous trouvons en fait des dispositions de ce genre attestées pour des cas particuliers[13]. A défaut de disposition expresse, les simples ornati ne doivent, d’après les principes généraux, avoir pris rang qu’après ceux qui avaient une ancienneté quelconque.

IV. Les ornamenta comprennent enfin le droit de prendre place parmi les sénateurs dans les solennités publiques et de participer aux banquets des sénateurs, ensuite celui de paraître en tout lieu dans le costume sénatorial, et pour peu que les ornamenta dépassent le plus bas degré, c’est-à-dire le degré de la questure, celui de paraître dans les solennités publiques avec les insignes impliqués par leur concession[14]. On ne peut établir directement, mais il n’est pas douteux que le droit d’être enterré avec les mêmes insignes soit également compris dans la concession. — Cette faveur ne se présente pas seulement sous la forme d’une concession générale des honneurs attachés ê, une magistrature déterminée, mais aussi, et probablement à l’époque ancienne exclusivement, sous celle de la concession spéciale de droits isolés de cette nature, en particulier du droit de porter la prétexte comme les ex-magistrats curules pour les vivants[15], de celui d’être enterré avec les honneurs de l’ex-censeur, c’est-à-dire avec la robe mortuaire de pourpre, pour les morts[16]. Les résolutions de ce genre ont naturellement la portée qui résulte de leur contexte ; mais cependant la première concession ne diffère peut-être que dans sa rédaction de la concession des ornamenta usitée sous l’Empire. — Il se comprend de soi que les ornamenta étaient reproduits dans les représentations figurées[17]. — Pour les non sénateurs, ces droits honorifiques 1461 sont le seul effet des ornamenta, et, leur concession étant toujours plus fréquemment et, plus tard, exclusivement faite à de tels personnages, c’est à ces honneurs extérieurs que font d’abord et avant tout penser Ies ornementa.

Reste à exposer le développement historique des ornementa et à expliquer les différences de leurs diverses variétés. Sous le premier rapport, il faut distinguer la concession des ornamenta à des personnes qui siégeaient déjà au sénat ou qui étaient destinées à y entrer, et la même concession faite à des personnes qui n’appartenaient ni ne pouvaient appartenir au sénat. Car, si les deux actes ont théoriquement le même caractère[18], les suites de la concession sont, comme nous avons vu, toutes différentes pour les deux catégories. Par suite, le développement pratique n’a pas été du tout le même pour les deux. La concession des ornamenta aux sénateurs tire son origine des primes légales établies au VIIe siècle en faveur des accusateurs de la procédure des quæstiones : l’une de ces primes était la concession du droit de suffrage et des honneur d’une classe hiérarchique plus élevée[19]. Le cas le plus ancien que nous connaissions est celui du tribunicius C. Papirius Carbo qui aurait même été honoré des ornements consulaires par le sénat, en 689, en récompense du succès d’une poursuite repetundarum[20]. On rapporte du dictateur César qu’il concéda les ornements consulaires à dix prœtorii[21]. Il a déjà été question de la concession des mêmes droits faite par le sénat en 714 au jeune César. Du temps d’Auguste, les honneurs prétoriens ont souvent été accordés aux jeunes membres de la maison impériale quelques années avant qu’ils parvinssent à la préture[22]. S’il ne nous est rien rapporté dé pareil pour l’époque postérieure, ce peut être un hasard ; mais cela peut aussi tenir à ce que les membres de la maison impériale ne prirent plus postérieurement aux travaux du sénat la même part que sous Auguste. Des légats de légion, c’est-à-dire probablement des prætorii et certainement des sénateurs, reçurent encore les ornements consulaires sous Othon et au début du règne de Vespasien[23] ; nous ne connaissons pas de pareilles concessions qui soient plus récentes. On conçoit que l’attribution des ornements prétoriens aux sénateurs — les questoriens ne pouvaient pas leur être donnés — se soit trouvée absorbée dans l’adlection inter prætorios, devenue de plus en plus fréquente. Il n’en est pas de même pour l’attribution des ornements consulaires, puisque l’adlection inter consulares n’est entrée que tardivement dans l’usage ; mais la facilité croissante d’arriver aux faisceaux consulaires effectifs peut bien encore avoir eu pour effet que les ornements consulaires n’aient plus guère été accordés à des sénateurs postérieurement au premier siècle.

Les choses se présentent différemment pour la concession des honneurs sénatoriaux à des non sénateurs. II se peut qu’elle n’ait pas été rare à l’époque ancienne de la République, notamment comme récompense militaire. Mais l’oligarchie arrivée à son développement ne paraît pas avoir toléré qu’un simple soldat pût, à raison de son courage, être mis extérieurement sur le même pied qu’un ex-sénateur. Des concessions de ce genre n’ont en principe eu lieu qu’exceptionnellement dans la période récente de la République[24]. Le cas le plus fréquent est encore celui où, en excluant du sénat un de ses membres, on admet ce tempérament de lui laisser les droits honorifiques en même temps qu’on lui enlève les droits politiques. L’exemple de ce genre le plus ancien qui nous soit connu, concerne un ex-magistrat qui fut écarté du sénat par les censeurs de 684, avec maintien de ses droits honorifiques, pour une tache de sa naissance, et bien que son honorabilité fut pour le surplus intacte. Auguste, sous le règne duquel les ornementa ont été si souvent accordés à des sénateurs, a également laissé, lorsqu’il n’y avait pas de circonstances aggravantes spéciales, les droits honorifiques aux personnages atteints par l’épuration du sénat. Mais la concession de ces honneurs à des personnes qui ne siégeaient ni ne devaient siéger au sénat, ne se rencontre pas dans les derniers temps de la République, ni même encore sous Auguste[25]. Elle ne reparaît que sous Tibère en l’an 19 de l’ère chrétienne[26]. Elle a alors, comme depuis en général, principalement lieu au profit des titulaires des fonctions équestres les plus élevées, en particulier au profit du præfectus prætorio auquel on avait coutume d’accorder, à l’origine, les ornements prétoriens et, depuis Néron, les ornements consulaires[27]. Mais des præfecti vigilum[28] et d’autres personnes influentes ou spécialement en faveur du second ordre de l’État[29] ont aussi obtenu ces ornements ; ils ont même été donnés à des procurateurs provinciaux[30] et, au moins lorsque, sous le gouvernement de Claude, les maîtres et les esclaves parurent avoir échangé leurs rôles, à des affranchis impériaux[31]. Les concessions des ornamenta, faites soit aux membres de la maison impériale[32], soit aux familles de dynastes dépendants[33] qui ne pouvaient ou ne voulaient suivre la carrière des magistratures romaines, sont provoquées par d’autres motifs, mais ne sont pas essentiellement différentes.

Les ornamenta de magistrats présentent trois gradations, qui se lient aux trois degrés de I’échelle obligatoire traditionnelle établie pour les magistratures sous la République : ils peuvent être consulaires, prétoriens, ou questoriens ; les derniers ne se présentent pas fréquemment[34] et, comme il va de soi, ne peuvent se rencontrer que chez des non sénateurs. Il n’y a pas plus d’ornements sénatoriaux en général[35] qu’il n’y a d’ornements tribuniciens, édiliciens[36] ou censoriens[37]. L’ascension d’un rang inférieur é un rang plus élevé avait lieu pour les ornements, tout comme pour les magistratures véritables[38]. Quant à l’appareil extérieur de ceux qui ont les ornamenta, les questoriens sont distingués de ceux qui sont au-dessus d’eux seulement[39] par le défaut de la prétexte, qui, d’ailleurs, ne se manifeste que dans les fêtes publiques. Au contraire, les prætorii ne semblent s’être distingués des consulaires qu’en ce que, lorsque le sénat paraissait en corps, ainsi, dans les fêtes publiques, les banquets du sénat, etc., les sénateurs étaient partagés selon leurs classes hiérarchiques et que ceux qui avaient des ornamenta étaient placés dans la classe à laquelle ces ornementa se rapportaient. A raison de l’Origine des ornamenta expliquée plus haut, il est vraisemblable que leur portée ne tenait pas autant à la façon générale dont on paraissait en public qu’à la place donnée a leur bénéficiaire quand le sénat lui-même paraissait en public, en particulier dans les divertissements publics.

A côté des ornements de magistrats, il y a les ornements triomphaux, c’est-à-dire le droit de porter, sans avoir triomphé, les insignes qui restaient à vie au triomphateur. A l’époque de la République, il n’y a pas trace de cette fiction. L’institution remonte à Auguste et se lie à la limitation du triomphe véritable à l’empereur et aux membres de la maison impériale. Au reste, Auguste observa fermement la règle que les ornements triomphaux ne pouvaient être donnés que lorsque les conditions du triomphe auraient été réunies d’après le système jusqu’alors en vigueur ; ils furent d’abord accordés, en 742, à ses deux beaux-fils, Tibère et Drusus[40], et ensuite à beaucoup d’autres généraux[41]. Cependant, depuis les modifications apportées sous César aux conditions du triomphe, il ne pouvait plus guère être trouvé de limite théorique ; sous l’administration déréglée des empereurs récents de la dynastie julio-claudienne, un arbitraire absolu prévalut dans la concession de cette distinction, et les ornements triomphaux ont été, sous Néron, accordés même à des non sénateurs[42]. Après Hadrien, on n’en trouve plus aucune mention, et ils peuvent être regardés comme ayant désormais disparu[43].

Tous les ornements, ornements de magistrats et ornements triomphaux, ont toujours été accordés par le sénat. Pour les ornements triomphaux, cela résulte déjà de ce que le triomphe lui-même était, dans la période récente de la République, accordé par le sénat. D’après les documents existant sur ce point, la proposition était faite par l’empereur, mais c’était le sénat qui statuait[44]. Il en est de même des ornements de magistrats. Bien que l’empereur attribue lui-même en partie les magistratures en vertu de son droit de commendatio, le classement d’un sénateur pour la hiérarchie et pour le vote dans une classe supérieure à celle à laquelle il appartient, et l’admission d’un non sénateur au partage des honneurs qui reviennent au sénat n’ont jamais été prononcés directement par l’empereur, quoiqu’ils aient difficilement été prononcés parle sénat autrement que sur sa proposition[45].

 

 

 



[1] L’étude de Nipperdey sur les ornamenta consularia, etc., dans les Abhandlungen de Leipzig, 5, 69 ss. n’a pas éclairé d’une manière suffisante ce sujet difficile, bien qu’elle marque pour certains points, en particulier pour la séparation énergique de l’adlectio et des ornementa, un progrès sur les travaux antérieurs.

[2] Comme l’institution même, les expressions techniques se sont plutôt fixées à l’époque des débuts de l’empire qu’à l’époque de la République. La plus ancienne mention des ornamenta se trouve dans Cicéron, Pro Cluent. 41, 13-9. Ornamenta est là à peine employé comme expression technique ; mais il n’en ressort que plus nettement que l’on entend par là les droits purement honorifiques par opposition à ceux qui ont une importance politique.

[3] On n’aurait certainement pas non plus attaché le jus imaginum aux simples ornamenta. Mais on ne peut pas en parler dans cette matière, puisque, tant que le jus imaginum a existé d’une manière effective, il n’y a pas eu de magistrature fictive comme institution générale.

[4] Tibère reçut le rang prétorien en 735 (Dion, 54, 10) et devint préteur en 738 (Dion, 54, 19). Drusus reçut le rang prétorien 3 la En de 739 (Dion, 54, 22) et devint préteur en 743 (Dion, 54, 32. 33. 34). Un q. Aug. orn(amentis) [p]rætoricis a senatu auctorib(us) [im]peratorib(us) Vesp(asiano) et Tito adlectus devient ensuite préteur (Gori, Inscr. Etr. 2, 294 = C. I. L. XI, 1834). Cf. Suétone, Claude, 1. D’une manière analogue, à Cirta, un individu hab(ens) orn(amenta) quinq(uennalicia) d(ecurionum) d(ecreto) devient ensuite encore quinquennalis (C. I. L. VIII, 7986 ; Hermes, 1, 59). V. des cas analogues C. I. L, III, 384. 392.

[5] C. Fulvius Plautianus, consul en 203 après J.-C. est le premier à s’être intitulé consul II à cause des ornamenta consularia qu’il avait obtenus précédemment comme præf. præt. (Dion, 46, 46. 78, 13.)

[6] Une fois l’on accorde à un non sénateur avec les ornamenta le droit de s’asseoir, s’il paraît au sénat, clans la suite de l’empereur (Dion, 60, 23), ce qui naturellement n’a rien de commun avec le droit des sénateurs de siéger et de voter.

[7] Tite-Live, Ep. 1, 18. Quelqu’un est également gratifié par un municipe, C. I. L. III, 753, d’abord des ornementa duoviralia, puis du jus sententiæ dicundæ.

[8] Les inscriptions municipales fournissent encore pour cela des analogies, ainsi l’inscription de Capoue (C. I. L. X, 8904) d’un decurio ornatus sentent(ia) IIvirali.

[9] Auguste, Mon. Anc. 1, 3. Tite-Live, Ep. 118. Appien, B. c. 3, 54. Dion, 40, 29. Ces trois témoignages se rapportent aux sénatus-consultes de janvier 711 ; Dion ajoute, 46, 41, qu’après la bataille de Mutina le sénat lui refusa dans l’été le consulat. — La proposition de Cicéron faite le 1er janvier 711, tendait à (Philipp. 51 37, 46) : Senatui placere C. Cæsarem C. f. pontificem pro prætore senatorem esse sententiamque loco prætorio dicere ejusque rationem, quemcumque magisiratum petet, ita haberi, ut haberi per leges liceret, si anno superiore quæstor fuisset. Cf. Plutarque, Ant. 17.

[10] Dion, 56, 17.

[11] Par conséquent, notre tradition est, sur les événements en question, parfaitement pure et concordante, si ce n’est que Dion a commis la faute de placer la concession des ornements consulaires après la bataille de Mutina au lieu d’avant. Les résolutions prises furent au nombre de trois : 1° que C. César serait sénateur (Mon. Anc. ; Cicéron ; Tite-Live) ; 2° qu’il serait réputé quæstorius (Dion ; Cicéron) ; 3° qu’il aurait son siège parmi les consulaires (Mon. Anc. ; Tite-Live ; Appien ; Dion) ce qui dépassait la proposition de Cicéron : C. Cæsarem... sententiam loco prætorio dicere. — Nipperdey a trouvé ces textes si surprenants qu’il écarte ceux de Dion et d’Appien comme contenant une grande et une encore plus grande contradiction et que, dans Cicéron, il corrige prætorio en quæstorio parce qu’il ne pouvait pas être imposé à un personnage qui était prætorius dans le sénat, de devenir édile ou préteur. Cela est aussi vrai qu’il est faux de regarder comme un prætorius celui qui vote au rang prétorien.

[12] D’après Dion, 53, 28, le droit lui fut donné à son entrée au sénat, en 730, tandis qu’il reçut l’édilité en 731. Cela doit être donc compris en ce sens qu’il fut, quant aux candidatures, déclare quæstorius et qu’il obtint en cette qualité l’édilité, mais qu’il votait parmi les prætorii.

[13] Ainsi pour Germanicus. De même pour le jeune Drusus, Dion, 56, 17.

[14] Suétone, Auguste, 35. Dion, 58, 11, ce qui ne peut s’appliquer qu’aux ornamenta prætoria de Séjan ; car il reçut le consulat de l’empereur. Dion, 58, 12, rapporte aussi que le sénat conféra les honneurs questoriens à un præf. vigilum, les honneurs prétoriens à un præf. prætorio. Le même, 54, 14. 55, 9. Cicéron, Pro Cluent. 47, 132 (p. 100, note 1). Les banquets du sénat, dont il s’agit sont en première ligne l’epulum Jovis du 13 novembre et l’epulum Minervæ du 13 septembre (Aulu-Gelle, 2, 18, 2, etc. ; Handb. 6, 349 = tr. fr. 13, 38). — Le statut de Genetiva, c. 125, donne place au théâtre, de même qu’aux décurions, à ceux quibus locus in decurïonum loco ex d(ecreto) d(ecurionum)... d(ari) o(portet). L’ordo accorde à un augustale ut... commodis publicis ac si decurio frueretur (Orelli, 4047 = C. I. L. X, 4760). Autres exemples Eph. ep. II, 131.

[15] Tacite, Ann. 4, 15. 6, 27 ; Hist. 4, 47 ; Vita Pertinacis, c. 15 ; Vita Severi, c. 7 ; et en outre l’épitaphe, probablement relative à un prince de la maison d’Auguste, C. I. L. VI, 895. L’empereur Claude, auquel, tout comme à Auguste (Tacite, Ann. 12, 69), un funus censorium fut décrété (Tacite, Ann. 13, 2), avait été censeur. On aurait pu sans doute aussi lui faire des funérailles de triumphalis ; mais à cette époque les triumphales étaient aussi communs que les censorii étaient rares. A l’explication de Nipperdey (sur Tacite, Ann. 3, 5), d’après laquelle le funus censorium serait celui organisé par les censeurs, par suite aux frais de l’État, on peut opposer surtout, autre l’inscription ci-dessus, que, le funus publicum se présentant en moyenne deux fois plus souvent aux époques où il n’y avait pas de censeurs qu’à celles où ils étaient en fonctions, il ne peut pas facilement leur avoir emprunté son nom.

[16] On expliquera par là la permission accordée, en 652, par le général à un centurion, à raison de sa belle conduite dans la guerre des Cimbres, de sacrifier revêtu de la prétexte. De même il fut proposé en faveur du quæstorius Caton, en 698, τάς θέας αύτόν έν έσθήτι περιπορύρω θεάσασθαι (Plutarque, Cal. min. 39). Le futur Auguste promit aussi à ses centurions et à ses tribuns, avec d’autres honneurs, περιπορφρους έσθήτας καί βουλευτικήν έν ταΐς πατρίσιν άξίωσιν (Appien, B. c. 5, 128), c’est-à-dire à chacun dans son pays les ornementa decurionalia.

[17] Orelli, 3986 = C. I. L. II, 4268. Quand l’ordo décerne à un défunt laudationem publicam, locum sepulturæ, impensam funeris, clupeum, statuam pedestrem et ornamenta decurionalus (C. I. L. II, 1286 rapproché de 1186), les ornamenta comprennent à la fois les deux choses : le costume porté par le cadavre et les insignes mis à la statue.

[18] Cela ressort surtout avec vigueur dans Tacite, Hist. 4, 4 : Adduntur Primo Antonio consularia, Cornelio Fusco et Arrio Varo prœtoria insignia. Le premier est sénateur, les deux autres ne le sont pas.

[19] Cicéron, Pro Balbo 25, 51. Je dois l’indication de ce texte jusqu’à présent inaperçu à mon ami Dessau.

[20] Dion, 36, 40 [23]. Nipperdey, p. 73, soulève des doutes sur la véracité de l’assertion ; il me semble qu’il n’y a pas de contradiction à ce que Cicéron parle des ornements prétoriens et Dion des ornements consulaires ; les primes des accusateurs étaient réglée ; différemment pour les différentes quæstiones et probablement même graduées dans la même quœstio. La décision prise en 698 en l’honneur du quæstorius Caton a le même caractère.

[21] Suétone, Jul. 76 : Decem prætoriis viris consularia ornamenta tribuit. Au contraire, Dion, 43, 47 se rapporte, comme Nipperdey, p. 18, le remarque avec raison, aux adlectiones.

[22] M. Marcellus entra, en 730, au sénat nommé quæstorius, mais avec les honneurs prétoriens. Tibère, questeur en 731, obtint le rang prétorien en 733 et la préture en 738 ; son frère Drusus, questeur en 739, obtint le rang prétorien à la fin de l’année et la préture en 743 ; Germanicus, questeur en 7 après J.-C., les honneurs prétoriens en 10 après J.-C., tandis qu’il lui fut fait postérieurement remise de la préture pour lui permettre de revêtir le consulat dés l’an 12 (Dion, 56, 26). Le second Drusus reçut, dès l’an 10, les droits prétoriens pour l’époque où il revêtirait la questure, qu’il obtint ensuite en l’an 11 (Dion, 56, 25).

[23] Tacite, Hist. 1, 79. 4, 4.

[24] Il est remarquable que le futur Auguste promet comme récompense militaire les ornamenta de décurion, mais non les sénatoriaux.

[25] L’attribution à un non sénateur pour le cas où il entrerait au sénat, d’un rang plus élevé, comme cela eut lieu pour le second Drusus, est quelque chose de tout différent.

[26] Dion, 57, 19.

[27] Les ornamenta prætoria furent accordés aux præfecti prætorio Séjan et Macro, son successeur (Dion, 58,12), et à d’autres encore sous Néron (Tacite, Hist. 11, 4) et Vespasien (Tacite, Hist. 4, 4) ; les ornements consulaires d’abord, autant que nous sachions, sous Néron, à Rufrius Crispinus, qui avait précédemment obtenu les prétoriens (Tacite, Ann. 16, 17 rapproché de 33, 4) et à Sex. Afranius Burrus (inscription de Vaison, C. I. L. XII, 5843), puis, ensuite, à beaucoup d’autres : Tacite, Ann. 15, 12 ; Dion, 46, 48. 18, 13. 79, 4. Orelli, 3157 = C. I. L. IX, 5358. Orelli, 3514 = C. I. L. VI, 4599. Vita Hadr. 8 ; Pii, 10.

[28] Le præf. vigilum Laco reçoit sous Tibère les insignes de questeur (Dion, 58, 12).

[29] Un secrétaire de cabinet de l’empereur (ab epistulis) reçoit sous Nerva les insignes prétoriens (Orelli, 801 = C. I. L. VI, 798) ; l’ancien tuteur fie l’empereur Néron reçoit les consulaires (Tacite, Ann. 43, 10) ; un chevalier romain les questoriens (Tacite, Ann. 16, 33 rapproché de 28).

[30] Suétone, Claude, 24. Des cas isolés de ce genre sont rapportés par Tacite, Ann. 12, 21 pour un procurateur du Pont, par Dion, 60, 23, pour le Laco mentionné note 28, en qualité de procurateur des Gaules (cf. Orelli, 3130 = C. I. L. V, 3340). D’autres procurateurs de provinces obtiennent les ornements prétoriens (Tacite, loc. cit. et Hist. 4, 4). Vita Alex. 68, doit aussi se rapporter à cela.

[31] Pallas reçut les ornamenta prétoriens (Pline, Ep. 7, 29. 8, 6 ; Tacite, Ann. 12, 53 ; Suétone, Claude, 28 ; Pline, H. n. 35, 18, 201). Narcisse, les questoriens (Tacite, Ann. 11, 38 ; Suétone, loc. cit.).

[32] Ainsi Claude reçut de Tibère les ornamenta consulaires (Suétone, Claude, 5) ; le dernier fit casser la décision du sénat, id., 6. Probablement, ce que l’on doit comprendre, c’est que le sénatus-consulte portait, comme pour Octave : Ut senator esset et loco consulari sententiam diceret, et que Tibère rejeta la première disposition et admit la seconde.

[33] Le roi juif Agrippa Ier reçut, sous Caligula, les ornamenta prétoriens (Philon, In Flacum, c. 7) et, sous Claude, les consulaires (Dion, 60, 8) ; son frère Hérode reçut sous ce dernier les prétoriens (Dion, loc. cit.). Au reste tous deux avaient la qualité de citoyen déjà concédée à leur ascendant Antipater par le dictateur César (Josèphe, Ant. 14, 8, 3) ; les ornamenta n’auraient sans aucun doute pu être accordés à un non citoyen.

[34] Je ne connais que les trois exemples cités notes 28 et 29. Jusqu’à présent ils ne figurent pas sur les inscriptions.

[35] La raison est que, dans le sénat de ce temps là, il n’y a pas de classe hiérarchique inférieure à celle des quæstorii ; ce qui fait qu’il n’y a pas d’adlectio inter senatores. Au reste, l’expression est employée collectivement pour désigner à la fois les honneurs consulaires, prétoriens et questoriens (Digeste, 50, 16, 100). Dans les municipes où il y a toujours eu une classe de sénateurs correspondant aux anciens pedarii, on rencontre par suite, fréquemment, les ornamenta decurionalia.

[36] A. W. Zumpt (Rhein. Mus. nouv. série, 2, 276) et Marquardt (1re éd.) ont fait remarquer l’absence de témoignages relatifs aux ornamenta tribunicia et ædilicia (car il n’y a pas de compte à tenir du passage incertain et embrouillé de la vita Marci, c. 10). La raison doit en être en premier lieu que le système des ornamenta fut organisé à une époque qui ne connaissait pas encore les classes sénatoriales des tribuinicii et des ædilicii créées seulement plus fard par Auguste. — Dans les municipes, on trouve ædilicii honores (C. I. L. II, 4062) ou ædilicium jus (C. I. L. II, 4061) relativement à des Augustales.

[37] On rencontre, bien que rarement, des ornamenta censoria (Orelli, 3897 = C. I. L. X, 60) ou quinquennalicia municipaux (Henzen, 6956 = C. I. L. VIII, 1986). La raison de la différence est que la quinquennalité se maintint dans les municipes, si bien que les quinquennalicii s’y distinguaient, comme une classe hiérarchique supérieure, des duoviralicii, tandis que les censorii faisaient, pour ainsi dire, complètement défaut à Rome, à l’époque où se développa le système des ornamenta. Par conséquent, on pouvait bien accorder le funus censorium, c’est-à-dire le droit d’être enterré en robe de pourpre, mais on ne pouvait pas placer un vivant dans une classe hiérarchique qui, en réalité, n’existait plus. — On rencontre aussi parfois des ornamenta sacerdotalia comme distinction municipale (C. I. L. III, 384. 392. 753), amis non comme coutume romaine.

[38] Cf. les cas de Crispinus, Laco et Agrippa, (notes 27, 30 et 33).

[39] Il est possible, qu’en outre, le nombre des faisceaux fut différent pour les funérailles.

[40] L’opinion traditionnelle, encore suivie par Borghesi (Opp. 5, 26), d’après laquelle les ornements triomphaux auraient été accordés pour la première fois à Agrippa, en 740, est inadmissible. Dion, 54, 24, ne le dit pas du tout, et nous n’avons aucune raison de nous écarter du témoignage de Suétone, qui, à la vérité, n’est pas sûr de ce qu’il avance (Tibère, 9) : Quas ob res et ovans (en 745) et curru (en 747 et 765) urbem ingressus est (Tibère), prius, ut quidam putant, triumphalibus ornamentis honoratus novo nec antea cuiquam tributo genere honoris, et de celui de Dion, lui-même, 54, 31. 33, d’après lequel les ornements triomphaux furent accordés, en 742 et 743 aux deux frères Tibère et Drusus. Cette fois, ils furent décernés, au moins à Drusus, en même temps que l’ovatio (Dion, loc. cit. ; Suétone, Claude, 1) ; plus tard, ils apparaissent à titre pleinement indépendant.

[41] Suétone, Auguste, 38.

[42] Suétone, Nero, 15, où il parait s’agir du præf. præt. Tigellinus (Tacite, Ann. 15, 72). Voir pour plus de détails sur la dénaturation postérieure de cette institution, Handbuch, 5, 594 = tr. fr. 14, 344.

[43] Le plus récent témoignage connu jusqu’à ce jour, qui m’est signalé par Dessau, est celui de C. I. L. III, 2830, sous Hadrien. Borghesi, Opp. 5, 30 et ss. Handb. 5, 591 = tr. fr. 44, 344. Cf. p. 93.

[44] Orelli, 750 = C. I. L. XIV, 3608. De même Orelli, 622 = C. I. L. XIV, 3606. Orelli, 3187 = C. I. L. VI, 1386. Henzen, 5366 = C. I. L. XIV, 3613. Henzen, 3448 = C. I. L. VI, 1444. Pline, Ep. 2, 1, 1, etc. Dans la constitution arrêtée par Auguste pour le temple de Mars, il était prescrit que ceux qui se rendraient dans les provinces avec un commandement partiraient de cet édifice (Dion, 55, 10 ; Suétone, Auguste, 29). On s’explique facilement que le sénat soit parfois nommé seul sur les inscriptions et que l’empereur le soit plus souvent seul dans les auteurs.

[45] La procédure suivie est montrée par les cas d’Agrippa (note 33) et de Pallas (note 31), puis, en outre, par l’inscription, citée plus haut, d’un orn[amentis p]rætoricis a senatu auctoribus imperatorib(us) Vespasiano et Tito adlectus et par l’inscription Orelli., 801 = C. I. L. VI, 798 : Eodem (dive Nerva) auctore ex s. c. prœtoriis ornamentis. Je ne connais pas d’exemple certain d’omission du sénat.