I. — L’AUSPICIUM.Les pouvoirs du magistrat consistent dans le droit d’accomplir, au nom de la cité, les actes qui la concernent tant avec les dieux qu’avec les hommes. Les magistrats ont, dit-on, pour désigner leurs pouvoirs par leur expression la plus large et la plus élevée, l’auspicium et l’imperium (auspicium imperiumque)[1]. Cette division en deux branches, qui sert de base à toute l’organisation politique de Rome, trouve sa plus vivante expression dans les deux actes d’entrée en fonctions qui lui correspondent[2] : la prise des premiers auspices, qui assure l’assentiment des dieux, et la loi curiate, qui engage la foi des citoyens. Nous commençons la théorie générale des attributions du magistrat par celle de ses auspices. La religion romaine est dominée par l’idée que l’homme ne peut ni ne doit connaître les choses à venir et que les dieux ne l’aident pas à les pénétrer[3], mais qu’en présence de tout acte que l’homme entreprend librement, le dieu très haut et très bon du peuple romain, le Pater Jovis[4], éprouve un sentiment d’approbation ou de désapprobation, et qu’il le manifeste, dès avant le commencement de l’acte, par des signes apparents intelligibles aux personnes compétentes ; ce qui fait qu’on peut, si l’on veut, être sûr d’avance du succès de ses actes, à condition de renoncer à ceux pour lesquels le ciel a, par des signes, ex-primé sa désapprobation[5]. — Les signes employés par Jupiter sont multiples. Mais une prédominance exclusive appartient à ceux qui, au lieu d’être provoqués par un acte intentionnel de l’homme, comme est par exemple le tirage au sort, se produisent spontanément, selon le cours naturel des choses, dans l’espace situé entre le ciel et la terre. Parmi ces derniers, l’on distingue les signes que l’observateur a sollicités d’avance et qui, par suite, sont en quelque sorte la réponse à une question posée aux dieux dans une formé déterminée (legum dictio), les auguria impetrativa, et ceux qui, tout en étant considérés d’après le rituel comme susceptibles d’interprétation, se produisent d’une manière fortuite, les auguria oblativa[6]. — Les signes dont l’observation était prescrite de toute antiquité, à la constatation et à l’interprétation desquels l’État portait ses soins depuis une époque immémoriale, étaient divisés par la discipline augurale en cinq catégories[7], qui ne peuvent être négligées, même ici où nous n’étudions cette théorie que dans ses rapports avec le droit public. Ce sont : d’abord, les quatre variétés d’auguria impetrativa, dont les trois premières, les signes fournis par le vol des oiseaux, par les autres animaux et par le ciel, appartiennent à la compétence urbaine, et dont la quatrième, les signes fournis par les poulets, appartient à la compétence militaire ; puis, en cinquième lieu, les auguria oblativa ou diræ. 1. Signes fournis par les oiseaux (signa ex avibus). L’observation du vol et des cris des oiseaux paraît avoir été, tant qu’on prit les auspices au sérieux, la forme ordinaire dans laquelle on y recourait lorsqu’ils étaient requis. C’est ce qu’indiquent les expressions auspicia, augures, dans lesquelles le vol des oiseaux apparaît comme l’objet sinon exclusif, au moins principal des observations. La préférence avec laquelle la discipline augurale était tournée de ce côté[8] a, de plus, laissé des traces nombreuses et précises dans les formules et les documents les plus anciens[9]. Mais l’argument décisif, c’est que l’observation des phénomènes célestes, qui fut plus tard le principal instrument du commerce avec les dieux, ne peut avoir été pratiquée primitivement que dans une proportion beaucoup plus restreinte. Tant que l’on fit des auspices un usage sérieux et que les signes par lesquels se manifestait la volonté des dieux furent réellement constatés, ce ne put pas être à ces phénomènes relativement rares, ce fut au vol des oiseaux et aux faits analogues que l’on rattacha les auguria impetrativa précédés d’une legum dictio. Si les signes que, grâce au vol des oiseaux, on a toujours à sa disposition, sont tenus pour plus faibles que celui fourni par la vue d’un éclair, si, par suite, la personne qui a obtenu le dernier n’a plus, de tout le jour, besoin d’obtenir les premiers, cela montre précisément que ceux-ci sont les signes habituels et réguliers. — Dès l’époque de Cicéron, les auspices fournis par les oiseaux étaient tombés en désuétude[10]. 2. Signes fournis par les autres animaux (pedestria auspicia, auspscia ex quadrupedibus)[11]. L’observation de la marche et des cris des quadrupèdes et des reptiles qui circulant dans un espace déterminé est absolument symétrique à celle des oiseaux. Mais elle parait n’avoir été usitée que dans une bien plus faible mesure. A l’époque de Cicéron, ces auspices avaient disparu comme les précédents. 3. Signes célestes (cælestia auspicia). Ce sont, sinon exclusivement, au moins principalement le tonnerre et l’éclair[12]. Les Romains considèrent l’éclair lancé par Jupiter comme le plus élevé et le plus décisif de tous les signes envoyés par les dieux[13]. Et ce signe a, sur tous les autres, l’avantage que son effet s’étend toujours à toute la journée dans laquelle il a été reconnu[14]. En général, l’éclair est tenu pour un, signe favorable, quand il est dirigé de gauche à droite et qu’il parait dans un ciel serein[15]. Il y a cependant une exception pour les comices. Non seulement l’assemblée du peuple se dissout toujours, quand il éclate un orage, sans qu’il y ait à distinguer selon la direction de la foudre ; mais on considère la constatation d’un éclair, à un jour quelconque, comme exprimant l’opposition de la divinité à l’accomplissement d’aucun acte cum populo dans cette journée[16]. II a été fait de très bonne heure un scandaleux abus de ce signe élevé entre tous. On a profité de ce que quiconque avait qualité pour observer les auspices pouvait exiger la croyance aux déclarations qu’il faisait sur leur résultat[17], et de ce qu’il n’y avait, contre les fausses déclarations, volontaires ou non, aucune vole de recours. Et on en a abusé sous deux rapports. En premier lieu, le signe favorable tiré de la vue d’un éclair, qui, de sa nature, rentre dans les auguria oblativa et qui certes ne fut employé que de cette façon tant que la croyance aux auspices exista sérieusement, fut transporté parmi les impetrativa : les magistrats qui prenaient les auspices regardaient s’il y avait des éclairs et prétendaient en avoir vu de favorables[18]. C’est surtout polir les entrées en fonctions de magistrats que cela se produisait : lorsqu’au premier jour de ses fonctions, le nouveau magistrat, consul, préteur ou questeur, implorait des dieux un signe favorable, on l’informait régulièrement qu’un éclair dirigé de gauche à droite avait été vu dans un ciel serein[19]. Il est probable que cette forme d’auspices, non seulement plus énergique que toutes les autres, mais rendue ainsi d’un maniement beaucoup plus facile, a, par la suite, supplanté partout, pour l’administration urbaine, les auspices fournis par les oiseaux et les autres animaux, et qu’à l’époque récente les auspicia impetrativa urbana se confondent avec les auspicia cælestia[20]. En second lieu, la déclaration d’un magistrat possédant les auspices qu’il avait à un jour donné observé le ciel (de cælo servasse), et qu’il y avait constaté un éclair[21] constituait, vraie ou fausse, un procédé, constitutionnellement inexpugnable, et bientôt d’usage courant, pour empêcher la réunion du peuple fixée au même jour. La constatation de l’éclair en pareil cas allait si bien de soi qu’en règle on se bornait à indiquer l’observation sans son résultat[22]. On alla même dans cette voie jusqu’à annoncer formellement d’avance que l’on ferait l’observation à des jours déterminés[23], en entendant par là, comme une conséquence naturelle, que le signe divin serait constant[24]. Pourtant une telle publication préalable ne suffisait pas à elle seule, et il fallait, à chacun des jours en particulier, informer, en temps opportun, le magistrat qui tenait les comices que l’observation avait en lieu[25]. En présence de l’importance politique de ces observations relatives aux éclairs comme de leur arbitraire à peine déguisé, on conçoit que non seulement il soit intervenu, à plusieurs reprises, à l’époque récente de la République, des réglementations du droit de consulter les auspices avec une force légalement obligatoire, — c’est à quoi paraissent s’être bornées, les lois que nous étudierons plus loin d’Ælius et de Fufius, à la fin du vie siècle ou au début du vue, et celle de Clodius, en 690, — mais encore que, plus d’une fois, des ordres supérieurs[26] ou des sénatus-consultes[27] aient défendu à ceux qui avaient constitutionnellement le droit d’observer les éclairs, de l’exercer à des jours déterminés. 4. L’appétit des poulets (auspicia ex tripudiis). A côté de signes tournis l’observation des oiseaux qui volent dans les airs, la coutume romaine connaissait une autre espèce d’auspices fournis par les oiseaux. On jetait à manger à des oiseaux, en particulier à des poulets[28], et si l’un d’eux laissait, en mangeant, tomber quelque chose de son bec (tripudium solistimum), on y voyait une approbation donnée par les dieux à l’accomplissement de l’acte projeté[29]. Ce procédé se recommandait soit par la clarté et la simplicité du signe, qui rendaient très facile de se passer du concours des hommes de l’art, soit surtout par sa rapidité et sa sûreté ; car, les poulets étant emportés parles magistrats dans des cages spéciales[30], l’homme aux poulets (pullarius) avait le succès entre les mains[31]. C’était par suite le procédé que dans le camp[32] le général employait couramment[33]. En revanche, pour les auspices publics de la ville de Rome[34], en particulier pour ceux qui se rapportent aux comices du peuple romain, l’emploi des poulets pour rechercher la volonté des dieux n’était sûrement pas admissible à l’époque ancienne et il est au moins douteux qu’il le fût à l’époque récente[35]. 5. Les avertissements (signa ex diris) sont en général tous les phénomènes extraordinaires qui, d’après les dispositions 186 de la théologie romaine, sont considérés comme ayant une signification, en particulier comme étant de mauvais augure. D’après la nature des choses, et d’autant qu’ils interviennent en général pour détourner de faire un acte, on n’implore pas de pareils signes ; ils ne peuvent donc être regardés que comme des auguria oblativa. Ils jouent, en théorie et en pratique, un rôle d’une importance extraordinaire : il suffira ici d’indiquer quelques-uns des principaux points de vue. Les avertissements peuvent intervenir soit en corrélation directe avec une auspication, soit d’une manière indépendante. Le silence absolu (silentium) étant la première et la plus importante des conditions de l’auspicium[36], ou comprend d’abord parmi les diræ toutes les chutes d’objets qui se produisent dans le templum[37] et en général tous les bruits inconvenants qui troublent l’observateur[38]. Il y a également un avertissement si celui qui prend les auspices trébuche, s’il commet une erreur dans la prononciation de la formule sacramentelle, ou s’il se produit toute autre défectuosité du même genre dans la cérémonie de la prise des auspices. Pour les diræ qui se produisent d’une manière indépendante, le cas le plus connu est celui où un individu est pris d’une attaque d’épilepsie — morbus comitialis — pendant l’accomplissement d’un acte ; lorsque l’attaque se produit dans une assemblée du peuple, elle a pour conséquence nécessaire la dissolution de l’assemblée[39]. On considère également comme portant malheur à quelqu’un de trouver en sortant des corbeaux qui volent à sa rencontre[40]. On remplirait des pages avec les conceptions du même genre de la désidémonie publique et privée des Romains. Cependant ces signes indépendants ne concernent la discipline augurale qu’autant qu’ils se trouvent en relation claire et précise avec un acte en train de s’accomplir, comme c’est le cas dans les exemples qui viennent d’être cités, et que par suite ils apparaissent comme l’expression de l’hostilité de la divinité envers cet acte. Pour découvrir le sens exact de signes en soi indéterminés, on ne s’adresse pas aux augures, mais, à l’époque ancienne, aux pontifes[41], et plus tard fréquemment aux livres sibyllins ou à la science haruspicinale étrusque. Rappelons du reste que, dans la conception romaine, l’avertissement ne liait l’auteur de l’acte qu’autant qu’il avait été perçu matériellement par lui, et que par suite non seulement il était inoffensif si une circonstance fortuite empêchait de le voir ou l’entendre, mais que même on pouvait s’en garder par des précautions réfléchies[42]. Voilà les cinq variétés : signes fournis par les oiseaux, par les autres animaux, par le ciel, par les poulets, et avertissements en général, qui constituent l’ensemble des phénomènes réunis a potiori par la théologie romaine sous le nom d’auspicia[43]. En réalité, tout ce que notre tradition nous fournit de relatif à cette matière peut rentrer dans les cinq catégories en question[44]. Assurément il existe d’autres modes pour chercher la volonté dés dieux : en dehors de l’interrogation du sort, qui ne peut être regardée comme une institution publique permanente, et des oracles d’Apollon, empruntés aux Grecs, dont la consultation et l’interprétation étaient confiées au collège sacris faciundis spécialement commis à cet effet, on chercha plus tard d’une façon régulière la volonté des dieux, relativement à un acte projeté, dans l’examen des entrailles des animaux offerts en sacrifice[45]. Mais ce n’était pas là le but primitif des sacrifices. Si des incidents spéciaux se produisaient au cours du sacrifice, comme si par exemple l’animal s’échappait, ou sans doute aussi si l’on rencontrait dans ses entrailles quelque singularité surprenante, ces événements rentraient forcément, à titre de diræ, dans le cercle de la discipline augurale[46], et il est certain que, de toute antiquité, ils obligeaient, aussi bien que des auspicia ex avibus défavorables, celui qui recevait les auspices à renoncer pour le moment à l’acte en vue duquel il sacrifiait ; seulement l’observation permanente et l’interprétation raisonnée de l’état des entrailles des animaux sacrifiés ne rentrent pas dans les auspices, ni en somme dans le plus ancien rituel de Rome. Ce sont les haruspices étrusques auxquels, comme on sait, on recourt de préférence à ce sujet, et ce n’est que sous l’Empire qu’ils ont été constitués en sacerdoce de l’État[47]. Tels que nous les avons jusqu’à présent décrits, les auspices servent aussi bien au commerce des dieux de Rome avec les divers citoyens qu’à leur commerce avec l’État lui-même. Ce sont, dans le premier cas, des auspicia privata[48], dans le second, des auspicia publica populi Romani[49]. Les derniers seuls rentrent dans le cadre de cette étude. Lorsque le signe divin est sollicité au nom du peuple, lorsque c’est un augurium impetrativum, la question se pose de savoir de magistrats à qui reviennent le droit et le devoir d’interroger la divinité et de recevoir sa réponse ; ce à quoi se rattache le nouveau droit de décider souverainement, en cas de doute, si le signe sollicité a été obtenu ou non. La réponse à cette question va de soi. Les relations célestes de l’État romain ont, comme ses relations terrestres avec les autres États et avec les particuliers, les magistrats pour intermédiaires. En ce sens, c’est aux magistrats[50], à eux seuls, et à eux tous, bien qu’à un degré différent, qu’appartiennent les auspicia publica en général, ou, relativement à chaque cas particulier, la spectio. Tout magistrat, même le plus inférieur, a des actes à accomplir pou, le compte de l’État, et il a le droit et le devoir de solliciter pour eux des signes apparents de la bienveillance divine, aussi bien d’une façon générale, à son entrée en fonctions, que d’une façon spéciale, avant l’accomplissement de chaque acte isolé. Et ce sont là les auspicia publica. Les mots auspicium et imperium, qui désignent le droit de la magistrature d’observer les signes et la puissance qui en résulte, ne sont donc en réalité que deux expressions de la même idée considérée sous des points de vue différents : celui des rapports avec le ciel et celui des relations terrestres, et ils sont fréquemment employés l’un pour l’autre, même dans la langue technique[51]. On pourrait considérer la question de savoir à qui appartiennent les auspices comme résolue par ce renvoi général à la puissance publique qui leur est corrélative. Cependant il ne sera pas hors de propos, particulièrement pour assurer un terrain plus solide à l’étude des différentes espèces d’auspices et de la théorie de leurs conflits, de suivre ce principe général dans ses diverses applications. L’idée que la puissance publique appartient en dernier ressort à l’ensemble des sénateurs patriciens et à l’interroi, que par suite leurs pouvoirs restent bien en repos tant qu’il existe des magistrats supérieurs, mais rentrent en activité aussitôt qu’il n’y en a pas, s’exprime encore plus vigoureusement par rapport aux auspices que pour les affaires terrestres. Tous les auspices remontent à ce grand signe par lequel les dieux donnèrent à Romulus le pouvoir de fonder la ville et de créer le peuple de Rome et lui attribuèrent la royauté sur celui-ci[52]. Cette protection divine passe comme un fidéicommis, de main en main, des rois aux consuls et aux autres magistrats supérieurs. Mais, si, par la faute ou le malheur de l’un des individus actuellement en fonctions, les rapports entre l’État et les dieux sont troublés à ce point qu’une expiation et le renouvellement de leurs auspices ne semblent pas possibles, leur retraite sans qu’ils aient nommé d’héritier de leurs droits et de leur faute, c’est-à-dire l’interregnum, a pour effet de faire remonter les auspices à leur source qui n’a pas été troublée et est nécessairement pure : d’abord aux dépositaires de l’autorité qui sont toujours présents bien que leurs pouvoirs soient en règle suspendus, aux membres du sénat patricien[53], ensuite à celui d’entre eux auquel l’élection ou la voie du sort attribue la direction du gouvernement, à l’interroi[54]. Par suite l’interregnum est un renouvellement (renovatio) des auspices[55]. — Puisque non seulement les patriciens possédaient seuls les auspicia publica à l’époque la plus ancienne, mais que les plébéiens n’ont jamais participé à cette source dernière de la puissance publique dans les choses divines et humaines, les auspicia publica peuvent encore plus tard être désignés comme un droit exclusivement réservé aux patriciens, et la résistance de la noblesse contre l’admission des plébéiens aux magistratures de l’État trouvait son appui dans la logique, indiscutable en elle-même, du droit religieux. Cependant la même logique demandait que, du moment que l’on admettait les plébéiens aux magistratures et dans la mesure où on les y admettait, on ne fit pas de distinction entre les auspices des magistrats appartenant à l’une ou à l’autre des classes ; et, en réalité, on n’en a jamais fait. Tous ceux qui sont investis de la plénitude de la puissance publique, qui ont l’imperium, ont les auspicia maxima[56]. Ce sont naturellement le roi, l’interroi, les consuls, les préteurs[57], les dictateurs et tous les magistrats qui ont la puissance consulaire ou prétorienne, sans qu’il y ait à distinguer s’ils agissent en qualité de magistrats ou pro magistratu[58], s’ils rentrent parmi les magistrats constitutionnellement annuels ou s’ils ont été institués consulari imperio en qualité de tribuns militaires ou autrement[59]. Le maître de la cavalerie a également, dans la mesure générale où les auspices lui appartiennent, les auspices prétoriens[60]. Mais, le domaine des auspices ayant la même étendue que celui de la puissance publique, ils ne font pas non plus défaut aux magistrats d’ordre moins élevé. Les auspices des censeurs sont encore comptés parmi les auspicia maxima, mais, semble-t-il, comme cette magistrature même est classée parmi les supérieures, plutôt quant à la forme ; car on ajoute expressément qu’ils diffèrent en qualité de ceux des consuls et des préteurs[61]. — Les magistrats inférieurs comme les édiles et les questeurs ont, par symétrie, des auspices inférieurs (auspicia minora)[62]. — Enfin il faut citer encore, dans la classe des grands prêtres, qui par ailleurs n’ont pas plus d’auspicium que d’imperium, le grand pontife, qui, aérant à accomplir certains actes comme magistrat, peut par suite probablement aussi prendre pour eux les auspices[63]. — Il serait concevable que ces divers auspices eussent aussi différé quant à l’objet et au rituel de l’observation ; mais cette différence n’est aucunement requise par la logique juridique ; et le fait que le signe d’ordre le plus élevé, l’éclair, pouvait faire l’objet d’auspices inférieurs[64] ne porte pas à le supposer. L’unique différence essentielle entre les auspices supérieurs et inférieurs consiste, semble-t-il, en ce qu’ils servent d’introduction et de condition, les uns aux actes des magistrats supérieurs, et les mitres à ceux des magistrats inférieurs. Les auspices énumérés jusqu’à présent sont tous les auspices propres du magistrat qui les prend ; c’est-à-dire que ce sont les auspices de l’État pris par celui qui, dans le cas particulier, est appelé à le représenter. Mais il y a, à côté de l’imperium propre, l’imperium délégué. Il y a de même, à côté des auspices propres des véritables magistrats de l’État, les auspices dérivés, exercés par l’intermédiaire d’autrui, ceux des représentants institués par ces magistrats. On les rencontre dans l’intérieur de la ville, dans les rares hypothèses ou une délégation y est constitutionnellement possible, voire même nécessaire, en particulier pour la direction d’une procédure capitale, devant les comices par centuries, par un magistrat qui n’a pas qualité pour convoquer ces comices, par exemple par un questeur[65]. On les rencontre surtout où la régime militaire permet au général en chef de se faire représenter, pendant son absence, par un mandataire. Comme on sait, les auspices n’appartiennent pas, dans ce cas, à celui qui exerce en fait le commandement en chef, mais au général eu chef absent, cujus auspiciis res geritur[66]. Nous n’avons pas de renseignements sur la manière propre dont était pratiquée cette procédure. Riais on considérait sans doute que la délégation de l’imperium impliquait de droit celle des auspices. Par conséquent, le représentant avait à prendre les auspices, avant la bataille et dans lès autres cas, comme le général les aurait pris s’il avait été présent ; mais, en droit, la spectio n’était pas considérée comme la sienne, elle était considérée comme celle du général absent. Les rapports des différents titulaires des auspices entre eux se déterminent de la même façon. On part, à l’origine, de l’unité de l’auspicium, comme on part de celle de l’imperium. Tant qu’il n’y a eu à la fois qu’un magistrat de l’État, il a été l’unique préposé aux rapports avec les dieux, et il n’a pu y avoir de conflit ; car ceux auxquels le roi déléguait les auspices ne faisaient qu’exercer les auspices de leur mandant et n’avaient pas dé droit propre à invoquer contre lui. Plus tard, il y eut autant de personnes investies des auspices que des pouvoirs de magistrat. Mais l’organisation de la collégialité et des compétences distinctes limita les cas de conflit, sans pourtant les supprimer complètement. Les auspices du consul et du censeur, de l’édile et du questeur, du préteur judiciaire et du préteur de Sicile existaient les uns à côté des autres, comme les fonctions auxquelles ils se rapportaient, sans se troubler aucunement[67]. Lorsque deux magistrats se trouvaient l’un à côté de l’autre avec les mêmes attributions, — conlegæ, — quand, par exemple, un dictateur et un consul, un consul et un préteur, ou deux consuls, ou deux préteurs exerçaient le commandement dans le même camp ou quand deux censeurs procédaient ensemble au cens, il fallait voir si la collégialité était égale ou inégale. Dans le dernier cas, c’est-à-dire pour le dictateur et le consul, pour le consul et le préteur, les deux magistrats ont bien les auspices, mais, si ces auspices se contredisent, ce sont les signes obtenus par le magistrat le plus élevé qui l’emportent[68]. Entre collègues égaux, il y a, dans la collégialité militaire, un certain roulement journalier du commandement en chef, qui fait qu’il n’y en a jamais qu’un à la fois à avoir la puissance la plus élevée ; celui qui a présentement cette puissance a du même coup pour la journée l’auspicium le plus fort[69] ; il est à croire qu’anciennement celui qui n’exerçait pas pour le moment le commandement en premier, s’abstenait en général de consulter les auspices ; plus tard, de même que tous deux avaient les faisceaux, tous deux prenaient les auspices ; mais naturellement, en cas de conflit, c’étaient les auspices qui pour le moment étaient les plus forts qui l’emportaient[70]. Quant aux relations des titulaires de l’imperium égaux en droit, dans l’administration non militaire, il est possible que les auspices aient alterné de mois en mois, comme les faisceaux, entre les consuls ; mais, si tous deux recevaient des auspices et si les auspices ne concordaient pas, ces auspices contradictoires devaient, d’après la manière générale dont on réglait les conflits du même genre, se neutraliser réciproquement[71], et, par suite, comme au cas d’intercession d’un collègue, l’acte projeté devait être abandonné. Nous avons vu à qui il appartient de prendre, au nom du peuple, l’expression de la volonté de Jupiter relativement à un acte projeté. II nous faut maintenant chercher dans quels cas cette pratique religieuse est requise. La réponse générale est que le sens à la fois pieux et pratique des plus anciens organisateurs de l’État considère cette consultation comme étant désirable et opportune pour toutes les affaires importantes, mais comme ne constituant jamais une formalité indispensable. Par conséquent, on consulte régulièrement les dieux avant tout acte public d’ordre civil ou militaire[72]. Mais, lorsqu’un retard serait périlleux et que l’intérêt de l’État romain ne tolère aucune perte de temps, il n’y a naturellement pas besoin de consulter les dieux ; car eux aussi sont Romains. Il n’est donc ni possible ni nécessaire d’énumérer tous les actes pour lesquels interviennent les auspices. Nous les trouvons mentionnés avant des séances du sénat[73], avant des tirages au sort[74], avant la convocation de l’armée[75], avant la fondation de colonies[76] ; ensuite, à la guerre, avant le passage de tous les cours d’eaux[77], et avant le commencement des batailles[78]. Mais nous ne pouvons ni distinguer d’une manière précise jusqu’à quel point la coutume prescrivait ou seulement admettait les auspices dans ces hypothèses, ni délimiter avec quelque certitude le cercle des actes pour lesquels les auspices étaient en usage. Pourtant, il y a trois cas : la nomination d’un magistrat, la tenue d’une assemblée populaire, et le départ, du général pour la guerre, où les auspices non seulement sont indispensables en dehors des cas de force majeure les plus extrêmes, mais présentent pour, l’organisation politique de Rome une importance qui oblige à les étudier ici. — Il en est de même des auspices pris à l’entrée en fonction des magistrats ; mais le nécessaire a déjà été dit sur eux plus haut et nous aurons l’occasion d’y revenir dans la partie de l’Entrée en fonctions. 1. Tout magistrat, électif ou non, ne peut être nommé valablement qu’autant que le magistrat qui le nomme, en vertu de son propre choix ou de l’élection populaire, a préalablement interrogé les dieux à ce sujet. C’est pour les magistrats qui sont appelés à leurs fonctions sans le concours du peuple, pour l’interroi[79] et pour le dictateur[80], que cette condition se révèle le plus nettement. Pour les autres, notre auspication se confond avec celle qui est requise pour l’ouverture de l’assemblée du peuple. — Une exception forcée est faite, à chaque fois qu’il y a l’interregnum, pour le premier interroi ; car il n’y a personne qui puisse l’investir de ses fonctions ; aussi est-il le seul magistrat romain qui ne soit pas institué auspicato, et c’est sans doute le motif pour lequel il semblait scabreux de faire accomplir immédiatement par lui la nomination du roi ou du consul[81]. 2. La réunion de toute assemblée de l’ensemble du peuple, appelée à prendre une résolution quelconque, a pour condition préalable des auspices pris, spécialement dans ce but, le matin du jour fixé[82]. Cela s’applique également aux comices par curies, aux comices par centuries[83], et aux comices par tribus patricio-plébéiens[84]. Par contre, on ne parait pas avoir consulté les auspices pour les assemblées du peuple qui n’avaient pas de résolution à prendre[85]. — Il est probable que ces auspices se sont distingués dans la forme, selon la nature des assemblées à convoquer, non pas tant en ce que l’on sollicitait des signes différents qu’en ce que l’on faisait connaître aux dieux le caractère des comices et le but spécial de leur réunion[86]. 3. Le général qui part en campagne doit prendre, spécialement dans ce but, le matin du jour où il quitte la ville, les auspices au Capitole[87]. La condition préalable de ces auspices est, en dehors d’autres actes que le général doit constitutionnellement accomplir avant de partir pour le camp, la réception de l’imperium dans les comices par curies[88]. Ces auspices ne pouvant être pris qu’à Rome[89], il faut, s’ils deviennent inutiles pour quelque motif, ou s’il s’élève des objections contre leur validité, que le général revienne à Rome pour leur renouvellement (repetitio)[90]. — Les auspices de guerre ainsi pris à Rome ; tout comme la nuncupatio des vota faite au Capitole qui les suit et l’ensemble de la solennité du départ, ont été d’une importance extraordinaire pour le développement des institutions romaines, Ils ont eu surtout cette importance parce qu’ils ont été le principal obstacle à la concession de commandements militaires extraordinaires, distincts de la magistrature constitutionnelle. Tandis qu’il dépendait exclusivement de la volonté des comices de prolonger les imperia qui existaient, il ne pouvait en être établi de nouveaux comportant la plénitude du commandement militaire qu’avec la prise des auspices du départ au Capitole, par conséquent avec un acte accompli dans la sphère de la compétence urbaine. Donc tout imperium militaire doit débuter à titre de magistrature urbaine, et, en en organisant une en dehors de la constitution, on aurait franchi les bornes qui s’imposaient même aux comices du peuple souverain[91]. Il n’y a guère de barrière constitutionnelle qui ait aussi longtemps résisté que la garantie que l’on avait trouvée là, dans ces auspices du général, contre les pouvoirs militaires extraordinaires ; mais cette prescription a fini par être elle-même écartée ou plutôt tournée. A l’époque récente, on annexait, par une fiction de droit, à la ville de Rome, comme s’il avait été situé dans le pomerium, un morceau de terrain quelconque situé hors de la ville[92], et on y accomplissait l’auspicium requis[93]. Cela s’est d’abord produit dans les cas où le général, éloigné de Rome, peut-être commandant outre-mer, avait, pour quelque motif religieux, besoin de renouveler ses auspices. Mais l’on pouvait de la même façon éluder dès la première fois la prescription légale ; lorsque Scipion a pris, en 513, le commandement en chef pour l’Espagne, sans être investi d’aucune magistrature urbaine, il a probablement acquis, les auspices hors de la ville par un acte fictif de ce genre. Mais, jusqu’à l’époque de Sulla, cette anomalie ne s’est, autant que nous sachions, guère reproduite. Ce n’est que la constitution de Sulla qui rendit, une fois pour toutes, les auspices du général au sens strict impossibles à prendre. En effet, ils devaient, d’après le rituel, être pris par le magistrat dans l’intérieur de la ville, au moment ou il prenait le commandement ; or, désormais il était interdit au magistrat de prendre le commandement comme tel, et ce n’était qu’à l’expiration de son année de fonctions ; en recevant sa province, qu’il lui était prescrit de prendre possession de ce commandement. Dans ces conditions, il ne pouvait plus acquérir les auspices ; et, par suite, Cicéron a pleinement raison de dire qu’il n’y a plus, de son temps, d’auspices de guerre[94]. La cérémonie du départ est, pour le reste, c’est-à-dire, en ce qui concerne les vœux faits au Capitole et le costume de guerre pris aux portes de la ville, encore observée dans la mesure du possible à cette époque[95]. Ce n’est pas ici le lieu d’exposer, dans tous ses détails, la procédure de la spectio. Cependant, nous ne pouvons omettre de noter les points essentiels. Au point de vue du temps, les auspices doivent être pris le jour où l’on compte accomplir l’acte auquel ils se rapportent[96]. Régulièrement, ils sont pris aussitôt que le jour a commencé au sens légal, par conséquent aussitôt après minuit, et terminés avant le lever du soleil[97]. On ne peut dire avec précision si c’est pour réserver la totalité du jour aux affaires ou en vertu d’une prescription du rituel : en tout cas, cette heure matinale ne peut avoir été imposée pour tous les auspices ; car elle n’aurait pu être observée pour ceux qui sont requis au passage des cours d’eau[98], ni pour les autres auspices militaires. Pour le lieu, la règle est la même. Il faut prendre les auspices dans l’endroit où doit être accompli l’acte auquel ils se rapportent[99], c’est-à-dire les auspices pour les comices par curies, dans l’intérieur du pomerium ; ceux pour les comices par centuries, hors de son enceinte, dans le voisinage immédiat de la ville ; ceux pour les séances du sénat, dans le local où il se réunit ; ceux pour le départ du général, dans la ville de Rome ; ceux pour un combat, sur le champ de bataille. Cela implique déjà que l’auspicium, pas plus que l’imperium, n’est en soi attaché à aucun lieu, et qu’il peut, selon les besoins, s’exercer n’importe où. Il y a une différence essentielle entre les auspices pris dans l’intérieur ou le voisinage de la ville et les auspices du général proprement dits : c’est que le tracé d’un champ d’observation (templum) est requis pour les premiers, et qu’il ne l’est pas dans la même mesure pour les auspices pris au camp[100]. Le fait que la volonté des dieux se révèle, à la ville et dans son voisinage, par les éclairs et le vol des oiseaux du ciel, tandis qu’elle se révèle en campagne au moyen des poulets apprivoisés, concorde avec cette différence, ou plutôt il n’en est que l’expression. En règle, on se sert, dans le premier cas, de templa délimités une fois pour toutes : d’abord pour les assemblées qui se tenaient au Capitole, de celui qui était tracé, en partant de l’auguraculum situé sur la colline de la citadelle, au-dessus de celle-ci[101] ; ensuite, pour les assemblées tenues au comitium, de celui délimité en partant des rostra[102] ; pour celles du Champ de Mars, entre autres d’un temple orienté du jardin de Scipion[103]. La disposition d’un emplacement de cette espèce, son inauguratio est le préliminaire de l’accomplissement de ces actes[104]. Les séances du Sénat ayant lieu dans un local fermé, les bâtiments affectés ou simplement employés à cet objet devaient eux-mêmes, à raison des auspices à prendre ; être érigés en templa[105]. Les auspices qui ne se rapportaient pas aux assemblées du peuple et du sénat étaient de nature plus libre, et, s’ils étaient rattachés au templum en général, ils ne l’étaient pas, avec une nécessité légale, à l’un des templa déterminés ; ainsi, quand la nomination ou l’entrée en fonctions du dictateur avait lieu hors de Rome, il fallait bien se passer de temple fixe. La prise des auspices en elle-même ne peut être ici qu’esquissée. La délimitation du templum pouvait sans aucun doute être faite par le magistrat seul[106]. Mais, à la vérité, la disposition et l’usage du templum fixe, duquel on se sert constamment pour les auspices urbains, ne sont pas l’affaire des magistrats, mais du collège sacerdotal affecté à ce soin, du collège des augures[107], dont l’activité se rapporte essentiellement à cet objet et par conséquent se limite eu général à la ville. A l’endroit où les auspices doivent être pris, le magistrat qui doit les observer dresse, la veille, sa tente[108], en langue augurale, le templum minus[109], disposé de façon que, par son unique ouverture, il puisse voir tout l’espace qui a été assigné à l’observation, et il s’y couche. Après minuit, il se lève[110], et, après avoir prié et s’être orienté pour l’observation, il l’accomplit d’un siège sur lequel il est assis[111]. Il se sert avant tout pour cela du propre témoignage de ses sens[112], ainsi que le prouve déjà l’expression spectio ; mais il ordonne aussi aux assistants de faire attention aux signes envoyés par les dieux, et il est admissible, il est même conforme à la pratique récente qu’il charge un serviteur ou un autre assistant de la constatation matérielle[113]. Il va de soi que ces mandataires pouvaient, pour les auspices urbains, être même des augures[114] ; mais il n’y a pas un indice qu’il ait seulement été d’usage établi d’inviter les augures à assister à la spectio[115]. L’admission ou le rejet des constatations rapportées par les personnes invitées à la spectio dépend du reste absolument de l’arbitraire du magistrat qui a la spectio. L’observation personnelle de ces auxiliaires religieux est avec l’auspicium du magistrat, dans le même rapport que le comitium des membres de son conseil avec son decretum. Il n’a jusqu’à présent été parlé ici que des auspicia impetrativa, des questions posées à Jupiter pour des entreprises déterminées et des réponses qu’il y fait. Mais le Dieu peut aussi, sans être interrogé, manifester son opposition à un acte qui n’est pas encore commencé ou qui n’est pas encore terminé ; et il nous faut soumettre à un examen spécial ces auspicia oblativa et la manière absolument différente dont ils sont traités. La constatation du fait que le Dieu a fait opposition à un acte antérieurement approuvé par des auspices implique, à la fois, la démonstration que le signe invoqué s’est réellement produit, et l’interprétation de la volonté divine qu’il exprime. La démonstration du premier point résulte, soit de la constatation personnelle du magistrat ou de ce qu’il allègue comme tel[116], soit de la communication que lui adresse une autre personne sur l’observation faite par elle (nuntiatio)[117] et de la foi qu’il y accorde. Muant à l’interprétation, elle est égaiement, au point de vue légal, laissée en dernier ressort à la conscience du magistrat. Néanmoins l’influence soit des gens de l’art, soit des collègues, qui n’entre guère en ligne de compte dans les auspicia impetrativa, obtint de bonne heure une importance étendue dans les auspicia oblativa et enchaîna, d’une façon plus ou moins solide, l’arbitraire du magistrat qui accomplissait l’acte. Dans la notification d’une observation, la véracité personnelle de celui qui la communique n’est naturellement pas seule en jeu ; l’observation faite par un augure ou un collègue doit ètre traitée avec de tout autres égards que celle émanant d’un simple citoyen. Il en est de même pour l’interprétation. Les faits matériels qui constituent les auspicia oblativa ne sont pas seulement dépourvus de la relation avec une personne déterminée qui existe nécessairement dans les impetrativa, par rapport à celui qui les consulte. Ils sont aussi plus difficiles à comprendre et à expliquer, puisqu’ils ne sont pas, comme les impetrativa, précédés d’une legum dictio. Le Dieu adresse, par cette voie, sa déclaration à qui il veut et comme il veut. On a ici bien plus besoin de l’assistance des personnes compétentes, en particulier de celle des augures de profession. Aussi le caractère légalement obligatoire de la nuntiatio est-il devenu, d’assez bonne heure, l’objet d’une législation positive. Ces lois, comme à peu près tous les renseignements que nous avons sur les auspicia oblativa, se rapportent, d’une part, aux auspices résultant des éclairs qui, tout en jouant le rôle d’auspicia impetrativa, n’avaient pas cessé pour cela de fonctionner comme auspicia oblativa, de l’autre, aux réunions des comices. Mais ces limitations ne résident pas dans la nature des choses. Le Dieu peut aussi bien révéler sa volonté par un autre signe que l’éclair, et il y a au moins un cas où l’obnuntiatio fondée sur des signes défavorables (diræ) a été opposée au départ du magistrat pour l’armée[118]. Mais, à l’époque où nous avons des renseignements sur la nuntiatio, elle est déjà dépouillée de sa signification religieuse primitive, et on l’a dénaturée pour en faire un instrument politique ; or, parmi les signes célestes imaginaires, la vue d’un éclair avait, tant comme auspicium impetrativum favorable, pour l’entrée en charge d’un magistrat, que comme auspicium oblativum, écartant les comices, cet avantage que, la sincérité du fait étant admise, il ne pouvait, ni d’un coté ni de l’autre, y avoir de doute sur le sens du signe ; elle avait surtout cet autre avantage que le magistrat était parfaitement dans son droit et ne méritait aucun blàme en sollicitant, à de nouvelles reprises, l’auspicium impetrativum fourni par la foudre, puisqu’il ne faisait par là qu’implorer l’approbation du Dieu dans sa forme la plus élevée et la moins équivoque, et que c’était en quelque sorte fortuitement que le même auspice qui lui assurait la faveur des Dieux avait, sous un autre rapport, en tant qu’auspicium oblativum, notamment pour les comices d’autres magistrats, un caractère prohibitif. Il n’est pas douteux que l’abus de l’obnuntiatio est précisément résulté de ce que, dans les cas où l’usage requérait des auspicia cælestia impetrativa, il devenait par là même impossible d’agere cum populo dans la journée[119]. C’est pour cela que notre exposition se bornera à ce qui regarde l’observation des éclairs. La nuntiation se rapporte principalement, en particulier quant à sa réglementation législative, aux comices de toute sorte[120]. Cependant tout autre acte des magistrats peut également être ajourné par un signe des dieux. Nous rencontrons de telles nuntiations dirigées soit contre le départ du général, comme dans l’exemple qui vient d’être cité, sait aussi contre des actes des censeurs. Les actes des magistrats pour lesquels les auspicia impetrativa ne sont pas requis légalement peuvent eux-mêmes être frappés d’opposition par des auspicia oblativa. Nous trouverons par conséquent la nuntiation dirigée même contre les concilia plebis et leurs résolutions. La nuntiation munie d’une force légalement obligatoire appartient, par rapport aux comices, soit aux augures, soit aux magistrats[121]. Chaque augure a individuellement le droit d’assister à l’assemblée du peuple[122] et de faire la nuntiation sous forme de prononciation d’un ajournement (alio die)[123], à raison d’un signe qu’il a personnellement constaté ou dont il a été informé, en particulier d’un éclair[124]. Il est indiscutable que les augures ont ainsi assisté même aux assemblées exclusivement plébéiennes, quoique l’efficacité de leur action y ait probablement été moins incontestée[125]. Mais cette nuntiatio ne peut émaner d’un augure que contre les comices auxquels il assiste ; par conséquent, elle ne peut être faite ni par un augure absent, ni contre un autre acte des magistrats par un augure présent. S’il en avait été autrement, toute la marche des affaires publiques aurait été livrée à l’arbitraire de chacun des augures. La nuntiation des magistrats se rattache à la spectio. Un magistrat est sans doute libre de considérer comme n’existant pas un éclair qu’un particulier prétend avoir observé et de ne pas se laisser ainsi empêcher de tenir les comices. Mais il ne peut guère ignorer, en ce qui le concerne, un signe de ce genre qui a été constaté par un autre magistrat et tenu par ce dernier pour valable, ainsi encore en particulier l’éclair obtenu par l’autre magistrat à titre d’auspicium impetrativum. Si, par exemple, un questeur, le jour de son entrée en fonctions, observe le ciel pour ce motif, et voit l’éclair qui lui annonce la faveur de Jupiter, il serait au moins inconvenant que le consul réunit le peuple en ce jour que le signe résultant de l’éclair a rendu impropre aux comices. C’est là-dessus que se fonde, d’une part, l’usage d’après lequel le magistrat supérieur interdit à l’inférieur d’observer la foudre le jour où il a l’intention de convoquer le peuple[126], d’après lequel aussi le sénat adresse quelquefois la même instruction à tous les magistrats relativement à certaines rogationes. C’est là-dessus, d’autre part, que se fonde le droit d’obnuntiatio des magistrats[127], c’est-à-dire le droit appartenant à un magistrat d’en avertir personnellement[128] un autre, avant la réunion ou la clôture de l’assemblée du peuple ouverte ou projetée par celui-ci, qu’il a, lui, le nuntians, observé le ciel et constaté un éclair, et de le contraindre de cette façon à ne pas tenir ou à dissoudre l’assemblée populaire. Cette coutume est, dans ses traits essentiels, sans doute aussi vieille que la constitution républicaine elle-même. La réglementation législative de l’obnuntiatio fut faite par deux résolutions populaires de la fin du sixième siècle ou du commencement du septième, les lois Ælia et Fufia, dont les dispositions ne sont au reste pas connues d’une manière plus précise[129]. C’est principalement à la suite de ces lois que l’obnuntiatio parait être devenue un instrument politique. Parmi les applications qui en ont été faites de cette façon, celle pratiquée par le consul Bibulus, en 695, est la plus ancienne dont nous ayons la preuve directe ; ce n’est certainement pas la première ; pourtant les anciennes luttes des partis ont visiblement plutôt utilisé l’arme politique de l’intercessio que cette arme tirée d’une simulation religieuse, qui d’ailleurs se brisa aussitôt qu’elle fut employée. Dès 696, une loi proposée par le tribun du peuple Clodius supprima l’obnuntiatio[130]. Cette loi fut un certain temps contestée, mais semble être finalement restée en vigueur[131]. D’après les dispositions antérieures, l’obnuntiation émanait soit du consul à l’encontre du consul[132] ou du grand pontife tenant les comices par curies[133], soit du tribun du peuple à l’encontre du consul[134] ou du censeur[135]. La spectio constituant un des droits des magistrats de l’État, l’obnuntiation, qui l’a pour fondement, ne peut avoir appartenu aux magistrats plébéiens. Mais le système de l’obnuntiation n’est pas limité aux signes obtenus par la voie de la spectio, elle n’est un droit de magistrat qu’en es sens qu’un magistrat ne peut pas ignorer la communication d’un autre magistrat à l’égal de celle d’un particulier. On s’explique ainsi facilement que les tribuns, quoique ne prenant pas d’auspicia impetrativa, exercent cependant, eux aussi ; à l’époque récente, le droit d’obnuntiation. Ont-ils eu ce droit depuis qu’ils ont été considérés comme magistrats ou peut-être seulement en vertu des lois d’Ælius et de Fufius, c’est un point que l’on ne peut décider. A l’inverse, l’obnuntiation est signalée comme admissible même contre les assemblées de la plèbe[136] ; car un acte pour lequel on ne prend pas d’auspices peut néanmoins être interrompu par des diræ. Cependant nous sommes pour ainsi dire complètement dépourvus de témoignages positifs sur son application aux concilia plebis[137]. Par une conséquence naturelle, nous ne pouvons davantage déterminer les magistrats, auxquels l’obnuntiation appartenait à l’égard du tribun du peuple ; nous ne pouvons dire si c’était exclusivement à son collègue, ou, comme il semble plutôt, en outre au consul et au préteur[138]. Si cette dernière solution était exacte, il s’ensuivrait que l’obnuntiation ne pourrait être désignés comme une conséquence de la par majorve potestas ; et la nature même des choses aussi bien que l’usage de défendre aux magistrats inférieurs d’observer le ciel à des jours donnés paraissent indiquer que le minor magistratus lui-même peut, en pareil cas, arrêter L’acte du supérieur. Il semble même que l’on se réfère à cela, en attribuant ce droit à tous les magistrats[139]. Lorsque l’opposition de la divinité s’est manifestée contre un acte, que ce soit en réponse à une question, dès avant le début de l’acte, ou plus tard, sans qu’il y ait eu de question, avant qu’il fût terminé, l’acte ne peut être accompli le jour où l’opposition s’est produite[140] ; mais rien ne s’oppose en règle à ce que les Dieux soient de nouveau consultés, relativement au même acte, le jour qui suit ou l’un des jours postérieurs ; il est permis de repetere auspicia[141]. — Lorsque intentionnellement ou non, on a manqué à cette prescription, et accompli l’acte soit en négligeant de prendre les auspices qui auraient dû être pris, soit à l’encontre de ceux qui avaient été pris, soit au mépris de l’opposition des Dieux manifestée postérieurement, il y a un vice (vilium)[142], dont la constatation, à moins qu’il ne s’agisse de faits notoires, est opérée par le collège des augures. Ce collège doit d’abord se renseigner sur la façon dont les choses se sont passées[143] et il statue ensuite par un décret[144]. Le sénat et les divers magistrats ont le droit de réclamer du collège une pareille consultation[145] ; mais le collège lui-même avait, nous en avons la preuve, le droit de prendre l’initiative et d’adresser spontanément au sénat une communication de ce genre[146]. Des questions de droit public pouvant être tranchées et même des poursuites capitales être intentées en vertu de ces consultations des hommes de l’art, ce n’est pas sans raison qu’on attribue aux augures en partant de là une puissance sur les magistrats[147] en même positivement une juridiction[148]. Mais au sens rigoureux, c’est plutôt la magistrature qui a le devoir de prendre les mesures nécessaires en vertu de la consultation augurale. Nous reviendrons, en étudiant la compétence de l’assemblée du peuple (VI, 1) sur la question importante entre toutes de la mesure dans laquelle le vice reconnu par les augures dépouille de son efficacité juridique l’élection ou la résolution quelconque du peuple qui en est atteinte. |
[1] Cette formule est employée, d’une manière constante, dans les inscriptions de généraux victorieux, dans les deux inscriptions rapportées par Tite-Live, (40, 52, 5 : Auspicio imperio felicitate ductuque ejus ; 41, 28, 8 : Consulis imperio auspicioque) et dans celle de L. Mummius qui nous a été conservée (C. I. L. I, n. 541 : Ductu auspicio imperioque ejus) comme dans le pastiche de Plaute, Amph. 196 : Duclu imperio auspicio suo. Les mots imperium auspiciumque se trouvent dans Tite-Live, 22, 30, 4. 28, 27. 4. 29, 27. 2 (loi précédés de secta), dans Val. Max. 2, 8, 2, et dans la scolie de Virgile. — Bien que les passages cités ici, en particulier ceux rédigés dans une langue poétique, fassent fréquemment ressortir, à côté de l’opposition de droit public de l’auspicium et de l’imperium, l’élément personnel du commandement propre, l’antique formule qui leur sert de base n en est pas moins fort clairement mise en lumière dans ces très anciens documents. En se tenant à l’ancien usage, on dit auspicium imperiumque et non pas imperium auspiciumque. Cela résulte, plus encore que des témoignages directs, de la préséance connue des res divinæ sur les res humanæ (Aulu-Gelle, 14, 7, 9, etc.). La formule n’est employée que pour les magistrats qui ont la plénitude des pouvoirs militaires ; car il n’y a que pour eux que le mot imperium puisse être employé, en réalité, on peut diviser les attributions de chaque magistrat en res divinæ et en res humanæ, la première expression désignant son auspicium et la seconde son imperium ou sa potestas.
[2] Il est traité de l’un et l’autre, tome II, dans la théorie de l’Entrée en fonctions.
[3] Cf. Rubino, Untersuch., p. 40, note 4. Les oracles proprement dits sont, comme on sait, étrangers à la foi romaine primitive, et ils n’ont jamais pu bien s’installer à Rome.
[4] C’est à lui que remontent tous les auspices. Les augures publici sont appelés par Cicéron interpretes Jovis optimi maximi, De leg. 2, 8, 20, (cf. 3, 19, 43), et les poulets qui mangent interpretes Jovis, De div. 2, 34, 72. c. 35, 73 ; les livres des augures disent : Jove tonante fulgurante comitia populi habare nefas. Je ne vois, pas qu’aucune divinité joue, à côté de Jupiter, un rôle essentiel dans la discipline augurale ; les oiseaux qui donnaient les différents signes étaient bien répartis entre les dieux (Handb. 6, 405 = tr. fr. 33, 119), mais tout signe parait cependant envoyé par Jupiter lui-même.
[5] Cicéron, De div. 1, 16, 30 : Diræ, sicuti cetera auspicia, ut omina, ut signa, non causas adferunt, cur quid eveniat, sed nuntiant eventura, nisi provideris. Tout ce que permet ce commerce avec les dieux, c’est d’éviter le mal à venir en renonçant é l’acte projeté ; il ne permet pas, selon une idée qui prévaut ailleurs, par exemple, dans le culte d’Apollon et dans les cérémonies réglées par le collège apollinaire sacris faciundis, de modifier le cours du destin, d’amener les dieux à changer d’avis, ou de se concilier leur faveur.
[6] Servius, Ad Æn. 6, 190 : Auguria aut oblativa sunt, qua non poscuntur, aut impetrativa, quæ optata veniunt. Le même, Ad Æn. 12, 289 : Hoc erat in votis, inquit, quod sape petivi] quasi impetrativum hoc augurium vult videri. — Accipio agnoscoque deos] modo quasi de obtativo loquitur nam in oblativis auguriis in potestate videntis est, utrum id ad se pertinere velit an refutet et abominetur. Cf. Ad Att. 2, 702. 12, 246. Dans l’impetrare (ou plus anciennement impetrire : Cicéron, De div. 1, 16, 28. 2, 15, 38 : Val. Max. 1, 1, 1 ; Pline, H. n. 28, 2, 11) de l’augurium, la question était formulée en termes rigoureux. Servius, Ad Æn. 3, 89 : Da, pater, augurium] (augurium) tunc peti debet, cum id quod animo agitamus ; per augurium a diis volumus impetratum... et est species ista augurii, qua legum dictio appellatur : legum dictio autem est, cum (il faut, avec Hertz, effacer comme une glose les mots condictio ipsius augurii intercalés ici) certa nuncupatione verborum dicitur, quasi condicione augurium peracturus sit. La nature du signe attendu fait également l’objet d’une nuncupation préalable. Tite-Live, 1, 18, 9 : Juppiter pater... uti tu signa nobis certa adclarassis... tum peregit verbis auspicia, quæ mitti vellet. C’était par conséquent, comme le votum, un contrat en forme conclu avec la divinité.
[7] Festus, p. 260, 261 : Quinque genera signorum observant augures publici : ex cælo, ex avibus, ex tripudiis, ex quadripedibus, ex diris.
[8] Handb. 6, 405 et ss. = tr. fr. 13,118 et ss.
[9] Il suffit de rappeler l’augustum augurium, quo incluta condita Roma est. Comparez encore la prise des auspices du départ au Capitole par le général qui se met en route ubi aves admisissent (Festus, v. Præstor, p. 241) ; le dictateur devant livrer bataille en vue de la ville, qui ne donne le signal du combat que lorsqu’il a lui-même reçu de la forteresse de la ville le signe convenu ubi aves rite admisissent (Tite-Live. 4, 18) ; l’indication générale ut nihil belli domique postea nisi auspicato geriretur, concilia populi, exercitus vocati, eumma rerum, ubi aves non admisissent, dirimerentur (Tite-Live, 1, 36) ; la nomination du dictateur ave sinistra dans la formule donnée par Cicéron, De leg. 3, 19, et bien d’autres preuves.
[10] Cicéron, De div. 2, 32, 91 : Ut sint auspicia, quæ nulla sunt, hæc cerce quibus utimur, sive tripudio cive de cælo, simulacra sunt auspiciorum, auspicia nullo modo. D’après ce texte, il n’y avait alors que deux espèces d’auspicia impetrativa qui fussent encore en usage, ceux ex canto et ceux ex tripudio ; les signa ex avibus et ex quadrupedibus avaient donc déjà disparu. Le silence de nos sources concorde bien en outre avec cette donnée. La reproduction du signe des vautours de Romulus pour les premiers auspices consulaires d’Octavianus (Suétone, Aug. 95 ; Appien, B. c. 3, 94 ; Dion, 46, 46), est visiblement quelque chose de spécial et ne prouve pas du tout que les oiseaux jouassent un rôle dans les relations habituelles de ce genre. Les oiseaux qui surviennent a titre de dire, comme les corbeaux dans les auspices (consulaires) de Séjan, pendant que les oiseaux de bon présage font défaut (Dion, 58, 5), n’ont rien de commun avec les signa (impetrativa) ex avibus.
[11] Festus, Ep. p. 244 (cf. p. 245) ; Pedestria auspicia nominabantur, que dabantur a vulpe lupo serpente equo ceterisque animalibus quadrupedibus. Pline, H. n. 8, 22, 84, pour le loup : Inter auguria ad dexteram commeantium præciso itinere, si pleno id ore fecerit, nullurn omnium prestantius. Cf. note 13.
[12] Festus, Ep. p. 64 : Pedestia auguria dicunt, cum fulminat aut tonat. Lucain, 6, 428 : Quis fulgura cæli Servet. Le tonnerre et l’éclair sont seuls désignés expressément ; mais on doit comprendre dans la même catégorie toits Ies phénomènes surprenants qui se produisent dans le ciel.
[13] Dion, 38, 13. Cicéron, De div. 2, 35, 43 : Fulmen sinistrum, auspicium optimum quod habemus ; cf., c. 18, 43. Servius, Ad Æn. 2. 693 : De cælo lupsa] hoc auspicium cum de cælo sit, verbo augurum maximum appellatur. Voir Denys, 2, 5, la description de la prise des auspices faite par Romulus avant d’entrer en fonctions.
[14] Dion, 38, 13.
[15] Denys, 2, 5 in fine. Virgile, Æn. 2, 692. 7, 141. 9, 630, et Servius sur ces vers. En revanche, le coup de tonnerre entendu au moment de l’entrée en fonctions, est un signe défavorable (Tite-Live, C3, 31, 13 ; Plutarque, Marcell. 12).
[16] Dion, 38, 13. Cicéron, De div. 2, 18, 42, citant les livres des augures : Jove tonante fulgurante comitia populi habere nefas. Le même, In Vatin. 8, 20 ; Phil. 5, 3, 7. Les exemples pratiques sont nombreux. Tite-Live, 10, 42, 10 : De cælo quod comitia turbaret intercenit ; même livre, c. 95, 5. Cicéron, Phil. 5, 3, S. Tacite, Hist. 1, 18. Cf. aussi note 14.
[17] C’est un principe établi que le signe qui a été vu est considéré comme ne l’ayant pas été si celui qui le reçoit déclare qu’il ne l’a pas vu (Pline, H. n. 28, 2, 17 : In augurum disciplina constat neque diras neque ulla auspicia pertinere ad eos, qui quamque rem ingredientes observasse ea negaverint, quo munere divinæ indulgentiæ majus nullum est) et réciproquement (Cicéron, Phil. 3, 4, 9 : Collega... quem ipse ementitis auspiciis vitiosum fecerat ; — l’élection de Dolabella fut viciée par l’opposition de l’augure Antoine, bien que le signe allégué par l’augure fût de son invention). Le fondement de tout cela, test l’idée que la fraude du serviteur na concerne que lui et qu’elle ne concerne pas le maître trompé, que, par conséquent, au cas de falsification des auspicia publica, ce n’est pas l’État dont la responsabilité est engagée, mais exclusivement et personnellement l’augure ou le magistrat. Tite-Live, 10, 40, 11 : Qui auspicio adest, si quid falsi nuntiat,in semet ipsum religionem recipit ; mihi quidem tripudium nuntiatum populo Romano exercituique egregium auspicium est. Le pullarius coupable est là immédiatement puni par un javelot lancé par hasard, et un corbeau crie, en signe que le dieu est satisfait.
[18] Ce sont là des auspicia impetrativa et non pas oblativa : cela résulte du sens de servage ; car ce sont précisément l’observation et le caractère fortuit qui distinguent les deux catégories, et la confirmation en est que le droit de de cælo servare n’est jamais attribué à l’augure.
[19] Denys (loc. cit.) poursuit en disant que l’auspice de Romulus est, de son temps, devenu l’auspice constant pour rentrée en fonctions des magistrats ordinaires. Cicéron, De div. 9, 35, 73 : Jam de cælo servare non ipsos censes solitos, qui auspicabantur ? nunc imperant pullario : ille renuntiat fulmen sinistrum, auspicium optumum quod habamus ad omnes res præterquam ad comitia. Car c’est ainsi qu’il faut ponctuer le teste, corrompu dans les éditions. Varron, 6, 86, l’atteste pour l’entrée en fonctions du censeur : Ubi noctu in templum censor (le Ms. : censura) auspicaverit atque de cælo nuntium erit. La pierre récente d’Apisa major en Afrique (C. I. L. VIII, 774) qui représente un éclair avec la suscription : Deo loci, ubi auspicium dignitatis tale, a encore certainement désigné le lieu où les magistrats locaux prenaient ce signe à leur entrée en fonctions.
[20] Je ne rencontre pas de témoignages exprès sur la forme des auspices urbains, pris en dehors de l’entrée en fonctions, par exemple pour la convocation des caries. Mais nous voyons dans Varron, 6, 53, les auspicia cælestia, dans Cicéron, De leg. 2, 8, 21, les cæli fulgera entrer seuls en considération comme auspices urbains, et c’est l’auspice tiré de l’éclair auquel, tout aussi bien que pour l’entrée en fonctions, il faut penser là partout. Les auspices ex tripudiis, qui existent encore à tété de lui pour la compétence militiæ, ne paraissent pas avoir pénétré dans le cercle de la compétence urbaine, au moins en tant que les actes doivent être accomplis dans l’intérieur du pomerium.
[21] On simulait toujours, dans ces observations, que l’éclair avait eu lieu, et la déclaration du magistrat ne se bornait pas, comme pense Rubino, Untersuch. p. 76 et ss., à dire qu’il avait regardé dans le ciel s’il y avait de tels signes. C’est ce que prouvent, en dehors de l’analogie de la procédure exposée note 23, des textes spéciaux, ainsi Cicéron, Phil. 2, 38, 99 : cur ea comitia non habuisti ? an quia tribunes plebis sinistrum fulmen nuntiabat ? et Lucain, 5, 395 : Nec cælum servare licet : tonat augure surdo. Ce que dit Cicéron de la prévision du vitium n’a non plus de sens qu’autant que la déclaration porte qu’un éclair a été vu. Enfin il ne faut cependant pas faire aller l’affectation de religiosité des Romains jusqu’à ce degré d’absurdité que le même effet soit produit, qu’on ait vu un éclair ou qu’on n’en ait pas vu.
[22] Cicéron, De domo, 15, 19 : Negant las esse agi cum populo, cum de cælo servatum sit... § 40 : Auspiciorum patronus subito exitisti : tu M. Bibulum in contionem, tu augures produxisti : a te interrogati augures responderunt, cum de cælo servatum ait, cum populo agi non posse : tibi M. Bibulus quærenti se de cælo serrasse respondit. Le même, In Vatin. 6, 15 : Quæro... num quando tibi moram attulerit, quo minus concilium advocares legemque ferres, quod eo die scires de cælo esse servatum. Op. cit. c. 7, 17 ; De harusp. resp. 23, 48 ; Ad Att. 2, 16, 2, etc.
[23] Dion, 38, 13. C’est ainsi que le tribun du peuple Milon annonça, par voie d’affiches en 697 (proscripsit) qu’il le ferait à tous les jours de comices (se per omnes dies comitiates de cælo servaturum : Cicéron, Ad Att. 4, 3, 3 ; Drumann, 2, 318). Le consul Bibulus, en 695, n’alla pas aussi loin ; il se contenta d’établir par édit des fêtes à tous les jours comitiaux (Dion, 38, 6), et de faire en outre, à chacun de ces jours en particulier, l’obnuntiatio qu’il avait vu un éclair (Cicéron, De domo 13, 39. 40 ; De harusp. resp. 23, 48 ; Ad Att. 2, 16, 2 ; Suétone, Cæs. 20), deux choses qu’il faut bien distinguer. Leur confusion a conduit les anciens érudits à l’opinion aujourd’hui rejetée d’après laquelle l’obnuntiatio et l’indictio feriarum auraient été identiques. [Cf. aujourd’hui en sens différent VII.]
[24] Cicéron, Phil. 2, 32, 81. c. 33, 83, reproche à Antoine d’avoir, dans les mois qui précédèrent les comices consulaires de Dolabella, déclaré, en qualité d’augure et non de consul, pouvoir empêcher sinon qu’ils fussent tenus, au moins qu’ils donnassent un résultat (comilia auspiciis vel impedire vel vitiare) : Quisquamne divinare potest, quid vitii in auspiciis futurum sit, nisi qui de cælo servare constituit ? C’est-à-dire que le magistrat qui, faisant usage de ses droits, annonce qu’il observera le ciel, peut assurément prévoir d’avance qu’il verra un éclair au jour indiqué, mais que cette espèce de mensonge n’est pas permise à l’augure. Il y a à ce système une certaine excuse. C’est que la nuntiatio du magistrat repose sur des auspicia impetrativa, et qu’il peut bien savoir d’avance, non pas à la vérité qu’un éclair lui apparaîtra au jour fixé, mais qu’il fera des observations dans ce but. Au contraire la nuntiatio des augures se base toujours sur des auspicia oblatira, et par suite il n’en est pas de même pour elle.
[25] C’est ce que montre de la façon la plus claire la suite de l’histoire de Milon (Ad Att. 4, 3, 3). Ses adversaires déclarent ne pas vouloir tenir compte de son affiche : Nisi Milo in campum obnuntiaset, comitia futura. Le tribun sa soumet à leur prétention. Et alors nous assistons à la course continuée pendant plusieurs jours par le tribun qui veut obnuntiare à la poursuite de ceux qui veulent tenir les comices : il s’agit pour lui de leur faire son obnuntiatio avant que la procédure comitiale ne soit terminée : Si quis (de cælo) servavit, non comitiis habitis, sed priusquam habeantur, debet nuntiare (Cicéron, Phil. 2, 33, 81).
[26] Aulu-Gelle, 13, 15, 1 : In edicto consulum, quo edicunt, quis dies comitius centuriatis futurus sit, scriptum ex vetere forma perpetua : Ne quis magistratus minor de cælo servasse velit.
[27] Cicéron, Ad Att. 1, 16, 13 : Lurco ir. pl... solutus est et Ælia et Fufia, ut legem de ambitu ferret. Le même, Pro Sest. 61, 429 : Decretum in curia... ne quis de cælo servaret, ne quis moram ullam afferret, relativement au projet de loi déposé sur la restitutio in integrum de Cicéron.
[28] Ce n’était pas nécessaire. Cicéron, De div. 2, 35, 73 : Decretum collegii (des augures) velus habemus omnen avem tripudium facere posse. Virgile, Æn. 6, 200, représente aussi des pigeons qui mangent en volant dans un augurium impetrativum favorable.
[29] Cicéron, De div. 1. 15, 27. 28 : Nostri magistratus auspiciis utuntur coactis : necesse est enim offa objecta cadere frustum ex pulli ore, cum pascitur. Quod autem scriptum habetis avi (les manuscrits : aut) tripudium fieri, si ex ea (peut-être si escæ. Hertz conjecture si ex esca) quid in solum (les Mss. : solidum) ceciderit, hoc quoque quod dixi coactum tripudium solistimum dicitis. D’après Festus, Ep. p. 244, v. Puls, il suffit que les poulets mangent. Mais c’est une atténuation récente. Cicéron, De div. 2, 34, 72, dit expressément qu’il faut que les poulets laissent tomber de la nourriture, qu’il y ait tripudium et qu’il ne suffit pas qu’ils mangent : Pascantur necne (quid refert parait être une glose) nihil ad auspicia : sed quia, cum pascuntur, necesse est aliquid ex ore cadere et terram pavire, terrfpavium primo, post terripudium dictum est : hoc quidem jam tripudium diciter. Cum igitur offa cecidit ex ore putti, tum auspicanti tripudium solistimum nuntiatur. Festus, v. Tripudium p. 363 (p. 74 dans mon édition du Quaternio XVI) et v. Puls, p. 245, donne la même étymologie. Le même, p. 298 : Solistimum Ap. Pulcher in auguralis disciplinæ l. I ait esse tripudium, quod avi (le Ms. : aut) excidit ex [ore.]
[30] La représentation d’une botte de ce genre, contenant deux poulets qui y mangent, sur la pierre funéraire d’un pullarius (Marini, Inscr. Alb. p. 120), montre qu’elle était disposée de façon à pouvoir être portée à la main.
[31] On faisait jeûner les poulets. Cicéron, De div. 2, 35, 73 : Hoc auspicium divin quiequam habere potest, quod tam sit coactum et expressum ?... tum... esset auspicium, si modo esset ei (avi) liberum se estendisse... nunc vero inclusa in cavea et fame enecta si in offam pultis invadit et si aliquid ex ejus ore cecidit, hoc tu auspicium... putas ? On leur donnait de la bouillie pour être plus sûr du résultat. Festus, p. 245 : Puls polissimum datur punis in auspiciis quia ex ea necesse erat aliquid decidere quod tripudium faceret, id est terripuvium.
[32] Les auspices relatifs à l’exercitus centuriatus sont, d’après toutes les apparences comme toutes les analogies, étrangers à ceci et font partie des auspicia urbana, bien qu’à ma connaissance les témoignages positifs sur leur forme fassent défaut.
[33] Festus, v. Tripudium (d’après mon édition) : In [c]astris usur[patur]. Silius, 5, 59, appelle les poulets priscum populis de more Latinis auspicium, cum bella parant. Les scolies de Vérone, Ad Æn. 10, 241, citent, d’après l’ouvrage d’un certain Sabidius, sur lequel on ne sait rien de plus, le formulaire des auspices militaires. La restitution, qui en est tentée ici, en partie d’après H. Keil, présente assurément des incertitudes multiples : Ut in exercitu [signum ad pugnam datum erat, is penes que]m imp[erium auspici]umque erat, in tabernacuto in sella [sed]ens auspicabatur coram exercitu. Pullis e cavea lib[e]ratis [immissisque in lo]cum circum sellam suam..... nuntiato a..... [p]ultum ?... [tripudium sinisterum solisti]mum quisqu[is vestrum viderit,] tripudia[tum nunt]iato (cette invitation, s’il en existe une, car Keil lit avec hésitation iato ou ntia, et Herrmann cité par Bücheler dans les Jahrbücher de Jahn, 93, 71, itali — parait être adressée aux pullarii ; cf. Tite-Live, 10, 40). Silentio deinde facto residebat et dicebat : equites et pedites nomenque Lati[num]... les cincti armati paludati... [qui ad]estis, s[i]cuti [tripu]d[i]um sinister um solistimum quisquis vestrum vider[it, nuntiato. Felici] deinde ili[i augurio] nuntiato diceba[t]. Vient ensuite l’appel aux armes ; finissant par viros voca, prælium ineant. Deinde exercitu in anciem educto iterum [morabantur, ut immolare]tur (? cf. Tite-Live, 9, 14, 4. 33, 26, 1) ; interim ea mora utebantur, qui testumenta in procinctu facere volebant. C’est la même formule à laquelle pensent Cicéron, De div. 2, 34, 72, et De d. n. 2, 3, 9, et Aulu-Gelle, 15, 27, 3. Les exemples de tels auspices ex tripudiis aux camps sont fréquents : Tite-Live, 9, 14, 4. 10, 40. 22, 42. Cicéron, De div. 1, 35, 71 ; ajoutez l’incident connu arrivé en 505 sous le consul P. Claudius (Valère Maxime, 1, 4, 3 ; Servius, Ad Æn. 6, 198 ; Cicéron, de d. n. 2, 3, 7, et ailleurs encore). Le pullarius ne fait défaut dans aucun camp (Tite-Live, 8, 30, 2. 41, 18, 14, etc.) et nous avons encore de l’époque impériale une inscription d’un affranchi du præfectus castiorum de la 20e légion qui servait à son patron de pullarius.
[34] Servius, Ad Æn. 3, 375, parait même désigner les tripudia comme des auspicia minora.
[35] Il est d’autant plus difficile d’arriver à une notion précise de la situation récente des auspicia pullaria que, comme il est remarqué plus haut, le pullarius sert par la suite, au magistrat d’auxiliaire général pour les auspices et est employé par lui dans des auspices où l’on ne consulte pas les poulets, mais les éclairs, ou tout au plus les oiseaux. Si par conséquent un préteur urbain, avant une séance du sénat, interroge les auspices avec le concours des pullarii (Cicéron, Ad fam. 49, 42, 3), il n’en résulte rien pour la nature de ces auspices. Les auspices fournis par les poulets sont assurément cités pour la catastrophe de Ti. Gracchus (Val. Max. 1, 4, 2 ; Plutarque, Ti. Gracch. 47) ; mais, lorsqu’il mourut, Ti. Gracchus n’était pas seulement tribun du peuple, il était aussi IIIvir agris dandin adsignandis ; le droit de consulter les poulets peut lui avoir appartenu en cette dernière qualité d’autant plus qu’on ne trouve ailleurs aucune trace d’auspicia imperativa des tribuns du peuple et que les triumvirs de la loi agraire Sempronia avaient des pullarii (Cicéron, De l. agr. 2, 42, 34) ; et alors ses auspices n’étaient pas urbains. Les poulets donnèrent à Lavinium un augure défavorable au consul de 617, Mancinus (Val. Max. 1, 6, 7 ; Tite-Live, 55 ; Obseq. 24) ; et cela se rapporte assurément à l’un des actes permanents qui accompagnaient l’entrée en fonctions des magistrats supérieurs (v. tome II, la théorie de l’Entrée en fonctions) ; mais l’acte n’a pas lieu à Rome, et ce peut être la raison de l’emploi des auspices des camps. Il en est de même des auspices que prit l’empereur Galba le 1er janvier de l’année où il mourut (Suétone, Galb. 43 : Auspicanti pullos avolasse) ; le prince a, même dans la ville, l’imperium militaire. Rien n’empêche de rapporter à ces auspices impériaux les decuriales pullarii de la capitale (v. plus loin la partie des Apparitores). Il n’y a donc pas, en réalité, un seul exemple certain que les auspices fournis par les poulets aient été employés pour les actes accomplis domi ; et, si l’on ne peut affirmer qu’ils en aient été absolument exclus, l’expression de Servius, Ad Æn. 6,498 : Romani moris crut et in comitiis agendis et in bellis gerendis pullaria captare auguria est en tout cas trop générale. Il est encore moins décisif que Prudentius, Peristeph. 10, 146, dise : Cum consulatum initis..... farre pullos pascitis, et que Salvien demande, De gub. 6, 2, 12 : Numquid non consulibus et puni adhuc gentilium sacrilegorum more pascuntur et volantis pennæ auguria quæruntur et pæne omnia fiunt quæ etiam illi quondam pagani veteres frivola atque irridenda duxerunt ?
[36] Ateius Capito, dans Festus, p. 351, v. Sinistrum, distingue l’auspicium silentio et l’auspicium sinistrum : le premier signifie d’une façon purement négative, que la divinité ne défend pas l’acte (vacal vitio : igitur silentio surgere cum dicitur, significat non interpellari, quominus rem gerat) ; le second, d’une façon positive, qu’elle le conseille (hortari auspicia ad agendum, quod anima quis proposuerit). L’article a demi détruit Silentio surgere, p. 348, montre que le silentium devait durer depuis le moment où l’auspicant sortait du lit pour s’asseoir sur le siège d’observation jusqu’à celui où, l’acte termines, il sa remettait au lit. Hoc enim est [si]lentium omnis vitii in aucpiciis vacuitas. (La même définition est donnée par Cicéron, De div. 2, 34, 71). Un autre théologien ajoute encore que l’auspicant peut, au lieu de venir d’un véritable lit, venir d’une couche quelconque (cubile) et qu’il n’est pas non plus obligé de retourner ensuite se mettre au lit. Le silentium est aussi prescrit pour les auspices fournis par les poulets. Cicéron, De div. 2, 34, 72. Illi qui in auspicium adhibetur cum ita imperavit is qui auspicatur dicito, si silentium esse videbitur, a nec suspicit nec circumspicit, statim respondet silentium esse videri.
[37] L’art. Silentium, qui vient d’être cité, spécifie ne quid eo tempore deiciat. Il y aurait caduca auspicia : caducs auspicia dicunt, dit Festus, Ep. p. 84, cum aliquid in templo excidit, veluti virga e manu.
[38] Caton (dans Festus, v. Prohibere, p. 234) : Domi cum auspicamus... sovi ancilliæ si quis eorum sub centone crepuit, quod ego non sensi, nultum mihi vitium facit. Pline, H. n. 8, 57, 223 : Soricum occentu dirimi auspicia annales refertos habemus. Val. Max. 1, 4, 5. Plutarque, Marc. 5. D’où diræ obstrepentes, Pline, H. n. 28, 2, 11.
[39] Festus, p. 234 : Prohibere comitia dicitur vitiare diem morbo, qui vulgo quidem major, ceterum ob id ipsum comitialis appellatur. Serenus Sammonicus, De med. v. 1015 et ss. : Est subiti species morbi, cul nomen ab illo est, quod feri nobis sulfragia justa recusat. Sæpe etenim membris taro languore caducis concilium populi labes horrenda diremit. Dion, 46, 33.
[40] Valère Maxime, 1, 4, 2. 4. 5, etc.
[41] Handb. 6, 259 = tr. fr. 12, 310.
[42] C’était déjà l’interprétation de M. Marcellus, l’adversaire d’Hannibal, optimus augur : quand il voulait livrer bataille, il se faisait porter dans une litière fermée, ne auspiciis impedirefur (Cicéron, De div. 2, 35, 77). Pendant le sacrifice, on joue de la flûte, ne quid aliud exaudiatur (Pline, H. n. 28, 2, 11).
[43] Cicéron, De div. 2, 32, 71, et d’autres textes nombreux montrent que le mot auspicia est employé avec une préférence décidée par la langue technique dans le sens général indiqué par le texte de Festus, p. 260, 261, cité plus haut.
[44] Je ne veux pas dire par là que les anciens augures n’en aient pas admis encore d’autres espèces. Ainsi les auspicia ex acuminibus (Cicéron, De div. 2, 86, 77 ; De d. n. 2, 3, 9 ; Arnobe, 2, 67, p. 91) ne paraissent pas avoir été à l’origine des auspicia oblativa, comme les représentent Denys, 5, 46, et Tite-Live, 22, 1, 8. 43, 43, 6, mais des auspicia impetrativa, qui étaient pris avant le début du combat en observant les pointes des lances de l’armée rangée en bataille. Déjà M. Marcellus désigne ces auspices comme vieillis, ce qui peut tenir à la réduction de l’usage de la lance dans l’armement (Handb. 5, 353). On sait que beaucoup d’auspitia et d’auguria ont de bonne heure disparu (Caton, dans Cicéron, De div. 1, 15, 28, et Cicéron, eod. loc.).
[45] Cicéron, De div. 1, 16, 28 : Nihil fere quondam majoris mi nisi auspicato ne privatim quidem gerebatur, quod etiam nunc nuptiarum auspices declarant, qui re omissa nomen tantum tenent. Nain ut nunc extis (quamquam id ipsum aliquanto minus quam olim), sic tum avibus magna res impetriri solebant. D’où Val. Max. 2, 1, 1.
[46] Dans ce sens il est parfaitement exact de dire, Handb. 6, 411 = tr. fr. 13, 436, que la notion exprimée par le mot litare, celle d’accomplissement régulier du sacrifice, appartient déjà au rituel romain et ne suppose avec aucune nécessité m’existence de l’haruspex. Pour le même motif, on ne doit pas être surpris de l’extension d’auspicia à de pareilles hypothèses (Festus, Ep. p. 244 : Piacularia auspicia appellabant, quæ sacrifecantibus tristia portendebant, cum aut hostia ab ara effugisset aut percussa mugitum dedisset aut in aliam partem corporis quam aporteret cecidisset. Pestifera auspicia esse dicebant, cum cor in extis aut caput in iocinore non fuisset).
[47] Handb. 6, 410 et ss. = tr. fr. 43, 135 et ss.
[48] L’usage général des auspicia privata à l’époque ancienne est attesté par Cicéron, et on les rencontre encore quelquefois par la suite (ainsi dans Caton). Mais nous avons sur eux peu de renseignements précis (cf. Rubino). Un comprend qu’ils étaient de même nature que les auspices publics, et c’est aussi dans ce sens qu’est composée l’histoire d’Attus Navius dans Cicéron, De div. 1, 17. Il est également dans la nature des choses qu’ils aient, à l’origine, exclusivement appartenu aux patriciens, comme les droits de gentilité ; c’est à ce rapport de corrélation entre gens et auspicia (privata) qu’il faut rapporter les expressions employées dans Tite-Live, 4, 2, 5. e. 6, 2. 40, 3, 3 ; au reste, les auspicia publica sont encore sous un autre rapport attribués jusqu’à un certain point en privé aux patriciens. Le manque primitif d’auspicia privata des plébéiens ressort avec une netteté particulière dans le défaut de conubium ; le mariage mixte est impossible parce que la partie plébéienne n’a pas les auspices (Tite-Live, 4, 6, 2).
[49] Auspicia populi Romani, Cicéron, De domo, 44, 33 ; De d. n. 2, 4, 11. Auspicia publica privataque, Tite-Live, 4, 2. Pourtant on ajoute rarement la mention de ces derniers, d’autant plus qu’il l’époque où écrivaient Cicéron et Tite-Live, les auspicia privata étaient déjà une antiquité (Cicéron, De div. 2, 36, 76).
[50] Varron dans Nonius, p. 92 : Eo die cis liberim redeundum est quod de cælo auspicari jus nemini est (sit dans les Mss.) præter magistratum (magistrum dans les Mss.). Mais les mots de Cicéron, De leg. 3, 1, 10, omnes magistratus auspicium habento ne se rapportent probablement pas à ce sujet et se rattachent au droit d’obnuntiation qui sera étudié plus loin. — Cicéron, Phil. 2, 33, 81, dit pour la spectio : Nos (augures) nunfiationem solum habemus, consules et reliqui magistratus etiam spectionem. Cf. Varron, 6, 83. Le rapport des deux expressions consiste en ce que auspicium désigne le droit abstrait du magistrat de consulter les dieux, et spectio le même droit dans son application concrète : par suite, la première est dans cette acception ordinairement employée au pluriel, et la seconde toujours au singulier. Naturellement les deux sont fréquemment confondues par la pratique ; mais, lorsque, dans l’interregnum, le droit général de reconnaître les signes passe au sénat, on ne peut l’appeler spectio, mais seulement auspicium ou mieux auspicia.
[51] Cf. parmi les exemples sans nombre, en particulier Messala dans Aulu-Gelle, 13, 15, où les auspicia maxima et minora sont expressément identifiés avec les magistratus majores et minores. On dit : A populo auspicia accepta habere (Cicéron, De div. 2, 36, 76), auspicia ponere (le même, De deor. nat. 2, 3,19), etc.
[52] Rubino, p. 82.
[53] C’est ce qu’expriment Cicéron, De leg. 3, 4. 9. par les mots auspicia patrum esse, et l’auteur des lettres cicéroniennes ou pseudo-cicéroniennes à Brutus, 1 ; 5, 4, par auspicia ad patres redire, Tite-Live, 1, 32, 1, dit dans un sens analogue : Res ad patres redierat, et, dans un discours, 6, 41, 6, que les patriciens, en tant qu’ils nomment l’interroi, privatim auspicia habent. Cf. tome II, la théorie de la Représentation.
[54] Cicéron, De domo, 14, 38 : Auspicia populi Romani... intereant necesse est, eum interrex nullus sit.
[55] Tite-Live, 5, 31, 7 : Placuit per interregnum renovari auspicia. 6, 5, 6 : Ut renovarentur auspicia, res ad interregnum rediit. La décision, 5, 17, 3 : Ut tribun militum abdicarent se magistratu, auspicia de integro repeterentur ei interregnum iniretur, est qualifiée, c. 52, 9, d’instauratio sacrorum auspiciorumque renovatio. Partout où l’interregnum est établi à dessein, c’est en vertu de la même idée, ainsi après l’incendie de Rome par les Gaulois, Tite-Live, 6, 1, 5, et encore 9, 7, 14, et avec une clarté particulière dans le cas cité, 8, 17, 4, où un dictateur démissionne comme vitio creatus et où ensuite, une peste éclatant, velut omnibus eo vitio contactis auspiciis res ad interregnum rediit. — Il ne faut pas confondre avec ceci la simple repetitio auspiciorum d’un même magistrat.
[56] Au reste les signes célestes sont encore distingués en majora et minora sous d’autres rapports que celui de la différence de puissances ; ainsi par exemple en opposant l’aigle au pivert (Servius, Ad Æn. 3, 374, et Ad Ecl. 9, 13), les auspices de Numa à ceux de Romulus (Cicéron, De re publ. 2, 14, 26). Dans ce sens on appelle l’éclair auspicium maximum.
[57] Messala, dans Aulu-Gelle, 13, 15 : Patriciorum (magisiratuum) auspicia in duas divisa vint potestates. Maxima sunt consulum prastorum censorum reliquorum magistratuum minora sunt auspicia : ideo illi minores, hi majores magistratus appellantur. Festus, v. Minora auspicia, p. 157, parait tiré de Messala.
[58] Celui qui commande pro consule ou pro prætore et non en vertu d’une délégation à un autre magistrat, a nécessairement des auspices propres, quoiqu’il ne puisse que sous certaines conditions devenir imperator et obtenir le triomphe ; c’est un point qui n’a pas besoin d’être démontré. Sur le sens dans lequel Cicéron refuse les auspicia aux proconsuls et aux propréteurs de son temps, cf. De div. 2, 36, 76.
[59] L’idée que les auspices des tribuns consulaires aient été plus faibles que ceux des consuls ne trouve aucun appui dans les sources, et la logique juridique est absolument contre elle. Les auspices prétoriens, étant, par rapport aux consulaires, qualifiés d’eadem aut ejusdem potestatis (ci-dessous note 61), on ne voit pas comment les auspices des tribuns consulaires auraient pu être plus faibles, étant donné surtout que les augures permettent au tribun consulaire de procéder à la nomination du dictateur (Tite-Live. 4, 31, 4) et que cette nomination ne peut émaner du préteur.
[60] La situation du maître de la cavalerie oscille entre celles de l’officier et du magistrat ; ce point sera développé dans la partie qui le concerne ; on y montrera également qu’en tant qu’il est tenu pour magistrat, il est sur le même pied que le préteur.
[61] Messala (dans Aulu-Gelle, 13, 15) : Maxima (auspicia) sunt consulum prætorum censorum, neque tamen eorum omnium inter se eadem aut ejusdem potestatis, ideo quod conlegæ non suni censores constelum aut prætorum... ideo neque consoles aut prætores censoribus neque censores consulibus aut prætoribus turbant aut retinent auspicia.
[62] Messala poursuit, après avoir parlé des consuls, des préteurs et des censeurs, en disant : Reliquorum magistratuum minora sunt auspicia : ideo illi minores, hi majores magistratus appellantur. C’est pourquoi on attribue expressément aux magistratures de nouvelle création les auspices comme la compétence. Cicéron, De leg. agr. 2, 12, Si : Jubet auspicia coloniarum deducendarunt causa decemviros habere. Pullarios codent jure, inquit, quo habuerunt tresviri lege Sempronia. Au reste on rencontre très rarement ces auspices inférieurs. On peut encore remarquer ici, bien que ni l’un ni l’autre ne se rattache rigoureusement aux auspices, que, d’après la loi municipale de la colonie de Genetiva, c. 62, l’haruspex et le tibicen font partie des appariteurs des édiles. — On ne confondra pas avec les minore auspicia des magistratus minores les auspices que prend le magistrat supérieur pour les comices électoraux de l’inférieur tenus sous sa présidence.
[63] Le pontifex maximus tenant régulièrement les comitia calata (Aulu-Gelle, 15, 21), on ne peut lui refuser la possession d’auspices propres. L’indication altérée de l’Epitomé de Festus, p. 248 : Posimerium pontificale pomerium, ubi pontifices auspicabantur (cf. à ce sujet Hermes, 10, 40 = Rœm. Forsch. 2, 23) se rapporte, il est vrai, malaisément à notre matière ; et le passage mutilé de Festus, v. Saturno, p. 343, ne fournit pas une preuve certaine que le pontife puisse, comme le magistrat, inviter les augures à observer les auspices. Cf. tome III, la théorie du Pontificat.
[64] Aulu-Gelle, 13, 15, 1, indique, comme un vieil usage, que les consuls défendaient par un édit, pour le jour où ils voulaient tenir les comices par centuries, ne quis magistratus minor (c’est-à-dire minor consule) de cælo servasse velit.
[65] Le commentarium vetus anquisitionis (Varron, De l. L. 6, 91) commence ainsi : Auspicio operam des et (d’après l’excellente correction de Bergk ; le manuscrit porte orandesed) in templo auspices (le Ms. auspiciis). Dum aut ad prætorem aut ad consulem mittas auspicium petitum, comitiatum præco populum (le Ms. : commeatum prætores) vocet ad te. Il résulte au moins clairement de là que le questeur, — car c’est à lui qu’on s’adresse, — peut bien prendre les auspices, mais que ces auspices ne suffisent, pour les comices par centuries ; qu’autant qu’il se les est fait préalablement Concéder par ai magistrat ayant qualité. Il semble que leur concession implique le droit de tenir les comices, c’est-à-dire la délégation de l’imperium nécessaire à cet effet, et que le questeur occupe lui-même la présidence dans ces comices.
[66] Des tournures comme ob res a ut a me aut per legatos] meos auspiciis meis... gestas (Auguste, Mon. Ancyr. 1. 21) ; partim ductu partim auspiciis suis (Suétone, Aug. 21) ; ductu Germanici, auspiciis Tiberii (Tacite, Ann. 1, 41) sont fréquentes.
[67] C’est une autre question de savoir si non pas l’observation en soi, mais le signe particulier constaté par l’un, en particulier l’éclair, en tant qu’il est incompatible avec la tenue des comices, ne peut pas troubler l’autre. Cela rentre dans la théorie de l’obnuntiation ; mais, quoi qu’il en soit, il n’est porté par là aucune atteinte à la règle générale posée ci-dessus.
[68] Messala, loc. cit., enseigne que les auspices des préteurs et des consuls sont eadem aut ejusdem potestatis, ideo quod conlegæ... prætores consulum sunt, et il en conclut que prætores consulesque inter se vitiant et obtinent (auspicia). A la bataille des îles Ægates, le commandement était exercé par le consul Catulus et le préteur Falto : ce dernier prétendant au triomphe, on lui demanda si, en cas de différence d’opinions, ce n’aurait pas été son imperium, puis si, en cas de différence d’auspices, ce n’auraient pas été les siens qui auraient eu le dessous (si diversa auspicia accepissetis, cujus magis auspicio daretur ?), et, comme il lui fallut répondre affirmativement, le débat fut tranché contre lui (Val. Max. 2, 8, 2). On voit la clairement que Messala ne veut pas dire que les préteurs et les consuls ne puissent pas du tout prendre les auspices les uns à côté des autres, mais seulement que, si les uns et les autres les interrogent sur la même question et que les réponses soient différentes, l’auspicium le plus fort rend le plus faible vicieux, et l’emporte sur lui (vitiat et obtinet, ou, comme il dit un peu avant, turbat et relinet).
[69] Après la bataille de Sena, dans laquelle avaient commandé les deux consuls, le droit de triompher au premier rang fut reconnu à M. Livius, quoniam... eo die, quo pugnatum foret, ejus forte auspicium fuisset (Tite-Live, 28, 9, 10).
[70] Lorsque, dans le camp des consuls Paullus et Varro, ce dernier avait le commandement en chef et avait déjà donné l’ordre de marcher, Paullus, cum ei sua sponte cunctunti pulli quogue auspicio non addixissent, nuntiari jam efferenti porta signa collegæ jussit, et Varron céda, mais ce fut seulement parce qu’il le voulut bien (Tite-Live, 22, 42, 8).
[71] On n’a sans doute jamais pesé de tels signes l’un par rapport à l’autre sous le rapport de leur force intime. Les augures donnés par les vautours à Romulus et à Remus peuvent plutôt être comparés aux auspices pris, avant la bataille, par deux généraux qui se trouvent l’un eu face de l’autre, qu aux auspices de collègues comme les consuls.
[72] Cicéron, De div. 1, 2, 3 (et, 1, 16, 23) : Nihil publice sine auspiciis nec domi nec militim gerebatur. Tite-Live, 6, 41, 4 : Auspiciis hanc urbem conditam esse, auspiciis bello ac pace, domi militiæque omnia geri quis est qui ignoret ? Servius, Ad Æn. 1, 346. 4, 45. 340.
[73] Varron, dans Aulu-Gelle, 14, 7, 9 : Immolare prias auspicarique debere qui senatum habiturus esset. Cicéron, Ad fam. 10, 12, 3 : Oblata religio est Cornulo (au préteur urbain qui a convoqué la sénat) pullariarum admonitu non satis diligenter eum auspiciis operam dedisse. Servius, Ad Æn. 1, 446 : Erant templa, in quibus auspicato et publice res administraretur et senatus haberi posset. Mais, quand Appien, B. c. 2, 116, exprime relativement à César la règle : Έβος έστί τοΐς άρχουσιν ές τήν βουλήν είσιοΰσιν οίωνίζεσθαι, la suite montre qu’il s’agit du sacrifice usité en pareil cas, et, quand Pline, Paneg. 76, dit du consul Trajan se rendant aux séances du sénat : Una erat in limine mors consultare aves revererique numinum monitus, il n’y a pas davantage à penser à une auspication en forme.
[74] Tite-Live, 41, 18, 8 ; cf. Rubino, p. 92. Les auspices d’entrée en fonctions servent probablement pour le tirage au sort ordinaire des magistrats, pourvu qu’il les suive immédiatement.
[75] Tite-Live, 45, 12, 10 : (Consul) cum legionibus ad conveniendum [diem] dixit, non auspicato templum intravit : vitio diem dictam esse augures... decreverunt.
[76] Varron, 5, 143.
[77] Ce sont les auspicia peremnia. Festus, p. 245 : Peremne dicitur auspicari, qui amnem aut aquam, quæ ex sacro (peut-être ex agro) oritur, auspicato transit. Le même, p. 250 : Petronia amnis (cf. Becker, Top. 1, 629) est in Tiberim perfluens, quam magistratus auspicato transeunt, cum in Campo quid agere volunt : quod genus auspici peremne vocatur. Le même, p. 157 : Manalis fons appellatur ab auguribus puteus peremnis, neque tamen spiciendus videtur, quia flumen ia spiciatur, quod sua sponte in amnem influat. Les auspices requis lorsqu’on franchissait le pomerium pour aller de la ville au champ de Mars ne sont probablement pas autre chose que ceux que motivait le passage de l’amnis Petronia ; car il ne nous est pas rapporté que la prise des auspices fut requise pour le passage du pomerium, et le langage de Festus, quine les exige que pour le passage de ce pont, implique plutôt le contraire (cf. Jordan, Top. 1, 267). La nécessité de ces auspices résulte du principe de la doctrine augurale, d’après lequel tes cours d’eaux interrompent tous les signa ex avibus, et il faut un acte spécial pour faire subsister le signe (ut perseveret augurium) si l’oiseau passe en volant au dessus d’un cours d’eau (Servius, Ad Æn. 9, 24). Le caractère avant tout militaire de ces auspices est enseigné par Cicéron, De d. n. 2, 3, 9 et De div. 2, 36, 76, où il cite parmi les exemples de l’abandon des auspices dans les guerres de son temps que nulla peremnia servantur, ou, comme porte le second passage, que les généraux amnes transeunt (non) auspicato. L’origine de la coutume est compréhensible en présence de la situation de Rome au bord du Tibre, à la limite du Latium et de l’Étrurie : tout passage du fleuve constituait un premier acte de guerre.
[78] Tite Live, 34, 14, 1.
[79] Tite-Live, 6, 41, 6 : Nobis adeo propria sunt auspicia, ut non solum quos populus creat patricios magistratus, non aliter quam auspicato creet, sed nos quoque ipsi sine suffragio populi auspicato interregem prodamus.
[80] Cicéron, De leg. 3, 3, 9 : Ate sinistra dictus populi magister esto. Le consul accomplit la nomination solennelle du dictateur, selon I’expression technique oriens (c’est-à-dire surgens, d’après Velius Longus, De orthogr. éd. Putsch, p. 2234), nocte silentio (Tite-Live, 8, 23, 15, où les manuscrits portent oriente nocte) ; on rencontre du reste le plus souvent une abréviation de la formule : oriens (Velius, eod. loco) ; nocte silentio (Tite-Live, 9, 38, 14) ; nocte (Dion, fr. 36, 26 ; Tite-Live, 23,.22, 11) ; silentio (Tite-Live, 10, 40, 2). Il n’est pas besoin de preuve, et du reste il est dit expressément par Tite-Live, 8, 23, 15, qu’on entend par là la prise des auspices.
[81] Asconius, In Milon. éd. Orelli, p. 43 : Non fuit moris ab eo qui primus interrex proditus erat comitia haberi. De même, Schol. Bob. éd. Orelli, p. 281. Dans le fait il ne se trouve dans les annales, si fréquemment qu’elles indiquent le numéro d’ordre de l’interroi qui tient les comices, aucun exemple admissible que le premier les ait tenus (Rubino, Unters. p. 95) ; car le récit de Denys, 4, 75, 76. 84, selon lequel, après l’expulsion des rois, le premier interroi Sp. Larcius aurait nommé les premiers consuls, n’est certainement qu’un maladroit expédient des annalistes postérieurs (Schwegler, 2, 76). — Rubino, p. 93, conclut des expressions rapportées plus haut, diamétralement le contraire de notre solution c’est-à-dire que les auspices sont consultés même pour la nomination du premier interroi. D’après le sens textuel, on peut assurément les rapporter aussi bien à la nomination du premier interroi (patricii produnt interregem) qu’à celle du suivant (interrex patricius prodit interregem) ; mais rien n’oblige à comprendre ici la première hypothèse, et par conséquent à soulever un problème insoluble. Car, où il n’y a personne pour faire la nomination, la prise des auspices avant la nomination est impossible.
[82] Tite-Live, 3, 20, 6 : Augures jussos adesse ad Regillum lacum... locumque inaugurari, ubi auspicato cum populo agi posset ; 5, 14, 4 : Comitiis auspicato quæ fierent ; 28, 1, 2 : Solemne aupicatorum : (les Mss. : auspiciatorum) comitiorum. Varron, 6, 91. Denys, 7, 59, et beaucoup d’autres textes.
[83] Tite-Live, 5, 52, 15 : Comitia curiata... comitia centuriata... ubi auspicato, nisi ubi adsolent, fieri possunt ? Le même, 9, 38, 16. c. 39, 1. Denys, 9, 41. Cicéron, De d. n. 2, 4, 11, et beaucoup d’autres textes.
[84] Dion, 54, 24, et plusieurs autres textes.
[85] L’auspication des censeurs mentionnée dans Varron, 6, 86, se rapporte vraisemblablement à leur entrée en charge ; et le fait que la nuntiatio se produit à l’encontre du cens ne prouve aucunement que les censeurs fussent tenus de consulter chaque jour les auspices.
[86] C’est à quoi semblent se rapporter les passages suivants : Messala, dans Aulu-Gelle, 13, 15 : Censores non eodem rogantur auspicio atque consules et prætores ; Tite-Live, 7, 1, 6. Prætorem... collegam consulibus atque iisdem auspiciis creatum ; le même, 3, 55, 11. 8, 32, 3 ; Cicéron, Ad fam. 7, 30, 1 : Comitiis quæstoriis institutis... ille (le dictateur César) qui comitiis tributis esset auspicatus, centuriata habuit. Les scolies de Milan, Ad Catil. 4, 1, 2, disent, éd. Orelli, p. 369 : Campus consularibus auspiciis consecratus] cum omnes magistratus auspicio crearentur, tum maxime consules certorum auspiciorum ritu designabantur.
[87] Festus, p. 241 : Prætor ad portam nunc salutatur is qui in provinciam pro prætore aut pro consule exit, ce que Cincius ramène à ce que, lorsque le général de l’armée romano-latine partait de Rome, complures nostros in Capitolio a sole oriente auspiciis operam dare solitos : ubi aves addixissent, les soldats latins l’auraient (devant la porte) salué comme prætor. Tite-Live, 21, 63, 9 : (C. Flaminium) fugisse, ne... auspicato profectus in Capitolium, ad vota nuncupanda paludatus inde cum lictoribus in provinciam iret. Cf. 22, 1.
[88] Cela résulte en réalité déjà de ce que la loi curiate est une condition préalable du droit de faire la guerre ; car, par suite, elle est aussi une condition préalable du départ et de ses auspices. Cicéron, De leg. agr. 2, 11, 27, le dit expressément : Curiala (comitia) tantum auspiciorum causa remanserunt, c’est-à-dire que les comices par curies, par lesquels il faut toujours entendre en premier lieu ceux de imperio, n’ont subsisté que parce que, sans eux, le général ne peut arriver à prendre ses auspices.
[89] Tite-Live, 22, 1, 7 : Sine auspiciis profectum in exteno ea solo nova atque integra concipere (non) posse.
[90] Tite-Live, 8, 30, 1 : In Samnium incertis itum auspiciis est... Papirius dictator a pullario monitus cum ad auspicium repetendum Romam proficisceretur... De même, 8, 32, 4. 10, 3, 6. 23, 19, 2. c. 36, 2. Même si le général se rend à Rome pour d’autres motifs, les auspices de guerre spéciaux cessent d’exister quand il franchit le pomerium, et par suite, s’il retourne au camp, il lui faut les renouveler. C’est à cela peut-être, malgré l’inexactitude de l’expression, que pense Tacite, Ann. 3, 19 : Drusus urbe egressus repetendis auspiciis, mox onans introiit.
[91] A l’époque ancienne, les patres auraient refusé leur auctoritas à une pareille résolution populaire.
[92] A l’époque ancienne, il fallait que ce morceau de terrain fût en Italie ; plus tard, en a admis la même chose pour le sol d’outre-mer lui-même. Cf. VI, 2.
[93] Servius, Ad Æn. 2, 178. La répétition de la lex curiata, qui a lieu au cas de renouvellement de l’imperium et qui sera étudiée tome II, dans la théorie des Formes de l’Entrée en fonctions, est un acte de la même famille. Cette formalité fut supprimée en 540 et la modification relative aux auspices peut fort bien avoir été faite é la même époque. Cf. VI, 2.
[94] Cicéron, De div. 2, 36, 76. De même, De d. n., 2, 3, 9. Les paroles de Cicéron, bien que parfaitement claires, ont souvent été mal comprises (par exemple, par Rubino, p. 47).
[95] C’est ce que montre de la manière la plus précise César, B. c. 1, 6, d’après lequel les promagistrats partant contre lui paludati volis nuncupatis excunt. Cf. mon commentaire du Mon. Ancyr. p. 21. Il ne critique pas le défaut d’auspices, bien qu’il relève d’autres irrégularités constitutionnelles. Sans doute cette solennité avait été légalement réglée par Sulla, et César lui-même était parti de la même manière pour la Gaule.
[96] Aulu-Gelle, 3, 2, 10 : Magistratus quando uno die eis auspicandum est et id super quo auspicaverunt agendum, post mediam noctem auspicantur et post exortum solem agunt auspicalique esse et egisse eodem die dicunrtur. Le passage de Macrobe, 1, 3, 7, emprunté à Aulu-Gelle, permet de remplacer par post exortum solem agunt le texte corrompu qui nous a été transmis post meridiem solem agnum.
[97] Censorinus, 23, 4 : Indiciosunt..... auspicia..... magistratuum, quorum si quid..... post medium noctem et ante lucem factum est, eo die gestum dicitur qui eam sequitur noctem. Denys, 11, 20, fait pour la nomination du dictateur ceux qu’elle concerne paraître περί μέσας νύκτας et accomplir l’acte πρίν ήμέραν γενέσθαι. Dans Tite-Live, 10, 40, 2, le consul se lève dans le même but tertia vigilia, noctis, dans Festus, p. 348, post medium noctem, p. 347, mane. — Habituellement on retourne ensuite au lit ; Veranius (dans Festus, p. 348) remarque expressément que ce n’est pas nécessaire.
[98] Cf. Cicéron, De n. d., 2, 4, 11.
[99] Tite-Live, 3, 20 et ailleurs. D’après Dion, 41, 43, les Pompéiens consacrèrent un morceau de terre de ce genre à Thessalonique en l’an 706. On ne peut certainement pas conclure de Varron, 6, 86. 81, que le templum dans lequel le censeur prend les auspices soit différent de celui, dans lequel il tient la contio, bien que le point de savoir à quoi se rapportent les mots ubi templum factum est de 6, 87 soulève une difficulté. — Le récit de la rencontre en vue de la ville, pour laquelle les augures prennent les auspices à la citadelle et où le général attend avant d’attaquer que le signal convenu lui soit donné de là (Tite-Live, 4, 18 ; et Jordan, Topogr. 1, 241), est singulier, soit en ce que l’on ne voit jamais ailleurs les auspices ex avibus pris avec le concours des augures employés comme auspices militaires, soit en ce que le magistrat peut bien prendre les auspices par l’intermédiaire d’une autre personne, mais non dans un autre lieu. Il n’y a probablement là qu’un enjolivement indigne de foi.
[100] Assurément on rencontre le templum, même pour des auspices pris au camp ; ainsi avant le tirage au sort (Tite-Live, 41, 18, 8). L’orientation avait sans doute lieu même là, et, en ce sens, on peut dire jusqu’à un certain point que le templum se rencontre dans tous les auspices et non pas seulement dans les auspicia urbana. Mais le caractère des présages, l’impossibilité d’établir au camp des temples fixes et enfin l’extrême rareté de la mention du temple pour les auspices du camp montrent que l’établissement du templum n’a guère pu s’y étendre à quelque chose de plus que l’orientation.
[101] Becker, Top. p. 408. C’est le templum que Romulus avait à la fondation de la ville tracé de son lituus éternel (Cicéron, De div. 1, 17, 30) et pour lequel était établi un observatoire, l’auguraculum. Festus, Ep. p. 18 : Auguraculum appellabant antiqui quam nos arcem dïcemus, quod ibi augures publice auspicarentur. Varron, 5, 47 : Per quam (sacram viam) augures ex arce profecti solent inaugurare. Hadrien fit encore restaurer l’auguratorium (C. I. L. VI, 976). Les paroles de Cicéron, De off. 3, 16, 66 : Cum in arce augurium augures acturi essent jussissentque Ti. Claudium Centumatum, qui ædes in Cælio monte habebat, demoliri ea, quorum altitudo officeret auspices, montrent que la vue de l’Auguraculum s’étendait au moins à tout le Forum, puisque le Forum se trouve entre le Capitole et le Cælius. C. Marius, élevant le temple de l’Honos et de la Virtus, probablement au Capitole (Becker, Top. pp. 405.539) le fit bas, ne, si forte offeceret auspicis publicis, augures eam demoliri cogerent (Festus, v. Summissiorem, p. 344). La prise des auspices à l’Auguraculum pour les assemblées qui se tenaient au Capitole, en particulier pour celles des ourles, lis nous est pas attestée ; mais il est vraisemblable que l’Auguraculum servait pour ces actes, comme pour tous ceux qui se faisaient au Capitole et qui étaient soumis à une auspication.
[102] Cicéron, In Vatin. 10, 24 : In rostris, in illo inquam augurato templo ac loco. Tite-Live, 8, 14, 12 : Rostra id templum appellatum.
[103] Ti. Gracchus, consul en 591, informa le sénat qu’il avait commis un vitium, dans les élections consulaires qu’il dirigeait, en ayant placé son tabernaculum dans le jardin de Scipion (vitio sibi tabernaculum captum fuisse hortos Scipionis), puis en ayant franchi le Pomerium pour aller à Rome et en en étant revenu sans avoir pris les auspices (Cicéron, De d. n. 2, 4, 41 ; et. De div. 1, 17, 33. 2, 35, 74 ; Ad Q. fr. 1, 2, i ; Licinianus, éd. de Bonn, p. 10 ; Valéry Maxime, 1, 1, 3 ; Victor, De vir. ill. 44 ; différemment Plutarque, Marcell. 5). Je ne vois pas pourquoi l’on a soulevé des doutes contre la leçon qui nous est transmise (O. Müller, Etrusker, 2, 148, propose hortus spicionis, d’autres, d’autres corrections) ; si comme il est probable, la faute se rapportait au passage de l’amnis Petronia, il fallait bien indiquer l’endroit où était dressé le tabernaculum.
[104] Dans Tite-Live, 3, 20, les tribuns se plaignent de l’intention des consuls de tenir les comices par centuries au delà de la première borne milliaire (car c’est là nécessairement le sens de de exercitu proferendo) : et augures jussos adesse ad Regillum lacum fama exierat locumque inaugurari, ubi auspicato cum populo agi posset. Les consuls de 705 rendent possible la tenue de comices par centuries à Thessalonique (Dion, 41,43). Les horti Scipionis prouvent qu’il n’était pas nécessaire que l’emplacement inauguré fût la propriété de l’État ; mais il faut nécessairement que le sol soit romain et Dion ne veut rien dire de plus.
[105] Varron, dans Aulu-Gelle, 14, 7, 7 : Nisi in loco per augurent constituto ; quod templum appellaretur, senatus consultum factum esset, justum id non fuisse. Propterea et in curia Hostilia et in Pompeia et post in Julia, cum profana ea loca fuissent, templa esse per augures constituta, ut in iis senatus consulta more majorum justa fieri possent.... non omnes ædes sacras templum esse ac ne ædem quidem Vestæ templum esse. Voir dans le même sans Varron, De l. L. 7, 10 ; Tite-Live, I, 30, 2 ; Dion, 55, 3 ; Servius, Ad Æn. 1, 146. 7, 153. 11, 235. 12, 130. C’est pour cela que Cicéron, De domo, 64, 131, et Pro Mil. 33, 90, appelle la curie templum publies consilii. Cf. Handb. 6, 155 = tr. fr. 12, 186.
[106] Cf. tome III, la théorie de la Dictature. Les récits des nominations de dictateurs ne laissent point place à la supposition que le templum ait été déterminé pour elles à chaque fois par le collège des augures ou même par un seul augure.
[107] C’est pourquoi le lituus, le bâton employé dans ce but, est l’insigne officiel des augures ; et c’est aussi là qu’on doit chercher l’origine du mot augur ou auger (Priscien, 1, 6, 36), qui est visiblement dans un lien de corrélation avec auspex. Il est probable que l’étymologie, qui vient la première à l’esprit et qui était déjà donnée par les anciens (Festus, Ep. v. Augur, p. 2 ; Servius, Ad Æn. 5, 523), celle tirée de gerere, est exacte. L’augure conduit, dirige les oiseaux en ce qu’il détermine les bornes de leur apparition dans ses divisions du ciel. Par suite, on peut employer le mot auspex pour l’augure comme pour le magistrat (Plutarque, Q. R. 72 et d’autres textes), puisque tous deux regardent les signes, mais on ne peut pas employer augur pour le magistrat, puisque ce n’est pas lui qui trace le templum. De même, auspicium désigne par excellence la constatation du signe et augurium l’explication du signe constaté (Rubino, p. 45, note). — Les expositions faites jusqu’à présent de cette théorie présentent toutes un défaut ; c’est que la sphère d’activité des augures (templum, effari loca) et celle du magistrat qui prend les auspices ne sont pas correctement séparées, bien qu’en réalité les sources fassent la distinction avec la plus grande clarté.
[108] Cela s’appelle tabernaculum capere. Cicéron et Plutarque, dans les textes cités plus haut ; Tite-Live, 4, 7, 3 ; Servius, Ad Æn. 2,178 : In constituendo tabernaculo si primum vitio captum esset, secundum eligebatur ; quod si et secundum ratio captum esset, ad primum reverti mos erat. Tabernacula autem eligebantur ad captanda auspicia. Cf. Festus, v Tabernaculum, p. 356, et Contubernales, Ep. p. 356. Le tabernaculum est nommé au sujet des auspices pris au camp.
[109] Festus, p. 157 : Minora templa fiunt ab auguribus, cum loca aliqua tabulis aut linteis sæpiuntur, ne uno amplius ostio pateant, certis verbis definita. Itaque templum est locus ita effatus aut ita sæptus, ut ea (plutôt ex) una parte pateat augulosque adfixos habeat ad terram. Servius, Ad Æn. 4, 200 : Templum dicunt non solum quod potest claudi (c’est-à-dire l’espace fermé par des lignes idéales et non par des limites réelles), verum etiam quod palis aut hastis aut aliqua tali re et linteis (écrit Nissen, Templum, p. 4 ; le manuscrit porte lineis) aut loris aut simili re sæptum est quod effatum (le Ms. : et factum) est amplius in eo uno exitu esse non oportel, cum ibi sit cubiturus auspicans.
[110] Festus, p. 343, v. Silentio : .....qui post mediam [noctem auspic]andi causa ex lectulo suo si[lens surr]exit, et liberatus (peut-être levatus) a lecto in solido [solio se posuit se]detque.
[111] Servius, Ad Æn. 9, 4 : Post designatas cæli partes a sedentibus captabantur auguria. Stace, Theb. 3, 459 : Vacuoque sedet petere omina cælo, et ensuite : Postquam rite diu partiti sidera cunctas perlegere... auras. Plutarque, Marc. 5 : Άρχων έπ' όρνισι καθεζόμενος. Scolies de Vérone, Ad Æn. 10, 241. Le siège était une solida sella, Festus, s. v. p. 347, et ci-dessus, note 110.
[112] Cicéron, De div. 4, 40, 89 : Apud veteres qui rerum potiebantur iidem auguria tenebant. Il s’agit là en premier lieu du roi Romulus en sa qualité d’optimus augur (eod. loco, 1, 2, 3, rapproché de c. 48, 107) et d’une manière générale des reges augures (eod. loco, c. 40, 89).
[113] Cicéron, De div. 2, 33, 74 : Jam de cælo servare non ipsos censes solitos, qui auspicabantur ? nunc imperant pullario. C’est aussi vrai pour l’auspice fourni par les poulets que pour celui tiré de l’éclair, d’après la description détaillée donnée dans Cicéron, De div. 2, 34, 72 : Illi qui in auspicium adhibetur cum ita imperavit is qui auspicatur dicito, si silentium esse videbitur, .... respondet silentium esse videri. Tum ille : dicito si pascuntur. Pascuntur.
[114] Tite-Live, 4, 18, atteste un incident de ce genre, s’il faut accorder foi à son récit. Les augures ne paraissent jamais dans les auspices militaires (Tite-Live, 8, 21, 16) ; dans Cicéron, De leg. 2, 8, 20 : Quique agent rem duelli quique propopularem auspicium (augures) præmonento ollique obtemperanto, le premier membre de phrase se rapporte aux auspices urbains pris par le général à son départ, tandis que le second, dont le texte est corrompu, doit viser les autres auspices des magistrats.
[115] Cicéron, loc. cit., dit seulement : Q. Fabi, te mihi in auspicio esse volo. Respondet audivi. Hic apud majores adhibebatur peritus ; nunc quilubet. L’expression in auspicio esse s’applique à tous ceux qui assistant à l’acte à titre de conseillers, non pas seulement à l’augura, mais encore par exemple aux conseillers de l’augure (Cicéron, De leg. 3, 19, 43).
[116] C’est ainsi que pompée, consul en 702, dissout les comices prétoriens, sous prétexte qu’il a entendu un coup de tonnerre (Plutarque, Cato min. 42 ; Pomp. 52).
[117] Cf. la nuntiation des prodiges (Aulu-Gelle, 2, 28, 3, etc.).
[118] Le tribun C. Ateius fit, en 699, une telle obnuntiatio au consul Crassus. Ce que Cicéron (De div. 1, 16, 29) désigne du nom de dirarum obnuntiatio s’appelle, chez les auteurs récents, execratio (Velleius, 2.46) ou devotio diris (Florus, 1, 45 [3, 11] ; Lucain. 3, 136), et est exprimé par des termes analogues (έπαάσθαι, καταράσθαι) dans les auteurs grecs (Appien, B. c. 2, 18 ; Plutarque, Crass. 16 Dion. 39, 39). Il est évident que cette désignation est incorrecte, et que celle de Cicéron est seule d’accord avec le rituel.
[119] C’est à cela que pense Caton, dans son traité de re militari (dans Festus, v. Peremere, p. 214) : Magistratus nihil audent imperare, ne quid consul auspici peremat (= vitiet). Le questeur, par exemple, n’ose pas entreprendre un acte pour lequel il faut servare de cælo, parce qu’il craint d’empêcher ainsi un acte officiel projeté par le consul.
[120] L’obnuntiatio était admissible, même en matière d’élection. Dion, 38, 13, le dit expressément et les exemples particuliers cités note 133, le prouvent. C’est sans motif que Lange, De legibus Ælia et Fufia, Giessen, 1861, p. 37 et ss., a soutenu le contraire. On n’a jamais fait la distinction à ce point de vue entre les comices législatifs, électoraux et judiciaires. Quand Cicéron prend la défense de l’obnuntiatio, il la réfère d’une façon sommaire aux concilium aut comitia (Cum. sen. gr. eg. 5, 11), et il ne s’exprime pas autrement quand il juge opportun de plaider son inadmissibilité (Phil. 2, 32, 81), Seulement il est bien clair que l’obnuntiatio, dont l’admission dépendait, absolument à l’origine, et plus tard encore en partie, de la volonté du magistrat auquel elle était faite, fut admise par les tribuns du peuple dans une beaucoup plus faible mesure que par les magistrats patriciens.
[121] Outre le texte capital déjà cité note 50, qui exprime nettement et clairement la distinction de la spectio des magistrats et de la nuntiatio des augures, le texte suivant de Festus, qui est très difficile à cause de son état d’altération et qui n’a pas été heureusement traité par Rubino, p. 58, et par d’autres, appartient encore à notre matière, Festus, p. 333 : spectio in auguratibus ponitur pro aspectione. Et nuntiatio, quia omne jus sacrorum habent, auguribus competit, dumtaxat quod eorum (le manuscrit auguribus spectio dumtaxat quorum) consilio rem gererent magistratus, hos (le manuscrit : non) ut possent impedare nuntiando quœcumque (que manque dans le Ms.) vidassent. At his (le manuscrit salis) spectio sine nuntiatione data est, ut ipsi auspicio rem gererent, non ut alios impedirent nuntiando. Madvig, Verfassung des röm. Staats, 1, p. 267 = tr. fr. 1, p. 284) restitue le texte en ce sens que les augures auraient la spectio outre la nuntiatio. Mais c’est en contradiction flagrante avec l’allégation de Cicéron et cela ne pourrait se défendre qu’en supposant par exemple que spectio ne voudrait pas dire ici le droit d’observer, mais la simple constatation ; ce qui est en contradiction avec les habitudes du langage.
[122] La présence (in auspicio esse) des augures dans les comices par curies (Cicéron, Ad Att. 2, 7, 2 ; Ep. 12, 1. 4, 18, 2), par centuries (Varron, 6, 95 ; Messala dans Aulu-Gelle, 13, 15) et aux comices par tribus patricio-plébéiens (Varron, De r. r. 3, 2, 2), nous est fréquemment attestée ; nous n’en savons rien de plus précis. Probablement tout augure pouvait de cette façon assister à toute assemblée. Il résulte de Cicéron, Ad Att. 4, 18, 2, que, quant aux comices par curies, le témoignage de trois augures était tenu pour une preuve pleine et entière. Au point de vue de la forme, il mérite d’être remarqué que, pendant l’élection des édiles, l’augure qui assistait le consul par lequel l’élection était dirigée, était assis sur un banc, dans la villa publica, ut consuli, si quid usus poposcisset, esset præsto ( Varron, eod. loc.).
[123] Cicéron, De leg. 3, 4, 11 (cf. c. 19, 43) : Qui agent (cum populo patribusque), auspicia servanto : auguri publico parento. Cette procédure apparaît, d’une manière plus précise, dans l’opposition que souleva Antoine, en qualité d’augure, pendant les élections consulaires de 710 : Bonus augur, dit Cicéron, Phil. 2, 32, 81, eo se sacerdotio præditum esse dixit, ut comitia auspiciis vel impedire vel vitiare posset (impedire, si le magistrat qui présidait le vote déférait à l’opposition, vitiare, s’il passait outre). Finalement il la fit immédiatement avant la clôture du scrutin : Confecto negotio bonus augur alio die inquit. Cicéron, Phil. 1, 13, 1, emploie, pour désigner l’acte d’Antoine, l’expression auspicia a te ipso augure populi Romani nuntiata. De même, De leg. 2, 12, 31. Quid majus est, si de jure (auguram) quærimus, quam posse a summis imperiis et summis polestatibus comitiatus et concilia vel intitula dimittere vel habita rescindere ? Quid gravius quam rem susceptam dirimi, si unus augur alio die dixerit ? Tite-Live, 1, 36, 6 : Sacerdotio... augurum... tantus honos accessit, ut... concilia populi, exercitus vocati, summa rerum ubi aces non admisissent, dirimerentur (cf. à ce sujet Forsch. 1, 170).
[124] L’augure n’a pas à de cælo servare ; car cela rentre dans les auspicia impetrativa. Cicéron, Phil. 2, 32, 81, refuse ce droit à Antoine, parce qu’il n’est pas magistrat, mais seulement augure : Quisquamne divinare potest, quid vitii in auspiciis futurum sit, nisi qui de cælo servare constituit ? Comme magistrat, il aurait pu annoncer qu’ils prendraient les auspicia impetrativa au jour dont il s’agissait et empêcher par là les comices, dès le principe ; comme augure, il ne pouvait se servir que de l’obnuntiation. Soltau, Gültigkeit der Plebiscite, p. 57, n’a pas compris ce texte.
[125] Il est surprenant que les augures patriciens assistent à une assemblée où ils n’ont pas le droit de vote. Mais, alors que Cicéron et Tite-Live, dans les textes qui viennent d’être cités, indiquent expressément les concilia à côté des comitia, alors que le premier ajoute dans la suite du texte : Quid religiosius quam cum populo, cum plebe agendi jus aut dare aut non dare ? il est impossible de nier que le droit concilii dimittendi ne soit pas par là reconnu aux augures.
[126] Aulu-Gelle, 13. 15, 1. On comprend qu’en n’obéissant pas à cet ordre, le magistrat inférieur s’expose à étire puni. Il est vraisemblable que l’éclair vu par lui lie son supérieur.
[127] Donatus, Ad Terent. Ad. 4, 2, 9 : Qui malam rem nuntiat, obnuntiat, qui bonam, adnuntiat : nam proprio obnuntiare dicuntur augures, qui aliquid mali ominis scævumque viderint. Comparez obrogare. Au reste, en dehors de ce texte, obnuntiare n’est pas employé pour l’augure qui ajourne une assemblée, mais uniquement pour le magistrat qui empêche son collègue de faire une rogatio. On ne peut invoquer en sens contraire Cicéron, Phil. 2, 33, 83 : Consul consuli, augur auguri obnuntiasti ; car Cicéron confond là intentionnellement les deux choses. — Il ne faut pas confondre l’obnuntiatio dont il s’agit ici avec l’hypothèse, discutée plus haut, du conflit des auspices de deux collègues qui ont les mêmes attributions, mais qui sont inégaux.
[128] Le fait que Bibulus, chassé par la force du Forum, se contenta d’obnuntiare per edicta (Suétone, Jul. 20), ne fait que confirmer la règle. Cf. Drumann, 3, 204.
[129] Cicéron les désigne expressément comme deux lois différentes (De Har. resp. 27, 58 : Sustulit duas leges Æliam et Fufiam ; de même Pro Sest. 15, 33 ; In Vat. 2, 5. 7, 18. 9, 23 ; De prov. cons. 19, 46) ; la première est aussi citée à part par Cicéron, Pro Sest. 53, 114, et Ad Att. 2, 9, 1, et par Asconius, In Pison. p. 9, la seconde par Cicéron, Ad Att. 4, 16, 5, où il est question d’une action pénale intentée en vertu de cette loi ; mais habituellement elles sont rassemblées et quelquefois même on trouve lex Æia et Fufia (Cum sen. gr. egit. 5, 51 ; In Vat. 7, 18 ; In Pison. 5, 10 et le commentaire d’Asconius). Sur leur date, nos seules données sont qu’elles avaient subsisté une centaine d’années quand elles furent abrogées par Clodius en 696 (Cicéron, In Pison. 5, 10 : Centum prope annos legem Æliam et Fufiam tenueramus), et qu’elles sont antérieures aux Gracques (le même, In Vat. 9, 23). Ce sont vraisemblablement toutes deux des plébiscites, la loi Fufia doit au moins en être un, car on ne trouve pas de consul de ce nom avant 707, et on ne peut guère songer ici à une loi prétorienne. Pour leur contenu, parmi beaucoup de renseignements peu précis, le plus précis est encore dans Asconius, In Pis. p. 9 : Obnuntiatio, qua perniciosis legibus resistebatur, quam Ælia lex confirmaverat, erat sablata, d’où il résulte comme de la note 121, qu’elles ne firent aucune innovation de principe. Quant à la mesure dans laquelle elles réglèrent l’obnuatiatio, quant aux points qu’elles fixèrent et à ceux qu’elles ne fixèrent pas, les critiques prudents sauront se résigner à l’ignorance. L’assertion des scol. Bobiens, in Vat., 9, p. 319, d’après laquelle ces lois auraient interdit le dépôt d’une rogatio avant l’élection des magistrats est, dans sa forme présente, visiblement inadmissible ; mais, ainsi que me le fait remarquer Hirschfeld, elle est confirmée par l’observation que, selon Cicéron, Ad Att. 1, 16, 13, la dispense de ces lois accordée à l’auteur d’une rogation pour accélérer le vote de son projet de ici a pour conséquence l’ajournement des élections.
[130] Cicéron, Pro Sest. 15, 33, indique comme objet de la loi Clodia, ne auspicia valerent, ne quis obnuntiaret, ne quis legi intercederet, ut omnibus fastis diebus legem ferri liceret, ut lex Ælia, les Fufia ne valerent (voir dans un sens analogue, op. cit. 26, 56 ; Cum sen. gr. egit, 5, il ; De prov. cons. 113,46 ; In Vat. 1, 18 ; In Pison. 5, 10), Asconius (In Pison. p. 9), ne quis per cos dies, quibus cum populo agi liceret, de cælo servaret, et presque dans les mêmes termes Dion, 38, 13.
[131] On rencontre bien, pour l’époque postérieure à 696, suffisamment d’exemples d’obnuntiations, et c’est certainement parce que la validité des lois de Clodius fut soumise à des contestations multiples. Mais, si Antoine fait opposition aux comices consulaires de Dolabella en qualité d’augure et non pas de consul (Cicéron, Philipp. 2, 32. 33), il ne faut pas l’expliquer, comme Cicéron feint de le croire, par son ignorance ; c’est parce qu’Antoine admet la validité de la loi Clodia de 696, et au même moment Cicéron reconnaît lui-même cette validité, (op. cit. § 81 : quod — le fait de de cælo servare — neque licet comitiis per leges). Antoine rejeta encore dans deux autres cas cités, en qualité de consul, l’obnuntiation des tribuns, et, lorsque Appien donne pour motif, B. c. 3, 7, que ce droit appartient à d’autres cela ne peut signifier qu’une chose, c’est qu’Antoine déclara que le droit de faire de pareilles oppositions appartenait exclusivement aux augures et pas aux magistrats. Enfin la définition de la spectio dans Festus refuse la nuntiation aux magistrats, ce qui n’est exact qu’en partant de la validité de la loi Clodia. Certainement le fait qu’il n’est plus question de l’obnuntiation sous l’Empire ne peut pas être invoqué pour prouver la validité de cette loi. L’accusation intentée, encore en l’an 700, pour violation de la loi Fufia (Cicéron, Ad Att. 4, 16, 5), est parfaitement conciliable avec l’existence légale de la loi Clodia qui dérogea bien aux lois Ælia et Fufia, mais ne les abrogea pas formellement ; certaines de leurs dispositions restèrent sans doute en vigueur et pouvaient servir de base à une action.
[132] C’est ainsi que, comme on sait, le consul Bibulus fit, en 693, obnuntiation à son collègue César à tous les jours de comices (Suétone, Jul. 20, et d’autres auteurs ; Drumann, 3, 204).
[133] Cicéron, De domo 15, 39 ; De har. resp. 23, 48 ; De prov. cons. 19, 45 ; Ad Att. 2, 12, 2.
[134]
C’est ainsi que les tribuns du peuple, P.
Sestius (Cicéron, Pro Sest. 37, 79. 38, 83), et T. Milon (Cicéron, Ad
Att. 4, 3, 3. 4) firent obnuntiation, en 697, au consul Metellus Nepos,
relativement aux élections des édiles
curules ; le tribun Mucius Scævola aux consuls de l’an 700, relativement aux
élections de leurs successeurs (Cicéron, Ad Att. 4, 16, 7 ; Ad Q. fr.
3, 3, 2 : Comitiorum quotidie singuli dies
tolluntur obnuatiationibus ; Drumann, 3, 6) ; le tribun Nonius
Asprenas au consul Dolabella, en 710, à raison de la proposition tendant à lui
donner la province de Syrie (Appien, B. c. 3,7), et un de ses collègues
au consul Antoine qui avait convoqué des comices pour l’élection des censeurs
(Cicéron, Phil. 2. 38, 99 : Cur ea comitia non
habuisti ? an quia tribunus plebis sinistrum fulmen nuntiabat ?)
[135] Cicéron, Ad Att. 4, 9, 4, en 699 : Velim scire, num censum impediant tribuni diebus vitiandis. C’est encore à cela que se rattaché le récit de Dion, 37, 9, d’après lequel, en 689, les censeurs furent empêchés par les tribuns de faire la lectio senatus. — Au reste la nuntiation n’est pas ici dirigée comme d’habitude contre la réunion du peuple, mais contre l’accomplissement du recensement par les censeurs.
[136] Cicéron, In Vat. 7, 17. 18 : Cum quem post urbem conditam scias tribunum plebis egisse cum plebe, cura constaret servatum esse de cælo ?... cum te tribuno plebis esset etiamtum in re publica lex Ælia et Fufia, quæ leges sæpenumero tribunicios furores debititarunt et represserunt, quas contra præter te nemo umquam est facere conatus... ecquando dubitaris contra eas leges cum plebe agere et concilium convocare ? Le même, op. cit. 8, 20. 9, 43. De plus, il est argumenté, pour la validité du plébiscite de Clodius sur l’exil de Cicéron, dans le De prov. cons. 19, 45, de ce que nemo de cælo servarat, et en revanche, contre celle du plébiscite d’Antoine de 710, de ce qu’il a été rendu Jove tonante (Philipp. 5, 3, 8). Enfin la loi de Clodius défend d’obnuntiare concilio aut comitiis (Cicéron, Cum sen grat. eg. 5, 11).
[137] Vraisemblablement c’est à cela que se rattache l’abrogation par un sénatus-consulte, en 663, des plébiscites de Livius comme rendus contra auspicia (Asconius, In Cornel. p. 69) ; car on ne peut entendre par là que la transgression d’une nuntiation augurale ou d’une obnuntiation de magistrat. Cependant on invoquait, dans cette occasion, encore d’autres causes de nullité. En présence des louanges éloquentes adressées par Cicéron aux leges Ælia et Fufia, quæ in Gracchorum ferocitate et in audacia Saturnini et in colluvione Drusi et in contentione Sulpicii et in cruore Cinnano, etiam inter Sullana arma vixerunt (In Vat. 9, 23), on ne peut que regretter qu’il soit resté pour tout ce temps si peu de vestiges de leur existence ; la chose devient d’autant plus étonnante, si l’on en rapproche le rôle joué dans ces luttes par le droit d’intercession.
[138] C’est à ceci que se rapporte le texte tant discuté de Cicéron, Pro Sestio, 36, 78 : Si obnuntiasset Fabricio (au tribun du peuple de 697, dans la rogation pour le rappel de Cicéron) is prætor, qui se servasse de cælo dixerat, accepisset res publica plagam, sed eam, quam acceptam gemere posset. La leçon qui nous a été transmise est vraisemblablement correcte. Le préteur Appius, — car c’est à lui qu’il est fait allusion, — avait observé la foudre, mais on n’en arriva pas à une obnuntiation, parce que Fabricius fut auparavant chassé par la force du lieu du vote. On ne peut pas s’étonner que le frère de Publius Clodius observe le ciel, contrairement à la loi de son frère, quand on se rappelle que l’auteur de la loi lui-même combattit de cette manière les lois de César dans la seconde moitié de son tribunat. On n’a par conséquent besoin ni de changer dixerat en diceret, ni d’effacer prætor ; il est encore moins besoin de mettre une négation avant posset ; car Cicéron, comme le montre encore la suite, veut caractériser le procédé d’Appius comme constitutionnel, par conséquent comme étant bien blâmable, mais comme ne renversant pas l’organisation de l’État. D’après cela, l’obnuntiation parait, dans ses conditions générales d’admissibilité, avoir appartenu même aux hauts magistrats patriciens contre les plébéiens.
[139] Cicéron, De leg. 3, 4, 10 : Omnes magistratus auspicium... habento, avec le commentaire, c. 12, 27 — Omnibus magistratibus auspicia... dantur, ut multos comitiatus probabiles impedirent moræ ; sæpe enim populi impetum injustum auspiciis dii immortales represserunt.
[140] Cela s’appelle diem vitiare (Cicéron, Ad Att. 4, 9, 1). Cicéron exprime la même pensée d’une manière un peu différente, Phil. 2, 33, 80 — Comitia auspiciis vel impedire vel vitiare ; c’est à cette dernière acception que correspond la tournure : Collegam auspiciis vitiosum facere (Philipp. 3, 4, 9).
[141] Ainsi la loi curiate est ajournée (dies diffinditur), si le sort désigne une première curie de mauvais augure, mais elle est ensuite proposée de nouveau, postero die auspiciis repetitis (Tite-Live, 9,38, 39). C’est pour le départ pour la guerre qu’est le plus fréquemment cité ce renouvellement d’auspices, défectueux dès le principe ou devenus défectueux par la suite. Par conséquent, la simple contrariété des auspicia impetrativa amène la répétition de l’impétration, absolument comme, si le sacrifice d’un premier animal n’aboutit pas à la litatio, on en abat un second. La reprise des auspices ne peut cependant pas, d’après leur nature même, régulièrement avoir lieu le même jour. Si on accomplit l’acte projeté au mépris des auspices contraires, ou si les Dieux sont intervenus par des auspicia oblativa défavorables, (comme dans le cas de Tite-Live, 23, 31, que Rubino, p. 69, n’interprète pas exactement), il y a un vilium.
[142] Causa parait aussi être employé comme synonyme, Servius, Ad Æn. 7, 141. 9, 630. On désigne encore dans le même sens l’acte comme ayant été accompli inauspicato (Tite-Live, 21, 63, 7).
[143] De quelle façon, nous n’en savons rien. L’analogie avec les procédés de l’instruction judiciaire ordinaire peut se conclure de Tite-Live, 8, 23, 13 : Neque ab consule cuiquam publice privatimve de ea re scriptum esse nec quemquam mortalium extare, qui se vidisse aut audisse quid dicat, quod auspicium dirimeret.
[144] Tite-Live, 45, 12, 10 : Vitio dient diciam esse augures, cum ad eos relatum est, decreverunt. Le même, 4, 7, 3 : Augurunt decreto perinde ac vitio creati honore abiere, quod C. Curtius, qui comitiis eorum præfuerat, parum recte tabernaculum cepisset. Le même, 23, 81, 13 : Cui ineunit consulatum cum tonuisset, vocati augures vitio creatum videri pronuntiaverunt. De même, 8, 15, 6. c. 23, 14. Cicéron, De leg. 2, 12, 31 : Quid magnificentius quam posse decernere, ut magistratu se abdicent consules ? Cf. In Vatin. 8, 20. En pareil cas, ce n’est jamais, comme pour l’ajournement, un augure isolé, c’est le collège qui statue.
[145] Cela s’appelle referre ou rem deferre ad collegium : Tite-Live, 45, 12, 10 (ci-dessus, note 144) ; Cicéron, Phil. 2, 34, 83 : Quæ (acta Dolabellæ) necesse est aliquando ad nostrum collegium deferantur.
[146] Dans le cas le plus exactement connu, celui des élections des consuls pour 592, le magistrat qui dirigeait le vote et qui était également augure, s’apercevant de son erreur après la fin de son consulat, en informa le collège qui communiqua à son tour la chose au sénat (Cicéron, De n. d. 2, 4 ; cf. De div. 2, 35, 14). Dans un autre cas, les pullarii appellent l’attention du magistrat qui prend les auspices sur le vice commis, le collège des augures adopta leur opinion, et l’affaire est ajournée (Cicéron, Ad fam. 10, 12,2).
[147] Cicéron, De leg. 2, 8, 21 : Quæque augur injusta nefasta vitiosa dira deixerit (Mss. defixerit), inrita infestaque sunto, quique non paruerit, capital esto. Il recommande encore à plusieurs reprises, dans sa constitution, aux magistrats l’obéissance aux augures (eod. loc. un peu plus haut et 3, 4, 11 ; cf. 2, 12, 31. 3, 19, 43). Il englobe du reste ici des choses différentes, en particulier la nuntiatio des augures ; par suite, il y est probablement question d’un seul augure et non du corps des augures.
[148] Statut municipal de Genetiva, c. 66 : De auspiciis quæque ad eas res pertinebunt augurum juris dictio judicatio est.