I. — LA GUERRE DEVIENT GÉNÉRALE. AU moment où il rompait la trêve de Ratisbonne, Louis XIV comptait que la 'lutte entre Jacques II et Guillaume d'Orange empêcherait l'intervention des Provinces-Unies et de l'Angleterre et condamnerait les autres États à l'inaction. Il avait mal calculé. A la nouvelle que la France attaquait l'Empire, Guillaume avait pressé les États Généraux de consentir à une expédition en Angleterre, pour y forcer le gouvernement à se déclarer contre la France. L'opinion publique, travaillée depuis longtemps par les ministres protestants et par les réfugiés français, s'était prononcée en faveur de ce projet. Le 8 octobre 1688, les États Généraux y adhérèrent, et, quelques jours après ; ils déclarèrent aux ministres étrangers à La Haye que les liaisons étroites du roi de la Grande-Bretagne avec S. M. Très Chrétienne leur ayant inspiré des alarmes légitimes pour le maintien de leur religion et de leur indépendance, ils avaient jugé convenable d'assister le prince d'Orange avec des forces navales et militaires, pour aller rétablir l'ordre et le règne de la loi en Angleterre ; que, toutefois, l'intention du prince n'était ni de subjuguer ce royaume, ni de Mener le roi régnant, ni d'inquiéter les catholiques, mais seulement d'y rétablir la paix publique et le règne des lois, en faisant convoquer un Parlement librement élu par la Nation. Après quelques semaines de retard, causé par des vents contraires, — des vents papistes, comme le disaient les partisans du stathouder, — la flotte prit la mer le 11 novembre 1688. Elle se composait de 400 voiles, dont 50 vaisseaux de guerre, sous les ordres de l'amiral Herbert, récemment destitué par Jacques II. Les régiments, formés de Hollandais, d'Anglais et de réfugiés français, étaient sous le commandement d'un de ces réfugiés, un maréchal de France, le comte de Schönberg. Le 15 novembre, après une traversée favorisée par un vent protestant, le débarquement eut lieu sur la plage de Torbay[2]. On avait évité un engagement avec la flotte de Jacques II. Guillaume ne reçut pas l'accueil chaleureux sur lequel il comptait. La révolution était surtout l'œuvre des grands seigneurs et des évêques anglicans, qui ne pouvaient pas supporter que Jacques II livrât aux catholiques les postes de la cour, de l'église et de l'armée. Mais le Roi ayant été abandonné par ses ministres, ses généraux, ses évêques, par son gendre Georges de Danemark et même par sa propre fille, la princesse Anne, ces exemples entraînèrent le pays. Jacques, passé de la sécurité à la terreur, ne sut ni résister énergiquement ni négocier loyalement. Il abandonna son royaume et se réfugia en France. Il croyait qu'il laisserait l'Angleterre dans une anarchie qui rendrait son retour nécessaire, mais le Parlement, après quelques hésitations, offrit la couronne au prince et à la princesse d'Orange. Le 23 février 1689, Guillaume et Marie, après avoir entendu, en séance solennelle, la lecture de la Déclaration des Droits, furent proclamés conjointement roi et reine d'Angleterre. Louis XIV espérait encore, au début de l'année 1689, éviter la guerre générale. En somme, il n'était en hostilités ouvertes qu'avec l'Empire. Garder une bonne défensive sur le Rhin, causer des embarras à l'Autriche du côté du Danube, lui paraissait possible, possible aussi d'occuper Guillaume en Angleterre, de façon qu'il ne pût intervenir dans les affaires du continent, et pour cela il importait de l'occuper dans ses États. C'est pour assurer la défensive sur le Rhin que les Français ruinèrent le Palatinat transrhénan. L'atroce exécution commença, en mars, par Heidelberg : sur l'ordre de Louvois, Tessé fit incendier la ville, détruire le pont et miner le château, résidence des électeurs. Il en avait sauvé quelques portraits de famille, avec l'intention de les remettre à Madame et de lui faire une honnêteté, quand elle sera un peu détachée de la désolation de son pays natal. Mannheim fut plus durement traité encore. On n'y laissa pas pierre sur pierre ; les habitants qui voulaient s'établir sur les ruines furent traqués. L'endroit fut comme un champ. Spire, Worms, Bingen, subirent le même sort du 31 mai au 3 juin 1689. Tout fut mis à sac. Les Allemands exaspérés dénoncèrent à l'indignation de l'Europe un ennemi implacable et cruel, et l'auteur des Soupirs de la France esclave écrivit : Les Français passaient autrefois pour une nation honnête, humaine, civile, d'un esprit opposé aux barbaries ; mais aujourd'hui un Français et un cannibale, c'est à peu près la même chose dans l'esprit des voisins. La guerre entreprise dans l'Empire rendit confiance aux Turcs, qui reprirent les hostilités sur le Danube. Mais Louis XIV ne put décider la Pologne à se déclarer contre l'Empereur ni contre l'électeur de Brandebourg. Il ne réussit pas non plus à ressaisir la Bavière, quoiqu'il fût bien servi auprès de l'électeur, par le marquis de Villars, alors colonel de cavalerie, qui se fit l'ami de Max-Emmanuel et lui promit monts et merveilles. L'affaire de Cologne, où sa maison était lésée, et l'incendie du Palatinat, qui fit horreur à toute l'Allemagne, décidèrent l'électeur à rompre. Sur la simple promesse de Léopold de demander pour lui à Madrid le gouvernement des Pays-Bas, il signifia son congé à Villars. Quelques mois après, par le traité du 4 mai 1689, il s'engageait à fond. avec l'Empereur. Louis XIV ne réussit pas mieux auprès de l'électeur de Brandebourg[3]. Frédéric III, bien qu'il fût d'humeur pacifique et désireux de ne pas rompre avec la France, avait refusé de reconnaître Fürstenberg comme archevêque de Cologne. Il s'était rencontré, le 8 septembre 4688, à Minden avec son cousin Guillaume d'Orange, et lui avait promis 6.000 hommes de troupes. Quelques jours après, des régiments brandebourgeois étaient entrés à Cologne pour défendre l'électorat. Enfin, dans une entrevue, à Magdebourg, avec l'électeur de Saxe, le duc de Hanovre et le landgrave de Hesse, Frédéric déclara qu'il ne restait plus d'autre sûreté aux princes de l'Empire que celle qu'ils trouveraient à la pointe de leurs épées. Par le concert de Magdebourg ces princes décidèrent l'envoi d'une armée de 22.000 hommes sur le Rhin. Louis XIV tenta inutilement d'acheter la neutralité du Brandebourg. En Espagne, la reine Marie-Louise d'Orléans, qui soutenait le parti français contre le parti impérial, mourut presque subitement, le 12 février 1689. Charles II céda au parti adverse, où allaient d'ailleurs ses sympathies, la France lui ayant donné tant de sujets de ressentiment. Il conclut un accord avec les États Généraux et fit entrer des troupes allemandes dans les forteresses de Belgique. Le 15 avril, Louis XIV lui déclara la guerre. Louis XIV rompit aussi avec les Provinces-Unies. Au mois de novembre 1688, l'embargo avait été mis sur les navires hollandais qui se trouvaient dans les ports de France ; mais les États Généraux avaient refusé de délivrer des commissions pour courre sus aux vaisseaux français. Il n'y avait rien à craindre de ce côté tant que le roi-stathouder ne serait pas libre d'intervenir par les armes sur le continent. Louis XIV essaya de l'enfermer en Grande-Bretagne. Si l'Angleterre paraissait être acquise à Guillaume, l'Écosse ne s'était pas encore prononcée pour lui, et l'Irlande s'était soulevée en faveur de Jacques II, par sympathie religieuse et par haine des Anglais. Les Irlandais avaient assailli les landlords et massacré leurs familles ; ils avaient fait savoir à leur roi, réfugié à Saint-Germain, que, s'il ne venait pas se mettre à leur tête, ils se donneraient à la France. Jacques II, le 25 février 1689, prit congé de Louis XIV. Le roi de France avait fait préparer une flotte à Brest ; il fournit à l'expédition des munitions, des armes, de l'argent, un petit état-major d'officiers, même un diplomate, le comte d'Aveux ; mais il ne lui donna pas de troupes. Le 22 mars, Jacques débarqua sur la côte méridionale de l'Irlande ; bientôt il entra à Dublin. Les officiers français auraient voulu tout d'abord organiser et discipliner l'armée irlandaise, cohue de 40 à 50.000 hommes mourant de faim, à moitié nus, brandissant, pour toutes armes, des bâtons et des faux. Jacques II voulut se porter sans délai dans le nord de Pile, où s'étaient concentrés les partisans de Guillaume, les vaincre, passer ensuite en Écosse où les montagnards s'étaient soulevés et marcher de là sur Londres. On Se dirigea donc vers Londonderry. Mais les Anglais, qui s'y étaient réfugiés, résistèrent et appelèrent Guillaume III. Celui-ci envoya une flotte dans la Manche pour empêcher la flotte française, commandée par Château-Renault, de débarquer en Irlande des munitions et des renforts. Mais, quand les 22 vaisseaux anglais, commandés par l'amiral Herbert, se présentèrent, le 11 mai, devant la baie de Bantry, Château-Renault les reçut à coups de canon et les contraignit à se retirer. Les Français étaient encore maîtres de la mer. Ainsi commencèrent les hostilités directes entre Louis XIV et Guillaume III. Guillaume déclara la guerre à la France le 17 mai. Il invoquait pour griefs l'insulte faite au pavillon anglais par les Français en lui refusant le salut dans.les mers britanniques, les hostilités entreprises par les Canadiens contre les possessions de la Nouvelle-York et de la baie d'Hudson, et surtout l'aide donnée à Jacques II. La guerre, que Louis XIV avait espéré limiter, était donc devenue générale. Jamais encore le Roi n'avait eu affaire à si forte partie, puisque l'Angleterre, dont l'alliance ou la neutralité lui avait, permis jusque-là de résister et de vaincre, s'était déclarée contre lui. Il résolut d'y porter la guerre, et de demeurer partout ailleurs sur la défensive. D'ailleurs, la défensive — barrer le passage aux armées étrangères, vivre aux dépens de l'ennemi, sur son propre territoire, lui enlever des places fortes, sans courir de grands risques — c'était la tactique préférée de Louis XIV et de Louvois, plus administrateurs qu'hommes de guerre et qui craignaient la fortune des batailles. Pendant les années 1689 et 1690, aucun événement décisif ne se produisit aux frontières. Noailles entra en Catalogne et. s'y maintint. Sur le Rhin, une armée de 40.000 hommes, commandée par le maréchal ; de Duras, laissa l'électeur de Brandebourg et le duc de Lorraine prendre Mayence en septembre, et Bonn en octobre 1689. Duras réincendia le Palatinat, où les paysans exaspérés firent la guerre d'embuscade. L'an d'après, l'armée du Rhin, sous le commandement du Dauphin et du maréchal de Lorge, se contenta de vivre en pays ennemi et de protéger l'Alsace. Aux Pays-Bas, en 1689, d'Humières défendit mal la frontière. Des partis ennemis ravagèrent les cantons français du Tournaisis et de la Flandre wallonne. En 1690, les alliés firent un grand effort aux Pays-Bas. 48000 hommes, Espagnols, Hollandais, Allemands, commandés par Waldeck, devaient marcher vers la Champagne ; une autre armée se forma sur la Moselle, sous le commandement de l'électeur de Brandebourg. Les coalisés furent lents. Luxembourg, très rapide, devança leur jonction. Dans la plaine de Fleurus, entre Charleroy et Namur, après une. furieuse journée, le Ire juillet 1690, il rompit l'armée de Waldeck ; après quoi, il s'arrêta. Sur mer, la guerre offensive que conduisit Tourville, commandant les flottes réunies. de la Méditerranée et de l'Océan, fut marquée, en 1690, par une grande bataille. Sorti de Brest, le 23 juin, avec 70 vaisseaux, Tourville rencontra la flotte anglo-hollandaise, forte d'une soixantaine de vaisseaux, à la hauteur du cap Béveziers[4] (Beachy-Head). Le combat s'engagea le 10 juillet. Les Hollandais, placés à l'avant-garde, se défendirent courageusement et subirent de grosses pertes : un vaisseau pris, huit coulés à fond, sept autres extrêmement maltraités. Les Anglais, qui formaient le centre, combattirent de loin et mollement[5]. Grâce à un changement dans le courant de marée, les ennemis purent s'éloigner en bon ordre. Tourville eut le tort de ne pas les poursuivre avec ses meilleurs marcheurs et de perdre ainsi contact avec eux pendant la nuit. Il essaya d'aller les chercher jusque dans la Tamise, opéra des débarquements sur plusieurs points de la côte et incendia douze vaisseaux de guerre qu'il découvrit à Teignmouth[6]. Les Anglais étaient consternés ; les Hollandais étaient profondément irrités contre leurs alliés ; on espérait une rupture. Mais le jour même de la bataille de Béveziers, à Drogheda, sur la Boyne, le roi Guillaume attaquait le roi Jacques, qui aurait été pris dans la déroute de ses Irlandais, si le corps français n'avait protégé sa retraite. Jacques retourna en France. Guillaume, le 20 septembre 1690, annonçait au prince de Waldeck qu'il allait apporter le secours des armes anglaises aux alliés du continent, et attaquer la France à la fois sur terre et sur mer. II. — LA GRANDE ALLIANCE DE VIENNE ET LA FRANCE. PENDANT ces deux premières années, les ennemis de la France s'étaient unis et avaient fait une coalition. Des négociations entre Vienne et La Haye conduites par Jacques Hop, pensionnaire d'Amsterdam, aboutirent au traité de Vienne, le 12 mai 1689. Les alliés s'engageaient à soutenir la guerre avec toutes leurs ressources ; — à rétablir l'état religieux et politique sur le pied des traités de Westphalie et des Pyrénées ; — à faire rendre au duc de Lorraine ses États et droits héréditaires. Des articles séparés, qui devaient rester secrets pour l'Espagne, portaient que les adhérents aideraient S. M. Impériale et ses héritiers à se mettre en possession de la monarchie espagnole, dans le cas où Charles II mourrait sans héritier légitime, et à faire élire roi des Romains l'archiduc Joseph. Guillaume s'était fort intéressé aux négociations austro-hollandaises. Après qu'il eût conclu avec la Hollande une alliance défensive et offensive, il avait adhéré au traité de Vienne en décembre 1689. Ainsi, les deux Puissances maritimes, longtemps rivales et adversaires, se réconciliaient. Longtemps ennemies de la maison d'Autriche, elles s'alliaient avec elle, et ne s'inquiétaient pas de la reconstruction possible de l'empire de Charles-Quint. Elles s'engageaient à y aider. C'est qu'elles ne détestaient pas seulement la France ; elles la craignaient, la voyant forte sur mer, comme elle ne l'avait jamais été. L'alliance de Vienne fut complétée par l'adhésion que lui donnèrent, en juin 1690, le roi d'Espagne, qui se fit, d'ailleurs, prier par l'Empereur, et, en octobre, le duc de Savoie. Victor-Amédée en était arrivé tortueusement à ce pas décisif. Il se rendit comme à dessein suspect par des actes divers à Louis XIV, qui envoya Catinat pour le surveiller et le maintenir de force dans l'alliance française. Pressé de prendre de nouveaux engagements plus étroits, il promit ce qu'on voulut : envoyer ses troupes servir en France, remettre aux Français jusqu'à la paix les villes de Turin et de Verrue. Mais pendant qu'il traînait les dernières négociations en longueur, il fortifiait Turin ; les 3 et 4 juin, il signa des traités d'étroite alliance avec l'Espagne et avec l'Empereur. Les contractants lui promettaient des troupes et de faire restituer Pignerol à la Savoie. Casal serait donné aux Espagnols. Le jour même qu'il traitait avec Léopold, Victor-Amédée faisait savoir à Catinat que l'extrémité dans laquelle le Roi le réduisait l'avait enfin porté à recevoir les offres de secours que les Espagnols lui avaient inutilement offerts plusieurs fois. Catinat attaqua, le 18 août, à Staffarde l'armée de Savoie, grossie d'un contingent espagnol, la mit en déroute, mais fut si affaibli par sa victoire qu'il ne fit que s'emparer de Suse et de quelques forteresses et rentrer en France pour y prendre ses quartiers d'hiver. Ce fut alors que Victor-Amédée, qui avait tout à craindre de la France, après l'éclat de sa rupture, adhéra, le 20 octobre, à la Grande Alliance, qui lui promit un subside de 30.000 écus par mois et lui garantit la restitution de Pignerol. Le duc révoquait son édit de 1686 contre les Vaudois, et s'engageait à traiter favorablement les autres gens de la religion qui voudraient s'établir dans ses vallées. La France est désormais enfermée dans un cercle d'ennemis. De tous ses voisins les Suisses seuls ne s'étaient pas déclarés contre elle. Pour la première fois Louis XIV se trouvait réduit à ses propres forces[7]. Les Portugais qui, dans les guerres précédentes, avaient pris l'Espagne à revers, s'étaient détachés de la France, à la suite de désaccords politiques et commerciaux. Leur roi Don Pedro avait épousé, en 1687, la fille de l'électeur Palatin, Marie de Neubourg. Il l'avait préférée à une princesse française. Les cabinets de Madrid et de Vienne auraient voulu le faire entrer dans la coalition. Timide et arrêté aux bagatelles, il refusa de prendre parti contre la France ; mais Louis XIV n'avait rien à attendre de lui. Rien non plus des États du Nord. Le Danemark ne promit que sa neutralité par un traité de mars 1691. La Suède, engagée par traités à fournir des troupes à l'Empereur et à la Hollande, se dérobait à ses obligations, mais ne songeait aucunement à se rapprocher de la France. Enfin, le Saint-Siège demeurait défiant et hostile. Le Roi pourtant avait fait bien des concessions. Dès le début de l'année 1689, il avait rappelé Lavardin de Rome. Innocent XI était resté indifférent à cette concession. Son successeur Alexandre VIII, élu le 6 octobre 1689, passait pour favorable[8] à la France. Louis XIV restitua Avignon et le Comtat ; il renonça aux franchises le 31 octobre ; puis il rappela de Rome le cardinal d'Estrées, qui était détesté à la cour pontificale. Le Saint-Père n'accorda rien en échange, et le désaccord reprit sur la question des bulles et de la déclaration de 1682. La réconciliation ne devait avoir lieu qu'à la fin de l'année 1693, avec Innocent XII[9]. La France pouvait tenir tête à la coalition[10]. Bien qu'affaiblie par l'émigration des protestants et par la diminution de son commerce, elle possédait encore des ressources financières et militaires considérables. Pour réunir l'argent nécessaire, on avait de nouveau recours aux affaires extraordinaires. Son organisation militaire était forte et solide. La défense de ses frontières continentales avait été complétée par l'acquisition de Luxembourg, de Casai et de Strasbourg, qui fermaient l'entrée dans le royaume du côté des Pays-Bas, de l'Italie et de l'Empire, et ouvraient à la France des passages pour entrer dans ces contrées. Ses armées n'atteignaient pas le chiffre de 300.000 hommes, comme on en répandait le-bruit, mais les troupes en campagne comptaient 100.000 hommes, et il y avait autant de monde dans les garnisons. Pour la première fois on organisa la levée des milices, qui donna 25.000 hommes. Enrôlés de force, mal équipés, insuffisamment dressés, les miliciens ne tardèrent pas cependant à former une bonne armée de réserve. L'artillerie venait d'être augmentée : outre les régiments de fusiliers et de bombardiers, elle comprenait 12 compagnies de canonniers. La cavalerie, qui avait remplacé l'épée par le sabre, et dont chaque régiment possédait une compagnie de carabiniers, n'était pas très bien montée ; mais l'infanterie était bonne et bien armée, en partie de la pique, en partie du fusil, que Vauban avait rendu, par son invention de la baïonnette à douille, une arme de jet et d'escrime. Les forces du Roi sur mer étaient aussi imposantes. Les côtes françaises étaient protégées par les arsenaux de Toulon, de Rochefort, de Brest, de Dunkerque et par de nombreuses fortifications fixes, le long du littoral. La défense mobile de terre était confiée aux troupes régulières, aux gentilshommes qui ne servaient pas à l'armée et qui formaient les compagnies du ban et de l'arrière-ban, et surtout aux milices gardes-côtes, composées de paysans habitant les paroisses du bord de la mer. Sur les côtes croisaient de nombreux navires et 45 galères. Des 219 vaisseaux de ligne, 80 étaient armés de 50 canons au moins. A cela, il faut ajouter la flotte auxiliaire ; les armateurs transformaient leurs navires marchands en capres. Dunkerque, Saint-Malo, Nantes, Bayonne devaient s'illustrer dans la guerre de course. En somme, les forces navales de la France dépassaient, par le nombre et par la qualité, les flottes anglaise et hollandaise réunies. La volonté de Colbert avait fait cette merveille. La France ne manquait pas d'hommes capables de conduire ses forces militaires. Condé est mort en 1686, suivi bientôt par le maréchal de Créqui, le meilleur élève de Turenne, mais il reste d'autres capitaines. Le maréchal de Large avait été à l'école de Turenne, son oncle ; il en suivait la méthode et les maximes. Boufflers, insuffisant pour commander en chef, était un excellent lieutenant-général, vigilant et actif. Un autre lieutenant-général, Catinat, s'était, élevé par degrés, sans aucune brigue. Hardi et entreprenant quand il avait l'épée à la main, il était pétri de précautions avant la bataille. Le maréchal de Luxembourg rappelait Condé : un génie ardent, une exécution prompte, un coup d'œil juste, avec un sang-froid qui lui laissait tout voir et tout prévoir au milieu du plus grand feu et du danger du succès le plus imminent. Et c'était là où il était grand. Pour le reste, la paresse même ; et, si le sexe se trouvait près de là, alors il était inaccessible à tout. Parmi les marins, on compte encore, après la mort de Duquesne, en fête, et la retraité du comte d'Estrées, le chevalier de Tourville, le comte de Château-Renault, Forbin, Jean Bart, Duguay-Trouin. Le vice-amiral de Tourville, déjà célèbre par ses victoires, se montrait d'Une prudence qui paraissait excessive à la cour. Château-Renault, plus audacieux, représentait la jeune, marine, disposée à innover dans la construction et l'armement des navires. Jean Bart est resté le type de l'officier de fortune, successivement matelot, corsaire, capitaine de vaisseau et plus tard chef d'escadre. Marin dans l'âme, il savait parfaitement bien son métier. Seignelay, qui administrait la marine, mourut le 3 novembre 1690 ; il fut remplacé par Louis Phélypeaux de Pontchartrain. Pontchartrain avait prié le Roi de ne point le charger de la marine parce qu'il n'en avait aucune connaissance ; mais le Roi avait voulu absolument qu'il s'en chargeât, parce qu'il avait reçu de lui des preuves solides de sa probité, de sa capacité et de son zèle pour son service. Louvois, qui mourut le 16 juillet 1691, eut pour successeur son fils Barbezieux au secrétariat de la guerre. Barbezieux n'avait que 93 ans. Avec beaucoup d'esprit, de pénétration, d'activité, de la justesse et une facilité incroyable de travail, il avait de grands défauts. Libertin, dissipé, impertinent et traitant quelquefois trop légèrement le militaire... il se livrait à ses bureaux par nécessité, mais leur imposait toujours, parce que le fils de M. de Louvois, leur créateur pour ainsi dire, ne pouvait manquer de leur inspirer du respect. C'était, à tout prendre, de quoi faire un grand ministre, mais extrêmement dangereux. Louis XIV comprit qu'il devait, plus que jamais, tout diriger par lui-même, pour maintenir les traditions. et l'unité. Les coalisés, liés d'intérêts, de forces et de conseils, étaient résolus à fournir un grand nombre de troupes : les Provinces-Unies 35.000 hommes ; l'Empereur, l'Angleterre, l'Espagne chacun 22.000 ; les autres princes en proportion. Le total s'élevait à 220.000 hommes. Mais la plupart des princes étaient pauvres ou obérés, si bien que l'entretien des armées de terre retomba en grande partie sur les Puissances maritimes, qui avaient encore à pourvoir aux opérations navales. Les alliés avaient de bonnes troupes, notamment celles qui avaient servi dans les campagnes sur le Danube. Le margrave de Bade, qui les avait commandées, était, au dire de Villars, un vrai homme de guerre. L'électeur de Bavière avait la passion du commandement et des brillants combats. Le roi Guillaume III pouvait soutenir la comparaison avec nos hommes de guerre. Mais ce que la coalition n'avait pas, c'était l'unité de direction, que, seul, le duc de Lorraine aurait pu lui donner. Il joignait à la qualité d'un grand capitaine celle d'un généreux prince, engagé bien avant dans le parti contre la France par sa naissance et par son propre et puissant intérêt. Il mourut au mois d'avril 1690. C'est la plus grande perte que puissent faire les ennemis du Roi, écrit Louvois, le 4 mai 1690, et ils s'en apercevront avant qu'il soit deux mois, étant impossible qu'un autre que lui puisse concilier les esprits des alliés de l'Empereur, qui se mangent les yeux, devant que la moitié de la campagne soit passée. Entre les chefs, entre les troupes éclatent les rivalités. L'assemblée des Hauts Alliés, qui siège à La Haye, n'arrive pas à faire exécuter par tous le plan convenu. Beaucoup font passer leurs propres intérêts avant ceux de la coalition. L'Empereur s'occupe surtout des Turcs, qui forcent le margrave Louis de Bade à reculer et reprennent Belgrade le 8 octobre 1690. Guillaume III veut porter la guerre sur les côtes de France, particulièrement sur celles du Poitou et de la Guyenne, afin de pousser les nouveaux convertis à la révolte. Le duc de Savoie est à peine entré dans l'alliance qu'il considère déjà le profit à retirer d'une défection. III. — OPÉRATIONS MILITAIRES ET NÉGOCIATIONS STÉRILES. EN février 1691, Guillaume III préside, à La Haye, le congrès des Hauts Alliés. Il y prêche l'unité et la concorde ; il ranime le zèle des puissances confédérées : de l'Empereur, qui, après avoir procuré à l'archiduc Joseph le titre de roi des Romains, devrait reprendre à la France les territoires de l'Empire ; — de l'Espagne, qui ne fait rien pour défendre les Pays-Bas ; — de la Suède, qui, au lieu d'envoyer des troupes, parle de médiation. Il presse les armements par terre et par mer et engage les coalisés à entrer de bonne heure en campagne. Le congrès délibérait encore lorsqu'on apprit que Louis XIV, prévenant comme d'habitude ses ennemis, avait investi Mons, le 15 mars, et que Luxembourg, avec 30.000 hommes, couvrait le siège. Guillaume marcha au secoure ; mais, avant qu'il fût arrivé à portée, la ville capitula, le 8 avril. Luxembourg refusa la bataille au roi d'Angleterre et se tint sur la défensive. Louvois commanda, comme à l'ordinaire, de ravager et de brûler le pays. Boufflers incendia Liège du 2 au 7 juin ; mais Luxembourg, regardant qu'un bombardement eût un mal pour ceux qui le reçoivent, sans fruit à ceux qui le font, fit savoir qu'il n'irait pas de bon cœur à celui de Bruxelles. Sur mer, Tourville avait ordre de protéger les côtes et d'affûter la flotte marchande anglo-hollandaise qui, du Levant, faisait voile vers l'Angleterre. Avec 72 vaisseaux et quelques frégates, Tourville ne pouvait attaquer le convoi ennemi, qui en comprenait plus de 100. Il établit sa croisière à l'entrée de la Manche, trompa, par de fausses routes, les croiseurs anglais et tomba sur un autre convoi, venant de la Jamaïque. Il lui enleva 11 navires et dispersa les autres. L'escadre alliée accourut pour le combattre, mais Tourville l'attira au large, et, habile à lui disputer l'avantage du vent, tint la mer pendant cinquante jours, sans lui fournir l'occasion d'une bataille. Pendant ce temps, les armateurs français et les transports pour l'Irlande traversaient impunément la Manche. Mais la dernière place irlandaise qui résistait encore aux Anglais capitula le 13 octobre. Du côté de l'Allemagne les troupes françaises ne firent aucune entreprise importante, mais elles vécurent sur le sol ennemi pendant une partie de la campagne. Louvois aurait voulu forcer le roi d'Espagne et le duc de Savoie, par des coups sensibles, à sortir de la coalition. Noailles opéra en Catalogne et d'Estrées bombarda Barcelone . Le comté de Nice, attaqué par terre et par mer, fut enlevé au duc de Savoie, au mois de mars, et le Piémont envahi. Mais Catinat, trop faible contre le duo de Savoie et l'électeur de Bavière réunis, ne put conquérir le Piémont. Il se retira vers les Alpes et rentra en Savoie où le duc ne possédait plus aucune place. L'année 1692, Louis XIV résolut de faire un grand effort contre Guillaume en l'attaquant à la fois dans son royaume et du côté des Provinces-Unies. En Angleterre Guillaume était devenu impopulaire, parce qu'il était étranger et qu'il accordait toute sa confiance à des Hollandais. Les Anglais lui reprochaient son abord glacial et sa manière de vivre, son ingratitude à l'égard des whigs et ses avances au parti tory. Lui-même se plaignait de la défiance qu'on lui montrait et des prétentions du Parlement à surveiller l'armée et les finances. Jacques II croyait le moment venu de remonter sur le trône d'Angleterre. Ses partisans, auxquels se joignaient quelques whigs mécontents et quelques ambitieux, l'appelaient. Il pensait que la flotte de la Manche ferait défection au lieu de le combattre. Jacques obtint de Louis XIV le commandement de l'armée qui devait faire une descente dans les îles Britanniques. 21 bataillons, dont 12 d'Irlandais, furent rassemblées à La Hougue, dans la presqu'Ile du Cotentin. En même temps, le roi de France assiégerait Namur, qui, placée au confluent de la Sambre et de la Meuse, fermait le chemin du pays de Liège et des Provinces-Unies. Le 10 mai, le Roi quitta Versailles pour l'armée ; deux jours après la flotte de Tourville sortait de Brest. Louis XIV, impatient de commencer la campagne, avait ordonné de ne pas attendre l'escadre de Toulon, retenue par des vents contraires, et. de livrer bataille, quelle que fût la force de l'ennemi. Il croyait que Tourville avait manqué de hardiesse l'année précédente Il espérait d'ailleurs que les Anglais et les Hollandais n'auraient pas le temps de faire leur jonction ; mais, en se rendant à La Hougue pour embarquer les troupes sur ses vaisseaux et sur les bâtiments de transport, Tourville rencontra la flotte anglo-hollandaise[11]. Au large de Barfleur, le 29 mai, 44 vaisseaux français soutinrent une lutte héroïque, pendant près de douze heures, contre 89 bâtiments ennemis. Les alliés perdirent 2 navires, les Français ne firent aucune perte. Ce résultat, dû à l'habileté professionnelle et à la tactique de Tourville, était extraordinaire, et il ne fallait pas songer à renouveler un pareil effort. Tourville voulut donc profiter de la nuit pour se dérober. La moitié de ses navires échappa à la poursuite en s'engageant dans les passages difficiles des fies Anglo-Normandes. La marée manqua aux autres. 3 bâtiments se réfugièrent dans la rade de Cherbourg, où l'ennemi les incendia. Tourville, avec 12 vaisseaux, gouverna sur la baie de Saint-Vaast-La Hougue, où la flotte anglo-hollandaise vint les cerner. Il n'y avait là que quelques batteries ; cependant on pouvait résister, et peut-être avec succès, à des ennemis qui n'osaient s'aventurer sur une côte inconnue. Le maréchal de Belle-fonds, commandant les troupes, ordonna d'échouer les vaisseaux et d'en retirer le' matériel. Pour contrarier cette opération, les. Anglais armèrent leurs chaloupes, attaquèrent les travailleurs, les repoussèrent sur le rivage et mirent le feu à tous les bâtiments qui se trouvaient dans la baie (2 et 3 juin). Les alliés, les Anglais surtout, triomphèrent de cette victoire sur la première puissance maritime du monde. Ils n'avaient plus à craindre, pour cette année, l'invasion de leur île, mais ils ne pouvaient pas encore se vanter d'avoir détruit la marine française. Au début de l'année 4693, le comte Victor-Marie d'Estrées, fils du vice-amiral ; courait la Méditerranée avec 30 bâtiments de guerre, et Tourville commandait. une flotte de 72 vaisseaux. Seulement, à cette date, la France renonce à armer de grandes escadres et à livrer des batailles rangées. Les énormes dépenses de la guerre continentale obligent Louis XIV à réduire l'action maritime à la protection des côtes françaises et à la destruction du commerce des ennemis. Les défenses du littoral sont renforcées ; les petits bâtiments de la marine royale escortent parfois les navires marchands. On les prête aussi, pour faire la course, aux armateurs de Saint-Malo, de Dunkerque, de La Rochelle, de Dieppe, etc. Les corsaires, déjà nombreux dans les premières années de la guerre, se multiplient. Des ports du royaume sortent des divisions conduites par Jean Bart, Forbin, Duguay-Trouin, Saint-Pol, Pointis, Nesmond et tant d'autres. Les corsaires flamands, normands, bretons et basques vont partout ; partout ils affrontent les plus grands navires, traversent des flottes entières et semblent se jouer des vents et des ennemis. Ils ne laissent aucune sécurité au commerce des puissances maritimes. Pour protéger leurs navires marchands, les ennemis les réunissent en convois, qu'ils font escorter par leurs vaisseaux de guerre. Ils essayent aussi d'opérer des descentes sur les côtes et d'incendier ou de bloquer les ports de France. A part les Flessinguois, ils réussissent peu dans la guerre de course. De toutes façons, leur action est inefficace. Ils ne sont pas encore maures de la mer. Aux Pays-Bas, encore une fois, les coalisés furent surpris par l'attaque des Français. 50000 hommes commandés par le Roi, qu'assistait Vauban, investirent Namur le 24 mai. Luxembourg surveillait l'ennemi avec 80.000 hommes. Guillaume III et Max-Emmanuel de Bavière, — qui venait enfin d'obtenir le gouvernement général des Pays-Bas espagnols, réunirent à la hâte les troupes espagnoles, hollandaises, anglaises, danoises, allemandes, dispersées dans les Pays-Bas, et ainsi rassemblèrent 73.000 hommes. Quand elles furent en état de marcher, la ville de Namur s'était rendue (5 juin). Mais la garnison s'était réfugiée. dans le fort Guillaume et dans le vieux château. Le roi d'Angleterre s'efforça à trois reprises de porter secours aux assiégés, mais chaque fois il fut arrêté par Luxembourg. Le 22 juin, le fort et, quelques jours après, le château se rendirent. Ainsi, comme l'écrivait le marquis de la Pare, cette conquête eut un double agrément pour le Roi, l'un son importance, et l'autre qu'elle avait été faite à la barbe du roi Guillaume. Louis XIV s'était donné beaucoup de peine à ce siège, où il gagna une violente attaque de goutte. Après la capitulation, il regagna Versailles. La perte de Namur irrita les alliés, qui s'en prirent au roi d'Angleterre. Pour imposer silence aux malveillants ou bien parce qu'il savait que son armée était supérieure en nombre à celle de Luxembourg, Guillaume essaya d'avoir sa revanche en attaquant à l'improviste l'armée française, campée entre Steenkerke et Enghien. Une région boisée, coupée de ravins et de haies l'en séparait. Le 3 août, au matin, il fit marcher son infanterie en deux colonnes parallèles contre Steenkerke. Les avant-postes français signalèrent ce mouvement de troupes. Luxembourg ne s'en inquiéta pas : un de ses espions lui avait fait savoir que les ennemis feraient un grand fourrage, qui serait couvert par l'infanterie. Mais quand, vers 9 heures, il vit des bataillons sortir de toutes parts des défilés, qui étaient fort près de la tête de son camp, il fit prendre les armes et forma son armée en bataille. Cependant, les troupes qui couvraient l'aile droite furent culbutées par l'infanterie du duc de Wurtemberg et durent abandonner leurs canons. Les bataillons de la seconde et de la troisième lignes plièrent à leur tour. Alors, Luxembourg fit donner les gardes françaises et suisses Conduits par le prince de Condé, le prince de Conti, le duc de Vendôme, le duc de Villeroy, ils marchèrent l'épée à la main, sans tirer un seul coup de fusil, enfoncèrent l'ennemi et lui reprirent les canons perdus. Au centre, Guillaume III, qui avait perdu du temps à se mettre en bataille, attaqua trop tard. Il dut abandonner quelques canons et battre en retraite dans les défilés dont il était sorti pour combattre. Il ne s'était point vu jusque-là une si grande affaire d'infanterie. Les pertes étaient à peu près égales des deux côtés, mais Guillaume avait été obligé d'abandonner le champ de bataille et il laissait 1.300 prisonniers et 10 pièces de canon aux mains des Français. Sur le Rhin, le maréchal de Lorge, avec 30.000 hommes, défendit la frontière, alla vivre sur la rive droite, s'empara de Pforzheim. Aux Alpes, où Catinat ne commandait qu'une armée de 38.000 hommes, le duc de Savoie prit l'offensive, entra en Dauphiné, s'empara d'Embrun et de Gap, appela aux armes les religionnaires de la province qui venaient de subir une conversion forcée. Mais aucun mouvement ne se produisit. La résistance s'organisa : les paysans, sous la conduite de leurs seigneurs[12], prirent les armes, et Catinat reçut des renforts. Victor-Amédée, malade, fut obligé de quitter l'armée, qui bientôt repassa les Alpes. Ainsi, la France, sans remporter d'avantages décisifs, tenait tête à la coalition. Louis XIV prépara, pour l'année 1693, une campagne qu'il espérait devoir être décisive. Des levées considérables furent faites dans tout le pays. On créa, à l'imitation de l'Autriche, un corps de cavalerie légère, les Hussards, composé en grande partie de mercenaires allemands. On institua, pour récompenser la valeur militaire, l'ordre de Saint-Louis. Une promotion de maréchaux comprit Tourville, Catinat, Boufflers et Noailles. Au printemps, les armées étaient prêtes sur toutes les frontières, et le long des côtes du Ponant, où l'on redoutait des tentatives de descente de la part des Anglais. Aux Pays-Bas, Luxembourg aurait voulu surprendre Bruxelles avant que les coalisés eussent eu le temps de se rassembler, mais le Roi préférait agir sur la Meuse afin de menacer les Hollandais et de les dégoûter de la guerre. Des retards dans la marche permirent à Guillaume III de renforcer la garnison de Liège et de prendre position dans les environs de Louvain. Il fallait donc livrer bataille, avant d'attaquer Liège. Louis XIV, malgré les représentations de Luxembourg, s'y refusa. Il décida qu'on frapperait le grand coup du côté de l'Allemagne où la campagne s'annonçait mieux et il partit pour Versailles. Cette retraite, dit le marquis de la Fare, n'a pas fait honneur au Roi, qui depuis ne s'est point trouvé à la tête de ses armées, où cependant il avait toujours été heureux. Il avait été toujours heureux, en effet, dans les sièges, mais jamais n'avait tenté la fortune d'une bataille rangée. Un corps de 23.000 hommes, sous le commandement du Dauphin et de Boufflers, alla renforcer les troupes du maréchal de Lorge. Luxembourg, avec les 70.000 hommes qui lui restaient, devait retenir les alliés dans le Brabant, les empêcher de marcher vers le littoral pour combiner leur action avec la flotte, et les combattre dès qu'il y aurait apparence de les vaincre. Pendant plusieurs semaines, Guillaume et Luxembourg manœuvrèrent en face l'un de l'autre. Le 29 juillet 1693, Luxembourg attaqua son adversaire entre Liège et Louvain. L'armée des confédérés était adossée au cours d'eau de la Petite Gheete, la droite de Laer à Neerwinden, le centre jusqu'à Neerlanden, la gauche au delà vers le Nord. Lorsqu'il apprit la marche en avant des Français, Max-Emmanuel, qui commandait l'aile droite, proposa soit de les attaquer dès qu'ils paraîtraient, sans les laisser se reposer, soit de se retirer derrière la rivière. Guillaume, qui avait fortifié ses lignes, déjà garanties par des fossés et des haies, et qui avait fait jeter sur la Gheete des ponts pour assurer sa retraite, préféra les attendre de pied ferme. Il ne disposait que de 50000 hommes contre 66000. Le 29 juillet, au matin, Luxembourg attaqua la droite ennemie, surtout le village de Neerwinden, contre lequel il tourna 70 pièces de canon. Une première fois, les Français, après avoir pris Laer et Neerwinden, furent repoussés vigoureusement par l'électeur de Bavière. Au centre, ils durent aussi reculer après avoir occupé un moment Neerlanden. Un deuxième assaut ne réussit pas mieux. Mais, après plusieurs charges, la cavalerie française parvint à séparer l'aile droite et le centre, dont les fortifications furent en même temps enlevées par l'infanterie. Neerwinden resta aux mains des Français et la bataille fut gagnée. La journée avait été fort meurtrière. C'est à cette occasion qu'on disait qu'il fallait chanter plus de De profundis que de Te Deum. Luxembourg avait fait 15.000 prisonniers, enlevé 76 pièces de canon et pris un si grand nombre de drapeaux qu'on l'appela le Tapissier de Notre-Dame. Mais il avait lui-même perdu beaucoup de monde, et il ne put poursuivre l'ennemi. Les deux adversaires se reprirent à manœuvrer. Luxembourg, plus adroit, prit, le 11 octobre, Charleroy, à la barbe du roi Guillaume. En renforçant l'armée du Rhin, Louis XIV avait pensé qu'elle occuperait les cercles de Souabe et de Franconie et que les princes allemands seraient contraints à faire la paix. Mais le maréchal de Lorge eut affaire au margrave Louis de Bade, qui le tint en respect. L'armée française était indisciplinée et maraudeuse. Encore une fois Heidelberg fut pillé et incendié. Sur les Alpes, Victor-Amédée prit l'offensive. Il bloqua Casal, menaça Pignerol. Catinat vint de Savoie, marcha sur Turin, attaqua le duc à La Marsaille, le 4 octobre, lui tua 6.000 hommes, lui en prit 2.000, mais ne put faire davantage. Sur toutes les mers, la marine française fut heureuse. La flotte de la Méditerranée, sous le commandement de d'Estrées, seconda l'armée de Catalogne, qui s'empara de Rosas. Elle rejoignit alors la sorti de Brest avec 72 vaisseaux avant que les alliés eussent pu bloquer ce port, avait ordre de capturer un grand convoi anglo-hollandais, à destination de Smyrne . Environ 200 navires marchands, richement chargés, étaient partis d'Angleterre sous l'escorte de 22 vaisseaux de guerre. Les amiraux Rooke et Vandergoês, qui les convoyaient, aperçurent, le 27' juin, à la hauteur de Lagos, la flotte française qui leur donnait la chasse. Ils essayèrent vainement de se dérober. Gabaret, détaché par Tourville avec les meilleurs voiliers, réussit à capturer 2 bâtiments hollandais et à cerner, pendant la nuit, les navires de l'arrière-garde, qui furent pris, brûlés ou coulés le lendemain. Puis, avec 16 vaisseaux, il s'attaqua à Rooke et à Vandergoës, et les poursuivit, au lieu de capturer les autres navires de commerce, qui réussirent à se disperser. Mais Tourville acheva la victoire par la destruction de plusieurs bâtiments réfugiés sur les côtes d'Espagne. La perte des alliés était estimée, de leur propre aveu, à 83 navires, valant au total trente à quarante millions de livres. Les Anglais, exaspérés par ce revers et par les nombreuses prises qu'avaient faites les corsaires malouins, résolurent de se venger sur Saint-Malo. Le 26 novembre, 12 vaisseaux, 12 frégates, 4 galiotes à bombes et un brûlot parurent à portée de canon de la ville. Le bombardement commença aussitôt, mais sans succès. Dans la nuit du 28, le brûlot, mal dirigé, vint s'échouer sur une roche et sa charge de bombes et de mitraille ne causa, en éclatant, que des dégâts insignifiants dans la ville. Si Louis XIV n'avait obtenu, nulle part, de ces succès qui forcent les ennemis à signer la paix, la campagne de 1693 s'était terminée partout à son avantage. Mais la France était épuisée. La misère s'étendait dans les provinces ; la disette sévissait à la suite de mauvaises récoltes. L'argent manquait surtout. S'il fallait redoubler d'efforts, ce serait la ruine complète. Le Roi le savait et désirait sincèrement la paix. Les coalisés n'étaient pas dans une situation meilleure. L'Espagne ne comptait plus que par le souvenir de sa puissance passée. L'Empereur craignait que les Turcs ne fissent la paix avec les Polonais pour employer toutes leurs forces contre les Impériaux. En septembre 1693, ces derniers durent lever le siège de Belgrade. Dans l'Empire, plusieurs princes avaient une attitude équivoque : Léopold avait-acheté la fidélité de la maison de Hanovre en créant en sa faveur un neuvième électorat (1692), mais il s'était aliéné ainsi d'autres princes et il avait dû suspendre l'effet de l'investiture. Le prince-évêque de Munster, les électeurs de Saxe et de Brandebourg réclamaient continuellement des subsides. Tout le fardeau de la guerre retombait sur les Puissances maritimes, qui se lassaient d'être les banquiers de la coalition. Les marchands d'Amsterdam et de Londres voulaient que toutes les ressources fussent employées aux hostilités sur mer. La province de Frise, gagnée par des agents français, refusait de concourir aux frais de guerre. Guillaume III, voyant que l'Angleterre et la Hollande étaient à bout de sacrifices, se résignait à la paix. Au mois de novembre 1692, il écrivait à Heinsius : Si nous pouvions arriver à une paix, ne fût-elle que passable, ce serait fort à désirer, et, à la fin de la même année : Je doute que nous puissions obtenir une paix plus avantageuse que celle de Nimègne. En novembre 1693, il sentait la nécessité d'en venir à une conclusion, les conditions dussent-elles en être désavantageuses. Comme il avait fait au temps de la guerre de Hollande, Louis XIV entra en négociation, sitôt que l'occasion lui en fut offerte. Le roi Charles XI de Suède, bien qu'engagé par des traités avec l'Empire et les Provinces-Unies, était demeuré neutre. Il cherchait à se faire décerner une médiation. Le roi Christian V de Danemark, lié avec la France, le secondait. Louis XIV, au mois de juillet 1693, adressa au comte d'Aveux, son représentant à Stockholm, un mémoire où étaient énumérées ses conditions. Les traités de Westphalie et de Nimègue seraient confirmés et la trêve de Ratisbonne convertie en traité définitif. Toutefois, en compensation de Strasbourg, il offrait de rendre les forteresses de Montroyal et Trarbach, qu'il avait construites sur la Moselle, près de Trèves, en 1687 et 1688 ; de démolir les ouvrages de Fort-Louis et de Huningue, sur la rive droite du Rhin, et de restituer Philippsbourg et Fribourg. Il renoncerait, de la part de la duchesse d'Orléans, à ses revendications territoriales et donnerait au duc de Lorraine un équivalent de son duché, bien que le dernier duc ait refusé ce qui a été stipulé en sa faveur par le traité de Nimègue. Louis XIV ajoutait : Je consens aussi qu'en cas qu'il y ait quelqu'une des réunions ci-devant faites qui ne soit pas conforme aux traités, il soit nommé des commissaires de part et d'autre pour examiner de nouveau les raisons de ceux qui en porteront les plaintes. Ces propositions ne parurent pas sincères. Elles n'intéressaient que l'Empereur et pouvaient être considérées par les alliés comme un moyen de les séparer pour les accabler l'un après l'autre. D'ailleurs, Léopold s'étonna qu'il n'y fût pas question de la succession d'Espagne ni du renouvellement de la renonciation consentie par Marie-Thérèse au moment de son mariage. Il réclamait la place de Casai, sous prétexte que le duc de Mantoue avait perdu, par félonie, les droits qu'il possédait sur ce fief impérial. Louis XIV compléta ses propositions pacifiques : il rendrait à l'Espagne les conquêtes faites en Catalogne et les villes de Mons, Namur et Charleroy. Ces places renforceraient la barrière que les Provinces-Unies tenaient à maintenir entre elles et la France. Il ne s'opposerait pas à ce que, au cas où Charles H mourrait sans enfant, les Pays-Bas espagnols fussent donnés à l'électeur de Bavière. Au profit de ce prince, Louis XIV renoncerait à faire valoir ses droits sur ces provinces pourvu que l'Empereur en fit autant. Outre ces conditions, destinées à satisfaire les Hollandais, Louis XIV leur promettait encore de rétablir le commerce sur le pied du traité de Nimègue. En même temps, des négociations secrètes s'engageaient à Bruxelles. La France y avait envoyé un agent officieux, l'abbé Morel, pour discuter avec un des familiers de Guillaume III, le député Éverard von Weede, seigneur de Dyckweldt. Porte-paroles du pensionnaire de Hollande et du roi d'Angleterre, Dyckweldt demanda à Louis XIV de restituer, outre les villes perdues par l'Espagne aux Pays-Bas durant cette guerre, celles de Tournai, Condé, Ypres, Maubeuge et Menin, cédées à la France par des traités antérieurs. Elles serviraient, disait-il, de compensation pour Luxembourg et consolideraient la défense des Pays-Bas. Mais Louis XIV refusa ; la protection des Provinces-Unies, disait-il, ne pouvait être mieux assurée que par la constitution des Pays-Bas en État indépendant sous un prince bavarois. Guillaume travaillait sous main la Suède pour obtenir de la France des conditions plus avantageuses. Louis XIV laissait à Charles XI le soin de faire, comme de lui-même, toutes les ouvertures capables de conduire à la paix. Mais on ne pouvait aboutir si vite ; les hostilités recommencèrent pendant l'été de 1694. Ce fut une guerre languissante, les adversaires étant épuisés et craignant de se compromettre par une action sérieuse. Aux Pays-Bas, Guillaume voulut envahir la Flandre française et combiner ses opérations avec celles de la flotte anglaise qui croisait en vue de Dunkerque et de Calais. Luxembourg lui barra le chemin par de belles manœuvres. Sur mer, les corsaires de France continuèrent leurs exploits. Au mois de juin, Jean Bart délivra des vaisseaux marchands français, venant de la Baltique, chargés de blé, et que les Hollandais avaient capturés ; il prit à ceux-ci 3 vaisseaux de guerre. Cette action parut si belle qu'une médaille la commémora, et que Jean Bart fut anobli. Les côtes furent bien défendues. Au mois de juin, une flotte anglo-hollandaise de 36 vaisseaux de guerre, 12 galiotes à bombes et 80 petits navires de transport, mouilla près de Bertheaume et de Camaret[13]. L'intention du général Tollemache, qui commandait les troupes, était de s'emparer de Brest, que l'escadre de Tourville avait quitté au mois d'avril. Il ignorait que Louis XIV, averti de ce dessein, avait envoyé Vauban pour diriger la défense. Le 18 juin, un feu épouvantable d'artillerie et de mousqueterie mit le désordre dans les rangs des ennemis, qui avaient réussi à débarquer. Quelques centaines d'hommes des compagnies franches et les miliciens gardes-côtes, en partie armés de bâtons et de faux, se ruèrent sur les Anglais. L'escadre se retira, laissant sur la grève 800 morts et 500 prisonniers. Elle avait perdu trois navires. En juillet, ce furent les ports de Dieppe et du Havre, en septembre, ceux de Dunkerque et de Calais qui reçurent la visite de la flotte anglo-hollandaise. Seule, la ville de Dieppe, qui n'avait que quelques mauvais canons pour répondre aux ennemis, souffrit du bombardement. La plupart des maisons étaient en bois : beaucoup furent réduites en cendres. En Méditerranée, Tourville et Château-Renault bloquèrent la côte de Catalogne et secondèrent le duc de Noailles, qui fit de grands progrès dans ce pays. Mais, au moment où le duc menaçait Barcelone, une escadre ennemie obligea Tourville à se retirer à Toulon. Barcelone fut sauvée. Depuis le début des hostilités on se battait aux colonies. Dans l'Amérique du Nord, les différends de frontières entre Canadiens et Anglo-Américains amenaient des conflits fréquents. En juin 1689, le gouverneur du Canada, Frontenac, fit une vaine démonstration contre New-York. Les colons anglais y répondirent l'année suivante par une expédition contre Québec, qui leur résista. Mais l'Acadie fut prise et resta une année en leur pouvoir en 1691. En 1694, d'Iberville prit Port-Nelson, la principale factorerie anglaise de la baie d'Hudson. Aux Antilles, l'île de Saint-Christophe, que se partageaient Français et Anglais, fut occupée en entier par les Anglais, en 1690, et, dans l'Inde, les Hollandais s'emparèrent, en 1693, de notre colonie naissante de Pondichéry. L'année 1694 s'était écoulée sans que les armes françaises remportassent un avantage signalé. On disait en Angleterre : En continuant la guerre avec vigueur pendant une couple d'années on parviendra, sans aucun doute, à forcer la France à accepter des conditions qui permettront d'être tranquille à l'avenir, et qui nous empêcheront de retomber si facilement dans une guerre. Poursuivies sans grand désir d'aboutir, les négociations pour la paix furent stériles. La plus sérieuse eut lieu pendant l'été de 1694, à Maëstricht, entre Dyckweldt pour les Puissances maritimes, le conseiller d'État Harlay de Bonneuil et le diplomate François de Callières pour la France. Les pourparlers, à la fin de novembre, furent communiqués aux ministres des alliés réunis à La Haye. Louis XIV acceptait de prendre les traités de Westphalie et de Nimègue comme base de la paix, de reconnaître Guillaume III, de restituer les conquêtes de la guerre présente et des réunions, sauf Luxembourg et Strasbourg, pour lesquelles il donnerait des équivalents. Mais il n'accepta pas que ces équivalents fussent, comme les alliés le demandaient, les villes de Tournai, Condé, Ypres, Maubeuge et Menin. La négociation fut rompue, et Guillaume écrivait à Heinsius en décembre 1694 : Cela m'afflige profondément, car je dois vous avouer que la paix serait souhaitable à bien des égards. Mais il n'y a plus rien à faire, si l'ennemi ne la veut pas, que de continuer la guerre avec la plus grande vigueur. Par ce moyen on pourra arriver à une paix passable. |
[1] SOURCES. Outre les sources citées plus haut, les Mémoires de Catinat (éd. Le Bouyer de Saint-Gervais, 3 vol.), de Villars (éd. du marquis de Vogué, le Ier vol.), de Noailles (Collection Petitot, 2e série, t. LXXII), de Berwick (Coll. Petitot, 2e série, t. LXV), de Tessé, de Feuquière, de Saint-Hilaire, de la Colonie, de Mérode-Westerloo. Les Mémoires de Tourville (Amsterdam, 1742, 8 vol.), de Forbin et de Duguay-Trouin (coll. Petitot, 2e série, t. LXIV et LXXV). Le Journal du corsaire Jean Doublet de Honfleur (Éd. Bréard, 1884).
OUVRAGES.
Marquis de Quincy, Histoire militaire du règne de Louis le Grand, t. II
et III, 1728. De Beaurain, Histoire militaire de Flandre depuis l'année 1610
jusqu'en 1694, Paris, 2 vol. in fol., 1755, précieux surtout pour les
cartes et plans. P. de Ségur, Le Tapissier de Notre-Dame. Les dernières
années du maréchal de Luxembourg, Paris, 1904. K. von Landmann, Wilhelm III von England und
Max. Emanuel von Bayern im niederlandischen Kriege (1613- 1607),
[2] Côte de la Manche, où se trouve aujourd'hui le port de Brizham (comté de Devon).
[3] Haake, Brandenburgische Politik
and Kriegführung in den Jarhren 1688 und 1689,
[4] Sur la Manche, à l'est de Newhaven.
[5] Dans son discours au Parlement, le 12 octobre, Guillaume III s'exprima ainsi à ses sujet : Je ne puis m'abstenir de vous faire connaître l'atteinte portée à l'honneur national par la mauvaise conduite de ma flotte dans le dernier engagement avec les Français et je me crois tenu d'agir avec la plus grande sévérité quand les coupables me seront signalés.
[6] Sur la Manche, près d'Exeter, Devonshire.
[7] La diversion opérée par les Turcs sur le Danube n'était pas un secours direct prêté à la France.
[8]
Gérin, Le pape Alexandre VIII et Louis XIV, Revue des Questions
historiques, 1877. Von
Bischoffshausen, Papat Alexander VIII end der Wiener Hof (1689-1691),
Vienne, 1900.
[9] Voir plus bas.
[10] Sur les forces respectives de la France et de la coalition, on trouvera beaucoup de renseignements dans l'excellente édition donnée par M. B. Bourgeois de la Relation de la cour de France par Spanheim.
[11] G. Toudouze, La bataille de la Hougue, 29 mai 1662, Paris, 1899.
[12] Une jeune héroïne, Mlle de la Tour du Pin, dirigea cette guerre de partisans. Le roi lui donna une pension comme à un chef militaire.
[13] G. Toudouze, La bataille de Camaret (18 juin 1694), avec plan, Revue d'histoire moderne et contemporaine, 1899-1900.