ESSAI SUR LE RÈGNE DE L’EMPEREUR AURÉLIEN (270-275)

 

DEUXIÈME PARTIE. — LA DÉFENSE DU DANUBE. LA RECONSTITUTION DE L’UNITÉ IMPÉRIALE (270-274).

CHAPITRE IV. — SECONDE CAMPAGNE D’ORIENT. (FIN 272-DÉBUT 278).

Texte numérisé par Marc Szwajcer

 

 

Les affaires d’Orient et de Palmyre provisoirement réglées, Aurélien, suivi de son armée et de ses prisonniers[1], reprit la route d’Antioche (début de l’été 272). Il s’arrêta quelque temps à Hémèse ; c’est là[2], et non à Palmyre, qu’il fit mettre en jugement Zénobie et les principaux chefs du parti de l’indépendance. Zénobie, abattue par ses malheurs, se défendit sans dignité ; elle se plaignit de ses conseillers grecs et palmyréniens[3], qui avaient abusé, disait-elle, de sa faiblesse de femme, pour gouverner à leur gré, rejeta sur eux la responsabilité des événements, et même, ne s’en tenant pas à cette accusation générale, elle dénonça les plus coupables. Longin était du nombre[4]. L’armée, exaspérée par les souffrances du siège, réclamait la mort de Zénobie[5]. Aurélien n’y consentit pas. C’était, à ses yeux, un acte de cruauté inutile, et il préférait réserver Zénobie pour son triomphe[6] ; mais il livra au supplice tous ceux que Zénobie avait dénoncés[7]. Longin mourut sans se plaindre et en consolant ses amis[8].

Aurélien n’avait pas ordonné ces supplices par cruauté ou par besoin de vengeance ; sa modération, après la prise de Tyane, d’Antioche et de Palmyre, en était la preuve ; mais il avait voulu faire quelques exemples et frapper ceux qui avaient joué le principal rôle dans la formation de l’empire palmyrénien. Emmenant avec lui Zénobie, Waballath et les Palmyréniens auxquels il avait fait grâce, car il ne voulait pas les laisser en Orient, il regagna ensuite Antioche, l’Asie Mineure et Byzance[9].

Un accident se produisit au passage de la Propontido. Les Palmyréniens périrent victimes d’une tempête ; Zénobie et Waballath échappèrent seuls au naufrage[10].

Arrivé en Mésie Inférieure, Aurélien battit les Carpes[11], sur le Danube, entre Carsium et Sucidava, et remit la frontière en état de défense. Une grande partie des vaincus fut transplantée par l’empereur dans les provinces dépeuplées de Mésie Inférieure et de Thrace, particulièrement, semble-t-il, dans la région du Rhodope. Aurélien reçut le surnom de Carpicus[12].

Sur ces entrefaites, de graves nouvelles lui parvinrent d’Orient. Palmyre venait do se révolter et l’Égypte soulevée s’associait au mouvement. La défection totale de l’Orient était à craindre. La campagne de 271-272 allait être à recommencer tout entière.

Le caractère du mouvement ne fut pas exactement le môme à Palmyre et en Égypte. Palmyre se souleva surtout par regret de la grandeur perdue et par rancune de vaincus. Il y eut en Égypte une de ces révoltes soudaines, analogue à celles d’Æmilianus, sous Gallien, et d’Achilleus, sous Dioclétien. La simultanéité du soulèvement s’explique toutefois par une cause plus générale. Pendant deux ans (200-271), l’Égypte avait fait partie de l’empire palmyrénien. Les relations politiques et commerciales avaient cessé avec Rome, taudis qu’elles devenaient plus étroites avec la Syrie, l’Asie Mineure et Palmyre. Rome avait surtout exploité l’Égypte en grand domaine et en pays de production. La politique commerciale d’une ville de transit, comme Palmyre, devait fort bien convenir à toute la partie de la population égyptienne qui vivait du trafic et surtout à la classe des gros commerçants d’Alexandrie. L’unité commerciale de l’empire palmyrénien n’avait pas tardé à se constituer.

Tout changea lors de la rupture entre Rome et Palmyre. L’Égypte fut reconquise ; les relations commerciales avec l’Asie et l’Orient furent suspendues pendant une année entière, et la chute de Palmyre consacra la rupture de l’unité établie depuis deux années. Une semblable rupture ne se produit pas sans léser bien des intérêts, et on comprend que le mécontentement ait été grand, surtout à Alexandrie, parmi les négociants qui vivaient des relations commerciales avec les autres provinces de l’empire palmyrénien. C’est Alexandrie qui prit l’initiative de la révolte contre Aurélien.

A Palmyre, le mouvement fut dirigé par un certain Apsæus[13], un des chefs du parti de l’indépendance dans la première campagne[14]. Aurélien avait emmené avec lui les principaux chefs du parti national[15], mais il en était resté quelques-uns, et le départ précipité de l’empereur pour l’Occident leur avait donné toute liberté. Apsæus organisa un complot, dans lequel entrèrent un grand nombre de Palmyréniens. Lui-même, quoiqu’il fût l’âme de la conspiration, semble bien s’être gardé do se compromettre trop ouvertement.

Aurélien avait pris ses précautions. Marcellinus, préfet de Mésopotamie et chargé du gouvernement général de l’Orient, placé entre Palmyre et la Perse, les surveillait l’une et l’autre et pouvait s’opposer à la jonction de leurs forces. Apsæus sonda Marcellinus, chercha aie détacher de la cause romaine et l’engagea même h prendre le titre d’empereur[16]. Cette conduite était très habile. Le mouvement, à Palmyre, comme on n’allait pas tarder aie voir, était certainement un mouvement national ; mais Zénobie et le roi légitime Waballath, étaient restés aux mains d’Aurélien. Marcellinus pouvait étouffer le soulèvement avant que Palmyre n’eut pu se mettre en état de défense. Apsæus et ses complices avaient donc tout intérêt à dissimuler le véritable caractère de la révolte et surtout, s’ils le pouvaient, à gagner Marcellinus à leurs vues.

L’empire palmyrénien avait été fondé par Odænath et s’était maintenu pendant les quatre premières années du règne do Waballath, de l’aveu même et avec le consentement tacite ou formel des empereurs romains, dont les rois de Palmyre avaient toujours reconnu la souveraineté ; la rupture avec Rome avait été le signal de sa chute. Demander à Marcellinus, fonctionnaire romain chargé d’un commandement légal, d’usurper l’empire, c’était reprendre cette fiction que Palmyre ne répudiait pas la cause romaine et que les provinces asiatiques se contentaient d’opposer empereur à empereur, comme le fait s’était produit sous Marc Aurèle, pour Avidius Cassius et, sous Septimo Sévère, pour P. Niger.

L’attitude de Marcellinus fit échouer ce plan ; il se garda bien de refuser catégoriquement, ce qui eût provoqué une explosion immédiate, demanda du temps pour réfléchir et prévint secrètement Aurélien[17]. Les Palmyréniens renouvelèrent plusieurs fois leurs tentatives auprès de Marcellinus[18] ; il leur fit chaque fois la même réponse. Cessant alors de compter sur lui et décidé à agir avant le retour d’Aurélien, Apsæus fit proclamer roi de Palmyre un certain Antiochus, qui se rattachait à la dynastie légitime[19]. Le gouverneur militaire laissé par Aurélien à Palmyre, Sandarion, fut mis à mort avec 600 archers[20]. Le caractère du mouvement n’était plus douteux : c’était un mouvement national, une tentative de reconstitution de l’empire palmyrénien.

En Égypte, la marche des événements avait été simultanée. L’instigateur de la révolte ne fut pas un Égyptien, mais un Grec de Séleucie[21], Firmus, riche commerçant établi à Alexandrie, qui était en relations d’affaires avec Palmyre[22]. Il y avait eu de tout temps à Alexandrie un fort parti palmyrénien, et c’est ce parti, qui, en 209, avait facilité la conquête de l’Égypte à Zénobie ; Firmus en était un des chefs. Il attendit pour se prononcer qu’Aurélien fût rentré en Europe et que Palmyre se fut déclarée. Dans ses divers soulèvements, l’Égypte s’était tantôt donné un chef particulier, comme l’avait été Æmilianus au temps de Gallien et comme devait l’être Achilleus sous Dioclétien, tantôt ralliée aux usurpateurs proclamés par les légions d’Orient (Avidius Cassius, P. Niger). En 272, la révolte se fit vraisemblablement au nom de l’empire palmyrénien. Firmus ne prit pas le titre d’empereur ; il gouverna l’Égypte avec des pouvoirs analogues à ceux d’un préfet romain. Le fait se rattache évidemment aux tentatives engagées auprès de Marcellinus pour le décidera prendre l’empire. S’il avait accepté, il eût été reconnu en Égypte, comme dans le reste de l’Orient. En attendant, Firmus se contentait d’exercer le pouvoir exécutif. On ne sait ce qui se passa lorsque le parti de l’indépendance palmyrénienne proclama Antiochus. Il est extrêmement vraisemblable qu’Antiochus fut reconnu en Égypte et que Firmus[23] continua à gouverner le pays en son nom. Les conséquences de la défection de l’Égypte ne tardèrent pas à se faire sentir. Les approvisionnements furent arrêtés par Firmus[24]. Rome fut menacée de la famine, ce qui pouvait créer à Aurélien, en son absence, les plus graves difficultés.

La rapidité et l’esprit de décision d’Aurélien déconcertèrent les chefs de la révolte à Palmyre et à Alexandrie. Le courrier de Marcellinus n’avait guère du mettre plus de dix jours pour le joindre. Pour gagner Palmyre par une marche forcée, il fallait environ deux mois. Les révoltés de Palmyre eurent moins de trois mois pour se préparer à la résistance. Les Perses n’eurent pas le temps d’entrer en campagne. Marcellinus, établi sur l’Euphrate, empêchait le mouvement de se généraliser.

Aurélien ne perdit pas de temps. Son armée était prête[25]. Il gagna Antioche[26] par une marche foudroyante, y arriva un jour de jeux[27], effraya tout le monde par sa présence et courut à Palmyre. La ville, démantelée quelques mois auparavant n’avait pas eu le temps de reconstituer ses défenses ; elle fut enlevée sans combat[28]. Antiochus, fait prisonnier, fut épargné comme inoffensif[29]. La ville fut mise à sac[30].

De Palmyre, Aurélien courut à Alexandrie. La révolte, semble-t-il, n’avait pas gagné toute l’Égypte[31] et la prompte chute de Palmyre avait dû retenir dans l’obéissance beaucoup d’indécis. Firmus et ses partisans, comme Æmilianus sous Gallien, s’étaient enfermés dans le Bruchium[32]. Ses alliés les Blemyes, contenus probablement par les troupes romaines du Haut Nil, ne purent le secourir. Firmus se pondit pour ne pas tomber entre les mains d’Aurélien[33]. Alexandrie fut rudement traitée ; pour prévenir toute nouvelle révolte, Aurélien en fit abattre les murailles et détacha de la ville la plus grande partie du Bruchium[34].

 

 

 



[1] ZOSIME, I, 59.

[2] ZOSIME, I, 56.

[3] ZOSIME, I, 56.

[4] ZOSIME, I, 56. — Vita Aureliani, 30, 3.

[5] Vita Aureliani, 30, 1.

[6] Vita Aureliani, 30, 2.

[7] ZOSIME, I, 56 ; — Vita Aureliani, 30, 2.

[8] ZOSIME, loc. cit. ; — Vita Aureliani, loc. cit. ; — SUIDAS, au mot Λογγένος (Ed. Th. Gaisford, p. 2331).

[9] ZOSIME, I, 59 ; — Vita Aureliani, 30,4.

[10] ZOSIME, loc. cit. — Sur le sort ultérieur de Zénobie, voir plus loin.

[11] Aurélien, de Byzance, dut gagner le Danube par la grande route Byzance-Anchialos-Callatis-Tomi (Itin. Anton., éd. G. Parthey, pp. 106-107), puis par la route Tomi-Axiopolis, qui débouchait sur le Danube aux environs de Cernavoda, entre les deux points de Carsium (Hârsova) et de Sucidava (Osenik ou Satonou ?), précisément à l’endroit où eut lieu la bataille. (H. KIEPERT, ad C. I. L., III, Supplément, tab. IV.) — La distance d’Axiopolis à Sucidava, située à l’Ouest, était de 12 milles (18 kilomètres) ; celle d’Axiopolis à Carsium, situé au Nord, de 36 milles (53 kilomètres) (Itin. Anton., p. 105).

[12] La Vita Aureliani (30, 4) est le seul texte qui mentionne la guerre contre les Carpes. A cette campagne se rapporte certainement l’inscription de Durostorum (C. I. L., III, Supplém., 12.156) : le nom du peuple envahisseur a disparu, mais il est certain qu’il s’agit des Carpes. D’après cette inscription, il y eut une bataille sur le Bas Danube, entre Carsium et Sucidava.— Un certain nombre des Carpes vaincus furent établis comme colons dans les provinces dépeuplées de la rive droite du Danube (AUREL. VICT., Cæsar., 39, 43-14, parlant de la transplantation totale des Carpes sur le territoire romain, au temps de Dioclétien, surtout en Thrace, dans la région du Rhodope (Vita Aureliani, 31, 3).

Le biographe (30, 1-5) prétend qu’Aurélien à qui le Sénat avait décerné le titre de Carpicus, se montra peu satisfait. L’anecdote n’a aucune valeur. Le surnom de Carpicus n’était en rien ridicule ; il avait été porté, avant Aurélien, par les deux Philippes, et devait l’être, après lui, par Dioclétien. Maximien, Constance Chlore, Valerius et Constantin.

En fait est certain. Aurélien prit officiellement le surnom de Carpicus le texte du biographe ne dit d’ailleurs pas qu’il l’ait refusé — L’inscription la plus ancienne qui en fasse mention est de la IIIe puissance tribunicienne d’Aurélien (10 décembre 271 / 9 décembre 272 : C. I. L., III, Supplém., 7386). — Le titre de Carpicus est donné en outre par les inscriptions suivantes : II, 4506 ; XII, 5548, 3561 ; VI, 1112 ; ORELLI-HENZEN, 5331. Peut-être faut-il le rétablir dans C. I. L., III, Supplém., 12.333 ; XII, 2673 (= 5571) et 5549). — Dans la série des surnoms d’Aurélien, il se place après celui de Parthicus, C. I. L., VI, 1112 ; ORELLI-HENZEN, 3531 ; cf. C. I. L., XII, 3561, où il suit le surnom d’Arabicus.

[13] ZOSIME, I, 60. — Une inscription de Palmyre (WADDINGTON, loc. cit., 2382 = C. I. G., 4487) mentionne ce personnage. Apsæus était un des principaux citoyens de la ville.

[14] ZOSIME, I, 60.

[15] ZOSIME, I, 59.

[16] ZOSIME, I, 60.

[17] ZOSIME, I, 60.

[18] ZOSIME, I, 60.

[19] ZOSIME, I, 60 ; — POLEM. SILVIUS, loc. cit. (Chronic. Minor., I, éd. Th. Mommsen, p. 522) — K. KALINKA, Insckriften aus Syrien, loc. cit., n° 11 et 12 ; — C. I. L., III, 6019 (= WADDINGTON. loc. cit., 2629). — Le biographe donne par erreur le nom d’Achilleus (Vita Aureliani, 1, 2). — Une inscription (K. KALINKA, loc. cit., n° 11) donne à Zénobie le nom de mère d’Antiochus ; il est probable que les révoltés, pour donner à leur candidat l’autorité d’un roi légitime, supposèrent une adoption d’Antiochus par Zénobie.

[20] Vita Aureliani, loc. cit.

[21] Vita Firmi, 3, 1.

[22] Vita Firmi, 3, 2.

[23] Vita Firmi, 5, 4.

[24] Firmus n’est nommé que par la Vita Aureliani (32, 2) et par la Vita Firmi. La Vita Aureliani dit expressément que Firmus ne prit pas le titre d’empereur. La Vita Firmi (2, 1-3) discute longuement la question et donne une conclusion opposée. Il n’y a pas à hésiter entre les deux textes : la Vita Firmi, comme valeur historique, est très inférieure à la Vita Aureliani, et le texte de la Vita Aureliani, relatif à l’usurpation de Firmus est très précis.

De ces textes, il faut rapprocher une inscription, trouvée en 1878, à l’emplacement du camp romain d’Alexandrie [NEROUTSOS-BEY, Inscriptions grecques et latines recueillies dans la ville d’Alexandrie et aux environs (Rev. Archéol., 1887, pp. 206-208, n° 48) ; — cf. P. MEYER, Nochmals Praefecti Aegypti Hermès, XXXIII, 1898, pp. 268-270)]. L’inscription, dédicace à un empereur dont le nom a été martelé, est ainsi conçue : ///////// σεβαστόυ | έπειφί Κ | έπί Κλαυδίου Φίρμου | λαμπροτάτου έπανορθωτόυ |. Elle est datée du 20e jour du mois d’Επειφί (= 18 juillet) : il n’y a aucune indication d’année. L’écriture est de la seconde moitié du IIIe siècle. Quel est ce Firmus qui remplit ici des fonctions équivalentes à celles d’un préfet d’Égypte ? La Vita Firmi (3,1) dit qu’il y a eu trois Firmus contemporains. NEROUTSOS (loc. cit.) pense que le Firmus de l’inscription est le préfet d’Égypte mentionné par la Vita Firmi. Il serait devenu préfet d’Égypte, en 271, lors de la reconquête du pays par Probus, et le titre de λαμπρότατος έπανορθωτής ferait allusion au rétablissement de la domination romaine. — Il serait bien invraisemblable qu’il y ait eu, en Égypte, deux Firmus contemporains, l’un préfet romain, l’autre usurpateur ; et d’autre part, il serait singulier que le titre officiel des préfets d’Égypte έπαρχος ; ne fut pas mentionné sur l’inscription. Je crois plutôt, avec P. MEYER (loc. cit.), que le préfet d’Égypte et l’usurpateur sont un même personnage ; l’usurpateur Firmus ne s’est pas proclamé empereur, mais a gouverné l’Égypte avec des pouvoirs analogues à ceux du préfet romain. Cette interprétation s’accorde bien avec le texte de la Vita Aureliani (32, 2). La Vita Firmi fait erreur en donnant à l’usurpateur Firmus le titre impérial et en mentionnant deux Firmus, l’un empereur, l’autre préfet d’Égypte, alors que, selon toutes les vraisemblances, il n’y en a eu qu’un.

Il reste alors une question à résoudre. Quel est l’empereur dont Firmus s’est constitué le représentant en Égypte et dont le nom a été martelé plus tard, en 213, lorsque la province a été reconquise par Aurélien ? P. MEYER (loc. cit.) pense qu’il s’agit d’un empereur indigène, probablement un prince Blemye ; ce serait l’Autocrator Psilaan Augustus, nommé, au IIIe siècle, par une inscription hiéroglyphique du temple d’Esney (cf. E. REVILLOUT, Revue Égyptologique, V, 1886. pp. 121 sqq.) : Firmus aurait été ainsi, pour le parti national, le restaurateur de la liberté. — Mais la lecture Psilaan n’est pas certaine ; LEPSIUS [der letzte Kaiser in den Hierogliphischen Inschriften (Ægypt. Zeitschrift, 1870, p. 23 sqq.)], BRUGSCH (Id., 1888, 63 lisent le nom de l’empereur romain Philippe, interprétation qui est beaucoup plus admissible [cf. J. KRALL, Beiträge zur Geschichte der Blemyer und Nubier (Denkschrift. der Kais. Akad. der Wissensch. Wien., XLVI, 1900. p. 9]. Les Blemyes étaient encore au IIIe siècle des peuplades sauvages ; Alexandrie, très civilisée et très hellénisée, n’aurait certainement pas proclamé un empereur blemye pour l’opposer à Aurélien.

On ne sait donc rien de certain sur l’empereur dont le nom a été martelé : le plus probable — c’est une pure supposition — est qu’il s’agit d Antiochus de Palmyre. Antiochus aurait été reconnu en Égypte et Firmus aurait gouverné le pays en son nom.

[25] ZOSIME, I, 61. — Vita Aureliani, 31, 3.

[26] ZOSIME, I, 61.

[27] ZOSIME, I, 61.

[28] ZOSIME, I, 61.

[29] ZOSIME, I, 61.

[30] ZOSIME, I, 61. — La lettre d’Aurélien à Cerronius Bassus, rapportée par la Vita Aureliani (31, 5-10), est certainement fausse. Aurélien ordonne de remettre en état le Temple du Soleil pillé par les troupes romaines (Id., 7-9), et annonce qu’il demandera au Sénat d’envoyer un pontife pour procéder à la dédicace. La création des Pontifices Solis (voir plus loin, IIIe Partie, Chap. V) n’eut lieu qu’une année plus tard, en 274. — Aurélien n’a pas entièrement détruit Palmyre : les monuments restèrent debout et la ville conserva une faible partie de sa population. Mais elle ne devait jamais se relever de sa chute. Au IVe siècle et à l’époque byzantine, elle n’eut d’importance qu’au point de vue militaire, pour la défense du Limes Oriental. (Pour l’histoire ultérieure de la ville, voir DE VOGUË, Syrie centrale. Inscriptions Sémitiques, p. 12 et C. RITTER, Erdkunde, XVII, Berlin, 1854, pp. 1501-1507.)

[31] ZOSIME, I, 61. Sur la facilité de la reconquête, cf. Vita Aureliani, 32, 3. — Selon la Vita Aureliani (32, 1 ; cf. Vita Firmi, 5, 2), Aurélien, après la seconde prise de Palmyre, serait rentré en Thrace, où il aurait remporté quelques victoires, puis serait revenu sur ses pas et aurait marché sur Alexandrie. Il y a là une confusion avec la marche d’Aurélien, au retour de la première campagne d’Orient.

[32] Sur les sièges antérieurs du Bruchium, dont il est question dans EUSÈBE (Hist. Ecclés., VII, 21-22, 32) et la Chronique de saint Jérôme (ad. ann. Abrah. 2286, éd. A. Schöne, p. 183), voir mon travail De Claudio Gothico, Romanorum Imperatore, Chap. VII. — Aucun de ces deux textes ne concerne la révolte de Firmus.

[33] Vita Firmi, 5, 2. — La Vita Firmi (5,3-6) donne le texte de l’Édit par lequel Aurélien aurait annoncé au peuple la défaite et la mort de Firmus. Il y est dit que Firmus fut mis en croix par ordre de l’empereur (5, 3). La pièce n’est pas authentique. La véritable tradition relative à la mort de Firmus est celle qui est rapportée dans le texte même de la biographie (loc. cit.). — La Vita Aureliani (33, 4), mentionne la présence, au triomphe, de prisonniers Axomites. Si cette indication est exacte, les Axomites avaient pris part à l’invasion de l’Égypte comme auxiliaires des Blemyes (cf. Vita Aureliani, 41,10).

[34] AMMIEN MARCELLIN, XXII, 16, 15. — A la suite de la révolte de Firmus, Aurélien imposa à l’Égypte, d’une manière permanente, de nouvelles contributions en nature. Voir plus loin, IIIe Partie, Chap. IV. — Un papyrus (voir introduction, note n° 25), postérieur à la reconquête de la province par Aurélien, parle de dégâts commis sur une propriété impériale en Égypte.