PRÉCIS DE L'HISTOIRE DU MOYEN ÂGE

PREMIÈRE PARTIE. — DEPUIS L'INVASION DES BARBARES JUSQU'AUX CROISADES, 395-1095

 

CHAPITRE DEUXIÈME.

 

 

Invasion des Barbares, depuis l'arrivée des Huns en Europe jusqu'à la chute de l'Empire d'Occident, 376-476.

 

§ I. — Arrivée des Huns, et premier établissement des Goths dans l'Empire, 376-395.

 

Origine des Huns. — Les Huns ou Hiong-nou, peuples pasteurs et nomades, étaient originaires de la partie septentrionale du grand plateau de l'Asie. Dès les temps les plus reculés, Tchun-Goei, leur khan ou tanjou, avait fondé un puissant empire au nord du désert de Kobi. Ses successeurs subjuguèrent les Mantchoux ou Tartares orientaux. C'est en vain que les Chinois opposèrent la Grande muraille à leurs incursions ; ils furent rendus tributaires des Tanjoux. Mais l'empereur Vou-ti chassa les Huns du Catay, et les Mantchoux s'affranchirent aussi de leur domination.

Les Huns en Europe. — En proie à une affreuse famine et à des guerres intestines, les Huns abandonnèrent les steppes de la Tartarie et se dirigèrent vers l'occident, divisés en deux corps de nation. Les Huns blancs ou Nephtalites s'arrêtèrent dans la Transoxiane, d'où ils se rendirent si redoutables à la Perse. Les autres tribus, conduites par Balamir, étant arrivées dans le pays des Alains, au nord du Caucase, entraînèrent avec elles ces barbares, passèrent ensemble le Don ou Tanaïs, et envahirent les terres occupées par les Goths (376).

Les Goths formaient la plus nombreuse et la plus puissante des tribus germaniques. Après avoir soumis la presqu'île Scandinave, ils étaient revenus sur le continent, et leur roi Amala s'était emparé de tout le pays situé entre la Baltique et la mer Noire, la Theiss et le Tanaïs. Le Borysthène ou Dniéper séparait les Ostrogoths des Visigoths ; les Gépides ou Traîneurs s'étaient arrêtés au nord des monts Krapaks. Ces trois grandes peuplades de la même nation obéissaient au puissant Hermanrich, lorsque les Huns vinrent bouleverser leur domination.

Les Visigoths dans l'Empire, 376. — Après la défaite d'Hermanrich, qui se donna la mort pour ne pas survivre à son malheur, les Goths orientaux et les Gépides se soumirent aux Huns, ainsi que les Slaves, qui ne firent que changer de maîtres. Les Visigoths épouvantés accoururent en foule vers le Danube, et sollicitèrent un asile dans l'Empire romain. L'empereur Valens accorda cette faveur aux prières de leur évêque Ulphilas, à condition qu'ils embrasseraient l'arianisme et qu'ils livreraient leurs armes aux commissaires impériaux. Les barbares furent cantonnés dans les deux Mésies ; on leur distribua les terres vacantes, et on leur permit d'y vivre suivant leurs lois, mais sous la surveillance des officiers de l'empereur.

378. — Les vexations de ces agents poussèrent les Goths à la révolte. Ils prirent les armes, que la vénalité avait laissées entre leurs mains. Conduits par leurs juges Fritigern et Alavivus, ils passèrent le mont Hémus, et gagnèrent sur les Romains la sanglante bataille d'Andrinople, où l'empereur perdit la vie, Cependant les vainqueurs n'osèrent attaquer Constantinople, et rentrèrent dans leurs terres chargés de butin.

L'empereur d'Occident Gratien, ayant succédé à son oncle Valons, confia la défense de l'Orient au comte Théodose, qu'il associa à l'Empire. Ce grand prince battit les barbares sur le Danube et leur dicta la paix. Les Visigoths s'engagèrent, moyennant une solde annuelle, à défendre la frontière qu'ils habitaient. Ils tinrent en échec les Huns, qui dominaient sur l'autre rive du fleuve, et leur général Alaric, fidèle à la fortune de Théodose, aida cet empereur à détruire le tyran Eugène, que le Franc Arbogast avait revêtu de la pourpre.

 

§ II. — Invasion des Visigoths, des Bourguignons, des Suèves et des Vandales sous Honorais, 395-424.

 

Première invasion d'Alaric, 395-401. — Après la mort de Théodose, les Visigoths, secrètement excités par le ministre Ruffin, se mirent en pleine révolte, sous prétexte que la cour de Byzance avait interrompu ou retardé le paiement de la solde convenue. Alaric à leur, tête, ils ravagent la Thrace, la Macédoine, et pénètrent jusque dans le Péloponnèse ; Stilicon les y poursuit. Mais les barbares lui échappent et traitent avec l'empereur Arcadius, qui accorde à leur chef Alaric la dignité de maître de la milice dans la préfecture d'Illyrie. Peu de temps après, le général barbare est élevé sur le pavois et proclamé roi par les Goths.

401-403. — Les barbares campés au pied des Alpes Juliennes désolaient la Vénétie par des incursions partielles. Enfin, Alaric lui-même, profitant de l'absence de Stilicon, fondit sur l'Italie avec toutes les forces de sa nation. Les riches cités de la Cisalpine furent livrées au pillage. Honorius, chassé de Milan, se réfugia dans Asti, où les Goths allèrent l'assiéger ; mais Stilicon, accouru du fond de la Rhétie, délivra l'empereur, et, poursuivant les barbares, les atteignit et les battit près de Pollentia. Alaric se replia sur l'Illyrie et obtint une paix avantageuse. Honorius alla triompher à Rome de la victoire de son général ; ensuite il transporta la résidence impériale à Ravenne, et mit ainsi, entre lui et les barbares, les lagunes de la mer Adriatique.

Invasion de Radagaise, 406. — Pendant que les Visigoths étaient stationnés sur les bords de l'Isonzo, une multitude de Suèves commandés par Radagaise accourut des bords de l'Oder et se joignit aux Alains et aux Vandales qui erraient sur les deux rives du Danube. Une division de ces tribus combinées passa les Alpes Rhétiennes et s'avança sans obstacles jusque sous les murs de Florence. Mais Stilicon, arrivant au secours de cette place, força Radagaise à lever le siège, et enveloppa lui-même les barbares postés sur les rochers de Fésules. Affamés dans leur camp et réduits à un petit nombre, ils se rendirent au général romain, qui les vendit comme esclaves et fit trancher la tête à Radagaise.

Invasion de la Gaule, 407. — A la nouvelle de ce revers, les autres tribus barbares rentrent dans la Germanie et se rapprochent du Rhin, où les Bourguignons font alliance avec elles. Les quatre peuples réunis entreprennent de passer ce fleuve, qui servait de barrière à la Gaule. Les Francs Ripuaires, alliés de l'Empire, essaient en vain de défendre le passage ; après avoir soutenu un choc terrible où le roi des Vandales perdit la vie, ils sont mis en déroute par la cavalerie des Alains, et les tribus confédérées passent librement le Rhin près de Mayence. Les cités de la Belgique sont livrées aux flammes, et pendant plus de deux ans la Gaule est parcourue et dévastée dans tous les sens. Elle dut sa délivrance à l'usurpateur Constantin, que les légions de la Bretagne venaient de proclamer empereur, et qui fit reconnaître son autorité à la plus grande partie de la Gaule et de l'Espagne.

409. — Les Vandales, les Suèves et les Alains laissèrent les Bourguignons entre le Jura et la Saône, et passèrent les Pyrénées pour piller les richesses de l'Espagne, pendant que l'Italie subissait une nouvelle invasion.

Prise de Rome par Alaric, 410. — L'empereur Honorius venait d'ordonner la mort de Stilicon, que ses envieux accusaient de trahison, et le massacre des Goths auxiliaires était compris dans ce coup d'État (408) ; mais les barbares s'échappent des garnisons de l'Italie et vont demander vengeance au chef de leur nation. Alaric saisit ce prétexte pour envahir de nouveau l'Italie, Il marche sur Rome, qui se rachète d'abord par une riche rançon. Elle reçoit ensuite pour empereur le préfet Attale, qu'Alaric fait élire par le sénat, pour le dégrader bientôt après ; enfin les portes de la ville sont ouvertes par les esclaves révoltés, et les immenses richesses accumulées dans la capitale de l'Empire deviennent la proie des barbares.

Les Visigoths dans la Gaule, 412. — Alaric étant mort à Cosenza, son beau-frère Adolphe ou Ataulf fut élu à sa place. Ce nouveau chef des Goths fit la paix avec l'empereur, qui lui laissa épouser sa sœur Placidie, et il s'engagea à chasser les usurpateurs Constantin, Gérontius, Jovin et Sébastien, qui se disputaient la Gaule. Constantin, fait prisonnier dans Arles par le comte Constantius, subit la peine capitale ; Gérontius se donna la mort ; Jovin et Sébastien, vaincus par les Visigoths, périrent sur l'échafaud à Narbonne.

Royaume des Bourguignons, 413. — A la faveur de cette anarchie, les Bourguignons s'étaient établis dans la Séquanaise, protégés par le traître Jovin ; Honorius confirma la possession de cette province à leur roi Gondicaire. Les successeurs de ce prince étendirent leur domination sur les provinces voisines, et Lyon devint la capitale des Bourguignons.

Royaume des Suèves, 419. — Le comte Constantius voulant éloigner de la Gaule des alliés qui la pillaient, engagea Ataulf à passer les Pyrénées. Ce chef barbare ayant été assassiné à Barcelone, Wallia prit sa place et servit les Romains contre les Vandales, les Suèves et les Alains. Dans cette lutte, les Alains furent détruits ; les Vandales furent poussés et contenus dans la Bétique ; et les Suèves, commandés par Hermanrich, fondèrent en Galice un royaume qui fut conquis par les Visigoths en 585.

Royaume des Visigoths, 419. — Pour prix des services que les Goths avaient rendus à l'Empire, Wallia obtint pour eux la seconde Aquitaine et la ville de Toulouse, qui fut pendant près d'un siècle la capitale de leur royaume. Les : premiers successeurs de Wallia ajoutèrent à cette province tout le pays compris entre la Loire et les Pyrénées, ainsi que la plus grande partie de l'Espagne.

Mort d'Honorius, 424. — Trois royaumes barbares venaient d'être fondés dans l'Empire, lorsque Honorius finit son règne et sa vie. La plupart des actes de son gouvernement avaient eu pour objet l'extirpation de l'hérésie et du paganisme ; il déclara tous les dissidents inadmissibles aux fonctions publiques, fit détruire les idoles et les temples des dieux. Il abolit aussi les combats des gladiateurs et tous les spectacles que réprouvaient la religion et l'humanité.

 

§ III. — Invasion des Vandales en Afrique et des Huns en Europe, sous Valentinien III.

 

Honorius n'ayant pas laissé d'enfants, son héritage revenait à son neveu Théodose II, déjà empereur d'Orient. Mais la division de l'Empire romain était devenue une nécessité publique, et le fils d'Arcadius se fit un devoir d'abandonner ses droits à son cousin Valentinien, né du second mariage de Placidie avec le comte Constantius. Cette princesse était alors à Constantinople avec son fils ; Théodose leur donna une armée pour aller prendre possession de l'Italie, où Jean le Secrétaire s'était fait reconnaître empereur.

VALENTINIEN III, 425. — L'usurpateur, trop tard secouru par les Huns, fut livré à Placidie, qui le condamna à la peine capitale. Cette princesse fit reconnaître l'autorité de son jeune fils aux Romains occidentaux et aux Barbares auxiliaires, et prit elle-même les rênes de l'état, pendant que Pulchérie, sœur de Théodose, régnait en Orient au nom de son frère. Deux illustres sénateurs, le patrice Aétius et le comte Boniface, se partagèrent la faveur de Placidie ; mais leur rivalité compromit l'empire et lui fit perdre l'Afrique.

Vandales en Afrique, 429. — Boniface, proconsul d'Afrique, accusé par Aétius et disgracié par l'impératrice, refusa de se rendre à Ravenne et. appela les Vandales à son secours. Ces barbares obéissaient alors a Genseric, qui venait de succéder à son frère Gonderic. Ils passèrent le détroit de Cadix, et furent accueillis en Afrique par les Donatistes persécutés et par les Maures indépendants, tous également ennemis des Romains. En vain Boniface, que les conseils de saint Augustin avaient ramené au devoir, et dont Placidie avait pardonné la trahison, s'efforça de défendre sa province contre Genseric. Sa valeur, secondée par les secours de l'Orient, ne put chasser les Vandales de la Numidie et d'une partie de la Carthaginoise, que la cour de Ravenne abandonna par un traité en 435.

Royaume de Carthage, 429. — A la faveur de cette paix, Genseric surprit Carthage, qui redevint alors la capitale d'un état indépendant plus redoutable pour Rome que ne l'avait été jadis la puissance punique. En peu de temps toute l'Afrique romaine subit le joug de Genseric, et les grandes îles de la Méditerranée, la Sicile, la Sardaigne, la Corse et les îles Baléares, tombèrent au pouvoir d'un prince qui avait su deviner que l'importance de l'Afrique dépendait du nombre de ses vaisseaux.

Prise de Rame, 455. — L'impératrice Eudoxie, veuve de Valentinien III, forcée de donner sa main au sénateur Pétrone Maxime, meurtrier et successeur de son mari, voulut tirer vengeance de ce crime et de cet outrage en appelant Genseric en Italie. Les Vandales débarquèrent au port d'Ostie, et s'avancèrent sur Rome, dont les habitans mutinés venaient d'égorger l'usurpateur. La ville, prise sans résistance, fut livrée au pillage, et Carthage s'enrichit de la dépouille de Rome et de sa population captive.

Pendant plus de vingt ans encore, Genseric fit trembler l'Orient et l'Occident, brûla ou dispersa les flottes qui devaient le détruire, et survécut à la dernière catastrophe de l'empire romain. Après sa mort, qui arriva en 477, royaume des Vandales ne fit que décliner jusqu'à l'époque où Bélisaire en fit la conquête sur Gélimer, en 534.

Puissance des Huns. — Depuis que ces barbares avaient paru en Europe, ils avaient inquiété l'Empire par des incursions passagères -, mais leur domination s'était étendue sur la plupart des tribus de la Sarmatie et de la Scythie. Attila agrandit encore cette puissance et la rendit formidable aux Romains.

Attila, 433-453. — Ce conquérant, si célèbre par ses dévastations qui lui méritèrent le surnom de Fléau de Dieu, affermit d'abord son autorité sur les peuples tributaires, et subjugua les Tartares Géougen pendant que ses lieutenants soumettaient les peuplades de la Germanie orientale.

442-450. — La cour de Byzance ayant refusé le tribut qu'elle s'était engagée à payer au roi des Huns, ces barbares passent la frontière, dévastent la Thrace et l'Illyrie, et forcent Théodose II, non-seulement à s'acquitter de cette dette, mais à leur abandonner la rive droite du Danube, et à livrer les Huns fugitifs qui s'étaient retirés dans les provinces de l'Empire (446). Pour se soustraire à ces conditions, les ministres de l'empereur trament un complot contre les jours d'Attila ; mais cette intrigue est déjouée, et le roi des Huns exige des réparations qui lui sont portées dans son camp parle consulaire Maximin et l'historien Priscus. Théodose ne survit que peu de mois à cette humiliation, et Marcien, qui lui succède, oppose, aux prétentions d'Attila une fermeté digne des Romains d'un autre âge.

Invasion de la Gaule, 451. — Le roi des Huns tourne alors ses vues contre l'Occident. Il demande la main d'Honoria, sœur de Valentinien III, et la moitié de l'Empire comme dot de cette princesse. Le refus qu'il essuie est un des prétextes qu'il met en avant pour envahir la Gaule. Il passe le Rhin, et s'avance vers la Loire, après avoir livré aux flammes les villes déjà saccagées par les Vandales. Orléans assiégé est délivré par le patrice Aétius, qui poursuit les Huns, et remporte sur eux une grande victoire près de Châlons-sur-Marne, avec l'aide des Visigoths, des Francs et des Bourguignons. Attila vaincu repasse en Germanie.

Invasion en Italie, 452. — Les Huns et les hordes tributaires d'Attila traversent les Alpes Juliennes et détruisent d'abord Aquilée. La Vénétie est saccagée, et ses habitans fugitifs se retirent dans les îles, où ils jettent les premiers fondements de Venise. L'empereur Valentinien III, effrayé par la dévastation de la Cisalpine, envoie au roi des Huns une ambassade présidée par le pape saint Léon. L'éloquence de ce grand pontife impose au féroce conquérant. Attila reçoit les présents de la cour impériale, et consent à abandonner l'Italie. La mort délivre l'Empire de ce formidable voisin (453).

Dispersion des Huns, 453, etc. — La mort d'Attila mit fin à la vaste et mouvante domination des Huns. Ses nombreux enfants se divisèrent, et la révolte éclata de tous côtés parmi lès tribus scythiques, slaves et germaniques. Plusieurs fils du conquérant périrent dans - cette mêlée des hordes barbares, et Irnak, le plus jeune d'entre eux, ramena en Asie les restes de la nation des Huns. Par suite de l'émancipation des peuplades tributaires, Ardaric, roi des Gépides, forma un état indépendant entre la Theiss et le Dniester, pendant que les Ostrogoths s'établissaient dans la Pannonie sous l'autorité de leurs trois chefs Walamir, Widimir et Théodomir.

 

§ IV. — Chute de l'empire d'Occident, 455-476.

 

Derniers empereurs, 455-476. — Depuis l'invasion de l'Italie par Attila, et la prise de Rome par Genseric, arrivées à peu d'intervalle, jusqu'à la chute de l'empire d'Occident, il s'écoula environ un quart de siècle qu'on peut considérer comme l'agonie de l'empire romain. La fureur populaire avait fait justice du lâche Maxime. Le rhéteur Avitus, proclamé dans la Gaule par son disciple Théodoric II, roi des Visigoths, est détrôné par le Suève Ricimer, qu'il avait choisi pour maître de la milice. Ce général donne la pourpre au brave, Majorien, dont les vertus et le grand caractère trompent les espérances ambitieuses de son protecteur. Ce prince, digne d'un meilleur temps, entreprend, mais en vain, de remettre en honneur parmi les Romains les mœurs antiques, et de faire régner les lois et l'ordre public. Dans le dessein de chasser les Vandales de l'Afrique, il fait préparer un grand armement naval dans le port de Carthagène ; mais ses généraux, gagnés par l'or de Genséric, laissent incendier la flotte impériale. Majorien désespéré retourne en Italie, où il ; trouve une armée mutinée qui le dépose et le livre au' sanguinaire Ricimer.

Le meurtrier de Majorien dispose successivement de la dignité suprême en faveur de trois sénateurs, Sévère III, Anthémius et Olybrius, également indignes du trône. Les noms obscurs de ces empereurs n'inspirent pas plus d'intérêt que ceux de Glycerius et de Julius Nepos, qui furent détrônés l'un et l'autre et terminèrent leur carrière, l'un dans les honneurs de l'épiscopat, l'autre dans la retraite de Salone.

Fin de l'empire romain, 476. — Le patrice Oreste, maître de la milice en Italie, après avoir été ministre d'Attila, revêtit son fils Romulus Augustule de la pourpre dont il venait de dépouiller Julius Népos. Mais les Barbares au service de l'Empire, sous le nom de fédérés, n'ayant pu obtenir de lui le tiers des terres de l'Italie, se révoltèrent sous la conduite d'Odoacre, Hérule de nation. Oreste, vaincu, périt massacré dans Pavie, et son fils, à peine âgé de six ans, fut relégué à Lucullanum, dans la Campanie, où il mourut bientôt après. La puissance des Céars acheva de s'éteindre dans un enfant.

La chute de la domination impériale en Occident ne peut être considérée comme une révolution ; ce fut un événement presque inaperçu qui ne changea rien au sort des peuples, tel que l'invasion l'avait fait. Les Barbares achevèrent leur établissement dans les provinces romaines, et l'Italie reçut Odoacre pour maître, sous les titres de patrice et de roi.