LA TERREUR

TOME SECOND

 

LES PRISONS DE PARIS.

 

 

I. — LA LOI DES SUSPECTS.

 

Les études que j'ai publiées dans le volume précédent ont porté sur des livres qui embrassaient dans son ensemble ou envisageaient à des points de vue particuliers le règne de la Terreur. Entre les principaux sujets qui s'y rapportent, il en est deux que j'avais réservés pour un examen plus étendu : ce sont ceux dont traite ce volume, les Prisons et le tribunal révolutionnaire de Paris[1] ; et d'abord, les Prisons.

Sans attendre les documents nouveaux que promettait M. Dauban, on avait déjà le moyen de s'en faire une idée par divers témoignages publiés depuis la fin du dernier siècle jusqu'à nos jours. Après la chute de Robespierre, plus d'un détenu, mis en liberté, avait pu faire connaître le régime des maisons où il avait vécu dans l'attente d'une mort prochaine. Dès l'an III (94-95), l'Almanach des prisons contenait plusieurs récits qui furent reproduits, et complétés par d'autres relations, dans un recueil plus étendu, l'Histoire des prisons de Paris et des départements, contenant des mémoires rares et précieux, ouvrage dédié à tous ceux qui ont été détenus comme suspects, rédigé et publié par P.-J.-B. Nougaret. Paris, l'an V (juin 1797), 4 vol. in-12 ; et c'est de là que plusieurs de ces morceaux ont passé dans les Mémoires sur les prisons qui font partie de la Collection des Mémoires relatifs à la Révolution française[2]. Madame Roland, dans la dernière partie de ses Mémoires, qu'elle écrivit en prison[3] ; Beaulieu, dans le cinquième volume de ses Essais historiques sur les causes et les effets de la Révolution française[4], et la comtesse de Bohm, née de Girardin, dans un livre qui porte ce titre un peu trop général : les Prisons en 1793[5], ont parlé de leur emprisonnement : la première, à l'Abbaye et à Sainte-Pélagie — elle n'a pu laisser qu'une note inachevée sur la Conciergerie — ; le second, à la Conciergerie et au Luxembourg ; la troisième, au Plessis, Plus récemment, les Mémoires du comte Beugnot ont fourni de nouveaux détails sur la Conciergerie et sur la Force, où il a été successivement enfermé ; et un ouvrage, non plus un journal de détenu, mais un travail d'érudit, vient de paraître sur les Carmes[6]. Quelque intérêt que puissent avoir les documents encore inédits, on aura toujours dans ces récits particuliers et dans ces pièces les grands traits du sujet. Ce sont ces traits que j'ai essayé de réunir dans la présente étude[7].

On sait déjà comme les prisons avaient été remplies et vidées aux journées de septembre. Le vide ne tarda pas à se combler de nouveau, et de nombreux suspects eurent à franchir ces guichets encore teints du sang de leurs prédécesseurs.

A la date du 14 novembre 1792, une revue des prisons, faite par le Comité de sûreté générale, donnait lieu à un rapport dans lequel on signalait à Saint-Lazare un seul prisonnier, à Sainte-Pélagie quatorze, dont deux, arrêtés sur des soupçons légers, furent mis en liberté ; à l'Abbaye cinquante soldats déserteurs, deux gardes du corps et quatre fabricateurs de faux assignats ; à la Force treize prisonniers, tous détenus pour des délits graves ; à Bicêtre deux cent quarante-neuf détenus en vertu de sentences de police correctionnelle ; à la Conciergerie deux cents dont trente-trois étaient des déserteurs prussiens -et non des émigrés comme on l'avait dit ; on les fit élargir[8]. Le mois suivant, le nombre croissant et les procédés de ces arrestations commencent à émouvoir le ministre de l'intérieur, Roland ; il écrit aux membres du Directoire du département de Paris :

Je crois devoir vous communiquer deux listes, l'une du 12 décembre, de la prison de la Force, l'autre du 13, de Sainte-Pélagie, qui m'ont été adressées par les concierges de ces maisons et sur lesquelles je vois des ordonnances signées d'officiers dont je ne connais pas le caractère ; et je vous charge de le vérifier ainsi que la validité des causes qui peuvent avoir déterminé l'arrestation et la détention des particuliers y dénoncés : vous enjoignant expressément de vous faire remettre chaque jour une pareille liste, afin d'être à portée de rendre compte, chaque jour, de l'état des prisons, et de connaître les abus qui pourraient .s'y commettre, vous observant que vous en serez garants par tout le poids de votre responsabilité.

Signé : ROLAND[9].

Le 17 mars 1793, il y avait, selon le rapport du citoyen Grandpré, inspecteur des prisons, neuf cent cinquante détenus dans les prisons de la capitale : trois cent vingt à l'hôtel de la Force, quarante-quatre à Sainte-Pélagie, deux cent six à Bicêtre, trois cent quatre-vingts à la Conciergerie.

Après la révolution du 31 mai, quand on entre dans la Terreur, les arrestations se multiplient et l'imagination populaire en porte déjà le nombre à un chiffre qui paraissait alors fabuleux. Dans la séance du samedi s juin 1793, la Convention reçut des administrateurs de police cette lettre :

Citoyens législateurs,

Nous avons vu avec la plus grande surprise, dans le Journal de Paris en date de ce jour, que le citoyen Fermond, l'un de vos collègues, avait demandé à la Convention Nationale, que tous les citoyens incarcérés par ordre des autorités non constituées fussent mis en liberté, et qu'il y avait dit que 10,000 citoyens étaient incarcérés par le Comité révolutionnaire de Paris.

Nous vous envoyons le relevé de tous les détenus dans les maisons de justice, d'arrêt, détention et correction. Parmi les individus qui y sont renfermés, il y en a qui sont fabricateurs de faux-assignats, assassins, voleurs, contre-révolutionnaires, et d'autres enfin prévenus de différents délits de police municipale, correctionnelle et militaire. Désirant éclairer à chaque instant nos concitoyens, nous nous engageons de leur donner, à quelque heure que ce puisse être, l'état au vrai de toutes les maisons de justice et de détention.

Les administrateurs au département de la police,

FIGUET, MARINO.

Nombre des prisonniers détenus dans les maisons de justice, etc. du département de Paris, le 6 juin.

Conciergerie, 322 ; grande Force, 354 ; petite Force, 129 ; Sainte-Pélagie, 118 ; Madelonnettes, 57 ; Abbaye, 80 ; Bicêtre, 228 ; en état d'arrestation à la Mairie, 22. Total : 1310[10].

C'est à propos de cette publication que l'observateur de police Perrière écrivait à Garat, à la date du 13 juin :

Un état des prisons, le 6 juin, imprimé par les administrateurs de police de Paris ! Les prisons en tout ne contenaient que treize cents et quelques personnes, la plupart voleurs, fabricateurs de faux assignats, et contre-révolutionnaires. On disait autour de nous, que ce mot de contre-révolutionnaire avait une furieuse latitude, que l'on n'avait point fait connaître au public la mesure à laquelle on l'avait restreinte et que probablement ces arrestations avaient encore mieux servi les haines particulières que l'intérêt de la patrie[11].

Mais le nombre devait rapidement s'en accroître.

Chaque journée de la Révolution fournissait toute une catégorie de victimes ; après les royalistes — les chevaliers du poignard et les conspirateurs du 10 août, comme on disait — ce furent les modérés et les feuillants ; puis les fédéralistes et les brissotins ; puis à peu près tout le monde, quand parut la loi qui fut la charte de la Terreur, la loi du 17 septembre 1793, dite loi des suspects[12].

Tous les suspects devaient être immédiatement mis en état d'arrestation (art. 1). Seront réputés suspects, ajoutait la loi :

1° Ceux qui, soit par leur conduite, soit par leurs relations, soit par leurs propos ou leurs écrits, se sont montrés partisans de la tyrannie, du fédéralisme, ou ennemis de la liberté ;

2° Ceux qui ne pourront pas justifier, de la manière prescrite par la loi du 21 mars dernier, de leurs moyens d'exister et de l'acquit de leurs devoirs civiques ;

3° Ceux à qui il a été refusé des certificats de civisme ;

4° Les fonctionnaires publics suspendus de leurs fonctions par la Convention nationale ou par ses commissaires, et non réintégrés ;...

5° Ceux des Ci-devant nobles, ensemble les maris, les femmes, pères, mères, fils ou filles, frères ou sœurs et agents d'émigrés, qui n'ont pas constamment manifesté leur attachement à la Révolution ;

6° Ceux qui ont émigré dans l'intervalle du ler juillet 1789 à la publication de la loi du 8 avril 1792, quoiqu'ils soient rentrés en France dans le délai fixé par cette loi ou précédemment. (Art. 2.)

Les comités de surveillance, établis d'après la loi du 21 mars précédent[13], étaient chargés de dresser la liste des suspects et de les faire arrêter (art. 3) ; dans la huitaine on les devait transférer dans les prisons départementales, où ils étaient gardés à leurs frais (art. 5-8). Les tribunaux civils et criminels pouvaient retenir en état d'arrestation comme suspects ceux qui seraient acquittés pour quelque délit (art. 10) [14] ; et comme si cela ne suffisait pas, Chaumette, commentant la loi, proposa dans le conseil de la Commune (10 octobre 1793) de reconnaître comme suspects

1° Ceux qui, dans les assemblées du peuple, arrêtent son énergie par des discours astucieux, des cris turbulents et des murmures ;

2° Ceux qui, plus prudents, parlent mystérieusement des malheurs de la République, s'apitoient sur le sort du peuple et sont toujours prêts à répandre de mauvaises nouvelles avec une douleur affectée ;

3° Ceux qui ont changé de conduite et de langage selon les événements ; qui, muets sur les crimes des royalistes, des fédéralistes, déclament avec emphase contre les fautes légères des patriotes et affectent, pour paraître républicains, une austérité, une sévérité étudiées, qui se démentent dès qu'il s'agit d'un modéré ou d'un aristocrate ;

4° Ceux qui plaignent les fermiers et marchands avides, contre lesquels la loi est obligée de prendre des mesures ;

5° Ceux qui ayant toujours les mots de liberté, république et patrie sur les lèvres, fréquentent les ci-devant nobles, les prêtres contre-révolutionnaires, les aristocrates, les feuillants, les modérés, et s'intéressent à leur sort.

Et sept autres articles semblables, entre lesquels nous ne signalerons plus que celui-ci :

8° Ceux qui n'ayant rien fait contre la liberté n'ont aussi rien fait pour elle.

ce qui débarrassait l'accusateur public de la nécessité de faire la preuve du délit Et le Conseil général, dit Beaulieu, qui reproduit ces articles dans son journal, couvrit d'applaudissements cette atrocité et en ordonna l'impression[15]. Mais il y a plus. La loi, on l'a vu, déclarait suspects ceux à qui il a été refusé des certificats de civisme. Or le 2 décembre (12 frimaire) le Conseil général de la commune déclara nuls tous les certificats de civisme accordés jusqu'à ce jour ; et voici à quelles conditions il mettait l'obtention d'un nouveau certificat :

Art. X. Pour obtenir un certificat de civisme, il faudra réunir les qualités ci-après savoir :

1° Produire l'extrait de son enregistrement dans la garde nationale depuis le commencement de l'année 1790, pour ceux seulement qui étaient à cette époque nommés actifs ;

2° Produire ses quittances de contributions patriotiques et d'impositions de 1191 et 92 ;

3° N'avoir occupé qu'une place à la fois depuis le 10 août et n'avoir touché qu'un traitement ;

4° N'avoir fait aucun écrit contre la liberté ;

5° N'avoir été d'aucun club proscrit dans l'opinion publique, tels, pour Paris, que ceux monarchiens, feuillants, Sainte-Chapelle, Massiac et Montaigu ;

6° N'avoir été rejeté d'aucune société populaire, telles, pour Paris, que les Jacobins et Cordeliers, lors de leur épurement ;

7° N'avoir signé aucune des pétitions proscrites, telles, pour Paris, que celle des huit et vingt mille, contre la translation de Voltaire et contre le mariage des prêtres, lors même qu'on se serait rétracté sur le champ.

C'est en vertu de ces textes et d'après ces règles que les comités révolutionnaires allaient procéder.

On n'avait pas attendu jusque-là pour opérer les arrestations les plus arbitraires. Le Comité de salut public avait fait emprisonner, comme suspects, les acteurs du Théâtre-Français pour ce vers de Paméla, dont les applaudissements de la salle avaient fait une insulte aux vainqueurs des Girondins :

Le parti qui triomphe est le seul légitime[16].

On arrêtait ceux qui n'avaient pas de passeports ; on arrêtait ceux qui en demandaient, s'ils y mettaient un peu trop d'empressement. Un père de famille, remis du jour au lendemain, ayant montré quelque impatience : Ce citoyen, dit un membre du comité, est trop pressé de quitter Paris pour qu'il n'y ait pas quelque chose contre lui. Il /m'est suspect. Je suis d'avis qu'on le f.... en prison. Et il y resta dix mois, trop heureux d'en sortir[17] l Mais depuis la loi, les arrestations furent en quelque sorte à l'ordre du jour. On arrêtait comme fanatiques ceux qui tenaient à leur religion. On arrêtait les riches surtout : on forçait tous les citoyens à afficher sur leur porte leurs noms, leur âge, leur profession, leurs moyens d'existence, afin de choisir plus aisément les victimes et de s'épargner la peine de les découvrir ; et l'âge n'était pas une excuse : On nous annonce, dit l'un de nos auteurs dans le journal de sa prison, une nouvelle pensionnaire : c'est la citoyenne Prévost, âgée de quatre-vingt-onze ans ; une fortune de cent mille livres de rente a fait présumer qu'elle était en état de contre-révolution[18]. On arrêtait aussi des pauvres et même des sans-culottes incompris : On m'accuse d'incivisse, disait l'un d'eux, moi qui ai voté pour la République nulle et invisible[19]. Il y avait donc des suspects avant la loi qui les décréta ; mais, depuis la loi, ce seul fait d'être suspect fut un crime. Suspect d'incivisme ! disait l'inspecteur de police Marino à un prisonnier, j'aimerais mieux avoir volé et assassiné. Et, au fait, c'était en ce temps-là moins dangereux. On était emprisonné, on était guillotiné comme suspecté d'être suspect ![20]

Avec un tel régime, les prisons devaient bientôt ne plus suffire. En laissant à part les deux prisons d'État, la Bastille et Vincennes, il y en avait quatre sous l'ancienne monarchie : la Conciergerie, la Tournelle, le Grand-Châtelet, la Force, qui, en 1782, venait de remplacer le Fort-l’Évêque (rue Saint-Germain-l'Auxerrois) et le Petit-Châtelet (au sud du Petit-Pont, à l'entrée de la rue Saint-Jacques). Joignez-y l'Abbaye, ou prison de Saint-Germain-des-Prés, devenue prison militaire, Saint-Lazare (faubourg Saint-Denis), ancienne léproserie, devenue maison de correction ; la Salpêtrière, Bicêtre et Charenton, maisons d'un caractère spécial, moitié prisons, moitié hôpitaux[21]. Il y en eut trente et plus sous cette ère de liberté ; et il en aurait fallu trois fois plus encore pour que les détenus y eussent l'espace nécessaire. Qu'eût-ce été si la Terreur n'avait Pas eu les moyens que l'on sait pour faire place aux nouveaux arrivants I Des couvents, des collèges, des casernes, des maisons particulières, des hôtels, des palais mêmes furent convertis en prison : les Madelonnettes et Sainte-Pélagie, les Carmes, de sanglante mémoire, Port-Royal, dit Port-Libre — amère dérision de la fortune dans les changements de nom ! — ; les Anglaises de la rue Saint-Victor, de la rue de Lourcine, du faubourg Saint-Antoine ; les Bénédictins anglais, rue de l'Observatoire, les Écossais, rue des Fossés-Saint-Victor et les Irlandais, rue du Cheval-vert ; la caserne des Petits-Pères et l'ancienne caserne des Gardes-Françaises, rue de Sèvres ; la maison des Oiseaux, même rue, la maison Belhomme, rue de Charonne, la maison Mahaye, rue du Chemin-vert (section Popincourt), la maison La Chapelle, rue Folie-Renault, et la maison Blanchard, à. Picpus ; l'hôtel des Fermes et l'hôtel Talaru, le palais du Luxembourg.

Les Madelonnettes et Sainte-Pélagie étaient toutes préparées à devenir prisons. Ces deux maisons, fondées à l'origine pour servir d'asile à des filles repenties, avaient fini par recevoir aussi celles qui avaient besoin de repentir[22] ; fermées ou plutôt ouvertes comme couvents en 1790, elles avaient reçu leur destination nouvelle en 1793. Vous savez tous, dit un détenu de Sainte-Pélagie,

Vous savez tous que de cette maison,

Jadis couvent de nonnes habité,

Ces derniers temps ont fait une prison :

En un seul point elle a changé d'usage ;

Pour des nonains, fille ou femme peu sage,

Vous y verriez au moins deux cents reclus

Dont la plupart ne péchèrent pas plus[23].

Aux Madelonnettes, les salles basses étaient déjà remplies de pailleux, c'est-à-dire de prisonniers couchant sur la paille, quand la loi du 17 septembre y envoya en masse les suspects.

La maison des Carmes, devenue, au contraire, prison par occasion, avait cessé de l'être après les massacres. Cette maison, dont les religieux, bien vus dans le quartier, avaient pu, jusqu'aux journées de septembre, vivre en communauté et ne pas même être inquiétés au milieu du massacre, avait été louée à un jardinier qui la sous-loua en grande partie au citoyen Langlois, ancien traiteur du lieu pendant l'incarcération des victimes. Langlois y transporta son matériel et ouvrit un bal champêtre dans le jardin même où les prêtres avaient été égorgés, — le bal des Tilleuls ! — On n'y dansa pas longtemps. A la fin de brumaire an II (novembre 1793), le Comité de salut public fit des Carmes, comme de plusieurs -autres couvents que nous avons énumérés, et d'autres encore, une maison de détention. Langlois réclama ; mais il était accommodant : il acceptait la résiliation de son bail, même sans indemnité pécuniaire. Seulement, en rendant la maison, il demandait à y rester comme geôlier, avec l'entreprise de la nourriture nécessaire aux détenus : transformation patriotique où il ne laissait pas que de trouver son avantage. Les prisonniers étaient des consommateurs forcés et qui ne pouvaient pas marchander sur leur consommation. On le savait, et on l'évinça révolutionnairement : la place fut donnée à un autre, et, le 10 décembre, on commença à y enfermer les suspects.

Port-Libre, au 26 frimaire (16 décembre 1793), contenait deux cents et quelques détenus, parmi lesquels vingt-sept fermiers généraux et vingt-sept receveurs généraux des finances, qu'un décret y avait réunis pour qu'ils fussent plus à portée de se concerter dans la reddition de leurs comptes : on trouva plus tard, pour plusieurs, une manière fort sommaire de les apurer[24]. Quant au Luxembourg, on y avait d'abord enfermé les députés accusés de fédéralisme[25] : c'est par les noms de huit des Girondins que commence le livre d'écrou du Luxembourg, conservé aux Archives de la Préfecture de police :

Du 26 juillet : Lehardy, Vergniaud, Foret, Gomer, Gardien, Valazé, Gensonné et Michel, par décret de la Convention nationale[26].

 

Un peu après, je veux dire le 19 vendémiaire an II (10 octobre 1793), on y enferma des Anglais et des Anglaises, mis en arrestation par voie de représailles[27] ; ils furent suivis bientôt (22 vendémiaire) des suspects de la section de la Fontaine de Grenelle, au nombre de cinquante-deux. Les plus grands noms du faubourg Saint-Germain figurent sur cette première liste, des femmes surtout : La nommée d'Ormesson, Amelot et sa femme, d'Hautefort jeune et sa femme, la Demoras, la Latournelle, la Brocas, la Albert Luynes, la Grammont et sa fille, la Serrans, la Narbonne Pelet [et] sa fille, la Larocheaymon et sa fille, la Du Metz et sa fille, la Mégrigny, la Biron, la Dapremont, la Duport, la Marbeuf, etc.[28] Dès lors, la population de la maison s'accrut rapidement. Ce fut pour recevoir le trop-plein de la Conciergerie que le Plessis de collège devint prison, et se joignit pour le même service son voisin Louis-le-Grand. Et d'autres maisons, celle de Blanchard, à Picpus, de Belhomme, rue de Charonne, etc., furent appropriées comme maisons de santé, au même usage, dans le cours de l'an II, dès les premiers mois de 1794.

Les autorités et les sections de Paris s'étaient empressées de seconder l'État dans l'application de la loi des suspects, en leur préparant des prisons. Toute autorité ayant droit d'arrêter, dit Beaulieu, avait une vaste chambre de dépôt près du lieu où elle était établie : la municipalité en avait une ; la Mairie ou le chef-lieu de la police, une ; et chaque comité révolutionnaire, une[29]. C'est comme cela qu'il en compte jusqu'à soixante. Chaque section de Paris, dit aussi un de nos narrateurs, était jalouse d'avoir la sienne particulièrement à la disposition de son comité révolutionnaire[30]. La seule section du Bonnet-Rouge en avait deux parmi celles que nous avons énumérées : l'ancienne caserne des Gardes-Françaises (20 septembre 1793) et la maison des Oiseaux, au coin de la rue de Sèvres et du boulevard (fin de mars 1794)[31]. Les suspects, d'après le décret, on l'a vu, devaient être gardés à leurs frais : on leur faisait payer même le chien de garde[32] ; on leur faisait payer leur lit, leur chambre ou leur place dans la chambre commune, et c'était une assez bonne spéculation. Dans la caserne des Gardes Françaises, rue de Sèvres, lieu humide et malsain, on payait de 20 sous à 12 livres par jour. Sur une recette de 300 livres, la section avait à dépenser 62 livres : bénéfice net, 238 livres par jour ; et c'est en vue de cette opération financière qu'elle s'était agrandie, louant la maison des Oiseaux, qui lui coûtait, selon un autre récit, 2400 livres de loyer, et lui en rapportait 150.000[33].

La section Lepelletier avait pour prison un hôtel. Dans les derniers mois de 1793, le marquis de Talaru, dont l'hôtel était voisin de la Bibliothèque nationale, l'avait loué au restaurateur Gence, pour occuper tout à côté une habitation plus modeste. Gence songeait à en faire une maison garnie ; mais réfléchissant qu'il n'arrivait plus d'étrangers dans Paris, il craignit d'avoir fait une mauvaise affaire ; et, comme d'autre part, il y avait beaucoup de suspects à loger, il offrit au comité révolutionnaire de la section Lepelletier de lui repasser son bail pour cet usage patriotique. De mauvaise l'affaire devint excellente, non pour le propriétaire, qui, à son grand regret, y rentra comme locataire : il l'avait loué 7000 livres ; il y paya une petite chambre 18 livres par jour, 6570 livres par an : il est vrai qu'il n'y resta pas toute l'année ! Mais l'affaire fut bonne pour la section : J'ai été, moi huitième, dit l'auteur du récit, logé dans un beau salon, au rez-de-chaussée, donnant sur un jardin. Nous y payions chacun 4 francs de loyer par jour. Ainsi ce salon rapportait 320 livres de loyer par décade, 960 livres par mois ; 11.520 livres par an : et tout l'hôtel était loué par son propriétaire 7.000 livres ! Que devenaient ces loyers concussionnaires et entre qui se partageait le gâteau ? Je n'ai jamais été du secret, dit notre détenu, et je ne puis vous en rien dire[34].

L'État lui-même, ou du moins ses agents, tiraient de ces prisons un assez joli bénéfice. A la Force, une chambre de quatorze pieds en carré contenait huit personnes et était louée 22 livres par mois par chaque prisonnier : Ô criminelle administration ! s'écrie un des députés incarcérés, elle faisait payer de location 22 livres par mois à chaque prisonnier à qui elle ne fournissait que le toit, propriété nationale ; et de cette manière sur huit mille prisonniers y a eu dans Paris, c'était une recette de 176.000 livres qui entrait tous les mois dans les caisses de l'administration, elle qui mettait la dépense au compte du Trésor public[35]. — A la Conciergerie, un lit de sangle se payait, selon un de nos auteurs, 25 livres par mois ; et il fallait avoir un lit de sangle si l'on ne voulait, jeté sur la paille, être exposé aux rats et aux souris qui venaient dévorer jusqu'aux souliers que l'on avait aux pieds[36]. — Il y a, dit un autre habitant du même lieu, autant de lits dans une chambre qu'elle en peut contenir. On payait d'abord pour un lit 27 livres 12 sous le premier mois et 22 livres 10 sous les mois suivants. On a réduit ce loyer à 15 livres par mois. Mais c'était 15 livres par nuit quand le nouvel arrivant n'y demeurait pas davantage : Dans les derniers temps de la tyrannie da Robespierre, lorsque le tribunal envoyait les victimes à la mort, par charretées, quarante ou cinquante lits étaient occupés tous les jours par de nouveaux hôtes qui payaient 15 livres pour une nuit, ce qui donnait par mois un produit de 18 à 22.000 livres. Aussi, ajoute-t-il, la Conciergerie est-elle le premier hôtel garni de Paris, quant au produit[37].

 

 

 



[1] Je demande au lecteur la permission de lui rappeler que ces deux études ont paru dans le Correspondant du 25 décembre 1871, 10 février, 10 mars, 10 juillet et 25 août 1872. Elles étaient composées avant les désastres de la dernière guerre et ces scènes lugubres de l'insurrection qui, un moment, leur ont donné un intérêt tout actuel. Je les publie telles qu'elles étaient écrites, en y ajoutant toutefois les résultats des recherches que j'ai pu faire depuis aux Archives nationales et aux archives de la Préfecture de police.

[2] Baudouin frères, libraires-éditeurs. Paris, 1823.

[3] Notices historiques sur la Révolution. 2 vol. in-8° ; dans la Collection des mémoires sur la Révolution française. Paris, 1821. — M. Dauban en a donné une nouvelle édition plus complète (Paris, 1864) en y restituant le titre, Appel à l'impartiale postérité, que madame Roland leur avait donné.

[4] Paris, 1801. 6 vol. in-8°.

[5] Paris, 1820. 1 vol. in-8°.

[6] Le couvent des Carmes et le séminaire Saint-Sulpice pendant la Terreur, par Alexandre Sorel. Paris, Didier, 1864. 1 vol. in-12.

[7] Depuis que ceci a été écrit, l'ouvrage de M. Dauban a paru sous ce titre : Les Prisons de Paris sous la Révolution, d'après les relations des contemporains, avec des notes et une introduction. Paris, 1870. 1 vol. in-8°. J'y ai vainement cherché ces pièces d'archives que j'en attendais. L'auteur s'est borné à reproduire, dans leur teneur ou par extrait, les récits déjà. publiés dans les recueils que je viens de citer. Mais cette reproduction dans un même volume est commode, et les notices que M. Dauban y a jointes doivent faire rechercher cette publication. Je regret te pourtant que l'auteur n'y ait pas donné, comme M. Sorel l'a fait pour les Carmes, un aperçu des livres d'écrou qu'il a eus entre les mains : c'est là le fond de toute histoire d'une prison ; et il le pouvait faire puisqu'il a été admis à consulter les archives de la Préfecture de police, faveur que j'avais sollicitée en vain sous l'Empire et que j'ai obtenue depuis, mais quand les torches de la Commune avaient déjà. passé par là. Les pièces les plus précieuses, celles qu'on avait mises à part pour les soustraire aux Prussiens, ont péri, dévorées les premières par cet autre fléau dont on n'avait pas pu se défier : par exemple, les écrous des prisons aux journées de septembre ; le registre d'écrou de la Conciergerie pour le tribunal révolutionnaire et plusieurs autres. Néanmoins on y trouve encore les registres d'écrou de Bicêtre, de la Force, de Sainte-Pélagie, de l'Abbaye, de Saint-Lazare et du Luxembourg, ainsi que ceux des maisons Belhomme et La Chapelle. Les registres de Bicêtre nous donnent toute la période révolutionnaire dans un premier registre qui va du 31 décembre 1777 au 30 juillet 1793, et un second du 31 juillet 1793 au 15 thermidor an II. La Force a un premier registre du 2 janvier 1793 au 12 octobre de la même année, dont les feuillets sont divisés deux à deux ,en onze colonnes sous ces titres :. noms des commissaires qui ont ordonné l'arrestation, — leur section, — date des procès-verbaux, —noms des prisonniers, — signalement, — date de leur entrée, — motif de leur arrestation, — transfèrement, — sortie par jugement, etc., — observations tendant à informer jour par jour des événements qui se sont passés dans la prison et de la conduite des guichetiers... Le second registre, composé de trois cent dix feuillets, est un ancien registre destiné aux détenus pour dettes civiles avant 1789, et repris pour continuer le premier, du 13 octobre 1793 au 30 thermidor an II. Le registre de l'Abbaye contient cinq cent cinq feuilles, cotées et paraphées le 25 janvier 1793, en onze colonnes sur deux feuillets, comme à la Force. Il commence le 29 janvier et finit au 16 prairial sans être arrêté. Celui de Sainte-Pélagie a cinq cent sept feuilles cotées et paraphées à la même date que celui de l'Abbaye (25 janvier 1793). Il va jusqu'au 12 floréal, au folio 239, et recommence au folio 240 par un écrou du 22 frimaire an III. On l'avait délaissé en floréal pour le remplacer par un registre plus ample dont les feuilles, pliées en deux, offrent plus d'espace aux onze colonnes réglementaires. Ce registre comprenant la mention des prisonniers écroués dans l'intervalle marqué plus haut, a été conservé. Il n'en a pas été de même pour Saint-Lazare. On a pour cette prison un premier registre .de petite dimension et sans colonnes, contenant huit cent soixante-quinze écrous numérotés, du 29 nivôse an II au 25 ventôse. Il est clos à cette date par l'administrateur de police Gagnant, bien que le quart à peine en ait été employé. C'est qu'à cette date on avait adopté un de ces registres aux feuilles plus larges que hautes. Ce registre, comme plusieurs autres de même forme, notamment celui des Carmes, a péri dans les flammes de la Commune. Le registre d'écrou de la maison de santé du citoyen Belhomme, rue de Charonne, va du 25 frimaire au 19 pluviôse an III, et contient environ cent soixante-quinze noms ; celui de la maison de santé du citoyen La Chapelle, sise rue Folie-Renault, n° 3, va du 22 nivôse au 7 thermidor et contient soixante-dix-huit noms. — Je les recommande à M. Dauban pour une prochaine édition de son ouvrage.

[8] Moniteur du 16 novembre 1792, p. 1363.

[9] Du 14 décembre. Moniteur du 19, p. 1504. Il fallut l'arrestation d'un révolutionnaire (Desfieux), arrestation rapportée à une erreur, pour qu'un peu plus tard le procureur de la Commune requît et obtînt du Conseil général que les motifs de l'arrestation fussent toujours inscrits sur l'écrou des prisonniers (24 du 1er mois de l'an II. Moniteur du 26, p. 103).

[10] Moniteur du 10 juin 1793, p. 696. L'État des prisonniers à Paris, communiqué dans la séance du 14 juin, n'est que de neuf cent cinquante-huit (Moniteur du 16, p. 720). Probablement on n'y compte pas Bicêtre. Le 1er août il est de 1417, y compris Bicêtre : Conciergerie 294 ; Grande Force, 329 ; Petite Force, 142 ; Sainte-Pélagie, 118 ; Madelonnettes, 104 ; Abbaye, 78 ; Bicêtre 232 ; Salpêtrière, 66 ; Chambre d'arrêt de la mairie, 54. (Moniteur du 1er août.)

[11] Schmidt, t. II, p. 39.

[12] Il y en avait, il faut le dire, jusque dans les bureaux du ministre de l'intérieur. Voici à ce propos une curieuse révélation de Perrière, un des observateurs de la police, à la date du 14 septembre an II (1793).

Je ne puis, citoyen ministre, vous celer des propos contre-révolutionnaires que j'ai entendus dans l'un de vos bureaux, quoique je les aie entendus ou plutôt précisément parce que je les ai entendus là. On y parlait avec haine de la Convention comme n'ayant fait que du mal ; on l'accusait de vouloir se perpétuer, et comme on ne pouvait récuser le témoignage de tant de communes qui s'accordent à demander la prolongation de sa session jusqu'à la fin des troubles et des dangers, on taxait Robespierre de s'être réjoui, aux Jacobins, de cette disposition du peuple, comme un ambitieux et un homme avide, qui ne cherche qu'à dominer et à s'enrichir. En vain je prétendais que, quoique la Convention ne possédât peut-être pas toutes les qualités qu'exigent les circonstances actuelles, il était cependant de l'intérêt .de la France de la maintenir, parce que dans une nouvelle élection l'aristocratie pouvait s'agiter encore... ; j'avais beau parler : c'était la Convention qui avait fait tout le mal, il fallait la chasser. En vain je faisais observer que la Convention n'avait pris des mesures vigoureuses que depuis l'anéantissement du Marais, et que c'était à l'activité de la Montagne et des Jacobins que nous devions notre salut. Ces Messieurs, sous prétexte d'impartialité, rejetaient avec mépris ces dénominations : ils n'étaient d'aucun parti.... (Schmidt, Tableaux de la Révolution française, t. II, p. 119.)

[13] Comités créés sur la proposition de Jean de Bry (21 mars 1793) pour surveiller les étrangers et qui devinrent les agents les plus terribles du Comité de salut public, sous le nom de comités révolutionnaires. (Moniteur du samedi 23 mars 1793.) Les sociétés d'où ils étaient généralement tirés recevaient de larges subventions sur les fonds secrets du Comité du salut public, à commencer par la société mère des Jacobins de Paris. En voici la preuve tirée des actes du Comité :

Le Comité de salut public, considérant que les sociétés populaires sont les foyers de la Révolution républicaine, les propagateurs lointains de l'esprit public, les défenseurs infatigables de la liberté et de l'égalité ; considérant que c'est de la Société populaire séante aux Jacobins de Paris que sont parties les premières impressions révolutionnaires, que c'est de ce centre d'opinions qu'à diverses époques de la Révolution l'esprit public a été remonté, soutenu et propagé par des correspondances énergiques et multipliées de cette société devenue nécessaire à l'affermissement de la liberté ;

Vu l'état des dettes de cette société pour frais d'impressions, correspondances, constructions et autres dépenses ; arrête qu'il sera donné à la société des amis de la liberté et de l'égalité séant aux cy devant Jacobins de Paris la somme de cent mille livres à prendre sur les 50 millions mis à la disposition du Comité pour survenir à ses divers besoins et la mettre plus à portée de servir la République et les progrès de la Révolution.

L'état des dépenses cy annexé demeurera attaché au registre des arrêtes du comité du Salut public.

25 brumaire an II,

Signé : Billaud-Varenne, Barère, C. A. Prieur, Carnot, Robespierre.

Archives nationales, AF n, 66 : [ancienne cote : 1, 3e dossier, carton 138.] Des subventions analogues (toute proportion gardée) furent allouées aux sociétés populaires de Grenoble, de Lorient, de la Rochelle, etc. (ibid. 5, 6 et 8.)

[14] Moniteur du 19 septembre 1793, p. 4.

[15] Beaulieu, Essais, t. V, p. 276 ; cf. Dauban, la Démagogie en 1793 à Paris, p. 456. — Le conseil général de Paris arrêta le 16 octobre que tout marchand, établi depuis un an, qui quitterait le commerce, serait réputé suspect et arrêté comme tel.

[16] Moniteur du 15 frimaire (5 décembre 1793).

[17] Histoire des prisons, t. IV, p. 249. Le fait est raconté dans un lettre anonyme qui fait partie des Papiers trouvés chez Robespierre, publiés par Courtois, n° XXXI et XXXII, p. 145.

[18] Histoire des prisons, t. IV, p. 247.

[19] Histoire des prisons, t. IV, p. 274. — Sur ce titre de la République, voici une autre forme donnée par un commandant da détachement de l'armée révolutionnaire :

Ge certiffi mois commandans du de ta Chemant de Larme Rel volusionner avec la Commemune danel avoir fait Lavizite de ameson du citoyen Laferte e navoir Rien trouve che luis qui soit contre lais loy nis contre Le bien publique fait a nel ce II frimer de la Republique nulle en divizible.

BALLANDIER,

Commandans du de ta Chemant.

(W 409, dossier 941 [première fournée du Luxembourg], pièce n°33.)

[20] Mémoires sur les prisons, t. II, p. 208 ; Histoire des prisons, t. III, p. 88 ; t. IV, p. 270.

[21] Voyez Dulaure, Histoire de Paris, et Barthélemy Maurice, Histoire des prisons de la Seine, ouvrage très-superficiel d'ailleurs et très-insuffisant.

[22] Sainte-Pélagie avait été fondée, vers la fin du dix-septième siècle, par Marie Bonneau, veuve du sieur Beauharnais de Miramion, dans des dépendances de l'hospice de la Pitié, dont elle n'est séparée aujourd'hui que par une rue (rue du Battoir). Les bâtiments de l'ancien couvent subsistent dans la maison fort agrandie depuis la Restauration. — Les Madelonnettes avaient été établies, dès le règne de Louis XIII, rue des Fontaines (quartier du Temple). En 1629, on y avait mis, pour gouverner la maison, quatre religieuses de la Visitation. On y comptait trois classes de femmes : 1° les filles détenues, portant l'habit séculier ; 2° les filles éprouvées par la pénitence, formant la congrégation et portant habit gris ; 3° les filles ayant fait preuve de conversion sincère et admises à prononcer des vœux (voyez Dulaure, Histoire de Paris, t. V, p. 364). Cette prison a été récemment démolie pour l'ouverture de la rue Turbigo, et remplacée par la grande prison Mie rue de la Santé.

[23] Mémoires sur les prisons, t. II, p. 492.

[24] Mémoires sur les prisons, t. II, p. 94-95.

[25] Essais historiques sur les causes et les effets de la Révolution française, t. V, p. 285.

[26] Lasource y fut écroué le 10 août et y demeura, vu son état de maladie, jusqu'au jour de sa condamnation. Ibid., folio 3.

[27] Les cartons des archives de la Préfecture de police (Arrestations) contiennent un grand nombre demandais d'arrêt contre eux, à dater du 19 vendémiaire.

[28] Registre d'écrou du Luxembourg. Archives de la Préfecture de police. Un peu après on y voit écrouer encore le 25 du 1er mois (vendémiaire) Bose ; le 30, la nommée Crussol d'Amboise ; le 1er du 2e mois, le citoyen Noailles-Mouchy et sa femme, le 15 Dharcourt ci-devant marquis, etc.

[29] Essais historiques sur les causes et les effets de la Révolution française, t. V, p. 285.

[30] Histoire des prisons, t. III, p. 89.

[31] Mémoires sur les prisons, t. II, p. 187-188.

[32] Il coûta 240 francs ans détenus de Port-Libre. (Mémoires sur les prisons, t. II, p. 4.)

[33] Mémoires sur les prisons, t. I, p. 216. Cf. t. II, p. 187.

[34] Histoire des prisons, t. III, p. 90.

[35] Histoire des prisons, t. I, p. 160.

[36] L'Humanité méconnue dans les Mémoires sur les prisons, t. I, p. 157.

[37] Histoire des prisons, t. II, p. 16 ; cf. Beaulieu, Essais, etc., p. 290.