1638. — Prise de Verceil par les Espagnole. — Préparatifs faits par le prince de Condé pour entrer en Espagne. — Succès du duc de Weimar en Alsace. De St Germain, ce 29 janvier 1638. Je vous envoye les deux lettres de Pujols auxquels il ny a pas grand chose[1], je vous atandroy demain a lheure que vous me mandés, La Reyne se porte bien grâces au bon Dieu[2]. Je men vas a la chasse a 3 lieues dicy, je me porte bien. LOUIS. — (Ibid., fol. 260.) — (Original.) De St Germain, ce 19 avril a une heure après midy, 1638. Je vous envoye la lettre de Castagneda par laquelle je voy le mauvois estat ou sont les affaires de l'Empereur, il ne faut pas perdre locasion de faire quelque chose cette anée pour esayier a avoir une bonne paix cet iver, si vous veniés demain diner a Ruel[3] je vous irois voir sur les 2 heures, si vous ne venés que au soir je vous iroy voir mercredy a la mesme heure, je vous prie que je sache ce que vous ferés demain à dix heures du matin. LOUIS. — (Ibid., fol. 261.) — (Original.) De St Germain, ce 8 juin 1638. Jay parlé a lambassadeur de Savoye selon vostre mémoire. Vous trouverés dans ce paquet les lettres que ma aportées le conte de Cameran et une que lambassadeur me vient de donner sur la faire de Verseil[4], envoyiés moi ce soir la réponce que il faut faire aux lettres de ma sœur par le conte de Cameran lequel est présé de partir[5]. LOUIS. — (Ibid., fol. 262.) — (Original.) De Bondoufle, ce 18 juin 1638[6]. Je suis très aise des nouvelles que Quérabin a apportées[7] jespère que ils secoureront Verceil[8]. Je trouve bon que Gasion soit maréchal de camp a la condition que vous me mandez de son régiment[9]. Il est a propos que vous envoyiés un des vostres a M. le prince pour le preser d'agir comme vous me le mandés[10]. Je trouve bon que Premarcon ne serve pas avec M. le prince. Je feroy bone chere a mon frère, je vous escrit ce billet dans le bois avant que mon frère soit venu. — LOUIS. — (Ibid., fol. 263.) — (Original.) De St Germain, ce 5 octobre 1638. Je suis extresmement fasché de laccès de fiebvre que vous avés eu[11], si il vous reprend encor un accès jiroy vous voir autrement je nauroy point de repos. M. Bouvard est alé ce matin à Paris si il a aprend que vous soyiés trouvé mal il ne manquera pas vous aler voir et me reportera de vos nouvelles ce soir lesquelles jatandroy avec impatiance. LOUIS. — (Ibid., fol. 266.) — (Original.) De Versailles, ce 7 octobre[12] 1638. Je resens ier une grande joye quand japris par Nogent que vous naviés point eu de fiebvre, jenvoye ce gentilhôme pour savoir comant vous aurés passé la nuit, je pansois aler aujourduy vous voir, mais Nogent me dist que peut estre vienderiés vous aujourduy a Ruel si vous vous portiés bien cette nuit, ce qui men a empesché, je prie le bon Dieu de tout mon cœur quel vous redonne la santé parfaite. LOUIS. — (Ibid., fol. 267.) — (Original.). De Versailles, ce 8 octobre 1638. Jenvoye ce gentilôme pour savoir côme vous aurés passé cette nuit atandant que jaille moy mesme après dîner vous voir, je suis extresmement faché du deplesir que vous me témoignés resevoir de la mort de M. de Lesclos[13] que vous me mandés estre corne asurée, je vous puis aseurer que je prendroy toujours autant de part a tout ce qui vous touchera côme si cestoit a moy mesme. LOUIS. — (Ibid., fol. 268.) — (Original.) De St Germain, ce 23 octobre 1638. Je vous avois mandé ier par celuy que vous maviés envoyié que jirois aujourduy a Ruel mais puisque vous désirés venir icy je vous atandroy tout aujourduy et ne monteroy point a cheval. LOUIS. — (Ibid., fol. 270.) — (Original.) De St Germain, ce 27 octobre 1638. Je prie Dieu que les nouvelles que vous mandés soient véritables[14], je men vas coucher a Versailles et fais estat de vous aler voir lundy a Ruel. LOUIS. — (Ibid., fol. 271.) — (Original.) De St Germain, ce 3 novembre 1638. Mon mal de main dure encore et est plus enflé quil nestoit ier et me fait un peu plus de mal parce que jay travaillé aujourduy a la chasse ou jay eu très grand pleur, jay bien apris des choses que je vous diroy a la première vue, e vous done le bonsoir. LOUIS. — (Ibid., fol. 272.) — (Original.) De Villeroy, ce 14 janvier 1639. Petit mest venu trouver de la part de la Reyne pour me dire que madame la Contesse lestoit venu trouver pour la prier que les fiansailles Daneri et Vieux pont se fissent en sa présance, luy ay fait réponce que Aneri ne me voyant point elle ne devoit faire faire ses fiansailles ches elle ny voir Anery mais que elle pouvoit bien signer le contrat et que les fiansailles se fisent a Paris chés madame la Contesse[15]. LOUIS. — (Ibid., fol. 274.) (Original.) De St Germain, ce 27 janvier 1639. Jay dépesché au conte de Lanoy dès ausitost que jay.reseu vostre mémoire, il seroit bon de renvoyier promtement Doisy au pont de Remy mon opinion est que ils entreprendront plus tost sur Rue, pont de Remy ou Pequigny que sur Montreuil ou Abbeville il seroit bon de donner avis a M. de Chaumes de faire prendre garde a Pequigny. LOUIS. — (Ibid., fol. 275.) — (Original.) De St Germain, ce 26 novembre 1639. Je vous remercie du soing que vous prenez denvoyer savoir de mes nouvelles, je me suis un peu trouvé mal cette nuit ce qui ma contraint de prendre ce matin un petit remède peut-être prendrai-je médecine ce soir, vous verrez par le certificat que je vous envoye en quel état est le raccommodement que vous fistes ier[16], quand vous vous êtes mêlé dune afaire elle ne peut mal aller, je vous donne le bon jour. — LOUIS. — (Bibliothèque nationale, Fonds Baluze, armoire V, paquet IV, n° 2, folios 47 et 50.) — (Copie.) — (Cousin, Mme de Hautefort, p. 47 et 48.) — (Avenel, Papiers de Richelieu, t. VI, p. 644.) De St Germain, ce 20 décembre 1639. Jenvoye ce gentillome exprès pour savoir de vos nouvelles ayant esté toujours en peine de vous depuis ier que vous partites dicy, je prie le bon Dieu quil men raporte de telles que je les desire, je men vas a Versailles pour y estre jusques a vandredy que je reviendroy icy. LOUIS. — (Arch. des aff. étrang., France, t. V, fol. 277.) — (Original.) |
[1] Ce Pujols était un agent français en Espagne. Les deux lettres dont parle Louis XIII étaient datées du 17 et du 18 décembre. Richelieu répondit le même jour à son agent. (V. Papiers de Richelieu, t. VII, p. 1029.)
[2] On sait qu'à cette époque Anne d'Autriche était déjà enceinte de Louis XIV.
[3] Richelieu était à Paris et logeait à l'Arsenal. Le 19, il alla visiter la duchesse de Rohan, à l'occasion de la perte qu'elle venait de faire de son mari, mort, en Suisse, des suites des blessures qu'il avait reçues à la bataille de Rhinfeld, le 28 février précédent. Le duc était âgé de cinquante-huit ans.
[4] Les Espagnols avaient mis le siège devant Verceil le 27 mai précédent.
[5] La duchesse de Savoie avait envoyé ce gentilhomme en France pour complimenter Anne d'Autriche à l'occasion de sa grossesse.
[6] Cette lettre est écrite au crayon.
[7] Le 7, le cardinal de la Valette écrivait à Richelieu qu'il envoyait le sieur de Quérabin à Paris, avec un exemplaire du traité que la duchesse de Savoie venait de signer, le 3 juin, avec exemplaire français. Par ce traité, la Savoie s'alliait de nouveau à la France pour combattre les Espagnols. (V. Arch. des aff. étrang., Turin, t. XXVI, fol. 121.)
[8] En apprenant le siège de Verceil, la duchesse de Savoie avait rassemblé ses troupes et prévenu le cardinal de la Valette qu'il eût à se réunir à elle avec le corps d'armée qu'il commandait en Italie. Le cardinal lui amena, selon la Gazette, treize à quatorze mille hommes de pied et cinq à six mille chevaux. (Gazette du 25 Juin.) Mais cet effort fut inutile. Quoique le général français fût parvenu à jeter dans la place un secours d'hommes et de vivres, elle se rendit le 5 juillet aux Espagnols.
[9] Gassion prêta serment, comme maréchal de camp, entre les mains du roi, à Rueil, le 23 juin.
[10] Richelieu écrivit au prince de Condé le 20 juin. (V. Papiers de Richelieu, t. VI, p. 55.) Le prince se préparait à prendre l'offensive sur la frontière espagnole. L'armée française, placée sous ses ordres, entra le 30 juin en Espagne et alla mettre le siège devant Fontarabie le 8 juillet. Deux mois après, le 7 septembre, le prince de Condé, qui, pendant tout ce temps, aval. agi sans énergie, était battu devant la ville qu'il assiégeait toujours inutilement, par une armée espagnole qui le forçait de rentrer en France précipitamment.
[11] Richelieu était malade, à Paris, depuis le 2 octobre. Il resta dans cette ville jusqu'au 7 juin, jour où il retourna à Rueil.
[12] Louis XIII avait quitté Saint-Germain le même jour.
[13] Ce d'Esclos ou Lesclos était le confesseur de Richelieu, qui l'avait fait prieur de Sainte-Gemme, dans son gouvernement de Brouage. Il était mort la veille, 7 octobre, à Paris.
[14] Probablement des nouvelles de l'armée du duc de Weimar, qui venait de battre le duc Charles de Lorraine, le 15 octobre, près de Cornier. Dans ce combat, que raconte la Gazette du 2 novembre, les Français n'eurent que cent cinquante hommes tués et cinquante blessés, tandis que le duc Charles laissa sur la place mille à douze cents hommes. Ces chiffres sont ceux de la Gazette. Vers le môme temps, le due de Weimar avait enlevé un des forts de Brissac, qu'il assiégeait, et rompu un pont sur le Rhin. La ville ne fut prise que le 19 décembre suivant, et non le 17 septembre, comme l'a imprimé M. Avenel (t. VII, p. 208), pour expliquer une lettre de félicitations de Richelieu, au duc de Weimar, au sujet de cet événement. La date de cette lettre aurait dû lui montrer son erreur, du reste, puisqu'elle fut écrite le 6 janvier 1639. Depuis le mois de septembre, le cardinal avait écrit souvent au duc, et l'eût félicité plus tôt si Brissac avait été pris à cette époque.
[15] Cet Annery, gentilhomme picard, et mademoiselle de Vieuxpont, fille d'honneur de la reine, avaient tous deux été mêlés aux intrigues intéressées que la liaison de Louis XIII avec mademoiselle de la Fayette avait fait naître. Cela explique l'éloignement que parait ressentir le roi au sujet de ces deux personnes.
[16] Ce certificat fait suite à la lettre de Louis XIII ; le voici :
Nous, ci-dessous signés, certifions à qui il appartiendra estre très-contents et satisfaicts l'un de l'autre et n'avoir jamais esté en sy parfaicte intelligence que nous sommes à présent. En foy de qnoy nous avons signé le présent certificat. Palet à St Germain, ce 26 novembre 1639. — LOUIS. — Et par mon commandement, — Effiat de Cinq-Mars.
Tout ceci fait allusion à une de ces brouilleries entre Louis XIII et le grand écuyer que le caractère volage de celui-ci amenait fréquemment et que Richelieu qui, à cette époque, croyait encore au dévouement de Cinq-Mars à son égard, était toujours chargé de terminer, soit par le roi, soit par le ,jeune favori lui-même.