Le Bon Chevalier se tire avec honneur d'une embuscade. - Il en découvre une seconde et prend loyalement sa revanche. 1509.La garnison allemande de Vicence, dans l'impuissance de garder cette place contre les troupes de la République, ne tarda pas à se réfugier dans Vérone. Enhardie par leur retraite, l'armée vénitienne s'avança jusqu'à San-Bonifacio, à onze milles de cette dernière ville, où elle comptait de nombreux partisans. L'hiver commençait à devenir rigoureux, et les fourrages de plus en plus rares dans Vérone ; la garnison était obligée de les aller chercher au loin, et il n'était pas de jour que les ennemis ne lui enlevassent des hommes et des chevaux. On donna des escortes aux fourrageurs, et les rencontres n'en devinrent que plus vives. Un capitaine vénitien, aussi rusé qu'entreprenant, nommé Jean-Paul Manfroni, fatiguait surtout les troupes allemandes et françaises, et venait à chaque instant faire des courses jusqu'aux portes de Vérone. Le Bon Chevalier résolut d'escorter lui-même les fourrageurs à leur première sortie, et de jouer à ce capitaine Manfroni quelque tour de vieille guerre. Mais l'exécution de son projet ne put être si secrète que le Vénitien n'en fût informé à point par un espion qu'il entretenait dans le logis même de Bayart. Un jeudi matin les fourrageurs partirent escortés par trente à quarante archers que commandait le brave lieutenant Pierrepont, et s'écartèrent, comme d'ordinaire, dans la campagne pour faire leurs provisions. Le Bon Chevalier, se croyant maître de son secret, s'était allé poster avec cent hommes d'armes, dans un village nommé San-Martino, à six milles de Vérone, sur la grande route. Ses coureurs n'allèrent pas bien loin sans découvrir environ cinq cents cavaliers ennemis qui marchaient sur les fourrageurs. Le Bon Chevalier, tout joyeux et sans regarder au nombre, fit monter sa troupe à cheval, et s'avança à leur rencontre. Il les eut bientôt rejoints, et se mit en devoir de les charger ; mais les Vénitiens ne l'attendirent pas, et s'enfuirent devant lui en tirant sur la gauche de la route. Parvenus à une certaine distance, soudain ils s'arrêtèrent, et tinrent ferme aux cris de Marco ! Marco ! Six cents hommes de pied, armés de piques et d'arquebuses, sortent à ce signal des ruines d'un ancien palais, et les Français sont assaillis par un feu terrible. Bien averti par son espion, Manfroni les avait placés là de grand matin, et comptait, avec tant de monde, avoir bon marché du capitaine Bayart. A la première décharge des ennemis, son cheval fut tué, et le Bon Chevalier fit une chute si malheureuse, qu'il se trouva une jambe prise dessous sans pouvoir la retirer. Ses hommes d'armes qui, pour mourir, ne l'eussent abandonné, chargèrent en désespérés les ennemis, pendant que l'un d'eux, nommé Grandmont, s'efforçait de dégager son capitaine. Accablé par le nombre, il ne put l'arracher de leurs mains, et il allait partager son sort. Mais au bruit du combat, le capitaine Pierrepont, laissant ses fourrageurs, arrivait à bride abattue ; on emmenait déjà hors de la mêlée les deux prisonniers, lorsque l'intrépide neveu[1] de Bayart, reconnaissant son oncle au milieu des ennemis, chargea avec tant de furie sur ceux qui le retenaient, qu'il les força de lâcher prise, et de se rabattre en désordre sur leur troupe. Le Bon Chevalier, remonté, courut au secours de ses gens qui étaient vivement pressés en tête et en queue. A la vue de leur capitaine et de Pierrepont, ils reprirent courage ; cependant les Vénitiens étaient quatre contre un, sans compter l'avantage de leurs arquebuses, et les Français auraient fini par succomber dans ce combat trop inégal. Pierrepont, dit le Bon
Chevalier, si nous ne gagnons le grand chemin, nous
resterons tous ici ; mais si nous y parvenons une fois, avec l'aide de Dieu,
nous leur échapperons. Là-dessus ils commencèrent à se retirer,
toujours en combattant, vers le grand chemin, où ils ne parvinrent qu'après
des efforts extraordinaires. Quand le Bon Chevalier et ses gens se trouvèrent
sur la route de Vérone, ils se formèrent en escadron carré, et battirent en
retraite au petit pas, se retournant de distance en distance, sans se laisser
serrer de trop près par la cavalerie ennemie. Mais ils avaient toujours en
flanc ces arquebusiers dont les décharges étaient si meurtrières, qu'à chaque
instant Bayart voyait quelqu'un de ses hommes d'armes démonté. Il se trouva
lui-même à terre une seconde fois. Les Vénitiens se précipitèrent, en foule
sur lui, mais il se défendit si bien à grands coups d'épée, qu'il donna le
temps à son guidon, le bâtard Du Fay, de le venir dégager et de le remettre
en selle. Les français continuèrent leur retraite en bon ordre, et se
retrouvèrent enfin à San-Martino, d'où ils étaient partis le matin, comptant
sur une meilleure, mais non sur une plus glorieuse journée. Manfroni, reconnaissant qu'ils étaient désormais à l'abri de ses arquebusiers, et qu'ils pouvaient être secourus de Vérone, fit sonner la retraite. Il reprit la route de San- Bonifacio en faisant défiler ses gens de pied devant lui ; mais rendus de lassitude et de fatigue après cinq heures de combat, ils refusèrent d'aller plus loin qu'à un petit village à quatre ou cinq milles de là. Jean-Paul Manfroni, voyant qu'ils ne l'écoutaient plus, poursuivit sou chemin avec ses hommes d'armes, le cœur plein de rage d'avoir échoué contre un si petit nombre de Français. Le Bon Chevalier et les siens, décidés à passer la nuit à San-Martino, firent honneur aux provisions qu'ils purent trouver, en se félicitant de s'être tirés d'un aussi grand péril sans qu'il leur en eût coûté qu'un seul archer et quelques chevaux, perte incroyable en comparaison de plus de cinquante hommes qu'ils avaient tués à l'ennemi. Dans ces entrefaites survint un espion qui arrivait de San-Bonifacio. Eh bien ! lui dit Bayart, que font là bas les ennemis ? — Je les ai laissés toujours en grand nombre, répondit-il, et se vantant d'entrer bientôt dans Vérone à la faveur de leurs intelligences. A mon départ est arrivé le capitaine Jean-Paul Manfroni bien fatigué et de fort mauvaise humeur ; je lui ai entendu dire qu'il avait eu affaire aujourd'hui, non à des hommes, mais à des diables incarnés. Puis, en continuant mon chemin, j'ai trouvé à quatre à cinq milles d'ici un village rempli de gens harassés de lassitude, et ne songeant qu'à se reposer et à dormir. — Sur ma foi ! s'écria Bayart, ce sont nos hommes ; mes amis, voici une belle occasion d'avoir notre revanche ! Faisons repaître nos chevaux, et nous irons au clair de la lune les réveiller. Il était certain de ne pas éprouver de refus ; chacun alla panser son cheval de son mieux, le guet fut placé, et nos Français prirent quelque repos. Quant au Bon Chevalier, la tête pleine de son projet, il ne dormit guère, et réveilla lui-même à trois heures ses gens qui montèrent sans bruit à cheval. Ils entrèrent dans le village où s'étaient arrêtés les arquebusiers de Manfroni, sans rencontrer âme qui vive, et firent soudain retentir les rues de leurs trompettes et de leurs cris de guerre. Ace fâcheux réveil- matin, il fallait voir les pauvres piétons sortir des maisons à moitié endormis, pour être assommés comme bêtes les uns après les autres. Leur capitaine parvint à en rassembler deux ou trois cents sur la place ; mais il n'eut pas le loisir de se mettre en défense, et ses gens, chargés de tous côtés, furent rompus et massacrés. On n'épargna que lui, et deux autres gentilshommes qui furent échangés quelques jours après contre autant de Français prisonniers de la République. Les Vénitiens, désolés de la perte de leurs troupes, s'en prirent à Jean-Paul Manfroni qui eut assez de peine à se justifier auprès du provéditeur André Criai, et qui jura que Bayart lui paierait ce nouvel affront. L'Italien ne tarda pas à mettre sa vengeance à exécution, et voici comment il s'y prit : il se servait d'un espion qui allait de lui à Bayart, jurait à chacun qu'il lui était uniquement dévoué, et tirait de l'argent de tous deux. Manfroni connaissait l'homme, et sur cela il lui dit un matin : Il faut que tu te rendes à Vérone et donnes à entendre au capitaine Bayart que, d'après les ordres de la seigneurie de Venise, je vais remplacer le gouverneur de Legnago, nommé au commandement des galères que la République envoie dans le Levant ; de plus, que tu sais de bonne part que je partirai demain au point du jour avec trois cents chevau-légers sans gens de pied. Le capitaine a le cœur trop bien placé pour ne pas venir me rendre visite au passage, et s'il y vient, ajouta imprudemment Manfroni, il n'en sortira, je l'espère, que mort ou prisonnier ; car je ferai embusquer à l'Isola della Scala deux mille hommes de pied et deux cents hommes d'armes des mains desquels il faudra qu'il se tire ; si tu t'acquittes bien de ma commission, je t'engage ma foi de te donner cent ducats d'or. Il n'y a guère loin d'un espion à un traître, et le galant assura Manfroni qu'il pouvait compter sur son savoir-faire, comme lui comptait sur son argent. Il se rendit le même jour à Vérone droit au logis de Bayart, dont tous les serviteurs le connaissaient pour un affidé de leur maître. Il fut introduit dans la salle où le Bon Chevalier achevait de souper, et en reçut meilleur accueil qu'il ne méritait. Sois le bienvenu, Vicentin ; tu ne viens pas sans doute pour rien ; quelles nouvelles ? — D'excellentes, Monseigneur, lui répondit l'autre en affectant un air mystérieux. Bayart se leva de table sur-le-champ, et tira à part l'espion pour savoir ce qu'il en était. Vicentin lui débita sa leçon avec tant de naïveté, que le
Bon Chevalier ne se pouvait contenir de joie. Il ordonna de faire souper
Vicentin et de le bien régaler, puis revint trouver les capitaines
Pierrepont, La Varenne, le bâtard Du Fay, et un capitaine du Hainaut nommé de
Sucker, qu'il traitait ce soir-là. Il leur conta de point en point ce qu'il
venait d'apprendre de l'espion, et leur dit que, s'ils étaient d'humeur à
l'accompagner, le lendemain ne s'achèverait pas sans
qu'il n'y eût de bons coups à férir. La partie se trouva fort de leur
goût ; ils en mirent Frédéric de Mailly, baron de Conti, qui de sa vie ne
leur eût pardonné de l'avoir oublié, et convinrent de partir au point du jour
avec deux cents hommes d'armes. On se sépara là-dessus de bonne heure, pour
être prêt de meilleur matin. Le hasard voulut que le seigneur de Sucker, dont le logis
était assez éloigné, aperçut chemin faisant le même homme qu'il venait de
voir chez Bayart, sortant d'une maison dont le maître était connu pour un
zélé partisan des Vénitiens. Sucker en conçut de l'ombrage, saisit rudement
l'individu au collet et lui demanda d'où il venait. L'espion interdit ne sut
que répondre, et son trouble augmenta les soupçons du capitaine qui le
ramena, sans le lâcher, au logis de Bayart. Le Bon Chevalier, sur le point de
se mettre au lit, revêtit à la hâte une robe de chambre, et vint s'asseoir
avec Sucker auprès du feu. Le capitaine lui conta le motif de son prompt
retour, et comment il avait trouvé son espion sortant de chez messire
Battista Volteggio, le plus grand marchesto[2] de tout Vérone. Cela m'a fait concevoir des soupçons, ajouta-t-il, et son trouble, quand je l'ai saisi, ne les a point
démentis. Au récit de Sucker, le Bon Chevalier, vivement ému, fit
amener sur-le-champ l'espion, et lui demanda ça qu'il était allé chercher au
logis de Battista Volteggio. Il répondit en premier lieu qu'il y était allé
voir un parent ; il allégua ensuite une autre raison, et finit par se contredire
cinq à six fois. On apporta des grésillons[3] pour le faire
expliquer plus clairement. Vicentin, lui
disait Bayart, avoue la vérité tout entière, et je
te promets, foi de gentilhomme, qu'il ne te sera point fait de mal, quand
bien même ma vie eût été menacée ; mais songe que si je te surprends en mensonge,
tu seras pendu et étranglé demain matin. L'espion, se voyant découvert, se jeta à deux genoux en demandant miséricorde, avoua de point en point toute sa trahison, et qu'il venait en effet de chez le seigneur Volteggio pour l'avertir de l'entreprise du capitaine Jean-Paul Manfroni, et aviser avec lui au moyen de livrer une des portes de la ville au provéditeur André Gritti ; mais que le gentilhomme véronais lui avait répondu qu'il n'entrerait dans aucune semblable machination, et resterait fidèle à l'Empereur dont il était le sujet. Lorsqu'il eut achevé ses révélations, le Bon Chevalier lui dit : Vicentin, j'ai bien mal employé les ducats que je t'ai donnés, cependant je ne t'aurais pas encore cru aussi scélérat. Tu as bien mérité la mort, mais puisque je t'ai promis la vie, je te ferai mettre hors de la ville sain et sauf ; prends garde toutefois d'y rentrer tant que j'y serai, car rien au monde ne te sauverait de la corde. Il ordonna ensuite de l'enfermer dans une chambre jusqu'à nouvel ordre. Mon ami, dit Bayart au
seigneur de Sucker, que ferons-nous pour rendre à ce
capitaine Manfroni le bon tour qu'il nous voulait jouer ? J'entrevois bien,
si vous pouvez me seconder, le moyen de prendre une revanche complète ?
— Vous n'avez qu'à commander, Monseigneur, lui
répondit le seigneur de Sucker, je suis prêt à vous
obéir. — Allez donc, je vous prie, de ce pas
chez le prince d'Anhalt, instruisez-le de la chose en détail, et tâchez
d'obtenir de lui pour demain matin deux mille de ses lansquenets. Nous les
mènerons avec nous, et les placerons dans quelque endroit où le Vénitien, à
son tour, verra s'il fera bon. Sucker se rendit incontinent au logis
du prince qui déjà était endormi. Il le fit réveiller, et lui répéta tout ce
que nous venons d'entendre. Le valeureux d'Anhalt honorait par-dessus tous
les gentilshommes français notre Bon Chevalier ; il répondit au seigneur de
Sucker qu'il n'avait plus, à son grand regret, le temps de se mettre de la
partie ; mais que tous ses gens étaient autant et plus à la disposition du
seigneur de Bayart qu'à la sienne propre. Son secrétaire courut avertir sur
l'heure les capitaines des lansquenets qui ne furent pas moins exacts au
point du jour que les gens d'armes. Quand le baron de Conti aperçut aux portes de la ville ces gens de pied, n'ayant rien su de l'aventure de la veille, il ne pouvait concevoir le motif de tout cet appareil. Le Bon Chevalier, chemin faisant, lui narra l'histoire. Sur ma foi ! dit le brave seigneur, en s'affermissant en selle, nous allons faire une bonne journée. Bayart laissa le capitaine Sucker avec les lansquenets dans un petit village nommé Zevio, à huit milles d'Isola della Scala, en lui promettant de lui amener les ennemis sous le nez, et de le mettre à même d'acquérir de l'honneur. Le baron de Conti et lui continuèrent de s'avancer vers Isola della Scala, comme s'ils ne se fussent doutés de rien. Ils ne tardèrent pas à découvrir en rase campagne le capitaine Manfroni médiocrement accompagné de quelques chevau-légers. Bayart envoya son guidon, le bâtard Du Fay, entamer l'action avec les archers, et le suivit de près à la tête de ses gens d'armes. Ils n'étaient plus qu'à un jet d'arc d'Isola, lorsqu'ils virent se précipiter hors des portes de la ville l'embuscade vénitienne, tambour battant, comme si elle eût couru à une victoire certaine. Pour mieux cacher son jeu, Bayait commanda aux trompettes de sonner à l'étendard. Le Bâtard avait sa leçon faite, et il obéit à ce signal en se repliant sur le gros de la troupe qui feignait elle-même de battre en retraite sur Vérone. Les Français se retirèrent ainsi en escarmouchant et au petit pas jusqu'à Zevio, où déjà Bayart avait envoyé au capitaine Sucker l'ordre de sortir en bataille. Les hommes d'armes vénitiens, soutenus à leurs ailes par les gens de pied, continuaient de charger avec confiance cette petite troupe qu'ils ne croyaient devoir leur échapper. Quelle fut leur surprise en découvrant une colonne de deux mille lansquenets qui croisaient sur eux au pas de charge ! Leurs gens de pied étaient trop avancés pour reculer, les gens d'armes ne les voulurent pas abandonner et firent bonne contenance. Messeigneurs, s'écria Bayait, à notre tour, chargeons ! Les ennemis soutinrent le choc bravement, mais non sans grande perte. Les lansquenets, de leur côté, tombèrent sur les gins de pied qui furent rompus et mis en pièces, sans qu'il en échappât un seul. Après d'inutiles efforts, Manfroni, témoin de sa défaite, reconnut qu'il n'avait plus d'autre ressource que la fuite, et se sauva au grand galop vers San-Bonifacio. Il fut poursuivi quelque temps, mais Bayart savait user avec prudence de la fortune ; il fit sonner la retraite, et rassembla ses gens qui, avec nombre de prisonniers, de chevaux et un butin considérable, reprirent la route de leur garnison. La perte des Vénitiens fut énorme ; outre leurs deux mille gens de pied dont il ne revint pas un seul, ils laissèrent sur le champ de bataille quarante hommes d'armes et plus de soixante prisonniers. On conçoit quelle réception firent à leurs compagnons les Français et les Allemands qui n'éprouvèrent d'autre regret que celui de n'avoir pas tous été de la partie. Cette journée fut d'autant plus glorieuse pour le Bon Chevalier que, tout en opposant la ruse à la ruse, il n'avait pas, à l'exemple de Manfroni, cherché à accabler ses ennemis sous le nombre, satisfait de les combattre à forces égales. De retour à son logis, il fit amener l'espion et lui dit :
Vicentin, selon ma promesse tu vas être conduit hors
de la ville ; retourne au camp des Vénitiens, et demande au capitaine Jean-Paul
Manfroni si le capitaine Bayart est aussi subtil en guerre que lui, et
dis-lui qu'au même enjeu il sera toujours à sa disposition. L'espion
n'y manqua pas, et se rendit droit à San-Bonifacio où, dès que Manfroni l'eut
aperçu, il le fit accrocher à un arbre, sans vouloir seulement l'écouter. Cet
exemple ne corrigea pas ses compatriotes et jamais armée n'a manqué en Italie
de cette espèce de gens. La rigueur de la saison vint ralentir la guerre ; André Gritti et Lucio Malvezzi se contentèrent de tenir Vérone en quelque façon bloquée et d'essayer de surprendre la garnison à la faveur des bonnes dispositions des habitants. Mais la vigilance de Bayart déjoua toutes leurs tentatives. Les Vénitiens, partis une nuit de San-Bonifacio, s'approchèrent du fort de San-Pietro, sur la hauteur de la ville, trouvèrent les Allemands endormis, et dressèrent des échelles contre les murailles. Mais tandis qu'ils les liaient ensemble pour suppléer à leur défaut de longueur, Bayart survint au bruit avec ses hommes d'armes, et les ennemis se sauvèrent en abandonnant leurs échelles. Il en coûta la vie à plusieurs Véronais convaincus d'avoir pris part à cette tentative, et Gritti et ses Vénitiens laissèrent enfin quelque repos aux Français. |
[1] Pierre du Pont, dit Pierrepont, gentilhomme savoisien, était fils de Marie Terrail, sœur de Bayart. (Voyez les Recherches généalogiques.)
[2] Partisan de Saint-Marc, c'est-à-dire de la république de Venise aussi appelée la république de Saint-Marc.
[3] Grésillons, grésilloux, espèce de menottes ou de manchettes de fer.