HISTOIRE LA TERREUR 1792-1794

NOTES, ÉCLAIRCISSEMENTS ET PIÈCES INÉDITES

 

II. — LES COMMISSAIRES DU POUVOIR EXÉCUTIF ET DE LA COMMUNE.

 

 

Les commissaires envoyés de Paris dans les départements, à la fin d'août et au commencement de septembre 1792, se divisent en trois catégories, qu'il importe de ne pas confondre : ceux de t'Assemblée nationale, ceux du pouvoir exécutif et ceux de la Commune de Paris.

Le 26 et le 28 août, l'Assemblée législative décréta :

1° Que trente mille hommes seraient levés, armés et équipés dans le département de Paris et les départements voisins ;

2° Que les commissaires précédemment envoyés par elle aux armées, aussitôt après le 10 août, cesseraient immédiatement leurs fonctions, afin que la marche du pouvoir exécutif ne pût être entravée par les pouvoirs illimités dont ils étaient revêtus ;

3° Que de nouveaux commissaires pris dans le sein de l'Assemblée, au nombre de douze, seraient nommés pour diriger les commissaires du pouvoir exécutif, chargés de presser la levée extraordinaire des trente mille hommes.

Dès le 29 août, les douze commissaires de l'Assemblée et les commissaires du pouvoir exécutif, au nombre de trente, se réunirent avec les ministres pour concerter la conduite des opérations qui leur étaient confiées[1].

Les douze commissaires de la Législative étaient :

Merlin, Legendre et Jean Debry, envoyés dans la Somme, l'Oise et l'Aisne[2] ;

Albitte et Lecointre, dans l'Eure, la Seine-Inférieure, le Calvados, Eure-et-Loir et Seine-et-Oise[3] ;

Gossuin, Duhem et Sallengros, à l'armée du Nord et dans les départements environnants[4] ;

Broussonet, Crublier d'Obterre, Beaupuy, à l'armée de Luckner, et dans les provinces de l'Est ;

Richard, dans l'Indre-et-Loire ;

Malgré toutes nos recherches nous n'avons pu établir la liste complète des trente commissaires du pouvoir exécutif ; nous avons seulement constaté que parmi eux se trouvaient :

Fréron, envoyé à Metz et dans les autres places fortes de la Moselle ;

Momoro, dans le Calvados et dans l'Eure ;

Mallet et Dubois, dans la Loire-Inférieure ;

Bonnemant, dans Rhône et Loire[5] ;

Parrain et Corchant, dans la Seine-Inférieure et dans l'Oise[6] ;

Clémence, dans les départements de l'Es[7] ;

Morin, dont nous n'avons pu retrouver l'itinéraire ; Chanderlos de Laclos, à l'armée de Luckner ;

Hion, Brochet et Gonord, à Châlons-sur-Marne et dans les départements environnants.

Les commissaires de la Commune de Paris furent nommés le 3 septembre, au moment même des massacres, en vertu d'une délibération ainsi conçue :

Le conseil général, voulant inviter les citoyens de tous les départements de l'empire à se réunir à leurs frères d'armes, qui sont disposés à mourir plutôt que de se laisser replonger dans l'esclavage ;

A arrêté que vingt-quatre commissaires seraient pris dans son sein pour engager les citoyens des départements à se réunir à l'armée parisienne, et à employer tous les moyens qui sont en leur pouvoir, pour repousser l'ennemi en conséquence, nomme les citoyens dont les noms suivent . . . . . . . . . . pour remplir la mission qui leur est déférée, et prie tous ses concitoyens des villes et des campagnes de leur porter secours à toute réquisition, et tout ce qui sera en leur pouvoir pour les aider dans leur mission.

 

Ce fut le fameux Hébert et deux autres de ses collègues moins connus, Darnaudry et Jolly, qui furent chargés de dresser la liste de ces vingt-quatre apôtres des doctrines maratistes. On pouvait s'en rapporter à eux. Le conseil exécutif provisoire, que Danton dominait par la terreur dans les jours néfastes de septembre, se hâta de régulariser les pouvoirs de ces commissaires par un arrêté que nous avons trouvé sur le registre de ses délibérations et qui est ainsi conçu ;

CONSEIL EXÉCUTIF PROVISOIRE.

Le conseil exécutif, voulant obvier à l'inconvénient résultant de ce que les volontaires affluent dans la ville de Châlons sans être munis d'armes et de subsistances, en sorte que le département a été forcé d'en renvoyer une grande partie dans leurs foyers, arrête que vingt-quatre commissaires, membres de la Commune de Paris seront envoyés dans les quatre-vingt-trois départements pour aller exciter de nouveau le zèle des citoyens et diriger le mouvement qui les porte vers la défense des frontières et de la capitale, et que ces commissaires se concerteront dans leur route avec ceux déjà envoyés dans seize départements environnant la capitale, et les préviendront de la nécessité de veiller à ce que les volontaires partant pour se rendre à Châlons soient tous armés, équipés, pourvus de munitions et suivis de chariots de subsistances pour autant de temps qu'il se pourra.

CLAVIÈRE, SERVAN, DANTON, MONGE, LEBRUN.

 

Nous avons pu retrouver les noms et la destination de ces vingt-quatre commissaires. C'étaient :

Huguenin et Michaut, pour les départements du Sud-Est ;

Soulès et Darnaudry, pour les départements du Sud-Ouest ;

Martin et Daujon, pour l'Yonne, la Haute-Marne et la Haute-Saône ;

Crosne et Laborie, pour l'armée du Rhin ;

Gobeau et Cellier, pour la Normandie ;

Xavier Audouin et Loiseau Grandmaison pour les Deux-Sèvres et la Vendée ;

Harou Romain et Sigaut, pour la Meurthe ;

Chartrey et Michel, pour Saône-et-Loire, Rhône-et-Loire et l'Ain ;

Legray et Janson, pour la Somme, le Pas-de-Calais et le Nord ;

Félix et Bodson, pour Eure-et-Loir, la Sarthe, Ille-et-Vilaine ;

Pâris fut adjoint à Fréron, pour la Moselle ;

Dufour à Momoro, pour le Calvados ;

Franchet à un sieur Morin, pour une destination dont nous n'avons pu retrouver la trace ;

Enfin, Billaud-Varennes fut envoyé au camp de Chatons.

De toutes ces missions, la plus importante était celle qui fut confiée à ce dernier[8]. Aussi reçut-il des pouvoirs spéciaux extraordinaires et du conseil général de la Commune et du pouvoir exécutif.

En voici la teneur :

4 septembre 1792.

Le conseil exécutif arrête que M. Billaud-Varennes, l'un des membres de la municipalité provisoire, sera envoyé en qualité de commissaire du pouvoir exécutif à Châlons, à l'effet d'y annoncer l'arrivée des soldats citoyens de la capitale, d'observer les dispositions faites pour l'établissement de l'armée qui doit s'y assembler sous les ordres du maréchal Luckner, d'alimenter te civisme et l'amour de la liberté qui conduit les troupes à la défense de la liberté et de' l'égalité, de correspondre avec le conseil exécutif, et de l'informer régulièrement de tous les résultats de ses observations, et généralement d'y employer son zèle et ses talents à tous les objets d'utilité publique.

 

5 septembre au matin.

Le conseil général, conformément à son arrêté qui nomme vingt-quatre commissaires pour se rendre dans les différents départements, afin de pourvoir à tout ce qui intéresse le salut public, délègue à M. Billaud-Varennes, substitut du procureur de la Commune, tous les pouvoirs dont il croira avoir besoin, et avoue tout ce que sa sagesse lui dictera dans l'importante mission dont il est chargé.

 

Les autres municipaux reçurent également une commission du pouvoir exécutif et un passeport de la Commune.

La commission était ainsi conçue :

Commission pour le citoyen Soulès.

Au nom de !a Nation, le conseil exécutif provisoire, en vertu de la loi du 28 août dernier et de la décision de ce jourd'hui, commet le citoyen Antoine Prosper Soulès, officier municipal qui nous a été indiqué par le conseil général de la Commune de Paris, à l'effet de faire auprès des municipalités, districts et départements telles réquisitions qu'il jugera nécessaires pour le salut de la patrie. En foi de quoi nous avons signé les présentes, auxquelles nous avons fait apposer le sceau de l'État. A Paris, le troisième jour de septembre 1792, an quatrième de la liberté, et le premier de l'égalité.

SERVAN, ROLAND, CLAVIÈRE, DANTON, MONGE, LEBRUN.

Par le conseil,

GROUVELLE, secrétaire.

 

Le passeport, délivré au même individu par la Commune, était conçu dans la forme ordinaire ; la Commune s'effaçait pour faire prendre le change aux autorités départementales qui n'auraient peut-être pas voulu recevoir ses émissaires, s'ils s'étaient présentés en son nom seul

MUNICIPALITÉ DE PARIS.

Laissez passer le sieur Antoine-Prosper Soulès, officier municipal de la Commune de Paris, natif d'Avize, département de la Marne, âgé de vingt-neuf ans, chargé par le pouvoir exécutif f à l'effet de se transporter dans les départements pour le bien de la chose publique, et prions de lui donner aide et assistance en cas de besoin.

Délivré à la maison commune de Paris, le 4 septembre 1792, l'an IV de la liberté et le 1er de l'égalité.

FLANCHET, président MEHÉE, secrétaire-greffier adjoint.

 

Il ne s'agissait plus que de procurer aux commissaires de la démagogie des moyens de transport pour se rendre à leur destination. La Commune prit à ce sujet une mesure très-expéditive, ainsi que le prouve son arrêté en date du 5 septembre :

Le conseil général, le procureur de la Commune entendu, arrête que les ateliers du sieur Pandroue, sellier, rue de Seine-Saint-Germain, seront fermés, et, attendu qu'il n'a pas de patente, autorise le procureur de la Commune à prononcer la confiscation de tous les objets qui s'y trouvent.

Messieurs . . . . . . . . . . commissaires nommés pour les départements . . . . . . . . . . sont autorisés à partir sur le champ et à choisir telle voiture qu'il leur plaira chez le sieur Pandroue.

 

Après les voitures on saisissait tes chevaux. Il y avait, pour ce dernier article, une administration spéciale et des commissaires ad hoc. A la tête de cette administration se trouvait un ancien ouvrier typographe, capitaine d'une compagnie de volontaires de Seine-et-Oise, futur maréchal de France, Brune. L'amitié de Danton et de Camille Desmoulins lui avait fait confier ces fonctions moitié civiles et moitié militaires, qui commencèrent sa fortune. La réaction de 1815, sous les coups de laquelle il périt, voulut frapper dans sa personne au moins autant ]e protégé des hommes de 1793 que le lieutenant de Napoléon[9].

Danton fit également donner une commission spéciale pour des livraisons de fusils à Guermeur, l'un des membres du fameux comité de surveillance, que Panis avait subrepticement introduit dans ce comité, le matin du 2 septembre. (Voir t. III, liv. XI, § VI.) Cet ancien chef des bureaux de la ville avait été chargé de vérifier les papiers de Brissot et au besoin de l'arrêter[10]. Il était devenu un embarras pour ceux qui l'avaient mis en avant ; on ne trouva rien de mieux, afin de l'éloigner de Paris, que de lui donner une mission pour la Bretagne. Ce fut à l'occasion de cette nomination qu'eut lieu la scène que raconte Mme Roland, dans ses Mémoires, et à la suite de laquelle le ministre de l'intérieur biffa la signature qu'il avait déjà apposée sur la commission délivrée au protégé de Danton. Mais le ministre de la justice ayant obtenu la signature de ses autres collègues, Guermeur se contenta d'un pouvoir qui portait avec lui le témoignage de l'opposition impuissante de Roland.

Voici quelle était la teneur de cette pièce :

Le citoyen Claude-Michel Guermeur, assisté du fédère Breton Jézégabel est chargé de se transporter à Brest et à Lorient, pour s'assurer s'il existe encore, dans les magasins et arsenaux des ports, des fusils qui puissent servir à armer les citoyens enrôlés.

 

Avec ce pouvoir, Guermeur emportait une autre pièce qu'il s'était fait délivrer par ses collègues du comité de surveillance. Mission lui était donnée d'éclairer le peuple et de l'engager à prendre les mesures les plus promptes pour le salut de la patrie ; il était en conséquence autorisé à faire dans tous les départements de la ci-devant Bretagne et même dans ceux circonvoisins, des perquisitions et des réquisitions de fusils, canons, armes, chevaux, poudres, etc., et ce au nom de la municipalité de Paris, qui s'engageait à tirer vengeance de toute violence, de toute opposition dont son délégué pourrait avoir à se plaindre dans l'exercice de son mandat.

Ce singulier passeport était signe Duffort, Sergent, Leclerc, Duplain, Panis, Deforgues, Marat l'Ami du peuple, Jourdeuil, Lenfant.

Les commissaires, qu'ils fissent partie des trente ou des vingt-quatre, avaient quitté Paris depuis quelques jours à peine, que des plaintes unanimes s'élevaient contre eux de tous côtés. Au lieu de surexciter l'enthousiasme général, ces dignes mandataires de Danton et de Marat semaient partout la terreur et l'anarchie. Au lieu de prêcher la concorde et l'union, ils professaient les doctrines les plus subversives, excitaient les populations au mépris des autorités constituées, se permettaient de continuels abus de pouvoir, et répandaient à profusion des exemplaires de la fameuse lettre du comité de surveillance, invitant les départements à imiter l'exemple que venait de donner Paris, en se débarrassant des traîtres par un massacre général[11].

Dès le 13 septembre, Roland expédiait à tous les corps administratifs une circulaire dans laquelle, tout en cherchant il ménager Danton et ses amis, il désavouait des agents pourvus de commissions signées de sa propre main, et prétendait, après coup, qu'ils n'avaient été chargés que de concilier tous les cœurs, en faisant connaître aux populations tout ce qu'avaient d'aimable et d'utile les principes inaugurés par la révolution du 10 août.

Cette circulaire est trop curieuse pour que nous ne la donnions pas in extenso :

AUX CORPS ADMINISTRATIFS.

Paris, le 13 septembre 1792, l'an IVe de la liberté, le 1er de l'égalité.

Des plaintes de plusieurs départements, messieurs, me sont déjà parvenues contre des commissaires qui les parcourent, et qui sont envoyés par le pouvoir exécutif ou par la municipalité de Paris l'excès de zèle est sans doute le principe des irrégularités on des erreurs qu'on leur reproche, et doit leur servir d'excuse. Mais, afin de leur rappeler le but de leur mission et de mettre les administrateurs à portée de le juger, je vous adresse une copie des instructions, ainsi que de la formule de commission, que j'ai données à tous ceux que j'ai choisis. Vous verrez par elles qu'il s'agit uniquement de répandre les lumières par le simple exposé des faits et la plus grande publicité de tout ce qui peut éclairer l'opinion de rallier les esprits aux principes de la justice et de l'égalité de leur concilier les cœurs par le développement de ce qu'elles ont d'aimable et d'utile pour leur application aux intérêts de tous enfin d'exciter l'attention générale et de porter l'activité de chacun sur les moyens de défense contre nos ennemis extérieurs. Si des pouvoirs ont été ajoutés à ces instructions, c'est pour en user dans le même esprit, et quiconque s'en écarte trahit sa destination.

Quant aux commissaires de la Commune de Paris, à plus forte raison n'ont-ils et ne peuvent-ils employer que les moyens de la persuasion il est évident que la municipalité ne saurait avoir d'action et d'influence hors de son territoire que par les sentiments de la fraternité. Il m'a été dénoncé un imprimé qu'on dit être envoyé de sa part, et qui renferme une invitation à de grandes violences. Je suis porté à le croire supposé : il est probablement l'ouvrage des ennemis de la Commune provisoire. Cette Commune doit son existence à une révolution nécessaire et qu'elle a bien servie. Il est possible sans doute que l'effervescence utile aux révolutions produise, après elle, des effets dangereux ; mais elle doit se tempérer et se régler par le sentiment de cette justice qui demeure dans le cœur du peupler et qui le porte à blâmer lui-même les excès auxquels on l'aurait entraîné contre ses propres intérêts, en profitant de son agitation pour servir des passions particulières.

Une cour perverse a disparu ; les Français ont juré de maintenir la Liberté, l'Égalité ; ils ont appelé une Convention pour les consacrer par un sage gouvernement ils n'ont plus qu'à se serrer, qu'à s'unir contre les ennemis du dehors, et à déployer autant de sagesse que d'énergie.

Au nom sacré de la Patrie, je vous conjure et je vous ordonne de travailler courageusement à établir le règne de l'Égalité, à faire respecter les lois, dont la Convention nationale doit seule réformer ce qu'elles peuvent avoir de défectueux à honorer enfin l'humanité par le régime le plus propre à soutenir toutes les vertus morales et politiques.

Le Ministre de l'Intérieur,

ROLAND.

 

FORMULE DE LA COMMISSION.

Le ministre de l'intérieur donne au citoyen NN. la mission de parcourir les départements ; d'y répandre les écrits dont t'Assemblée nationale a voté l'impression et l'envoi dans les départements de fixer l'attention des citoyens sur les lois que l'Assemblée nationale a décrétées et décrète journellement pour pourvoir à la sûreté de l'État contre l'invasion de ses ennemis ; d'en presser partout l'exécution, de la recommander à la surveillance des bons citoyens de les exciter à fabriquer des armes de toute espèce, à transformer en moyens de défense les métaux et tout ce qui peut y servir ; de répandre de toutes parts les lumières et l'esprit public, de faire en un mot tout ce que pourra lui inspirer l'amour le plus ardent de la patrie, en se bornant néanmoins à ce que tout citoyen a individuellement le droit d'entreprendre ; et je le recommande à ce titre, en tant que de besoin, aux bons offices des corps administratifs et des amis de la patrie.

ROLAND[12].

 

La Législative, en votant les mesures énergiques proposées par Vergniaud (voir livre XIV, § III), s'était fait l'interprète de la réprobation universelle qu'avaient excitée les commissaires. Le conseil exécutif, enhardi par l'esprit qu'avait montré la Convention dans sa première séance et dans ses premiers choix, prit, le 22 septembre, une mesure décisive qui mettait fin à ces pouvoirs dont on avait si étrangement abusé, à ces missions qui, quoique ne datant que de vingt jours au plus, avaient jeté le trouble et l'effroi dans la France entière.

Son arrêté était ainsi conçu :

Le conseil, considérant que les motifs qui ont déterminé l'envoi des commissaires dans les départements ne subsistent plus ; après en avoir délibéré, arrête que les commissaires précédemment envoyés dans les divers départements au nom du pouvoir exécutif seront rappelés, que les pouvoirs qui leur ont été délégués sont dès à présent révoqués ;

Qu'en conséquence, le ministre de l'intérieur donnera sur le champ avis aux corps administratifs de cette révocation.

 

Roland ne se le fit pas dire deux fois ; il accompagna l'envoi de l'arrêté du conseil exécutif d'une nouvelle circulaire dans laquelle on remarquait ce passage :

Si quelques commissaires ont rempli l'intention du conseil, qui était de ramener les hommes et les choses à l'unité de principes et d'action, de justice et d'ordre, quelques autres s'en sont étrangement écartés en provoquant, au contraire, des rumeurs occasionnant du trouble, exposant même la sûreté des personnes et des biens voulue par les lois, la justice et la raison. Le calme doit succéder à l'orage. Si donc, messieurs, il se présente dans votre département des hommes qui se disent encore investis des pouvoirs du conseil exécutif, hâtez-vous de leur apprendre que ces pouvoirs sont révoqués. Quant à ceux qui ne seraient pourvus que d'une commission émanée d'un seul ministre, ils resteront chargés d'en poursuivre l'exécution sous la responsabilité du ministre dont ils l'auront reçue.

 

La rentrée des commissaires à Paris s'opéra beaucoup plus lentement que leur départ. Leur premier soin fut de se faire payer largement leurs dépenses[13] ; mais, pendant longtemps, le conseil exécutif, et spécialement le ministre de l'intérieur, eurent à examiner les comptes des fournisseurs qui s'adressèrent naturellement au trésor public, pour obtenir le remboursement des avances que ces singuliers agents avaient oublié de solder[14].

Quelques-uns des commissaires étaient très-peu disposés à obtempérer aux ordres du ministre dont ils se prétendaient les délégués. Il fallut un décret formel de la Convention pour ordonner au pouvoir exécutif de rappeler sur le champ .ces agents récalcitrants, et de rendre compte de la conduite de chacun de ces commissaires, spécialement de ceux qui auraient été arrêtés et maintenus en état de détention.

Il s'était donc trouvé des autorités départementales assez résolues pour faire emprisonner les énergumènes qui leur avaient été envoyés de Paris, et mettre fin à leurs menées démagogiques, en s'assurant de leurs personnes. Ces exemples de courage civique furent donnés notamment par les administrateurs du Calvados, de la Haute-Saône et du Finistère. Momoro, membre du directoire du département de Paris (voir t. III, livre X, § IV), et Dufour, membre du conseil général de la Commune insurrectionnelle faillirent être écharpés à Lisieux, pour avoir prêché ouvertement la loi agraire. Les officiers municipaux de cette ville les firent arrêter ; mais, ne voulant pas retenir en prison des agents revêtus d'un certain caractère officiel, ils facilitèrent bientôt leur évasion. Les agents maratistes se hâtèrent de regagner Paris puis, une fois en sûreté, ils s'inscrivirent en faux[15] contre les assertions des autorités du Calvados qu'ils accusèrent d'avoir adressé au ministre de l'intérieur un rapport calomnieux sur les désordres dont ce département avait été le théâtre. L'affaire en resta là.

Martin et Daujon étaient tous deux membres du conseil général ; ils s'étaient empressés de se faire comprendre dans la liste des municipaux à envoyer en mission, parce qu'ils avaient tous les deux à Paris une fort mauvaise affaire sur le corps. On les accusait d'avoir, moyennant finance, fait évader le prince de Poix, et soustrait un carton rempli de pièces à sa charge.

Dans l'Yonne, ces deux commissaires avaient marqué leur passage par des déprédations incroyables par des prédications plus incroyables encore. Ils avaient déployé un zèle démagogique d'autant plus grand, qu'ils avaient plus de torts à se faire pardonner par leurs amis pour s'être laissé acheter par un aristocrate. Ils allaient partout enlevant les plombs des maisons, sous prétexte que ces maisons appartenaient aux émigrés, taxant le blé et les vivres sur les marchés et menaçant de mort ceux qui cherchaient à s'opposer à leurs attentats contre les propriétés et les personnes.

Grâce à leurs excitations, des troubles avaient éclaté sur plusieurs points du département. Le sang avait coulé. De l'Yonne, Martin et Daujon passèrent dans la Haute-Marne. Les autorités s'y montrèrent moins patientes ; les deux apôtres .des doctrines maratistes furent fort mal menés à Langres. Le conseil général de la Haute-Saône alla plus loin ; il les fit arrêter et reconduire à Paris de brigade en brigade, comme des criminels en rupture de ban.

Le conseil exécutif n'imita pas l'exemple de courage que venaient de lui donner des administrateurs pleins du sentiment de leur devoir ; il se hâta de faire réparation d'honneur à ces apôtres du vol et du pillage. Voici t'arrêté qui consacre son honteux abandon des principes qu'il proclamait bien haut, mais pour l'application desquels il n'osait pas affronter les récriminations des dictateurs de l'Hôtel de Ville. Il porte la date du 5 octobre.

CONSEIL EXÉCUTIF PROVISOIRE.

Lecture a été faite d'un arrêté du conseil général des commissaires des quarante-huit sections de Paris, auquel étaient jointes des délibérations du département de la Haute-Saône, ainsi que du district de Langres, le tout relatif à l'arrestation des citoyens Daujon et Martin, lesquels, envoyés en qualité de commissaires du conseil exécutif, n'ont pas été reconnus pour tels par le directoire du département de la Haute-Saône qui au contraire, s'est permis de les faire arrêter et conduire à Paris, par la gendarmerie nationale, de brigade en brigade.

Le conseil, délibérant sur ces faits, et considérant que les citoyens Daujon et Martin avaient en effet reçu des pouvoirs et des commissions du conseil, lesquelles étaient revêtues des formes les plus authentiques, arrête que lesdites pièces seront adressées au ministre de l'intérieur, qui examinera la conduite du directoire du département de la Haute-Saône, vérifiera les motifs qu'il a pu avoir de ne point reconnaître les commissions du pouvoir exécutif, et proposera au conseil les mesures qui lui paraîtront convenables à cet égard.

Le conseil arrête en outre que lesdits citoyens Daujon et Martin seront sur le champ mis en pleine liberté, que leurs effets leur seront rendus, et que le secrétaire du conseil est autorisé à délivrer au brigadier de la gendarmerie nationale chargé de la conduite de ces citoyens un certificat qui lui serve de décharge vis-à-vis des administrateurs dont il a reçu mission.

 

Tous les commissaires du pouvoir exécutif et de la commune de Paris étaient rentrés à Paris, prêts à recevoir de nouvelles missions, soit à l'intérieur, soit en Belgique. (Voir, au volume suivant, § X du livre XIX.) Un seul était encore détenu, et nul ne paraissait vouloir s'occuper de lui, tant il était compromettant. C'était Guermeur. Ce membre adjoint du comité de surveillance était d'origine bretonne, et s'appelait Royou[16] ; il avait changé de nom parce qu'ayant adopté les idées démagogiques, il ne se souciait pas d'être confondu avec ses frères qui, alliés très-proches de Fréron, le célèbre ennemi de Voltaire, avaient continué, dans le journal l'Ami du Roi, de défendre les doctrines politiques de l'Année littéraire. Son pseudonyme était emprunté à un village du canton de Pont-l'Abbé, dans le Finistère, dont sa famille était originaire.

Guermeur avait quitté depuis plusieurs années son pays natal, où probablement ses vertus et ses talents n'étaient pas appréciés à leur juste valeur. Lorsqu'en septembre 1792 il y revint avec des pouvoirs considérables, il fit sonner d'autant plus haut son crédit et ses amitiés, qu'il avait été jadis plus discrédité et méprisé. Préconisant les vertus, l'énergie, le patriotisme pur et sans tache des Panis, des Danton, des Marat, des Robespierre, il déblatérait contre les ministres de qui il tenait ses pouvoirs ostensibles, contre les chefs de la Gironde qu'il qualifiait de traîtres, contre les autorités locales, auxquelles la Commune de Paris apprendrait bientôt à obéir. Il poussa si loin l'insolence de ses propos et l'audace de ses menées, que l'administration départementale le fit arrêter et comparaître devant elle.

Qui êtes-vous, lui dit le président Kergariou ?

Claude-Michel Royou-Guermeur, réplique le prévenu, envoyé de la Commune de Paris, et chargé de pouvoirs extraordinaires pour poursuivre la vente des biens nationaux et la levée en masse des patriotes[17].

Il exhibe ses pouvoirs, mais ils paraissent fort peu en règle aux administrateurs, l'un parce qu'il émane de la Commune de Paris, laquelle n'a pas le droit de donner des ordres au fond de la Bretagne ; l'autre, bien que signé par plusieurs ministres, parce qu'il présente des traces de surcharge et des ratures, et que notamment la signature de Roland y est biffée. Le jour même, 22 septembre, les administrateurs du département du Finistère rendent compte à la Convention des mesures qu'ils viennent de prendre, et lui transmettent en même temps les dépositions relatives aux propos incendiaires que Guermeur a tenus depuis qu'il est arrivé dans le Finistère[18].

Pendant ce temps, Guermeur, espérant intimider ceux qui avaient osé mettre en état d'arrestation le délégué de la Commune de Paris, leur écrivait une lettre dans laquelle il déclarait vouloir donner une preuve écrite contre lui, et reproduisait tes injures dont il avait particulièrement honoré Roland et Pétion, les éloges qu'il avait décernés à Panis, Marat et Robespierre. Vous n'êtes pas, ajoutait-il, bien instruits de ce qu'on pense, dit et écrit à Paris, car vous verriez que mon opinion est dominante ou plutôt que je ne suis que l'écho des sentiments des plus ardents patriotes de la capitale.

La municipalité de Quimper dédaigna les injures de Guermeur et prit l'arrêté suivant :

Extrait du registre du conseil général de la commune de Quimper.

Du 24 septembre 1792, l'an IV de la Liberté et 1er de l'Egalité, séance du conseil général présidée par M. Vinot, en l'absence de M. le maire, assisté de MM. les officiers municipaux et notables.

Présent M. Legoarre, procureur de la Commune.

Messieurs les commissaires, chargés de la vérification des papiers du sieur Royou-Guermeur, ont déposé sur le bureau le procès-verbal qu'ils ont rapporté, duquel il résulte qu'ils ont saisi le nombre de cent quatre-vingt-dix-huit feuilles imprimées d'une lettre des administrateurs du Comité de salut public et des administrateurs adjoints réunis, nommés par )a commune de Paris, et une autorisation signée des mêmes administrateurs, qui donne audit sieur Royou le pouvoir de faire réimprimer et afficher, partout ou il le croira nécessaire, la lettre l'affiche et l'adresse dont il est porteur. Ces pièces ont aussi été déposées sur le bureau, et l'assemblée s'en est fait donner lecture. Les commissaires ayant ensuite exposé à l'assemblée que M. Royou demande à être mis provisoirement en liberté, donnant caution réséante de se présenter, ou à être transféré dans une autre maison, le conseil, après en avoir délibéré, a arrêté et arrête que la détention du sieur Royou continuera conformément à l'arrêté du jour d'hier, et, sur la seconde demande, n'y ayant d'autre maison que celle de justice où le sieur Royou put tenir arrêt, s'il quittait celle où il est actuellement, il a été arrêté qu'il n'y a lieu à délibérer faute d'une déclaration formelle et souscrite par lui de préférer d'être détenu dans la maison de justice que la loi réserve pour ceux qui sont prévenus de crimes ou de délits graves ; et sera copie du présent envoyée au Directoire du district, avec prière d'en donner connaissance au Directoire du département, conformément à la loi du 12 août dernier.

 

La Convention renvoya toutes les pièces à son Comité de sûreté générale mais celui-ci laissa dormir l'affaire dans ses cartons.

Après avoir vainement attendu que ses anciens amis, qui l'avaient mis en avant, s'occupassent d'obtenir sa liberté, Guermeur écrivit à Marat la lettre suivante

4 décembre, an Ier.

Il est inouï, mon cher Marat, que depuis trois mois qu'on me tient en captivité, le Comité de sûreté générale n'ait pas encore donné son avis. Je me doute bien qu'il est composé de Brissotins et de Rolandistes. En ce cas, ils me tiendront dans leurs griffes le plus longtemps qu'ils pourront. Il est plus que temps que cette vexation finisse ; vous êtes vous-même si cruellement persécuté, que je ne m'étonne pas que vous n'ayez pu prendre ma défense. Oh ! mon cher Marat, comme on cherche à tromper le peuple de ces départements sur votre compte et sur celui de Robespierre ; il n'y a pas de calomnie qu'on ne débite. Que je voudrais être libre pour désabuser ce peuple ignorant qu'on égare je périrai s'il le faut, mais je lui ferai entendre les mâles accents de la vérité. Il y a eu ici avant-hier, une grande fermentation. Les députés de ce département, qui sont d'enragés Rolandistes, Kervelegan, Gomaire et Marée, ont écrit une lettre alarmante ; on n'en a lu que quelques fragments. Voici en substance ce qu'ils marquent, ou du moins ce qu'on m'a rapporté : — Le parti Marat et Robespierre ne demande la punition du Roi que pour élever Égalité au trône. La Convention ne délibère pas librement ; elle n'est même pas en sûreté à Paris. En conséquence ils invitent le département à tenir une force armée prête à se rendre à Paris au premier signal. Effectivement le département a arrêté hier publiquement qu'il serait levé trois cents hommes dans l'étendue de son ressort, qui seront rassemblés tous ici, le 25 de ce mois que copie de cet arrêté sera envoyée à tous les districts et municipalités pour procéder, sans perdre un instant à cette levée, chacun suivant sa quote-part.

Je vous réponds sur ma tête de la réalité de cette mesure qui me semble la plus effrayante pour la chose publique. Je ne m'étendrai pas en réflexions, mais, si l'on peut tolérer un pareil excès de démence, on ne tardera pas à voir quelque département armer les citoyens pour aller guerroyer contre un département rival. On m'assure aussi que l'arrêté portait qu'il serait envoyé copie aux autres départements, celui de Paris excepté, avec invitation de prendre la même mesure.

Vous trouverez ci-jointe une circulaire aux quatre-vingt-un départements, qui prouvera que ce n'est pas la première fois que celui-ci cherche à se coaliser avec d'autres. Tout cela, je gage ma tête à couper, est le fruit de la correspondance de Roland. Si vous pouvez une fois parvenir à vous procurer une correspondance de cet abominable ministre avec ce département, c'est alors qu'on verrait sa scélératesse au grand jour. Ce qu'il y a de certain, c'est que Roland flatte, caresse toutes les administrations pour en obtenir au besoin des adresses. Il laisse les départements agir à leur gré, commettre tous les actes arbitraires, pour pouvoir en être soutenu. J'avais observé j'avais réservé ces pièces pour en faire la base d'une dénonciation solide et d'un rapport intéressant à la Commune et aux Jacobins. Mais vous m'avez tous oublié et j'ignore quand finira ma captivité, mais rien au monde ne me fera changer d'opinion.

Je vous envoie aussi trois numéros d'un journal de Rennes lisez attentivement les trois lettres de deux de vos collègues qui sont en tête et dévouez au mépris ces vils législateurs.

Voilà les vrais agitateurs, ceux qui cherchent à faire régner l'anarchie, à avilir la Convention. Quel parti je comptais tirer de ces pièces ! Mais elles sont en de bien meilleures mains si vous voulez en faire usage.

Je vous envoie aussi toutes les pièces relatives à mon arrestation vous y verrez l'insigne fourberie des témoins. Les quatre derniers ont déposé des choses auxquelles je n'ai jamais pensé. J'ai bien dit que Marat, Panis et Danton avaient sauvé la France ; aussi dès que j'ai eu connaissance de cette information frauduleuse, je me suis inscrit en faux, et j'ai sommé la municipalité de me confronter avec les témoins, ce dont elle s'est donné de garde.

Voyez donc enfin, mon cher Marat, ce que veut le Comité de sûreté générale ; veut-il ma tête parce que je déteste Roland et toute sa sequelle qu'ils trouvent donc des juges aussi vils qu'eux pour me condamner.

J'ai écrit dernièrement à Bazire, croyant que mon affaire était au comité de surveillance ; veuillez conférer avec lui, Fréron, Panis et Desmoulins, et tirez-moi enfin de la captivité que je n'ai jamais méritée. En grâce, gardez soigneusement toutes ces pièces, j'en aurai un jour besoin.

J'ai vu qu'il y avait eu une dilapidation effrayante à notre comité[19] ; je n'ai cessé de tonner contre le peu d'ordre qui régnait, mais certes il y a une négligence coupable, pour ne rien dire de plus, de la part des gardiataires. J'ai toujours eu cette appréhension, aussi je n'ai jamais voulu me charger de rien, et mes comptes seront rendus bien promptement. Cela m'a bien affecté pour Panis. Vous n'avez pas fait usage de ma lettre, relativement aux subsistances ; j'ai un projet là-dessus, mais que je n'ai pu vous développer, je connais cette partie à fond.

Veuillez donc, mon cher Marat, prendre en main ma cause. Elle est celle d'un ardent patriote opprimé par cette infernale clique girondaise, et comptez sur l'estime et la reconnaissance éternelle de votre concitoyen dévoue.

GUERMEUR.

En grâce, donnez-moi de vos nouvelles. Mon adresse est le citoyen Guermeur, à la maison d'arrestation, à Quimper, département du Finistère.

 

La municipalité de Quimper n'imitait pas celle de Paris ; elle n'interceptait pas les lettres des prisonniers. Celle de Royou-Guermeur parvint à l'Ami du peuple, qui se hâta de la transmettre au Comité de sûreté générale de la Convention, avec cette fougueuse apostille :

Je dénonce au comité de sûreté générale, la détention arbitraire du citoyen Royou dit Guermeur, qui a été arrêté par les administrateurs aristocrates du département de Quimper, le 12 ou le 13 septembre dernier, pour avoir travaillé à remplir une mission du conseil exécutif provisoire, tendant a procurer des armes et des munitions aux citoyens qui marchaient aux frontières ; comme il était porteur d'une lettre circulaire du comité de surveillance de Paris, lettre qui a été lue à la tribune par Vergniaud et sur laquelle on est passé à l'ordre du jour, on lui en a fait un crime, de même que d'avoir pris le nom de Guermeur qu'il portait au collège, pour se soustraire a l'opprobre qui couvrait celui de Royou. Je réclame la justice immédiate pour ce bon patriote.

MARAT, député de la Convention.

Paris, ce 21 décembre 1792.

 

Marat répondait en même temps à son ami :

Mon cher Guermeur,

J'ai été scandalisé de l'indifférence qu'ont témoignée vos anciens amis pour vous tirer de votre captivité. Il y a plus de deux mois que je fais les démarches nécessaires au comité de surveillance et de sûreté générale de la Convention. Je ne sais par quelle fatalité ma réclamation est. restée à l'écart. Je l'ai renouvelée avec fureur, il y a dix jours ; j'ai l'assurance que les ordres sont donnés pour votre élargissement. Vous serez à même de prendre à partie vos oppresseurs. J'ai traîné dans la boue vos coquins de députés de Quimper. Les scélérats tremblent sous le fouet de ma censure. Comptez que je vous vengerai de vos scélérats d'oppresseurs. Marquez-moi où en sont vos affaires et comptez toujours sur moi.

MARAT, l'ami du peuple et le vôtre.

Paris, 27 décembre 1792, n° 30, rue des Cordeliers, P. L. S[20].

 

Le renseignement donné par Marat à Guermeur était exact. A la date du 29 décembre, le Comité de sûreté générale, sous le coup des démarches incessantes de l'Ami du peuple, avait écrit aux autorités du Finistère :

Rien n'autorise les mesures de rigueur contre le citoyen Guermeur. Les divers propos tenus par lui sont des opinions très-permises. La loi du 8 octobre vous fait une obligation de le mettre promptement en liberté ; nous en réclamons l'exécution ; une plus longue détention nous mettrait dans la nécessité de dénoncer cet acte arbitraire, et vous en seriez personnellement responsables[21].

 

Les autorités du Finistère ne jugèrent pas que le décret du 8 octobre (nous en avons donné le texte, livre XVII, § IX) fût applicable à Guermeur ; aussi refusèrent-elles d'obtempérer à l'ordre du Comité de sûreté générale, déclarant qu'elles ne se soumettraient qu'à une injonction formelle de la Convention elle-même. Les choses en restèrent là jusqu'à là-fin de janvier. A cette époque, comme nous le verrons dans le volume suivant, les montagnards profitèrent de la victoire qu'ils venaient de remporter en envoyant Louis XVI à l'échafaud, pour envahir les comités les plus importants, et notamment, le Comité de sûreté générale.

Le 13 février, Duhem, l'un des membres les plus fougueux de l'extrême gauche, vint, au nom de ce comité, lire un rapport qui concluait à ce qu'il plût à l'Assemblée de faire élargir le prisonnier de Quimper, et de mander à la barre le procureur général syndic du Finistère, coupable d'avoir violé les droits de l'homme.

A cette proposition, la droite se soulève indignée :

Ce n'est point un rapport, s'écrie Lesage (d'Eure-et-Loir), qu'on nous en donne un autre !

Qu'on lise le premier arrêté du Finistère, demande Bailleul, et la Convention reconnaîtra qu'on réclame la liberté d'un assassin et la punition d'administrateurs fidèles à leurs devoirs. Par cet arrêté, il est prouvé, d'une part, que Royou-Guermeur a paru suspect, non-seulement à cause des propos incendiaires qu'il tenait, mais encore à cause de la forme même de la commission dont il était porteur, commission où le nom du ministre de l'intérieur se trouvait biffé, où nul sceau ne garantissait la signature des quatre ministres signataires. Il est prouvé, d'autre part, que Guermeur n'a été arrêté que provisoirement, jusqu'à ce qu'il plût à la Convention nationale et au ministre de l'intérieur de décider. C'est ce que n'ont fait depuis cette époque, ni l'Assemblée, ni le pouvoir exécutif.

Duhem se trouve alors obligé de lire et la commission quelque peu irrégulière remise par le conseil exécutif à Guermeur et la pièce émanée du comité de surveillance de la Commune de Paris. Lorsque le rapporteur cite les noms des signataires Panis, Sergent et Marat, plusieurs voix s'écrient à droite : Voilà les tyrans !

Qu'on lise le procès-verbal d'arrestation !

Je ne l'ai pas, répond Duhem.

Nous voulons toutes les pièces !

On conspire pour faire perdre le temps à l'Assemblée ; mettez aux voix l'élargissement et passez à l'ordre du jour sur tout le reste.

Non, non ! disent un grand nombre de membres.

Au plus fort du tumulte, Marat descend de son banc et va se poser dans le milieu de la salle, le chapeau sur l'oreille ; il montre le poing aux députés du Finistère et les apostrophe sur ce ton : Taisez-vous, malheureux, laissez parler les patriotes !... Taisez-vous, contre-révolutionnaires !... Taisez-vous, conspirateurs !... vous n'êtes que des gredins, des aristocrates, des coquins !...

L'Ami du peuple, comme certains démagogues de son espèce, croyait avoir, pour lui et ses amis, le monopole des injures et des interruptions il criait à l'oppression dès qu'on voulait user de représailles. Un spectateur l'ayant apostrophé au moment où il menaçait et insultait la Gironde, il se tourne vers le président et le somme de faire vider les tribunes : Il y a, dit-il, un insolent qui manque aux députés !

Dès que l'on a réussi à faire taire l'Ami du peuple, Duhem est obligé de lire toutes les pièces qu'il niait, un instant auparavant, avoir entre les mains. Dans l'une d'elles, plusieurs citoyens déposaient avoir entendu dire à Guermeur que Roland, Brissot, Guadet et Vergniaud étaient des gens détestables, tandis que Robespierre et Marat étaient des patriotes par excellence. La droite éclate de rire ; Marat rit aussi en criant : Oui ! oui ! Ce qui augmente encore l'hilarité générale. Mais bientôt on redevient sérieux, lorsque Duhem, continuant la lecture des faits allégués par les administrateurs du Finistère contre le client de l'Ami du peuple, en vient à la pièce où celui-ci menace les départements de la surveillance de Paris.

Ce sont des faux fabriqués à Quimper, interrompt Marat !

L'agitation est à son comble. Le président ne peut la dominer sa voix se perd dans le tumulte. Je demande la parole contre vous, monsieur le président, crie Bréard, si vous ne réduisez au silence ceux qui vous la dérobent audacieusement.

Enfin Lesage, pour empêcher que la discussion du projet du comité n'occupe toute la séance, propose qu'elle soit ajournée jusqu'à ce que toutes les pièces de cette affaire aient été imprimées.

Cette motion est adoptée. On pouvait croire qu'elle mettrait fin à des débats scandaleux ; mais ils recommencent lorsque Marat insiste afin d'arracher à la Convention la mise en liberté provisoire de Guermeur.

On réclame la question préalable sur cette nouvelle proposition elle est deux fois mise aux voix, et deux fois l'épreuve reste douteuse. Enfin, malgré l'insistance très-vive de Marat, de Legendre, de Basire et de Duhem, elle est adoptée, et il est décidé que Guermeur restera en prison jusqu'à nouvel ordre[22].

Mais ces discussions rétrospectives sur la circulaire du 3 septembre, ses auteurs et ses propagateurs, avaient épuisé toute l'énergie de la Convention. Le 4 mars, Duhem revient à la charge, et présente cette fois un décret qui déclare la parfaite innocence de Guermeur, et enveloppe, dans les poursuites destinées a venger sa détention arbitraire, cinq ou six magistrats du Finistère. Au nom du Comité de sûreté générale il propose[23] :

1° La mise en liberté du citoyen Royou dit Guermeur et de son compagnon Jézégabel, détenus à Quimper, en vertu d'un arrêté du département du Finistère ;

2° La citation à la barre des citoyens Kergariou président du département, Brichet, procureur syndic, Ledeau, maire de Quimper, Vuéack, officier municipal, Legoarre, procureur de la Commune, pour rendre compte de leur conduite.

Une très-vive discussion s'engage sur ce rapport. Un député du Finistère, Gomaire, déclare qu'il ne s'oppose pas à la mise en liberté du prisonnier de Quimper, mais il demande la question préalable sur la seconde partie de la proposition du Comité de sûreté générale.

Personne ne contestera, dit-il, que la municipalité de Quimper, essentiellement chargée de veiller au maintien de la paix autour d'elle et dans son sein, n'ait été fondée à faire mettre en état d'arrestation un homme porteur d'ordres arbitraires émanés du comité de surveillance de la Commune de Paris un homme connu pour avoir assisté, présidé même aux sanglantes exécutions de septembre. Quels reproches peut-on faire à la municipalité de Quimper et au département du Finistère, à moins qu'on ne leur fasse un crime d'avoir entravé les desseins de certaines gens ?

N'ont-ils pas au contraire bien mérité de la patrie, s'ils ont prévenu dans leur département le renouvellement des scènes d'horreur, qui ont déshonoré Paris et fait reculer la révolution...

Guermeur n'a été arrêté, répond Lamarque, que parce qu'il ne professait pas pour Roland l'idolâtrie qu'à ce moment l'on avait pour ce ministre ; je pensais qu'il avait été convenu qu'on ensevelirait dans le silence ces débats honteux sur les personnes qui ont si souvent troublé nos discussions. Je demande avec Gomaire, la question préalable sur la comparution à la barre des magistrats désignés par le Comité de sureté générale, et je propose la rédaction suivante :

La Convention nationale décrète que le citoyen Royou dit Guermeur, sera mis en liberté sur le champ, ainsi que son compagnon Jézégabel, si ce dernier est encore détenu, et passe à l'ordre du jour sur le fond de cette affaire.

 

Comme le disait Lamarque, les choses avaient marché depuis le jour où, pour la première fois, la circulaire du 3 septembre avait été lue par Vergniaud à la Convention. Ce qui excitait alors les cris d'indignation de l'immense majorité, était maintenant accepté comme un acte de peu d'importance, comme le résultat d'un entraînement fatal. Le procès du roi, les doctrines sauvages, qui, à cette occasion, avaient été proclamées à la tribune, le décret ordonnant la suspension de toute procédure contre les assassins de septembre, décret que, le 8 février, les montagnards avaient arraché à l'Assemblée (voir t. III, p. 612), tout concourait à empêcher les girondins d'insister désormais pour faire maintenir en arrestation le prisonnier de Quimper. Ils se crurent trop heureux d'acheter, au prix de sa mise en liberté, l'abandon des poursuites que leurs adversaires voulaient commencer contre les magistrats courageux qui l'avaient fait arrêter six mois auparavant.

Ce fut une espèce de contrat synallagmatique ; mais les conditions n'en furent pas longtemps respectées, au moins d'un côté. Guermeur fut mis en liberté quelque temps après le 31 mai 1793, les administrateurs du Finistère furent jetés en prison et traduits au tribunal révolutionnaire établi à Brest par les représentants que la Montagne victorieuse y avait envoyés en mission. Un des principaux griefs articulés contre eux fut l'arrestation de Guermeur. Celui-ci était revenu une seconde fois en Bretagne, à la suite des proconsuls montagnards. Il put lui-même surveiller la réalisation de la vengeance qu'il avait à exercer contre Kergariou et les vingt-cinq courageux administrateurs du Finistère. Le 1er prairial an II, ils furent tous condamnés à mort et exécutés le même jour[24].

Plus heureux que bien d'autres démagogues, Guermeur échappa à la tourmente révolutionnaire. Sous le Directoire, il était l'un des confidents de Barras sous le Consulat, il partit, avec son ami Fréron, pour l'expédition de Saint-Domingue, à laquelle il fut attaché en qualité de commissaire civil. Comme lui aussi, il y mourut misérablement.

 

 

 



[1] Moniteur, n° 242, 243.

Toutes ces décisions furent prises par l'Assemblée d'accord avec les ministres ; nous trouvons a la date des 28 et 29 août, sur le registre des délibérations du pouvoir exécutif les mentions suivantes :

28 août. — Le conseil arrête que les ministres se transporteront à l’ instant à l'Assemblée nationale,

Pour lui représenter l'inconvénient qui résulte des pouvoirs donnés par elle à ses commissaires et dont l'exercice peut entraver les opérations du pouvoir exécutif.

Et pour lui donner connaissance de la mesure prise pour l'envoi de commissaires dans les départements, en la priant de seconder cette utile mission en nommant quelques membres pris dans son sein pour diriger les commissaires du pouvoir exécutif.

Du 29 août 1792. — Les commissaires de l'Assemblée nationale nommés pour aller, en conformité du décret, concourir avec les commissaires choisis par le pouvoir exécutif a la réquisition extraordinaire d'hommes dans les seize départements qui environnent la capitale, sont venus pour concerter avec le conseil leur marche et leurs différentes opérations. < Les commissions des trente commissaires du pouvoir exécutif nommés pour la même mission ont été signées par le conseil.

[2] Moniteur, p. 1102.

[3] Moniteur, p. 1079.

[4] Moniteur, p. 1108.

[5] Bonnemant est le commissaire dont nous avons parlé tome III, livre XIII, §§ IV et V, à l'occasion des massacres de Couche et de Lyon.

[6] Parrain et Corchant sont les deux commissaires qui arrêtèrent à Forges le duc de la Rochefoucauld. Voir tome III, livre XIII, § V.

[7] Voir au Moniteur, sa lettre datée de Metz, 6 septembre.

[8] Voir ce que nous avons dit de la mission spéciale de Billaud-Varennes près de l'armée de Luckner, livre XVI, § XI de ce volume.

[9] Nous avons retrouvé les trois pièces suivantes à l'occasion de la mission spéciale qui fut confiée à Brune en septembre 1792 :

Nous, commissaire-général du pouvoir exécutif dans toute l'étendue de l'empire français, commettons les citoyens Mallet, Duplessis, Baudin, Lefèvre, Hérissant, Thuot, Boulanger et Berret, à se transporter de Paris à Fontainebleau pour y faire la saisie des chevaux de luxe que le salut de la patrie exige, tant de selle que de carrosse, avec leurs harnais, selles, brides, traits et autres ustensiles nécessaires à leur entretien, comme aussi les chariots superflus propres à faire des convois pour le transport des fourrages et vivres de l'armée ; les autorisons, en outre, à faire la perquisition des armes à feu et autres, notamment des fusils de chasse ; enjoignons à nos frères les officiers municipaux des lieux où ils passeront, au nom de la nation et de la patrie en danger, d'employer toute la force que la loi permet pour l'exécution du présent ordre dont il sera dressé procès-verbal, où il sera fait mention de la reconnaissance et du signalement des chevaux qui sera délivré au propriétaire, et qui sera à nous adressé dans le plus court délai.

Donné à notre bureau de la commission générale du pouvoir exécutif à Paris, le ..... septembre, l'an IVe de la Liberté, 1er de l'Égalité.

BRUNE, commissaire général du pouvoir exécutif.

——————————

MUNICIPALITÉ DE PARIS.

Nous autorisons nos concitoyens Mallet, Duplessis, Boulanger, Baudin, Lefèvre, Hérissant et Berret, à parcourir les environs de Paris à dix lieues à la ronde, accompagnes de six gendarmes, pour se saisir de tous les chevaux de luxe, et de ceux appartenant aux émigrés. Ils dresseront procès-verbal de leur saisie et nous amèneront tous ces chevaux.

A la mairie, ce ..... septembre 1792, l'an IVe de la Liberté.

Les administrateurs de police, membres du comité de surveillance, générale,

DUPPORT, LENFANT, DEFORGUES, PANIS, DUPLAN, CHANAY, secrétaire.

——————————

CONSEIL EXÉCUTIF PROVISOIRE.

Séance du 30 novembre 1792.

Le ministre de la guerre a présenté au Conseil un rapport concernant le compte des frais occasionnés par la commission donnée au citoyen Brune dans le mois de septembre dernier, à l'effet de faire saisir et réunir les chevaux des particuliers qui pourraient être employés au service des armées. Le Conseil, délibérant sur cet exposé, arrête qu'il sera fait un nouvel examen des objets énonces dans ce compte ; qu'il sera demandé au citoyen Brune des éclaircissements sur l'emploi des sommes qu'il présente comme dépenses secrètes ; que néanmoins il sera pourvu à l'acquittement des objets qui peuvent rester dus sur les frais de ladite commission.

PACHE, MONGE, ROLAND, GARAT, LEBRUN, CLAVIÈRE, GROUVELLE, secrétaire.

[10] Voir le Moniteur du 7 septembre 1792.

[11] Louvet rapporte un mot de Danton qui peint bien le caractère de ces singuliers missi dominici : Un député lui représentant la conduite qu'avait tenue l'un de ces effervescents, n'obtint de lui que cette justification : Eh ! f....., croyez-vous qu'on vous enverra des demoiselles ! C'était, ajoute l'ami de Roland, un rude ministre de la justice que ce monsieur-là !

[12] En rapprochant cette pièce des commissions spéciales données a Parrain, Corchant et Soulès, que nous avons retrouvées et que nous avons données, les deux premières, tome III, liv. XIII, § V, la dernière, dans la note III de ce volume, on se demande involontairement si Roland a dit l'exacte vérité, en insérant dans la circulaire officielle du 13 septembre une formule autre que celle qui avait servi à libeller les pouvoirs originaux donnés aux trente et aux vingt-quatre commissaires.

[13] Nous n'avons retrouvé que le compté relatif à la mission de Paris et de Fréron ils avaient dépensé pour eux deux et leur secrétaire 24.000 francs. La mission des 54 commissaires imposa-t-elle à l'État des sacrifices dans la même proportion, soit 12.000 francs par tête et pour trois semaines ? on arriverait au chiffre de 648.000 livres. Il paraîtrait, d'après la pièce que nous donnons, que les ordonnateurs de la dépense se méfiaient quelque peu de la manière dont la somme allouée serait répartie ; car ils prenaient leurs précautions pour que le secrétaire de ces messieurs reçût sa part, afin de ne pas être obligé de la lui payer deux fois.

CONSEIL EXÉCUTIF PROVISOIRE.

2 janvier 1793.

Sur le rapport fait au Conseil des demandes formées par les citoyens Paris et Fréron, ci-devant commissaires du conseil exécutif, envoyés à Metz et dans toutes les places fortes du département de la Moselle, pour le remboursement des dépenses par eux faites pour l'exécution de leur mission et pour l'indemnité qui est due à chacun d'eux, le conseil exécutif provisoire arrête que le ministre des affaires étrangères est autorisé à faire payer sur le fonds des dépenses secrètes la somme de 24,30 livres, montant de ces réclamations, mais qu'en même temps il s'assurera que le citoyen Sutières, employé dans la même mission avec lesdits citoyens, touche ce qui peut lui titre dû sur ladite somme.

ROLAND, CLAVIÈRE, MONGE, PACHE, GARAT, LEBRUN, GROUVELLE, secrétaire.

[14] Ces demandes de remboursement sont constatées par une délibération du conseil exécutif provisoire, du 6 octobre 1792 :

Sur le rapport fait au conseil que plusieurs réclamations ont été faites par différents fournisseurs pour des dépenses occasionnées par l'envoi qui n eu lieu pendant le mois d'août de divers commissaires dans les départements ;

Le conseil, considérant que tous ces objets ne peuvent être examinés et réglés que par l'un des ministres, et qu'ils ressortissent par leur nature au département de l'intérieur, arrête que le ministre de l'intérieur sera prié de faire vérifier et de faire payer, sur les fonds destinés aux dépenses extraordinaires, les fournitures et autres dépenses occasionnées par l'envoi desdits commissaires, comme aussi d'ordonner dans sa sagesse toutes les autres dispositions nécessaires pour faire cesser les réclamations cet égard.

[15] Voir les affirmations de Sergent et de Lidon, séance du 26 novembre, Journal des Débats et Décrets.

[16] Il ne faut pas confondre Royou-Guermeur avec le conventionnel de ce nom, qui était du même département (Finistère), mais n'avait avec lui aucun lien de parenté.

[17] Duchatellier, Histoire de la Révolution dans les départements de l'ancienne Bretagne, t. II, p. 199.

[18] La lettre des administrateurs du Finistère est au Moniteur du 15 février, compte rendu de la séance du 12 février 1793.

[19] Ce passage est une preuve nouvelle des effroyables dilapidations qui s'étaient commises au comité de surveillance de la Commune pendant les premiers jours de septembre, et cette preuve, nous la trouvons dans un écrit signé d'un des membres mêmes de ce comité. Seulement, comme tout mauvais cas est niable, les voleurs se rejetaient les uns aux autres la responsabilité des vols.

[20] La lettre de Marat est donnée par M. Duchatellier, p. 199-200 du tome II de son Histoire de la Révolution dans les départements de l'ancienne Bretagne. Nous avons été assez heureux pour retrouver la lettre de Guermeur. On a ainsi la demande et la réponse.

[21] Cette pièce est au Moniteur du 15 février 1793.

[22] Cette scène est racontée au Moniteur des 16 et 17 février 1793, n° 213 et 214, et dans le Journal des Débats et Décrets, p. 174-176, n° 148.

[23] Voir le Journal des Débats et Décrets, n° 167, p. 42-44, et le Moniteur du 5 mars 1793, n° 64.

[24] Le savant auteur de l'Histoire de la Révolution dans les départements de l'ancienne Bretagne, M. Duchatellier, cite de Guermeur un trait trop honorable pour que, dans notre impartia.titû, nous le passions sous silence ; ses opinions ultra-démagogiques ne l'empêchèrent pas de cacher dans sa propre maison, en 1793, son frère, le rédacteur de l'Ami du Roi.