Dans le système adopté par l'Assemblée constituante pour l'organisation des administrations municipales et départementales, à Paris comme dans le reste de la France, la base du droit électoral reposait sur la distinction faite entre les citoyens actifs et ceux qui ne l'étaient pas. Étaient citoyens actifs tous ceux qui, justifiant de la qualité de Français, avaient atteint la majorité de vingt-cinq ans et payaient une contribution directe de trois journées de travail. Les citoyens actifs se réunissaient en assemblées primaires. A Paris, ces assemblées avaient pris le nom de sections, et étaient au nombre de quarante-huit[1]. Les citoyens actifs élisaient directement les divers fonctionnaires de leur section. Ils élisaient aussi les électeurs du second degré dans la proportion d'un électeur à raison de cent citoyens présents ou absents, ayant droit de voter. Ces électeurs devaient non-seulement être pris parmi les citoyens actifs de la section, mais justifier du payement d'une contribution directe de la valeur de dix journées de travail. Ils étaient nommés pour exercer leurs fonctions jusqu'à la prochaine réunion des assemblées primaires. L'almanach de 1792 donne le nom, la profession et l'âge des huit cent douze électeurs de Paris et des cent trente-huit électeurs des seize cantons, qui formaient les districts de Saint-Denis et de Sceaux. On trouve dans cette liste, curieuse à plus d'un titre, les noms de plusieurs agitateurs qui préludaient, dans ces fonctions obscures, aux destinées plus hautes qui les attendaient pendant la période ultra-révolutionnaire. Le nombre de huit cent douze électeurs suppose, à Paris, à peu près quatre-vingt-deux mille citoyens actifs inscrits sur les registres civiques. Les scrutins de cette époque montrent combien peu d'électeurs prenaient part aux opérations des assemblées primaires ils constatent le vote de dix à douze mille électeurs, quelquefois de beaucoup moins. Les électeurs du second degré étaient appelés à nommer les députés à t'Assemblée nationale, les administrateurs de département, l'évêque, les juges de district, etc. Aux termes du décret des 21 mai-27 juin 1790, spécial pour la capitale, la municipalité parisienne se composait d'un maire, de seize administrateurs, de trente-deux membres du conseil, de quatre-vingt seize notables, d'un procureur de la commune et de deux substituts. (Art. 5 du titre Ier.) Il y avait, en outre, un secrétaire-greffier, deux greffiers adjoints, un trésorier, un garde des archives et un bibliothécaire nommés par le conseil municipal et dont les fonctions étaient déclarées incompatibles avec celles de membres de la municipalité[2]. (Art, 21 et 39 du titre Ier.) Le maire, le procureur de la commune et ses deux substituts étaient nommés directement par un scrutin individuel, ouvert simultanément dans les quarante-huit sections. (Art. 15 du titre Ier, art. 5 du titre II.) Le maire et le procureur de la commune devaient être élus à la majorité absolue des voix, aux deux premiers tours de scrutin ; mais, au troisième tour, un ballottage s'établissait entre les deux citoyens qui avaient obtenu le plus de suffrages aux scrutins précédents, et la majorité relative suffisait. — Art. 11 et 13 des décrets généraux déclarés applicables à la municipalité parisienne. Les deux substituts étaient nommés à la pluralité relative, pourvu qu'ils eussent réuni le quart des voix des votants. Au troisième tour de scrutin, ce quart des voix n'était pas même exigé. L'article 18 du titre Ier déclarait que, pour la nomination des membres du corps municipal et des quatre-vingt-seize notables, la population de Paris exigeait une forme de scrutin particulière. Voici la forme compliquée que le législateur de 1790 avait imaginée : Chacune des quarante-huit sections choisissait trois membres de la municipalité pris parmi les éligibles de la section. Ce choix se faisait au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages. (Art. 9 et 10 du titre II.) La liste des cent quarante-quatre membres ainsi élus, avec leurs demeures et qualités, devait être imprimée, affichée et envoyée aux quarante-huit sections. (Art. 14 du titre II.) Le lendemain de cet. envoi, les sections étaient tenues de s'assembler et de procéder à la lecture de la liste imprimée. Chaque section avait le droit d'accepter ou de refuser la nomination des citoyens compris dans ta' liste et votait successivement sur chacun des cent quarante-quatre élus par assis et levé, sans discussion. (Art. 15 du titre II.) Les résultats de la présentation de la liste dans chaque section devaient être envoyés à l'Hôtel de ville, et les citoyens qui n'étaient pas acceptés par la moitié des sections plus une étaient retranchés de cette liste sans autre information. (Art. 16 du titre II.) Les sections, dont un ou plusieurs élus avaient ainsi subi l'ostracisme de la majorité des autres sections, étaient tenus de remplacer dans les vingt-quatre heures les membres retranches de la première liste. (Art. 17 du titre II.) Ces nouveaux élus étaient soumis à la même présentation que ceux qu'ils avaient remplacés, et la municipalité n'était complète que lorsque chacun de ses cent quarante-quatre membres avait ainsi subi la censure et l'acceptation des quarante-sept sections autres que celle qui l'avait élu directement. (Art. 18 et 15 du titre II.) La liste des membres du conseil général étant ainsi définitivement arrêtée, il s'agissait de choisir entre eux les quarante-huit membres du corps municipal. Pour cela on se livrait à une autre opération plus compliquée encore que la première. Dans chacune des quarante-huit sections s'ouvrait un scrutin de liste ; chaque électeur ne pouvait inscrire sur son bulletin que dix noms choisis parmi ceux de la liste des cent quarante-quatre. Le résultat du scrutin de chaque section était apporté à l'Hôtel de ville, et ceux des membres du conseil général, qui se trouvaient avoir réuni le quart des suffrages, ainsi recensés dans tout Paris, étaient déclarés membres du corps municipal. Cette liste, si elle ne sortait pas tout entière du premier, se complétait par un deuxième et un troisième scrutin. Pour ce dernier la pluralité relative des suffrages suffisait à la validité de l'élection. (Art. 19-27 du titre II.) Ceux des cent quarante-quatre qui ne se trouvaient pas faire partie des quarante-huit membres du corps municipal restaient membres du conseil général en qualité de notables. (Art. 31 du titre II.) Enfin, parmi les quarante-huit membres du corps municipal, il fallait encore choisir les seize administrateurs chargés de la direction des diverses parties du service municipal. Ces seize administrateurs étaient désignés par le conseil général au scrutin individuel et à la majorité absolue des suffrages. Dans ce système d'élection très-compliqué, on avait cherché à combiner d'une manière plus ou moins satisfaisante l'élection individuelle et l'élection par scrutin de liste, l'élection directe pour le conseil et l'élection à deux degrés pour l'administration. On faisait même à l'alea une part assez considérable ; en effet, chaque bulletin de liste pour l'élection des quarante-huit ne contenant que dix noms sur cent quarante-quatre, le scrutin pouvait produire des résultats en dehors de toute prévision et donner souvent à la minorité l'occasion de l'emporter sur la majorité elle-même. Le maire, le procureur de la commune et les officiers municipaux devaient rester en fonction deux ans, et le renouvellement de la moitié du conseil se faire le dimanche après la Saint-Martin de 1791[3]. (Art. 42 du titre II.) Le corps municipal était tenu de s'assembler une fois au moins tous les quinze jours. (Art. 27 du titre Ier.) Les seize administrateurs se réunissaient en bureau au moins trois fois par semaine (art. 20 du titre III), et se divisaient pour les besoins du service en cinq départements subsistances, police, finances, établissements publics, travaux publics. (Art. 18 du titre III.) Le maire était déclaré chef de la municipalité, président des divers bureaux, du corps municipal — les quarante-huit —, du conseil général — les cent quarante-quatre —. Il avait voix délibérative dans toutes les assemblées. (Art. 1 du titre III.) II avait la haute surveillance 'de toutes les parties de l'administration confiées aux seize administrateurs, mais par cela même il n'avait pas le droit d'administrer ; seulement, si les délibérations d'un bureau ou les ordres d'un administrateur lui paraissaient contraires au bien général, il pouvait en suspendre l'effet, mais à la charge par lui de le déclarer aussitôt et de convoquer, dans les vingt-quatre heures, selon la nature de l'affaire, le bureau, le corps municipal où le conseil général de la commune. (Art. 4 du titre IV.) Lorsqu'il présidait un des bureaux d'administration, il avait voix prépondérante en cas d'égalité de voix, mais ceux qui étaient d'un avis contraire au sien. pouvaient porter l'affaire au corps municipal. (Art. 5 du titre III.) Enfin, avant de rapporter une affaire au conseil général, on devait la communiquer sommairement au maire ; s'il ne se présentait pas, on pouvait procéder à, la délibération malgré son absence. (Art. 39 du titre III.) La première place, dans les cérémonies publiques de la ville, appartenait au maire ; il était à la tête de toutes les députations[4] (art. 16 du titre III) ; mais son pouvoir réel était tellement limité que Je même article ajoutait qu'une délibération du corps municipal devait désigner les emplois dont il aurait la présentation. Les quarante-huit sections avaient été chargées de déterminer, sur la proposition de la municipalité provisoire, le traitement du maire, les indemnités à accorder aux administrateurs, au procureur de la commune, à ses deux substituts, au secrétaire-greffier et à ses adjoints. Nous avons eu la curiosité de connaître le montant de ces traitements et indemnités, et les recherches que nous avons faites aux archives de la cour des comptes nous ont permis de fixer, pour 1792, la quotité de chacun d'eux.
Les membres du corps municipal et du conseil général, le procureur de la commune et ses substituts ne pouvaient être révoqués, mais ils pouvaient être destitués pour cause de forfaiture jugée. (Art. 38 du titre Ier.) L'article 57 du titre Ier disait bien que la municipalité parisienne devait être entièrement subordonnée à l'administration du département de Paris, pour ce qui concernait les fonctions qu'elle exerçait, par délégation de l'administration générale ; seulement on avait omis d'indiquer comment cette subordination pourrait être rendue effective. Dans une phrase incidente, reléguée à l'article 8 du titre III, la loi déclarait que toutes les séances du conseil général seraient publiques. Enfin, l'article 60 du titre Ier réglait encore incidemment le droit de pétition, en déclarant que les citoyens actifs avaient le droit de se réunir, paisiblement et sans armes, en assemblées particulières, pour rédiger des adresses et des pétitions, soit au corps municipal, soit à l'administration du département de Paris, soit au corps législatif, soit au roi, sous la condition de donner aux officiers municipaux connaissance du temps et du lieu de ces assemblées, et de ne pouvoir députer que vingt citoyens actifs pour porter et présenter l'expression de leurs vœux. Les dispositions .relatives aux assemblées de section étaient contenues dans l'article 19 du titre Ier et dans l'article 1er du titre IV. Selon l'article 19, après les élections, les citoyens actifs ne pouvaient ni rester assemblés, ni s'assembler de nouveau sans une convocation ordonnée par le corps municipal. Mais, en vertu de l'article 1er du titre IV, ce corps était tenu de convoquer l'assemblée des quarante-huit sections, lorsque huit d'entre elles l'auraient demandé. Il fallait seulement 1° que ce vœu eût été émis dans une assemblée de la section composée de cinq cents citoyens actifs au moins, et 2° que cette assemblée eût été provoquée par cinquante citoyens actifs. Pour donner aux citoyens la possibilité de mettre en jeu ces assemblées successives des sections, l'article 4 du titre IV avait institué dans chacune d'elles un comité permanent de seize commissaires, devant se réunir tous les huit jours au moins. Sous l'autorité du corps municipal et du conseil général de la commune, ils étaient spécialement chargés de surveiller et de seconder les commissaires de police (art. 5), de veiller à l'exécution des ordonnances, arrêtés et délibérations, sans y apporter aucun obstacle ni retard (art. 6), et de donner aux divers membres de la municipalité tous les éclaircissements, instructions et avis qui leur seraient demandés. La nomination de ces seize commissaires avait encore lieu d'une manière bizarre et qui permettait souvent à la minorité d'imposer ses choix à la majorité. Chaque électeur ne devait inscrire que six noms sur son bulletin on était élu dès le premier tour de scrutin si l'on réunissait le tiers des suffrages exprimés. (Art. 27 du titre IV.) Il en était de même au deuxième tour ; le tiers n'était même plus nécessaire au troisième. La liste était formée ou complétée, suivant les cas, à la simple majorité relative. Aussi vit-on des commissaires être nommés par un nombre de voix très-minime. Les comités n'avaient pas de fonctions bien déterminées ; mais peu à peu leur importance s'accrut à raison des fréquentes convocations des sections, car on trouvait toujours facilement cinquante citoyens actifs disposés à signer les demandes nécessaires pour les valider. A une époque où tout était à l'élection, tes commissaires de police étaient eux-mêmes élus pour deux ans par leurs sections respectives. (Art. 12 du titre IV.) Il en était de même des juges de paix institués par la loi des 16-27 août 1790, dans chacune des quarante-huit sections, et qui, outre leurs fonctions civiles avaient en main la police de sûreté, le droit de lancer des mandats d'amener et d'exercer toutes les fonctions aujourd'hui attribuées par notre code criminel aux juges d'instruction. En 1789, la garde nationale, à Paris, s'était formée spontanément. Elle avait été naturellement divisée en soixante bataillons, correspondant aux soixante districts alors existants et portant le même nom que chacun de ces districts. Elle fut réorganisée par un décret du 23 septembre 1791, qui conserva la division en soixante bataillons et en forma six légions chacune de dix bataillons. Cette division ne correspondait plus à celle des sections qui n'étaient, comme on l'a vu plus haut, qu'au nombre de quarante-huit[6]. Aussi les sections, lorsqu'elles prirent de l'importance, se plaignirent-elles de n'avoir pas chacune un bataillon à leur disposition, et elles employèrent les huit premiers mois de l'année 1792 à demander sans relâche que l'organisation de la garde nationale rentrât dans le même cadre que celui des sections ; elles n'y réussirent' qu'après le 10 août. Dès lors la garde nationale perdit le nom glorieux sous lequel elle avait fait ses premières armes, pour prendre celui de sections armées. L'article 10 du décret du 23 septembre 1791 portait qu'il n'y aurait plus de commandant général de la garde nationale parisienne et que chacun des six chefs de légion en ferait .les fonctions et exercerait le commandement pendant un mois à tour de rôle[7]. Tous les citoyens actifs étaient tenus de se faire inscrire sur les contrôles de la garde nationale, sous peine de voir suspendre l'exercice de leur droit civique. Tous les fils des citoyens actifs étaient également tenus d'y entrer dès l'âge de dix-huit ans accomplis. — Loi du 29 septembre, spéciale à Paris, loi générale du 14 octobre 1791, qui réglait l'organisation de la garde nationale pour le reste de la France. Dans les premiers mois de 1792, la garde nationale parisienne formait un effectif de 32.600 hommes. (Voir l'Almanach Royal de 1792.) A chacun des soixante bataillons, les lois du 29 septembre 1781 et du 18 mars 1792 avaient permis d'attacher deux pièces d'artillerie. Tous les bataillons usèrent avec empressement de cette faculté et eurent une section de canonniers[8]. Aux termes de l'article 18 de la loi du 23 septembre, chaque compagnie nommait ses officiers au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages, et ses sous-officiers à la pluralité relative. Les officiers et sergents d'un bataillon élisaient les chefs de bataillon. Les chefs de bataillon, les capitaines et lieutenants d'une légion nommaient le chef de légion et son état-major. Ces dernières nominations se faisaient toutes au scrutin individuel et à la majorité absolue des suffrages. Le droit de requérir la force armée avait été confié aux épiciers municipaux par la loi des 21 octobre-21 novembre 1789. En cas de troubles intérieurs, ils étaient tenus de déclarer que la force militaire devait être déployée à l'instant pour rétablir l'ordre public. (Art. 1er.) Cette déclaration devait se faire en exposant à la principale fenêtre de la maison de ville et en portant dans les rues et carrefours un drapeau rouge. (Art. 2.) Les gardes nationales, les troupes réglées et la maréchaussée, requises par les officiers municipaux, étaient tenues de marcher sur-le-champ, précédées d'un drapeau rouge et accompagnées d'un officier municipal au moins. (Art. 4.) Après trois sommations faites à haute voix par cet officier municipal, la force des armes devait être employée sans que personne fût responsable des événements qui pouvaient résulter. (Art. 6 et 7.) Il devait être dressé par les officiers municipaux procès-verbal de tous les faits. (Art. 11.) Quand les troubles étaient apaisés, les officiers municipaux rendaient un décret qui faisait cesser la loi martiale, et le drapeau rouge était retiré. (Art. 2.). La loi des 27 juillet-3 août 1791, rendue après les événements du Champ de Mars, déclarait (art. 26) que si les progrès d'un attroupement ou émeute populaire rendaient nécessaire l'usage rigoureux de la force, un officier civil, soit juge de paix, soit officier municipal, procureur de la commune ou commissaire de police, soit administrateur de district ou de département, soit procureur syndic ou procureur-général-syndic, devait se présenter sur le lieu de l'attroupement et prononcer à haute voix trois sommations, chacune précédée d'un roulement de tambour. Les paroles sacramentelles de ces trois sommations étaient celles-ci : Obéissance à la loi ; — on va faire usage de la force ; — que les bons citoyens se retirent ! Après les trois sommations et même dans le cas où, après la première ou la seconde, il devenait impossible de faire les autres, la force devait être déployée à l'instant contre les séditieux. Aux termes de l'article 28, l'obligation de se présenter devant l'attroupement incombait d'abord au procureur de la commune et au commissaire de police, et à leur défaut successivement à tous les officiers municipaux, au juge de paix, au procureur-général-syndic et, faute de ce dernier, à tous les membres du directoire du département. Les officiers municipaux avaient toujours, sous leur responsabilité, le droit de suspendre les réquisitions ou d'arrêter l'action de la force publique faite ou provoquée par les procureurs des communes. Les directoires de district et les directoires de département avaient le même droit à l'égard des officiers municipaux et départementaux qui pouvaient requérir la force publique. (Art. 35.) Ainsi, la résistance d'un corps délibérant pouvait entraver les réquisitions faites par les magistrats chargés spécialement de veiller à la sûreté des personnes et à la tranquillité publique. Quant au pouvoir central, il ne paraissait nulle part ; dans la constitution de l'administration municipale comme dans celle de l'administration départementale, il n'avait aucun moyen d'action par lui-même ; il ne possédait qu'un seul droit, celui de suspendre de leurs fonctions les administrateurs qui compromettaient par leurs actes la tranquillité publique. (Constitution de 1791, chap. IV, sect. II, art. 5.) L'article 1er de la section III de la loi du 22 décembre 1799 attribuait aux administrations de département l'assiette des contributions. L'article 2 les chargeait sous l'autorité et l'inspection du roi, comme chef suprême de la nation et de l'administration générale du royaume, de toutes les parties de cette administration notamment de celles qui sont relatives 1° au soulagement des pauvres et à la police des mendiants et vagabonds ; 2° à l'inspection et à l'amélioration du régime des hôpitaux, hôtels-Dieu, établissements et ateliers de charité, prisons, maisons d'arrêt et de correction ; 3° à la surveillance de l'éducation publique et de l'enseignement politique et moral ; 4° à la manutention et à l'emploi des fonds destinés en chaque département à l'encouragement de l'agriculture et de l'industrie à toute espèce de bienfaisance publique à la garde et à l'entretien des propriétés publiques ; 6° à la conservation des forêts, rivières, chemins et autres choses communes ; 7° à la direction et confection des travaux concernant les routes, canaux et autres ouvrages publics autorisés dans le département ; 8° à l'entretien, réparation et reconstruction des églises, presbytères et autres objets nécessaires au service du culte religieux ; 9° au maintien de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques ; 10° enfin au service et à l'emploi des milices ou gardes nationales, tels qu'ils étaient réglés par les décrets particuliers dont nous avons parlé précédemment. Les délibérations des conseils de département sur tous les objets qui intéressaient l'administration générale du royaume ne pouvaient être exécutés qu'après avoir reçu l'approbation du souverain. (Art. 5.) Le département de Paris, pourvu de toutes ces attributions, était organisé exactement de la même manière que ceux du reste de la France. Le conseil général se composait de trente-six membres nommés par les électeurs du deuxième degré. Il élisait dans son sein un directoire de huit membres, présidé par le président même du conseil général. Près de ce directoire et de ce conseil était placé un procureur-général-syndic, élu au scrutin individuel et à la majorité absolue des suffrages par les mêmes électeurs qui venaient de nommer le conseil généra). Ce procureur-général-syndic n'avait pas voix délibérative, mais il recevait communication de tous les rapports faits au directoire et au conseil, et il devait être entendu avant toute délibération. Le conseil général n'avait qu'une session d'un mois par an, et toutes les affaires étaient administrées, toutes les décisions étaient prises dans l'intervalle des sessions par le directoire[9]. |
[1] Avant 1789, la ville de Paris était partagée en vingt et un quartiers. L'article 8 du règlement fait par le roi, le 23 avril 1789, pour la convocation des trois états de la ville de Paris, divisa cette ville en soixante-arrondissements ou districts. Cette division servit naturellement à la première organisation municipale qui s'établit d'elle-même après la prise de la Bastille et subsista jusqu'à la loi du 27 juin 1790. Mais plusieurs de ces districts, et notamment celui des Cordeliers, ayant été les promoteurs de désordres très-graves, on essaya, par la nouvelle division en quarante-huit sections, de rompre le concert qui s'était formé entre les turbulents d'une même circonscription. Mais on n'y réussit pas, et les sections furent bientôt sous l'influence des mêmes meneurs que l'on avait voulu dépayser en abolissant les districts.
La division en quarante-huit sections, toujours avec les mêmes circonscriptions, a subsisté depuis 1790 jusqu'à 1860 ; elle n'a été détruite que par l'annexion des communes suburbaines situées en deçà des nouvelles fortifications seulement, te nom de section, qui rappelait de fâcheux souvenirs, avait été remplacé depuis longtemps par celui de quartier.
[2] C'est pour cela que l'on voit très-fréquemment le secrétaire-grenier et les greffiers adjoints, au moment de leur élection à ces fonctions, remplacés comme membres du conseil général dont ils faisaient auparavant partie. Ainsi arriva-t-il à Royer-Collard, sous la première municipalité, à Tallien, Coulombeau et autres, sous la seconde et la troisième municipalité.
[3] Elle eut lieu, en fait, deux ou trois mois plus tard, au commencement de 1792.
[4] C'est ce qui explique comment, dans plusieurs circonstances, on vit arriver le maire de Paris à la tête de députations apportant à l'Assemblée nationale des pétitions qui n'avaient nullement son assentiment. Ainsi Bailly fut obligé d'accompagner Danton, lorsque celui-ci vint, le dû novembre 1790, lire au nom des quarante-huit sections de Paris une adresse des plus violentes, où l'on demandait à l'Assemblée de déclarer que trois ministres, MM. de Saint-Priest, La Tour du Pin et Champion de Cicé étaient indignes de la confiance publique et devaient être traduits devant une haute cour nationale. Quel rôle pitoyable la loi faisait jouer au premier magistrat de la capitale !
[5] Les assignats ne perdaient pas encore beaucoup de leur valeur.
[6] Les bataillons de garde nationale avaient conservé le nom qu'ils portaient du temps des soixante districts ; les quarante-huit sections avaient pris des noms nouveaux. Cette différence, qui exista de 1780 à 1792, dans la désignation des bataillons et des sections, a été, pour les historiens nos devanciers, une cause permanente d'erreur. S'ils avaient fait la distinction que nous venons d'établir, ils n'auraient pas pris pour des noms de sections des noms qui reviennent à chaque instant dans l'histoire et qui n'appartenaient qu'à des bataillons, ceux, par exemple, des Filles-Saint-Thomas, de la Butte des Moulins, du Val-de-Grâce, des Enfants-Trouvés, etc.
[7] Les six chefs de légion étaient, en 1793, Bouillard de Belair, Acloque, Ramainvilliers, Mandat, Pinon, Baudin de La Chesnaye.
Sur ces six officiers généraux, trois périrent, durant la même année, de mort violente
Mandat, le 10 août au matin, sur les mêmes marches de l'Hôtel de ville ;
Ramainvilliers et La Chesnaye, le 2 septembre dans les massacres des prisons.
[8] La plupart de ces canonniers sortaient des anciens régiments de gardes françaises. Ils jouèrent un très-grand rôle dans tous les événements de 1792 et 1793, et toujours se montrèrent ultra-révolutionnaires.
[9] Le directoire du département de Paris, au commencement de 1792, se composait du duc de La Rochefbuca.utd, président ; Anson, vice-président, Germain-Garnier, Davous, Talleyrand, Brousse-Desfancherets, Thion de La Chaume, Démeunier et Beaumez.