HISTOIRE ROMAINE

SECONDE PARTIE. — RÉPUBLlQUE

CHAPITRE XVIII.

 

 

LE monde entier avait les yeux tournés vers Pompée. C’était l’homme du jour. Velleius Paterculus en trace ainsi le portrait. Lucilia, sa mère, sortait d’une famille de sénateurs. La beauté qu’on remarquait en lui n’était pas celle qui tient à la fleur de l’âge. C’était un caractère de dignité solide, conforme à sa grandeur et à sa fortune futures, et qu’il conserva jusqu’à son dernier jour. D’une vie remarquablement pure, de mœurs irréprochables, d’un talent oratoire médiocre, passionné pour le pouvoir, mais voulant qu’on lui en fit hommage et non pas s’en emparer : grand capitaine d’armée, citoyen tranquille pendant la paix, tant qu’il n’eut pas un égal à craindre : ami constant, pardonnant aisément une offense, facile à satisfaire et d’une sincérité parfaite dans la réconciliation, n’abusant jamais, ou du moins rarement, de la puissance, Pompée eût été presque exempt de vices, si ce n’était le plus grand de tous, dans une ville libre et maîtresse du monde, de ne pouvoir souffrir un égal là où l’égalité régnait de droit entre tous les citoyens. Accoutumé, depuis qu’il avait pris la robe virile, à servir dans l’armée de son père, général habile (dans la guerre des Marses), il avait heureusement appliqué à l’étude de la science militaire sa facilité naturelle et son intelligence. A la mort de Sulla, Pompée avait vingt-trois ans. Le dictateur, qui l’avait salué du nom de grand, le comparait au soleil qui se lève. Le sénat s’inclina devant l’astre naissant. Lepidus ; proconsul dans la Narbonnaise, avait provoqué un soulèvement en faveur de la puissance tribunitienne. Le gouverneur de la Cisalpine, Junius Brutus, s’était déclaré pour lui. Les vétérans de Sulla accourent autour de Pompée et du consul Catulus. Lepidus, mis hors la loi, est battu près du pont Milvius. Défait de nouveau en Etrurie, il s’embarque à Cosa et va mourir en Sardaigne (77).

La résistance de Sertorius en Espagne prend le caractère d’une guerre suivie, menaçante pour Rome. Le chef des débris du parti de Marius n’était pas un homme vulgaire. Démocrate résolu, plein de droiture, sans emportement et sans violence, Sertorius avait réprimé les excès des Bardiens dans la guerre civile et fait tuer à coups de flèches quatre mille de ces monstres. Soldat intrépide, il avait rendu de grands services à Cæpion et à Marius dans la guerre contre les Teutons (102). Tribun en Espagne (91) et questeur en Gaule (92), il fait des prodiges de valeur et a l’œil crevé en s’exposant dans la guerre marsique (88). En 83, il retourne en Espagne, d’où il passe en Mauritanie, et remporte une victoire sur Paccianus, un des lieutenants de Sulla. Revenu auprès des Lusitaniens, il accepte d’être leur chef et tient tête à la puissance romaine. Tous, les proscrits se rangent sous ses drapeaux. Son camp devient une seconde Rome. Un sénat de trois cents membres, composé de notables émigrants, administre la péninsule à la façon du sénat romain. Des milliers de nobles Espagnols lui jurent fidélité jusqu’à la mort. Des corsaires favorisent ses relations avec l’Italie et l’Asie Mineure. Mithridate lui promet son concours. Sa tactique d’escarmouches et de combats partiels jette dans les plus grands embarras Metellus Pins, général habile, mais trop méthodique, envoyé contre lui. Pour affermir son autorité parmi ses soldats, Sertorius feint qu’une biche blanche le met en communication avec des dieux familiers. Mais c’est surtout sa loyauté, sa bravoure et sa constance qui le rendent cher aux Espagnols et aux Romains. Plutarque raconte que, voyant autour de lui tous ces hommes dévoués, obligés de fuir leur patrie ensanglantée par les proscriptions, il songea un moment à s’en aller fonder une nouvelle Rome dans les Iles Fortunées. Des marins, arrivés de l’Atlantique, lui en avaient fait la plus riante peinture ; mais les soins urgents de la guerre le détournent de ce dessein.

Un de ses partisans, Perpenna Vento, était venu s’unir à lui avec de grosses sommes d’argent et une nombreuse armée. Ce renfort arrive à propos. Il aide Sertorius à battre successivement, près de Sucro et de Tuttia, Metellus, Afranius et Pompée. Mais bientôt la jalousie pousse Perpenna à la trahison. Furieux de rester en sous-ordre, gagné peut-être par des offres d’argent, il forme un complot contre Sertorius. On était au quartier général d’Osca. Un message annonce que les troupes ont remporté une victoire éclatante. Contre l’usage Sertorius permet de fêter par le vin cette heureuse nouvelle. Au milieu de ce banquet, Perpenna laisse tomber une coupe qui résonne sur le pavé. C’était le signal convenu. Le voisin de table de Sertorius, Marcus Antonins, lui porte le premier coup. Sertorius résiste : une lutte s’engage ; et les autres convives, affiliés à la conjuration, tuent Sertorius à coups de poignard (72). Perpenna se met ensuite à la tête des troupes, mais il est battu par Pompée et fait prisonnier. Pour sauver sa tête, il livre au vainqueur la correspondance de Sertorius. Pompée, par un beau mouvement de générosité, ordonne de briller toutes ces lettres sans les lire, et livre le traître aux exécuteurs. Les restes de l’armée sertorienne, après une lutte inutile ; se réfugient en Libye ou à bord des pirates. Plus tard la loi Plotia, appuyée par le jeune César, leur permet de rentrer dans leur patrie. Pompée élève un trophée fastueux sur le sommet de la passe des Pyrénées, et rentre dans Rome, où il est salué, avec Metellus, par les acclamations du peuple (71).

Une nouvelle guerre l’attendait en Italie. Soixante-dix-huit gladiateurs s’étant échappés, à Capoue, de la salle d’escrime de Lentulus, se donnent pour chefs le thrace Spartacus, et les deux celtes Crixus et Œnomaüs. Ils appellent les esclaves sous leurs drapeaux au cri de liberté, et bientôt ils ont réuni plus de dix mille combattants. Clodius Glaber, avec trois mille hommes, les assiège sur le Vésuve, où ils se sont retranchés. Il espère les prendre par la famine ; mais ils se glissent avec des liens de sarments le long des flancs du rocher se massent au pied de la montagne, fondent sur le camp romain par des routes détournées et s’en rendent maîtres Le préteur publias Varinius rassemble alors deux légions et marche vers les gladiateurs formés en troupes régulières : il est battu. Le succès attire à Spartacus de nombreux partisans : pâtres, bouviers, bandits se rangent sous ses ordres, et lui font une armée de quarante mille soldats.

Rome, inquiète de ce soulèvement, décide l’envoi en Campanie de deux consuls Cn. Lentulus et C. Cassius (72). Ils succombent l’un après l’autre sur l’Apennin et devant Modène. Spartacus, fier de ses victoires, délibère s’il marchera sur Rome. En présence de ce danger, le sénat met à la tête de huit légions Marcus Licinius Crassus, célèbre par ses richesses et sa cupidité, général médiocre, mais d’un caractère énergique. Un% premier corps ayant fui devant les gladiateurs, Crassus le fait décimer, et redonne ainsi de la vigueur à ses troupes. Spartacus vaincu recule et prend le chemin de la Lucanie et de Rhegium. Il espère, à l’aide des pirates, passer en Sicile et y soulever les esclaves ; mais le préteur Verrès tient en échec la flottille des corsaires et l’empêche de remuer. A défaut de vaisseaux, les gladiateurs essaient, sur des radeaux faits de claies et de tonneaux liés avec de l’osier, d’affronter les flots rapides du détroit. Ils échouent ; font une attaque désespérée à Sila et à Silarus (Sele), et périssent en hommes de cœur, sans demander quartier (71). Spartacus, qui avait égorgé son cheval avant d’en venir aux mains, se défend avec le courage du lion ; blessé mortellement, genoux en terre, il frappe encore de sa lance l’ennemi qui le tue. Crassus, soutenu par un corps d’armée de Pompée, revenu d’Espagne, donne une chasse à outrance aux restes des bandes vaincues. Les aigles perdues sont reconquises et, sur toute la voie qui va de Rome à Capoue, sur un espace de cinquante lieues, six mille croix, portant les cadavres d’esclaves suppliciés, attestent le triomphe de Rome sur l’esprit de rébellion. Crassus avait préparé la victoire, Pompée en recueille les fruits. A son retour, le peuple qui l’attend avec impatience, le salue du nom de héros invincible.

La guerre des pirates augmente encore sa popularité. La Cilicie rude ou trachée (Challekim, pierre), avec ses ports nombreux et ses montagnes qui descendent jusqu’à la mer, servait de repaire à une foule de bandits, qui avaient établi sur toutes les côtes des arsenaux, des lieux de refuge et des postes d’observation. Les troubles de l’Asie, agitée par Mithridate, permettaient à leurs barques-souris (myoparones) d’exercer impunément leurs déprédations et leurs violences sur la cargaison des navires faisant voile d’Orient en Italie. Les eaux de la Crète, de Cyrène, d’Epire, d’Achaïe et le golfe de Malée, qu’ils appelaient le golfe d’or, offraient un riche butin à eux et à leur chef Isidorus. Nulle contrée maritime, nulle côte, nul voyageur, nul promeneur n’était à l’abri de leur attaque. Ils enlevèrent deux préteurs, revêtus de leur robe de pourpre avec les licteurs qui portaient les faisceaux. La sœur d’Antonins, magistrat honoré du triomphe, ne fut rendue à la liberté qu’en échange d’une grosse rançon. On raconte qu’ils enlevèrent également Jules César, qui leur imposa par son sang-froid, son énergie et par son audace. Il leur demanda trente jours pour payer sa rançon de cinquante talents, la paya, arma quelques vaisseaux à Milet, vint les attaquer dans l’île de Pharmacuse, les fit prisonniers et les pendit comme il les en avait menacés en riant. On vit toutefois par là qu’ils n’étaient pas invincibles.

La marine romaine ayant été singulièrement affaiblie durant les troubles civils, Publius Servilius combat les pirates plutôt sur terre que sur mer, détruit leurs plus fortes places, Phaselis, Olympe et Isauria, le boulevard de la Cilicie, ou ils avaient accumulé d’immenses dépouilles. Cette expédition lui vaut le nom d’Isauricus. En Crète, on envoie contre eux Marcus Antonins, le père du triumvir ; mais il échoue honteusement et n’use de son pouvoir que pour piller les provinces. Plus tard, Metellus met l’île de Crète à feu et à sang, enferme les pirates dans leurs châteaux et leurs places de guerre, Gnosse, Érythrée, Cydonie, défait les chefs des Cydoniens, Lasthène et Panarès, et revient triomphant à home recevoir le nom de Creticus, tandis qu’un autre Metellus revoit celui de Balearicus pour avoir dispersé et détruit les flibustiers frondeurs des îles Baléares.

Il était réservé à Pompée de terminer la guerre piratique. La loi Gabinia lui confère la dictature maritime sur toutes les mers, îles et pays de côte jusqu’à dix milles à l’intérieur des terres avec un plein pouvoir illimité pour trois ans. Muni de troupes nombreuses, d’argent et de navires, Pompée divise en treize circonscriptions toutes les eaux de la Méditerranée, pourchassé, avec l’aide de ses lieutenants, les barques-souris des pirates dans les régions les plus lointaines, les emprisonne comme dans un filet, et les combat victorieusement dans une bataille décisive à la hauteur de Coracesium, sur la côte occidentale de la Cilicie. Quarante jours suffisent à l’heureux général pour nettoyer la mer, rendre la sécurité au commerce et le blé à l’Italie, menacée d’âne effroyable disette. Par une douceur calculée, il fait grâce aux prisonniers, les établit dans les colonies de l’intérieur et notamment dans la ville de Soli, en Cilicie, à laquelle il donne le nom de Pompeiopolis (50).

A peine Pompée a-t-il assuré la domination romaine sur la mer par la destruction de la piraterie, que la loi Manilia lui confère le commandement sur l’Arménie et sur le Pont. Depuis l’existence de Rome, jamais pouvoir semblable n’avait été réuni dans les mains d’un seul homme. Les Grecs de l’Asie-Mineure n’usaient point de flatterie, quand ils l’appelaient le roi des rois.

Pendant les guerres intestines de Rome, Mithridate était relevé de ses défaites tel qu’un lion, dit Montesquieu, qui, regardant ses blessures, n’en est que plus indigné. Reprenant ses plans d’affranchissement et de conquête, il s’allie à Sertorius, et entre à main armée par la Cappadoce dans la Bithynie, que Nicomède III avait laissée en héritage aux Romains, tandis que sa flotte faisait éprouver au consul Cotta et au chef de la flotte romaine, Publius Rutilius Nudus, une sanglante défaite devant Chalcédoine (74). Lucius Lucullus, nommé par le sénat gouverneur d’Asie et de Cilicie parait alors sur le théâtre de la guerre. Il avait sous ses ordres cinq légions composées de trente mille hommes de pied et de seize cents cavaliers. Campé près du Sangarus (Sakarah), lorsqu’il apprend le désastre de Chalcédoine, il accélère sa marche et vient attaquer Mithridate, qui avait commencé le siège de Cyzique, opulente cité alliée des Romains. Les armées du roi étaient affaiblies par la maladie et par la faim. Lucullus les bat près de Rhyndacus, et contraint le roi à se sauver par mer vers le Pont. Non content de vaincre les ennemis sur la terre ferme, il leur donne la chasse sur mer, entre dans les eaux de l’Archipel, coule ou prend trente navires pontiques mouillés à Nea, entre Lemnos et Scyros, et ayant à bord plusieurs émigrés romains, anéantit le reste de la flotte, rassemble sur un même point tous les généraux placés sous ses ordres et refoule Mithridate jusque dans son royaume. Lucullus l’y poursuit, franchit l’Halys avec l’appui de Dejotarus, roi des Galates, et, mettant à profit le succès de son lieutenant Marcus Fabius Hadrianus, qui a détruit la cavalerie pontique, il attaque les forces réunies de Mithridate sur les frontières arméniennes, auprès de Cabira (71).

Mithridate vaincu se réfugie auprès de son gendre Tigrane, roi d’Arménie, qui le retient confiné dans une sorte de prison. Le Pont se soumet sans résistance aux Romains jusqu’à Trapezus (Trébisonde). Tous les trésors du roi tombent entre leurs mains. Les villes grecques du littoral, Amisos, Sinope, Héraclée, qui font mine de tenir tête à Lucullus, sont réduites à la dernière extrémité et les habitants forcés de s’enfuir sur leurs vaisseaux. Le général romain, pour recueillir tous les fruits de sa victoire, marche ensuite contre Tigrane, qui avait étendu sa domination sur l’Euphrate jusqu’à Antioche et la Syrie. Tigranocerta, la capitale de ses États, rappelait par sa grandeur, ses murailles, ses jardins, ses palais, les antiques cités de Babylone et de Ninive. Tigrane accourt au-devant de Lucullus, avec une armée innombrable ; un seul jour de bataille (6 octobre 69) suffit pour l’anéantir. Cent mille Arméniens tombent sous les coups des Romains, qui ne perdent que quelques soldats. Tigrane s’enfuit avec une petite troupe de cavaliers. Sa capitale offre un butin considérable aux vainqueurs ; mais, en même temps, ces richesses, si facilement acquises, développent l’esprit de mutinerie et d’insubordination dans les rangs de l’armée romaine. Les soldats refusent de suivre Lucullus jusqu’à la ville d’Artaxata, qui renfermait les femmes, les enfants et les trésors du roi. Lucullus se replie sur Nisibis, dont il s’empare : là se terminent ses succès.

C’est, en effet, à ce moment que la loi Manilia décerne à Pompée la direction de la guerre d’Arménie. Comme un oiseau de proie lâche et timide, qui suit le chasseur à l’odeur du carnage, Pompée, disait Lucullus, se jette sur le corps abattu par d’autres et triomphe des coups qu’ils ont portés. Il semblait, en réalité, que le peuple romain ne songeât plus qu’à couronner son idole. Lucullus était un homme affable, instruit, opulent, vanté pour son luxe proverbial, amateur éclairé des arts et des chefs-d’œuvre de la Grèce, imitateur élégant de la civilisation hellénique, possédant d’immenses jardins, où les arbres de l’Orient, par exemple les cerisiers, s’unissaient à ceux de l’Italie, habile général, homme bienveillant et intègre, mais il n’était aimé ni du peuple ni des soldats. Pompée, au contraire, voyait grandir chaque jour sa popularité. Fallut-il, dit Montesquieu, faire la guerre à Sertorius, on en donna la commission à Pompée. Fallut-il la faire à Mithridate, tout le monde cria Pompée. Eut-on, besoin de faire venir des blés à Rome, le peuple croit être perdu, si on n’en charge Pompée. Veut-on détruire les pirates, il n’y a que Pompée. Il part donc contre le roi de Pont qui se débat en vain comme dans une agonie. L’armée romaine, forte de cent vingt mille fantassins, de sept mille cavaliers et de cinq cents vaisseaux de guerre se met en campagne.

L’intervalle qui s’était écoulé entre le départ de Lucullus et l’arrivée de Pompée avait rendu le courage à Tigrane et à Mithridate. Le Pont tout entier était retombé au pouvoir de son roi ; mais un désaccord survenu entre les deux princes divise leurs forces et rend plus faciles les victoires de Pompée. Mithridate, abandonné de son allié, attaqué par une armée deux fois plus nombreuse que la sienne, fait une tentative en vue de la paix. Les exigences de Pompée l’obligent à ne plus prendre conseil que de son désespoir. Surpris pendant la nuit par les Romains, aux bords du Lycus, dans un site montagneux et coupé de ravins où s’éleva plus tard la ville de Nicopolis, Mithridate battu n’a plus qu’à s’enfuir avec deux cavaliers à Sinoria, où quelques fidèles le rejoignent (66). Il partage entre eux les trésors qu’il y a déposé et prend sur lui du poison ; puis, remontant l’Euphrate avec le peu de troupes qui lui restent, il va rejoindre le roi d’Arménie ; mais de la mésintelligence Tigrane avait passé à l’abandon et fait sa soumission à Pompée. Le général victorieux traverse alors le Caucase et pénètre chez des peuples inconnus, les Ibères et les Albaniens, pasteur et cavaliers, dont Rome savait à peine le nom et qui reconnaissent sa puissance. Poursuivi et chassé de toutes ses retraites, Mithridate, âgé de soixante-huit ans, conçoit le projet désespéré de marcher sur l’Italie par les pays du Danube, en soulevant tous les peuples sur soit :passage, Mais en lutte avec son propre fils Pharnace, abandonné de ses soldats et de ses sujets, il se réfugie à Panticapée sur le Bosphore cimmérien, s’empoisonne avec toutes les femmes de son harem, et, comme le breuvage n’agis sait pas assez vite, tend la gorge à un esclave gaulois qui l’achève (63).

Pompée, revenant sur ses pas, rentre dans le Pont, force les derniers châteaux qui tenaient encore, en rase les donjons et bouche les puits, en y roulant des blocs de rochers. Passant ensuite dans la Syrie, il met fin à la domination des Séleucides, en dépouillant Antiochus l’Asiatique, qui périt dans une embuscade, fait exécuter plusieurs princes pillards et rapaces, et dispose les États orientaux de telle sorte que la Bithynie avec le Pont, la Cilicie avec la Pamphylie et l’Isaurie, la Syrie avec la Phénicie, deviennent provinces romaines. La Grande Arménie, le Bosphore, la Paphlagonie, la Galatie et la Cappadoce sont donnés à des rois tributaires de Rome.

La Judée, soustraite aux rois de Syrie par le courage des Machabées (marteaux), s’était reconstituée et avait étendu son empire. A la mort d’Alexandre Jannai, le royaume juif touchait à la frontière égyptienne du côté du midi, au royaume des Nabatéens vers le sud-est, embrassait au nord Samarie et la Décapole jusqu’à la mer de Génésareth et ‘s’étendait, sur la côte, depuis le mont Carmel jusqu’à Rhinocorura, en y comprenant la place importante de Gaza. Pompée entreprend de réduire cette contrée. La querelle des Sadducéens et des Pharisiens l’avait affaiblie, en faisant de nombreuses victimes. Les deux fils d’Alexandre Jannai, Hyrcan et Aristobule, après la régence désastreuse d’Alexandra, leur mère, avaient renouvelé la guerre civile. Le questeur de Pompée, Æmilius Scaurus, s’était déclaré pour Aristobule, mais Pompée, intervenant de sa personne dans le débat, rétablit Hyrcan sur le trône, poursuit Aristobule jusque dans Jérusalem, l’y assiège, entre dans le temple et enlève tous les trésors (63). Un grand nombre de Juifs se précipitent du haut des remparts ou se brûlent dans leurs maisons. La Palestine est soumise à la puissance romaine : l’Iduméen Antipater, père d’Hérode le Grand, en devient le procurateur.