Légende de l'expulsion des Tarquins. — A partir du ne siècle il n'y eut plus de roi à Rome. Voici comment on expliquait ce changement : Lucius Tarquin, surnommé le Superbe, après avoir tué Servius, avait forcé le Sénat à le reconnaître pour roi. Il gouvernait en tyran, ne tenant pas compte des lois, faisant tuer les gens qui lui déplaisaient et confisquant leur fortune. Une garde de soldats payés l'aidait à opprimer ses sujets. Il fut riche et puissant, soumit les villes du Latium et fit faire à Rome de grands travaux. Un jour que Tarquin assiégeait la ville d'Ardée, un de ses fils, Sextus, partit du camp, arriva la nuit dans la maison de son cousin Tarquin Collatin et fit violence à sa femme, la vertueuse Lucrèce. Le matin, Lucrèce fit venir son mari et son père Lucretius, leur raconta son aventure, leur fit jurer de punir le coupable et se poignarda. Collatin avait amené son ami Brutus, neveu du roi. Brutus jure de punir la race des Tarquins et de supprimer les rois ; Collatin et Lucretius vont à Rome avec le corps sanglant de Lucrèce et réunissent le Sénat. Le Sénat convoque l'assemblée du peuple, on déclare Tarquin déchu et sa famille exilée. Brutus va au camp, devant Ardée, soulève les soldats et force Tarquin à s'enfuir en Étrurie. Brutus et Collatin sont chargés de gouverner. Cette révolution se fit en 510. Quelque temps après, des envoyés étrusques venaient à Rome sous prétexte de demander qu'on rendit à Tarquin ses biens, et s'entendaient avec plusieurs jeunes gens des principales familles, qui juraient de rétablir le roi déchu ; parmi les conjurés étaient les deux fils de Brutus. Un esclave les entendit et les dénonça. Ils furent condamnés et exécutés. Brutus lui-même ordonna de mener ses fils au supplice. — Les terres que Tarquin possédait au bord du Tibre furent consacrées au dieu Mars ; il fut défendu de les cultiver, ce fut le Champ de Mars. Tarquin arriva avec une armée étrusque, on se battit toute une journée ; Brutus et le fils de Tarquin furent tous deux blessés à mort ; la nuit arrêta la bataille ; aucun des deux partis n'était vainqueur. A minuit, on entendit dans la forêt une voix qui criait : Rome a perdu un homme de moins que les Étrusques. Les Étrusques effrayés s'enfuirent. On éleva au Capitole une statue de Brutus l'épée à la main. Le consulat. — Rien ne fut changé d'abord au gouvernement de Rome, sinon qu'au lieu d'un seul roi élu pour la vie, il y eut deux magistrats élus pour un an seulement ; on les appelait préteurs, plus tard consuls. Le peuple romain les élisait pour un an et leur déléguait son pouvoir. Chacun gouvernait à son tour. Il avait le pouvoir absolu, appelé en latin imperium : il commandait l'armée ; il tenait le tribunal et jugeait ; il convoquait et présidait toutes les assemblées. Il avait le droit de faire arrêter et mettre en prison, le droit de condamner à l'amende et même à mort. En signe de son pouvoir le consul avait les anciens insignes du roi, la chaise d'ivoire[1], la robe de pourpre, ou bordée de pourpre (prétexte). Il était accompagné de 12 licteurs, portant sur l'épaule gauche un paquet de verges (les faisceaux) et une hache au milieu, en signe que le consul avait droit de faire battre de verges et couper la tête à tout citoyen. Les Romains disaient que le consul avait le pouvoir d'un roi, mais ce pouvoir était court et partagé. Le consul ne gouvernait qu'un an et il avait un collègue dont le pouvoir était égal au sien et qui pouvait s'opposer à ses actes. La dictature. — Dans les moments difficiles, en cas d'invasion ou d'émeute, on décidait de remplacer les deux consuls par un chef unique qui commanderait comme autrefois le roi. Un des consuls, la nuit, dans le silence, le désignait. On l'appelait maître du peuple ou dictateur. Il gardait à la fois les 24 licteurs et il n'avait aucun collègue qui pût limiter son pouvoir. Il choisissait lui-même son lieutenant, appelé maître des cavaliers, qui avait 6 licteurs. Une fois le danger passé le dictateur abdiquait ; il ne devait jamais rester en charge plus de six mois. L'Assemblée du peuple. — Les consuls commandaient, mais le peuple romain seul avait le droit de faire les lois, de voter la paix ou la guerre et d'élire les consuls. Il fallait alors réunir les citoyens qui formaient le peuple ; ces assemblées s'appelaient comices. Il y en avait de différentes espèces ; la plus ancienne, les comices par curies, ne servait plus guère que pour des cérémonies religieuses. La principale, l'assemblée par centuries, était le peuple réuni en armée. C'est elle qui votait les lois et les traités et qui élisait les magistrats. Voici comment elle se tenait. Le magistrat, d'ordinaire un consul, ordonnait aux citoyens de se rendre tous à l'armée à un jour fixé : cela s'appelait convoquer l'armée. La nuit qui précédait ce jour, après minuit, le magistrat allait au lieu où devait se tenir l'assemblée ; là il prenait les auspices, c'est-à-dire qu'il demandait aux dieux s'ils approuvaient l'assemblée. Pour cela un augure traçait un carré (le templum) ; le magistrat priait, s'y asseyait et en silence observait les signes qu'allaient envoyer les dieux ; c'étaient les oiseaux ou les poulets sacrés. Si les signes paraissaient défavorables, le magistrat pouvait renvoyer l'assemblée à un autre jour. Si le magistrat trouve les signes favorables, sans sortir du templum, il convoque définitivement l'assemblée, en prononçant la formule : Quirites, je vous ordonne de vous assembler. Alors au milieu de la nuit, sur le rempart et dans la citadelle, les clairons sonnent pour avertir les citoyens. Au point du jour toute l'armée est rassemblée hors de la ville, sur le Champ de Mars, car la religion défend d'être en armes dans l'intérieur de l'enceinte sacrée. Sur l'ordre du magistrat, un crieur public convoque l'assemblée. L'opération commence, c'est d'abord une cérémonie religieuse : on sacrifie une victime, on fait une prière pour supplier les dieux de faire tourner au profit du peuple romain ce qui va être décidé. Puis le magistrat explique pourquoi il a réuni l'assemblée. Il peut, s'il le veut, laisser parler quelqu'un, mais personne n'a le droit de parler sans sa permission. Si l'assemblée a été convoquée pour une élection, le magistrat propose les noms de ceux qu'il permet d'élire ; mais on ne peut en élire d'autres, et il est arrivé qu'un magistrat n'a pas voulu proposer plus de noms qu'il n'y avait de places à remplir ; en ce cas l'assemblée n'a pu que voter sur ces noms. Après avoir exposé le but de la réunion, le magistrat dit : Je vous commande de vous assembler en comices par centuries. Les citoyens vont se ranger chacun dans sa centurie, derrière les étendards. Puis dans chaque centurie un questionneur (rogator) recueille les votes ; chaque citoyen répond oralement ; on calcule alors quel est le vote de la centurie, et c'est la majorité des votes des centuries qui forme la majorité. Car, dans les assemblées romaines, on compte les votes par groupes et jamais par têtes. Depuis l'organisation qu'on attribuait à Servius Tullius, l'armée romaine se divisait ainsi : 18 compagnies (centuries) de cavaliers, 5 corps (classes) de fantassins. Les citoyens étaient répartis dans les classes suivant leur fortune, les plus riches dans la première, et chaque classe était divisée en centuries, de la façon suivante : 1re classe, 80 centuries. 2e classe, 20 centuries. 3e classe, 20 centuries. 4e classe, 20 centuries. 5e classe, 30 centuries. En outre, 2 centuries d'ouvriers, 2 de musiciens, et 1 centurie où l'on mettait tous ceux qui n'avaient pas assez de fortune pour faire partie des classes. En tout, 193. On faisait d'abord voter les centuries de cavaliers et on proclamait leurs votes puis la 1re classe, puis la 2e, et ainsi de suite. Dès que la majorité était obtenue, on s'arrêtait ; en sorte que les citoyens des dernières classes, les moins riches, n'étaient pas même appelés à voter. Une fois le vote terminé, le magistrat proclamait le résultat et ordonnait à l'assemblée de se séparer. L'opération devait être achevée avant le coucher du soleil. Si, pendant que l'assemblée était réunie, il se produisait un signe regardé comme défavorable, par exemple s'il tonnait ou si quelqu'un prenait une attaque d'épilepsie, le magistrat renvoyait l'assemblée à un autre jour, et tout était à recommencer. Le Sénat. — Le Sénat continuait à opérer comme au temps des rois ; il avait été le conseil du roi, il devint le conseil des consuls. Le consul le convoquait quand il voulait et lui demandait son avis ; le Sénat n'avait aucun pouvoir indépendant. Mais comme il était composé de tous les anciens magistrats et des chefs des familles nobles, les consuls d'ordinaire le consultaient sur toutes les affaires graves et suivaient ses avis ; si bien que le Sénat arriva à diriger tout le gouvernement. NOTIONS SUR LE CULTE. Les dieux romains. — Les Romains, comme tous les peuples anciens, croyaient qu'il y avait dans le monde des êtres invisibles, beaucoup plus puissants que les hommes ; ils les appelaient les dieux. Ils croyaient que chaque dieu demeurait dans un certain endroit et avait puissance sur une certaine espèce de phénomènes. Voici les dieux principaux de Rome : Jupiter, dieu de la lumière et de l'orage, le dieu qui lançait le tonnerre ; on le regardait comme le plus puissant de tous. Le plus grand temple de Rome, sur le Capitole, était consacré à Jupiter le meilleur, le plus grand, qui protégeait spécialement le peuple romain. On le prenait à témoin quand on prêtait serment.... Junon, déesse de la lumière, protégeait les femmes romaines ; c'était la déesse du mariage (on se la représenta plus tard comme la femme de Jupiter). Mars, dieu de la guerre, père du peuple romain. Le loup était son animal sacré, les Sabins l'appelaient Quirinus (on adorait aussi à Rome un Quirinus). Vesta, déesse du foyer. Janus, qu'on représentait avec deux figures. Saturne, le dieu des Latins. Minerve, déesse de l'intelligence. Vulcain, dieu de la forge, protecteur des forgerons. Neptune, dieu de la mer. Vénus, déesse des jardins. Cérès, déesse des blés et de la moisson. Diane, déesse des forêts et de la chasse. Liber, dieu de la vigne. Mercure, dieu des voyageurs et des marchands. Orcus, dieu qui habitait sous la terre, où s'en allaient les âmes des morts. Il y avait des génies cachés dans les arbres, les sources, les rochers : les Silvains, les Faunes dans les bois ; les Nymphes et les Camènes près des sources. II y avait des divinités protectrices du bétail, une pour les bœufs (Bubona), une pour les chevaux (Equina), une pour les moutons (Pales). Chaque maison avait son esprit qui la protégeait, le Lar ; chaque homme avait son génie qui le surveillait. Il y avait même une divinité spéciale pour chacune des parties de la maison, Forculus pour la porte, Limentinus pour le seuil, Cardea pour les gonds ; une pour chaque acte de la vie : ainsi, quand un enfant était sevré, Educa et Potina lui apprenaient à boire, Cuba à se coucher, Statanus à se tenir droit, Abeona et Adeona à marcher, Fabulinus à parler ; quand il allait à l'école, Iterduca le menait, Domiduca le ramenait. On faisait même des divinités avec des qualités
personnifiées : Les Romains ne cherchaient pas à se figurer la forme de leurs dieux ; pendant longtemps ils n'eurent pas d'idoles ; ils adoraient Mars, représenté par une épée, Quirinus par une lance, Jupiter par une pierre. Ils ne se les imaginaient peut-être même pas comme semblables à des hommes ; ils ne se les figuraient pas mariés entre eux ou se réunissant ensemble, comme faisaient les Grecs ; ils ne connaissaient pas d'histoires à raconter sur leur compte. Ils les appelaient numen (manifestation). Il leur suffisait de savoir que ces dieux se manifestaient parfois comme des êtres puissants, qu'ils pouvaient faire beaucoup de bien ou beaucoup de mal et que, par conséquent, il était sage de s'en faire des amis. Le culte. — Le culte reposait sur cette idée. C'était un échange de services. L'homme apportait au dieu des cadeaux, il attendait en récompense que le dieu lui rendrait un service. On offrait aux dieux surtout des aliments ; du lait, du vin qu'on versait à terre ; des fruits, des gâteaux qu'on déposait sur un autel. Ce qu'on croyait leur être le plus agréable, c'étaient les animaux, surtout les moutons, les porcs et les bœufs. On devait tuer l'animal en cérémonie ; cela s'appelait sacrifier (faire une cérémonie sacrée). Les Romains croyaient que les dieux tenaient beaucoup à certaines formes anciennes, et qu'on les fâcherait si on les changeait ; ils avaient donc grand soin de faire exactement tout selon les rites (on appelait ainsi les règles sur la façon de procéder). Pour faire un sacrifice on doit choisir un animal sans défaut, un bœuf blanc pour Jupiter, un mouton noir pour un dieu souterrain. On l'amène devant l'autel, qui est un tertre en plein air ; on lui entoure la tête de bandelettes, on lui met sur le front une boule de farine salée, on le frappe d'un couteau ou d'une hache, suivant le cas. Puis on place la graisse et les os sur l'autel et on y met le feu. Le sacrifice est accompagné d'une prière pour demander au dieu un service. L'homme qui prie doit être habillé de vêtements propres ; il se tient debout, la tète couverte d'un voile et commence par appeler le dieu. Les Romains croyaient que les dieux avaient un nom secret inconnu des hommes. Personne, disait-on, ne sait les véritables noms des dieux. On invoquait donc le dieu en employant le nom d'usage, mais en ajoutant une précaution. On disait par exemple : Jupiter, très grand, très bon, ou si tu aimes mieux un autre nom. On expliquait ensuite ce qu'on demandait au dieu en se servant toujours de mots très clairs. On avait soin de s'adresser au dieu qu'on croyait le plus capable de rendre le service demandé : par exemple, à Cérès pour avoir une bonne moisson, à Neptune pour avoir une bonne navigation. Varron disait : Il est aussi utile de savoir quel dieu peut nous aider dans les différents cas, que de savoir où demeurent le charpentier ou le boulanger. Les particuliers faisaient des sacrifices et des prières pour le succès de leurs affaires particulières. Le gouvernement de Rome en faisait pour le succès des affaires du peuple romain. Les cérémonies religieuses paraissaient aussi nécessaires au moins que les assemblées ou les jugements. On n'osait même faire aucun acte important sans une cérémonie pour demander aux dieux de faire réussir cet acte. Chaque année, à des époques fixées, on célébrait une fête, qui était toujours une cérémonie destinée a plaire à un dieu et à le rendre favorable. Au printemps, c'était la fête de Palès, dieu des troupeaux. Ce jour-là on purifiait les maisons ; on allumait un feu de paille, on sautait par-dessus trois fois ; on sacrifiait des moutons à Palès et on les mangeait. Les prêtres. — Il y avait à Rome des personnages chargés de faire certaines cérémonies au nom de l'État, les prêtres (sacerdotes). Ils étaient groupés en plusieurs corps, chacun avait sa fonction. Les 15 flamines (allumeurs) allumaient la flamme de l'autel et faisaient le sacrifice. Les trois principaux étaient le flamine de Jupiter, le flamine de Quirinus, le flamine de Mars (qui sacrifiait chaque année un cheval à Mars). Les 12 Saliens du Palatin[2] gardaient un bouclier consacré à Mars. Ce bouclier, disait-on, était un jour tombé du ciel ; on le vénérait comme un dieu ; pour empêcher de le voler, on avait fait fabriquer onze boucliers tout pareils. Chaque année les Saliens faisaient une cérémonie en son honneur ; ils sortaient les 12 boucliers, chacun en prenait un, et ils exécutaient une danse guerrière, en chantant un hymne en l'honneur de Mamurius. Les Frères Arvales se réunissaient une fois par an dans un bois sacré, a deux lieues de Rome, et dansaient en chantant un hymne à la déesse Dea dia, pour la prier d'envoyer une bonne récolte. Les Luperques célébraient chaque année les Lupercales en l'honneur de Faunus ; demi-nus, couverts seulement de peaux de bouc, ils couraient autour de l'ancienne enceinte du Palatin, tenant des courroies en peau de bouc et frappant les femmes qu'ils rencontraient. Les Féciaux ne servaient que dans les rapports avec les peuples étrangers. Pour déclarer la guerre, ils allaient sur le territoire ennemi jeter un javelot par-dessus la frontière. Pour signer un traité, leur chef arrivait avec de l'herbe sacrée prise au Capitole, un sceptre, la pierre sacrée du temple de Jupiter Férétrien ; et, prenant pour garant cette pierre (qui était regardée comme un dieu), il jurait au nom du peuple d'observer le traité, puis il tuait un porc[3]. Les vierges Vestales,
jeunes filles des grandes familles romaines, avaient pour fonctions de garder
le feu du foyer sacré de Vesta. Elles demeuraient dans le sanctuaire et
entretenaient le feu qui ne devait jamais s'éteindre. Le plus important de tous ces collèges, celui des Pontifes, avait pour mission de diriger l'ensemble du culte. Ils réglaient le calendrier, c'est-à-dire qu'ils indiquaient, au commencement de chaque année, quel jour on devait célébrer chaque fête, quels étaient les jours fastes, ceux où l'on pouvait juger ou tenir les assemblées, et les jours néfastes, ceux où la religion défendait de faire aucun acte public. Ils faisaient les cérémonies et indiquaient comment on devait célébrer les fêtes au nom du peuple romain. Quand le magistrat ou le Sénat avait promis à un dieu un temple ou une fête pour le bien du peuple, les pontifes recevaient la promesse au nom du dieu. Quand un accident faisait penser que quelque dieu était irrité contre le peuple romain, les pontifes décidaient quelles cérémonies il fallait faire, quelles victimes sacrifier pour apaiser le dieu. Le chef des pontifes, le grand pontife, était un des premiers personnages de Rome, juge et arbitre des choses divines et humaines. Il surveillait même les particuliers et les obligeait à célébrer les cérémonies, car on croyait l'État intéressé à ce que chacun rendit aux dieux ce qui leur était dû. Culte du foyer et des lares. — Il y avait au milieu de chaque maison un foyer sacré, que la famille adorait. Avant de commencer le repas, on devait lui adresser une prière et verser un peu de vin (libation). On croyait que près du foyer demeurait un génie protecteur, le lar familiaris ; on lui apportait de la nourriture. Près du foyer on conservait les pénates, petites idoles de la famille. Rome aussi avait son foyer sacré, dans le sanctuaire de Vesta ; et dans ce même sanctuaire son idole, le Palladium. Culte des morts. — Les Romains regardaient les âmes des morts comme des esprits puissants ; ils les appelaient Mânes (les dieux bons) ; mais ils croyaient que ces âmes avaient besoin qu'on s'occupât d'elles. Quand un homme mourait, il fallait l'ensevelir suivant une forme consacrée dans un sanctuaire (le tombeau) ; puis lui apporter à boire et à manger. On versait du vin ou du lait à terre, on laissait dans des vases des gâteaux, on tuait des animaux dont on brûlait la viande. Chaque année, il fallait recommencer les cérémonies ; les descendants du mort en étaient chargés. On croyait que les âmes, si on les négligeait, devenaient méchantes et revenaient sur la terre pour effrayer les vivants et les tourmenter. On les appelait alors Lemures ou Larves. Chaque année, en mai, pendant les nuits, on jetait des fèves noires pour apaiser ces revenants. Augures et présages. — Les Romains croyaient que les dieux envoyaient des signes, les présages, pour indiquer leur volonté et qu'on pouvait deviner l'avenir en comprenant ces signes. Avant d'entreprendre un acte important, on commençait donc par consulter les dieux. Le magistrat, avant de réunir une assemblée, le général avant d'engager la bataille ou de traverser une rivière, interrogeaient les signes : c'est ce qu'on appelait prendre les auspices. On avait plusieurs procédés : tantôt on regardait les oiseaux qui passaient dans le ciel ; tantôt on sacrifiait un animal et on examinait ses entrailles ; ou bien on apportait les poulets sacrés entretenus par l'État, on leur donnait à manger ; s'ils refusaient, c'est que les dieux désapprouvaient l'entreprise. Quand on voyait un signe sans l'avoir demandé, on supposait que les dieux l'envoyaient pour avertir de ne pas continuer l'entreprise. On regardait comme signes défavorables un tremblement de terre, un orage, un éclair, un rat qui traversait le chemin. Il y avait à Rome un corps spécial, les augures publics du peuple romain, chargés d'interpréter les présages. Les augures décidaient si l'on s'était trompé en faisant une cérémonie ; en ce cas, on la recommençait. Le magistrat avait près de lui un augure pour lui dire si les présages étaient favorables ou non. Les cultes grecs. — Les Romains, dès les temps anciens, adoptèrent quelques-unes des croyances et des pratiques de leurs voisins, des Étrusques et des Grecs (surtout des Grecs de Cumes). Ils se mirent à adorer quelques-uns des dieux grecs, Apollon, Latone, Héraclès, qu'ils appelèrent Hercule, Castor et Pollux. Ils les adoraient suivant le rite grec, la tête découverte et couronnée de lauriers. On gardait précieusement un recueil grec de vers sacrés,
les livres sibyllins, qu'on disait
l'œuvre de Un corps de prêtres, 2, puis 10, puis 15, fut chargé de garder les livres sibyllins. Dans les moments de danger seulement, le Sénat ordonnait de les consulter ; et les gardiens déclaraient ce qu'il fallait faire. Quand les Gaulois marchèrent sur Rome, le Sénat fit consulter les livres sibyllins : on y vit cette prophétie que les Gaulois prendraient possession du sol de la ville ; en conséquence, pour accomplir l'oracle, les gardiens déclarèrent que le peuple romain devait enterrer vifs, sur la place du marché, un homme et une femme gaulois ; et on les enterra. |