HISTOIRE DE LA GRÈCE

 

PREMIER ÂGE DE LA GRÈCE

 

 

LE premier âge de la Grèce nous montre cette contrée divisée en plusieurs petits royaumes qui furent tous fondés par des colonies d’Égypte et de Phénicie. Les habitants sauvages de la Grèce s’étaient soumis, les uns volontairement et les autres par nécessité, aux rois de Sicyone, d’Athènes, d’Argos, de Sparte et de Corinthe. Ces princes commencèrent à polir et à civiliser les peuples en leur procurant les premiers avantages de la réunion sociale, et en leur faisant goûter la sécurité que leur donnaient les murs de leurs villes naissantes contre les- attaques des animaux féroces et les invasions des brigands.

Une grande partie des Pelages, attachés aux habitudes et à l’oisiveté de la vie sauvage, repoussèrent longtemps les lumières qu’on leur présentait, et résistèrent au joug qu’on voulait leur imposer. Ces hordes errantes, guidées par des chefs braves et cruels, répandaient partout l’effroi, massacraient les voyageurs, enlevaient les troupeaux, et dévastaient comme un torrent tous les lieux qu’elles traversaient. Cet obstacle, opposé aux progrès delà civilisation, excitait l’indignation des fondateurs dei nouvelles colonies. Le but de leurs efforts et l’objet de leur gloire fut longtemps la destruction de ces brigands ; et les premiers héros que l’histoire immortalisa et que la reconnaissance divinisa, se signalèrent par des victoires remportées sur les monstres des forêts et sur les chefs des hordes sauvages. La fortune, la puissance et la célébrité, fruits de ces premiers exploits, entretinrent l’esprit militaire chez les Grecs.

Lorsqu’ils n’eurent plus de monstres à terrasser ni de sauvages à soumettre, ils combattirent entre eux, et firent des incursions dans les îles adjacentes et sur les côtes voisines pour accroître leur renommée, pour étendre leur puissance, et pour augmenter leurs richesses, qu’ils ne pouvaient devoir qu’au pillage, en attendant que le commerce vînt leur donner des moyens plus doux d’en acquérir.

C’est dans ces temps qu’on nomme héroïques et fabuleux que l’histoire place le voyage des Argonautes, les crimes des Danaïdes, les aventures de Thésée, les travaux d’Hercule, les malheurs d’Œdipe, le siége de Thèbes et celui de Troie. On y trouve tellement mêlées la mythologie et l’histoire, la vie des hommes et celle des dieux, les métamorphoses et les révolutions, qu’on peut appeler ces temps fabuleux aussi bien qu’héroïques.

Les premiers rois des Grecs commandaient à des, hommes braves et même féroces ; leur autorité n’avait quelque étendue que pendant la guerre : elle était très bornée pendant la paix. Ils adoucirent leurs mœurs par leurs lumières, s’ans pouvoir amollir assez les courages pour établir solidement leur domination. Toute autorité, contestée et mécontente de ses limites, cherche à obtenir par la crainte ce qu’elle ne peut obtenir par la loi ; aussi vit-on bientôt tous ces princes abuser de leurs victoires sur leurs ennemis et du dévouement de leurs soldats pour opprimer leurs concitoyens ; mais les Grecs, uniquement occupés de guerre et d’agriculture, étaient exempts des vices qu’entraîne la mollesse. Ils brisèrent les chaînes de la tyrannie, et presque partout le gouvernement républicain s’établit. Les Grecs avaient conservé entre tous les citoyens une parfaite égalité qui maintint la liberté durant les deux premiers âges ; le troisième y introduisit la richesse, l’ambition, l’inégalité, la corruption ; et le quatrième, la servitude.

 

SICYONE

PLUSIEURS historiens parlent de Sicyone comme d’une des lus anciennes villes du monde. Ils font remonter sa fondation jusqu’à l’an 1915. Égialée fut, dit-on, le premier de ses rois. On ne s’accorde pas sur le nombre de ses successeurs ; le souvenir de leurs actions ne s’est pas conservé. Les historiens prétendent que ce royaume dura mille ans.

 

CRÈTE

LA plupart des anciens auteurs s’accordent à dire que le premier peuple grec civilisé fut celui d’Argos que fonda l’Égyptien Inachus[1]. Cependant d’autres assurent que l’île de Crète, éclairée et policée par Minos, avait reçu ses sages lois qui furent admirées par les philosophes, et qu’elle avait un gouvernement régulier dans le temps où toute la Grèce était encore sauvage. Ce qui est difficile à concevoir, c’est l’ignorance où l’histoire nous a laissés sur les noms et les actions des rois de cette île célèbre, dont tant de sages avaient étudié la législation. On ne sait pas même avec certitude si Minos était indigène ou étranger ; l’opinion la plus générale est qu’il était venu d’Égypte. Au reste sa justice et sa sévérité lui attirèrent tant de renom que la fable le plaça dans les enfers, et le chargea du soin de juger les ombres. On croit que Rhadamante, qui partagea cette triste gloire, était son frère.

 

ARGOS

LES rois les plus connus qui gouvernèrent cette contrée, furent Inachus, Phoronée, Apis, Argus, Criasus, Phorbas, Triopas, Crotopus, Sthénélus, Gélanor, Danaüs, Lyncée, Abas, Prætus et Acrisius ; de celui-ci provinrent Persée, Eurysthée, Hercule.

Inachus, victime d’une révolution en Égypte, fonda la première colonie en Grèce. Le règne de Phoronée, son successeur, marque l’époque la plus ancienne de la civilisation grecque. Ce prince établit dans la nouvelle ville d’Argos le culte des dieux et les lois égyptiennes. Il s’empara de toute la presqu’île du Péloponnèse. Apis donna son nom à la partie de cette presqu’île qui se nomma longtemps Apie. Argus fut le premier qui attela des bœufs à la charrue. La ville d’Argos, embellie par ses soins, prit et conserva son nom. Criasus y éleva un temple à Junon. Inachus fut le père de la fameuse Io. Un prince du pays, nommé Jupiter, enleva cette princesse, et la conduisit en Égypte, où elle fut, dit-on, adorée sous le nom d’Isis. Les poètes, ornant cette aventure des couleurs de la fable, dirent que le maître des dieux, étant devenu amoureux d’Io, la transforma en génisse pour la soustraire, au courroux de Junon.

Lorsque le roi Gélanor gouvernait l’Argolide, Égyptus régnait en Égypte. Égyptus avait cinquante fils ; il voulait les unir aux cinquante filles de son frère Danaüs. Celui-ci rejeta cette union et s’enfuit en Grèce. Ayant rassemblé ses amis et quelques aventuriers, il se mit à la tête des Argiens, mécontents de leur roi, et s’empara du trône de Gélanor. Le roi d’Égypte, opiniâtre dans ses desseins, troubla bientôt son frère dans son nouveau royaume. Il envoya en Grèce une armée sous les ordres de ses cinquante fils, fit le siège d’Argos, et força Danaüs à consentir au mariage projeté : mais le cruel roi d’Argos, dont la haine s’était accrue par cette violence, fit assassiner ses neveux par leurs femmes la nuit de leurs noces. Hypermnestre seule sauva son mari Lyncée qui s’échappa ainsi des embûches du tyran, vengea ses frères  et régna.

Acrisius et Prætus, fils jumeaux de Lyncée, se disputèrent le trône. Acrisius l’emporta, et donna la ville de Tirynthe en apanage à Prætus.

Acrisius fut père de Danaé. Un oracle l’avertit que l’enfant qui naîtrait d’elle le tuerait. Pour éviter ce malheur il enferma sa fille dans une tour : mais un prince voisin, nommé Jupiter, séduisit les gardes, entra dans la prison, enleva Danaé, et l’épousa ; elle donna naissance à Persée. Ce héros combattit les monstres des forêts, tua une reine d’Afrique, nommée Méduse, dont l’aspect, dit la fable, pétrifiait ceux qui la regardaient. La princesse Andromède fut délivrée par lui d’un ravisseur, dont les poètes ont fait un monstre marin. Enfin Persée, disputant le prix aux jeux funèbres de Thessalie, accomplit involontairement l’oracle, et tua son grand-père Acrisius d’un coup de palet.

Dans le même temps Pélops, fils de Tantale, roi de Lydie, vint en Grèce pour éviter la vengeance de Tros, roi des Troyens, qui lui faisait la guerre parce que Tantale avait enlevé un de ses enfants, nommé Ganymède. Pélops, ayant remporté le prix des chars aux jeux de Pise ou d’Olympie, épousa Hippodamie, fille d’Œnomaüs, roi de cette contrée. Il succéda à son beau-père se rendit maître d’une partie du Péloponnèse, qui prit son nom, et fut le chef de la race des Pélopides.

Persée, ne pouvant plus supporter le séjour d’Argos depuis qu’il avait tué son grand-père, transporta le siège de ses états à Mycène, et régna cinquante-huit ans[2]. Ses enfants se partagèrent son royaume : Anaxagoras, l’un d’eux, s’établit à Argos, et eut des successeurs.

Sthénélus, qui avait épousé une fille de Pélops, resta à Mycène, et laissa son sceptre à son fils Eurysthée, dont les enfants furent tués par ceux d’Hercule. Persée avait eu deux autres enfants ; Alcée, père d’Amphitryon, et Électryon, père d’Alcmène. Le mariage d’Alcmène et d’Amphitryon devint la source des grandes querelles qui éclatèrent par la suite entre les Pélopides et les Héraclides.

Alcmène, que les poètes font aussi mère d’Eurysthée, cédant à l’amour d’un prince voisin, nommé Jupiter, donna naissance au fameux Hercule. Ce héros, doué du plus grand courage et d’une force merveilleuse signala sa jeunesse par des victoires remportées sur des monstres et des brigands. Le roi Eurysthée, jaloux de sa renommée, le chargea de plusieurs entreprises périlleuses, espérant qu’il y trouverait la mort.

Hercule, poursuivi par le courroux de Junon et par la haine d’Eurysthée, remplit la terre du bruit de son nom. On croit généralement qu’il a existé dans différentes contrées plusieurs Hercules ; on trouve dans presque tous les pays des traces de leurs exploits, qu’on attribua dans la suite au seul Hercule, fils d’Alcmène et d’Amphitryon. Hercule, le premier des demi-dieux, extermina, dit-on, le lion de Némée, le taureau de Crète, le sanglier d’Érymanthe et l’hydre de Lerne. Il tua Busiris, roi d’Égypte, qui faisait massacrer les étrangers, et terrassa le roi de Libye, Anthée, dont la vengeance s’exerçait sur ceux qu’il avait  vaincus à là lutte. Sa. Massue écrasa les géants de Sicile et les centaures de Thessalie. Après avoir purgé la terre de brigands, il en fixa les limites à Cadix, qu’on appela les colonnes d’Hercule. La fable dit qu’il ouvrit les montagnes pour rapprocher les nations, qu’il creusa des détroits pour confondre les mers, et que les dieux durent à son secours leurs triomphes sur les géants appelés Titans. Son histoire est un tissu de fables. Les poètes lui ont attribué toutes les grandes actions dont on ignorait les auteurs ; mais il a existé certainement un véritable Hercule, célèbre par sa force et sa valeur, puisque sa race a subsisté et régné longtemps dans la Grèce.

 

EXPÉDITION DES ARGONAUTES

(An du monde 2785. — Avant Jésus-Christ 1219)

LES courses et les travaux de ces illustres aventuriers n’avaient pas toujours pour objet la sûreté du pays, la destruction des monstres, la protection de l’innocence et la punition des brigands. Le but de cette espèce de chevalerie errante que n’éclairait point une religion pure et vraie, était souvent l’enlèvement de quelques belles princesses ou le pillage de quelques riches cités.

La Colchide passait pour un pays très opulent : sa capitale renfermait, dit-on, un trésor que la fable transforme en toison d’or, gardée par des dragons. Le bruit des richesses de la Colchide excita la cupidité des héros grecs.

Jason était un prince de Thessalie ; son oncle Pélias, qui s’était emparé du trône, détermina ce jeune guerrier à tenter cette expédition contre Colchos  espérant qu’il y périrait. Les hommes les plus vaillants de la Grèce, Hercule, Oïlée, Télamon, Castor, Pollux, Thésée, Philoctète, Argus et plusieurs autres furent ses compagnons. Argus se chargea de la construction du navire qui devait les porter. Leur navigation fut heureuse. Médée, fille d’Ætas, roi de Colchide, seconda leurs efforts. Séduite par Jason, elle lui livra les trésors de son père et s’enfuit avec lui. Au retour de cette expédition Hercule continua longtemps ses brillants exploits ; mais ce superbe vainqueur, lui-même vaincu par l’amour, fila pour la reine Omphale, et conçut une grande passion pour Déjanire, qu’il épousa. Cette princesse, dans un accès de jalousie, lui donna un breuvage qui le rendit furieux. Ne pouvant supporter ni calmer ses violentes douleurs, il fit dresser un bûcher au sommet du mont Œta, se précipita au milieu des flammes et y périt. La fable dit que ses entrailles, étaient brûlées par une robe empoisonnée que  Déjanire, avait reçue de son rival Nessus, prince de Thessalie, et qu’on appelait Centaure ; parce que les Thessaliens furent les premiers Grecs qui dressèrent et montèrent des chevaux.

La mort d’Hercule n’éteignit point la haine d’Eurysthée ; il chassa du Péloponnèse les enfants de ce héros ; mais ils y revinrent bientôt, le défirent dans un combat et le tuèrent. Trois ans après Hellène, leur aîné, fut vaincu par un roi de Tégée et périt. Ses frères se dispersèrent dans la Grèce ou ils furent connus sous le nom d’Héraclides.

Eurysthée étant mort, Atrée, son oncle maternel et fils de Pélops, prit possession du Péloponnèse, et fonda la dynastie des Pélopides, dont les passions, les crimes et les malheurs remplissent encore le monde d’affreux souvenirs. Atrée, fameux par ses cruautés, conçut la plus violente haine contre Thyeste son frère, qui avait séduit sa femme Europe ; il le chassa de Mycène : l’ayant ensuite rappelé dans sa patrie, et dissimulant son courroux pour mieux assurer sa vengeance, il feignit de se réconcilier avec lui, assassina secrètement son fils Pélops, et servit à ce malheureux père dans un festin, les membres de son fils.

Plisthène, fils et successeur d’Atrée, fut le père du célèbre Agamemnon. Ce monarque acquit une grande puissance, et tous les Grecs l’élurent pour leur chef lorsqu’ils entreprirent la guerre de Troie. On verra dans la suite de cette histoire la mort funeste d’Agamemnon, qui périt sous le poignard de sa femme, fut vengé par son fils Oreste, et laissa son palais rempli de crimes et son royaume de troubles. Tisamène et Penthile, fils d’Oreste, vaincus par les Héraclides, se virent chassés de leur patrie, où la race des Pélopides cessa de régner.

 

ROYAUME D’ATHÈNES

CÉCROPS

(An du monde 2448. — Avant Jésus-Christ 1556)

CÉCROPS, né dans la ville de Saïs, en Égypte, quitta les borda du Nil pour échapper au joug d’un vainqueur inexorable. Après de longues coursés sur la mer,  il débarqua avec ses compagnons sur les côtes de l’Attique, pays habité de temps immémorial par un peuple sauvage que les hordes errantes de la Grèce n’avaient jamais été tentées de subjuguer. Sa pauvreté fut sa première égide. Cette contrée stérile et peu peuplée n’excitait ni crainte ni avidité. Les Athéniens, plus grossiers que barbares, accueillirent sans défiance les étrangers malheureux qui venaient leur apprendre à connaître les jouissances de la vie sociale. Bientôt les Athéniens et la colonie égyptienne ne formèrent qu’un seul peuple ; mais la supériorité des lumières assura la domination des Africains ; et Cécrops, choisi pour roi par les deux nations réunies, justifia leur choix par le bonheur dont il fit jouir ses sujets. Les anciens habitants ne se nourrissaient que de glands ; Cécrops leur apprit à se nourrir de grains. La charrue força la terre à devenir féconde ; l’olivier vint se naturaliser dans l’Attique ; une foule d’arbres fruitiers, jusque-là inconnus, ombragèrent les moissons et les couvrirent de fruits. Il soumit le mariage aux lois ; ses règlements, en créant les devoirs, firent à la fois naître les vertus et les plaisirs. Les liens des familles commencèrent les liens de la société, et les hommes autrefois isolés, aimèrent d’abord leurs foyers, et bientôt leur patrie.

On adorait autrefois les astres, les forêts, et les montagnes. Les Égyptiens firent adorer leurs dieux dans l’Attique, et consacrèrent la ville d’Athènes à Minerve, comme Argos l’avait été à Junon, et Thèbes à Bacchus.

Pour inspirer l’humanité à ces peuples barbares, le législateur égyptien ordonna d’honorer les morts, de les enterrer avec pompe, de consacrer par des éloges le souvenir des hommes vertueux, et de flétrir la mémoire des méchants. Il établit un tribunal dont la sagesse fut longtemps célèbre ; jamais on ne se plaignit d’un jugement de l’aréopage. Il eut la gloire de faire connaître la justice aux Grecs. Pour remédier à l’aridité du pays, dont la population devait s’accroître rapidement, il forma ses sujets à la navigation, et bientôt les blés apportés d’Afrique assurèrent des subsistances abondantes à ce nouveau peuple.

Les successeurs de ce sage roi furent Cranaüs, Amphictyon, Érictonius,  Pandion Ier, Érecthée, Cécrops II, Pandion II, Egée, Thésée, Ménesthée, Démophoon, Oxynthès, Phidas, Timéthès, Mélanthus et Codrus.

Si les institutions de Cécrops durèrent longtemps, sa postérité n’eut pas le même bonheur. Cranaüs fut chassé d’Athènes par Amphictyon Ier, et par Hellène, prince de Thessalie et fils de Deucalion. La fable place le déluge de Deucalion au temps où vivait Cranaüs. Un plus ancien déluge, celui d’Ogygès, avait eu lieu en Grèce longtemps auparavant[3]. Quelques auteurs prétendent que ce fut Hellène le Thessalien qui donna son nom aux Grecs, nommés Helléniens.

Amphictyon devint célèbre par une alliance qu’il forma entre plusieurs villes de la Grèce, que les uns portent au nombre de douze, et les autres de trente et une. Ces peuples confédérés envoyaient des députés deux fois par an aux Thermopyles pour délibérer sur les affaires publiques : leur réunion s’appelait le conseil des Amphictyons ; il jugeait tous les différends des peuples et des villes, et veillait à la défense du temple d’Apollon à Delphes. Cette institution, qui nous donne le premier exemple d’une confédération et d’une sorte de gouvernement représentatif, conserva beaucoup de force, d’indépendance et de crédit, jusqu’au temps de Philippe, roi de Macédoine, qui en brigua la présidence pour en faire un instrument de son ambition.

On croit que ce fût sous le règne d’Amphictyon que Bacchus, qu’on nommait aussi Dionysius, vint des Indes dans l’Attique. Il enseigna aux Grecs plusieurs arts, et entre autres celui de cultiver la vigne. Sa gloire excita l’envie : les Athéniens attentèrent plusieurs fois à ses jours : mais, après sa mort, ils le divinisèrent.

On place à l’époque du règne d’Érecthée l’enlèvement de Proserpine, fille de Cérès, reine de Sicile, par Pluton, roi d’Épire. Cérès accourut en Grèce pour chercher sa fille : on dit qu’elle s’arrêta à Éleusis chez Triptolème, qui apprit d’elle le labourage. Les lumières qu’elle répandit dans cette contrée la firent regarder comme une déesse. On établit son culte à Éleusis : les mystères de ce culte devinrent célèbres dans l’univers ; les princes les plus puissants et les personnages les plus distingués par leur science et par leurs vertus s’y faisaient initier ; retenus par des lois sévères, aucun n’en trahit le secret ; mais on croit généralement qu’on y enseignait aux initiés une religion plus simple, plus spirituelle et plus morale que celle du peuple, auquel on laissait les images et les fables.

Ce fut le roi Éricthonius qui établit à Athènes les courses de chars, les fêtes de Minerve, nommées Panathénées, et qui apprit aux Athéniens, l’usage des monnaies d’or et d’argent.

Pandion II eut deux fils, Égée et Pallas : celui-ci devint célèbre par l’ambition de ses cinquante enfants, qu’on nommait les Pallantides.

Égée eut la gloire d’être le père de Thésée. Éthra, fille de Pithée, l’un des sages et des illustres guerriers de la Grèce, fut la mère de Thésée. Elle n’était point l’épouse d’Égée, mais elle avait cédé à son amour.

 

THÉSÉE

(An du monde 2740. — Avant Jésus-Christ 1264)

PITHÉE, aïeul de Thésée, gouvernait la ville de Trézène. Égée laissa dans cette ville le jeune enfant qu’il avait eu d’Éthra, et dont il cachait avec soin la naissance, pour ne point exciter la haine de son frère Pallas et de ses enfants. En partant de Trézène il plaça sous un rocher énorme une riche épée ; et fit jurer à Éthra de ne révéler à son fils le secret de sa naissance que lorsqu’il serait assez fort pour soulever le rocher et s’armer du glaive qui devait servir à le faire reconnaître. Le jeune Thésée, destiné à la gloire, écoutait dans son enfance, avec une ardeur inquiète, le récit des grandes actions d’Hercule, et brûlait du désir de l’imiter. Lorsqu’il eut atteint l’âge où la force pouvait seconder son courage, Hercule était en Lydie ; les brigands, profitant de son absence, reparaissaient dans la Grèce, et les monstres infestaient de nouveau les forêts. Éthra, ne pouvant plus contenir le courage bouillant de son fils, lui apprit le nom de son père, le conduisit vers le rocher et lui ordonna de le déplacer. Il y parvint sans peine, et y trouva les signes qui devaient constater sa naissance. Armé du glaive royal, il s’arracha rapidement des bras de sa mère, et parcourut la Grèce, qu’il remplit bientôt du bruit de ses aventures et de ses succès. Cinnis, brigand redoutable et cruel, attachait les vaincus à des branches d’arbres qu’il courbait avec effort, et qui les écartelaient en se relevant. Il tomba sous les coups du jeune héros.

Son épée trancha les jours de Scyrron, qui défendait l’accès d’une montagne et précipitait les voyageurs du haut d’un rocher dans la mer.

Le tyran Procuste étendait ses prisonniers sur un lit dont la longueur devait servir de mesure à leurs corps, qu’il allongeait ou raccourcissait par d’affreux supplices. Thésée l’immola sur ce lit, funeste théâtre de tant de crimes.

Après avoir ainsi marché sur les traces d’Alcide, son modèle, il vint à la cour d’Athènes, dont le trône était ébranlé par de violentes dissensions. Les Pallantides, sacrifiant la nature à l’ambition, méprisaient la vieillesse d’Égée, conspiraient contre ses jours, et suivaient les conseils de la perfide Médée, qui se trouvait alors en Attique.

Les projets parricides des enfants de Pallas furent suspendus par l’arrivée imprévue du jeune guerrier. Son nom était devenu l’effroi du crime. Médée, accoutumée aux artifices, parvint à inspirer des soupçons au vieux roi d’Athènes, sur les desseins secrets d’un étranger qui fier de sa vaillance, pouvait aspirer au trône. Le faible Égée la crut, et la mort de Thésée fut résolue. Mais au milieu du festin qui devait terminer sa vie, au moment où on lui présentait une coupe empoisonnée, le jeune héros tirant son épée pour trancher, suivant l’usage, la viande qui était devant lui, Égée reconnut son glaive, son fils, renversa la coupe, et, n’écoutant que sa tendresse, découvrit hautement le secret de sa naissance. Les Pallantides furieux coururent aux armes. Thésée les combattit, les tua, et chassa Médée.

L’aréopage décida que la mort des Pallantides, quoi que nécessaire, devait être expiée. Thésée fut banni pour un an et ne revint dans Athènes qu’après s’être fait absoudre par les juges, qui s’assemblaient à Delphes dans le temple d’Apollon.

Il trouva l’Attique ravagée par un taureau furieux, né dans les champs de Marathon : Thésée l’attaqua, le terrassa ; et le montra chargé de chaînes aux regards du peuple.

Les Athéniens, ayant fait périr Androgée, fils de Minos, roi de Crète, ce monarque leur avait déclaré la guerre, et, après une grande victoire, les avait contraints à lui livrer tous les sept ans, un certain nombre de jeunes enfants qui trouvaient en Crète la mort ou l’esclavage.

Lorsque Thésée reparut dans Athènes, on allait payer pour la troisième fois ce fatal tribut : le jeune prince, rassurant le peuple, lui promit de l’affranchir de cette honteuse sujétion. Il s’embarqua promptement, et conduisit en Crète non des victimes, mais des soldats.

Son audace fut couronnée de succès, il vainquit Taurus, général des troupes de Minos ; et ce roi sage eut la générosité de pardonner aux Athéniens, de rendre hommage à la valeur de Thésée, et de lui accorder sa fille Ariane en mariage.

Si l’on en croit d’autres historiens, Ariane, séduite par Thésée, lui donna le moyen de surprendre Taurus. Après sa victoire il enleva la jeune princesse, qui lui fut ravie dans sa route par Bacchus. Le chagrin de cette perte lui fit oublier de hisser sur son vaisseau, comme il en était convenu, une voile blanche, signe de victoire et de succès. Égée, voyant le navire entrer dans le port avec une voile noire, crut son fils perdu, et se précipita dans la mer, qui depuis a conservé son nom.

La fable raconte autrement cette aventure ; elle dit que les victimes de Minos étaient enfermées dans un labyrinthe, et dévorées par le Minotaure, monstre moitié homme et moitié taureau, issu des amours infâmes de Pasiphaé, reine de Crète ; qu’Ariane, amoureuse de Thésée, lui donna un peloton de fil, à l’aide duquel il sortit du labyrinthe, après avoir tué le Minotaure ; que, vainqueur de ce monstre, il enleva la princesse qui l’avait secouru, et l’abandonna ensuite sur le rivage de Naxos.

Ce qui est constant, c’est que Thésée délivra son pays d’une honteuse servitude, et qu’à son retour il monta sur le trône vacant par la mort d’Égée.

Thésée fut le dixième roi d’Athènes. Il donna au gouvernement une forme plus régulière. Les douze villes de l’Attique étaient devenues des républiques particulières, des chefs indépendants se faisaient la guerre et ôtaient toute force et toute utilité à l’autorité royale qui se trouvait toujours entre deux écueils, le mépris qu’inspire la faiblesse et la haine qu’excite l’arbitraire.

Thésée mit le peuple dans son parti, et malgré l’opposition des riches et des grands qui ne combattaient que pour leurs intérêts, en prétendant défendre la prérogative royale, il obtint, par la persuasion, une soumission plus solide que celle qu’il aurait gagnée par la force.

Athènes devint le centre et la métropole de l’État ; la puissance législative fut attribuée à l’assemblée générale de la nation ; qu’on distribua en trois classes les nobles ou notables, les agriculteurs et les artisans. Les principaux magistrats devaient être choisis dans la première classe et chargés de la conservation du culte et de l’interprétation des règlements. Thésée, comme roi, avait pour attribution la défense des lois promulguées par le peuple et le commandement des troupes.

Par ces changements, le gouvernement d’Athènes devint démocratique ; ce qui fut la cause des agitations qui troublèrent constamment l’Attique.

Thésée institua une fête solennelle pour consacrer cette révolution et la réunion des différents peuples de ses états. Il agrandit Athènes, y construisit un bâtiment pour l’aréopage. Les étrangers, attirés par le commerce, accrurent la population ; la réunion du territoire de Mégare recula les limites du royaume. Une colonne placée sur l’isthme de Corinthe marqua la séparation de l’Attique et du Péloponnèse. On célébrait près de ce monument les jeux Isthmiques, à l’instar des jeux d’Olympie.

Les soins paisibles de l’administration ne pouvaient satisfaire longtemps le génie ardent de Thésée. Descendant de son trône pour chercher de nouvelles aventures ; il prit part à la défaite des Centaures, accompagna les Argonautes dans leur expédition, terrassa le sanglier de Calydon, et mêla son nom à celui des héros qui se distinguèrent dans les deux siéges de Thèbes.

Pirithoüs, qu’il avait combattu, fut bientôt son admirateur et son ami ; cette liaison lui devint funeste. Inconstants dans leurs amours et dominés par leurs passions, ils enlevèrent Hélène, fille de Tyndare. Castor et Pollux ses frères la délivrèrent de leurs mains. Embrasés d’une nouvelle flamme, ils voulurent enlever Proserpine, femme d’Aïdonius, roi des Molosses, qu’on appelait aussi Pluton. Ce prince découvrit leur complot, tua Pirithoüs, et enferma Thésée dans une prison, d’où Hercule le délivra. La fable place ces événements dans les enfers. Le roi d’Athènes avait autrefois combattu, vaincu les Amazones, et épousé leur reine Antiope. Le jeune Hippolyte, fruit de cette union, était resté dans l’Attique pendant l’absence de son père : Phèdre, nouvelle épouse de Thésée, conçut pour son beau-fils un amour criminel, dont le jeune prince repoussa l’aveu avec horreur. Lorsque Thésée délivré des prisons d’Épire revint dans ses états, la reine, furieuse, accusa l’innocent Hippolyte d’avoir attenté à sa vertu : le roi, trop crédule, ordonna la mort de son fils. Le désespoir de Phèdre expia ce crime.

La longue absence du roi, ses aventures, le bruit scandaleux de ses amours et le trépas injuste de son fils, avaient inspiré beaucoup de mécontentement aux Athéniens. Ménesthée, profitant de cette disposition des esprits, porta le peuple à la révolte. Thésée fut accusé devant l’aréopage. Ce héros, dédaignant de se justifier, abdiqua la royauté, et se retira dans l’île de Scyros, après avoir chargé d’imprécations le peuple ingrat qui l’abandonnait.

Le roi de Scyros, Lycomède, jaloux de sa gloire, l’attira dans un piège, et le précipita dans la mer.

L’envie s’arrête sur la tombe des gands hommes ; une reconnaissance tardive la remplace. Thésée fut l’objet des longs regrets du peuple athénien. On le regarda comme un demi-dieu, on prétendit qu’il était le fruit des amours secrètes de Neptune et d’Éthra.  Dans la suite le célèbre Cimon fût chargé de rapporter de Scyros ses ossements à Athènes. Son tombeau devint un lieu d’asile pour les esclaves.

Ménesthée, qui l’avait détrôné, et qui lui succéda, fit observer ses lois. Il acquit quelque gloire dans la guerre de Troie.

Sous le règne de Codrus, les Héraclides attaquèrent Athènes. Codrus, informé par un oracle que les Athéniens seraient vainqueurs si leur roi était tué, se déguisa en paysan, se jeta au milieu des ennemis, et y trouva la mort. Les Héraclides, admirant ce dévouement d’un roi pour son peuple, et effrayés par l’oracle, prirent la fuite.

Après la mort de Codrus  le gouvernement d’Athènes devint républicain sous l’autorité de magistrats nommés archontes.

Médon, fils de Codrus fut le premier de ces magistrats.

 

ROYAUME DE THÈBES

CADMUS, premier roide Thèbes, fils d’Agénor, et cousin d’Égyptus et de Danaüs, voyagea d’abord à Tyr, et conduisit, en Grèce une colonie phénicienne, sous prétexte de chercher sa sœur que Jupiter avait enlevée. Il s’établit en Béotie, y bâtit la ville de Thèbes, et sa citadelle qui porta le nom de Cadmée.

Polydore, Labdacus et Lycus lui succédèrent.

Polydore fut déchiré par les Bacchantes. Une mort prématurée termina les jours de Labdacus : il ne laissait qu’un fils dont le berceau était entouré d’ennemis ; ce fils se nommait Laïus. Le royaume fut gouverné par Lycus qui s’empara de l’autorité royale.

Sa femme Antiope, séduite par Jupiter, en avait eu deux enfants, nommés Amphion et Zéthus. Le roi .irrité des désordres de cette femme coupable, qui prétendait les couvrir par son intimité, avec le maître des dieux, la répudia et la chassa de son palais. Ses fils la vengèrent : ils, prirent la ville de Thèbes, dont Amphion se déclara roi. Sa douceur et son éloquence charmèrent ses sujets ; leur attachement légitima son usurpation. Il agrandit la ville et bâtit des temples.

Amphion fit entendre en Béotie les premiers accords de la lyre ; les poètes prétendirent que les pierres mêmes, sensibles à ses accents, venaient se ranger à sa volonté pour élever les édifices de Thèbes.

Cependant Laïus, fils de Labdacus, réclama ses droits au sceptre paternel ; ses armes furent heureuses ; il battit Amphion, le chassa de ses états et remonta sur son trône.

Après, cette victoire il épousa Jocaste, fille de Créon, prince thébain. Cette union devint la source des plus grands malheurs pour ce monarque et pour sa famille. Effrayé par un oracle qui lui avait prédit que son fils trancherait ses jours, il fit exposer sur le mont Cythéron l’enfant de Jocaste, qu’on appela Œdipe, parce que ses pieds s’étaient enflés lorsqu’on l’avait lié et suspendu aux branches d’un arbre. Un berger lui sauva la vie ; et le conduisit à Corinthe, où il fut élevé.

Lorsqu’il eut atteint l’âge viril, comme il parcourait la Grèce pour chercher des aventures, à l’exemple des héros de ces temps barbares, il rencontra son père dans la Phocide, le combattit sans le connaître, et le tua.

Créon, frère de Jocaste, prit les rênes du gouvernement. La Béotie était alors désolée par une guerre civile qu’excitait une fille naturelle de Laïus, nommée Sphinge. La fable en fait un monstre ailé, moitié femme et moitié dragon, qu’on appelait Sphinx. Il égorgeait tous ceux qui ne pouvaient deviner le sens obscur de ses paroles.

Créon effrayé, fit publier qu’il donnerait le royaume et Jocaste à celui qui expliquerait l’énigme du Sphinx. Œdipe se présenta : le monstre lui demanda, dit la fable, quel était l’animal  qui marchait à quatre pieds le matin, à deux au milieu du jour et le soir à trois. Œdipe devina que c’était l’homme. Il combattit ensuite le Sphinx, ou plutôt Sphinge, et l’immola.

Créon tint sa parole ; Œdipe régna et devint l’époux de sa mère. Le ciel, irrité de cet affreux hymen, répandit dans la Béotie une peste qui la dépeuplait. On consulta l’oracle, qui déclara que la peste cesserait lorsqu’on aurait banni de Thèbes le meurtrier de Laïus.

Après beaucoup de recherches, Œdipe découvrit à la fois son inceste et son parricide. Se trouvant lui-même indigne de voir le jour, il s’arracha les yeux et s’exila. Jocaste se donna la mort.

Deux jumeaux, Étéocle et Polynice, fruits de cet hymen funeste, et dont les combats, dit la fable, avaient commencé dans le sein de leur mère, convinrent d’abord de régner alternativement.

Étéocle monta sur le trône, mais lorsque l’année fut expirée il refusa de céder le pouvoir à son frère.

Polynice appela à son secours Adraste, roi d’Argos, Tydée, Amphiaraüs Capanée, Hippomédon, Parthénopée et Thésée. Ces princes alliés firent le siége de Thèbes, qui eut lieu trente ans avant la guerre de Troie. Il fut long, opiniâtre et sanglant. Presque tous les chefs des deux partis y périrent ; enfin, dans une bataille générale, Étéocle et Polynice tombèrent sous les coups l’un de l’autre.

Les fils des rois alliés, qu’on appelait les Épigones s’emparèrent de Thèbes. Le nom des princes qui y régnèrent n’est pas connu. On sait que le dernier s’appelait Xanthus, et  qu’après lui le gouvernement devint républicain.

 

ROYAUME DE CORINTHE

(An du monde 2628. — Avant Jésus-Christ 1376)

LES anciens auteurs ne s’accordent pas sur l’origine des Corinthiens. On croit que Sisyphe, leur premier roi, bâtit la ville d’Éphyre, dans la suite appelée Corinthe. Il était petit-fils d’Hellène : sa femme s’appelait Mérope, et était petite-fille d’Atlas. Ses successeurs furent Glaucus son fils, Bellérophon, Ornythion, Thersandre, Alinus. La fable dit que Sisyphe était fils d’Éole, qu’il chassa Médée de Corinthe, qu’il enchaîna la mort jusqu’au moment où Mars vint la délivrer pour  satisfaire Pluton, dont l’empire devenait désert.

Homère explique cette allégorie, en représentant Sisyphe comme un roi pacifique qui épargnait le sang de ses sujets et de ses voisins. Les poètes cependant le placent dans les enfers, où il est condamné, à rouler perpétuellement une roche qu’il élève en vain sur une montagne, et qui retombe sans cesse. Il mérita, disent-ils, ce supplice en trahissant un secret de Jupiter.

Quelques historiens regardent Glaucus comme l’instituteur des jeux Isthmiques. Bellérophon son fils termina en héros toutes les guerres qu’il avait entreprises ; et pour dire poétiquement qu’il triompha des plus grands obstacles, la fable le représente monté sur le cheval Pégase, et vainqueur, d’un monstre qu’on nommait Chimère.

Il est impossible d’éclaircir la confusion qui règne dans l’histoire des rois de Corinthe. Aucune action ne signala leurs vies. Un d’eux nommé Bacchis, donna son nom à sa race. Elle fut détrônée. Corinthe libre remporta quelques victoires sur mer, et fonda les colonies de Corcyre et de Syracuse.

Les Bacchides, après un long bannissement, rentrèrent dans leur patrie et y établirent le gouvernement aristocratique.

Dans la suite Cypsélus s’empara de l’autorité, se fit pardonner son usurpation par sa douceur, et régna trente ans. Son fils Périandre lui succéda : il gouverna en tyran. Les principaux citoyens qui lui donnaient de l’ombrage furent immolés ; il assassina sa femme. Cependant son esprit et ses liaisons avec les philosophes de son temps le firent compter au nombre des sept sages de la Grèce. Il aurait été plus juste de le compter au nombre des monstres dont la destruction était un bienfait pour l’humanité.

Après sa mort les Corinthiens, las de sa tyrannie, renversèrent le gouvernement monarchique, bannirent sa famille, et rétablirent le gouvernement démocratique.

Corinthe, placée entre le Péloponnèse et le continent, était appelée l’œil de la Grèce. Elle aurait pu aspirer à devenir la ville la plus puissante de l’Europe ; elle se contenta d’être la plus riche et la plus commerçante.

Nous ne parlerons point ici de la Macédoine. Ce pays, destiné à devenir un jour si fameux, resta longtemps ignoré sauvage, et en quelque sorte séparé de la Grèce.

Philippe fut le premier de s’es rois qui lui donna de l’éclat ; et ce royaume passa presque subitement de la barbarie à la civilisation, de l’obscurité à la lumière, de la faiblesse à la puissance.

 

ROYAUME DE LACÉDÉMONE

(An du monde 2884. — Avant Jésus-Christ 1120)

LÉLEX fut le premier roi de cette contrée qui s’appela d’abord Lélégie, et depuis Laconie. La fable le disait fils de la Terre. Ses successeurs furent Mysès, Eurotas, Lacédémon, Amyclès, Argalus, Cynortès, Abalus, Hippocoon et Tyndare.

Eurotas bâtit Sparte, et lui donna le nom de sa fille qu’il maria à Lacédémon. La capitale du royaume s’appela Sparte, et le territoire Lacédémone.

Tyndare, son fils, épousa Léda, dont les enfants devinrent célèbres sous le nom de Castor et Pollux, Hélène et Clytemnestre.

Castor et Pollux, jumeaux, se distinguèrent parmi les héros des temps fabuleux de la Grèce. Ils délivrèrent leur sœur Hélène des mains de Thésée et de Pirithoüs, et concoururent aux victoires des Argonautes. Les Grecs les divinisèrent, et donnèrent leurs noms à une constellation.

Après leur mort Tyndare accorda sa fille Hélène en mariage à Ménélas, frère d’Agamemnon. Ce prince reçut avec elle le royaume de Sparte. Clytemnestre épousa le roi d’Argon, Agamemnon.

La fable dit que Jupiter, amoureux de Léda, prit la forme d’un cygne pour la séduire. Deux sur œufs furent le fruit de cette union : de l’un sortirent Pollux et Hélène ; de l’autre Castor et Clytemnestre : les deux premiers crus fils de Jupiter, les autres, enfants de Tyndare. Pollux seul, dit-on, était immortel ; mais il obtint de Jupiter de partager avec son frère l’immortalité, et tous deux habitèrent alternativement les cieux.

L’enlèvement de leur sœur Hélène par un prince troyen devint la cause de la première guerre qui éclata entre l’Europe et l’Asie.

 

 

 

 


[1] An du monde 2148. — Avant Jésus-Christ 1856.

[2] An du monde 2992.

[3] An du monde 2208. — Avant Jésus-Christ 1796.