§ 11. — Des devoirs civiques. Le régime de vie et la discipline que Sparte imposait à ses citoyens eut sans doute pour fondement, à l’origine, le caractère national et les mœurs populaires ; mais sur ce fondement on éleva, d’après un plan calculé d’avance, tout un système de règlements, en harmonie avec la constitution de l’État. Ce système embrassait la vie entière, depuis la première enfance jusqu’à la vieillesse la plus reculée. C’était un cercle en dehors duquel nul ne pouvait prendre une direction ni recevoir une culture différentes de celles que semblait réclamer l’intérêt général, placé au-dessus de tous les autres mobiles. La promesse faite par l’oracle aux Spartiates que le courage et la concorde leur assurerait la jouissance de la liberté, était présente à l’esprit des législateurs qui déterminèrent les devoirs civiques[1], et c’est en effet un grand spectacle, bien digne de respect, de voir Sparte qui domptait les hommes, suivant l’expression de Simonide[2], développer chez les citoyens, en subordonnant les tendances individuelles à l’intérêt public, une énergie qui leur permit de soumettre des populations incomparablement plus nombreuses, et de maintenir longtemps leur hégémonie sur toutes les nations de la Grèce. On comprend qu’en présence de ce spectacle, on oublie ce qui pourrait faire ombre au tableau, et que Sparte apparaisse comme l’idéal de l’aristocratie, c’est-à-dire de l’État où a prévalu le principe du bien. La discipline spartiate a fait merveille en effet, si le but est de développer, au dépens des autres qualités, celle qui assurait la domination ; mais il faut en rabattre, s’il consiste dans le libre jeu de toutes les forces humaines, dans le perfectionnement harmonieux de l’intelligence et de la volonté. De ce point de vue, on est beaucoup plus tenté de souscrire au jugement de l’incorruptible Aristote, et de reconnaître que la discipline spartiate a fait des hommes grossiers et tout d’une pièce, au lieu de les ennoblir, et de réaliser l’idéal qu’elle avait la prétention d’atteindre[3]. Dès son entrée dans la vie, l’enfant était à la disposition de l’État. La question de savoir s’il avait droit à l’existence on s’il était condamné à disparaître n’était pas, comme cher d’autres nations, laissée à l’arbitre du père. Une commission formée des plus anciens de la tribu décidait de son sort. Paraissait-il faible, infirme ou mal conformé, il était envoyé sur le Taygète dans un emplacement désigné à cet effet et nommé Άποθέται. S’il était au contraire sain et valide, on décidait de l’élever. Au cas où il était posthume, et où le père n’avait pas laissé de propriétés assez considérables pour fournir des parts à toute la famille, on lui attribuait une portion de terrain tirée au sort, pourvu toutefois qu’il en restât de disponibles[4]. Jusqu’à leur septième année, les enfants demeuraient dans la maison paternelle, sous la surveillance des femmes. Cependant cette première éducation était exempte de faiblesses ; elle devait les préparer à la discipline qui les attendait, et les faire passer entre les mains des hommes sains de corps et d’esprit. Les nourrices ou bonnes lacédémoniennes étaient recherchées à l’étranger, par les familles riches. Alcibiade entre autres avait une bonne lacédémonienne, nommée Amycla[5]. A sept ans les enfants étaient conduits au pædonome qui présidait à l’éducation de toute la jeunesse. Le pædonome les réunissait en différents groupes désignés sous le nom de ίλαι. La réunion de plusieurs groupes formait une classe άγέλα ou en dialecte spartiate βοΰα. Chaque groupe avait à sa tête un ίλάρχης, chaque classe un βουάγωρ, choisis l’un et l’autre parmi les jeunes garçons plus avancés en âge ; il paraît que le βουάγωρ était élu par les enfants eux-mêmes[6]. Ces chefs étaient chargés de diriger les jeux et les exercices gymnastiques, sous la surveillance incessante du pædonome et des bidyens qui, escortés des mastigophores, se tenaient prêts à faire appliquer les corrections jugées nécessaires. Outre les représentants de l’État, il ne manquait pas d’assistants qui suivaient le spectacle avec un vif intérêt et avaient le droit d’exciter les enfants à tel ou tel tour de force, de provoquer entre eut des défis, de leur donner des conseils, de les réprimander et même de les châtier. Les exercices corporels étaient gradués suivant l’âge, mais il est impossible de rien spécifier à ce sujet ; on sait seulement que le pugilat et le, pancrace en étaient exclus, comme convenables à des athlètes, non à des guerriers. Courir, sauter, lutter, lancer le disque ou le javelot, étaient les exercices habituels. Il va de soi qu’une part était faite au maniement des armes, bien que les professeurs d’oplomachie, dont l’enseignement comprenait, avec beaucoup de choses inutiles, la tactique et en général tout ce qui concernait l’art militaire, fassent tenus éloignés de Sparte[7]. A ces leçons s’ajoutaient plusieurs sortes .de danses, parmi lesquelles la pyrrique aux mouvements précipités, que l’on dansait en armes et à laquelle les enfants étaient dressés dès l’âge de cinq ans[8]. Toute cette éducation’ avait pour but de fortifier et d’endurcis le corps. Les jeunes gens allaient à peine couverts, la tête et les pieds nus dès l’âge de douze ans ; ils portaient, même en hiver, un vêtement unique qui devait durer toute l’année. Leurs cheveux étaient coupés courts. Il leur était défendu de se baigner et de se parfumer, si ce n’est à des jours fixés et qui revenaient très rarement, Ils couchaient sans couvertures, sur du foin ou de la paille, et à partir de l’âge où la puberté commence à se développer, sur des joncs ou des roseaux (σίδη) d’où leur venait le nom de σιδεΰναι[9]. Leur nourriture était plus que simple, et distribuée avec une telle parcimonie qu’elle ne suffisait pas à satisfaire leur appétit, si bien qu’ils étaient forcés de voler des aliments, larcins qui d’ailleurs ne leur valaient que des éloges, s’il s’en tiraient avec adresse, et étaient punis dans le cas seulement où ils s’étaient laissé surprendre[10]. Enfin, pour les aguerrir contre la douleur, on avait établi, en dehors des exercices journaliers, l’épreuve de la διαμαστίγωσις ou du fouet, renouvelée chaque année devant l’autel d’Artémis Orthia ou Orthosia, dans laquelle les jeunes gens étaient frappés jusqu’au sang, avec défense, sous peine de déshonneur, de se plaindre ou de demander merci. Celui qui avait eu la meilleure contenance était honoré comme βωμονίκας, c’est-à-dire vainqueur à l’autel ; il n’était pas sans exemple que les victimes expirassent sous le fouet. Cet usage fut établi, dit-on, pour dédommager Arthémis des sacrifices humains auxquels elle était habituée ; il avait été conservé comme moyen d’éducation et existait encore, quand depuis longtemps déjà il n’y avait plus que fort peu de traces des institutions de Lycurgue[11]. Il n’est pas douteux que l’on dut atteindre par là le but que l’on se proposait, c’est-à-dire de fortifier et d’endurcir le corps ; c’est une autre question de savoir si la force nécessaire à la santé et à l’aptitude militaire ne pouvait être obtenue sans des moyens aussi rigoureux ; on est fort tenté de répondre par l’affirmative ; du moins, les Spartiates eux-mêmes sentaient le besoin de faire une exception en faveur des héritiers présomptifs de leurs rois[12]. Autant le développement des forces physiques était excessif, autant la culture intellectuelle était restreinte. A la vérité, lorsque fut établie la discipline spartiate, il n’était pas encore question d’enseignement scientifique dans le reste de la Grèce, mais plus tard, quand les éléments de la lecture et de l’écriture entrèrent partout ailleurs comme un minimum dans l’éducation de la jeunesse, ils ne furent pas admis dans le programme spartiate. De là le reproche qu’adresse Isocrate aux compatriotes de Lycurgue[13], d’être en retard sur la civilisation générale, et de ne pas même apprendre à connaître leurs lettres. Il y a là un abus de rhétorique ; il est bien vrai que la lecture et l’écriture ne faisaient pas régulièrement partie de l’éducation, mais un grand nombre de citoyens acquirent ces connaissances privément, dès que le progrès des relations en fit sentir l’utilité ou la nécessité. Ce qui est certain, c’est qu’ils ne les considérèrent qu’au point de vue des avantages immédiats qu’ils en retiraient, non comme le point de départ d’une instruction supérieure[14]. En revanche, la musique entrait dans l’enseignement public, non seulement comme une récréation, mais aussi comme un moyen de culture morale. Une condition toutefois lui était imposée, c’était de rester fidèle au mode dorien, et d’élever l’âme par la noblesse du rythme et la simplicité de l’harmonie. Les nouveautés et les raffinements étaient accueillis avec méfiance, souvent même repoussés brutalement. Les enfants et les jeunes gens ne se bornaient pas à chanter des morceaux en rapport avec l’esprit national, ils apprenaient aussi à jouer de la cithare et de la flûte[15]. Dans les cérémonies publiques, des chœurs nombreux composés d’hommes de différents âges se répondaient alternativement. Plutarque nous en a conservé un exemple qui mérite de trouver place ici. Le chœur des vieillards chantait d’abord Nous étions jeunes autrefois, pleins de force et de courage. à quoi les hommes faits répondaient : Nous le sommes aujourd’hui ; on peut en faire l’expérience. Puis venaient les enfants : Nous le serons à notre tour, et bien plus encore[16]. Les Spartiates estimaient que l’expérience de la vie développait suffisamment l’intelligence, et que le commerce de tous les jours était assez instructif pour qu’il ne fût pas besoin d’autres leçons ; aussi n’avaient-ils pas d’écoles. Les enfants étaient souvent admis aux repas des hommes, durant lesquels les conversations portaient sur les sujets les plus divers. Tantôt, il était question des affaires publiques : on examinait les actions louables ou répréhensibles, accomplies soit dans la guerre soit dans la pais ; tantôt les enfants entendaient les plaisanteries joyeuses ou mordantes auxquelles les Spartiates se livraient volontiers ; car le Dieu du dire avait un autel dans la ville, aussi bien que celui de l’Obéissance[17]. Les jeunes gens se mêlaient à ces conversations ; il leur était permis d’exprimer leur sentiment, ils devaient répondre aux railleries ou aux questions embarrassantes avec présence d’esprit et vivacité, en s’abstenant de tout développement inutile. Le but était de dire beaucoup de choses en peu de mots[18]. Ce qui dominait, c’est le respect que les citoyens plus âgés étaient en droit d’exiger des plus jeunes ; ils étaient vis-à-vis d’eux dans les relations de maître à disciple, de supérieur à subordonné. Ils pouvaient les interpeller sur leurs actes, les avertir et les réprimander, même les punir. Si un enfant allait se plaindre chez lui, il pouvait être sûr que la correction serait aggravée par son père[19]. Les enfants, en effet, appartenaient à l’État plus qu’à leur famille ; tous les vieillards étaient considérés par les hommes plus jeunes à l’égal de leur père. La jeunesse spartiate, tout en surexcitant ses forces et en rivalisant entre elle, témoignait un respect de la vieillesse et une modestie qui ont fait l’admiration de toute la Grèce. Sparte a prouvé, dit Xénophon, que les hommes ne le cédaient pas aux femmes en décence. Les jeunes gens n’étaient pas étourdis ; ils restaient silencieux comme des statues, ne portaient pas les regards de côté et d’autre, levaient à peine les yeux, avaient toujours une tenue sévère, et marchaient tranquillement, les mains cachées sous leur manteau[20]. — Il est impossible de passer sous silence les relations personnelles et étroites qui s’établissaient entre les hommes d’un âge mûr et les jeunes gens, et les résultats que, d’après des témoignages irrécusables, les Spartiates en obtenaient au- profit de l’éducation. Ce lien c’était bien l’amour (les jeunes garçons qui le formait, mais il faut entendre cet amour dans un sens plus pur et plus moral qu’on ne le fait d’ordinaire. Bien que le sentiment de la beauté physique fût sans doute une des raisons qui guidait le choix de l’amant, le but de l’amour était de donner à l’aimé la beauté intérieure que ses dehors semblaient promettre, et de l’aider à se rapprocher de ce qui était pour les Spartiates l’idéal de la vertu virile. Toutes les expressions qui avaient trait à ce commerce en font foi. L’amant s’appelait είσπνήλας, c’est-à-dire l’inspirateur, parce qu’il cherchait à souffler dans l’âme, du bien-aimé un amour dont lui-même était l’objet, il est vrai, mais à ce titre seulement qu’il s’offrait comme guide et comme modèle, dans l’effort qu’il provoquait pour atteindre à la vertu. L’aimé s’appelait άίτας celui qui écoute, parce qu’il prêtait l’oreille à la voix de son conseiller[21]. C’était une honte pour un jeune garçon, lorsque pas un homme ne le trouvait digne de son amour, et pour un homme, lorsqu’il ne faisait pas choix d’un jeune garçon[22]. Une fois le lien formé, l’amant s’engageait à conduire l’aimé dans la bonne voie, et devenait responsable de ses écarts[23]. Celui qui altérait pas des rapports sensuels la pureté d’un pareil commerce, était déshonoré, et tellement accablé par le mépris public qu’il préférait s’y dérober parla mort ou par l’exil. Les filles, comme les garçons, étaient exercées, de par la loi, à la gymnastique et à la musique ; mais oit ne sait rien de précis sur la manière dont était donné cet enseignement[24]. Il est probable qu’il existait pour les filles des règlements analogues à ceux qui ont été signalés plus haut[25] : distribution des enfants du même âge par sections et par classes, gradation des exercices, surveillance des pædonomes et des bidyens, etc. Il est spécifié que les filles apprenaient à courir, à sauter, à lutter, à lancer le disque et le javelot ; il fallait bien aussi qu’elles apprissent le chant et plusieurs espèces de danses, puisque, dans les fêtes solennelles, elles dansaient en rangs, et chantaient en chœur[26]. On ne peut douter que des emplacements distincts fussent réservés pour leurs exercices, et que l’accès n’en fut pas permis à tout le monde[27] ; il y avait cependant des épreuves publiques, dans lesquelles les garçons assistaient aux jeux des filles, et les filles à cens des garçons ; il paraît même que, dans ces occasions, les éloges ou le blâme exprimé par les filles était pour l’autre sexe un aiguillon puissant. Ces mœurs devaient fort scandaliser les autres nations chez lesquelles les femmes et surtout les filles étaient tenues absolument à part des hommes, et une jeune Laconienne forte et résolue, comparée aux frêles et timides Athéniennes, devait faire l’effet d’un être sans sexe. La censure s’attachait surtout à leur costume qui les couvrait à peine, en particulier à la tunique sans manches et fendue dans le bas, qui s’arrêtait au-dessus du genou, et laissait paraître beaucoup de choses soigneusement voilées ailleurs[28] ; cependant nous ne voyons parmi les jeunes filles spartiates aucune trace de désordres qui, s’ils eussent été fréquents, n’auraient pas échappé à la malveillance des observateurs. On sait que les objets qui, cachés et entrevus furtivement, enflamment l’imagination, perdent leur attrait dangereux pour ceux qui les voient tous les jours sans obstacle. C’est ainsi que les jeunes garçons pouvaient voir presqu’à découvert leurs saurs, et les filles leurs frères, sans que leurs sens en fussent émus. L’éducation spartiate, loin de rendre les filles déréglées, répondait parfaitement aux vues de Lycurgue, qui avait voulu en faire le type le plus robuste et le plus beau de la Grèce : La beauté des femmes spartiates était célèbre : chez Aristophane, Lampito excite l’admiration jalouse des femmes auxquelles elle se mêle[29]. — Des relations semblables à celles des hommes et des jeunes garçons n’étaient pas non plus chose rare à Sparte, entre les femmes et les filles[30]. Les sources ne nous indiquent pas à quel âge l’éducation des femmes était considérée comme achevée ; celle des garçons se prolongeait jusqu’à la trentième année. Alors seulement ils cessaient d’être soumis à la surveillance des bidyens, et astreints aux exercices que nous avons décrits[31]. Au commencement de la dix-huitième année, ils quittaient la classe des jeunes garçons et portaient jusqu’à, vingt ans le nom de μειλλείρενες ou μελλίρανες, ou comme qui dirait aspirants[32]. C’est dans cet intervalle qu’ils étaient appliqués au service de la κρυπτεία, dont il a été question plus haut. A partir de la vingtième année accomplie, ils passaient dans l’armée régulière, et étaient appelés jusqu’à trente ans εΐρενες ou ΐρανες[33], toutefois on désignait plus particulièrement les plus jeunes d’entre eux par le nom de πρωτεΐραι ou πρωτίρανες, les plus âgés par celui de σφαιρεΐς, peut-être du mot σφαΐρα, balle, parce que le jeu de balle, dont les mouvements divers exigeaient une grande habileté, tenait une place importante parmi les exercices en usage[34]. A trente ans, les Spartiates entraient dans la classe des hommes ; alors seulement ils pouvaient se créer une maison particulière, bien que souvent ils fussent mariés à l’avance. Le mariage en effet ne les dispensait pas de se rendre dans la section à laquelle ils appartenaient, pour y prendre leur repas, se livrer aux exercices prescrits, et passer la nuit dans des dortoirs communs, de telle sorte qu’ils ne pouvaient voir leur femme qu’à la dérobée[35]. La loi imposait à chaque citoyen en possession d’un lot de terre de se marier. Étaient exempts de ce devoir les fils puînés qui n’avant encore rien en propre, vivaient avec leur frère plus âgé, et étaient défrayés par lui. Nous avons vu plus haut qu’ils partageaient quelquefois non seulement sa maison, mais sa femme, jusqu’au moment où un établissement se présentait pour eux, c’est-à-dire une adoption dans une maison sans enfants, ou un mariage avec une héritière. Celui qui trouvant l’occasion de se marier, n’en profitait pas, était comme noté d’infamie. Il ne pouvait assister aux fêtes, par exemple aux Gymnopédies, et sur l’ordre des Éphores devait, par une journée d’hiver, se promener dans la place publique, couvert d’une simple tunique, en chantant une chanson satirique, dont il était lui-même l’objet, et où il se reconnaissait justement puni de sa désobéissance aux lois[36]. Il ne pouvait prétendre aux marques de respect que les jeunes gens devaient aux hommes plus âgés. Un général nommé Derkyllidas, avant ordonné à un jeune homme de se lever devant lui, n’en obtint que cette réponse : Tu n’as pas d’enfants qui un jour doivent se lever devant moi[37], et tout le monde applaudit. On était puni même, pour se marier trop tard, comme aussi pour faire un mariage peu honorable[38]. Étaient sans doute réputées telles les unions où le choix avait été déterminé par des considérations étrangères au but du mariage ou contraires aux dispositions de la loi, lorsque par exemple un homme refusait une fille pauvre, issue d’une famille alliée à la sienne, pour en épouser une plus riches[39]. Même sans témoignages exprès, on peut admettre par analogie avec d’autres législations qu’il n’y avait de mariages réguliers qu’entre citoyens et citoyennes ; toutefois semblable prescription n’est attestée que pour la race des Héraclides : toute union entre un descendant d’Héraclès et une étrangère non seulement était défendue, mais pouvait amener de graves conséquences. Un mariage de ce genre fut une des causes qui, vers l’an 242, poussèrent les Spartiates à déposer le roi Léonidas II[40]. Un citoyen qui recherchait une fille devait d’abord s’assurer le consentement du père ou du parent qui avait autorité sur elle. Si une contestation s’élevait sur la question de savoir à qui, entre plusieurs prétendants, elle devait échoir, les rois en décidaient[41]. Les dots étaient interdites ; plus tard cependant, lorsqu’un grand nombre de citoyens se trouvèrent possesseurs de fortunes considérables, cette défense tomba en désuétude. Depuis surtout que la loi d’Epitadeus eut autorisé la libre disposition des fonds de terre, les familles propriétaires de plusieurs domaines les firent servir à doter leurs filles, et comme les pères opulents cherchaient naturellement des gendres qui ne le fussent pas moins, cet usage ne contribua pas peu à réunir le sol dans les mêmes mains[42]. Sitôt qu’il avait obtenu l’adhésion des parents dont sa fiancée dépendait ; le fiancé s’en emparait par une sorte de rapt ; il l’enlevait du milieu de ses compagnes, et l’amenait dans la maison d’une parente à lui[43] ; cette femme qui pour la circonstance s’appelait νυμεύτρια, recevait la jeune fille ; la conduisait dans la chambre nuptiale, où elle lui coupait les cheveux, lui faisait revêtir un habillement et des chaussures d’homme, après quoi elle l’avertissait de se tenir prête à la consommation du mariage, et emportait la lumière. Le mari, s’il n’avait pas dépassé trente ans, ce qui était le cas le plus ordinaire, ne pouvait voir sa femme qu’en hâte et à la dérobée. Le but du législateur était d’éviter l’abus des plaisirs ; il en résultait cette circonstance singulière que des époux pouvaient avoir plusieurs enfants sans s’être jamais vus en plein jour[44]. Nous ne trouvons nulle part de détails précis sur les sacrifices et les cérémonies religieuses en usage lors de la célébration du mariage ; il ne faut pas cependant tirer de là cette conséquence que l’on s’en passât tout à fait. Il est plus naturel de croire que si, à l’encontre de la coutume généralement établie en Grèce, la consécration religieuse est été absente du mariage, cette exception ne fût pas passée inaperçue ; il est probable seulement que les cérémonies étaient très simples, et que les rites suivant lesquels le cortège, chez d’autres nations, conduisait la fiancée à son époux, étaient inconnus à Sparte. Il est certain que la loi envisageait le mariage au point de vue politique, comme un moyen de conserver la famille et d’accroître la population. Si cette considération n’était pas exclusive, elle était au moins dominante. Toutes les cités grecques partaient d’ailleurs du même principe, avec cette différence que les Spartiates l’appliquaient plus rigoureusement. La dissolution du mariage, à défaut d’enfants, n’était pas seulement facile à obtenir, elle était dans les prescriptions légales. Dès l’an 560, le roi Anaxandridas n’ayant pu avoir d’enfants de sa femme et refusant de s’en séparer, reçut des éphores l’ordre de lui en adjoindre une seconde, et entretint un double train de maison, pour les faire vivre séparément[45]. A peu près dans le même temps, le roi Ariston, ayant épousé une femme stérile, en prit une autre, puis pour le même motif une troisième, en l’honneur de laquelle il répudia, il est vrai, l’urne des deux premières[46]. C’était là une dérogation à la coutume, que l’on permettait aux rois pour perpétuer leur dynastie, tout en tenant compte de leurs faiblesses. En dehors de cette exception, chaque citoyen ne pouvait avoir qu’une femme, mais les mœurs permettaient aux femmes d’avoir deux ou même plusieurs maris. Non seulement, comme on l’a vu plus haut, des frères pouvaient avoir une femme en commun, mais on ne voyait rien d’inconvenant à ce qu’un vieillard qui ne se sentait, plus apte aux fins du mariage, invoquât l’aide d’un homme plus jeune et plus fort, ou qu’un mari qui trouvait la femme d’un de ses amis plus belle que la sienne le priât de l’admettre au partage de ses droits[47]. Il n’état pas même interdit, et l’on ne considérait pas comme honteux, de céder sa femme à des hommes dépourvus du droit de cité, s’ils paraissaient propres à procréer de beaux enfants[48]. Suivant quelques critiques, on distinguait soigneusement les cas où des faits de ce genre étaient permis ; mais les textes anciens ne nous fournissent aucun éclaircissement sur cette question délicate ; il est probable que chacun était libre de se montrer plus accommodant ou plus sévère[49]. Lorsqu’on nous assure que les infidélités des femmes spartiates étaient chose rare et presque inouïe[50], cela ne doit évidemment s’entendre que d’adultères commis sans l’assentiment et à l’insu du chef de famille. Il est croyable en effet qu’il ne s’en est pas présenté de tels ; mais la femme à qui des propositions étaient faites ne s’en montrait pas offensée, et renvoyait son amoureux se pourvoir auprès de son mari de l’autorisation nécessaire[51]. A part cette façon peu digne de comprendre les relations conjugales, les femmes jouissaient à Sparte d’une considération plus haute que dans le reste de la Grèce. Leur éducation les rapprochait davantage des hommes ; elles étaient habituées, dès l’enfance, à se sentir citoyennes, et prenaient vivement à cœur les intérêts publics. Plusieurs exemples prouvent que pour le courage, le patriotisme et l’abnégation, elles ne le cédaient pas à l’autre sexe ; de là le respect dont elles étaient l’objet de sa part. L’éloge ou le blâme des femmes importait fort ; on tenait grand compte de leur sentiment, même pour des choses qui paraissaient être en dehors de leur compétence. Telle était leur influence, que les autres Grecs affectaient quelquefois de considérer le gouvernement de Sparte comme un gouvernement de femmes. Cette autorité n’était que la conséquence naturelle de la part faite aux femmes spartiates qui, à la vérité, dépassait de beaucoup la condition sociale des autres Grecques, mais non celle que, chez les nations modernes de l’Occident, les hommes ont accordée à leurs compagnes. Nous aussi nous pourrions faire dire à un Athénien des meilleurs temps de la république que nous vivons sous le régime de la γυναικοκρατία[52]. La situation de la femme spartiate ne la rendait pas d’ailleurs moins soumise à ses devoirs d’épouse et de mère ; aussitôt mariée, elle s’appliquait aux soins de sa maison, d’où lui venait, d’après le témoignage d’Hesychius, la qualification de μεσοδόμα. Platon dit aussi qu’à la vérité les femmes de la Laconie ne tissaient ni ne filaient, ces occupations étant abandonnées aux esclaves, mais qu’elles n’en étaient pas moins appliquées aux travaux intérieurs[53]. Comme on demandait à l’une d’elles, tombée en esclavage, ce qu’elle savait faire : Bien gouverner la maison, dit-elle. A la même question une autre répondit : Être fidèle et soigneuse[54]. En dirigeant l’éducation de ses filles, dont elle ne s’occupait pas moins que son mari de celle de ses fils, la mère de famille s’adonnait de nouveau aux exercices gymnastiques et à l’étude de la musique. Les relations des femmes avec les hommes étaient moins libres que celles des jeunes filles. Le mot de Périclès, que le mieux pour une femme était de ne faire parler d’elle ni en bien ni en mal dans les conversations des hommes, était vrai aussi à Sparte[55]. Les femmes ne se montraient que voilées, tandis que les filles allaient à visage découvert. Un Spartiate, interrogé sur l’origine de cette coutume, répondit : Il faut bien qu’une tille cherche un mari ; une femme n’a qu’à garder le sien[56]. Ces paroles, outre qu’elles expliquent la différence des rapports suivant l’âge et la condition, prouvent que le goût personnel tenait plus de place à Sparte qu’ailleurs dans le choix d’une épouse, bien que sans doute il n’y faille pas chercher cet attrait romanesque qui dégénère facilement en sensiblerie. Nous ne devons pas davantage nous figurer l’intérieur des Spartiates d’après celui des modernes, pour qui leur maison représente le monde entier ou du moins la chose la plus importante du monde, à qui la vie privée fait oublier la vie publique, et qui peuvent en conscience se croire tenus d’agir ainsi. A Sparte, l’État passait avant tout ; la maison ne venait qu’après, et n’avait d’importance qu’en raison des services qu’elle rendait à l’État. Tel était le principe qui avait fait établir les Syssities, nommées aussi φειδίτια et άνδρεΐα, dont souffrait assurément l’intimité domestique, mais qui, suivant l’expression de Plutarque, faisait une habitude aux hommes de vivre serrés les uns contre les autres, à la façon des abeilles, et de ne se considérer, oublieux d’eux-mêmes, que comme des membres de l’État[57]. L’assistance aux syssities était un devoir impérieux pour tous les Spartiates. Dès qu’ils avaient accompli leur vingtième année, ils entraient dans la classe des εΐρενες et dans le corps des hoplites. Les citoyens préposés à la surveillance des enfants étaient seuls dispensés du service, et prenaient leurs repas avec eux[58]. Les rois eux-mêmes ne pouvaient se dispenser de participer aux syssities, et lorsqu’Agis, revenant de la guerre contre Athènes, demanda qu’on lui apportât son repas chez lui, afin qu’il pût dîner avec sa femme, cette faveur lui fut refusée[59]. Les deux rois mangeaient dans la même salle[60], et avaient pour compagnons de tables les mêmes hommes qui formaient leur entourage dans la guerre. Ils n’avaient sur leurs sujets que ce seul avantage de recevoir double portion et de pouvoir faire don de leur superflu à ceux qu’ils voulaient honorer. L’État faisait les frais de la table royale[61]. Tous les autres citoyens devaient, pour subvenir aux syssities, fournir chaque mois un médimne ou un peu plus de cinquante litres de farine, huit conges ou vingt-cinq litres de vin, cinq mines ou environ deux kilogrammes de fromage et un kilogramme de figues, sans compter une petite somme d’argent qui ne dépassait pas dix oboles d’Égine[62]. Celui qui se refusait à payer cette cotisation on ne pouvait le faire était rayé de la liste des όμοιοι, c’est-à-dire des citoyens en pleine possession de leurs droits[63]. Les absences n’étaient permises à ceux qui résidaient dans la ville que pour des motifs déterminés, par exemple lorsqu’on célébrait un sacrifice domestique, ou que l’on s’était attardé à la chasse[64] ; mais il arrivait assez souvent que des citoyens, après une déclaration préalable, obtenaient un congé pour s’éloigner de Sparte et faire un séjour de quelque durée dans les environs[65]. Il n’était pas inutile en effet de surveiller de temps à autre les Hilotes établis sur les propriétés ; d’autre part, la chasse dont les Spartiates étaient amateurs passionnés et à laquelle la loi elle-même les encourageait, les entraînait souvent loin de la ville. Les forêts du Taygète abondaient en gibier, notamment en sangliers, pour la poursuite desquels les chiens de Laconie avaient des aptitudes particulières[66]. On sait formellement que les Spartiates avaient sur leurs propriétés des magasins qui leur servaient à divers usages et d’où ils pouvaient tirer, quand ils venaient dans le pays, tous les objets nécessaires. Ils entretenaient aussi sur leurs terres des chiens et des chevaux qui donnaient lieu à une certaine communauté de biens chiens et chevaux étaient laissés à la disposition de tous ceux qui pouvaient en avoir besoin. Il était permis également aux personnes du voisinage de se servir des Hilotes et d’ouvrir les magasins, sous la seule condition de les refermer et d’y apposer leur cachet[67]. Pour revenir aux syssities, les Spartiates, comme les héros d’Homère, mangeaient assis, non couchés. Ce fut plus tard, on ne sait au juste à quel moment, que la coutume de prendre ses repas dans la position horizontale s’introduisit de l’Orient à Sparte, comme ailleurs, avec cette différence toutefois que les convives étaient étendus non sur des coussins ou des tapis, mais sur des planches[68]. Un des noms par lesquels on désignait les syssities, φιδίτια ou Ϝιδίτια, paraît être un reste de l’ancienne coutume, et subsista, comme cela s’est présenté souvent, alors même qu’il n’avait plus d’application[69]. A chaque table étaient réunies une quinzaine de personnes, tantôt plus, tantôt moins. Il fallait, pour être admis à l’une d’elles, être choisi par ceux qui en faisaient déjà partie. On votait avec des morceaux de mie de pain à l’état naturel ou fortement pétrie, que l’on déposait dans un vase placé sur la tête d’un esclave[70] : les relations de parenté ou de voisinage n’entraient pas en ligne de compte, au contraire. Les convenances de ce genre étaient négligées à dessein, et chacun élisait librement celui qui lui agréait le mieux comme convive. L’admission n’était prononcée qu’à l’unanimité des voix. Les compagnons de table se retrouvaient compagnons de tente pendant la guerre ; aussi les réfectoires s’appelaient, de même que les tentes, σκηναί, et les polémarques qui commandaient les différents corps de l’armée avaient aussi, dans la paix, la surveillance des syssities. La nourriture était des plus simples : tous les jours revenait le célèbre brouet noir (αίματία ou βαφά), composé de la chair da sanglier cuite dans le sang, sans autre assaisonnement que du sel et du vinaigre[71]. On servait à chacun une portion déterminée ; le pain d’orge était à discrétion ; le vin était aussi assez abondant pour satisfaire les plus altérés, mais l’ivresse était réputée honteuse[72]. Le dessert se composait de fromage, d’olives et de figues. Il. n’était pas défendu d’apporter comme extra un quartier de sanglier, un oiseau, un poisson ou du pain de froment[73]. Quelquefois même ces suppléments que l’on servait, sous le nom d’έπαικλον, à la suite du repas régulier, étaient imposés en réparation de fautes légères. Les citoyens riches ou ceux qui avaient été heureux à la chasse apportaient souvent aussi des offrandes volontaires[74]. Il y avait en outre à Sparte des repas solennels, où L’on s’écartait du régime ordinaire des syssities. Parmi ces réjouissances, les unes étaient publiques, comme par exemple aux I3yacinthies, aux Carnées ou aux Tithénidies ; dans l’un et l’autre cas, elles s’appelaient κοπίδες, comme qui dirait des banquets tranchants[75]. Il n’est pas douteux qu’une grande frugalité régni5t même dans ces repas, bien que le brouet noir fût remplacé par quelque autre ragoût, et le pain d’orge par des pâtisseries de froment. A vrai dire, la différence n’était pas grande, et l’habitant de Sybaris qui déclarait voir sans étonnement le mépris des Spartiates pour la mort, attendu que leur vie ne valait guère mieux[76], avait raison à son point de vue. Ce n’était pas seulement leur cuisine qui justifiait cette appréciation, mais le régime général auquel ils étaient soumis, et la privation absolue des jouissances qui faisaient tout le prix de la vie chez les Sybarites. Ainsi la loi exigeait que les plus riches fussent vêtus comme les plus pauvres. Les haillons des Spartiates étaient souvent pour le reste de la Grèce un sujet de raillerie, ce qui ne les empêchait pas d’ailleurs d’en tirer vanité. C’est dans, le même esprit qu’en Égypte Agésilas renvoya aux pilotes les mets recherchés qui lui avaient été servis, gardant pour lui les plus grossiers. Ainsi était justifié le mot de Diogène qui, voyant à Olympie de jeunes Rhodiens magnifiquement parés et des Spartiates mal vêtus, déclara qu’ils étaient aussi vains les uns que les autres, chacun à sa manière[77]. L’habillement usité à Sparte se composait d’une sorte de manteau étriqué en gros drap, sans agrafes et sans ceinture. A partir de douze ans, les jeunes Spartiates n’en pouvaient avoir d’autre, et les vieillards eux-mêmes s’en contentaient souvent. Le vêtement de dessous, fait également d’une laine grossière, ressemblait à une chemise sans manches et descendait jusqu’aux genoux. La chaussure consistait en une simple semelle, avec un rebord étroit, sur lequel étaient fixées des lanières qui s’attachaient au pied. Les enfants et les jeunes gens marchaient pieds nus ; les hommes mêmes ne mettaient guère de chaussures que dans les grandes occasions, ou lorsqu’ils entraient en campagne. Les chaussures des Spartiates étaient d’ailleurs réputées pour leur commodité et furent adoptées par les autres nations de la Grèce qui, tout en les rendant peut-être un peu plus élégantes, en conservèrent la forme ; celles d’Amycla étaient surtout réputées. Les Spartiates avaient d’ordinaire la tête découverte, et garnie, comme les Grecs d’Isomère, d’une longue chevelure qui, suivant une parole attribuée à Lycurgue, rehaussait la beauté du visage et, donnait à la laideur un aspect farouche. Aucune loi n’ordonnait cependant de laisser croître les cheveux ; c’était plutôt une tolérance accordée aux hommes qui dans leur enfance et leur jeunesse avaient dû les porter courts, pour se conformer à la règle ; un grand nombre même les conservait ainsi, sans doute par propreté[78]. C’était aussi par propreté et pour entretenir ses forces que l’on se faisait une habitude journalière de se baigner dans les eaux de l’Eurotas. De temps en temps, on prenait des bains de vapeur ; mais les bains chauds proprement dits étaient considérés comme une cause d’affaiblissement, et bien qu’ils ne fussent pas interdits, on en faisait peu d’usage. Les Spartiates portaient toute leur barbe, et ne la coupaient jamais. Toutefois, les éphores, à leur entrée en charge, ordonnaient de faire tomber les moustaches, soit, comme on le pensait généralement, pour habituer les citoyens à l’obéissance, soit en raison du sens symbolique que l’on attachait à cet ornement comme signe de la liberté individuelle[79]. Quand nous aurons rappelé encore le bâton solide dont tous les citoyens étaient munis et qui leur servait d’instrument de correction, non seulement contre les hilotes, mais contre les jeunes Spartiates sur lesquels ils avaient autorité[80], on pourra se représenter assez fidèlement leur apparence extérieure. Cette simplicité n’excluait pas d’une manière absolue la dignité, ni même la beauté de la prestance ; cependant, à en croire les Grecs des autres nations, les habitants de la Laconie avaient en général un extérieur assez laid, que rendait plus déplaisant encore leur air farouche et négligé. Tous les raffinements de la parure étaient bannis de Sparte. On ne souffrait ni les cosmétiques dont on ne manquait jamais ailleurs de s’enduire la tête en sortant du bain, ni les habits de couleur[81]. A L’exception du costume militaire qui était teint en pourpre, tous les vêtements étaient en laine de couleur naturelle. L’habitation n’était pas plus somptueuse que le reste. On cite une ordonnance de Lycurgue (ρήτρα) d’après laquelle la scie et la cognée pouvaient seules être employées pour couvrir on clore les maisons[82]. La charpente et toute la boiserie étaient formées de poutres mal équarries et de planches raboteuses. Un jour Léotychidès entrant dans la maison d’un riche étranger et voyant des pièces de bois dégrossies avec soin, demanda étonné si les arbres croissaient ainsi dans le pays[83]. La simplicité du mobilier répondait naturellement à celle de l’habitation, car, ainsi que le dit Plutarque, personne alors n’était assez corrompu pour entasser dans une cabane des sièges élégamment travaillés, des tapis de pourpre, des ustensile d’or et autres superfluités. La loi interdisait aux citoyens de posséder des métaux précieux. Cette défense se maintint alors même que l’or et l’argent furent devenus d’un usage général dans le reste de la Grèce, bien que l’État ne se fît pas faute de la violer, et que sans doute une exception fût réservée pour les rois. Il est évident, d’autre part, que les Périèques ne pouvaient sans or et sans argent commercer avec les pays étrangers, car ils ne se bornaient certainement pas à échanger les produits de la contrée, et la monnaie de fer eût été fort insuffisante ; elle était cependant la seule en usage pour les transactions intérieures. Elle circula d’abord en lingots, puis en disques désignés sous le nom de πέλανοι qui, tout en pesant une livre d’Égine, n’avaient que la valeur d’une demi-obole, grâce à la précaution que l’on avait prise de mêler au fer une substance qui le rendait impropre à tout autre usage[84]. On ne pouvait évidemment, avec une pareille monnaie, tirer de l’étranger aucun objet précieux. Elle ne servait qu’au dedans, comme appoint pour balancer les échanges qui composaient à peu près tout le négoce[85]. L’exemple de Thorax, un des amis et des compagnons d’armes de Lysandre, mis à mort pour avoir enfreint ces prescriptions, prouve avec quelle rigueur elles furent maintenues jusqu’après la guerre du Péloponnèse[86]. L’intention du législateur est facile à comprendre : il voulait tenir éloigné, en même temps que les marchandises, l’attrait corrupteur des mœurs étrangères et garder sans mélange la simplicité et la sobriété de la Sparte antique. La défense de voyager à l’étranger sans une permission spéciale des éphores, défense faite surtout aux citoyens encore en âge de porter les armes, n’avait pas d’autre but[87]. Ce fut encore pour le même motif que, durant la guerre du Péloponnèse, lorsque les Spartiates furent invités à envoyer quelques-uns des leurs, pour commander dans les villes soumises, on choisit des hommes âgés, et que les exceptions à cette règle furent considérées comme illégales[88]. L’émigration était absolument interdite : quiconque, après avoir quitté le pays, y rentrait, était puni de mort[89]. Il n’était pas permis davantage aux étrangers de s’établir comme métèques sur le territoire de Sparte. Ils y pouvaient faire de longs séjours, mais à la condition d’être l’objet d’une surveillance active, et de se tenir prêts à partir sur l’ordre des éphores. En cela, les Spartiates n’allaient guère plus loin que beaucoup d’États modernes, où les règlements de police sont appliqués aux étrangers avec une rigueur ombrageuse ; mais les nations rivales trouvaient ces mesures excessives et les leur ont souvent reprochées[90]. On sait, cependant par plusieurs témoignages qu’en certains moments les étrangers abondaient à Sparte, par exemple durant les fêtes où l’on exécutait des manœuvres militaires[91]. L’expulsion qui fut prononcée une fois par suite de la rareté des vivres[92] prouve bien qu’un nombre considérable d’étrangers séjournaient à ce moment dans la ville et depuis un assez long temps ; autrement ce parti extrême n’eût pas eu de raison d’être. On sait d’ailleurs que des étrangers, célèbres par leur sagesse ou leurs talents, tels que Thalétas et Épiménide de Crète, Terpandre de Lesbos, Phérécyde de Syros, Théognis de Mégare et d’autres encore habitèrent à Sparte et y furent en honneur[93]. On n’y souffrait pas, il est vrai, les corrupteurs de l’antique discipline, comme les musiciens Phrynis et Timothée, ou les sophistes dont la critique subtile minait les institutions, et qui par la flexibilité de leur talent enseignaient l’art de donner au mensonge l’apparence de la vérité[94]. Le témoignage d’Hippias d’Élis, que ses compatriotes envoyèrent à plusieurs reprises en ambassade auprès des Spartiates, prouve d’autre part qu’il était facile de les intéresser en leur racontant d’antiques légendes sur l’origine et les hauts faits des héros, sur les fondations des villes et les événements fameux des temps passés[95]. Les vieux chants épiques ne leur étaient pas moins familiers ni moins chers qu’aux autres nations de la Grèce. On dit même que Lycurgue apporta le premier de l’Ionie les poèmes d’Homère[96], et un poète épique, du VIIIe siècle, Cinæthon, était non pas Spartiate, mais Lacédémonien. On sait aussi que Tyrtée, du bourg attique d’Aphidna, agit sur l’esprit des Spartiates par ses chants politiques et guerriers. Il ne manquait même pas de poètes lyriques indigènes[97], mais leur nom seul a survécu, et ce fait qu’il n’en a subsisté aucun fragment semble prouver qu’ils ne trouvèrent pas grâce devant le goût plus raffiné des autres nations. Le seul dont quelques débris aient survécu, Alcman, habitait, il est vrai, à Sparte, mais il n’était pas Spartiate. La poésie dramatique ne trouva pas asile en Laconie. Cela ne veut pas dire seulement que cette contrée ne produisit aucun poète tragique ou comique, stérilité qui, si l’on excepte Athènes, fut commune à presque toutes les nations de ta Grèce, mais qu’il n’existe aucune trace de représentation dramatique à Sparte[98]. On ne connaissait d’autres acteurs que les δικηλίκται, qui appartenaient probablement à la classe inférieure de la population. Ils étaient trop dépourvus de culture littéraire pour pouvoir faire autre chose qu’improviser des scènes burlesques, empruntées à la vie de tous les jours[99]. En revanche, la musique et la danse étaient, comme on l’a vu plus haut, pratiquées assidûment par les filles et par les garçons de Sparte. Souvent, dans les fêtes, des chœurs de l’un et l’autre sexe formaient des danses mimiques ou guerrières et offraient au regard, dans des scènes vivantes, les mouvements rapides et cadencés des corps les plus forts, les plus agiles et les plus beaux. Pour les arts qui prétendent surtout à réaliser la beauté, la peinture, la sculpture el, l’architecture, leurs œuvres étaient fort rares à Sparte ; presque tous les monuments mentionnés par Pausanias dans ses Laconica appartiennent à l’époque où l’art n’avait pas encore assez grandi en Grèce pour se dégager des éléments matériels, et se vouer à la recherche du beau. D’après ce qu’en dit Thucydide, il est facile de voir que les temples et les édifices publics n’étaient nullement en rapport avec la grandeur de la ville et la puissance de l’État[100]. La période durant laquelle s’épanouirent les beaux-arts fut celle où les Spartiates résistèrent le plus obstinément aux progrès de la vie intellectuelle, dont les autres nations leur donnaient l’exemple. Ils craignaient, en se laissant aller à cette pente, d’être entraînés hors des voies de la tradition qui leur semblait une condition de salut. Il n’est donc pas étonnant que leur défiance polir tout ce qui était étranger, fût poussée à un excès blessant, et leur valût en retour le mauvais vouloir et le dédain de toutes les nations grecques. On ne peut contester que Sparte, à partir de la guerre médique, s’écarta de plus en plus du cercle dans lequel se développait la civilisation hellénique, et resta sous toms les rapports au-dessous du niveau général. Deux choses seulement purent lui conserver quelque temps encore la prépondérance : l’organisation de ses forces militaires et l’habileté soutenue de sa politique extérieure. |
[1] Diodore, Excepta. Vatic., t. III, p. 2, éd. Dindorf.
[2] Plutarque, Agésilas, 1.
[3] Aristote, Polit., VIII, 3, § 3 ; VII, 2, § 5 et 13, § 10-15 et 20.
[4] Plutarque, Lycurgue, 16 ; cf. Hermann, Antiq. Lacon., p. 188 et 194.
[5] Plutarque, Lycurgue, 16. Une inscription funéraire, découverte à Athènes, nous fait connaître un autre bonne lacédémonienne, Malicha, de Cythère, qui avait élevé les enfants de l’Athénien Diogiton, dans le IVe siècle av. J.-C. Voy. Bulletino di Corresp. archeol., 1841, p. 56.
[6] Plutarque, Lycurgue, 17.
[7] Voy. Haase dans son Comment. sur le de Reh. Laced., de Xénophon, p. 403 et 219.
[8] Athénée, XIV, p. 631 A.
[9] Plutarque, Lycurgue, 16 et Instit. Lacon., 5 ; Photius, Lexicon gr. p. 107 ; cf. O. Muller, Dorier, p. 301.
[10] Xénophon, Resp. Laced., 2, § 6 ; Plutarque, Lycurgue, 77.
[11] Pausanias, III, 16, § 6 et 7 ; Cicéron, Tuscul. Quæst., II, 14 ; cf. Haase, ibid. p. 83, et surtout Trieber, Quæst. Lacon., Berolini, 1867, p. 25.
[12] Plutarque, Agésilas, 1.
[13] Panathen., § 209.
[14] C’est l’opinion de Plutarque (Lycurgue, 16) dont le témoignage mérite .évidemment plus de confiance que celui d’Isocrate, quoique dise Grote (Hist. de la Grèce, t. III, p. 318 de la trad. franç.). Cf. Mure, Hist. of the Lang. and litter., IV, p. 33.
[15] Chamæléon, dans Athénée (IV, 84, p. 184) confirme l’usage de la flûte, particulièrement mis en doute par quelques critiques. L’anecdote rapportée par Plutarque (Apophlh. Lacon., 36) ne prouve rien. La réponse du Spartiate doit être prise dans le sens où s’était exprimé autrefois Thémistocle (Plutarque, Themist., 2).
[16] Plutarque, Lycurgue, 21 et Instit. Lacon., 15.
[17] Γέλως et Φόβος ; voy. Plutarque, Lycurgue, 25, et Cléomène, 9.
[18] Plutarque, Lycurgue, 12 et 19.
[19] Xénophon, Resp. Laced., 6, § 1 et 2.
[20] Xénophon, ibid., 3, § 4.
[21] Voir. Schœmann, Comment. sur la Vie d’Agis et de Cléomène, p. 81.
[22] Elien, Var. Hist., III, 10. Cicéron, cité par Servius, ad Virgil. Æneid., X, v. 325.
[23] Elien, ibid. ; Plutarque, Lycurgue, 18.
[24] Elien, ibid., III, 12 ; Plutarque, Instit. Lacon., 7.
[25] Xénophon, Resp. Laced., I, § 4.
[26] Plutarque, Lycurgue, 14 ; Platon, de Legib., VIII, p. 805.
[27] Voy. O. Muller, Dorier, II, p. 314 et les notes d’Hermann dans le Chariklès de Becker (t. II, p. 178). Je n’ose accepter comme concluants les passages cités par Trieber, Quæst. Lacon., p. 64.
[28] De là l’expression σχιστός χιτών et l’épithète de φαινομήριδες appliquée aux jeunes filles spartiates ; voy. Pollux, VII, 54, et Plutarque, Comp. Lyc. cum Numa, 3.
[29] Athénée, XIII, 20, p. 566 ; Strabon, X, p. 449 ; Aristophane, Lysistrata, v. 78.
[30] Plutarque, Lycurgue, 18.
[31] Pausanias, III, 11, § 2.
[32] D’après Plutarque (Lycurgue, 17) ce nom s’appliquait d’une manière générale à tous les jeunes gens approchant de l’âge des éphèbes, c’est-à-dire de la vingtième année.
[33] Plutarque, Lycurgue, 17, d’après l’Etymol. Magn. (p. 303, 37) le nom d’εΐρην désignait proprement les hommes majeurs, autorisés à fréquenter les assemblées (εΐραι) ; mais les Spartiates l’appliquaient aux jeunes gens de vingt ans, bien que le droit d’assister aux assemblées ne commençât qu’à la trentième année révolue. Voy. Plutarque, Lycurgue, 25. Sur les différentes formes de ce mot, voy. Legerlotz, dans la Zeitschrift de Kuhn (VIII, p. 53), et dans le Philologus de Leutsch (X, p. 431).
[34] Photius, Lexicon gr., p. 140, 21 ; Pausanias, III, 14, § 6 ; cf. O. Muller, Dorier, II, p. 302.
[35] Plutarque, Lycurgue, 15, et Apophth. Lacon., 17, t. II, p. 280, éd. Didot ; Xénophon, Resp. Laced., I, § 5.
[36] On peut ajouter ce que dit Athénée, d’après Cléarque (XIII, 2, p. 556), qu’à certains jours de fête, les femmes faisaient faire le tour de l’autel aux célibataires en les frappant.
[37] Plutarque, Lycurgue, 15.
[38] Δίκη όψιγαμίου et δίκη κακογαμίου ; voy. Pollux. III, 48 et VIII, 40 ; Stobée, Florileg., tit. 67, 16.
[39] Plutarque, Lysandre, 30.
[40] Plutarque, Agis, II.
[41] Elien, Var. Hist., VI, 4. — Plutarque, Apophth. Lacon., 15, t. II, p. 280, éd. Didot ; Elien, Var. Hist., V1, 6 ; Justin, III, 3.
[42] Aristote, Polit., II, 6, § 11. Si les paroles d’Hermippus, rapportées par Athénée (VIII, 2, p. 555) méritent confiance, les dots étaient encore inconnues au temps de Lysandre.
[43] Hermippus, cité par Athénée (ibid.) parle encore d’une autre coutume suivant lui on enfermait pêle-mêle les jeunes gens des deux sexes dans une chambre obscure, et chaque garçon prenait pour femme la fille dont il s’était saisi. Il n’est pas impossible que cela soit arrivé quelquefois, mais on peut conclure du silence de Xénophon que du moins une pareille coutume ne fut jamais générale. On s’explique que Xénophon ne parle pas de l’enlèvement, puisque ce n’était qu’une formalité.
[44] Plutarque, Lycurgue, 15 ; Xénophon, Resp. Laced., I, 5.
[45] Hérodote, V, 39 ; Pausanias, III, 3, § 7.
[46] Hérodote, VI, 61.
[47] Xénophon, Resp. laced., I, 7, § 8 ; Plutarque, Lycurgue, 15.
[48] Nicolas Damascène, dans les Fragm. hist. de Muller, t. III, p. 458 ; cf. Hesychius, Photius et Suidas aux mots λακωνικός τρόπος, où ce singulier usage est, il est vrai, présenté avec exagération.
[49] O. Muller, Dorier, II, p. 285.
[50] Plutarque, Lycurgue, 15.
[51] Voy. Plutarque, Apophth. Mul. Lacæn., 22, t. II, p. 299, éd. Didot, où une femme spartiate fait une réponse dans ce sens.
[52] Plutarque, Lycurgue, 14, et Agis, 7.
[53] Hesychius, t. II, p. 579 ; Platon, de Legib., VII, 12, p. 805.
[54] Plutarque, Apohhlh. Mul. Lacæ., 26 et 27, t. II, p ; 300, éd. Didot.
[55] Thucydide, II, 45 ; Plutarque, Apophlh. Lacon., p. 266 et 270 éd. Didot.
[56] Plutarque, Ibid., p. 286.
[57] Aristote, Polit., II, 7, § 3 ; Plutarque, Lycurgue, 25.
[58] Cela résulte de ce que dit Plutarque (Lycurgue, 17 et 18) ; un autre passage (Ibid., 15) prouve que, sauf cette exception, tous les hommes jeunes devaient assister aux Phédities ; et. Xénophon, Resp. Laced., 3, § 5.
[59] Plutarque, Lycurgue, 12.
[60] C’est le sens que l’on doit donner au mot συσκηνεΐν dans Xénophon (Hellen., V, 3, § 20) ; voy. le Comment. de Haase p. 273. Cf. Plutarque, Agésilas, 20.
[61] Xénophon, Resp. Laced., 15, § 4.
[62] Cette somme est indiquée dans Athénée (IV, p. 141 B) d’après Dicéarque. Pour les produits en nature, ce passage ne s’accorde pas complètement avec les évaluations de Plutarque (Lycurgue, 12), mais la question est trop peu importante pour nous y arrêter.
[63] Aristote, Polit., II, 6, § 21.
[64] Plutarque, Lycurgue, 12.
[65] C’est ce que Xénophon exprime par les mots έν τοΐς χωρίοις (Hellen., III, 3, § 5).
[66] Voy. Xénophon, Resp. Laced., 4§ 6, et le Comment. de Haase, p. 112. Cf. Libanius, I, p. 230 R.
[67] Xénophon, Ibid., 6, § 6, 3et4 ; Cf. Haase, p. 131.
[68] Varron, cité par Servius (ad Virgilii. Æn. VII, v. 176) ; Athénée, d’après Plutarque (IV, 20, p. 141 ; cf. XII, 15, p. 518) ; Suidas, s. v. Λυκοΰργορ et Φιλίτια.
[69] Ainsi le mot φιδίτια désignerait l’action de s’asseoir. Cette interprétation, pour être nouvelle, n’est pas plus risquée que celles que l’on a essayées jusqu’ici. Les Lacédémoniens faisaient sentir le Ϝ dans plusieurs mots qui n’en portent aucune trace, et le changement d’ε en ι a lieu aussi dans ίζω, ίδρύω. Lorsque les Spartiates prononçaient Ϝιδιτια, les autres Grecs pouvaient très bien entendre φιδίτια et prononcer eux-mêmes φειδίτια. Le mot φειδώλιον, cité par Hesychius comme synonyme de δίφρος, et de σφέλας, siège, escabeau, n’est autre que Ϝιδώλιον, Ϝεδώλιον, έδώλιον.
[70] Plutarque, Lycurgue, 12.
[71] Plutarque, Præc. Sanit. tuendæ, 12.
[72] Xénophon, Resp. Laced. 51, § 1 ; Plutarque, Lycurgue, 12. D’un autre passage de Plutarque (ibid., c. 28) on peut conclure du moins que l’on montrait aux jeunes garçons des hilotes ivres, pour leur faire sentir par des exemples jusqu’où l’ivresse ravale l’humanité.
[73] Athénée, IV, 19, p. 141.
[74] Xénophon, Resp. Laced., 5, § 5 ; Athénée, IV, 9, p. 141.
[75] Athénée, IV, 16, p. 138.
[76] Athénée, IV, 15, p. 138, et XII, 15, p. 518 ; Stobée, tit. 29, c. 96.
[77] Plutarque, Agésilas, 36 ; Elien, Var. Hist., IX, 311 ; Aristote, Morale à Nicom., IV, 7. Pour ce qui concerne les détails du costume lacédémonien, il suffit de renvoyer aux textes recueillis par Meursius, dans ses Miscell. Lacon., I, 45-18.
[78] Plutarque (Alcibiade, 23) désigne par l’expression έν χρώ κουριάν (comam in cute alere) une des choses par lesquelles Alcibiade se rendit semblable aux Spartiates. Un passage de Xénophon (Resp. Laced., II, 3) prouve que le fait de laisser croître sa chevelure (κομάν), bien qu’habituel, n’était que toléré.
[79] Plutarque, Cléomène, 9 ; cf. O. Muller, Dorier, II, p. 269.
[80] Denys d’Halic., Antiq. Rom., XX, 2.
[81] Athénée, XV, 34, p. 686.
[82] Plutarque, Lycurgue, 13.
[83] Plutarque, Ibid., et Apophth. Lacon., t. I, p. 279, éd. Didot. La même anecdote est mise sur le compte d’Agésilas, Ibid., p. 256.
[84] Plutarque, Lycurgue, 9, et Lysandre, 17 ; Hesychius, s. v. πέλανορ.
[85] Justin, III, 2.
[86] Plutarque, Lysandre, 19.
[87] Isocrate, Busiris, 18 ; Harpocration, aux mots καί γάρ τό μηδένα.
[88] Thucydide, IV, 132.
[89] Plutarque, Agis, II.
[90] Thucydide, I, 144 et II, 39 ; Schol. d’Aristophane, Aves, v. 1013 et Pax, 622. Gœttling (gesamm. Abhandl., I, p. 323) remarque avec raison que le mot ξενηλασίαι n’est employé qu’au pluriel par les bons écrivains et en tire cette conséquence qu’il désigne des mesures successives et non une disposition générale, applicable à tous les cas.
[91] Plutarque, Agésilas, 29, et Cimon, 10 ; Xénophon, Memor., I, 2, § 61.
[92] Théopompe, cité par le Schol. d’Aristophane, Aves, v. 1013.
[93] Plutarque, Agis, 10 ; cf. O. Muller, Dorier, II, p. 8 et 396.
[94] Athénée, XII, p. 611 A.
[95] Platon, Hippias major, p. 285 D.
[96] Plutarque, Lycurgue, 4 ; Elien, Var. Hist., XIII, 14.
[97] Athénée, XIV, 33, p. 632 F, et XV, 22, p. 678 B ; Plutarque, Lycurgue, 28 ; Pausanias, III, 17, § 3.
[98] Plutarque, Instit. Lacon., 33, p. 295 éd. Didot.
[99] O. Muller, Dorier, II, p. 344.
[100] Thucydide, I, 10.