LE MARIAGE DE JEANNE D'ALBRET

 

CHAPITRE QUATRIÈME.

 

 

Nouvelles négociations du roi de Navarre et de Charles-Quint. — Mort du duc d'Orléans. — Mort de François de Bourbon-Vendôme, comte d'Enghien. — Rivalité de la duchesse d'Estampes et de Diane de Poitiers. — Mort de François Ier. — Avènement de Henri II. — Pourparlers du mariage de Jeanne d'Albret avec le duc de Vendôme. — Antoine de Bourbon et François de Lorraine. — Résistance du roi de Navarre. — Voyage du roi en Piémont. — Insurrection en Guyenne. — Entrée du roi à Lyon. — Le roi de Navarre rejoint la cour à Moulins. — Mariage de Jeanne d'Albret et d'Antoine de Bourbon.

 

Pendant la durée de la campagne de 1543 et de 1514, Henri d'Albret était resté en Béarn. Depuis le siège de Perpignan, il désespérait de reconquérir la Navarre par les armes puisque l'alliance du roi de France ne lui apportait aucun secours, et même par les moyens pacifiques puisque sa fille était unie au duc de Clèves. Il fortifiait ses places, surtout Navarrains, et se préparait à faire face à tous les dangers, qu'ils vinssent de la France ou de l'Espagne. Les rapports d'espions adressés au comte de Castro, vice-roi de la Navarre espagnole, nous permettent de suivre les progrès de ses armements. Au mois d'avril 1543, il reçoit de France douze chariots chargés d'arquebuses, il arme à Bayonne quatorze galères neuves pour une destination inconnue, il monte à Dax douze pièces d'artillerie ; en mai, il lève en Gascogne 24 compagnies de gens de pied, il envoie les galères de Bayonne à la Rochelle, il achète des vivres ; le bruit se répand qu'une armée de mercenaires allemands et suisses est réunie tai Saintonge ; le prince d'Albret, accompagné d'une partie de sa noblesse, se rend à Bordeaux ; les espions éperdus ne doutent pas qu'il ne se mette à la tête des troupes ; mais le prince remonte la Garonne et se rend pacifiquement aux eaux dans les Pyrénées[1]. L'année 1544 fut entièrement occupée par la guerre d'Italie et la campagne de Charles-Quint en Champagne, Henri d'Albret n'y prit aucune part. De nouveaux rapports d'espions nous apprennent que sa neutralité était réelle, qu'il restait même indifférent, sinon hostile, aux succès du roi de France, mais que la reine de Navarre soutenait avec la même énergie l'alliance de son frère et y plaçait toute sa confiance[2]. La grossesse à laquelle elle avait cru à la fin de 1541 n'avait été qu'une vaine espérance ; malade et triste, délaissée de son mari, elle vivait habituellement à la cour ou dans ses terres. Le prince se livrait à des galanteries assez mal choisies. Le comte de Castro avait réussi à acheter une dame Adria qui remplissait vers cette époque un rôle prépondérant à la cour de Pau ; leur correspondance, mêlée de déclarations amoureuses et de révélations militaires, semble prouver que la dame, à l'instar de la duchesse d'Estampes, jouait un jeu double aussi bien en amour qu'en politique. Ses lettres[3], signées peut-être d'un nom supposé, Adria, ne permettent pas de deviner son vrai nom, et les historiens contemporains ont passé sous silence ces mystères.

La rupture du mariage du duc de Clèves et de Jeanne d'Albret allait donner lieu à de nouvelles négociations.

A la nouvelle de l'union du duc et de la princesse de Navarre, en 1541, Charles-Quint avait éprouvé un vif dépit. Peu confiant dans les protestations et les réserves, il avait renoncé aux intrigues si péniblement ourdies par Descurra. D'ailleurs l'infant Philippe, né le 21 mai 1527, n'avait que quatorze ans, et pour un futur roi d'Espagne, destiné à régner sur les deux mondes, les grandes alliances ne pouvaient manquer. L'ambassadeur d'Espagne en Portugal, don Luis Sarmiento, fut chargé de demander une des filles de Jean III, cousine germaine du prince. Au mois de novembre 150, les deux infants furent fiancés ; le 12 novembre 1543 ils se marièrent à Salamanque.

Aussitôt que Jeanne d'Albret eut recouvré sa liberté, le roi de Navarre reprit ses négociations avec l'Espagne. Il offrit d'abord sa fille au second fils de Ferdinand, à la condition que l'empereur lui rendrait la Navarre ou un équivalent. Il envoya un premier message à l'empereur au mois de mai, puis un second au mois de juillet. Mais ce mariage n'offrait aucun avantage à la politique de Charles-Quint, et Saint-Mauris eut l'ordre d'éconduire le prince ; l'ambassadeur prétexta, comme précédemment, du désir de son mettre de n'engager aucune négociation à l'insu du roi de France[4]. Pendant ces pourparlers, le 8 juillet 1545, l'infante d'Espagne, Marie de Portugal, mourut en donnant le jour à un fils, l'infant don Carlos. Trois mois après, le 12 octobre, un bref du pape Paul III libérait Jeanne d'Albret de tout engagement vis-à-vis du duc de Clèves. L'infant d'Espagne et la princesse de Navarre se retrouvaient donc affranchis de tout lien.

Le roi de Navarre était à la cour. A la nouvelle de la mort de Marie de Portugal, il demanda une entrevue à Saint-Mauris et lui parla de nouveau du mariage de sa fille avec Philippe d'Espagne, aux conditions qui avaient été tant de fois débattues ; il désirait seulement que la proposition vint de l'empereur : Je luy dis pour mon avis, écrit Saint-Mauris, qu'il ne devoit aulcunement encheminer ceste praticque sans en advertir le roy de France pour non s'alterer, et que bien difficilement la pourroit-il conduire sans sa volunté, en quoy il ne scayt comme s'en démesler, s'en tenant à demi asseuré que, s'il en fait ouverture, qu'elle sera plainement deboutée[5]. Les négociations continuèrent ; d'autres mariages furent mis en avant ; le cardinal de Tournon et l'amiral d'Annebaut proposèrent la fille du roi, Marguerite, à Philibert de Savoie, et Antoine de Bourbon, duc de Vendôme, à la fille de Ferdinand ; d'autres proposèrent Marguerite au duc de Saxe et Jeanne d'Albret au prince de Piémont. La reine de Navarre, dont l'ambition maternelle était réveillée par la rupture du mariage de Châtellerault, s'associait aux démarches du prince d'Albret ; on remarqua à la cour qu'elle était fort assidue auprès de la reine, sœur de Charles-Quint ; on en concluait qu'elle négociait le mariage de sa fille. Elle essaya même d'enlever la jeune princesse à la suite d'un scandale qui fit beaucoup de bruit à la cour. La veuve de l'amiral de Brion était courtisée par Jacques de Peyrusse, seigneur d'Escars ; elle devint grosse et simula une maladie pour cacher sa grossesse. L'aventure fut divulguée et les deux amants s'excusèrent sur un mariage clandestin. Le roi, fort indulgent d'ordinaire, montra une vive irritation, peut-être parce qu'il avait précédemment distingué l'amirale. La reine Marguerite, qui était à la veille de retourner en Béarn, saisit ce prétexte ; elle déclara qu'elle voulait soustraire sa fille aux mauvais exemples de la cour, et l'emmener avec elle en Béarn ; mais François e s'y refusa. Un jour il eut une altercation très-vive avec Henri d'Albret ; il craignait toujours le mariage de l'héritière de la Navarre avec l'infant d'Espagne et ne cachait plus ses soupçons ; le prince répondit avec vivacité que s'il avait voulu déserter l'alliance du roi de France, il en aurait cent fois trouvé l'occasion. Malgré toutes les protestations, François Ier décida que Jeanne resterait à Plessis-lès-Tours pendant l'absence de sa mère. Marguerite était gravement malade ; le bruit courait qu'elle était hydropique. Cependant elle partit de la cour avec le roi de Navarre au commencement de février 1546, Marguerite plus découragée, le prince plus mécontent que jamais[6].

Le retour inattendu en Béarn du prince d'Albret, gouverneur de la Guyenne, mit en éveil les agents impériaux. Le marquis de Mondejar, vice-roi de la Navarre, écrivit à l'infant don Philippe, à Madrid, que le prince réunissait des troupes, des armes et des vivres. La vérité est qu'il passait l'inspection des compagnies réunies dans son gouvernement. Saint-Mauris se porta garant de sa bonne volonté vis-à-vis de l'empereur. Mais la prolongation de son séjour à Pau affolait de terreur les Espagnols. Au mois de juillet, Saint-Mauris fit interroger la dame d'Estampes par un agent secret, désigné comme secrétaire de Jeanne d'Albret ; il en obtint l'assurance que le prince ne s'occupait que des embellissements de sa capitale[7]. Cependant il se ménageait des intelligences dans les villes de son ancien royaume. A la fin de 1546, il vint à la cour et soumit au roi le plan d'un coup de main sur Pampelune. Le projet paraissait habilement combiné et Burie reçut l'ordre d'armer ; mais le secret fut éventé et les précautions des agents espagnols firent ajourner l'entreprise[8].

Le cercle des prétendants à la main de Jeanne d'Albret se rétrécissait chaque jour. Le duc de Clèves était définitivement évincé. Une maladie rapide enleva le fils préféré du roi, le duc d'Orléans, le prince que la reine Marguerite souhaitait particulièrement pour beau-fils depuis que le dauphin François était mort à Tournon. En 1545 le duc avait vingt-trois ans, Jeanne dix-sept ; les deux princes étaient cousins germains, élevés dans la même cour, rapprochés par la même politique ; leur mariage semblait naturellement indiqué. Il est vrai que le roi avait une autre ambition pour son fils ; il le destinait à une fille de l'empereur à la condition que l'empereur lui donnât le Milanais ; l'échec répété de cette combinaison n'en avait pas dégoûté François Ier. En juillet 1545 Saint-Mauris écrivait encore : Le roy de France et le duc d'Orleans font diligence pour parvenir à épouser notre princesse affin d'obtenir le duché de Milan[9]. Mais on prévoyait à la cour que le mariage de Jeanne et du duc d'Orléans serait décidé le jour où le roi, ouvrant enfin les yeux, s'apercevrait que l'empereur ne voulait pas se dessaisir du Milanais.

Le duc d'Orléans, blond, bien fait, élégant de manières, l'image de son père, était un jeune homme fougueux et sans mesure dans ses jeux. Ses folies, ses actes d'audace avaient attiré auprès de lui une troupe de jeunes seigneurs que n'arrêtait aucune considération de prudence. Brantôme raconte qu'il estoit prompt, bouillant et aimant à faire toujours quelque petit mal. . . . . . tout bouillant de guerre. . . . bravant, piaffant, orgueilleux, trop esveillé. Un jour, à Amboise, il voulut rosser des valets qui battaient le pauvre peuple sur le pont. Il les charge de cul et de teste. Le combat s'échauffa et le prince faillit recevoir un coup d'épée ; un gentilhomme gascon, Castelnau, se jeta au-devant de lui et fut tué[10].

Le duc d'Orléans tomba malade à Forestmontiers, abbaye près d'Abbeville, dans les derniers jours d'août 1515. Voici une lettre où l'ambassadeur d'Espagne rend compte à son maître, avec l'autorité d'un témoin oculaire, des derniers moments de ce jeune prince. Aucun récit ne saurait remplacer ce tableau grave et saisissant.

Sire, par dessus les lettres communes de Monsieur de Noirthon et je à vostre Majesté, je n'ay voulsu délaisser pour mon debvoir advertir vostredicte Majesté et l'informer particulièrement de la maladie de Monsieur d'Orléans et progrès d'icelle jusques à maintenant.

Peu auparavant, Sire, que le mal le print, ilz se esbatirent assez longuement, monsieur le Daulphin et luy, ahans, passans et retournans aux chambres d'aulcungs gentilliommes du Roy ; et, comme il se dict, le dict sieur d'Orléans, faisant telz esjouyssemens, s'eschauffa grandement et beut quasi en même instant deux grandz trectz d'eau pure, ce que l'on dict onques il n'avoit faict. Laquelle eaue beue, test après il sentit quelque froideur. Et depuis s'en ensuyvit la fiebvre, que luy fut si véhémente et rude, qui conçut opinion que il eust la peste ; en quoy il s'erres-toit d'austant plus par ce qui sentoit soubz le bras une tumeur, qui luy faisoit douleur extrême, de manière qui commences à

dire qu'il estoit mort, déclairant qu'il avoit la peste. Et le dit premièrement au bailly de Dijon, lequel luy respondit que ce n'estoit peste, car il n'avoit esté en aulcung lieu suspect, et moings converser avec gens infectez ; mais, quant bien ce seroit peste, si estoit-ce qui n'en mourroit, s'il plaisoit à Dieu ; bien entendu que peu de gens de sa qualité en mouroient, par ce que l'on les secouroit promptement. Et avec ces remontrances le consola le mieulx qui peust, non pas que par cela il le sceust divertir de sa fantaisie qu'il eut la peste ; en quoy la plupart des médecins inclinoient assez, allégans que tous pré, &liges de peste apparissoient au dict sieur d'Orléans, car il avoit souffert vomissements, tremblement de jambes, et si ne désiroit, sinon de dormir. Et pour remédier audict mal ainsi apparent, les dictz médecins donnarent pour conseil que l'on ne le laissa aulcunement dormir, jugeans que aultrement et indubitablement il en mourroit. Suyvant quoy sept ou huit gentilhommes, et de ceux dudict sieur d'Orléans, emprindrent de l'exécuter ; et de fait ilz le agassarent tellement et avec tant de façons qui ne scout oncques dormir, luy donnant quelque fois un baston entre les mains pour frapper ceulx qui le irritoient ; sur lesquelx il touchoit quelque fois, mais par cela il rompoit tant plus son sommeil. Et fut ainsi mené, luy estant couché en son lict, l'espace de huit heures continues. Et auparavant, Sire, il avoit esté saigné avec extraction de grande quantité de sang tout corrompu.

En ses entrefaites, Sire, l'on advertit le Roy et monsieur le Daulphin dudict inconvéniant, dont tous deux firent incrédiblement espouventez, car, les jours précédans, ledict sieur d'Orléans avoit hanté avec euilx continuellement. Et fut ledict sieur Roy ung jour entier, et pendant que l'on doubtoit si c'estoit peste ou non, il délaissoit de parler aux serviteurs dudict sieur d'Orléans ; desquelx ung seul ne l'habandonna onques, mais entroient franchement en sa chambre comme ilz souloient auparavant ; en quoy l'on a descouvert la sincérité de leur affection envers leur maistre. Mais après que la fiebvre fut ung petit remise, les médicins commencearent de donner espoir que ce n'estoit peste, ains seulement ung pleurésie, accompaigné d'une fiebvre pestilenciale, en façon que le Roy se remit ung petit ; que fut le second jour de ladicte maladie. Allant à la chasse, il manda dire audict sieur d'Orléans que, au retour d'icelle, il le visiteroit, comme il fit. Mais ledit sieur d'Orléans, pour le divertir, luy envoya le bailly de Dijon luy dire qu'il avoit prins médecine, et qui le supplioit très humblement de non soy donner tant de peine que de le venir veoir, laquelle chose ledit sieur Roy rebouta plainement, et le fit treuver menant avec luy monsieur le Daulphin ; auquel auparavant l'on avoit reffusé l'entrée de la chambre dudict sieur d'Orléans par huit fois, où il vouloit entrer pour le veoir, voulsissent ou non ceuix qui en avoient la charge, avec une incrédible démonstration de sentiment de ladicte maladie. Et de laquelle il fit incontinant advertir Madame la daulphine ; mais on l'a tau à Madame Marguerite jusques ad ce que joinctement l'on Iuy déclara la çonvalescence. Et estant ledit Roy celle part, il fit descouvrir par les médicins le mal dudict sieur d'Orléans et la source d'icelluy, que lesditz médicins dirent avoir esté causé par quelques excès précédant : selon quoy ledict sieur Roy admonesta Messieurs ses enfants de avoir meilleur regard à l'advenir, et de donner frein et loy à leur jeunesse, puisque par icelle il en pouvoit succéder si grande altération. Et auparavant et en temps que l'on disoit que c'estoit peste, ledict sieur Roy fut bien longuement plourant avec grandes exclamations, qui litisoit de la perte dudict sieur d'Orléans ; mais depuys qui se treuva mieulx, il dit que Dieu n'avoit pas voulsu sa mort pour nous remettre la Chrestienté en plus grande affliction et division que auparavant, car il espéroit certainement que ledict sieur d'Orléans donneroit fin à toutes guerres, querelles et prétentions.

Et maintenant, Sire, ledit sieur d'Orléans dit que, si peult estre sus pied, il se vengera bien de ceulx qui le vespérizarent si rudement, qu'est par forme de jeu qu'il le dit. Et pour ce que sa maladie et santé survindrent quasi en même temps, et que l'ung fut premier publié que l'autre, le Roy fit incontinant despescher lettres par tout pour advertir de sa meilleure disposition, affin que son peuple en demeure tant plus à repos.

Toutes fois, Sire, pour le présent, ledit sieur d'Orléans n'est encores du tout hors de sa fiebvre, laquelle nal'habandonne point, par où les médecins ont crainte de sa personne et que n'osent l'asseurer ; laquelle chose ilz ont fait entendre au Roy, allégans que ledict sieur d'Orléans soit !bible et de bien petite complexion, et qui soit de présent du tout débilité par médicines qu'il a prinses, de manière qu'ilz doibvent consulter entre eulx et en présence dudict sieur Roy le moyen pour le remettre sus.

Et en actendant que ladicte consulte se flat, la fiebvre cependant s'accreût, laquelle causa aultre inconvénient audict sieur d'Orléans, qu'est qu'elle e,mpeschoit de alainner, par où les ditz médicins le jugearent d'enflant plus malade, considérans que si n'expulsoit avec toux son appostème, que indubitablement il mourroit.

Et ainsi advint-il le 7e jour de son dict mal, que fut environ les trois heures après le midy. Et fut ladicte mort si souldainne que à peine luy sceut-on donner l'extrême unction, laquelle toutesfois il reçeut. Auquel acte fut présent Monseigneur le daulphin, qui longuement auparavant avoit esté auprès de luy, le sollicitant et donnant le meilleur couraige qui pouvoit, pour le bon espoir de sa santé. Et comme l'on le vit décliner à la mort, les médicins en firent advertlr le Roy, qui lors estoit à la chasse, lequel manda en poste avant luy monsieur l'admirai et peu après y survint, et, pensant parler audict sieur d'Orléans, il le trouva mort. De laquelle mort ledict sire Roy fut tellement troublé et scandalizé que de plain sault il se trouva fort affaibli, de manière que l'on courut au vinaigre, et le fit-on retourner à luy. Lors il joignit les mains contre le ciel, y addonnant aussi son regard, et dit avec bien grande exclamation : Mon Dieu, que t'ay-je fait, en quoy t'ay-je despleu de m'avoir osté celluy par lequel la chrestienté pouvoit demeurer en perpétuel repos et quiétude, celluy qui eust nourri la paix et tranquillité entre les princes : Maintenant vois-je que je suys du tout sur compte de mon expectation, et que tout à une fois tu as anéanti tout ce que en toute ma vie j'avoye procuré, et où j'avoyes tascher pour le seul respect du bien de l'universelle crestienté !

Et avec telz et semblables propoz il fut longuement soy complaignant, cryant haultement et gectant larmes en bien grande quantité. Le même dœuil faisoit toute la cour par espécial plouroient et se lamentoient jusques au boult les Italiens. Et combien que lors la nuict approucha, si est-ce que ledict sieur Roy sortit du lieu où il estoit et alla coucher à trois lieues de là, tirant contre Amyens ; et donna ordre que le corps dudict feu sire d'Orléans fut ensepvely pour estre mené à Sainct Denys à Paris. Et pense l'on que les obsèques se feront sitost que la peste sera cessée audict Paris, et que la court il pourra estre, laquelle, Sire, comme l'on dit, va de présent à Ville-Coulteray et contre Coussy[11].

 

Le roi était inconsolable ; la fougue de son fils lui rappelait les belles années de sa jeunesse, le temps où il n'était encore que duc d'Orléans et où il étonnait la cour du sage Louis XII par ses folies aventureuses. L'infortuné père se reprochait à lui-même ses débordements., qui justifiaient la colère céleste : ..... et disoit avec grande exclamacion que Dieu punissoit son peché par luy oster ses enfans, et qu'il estoit tant enfoncé audit peché et en une maleure vie, qui ne s'en pouvoit retirer, qui failoit bien qui fust esté nez soubz une planete malheureuse, selon laquelle il chemine tousjours comme il a de coustume[12].

Charles-Quint adressa une lettre de condoléance à son allié. François Ier y répondit de sa propre main. Sa lettre se termine par ces nobles paroles, éloquentes parce qu'elles sont inspirées par un sentiment vrai : ..... priant Dieu vous donner grace de n'avoir jamès besoin d'etre consolé en tel endroict ny de sentir quelle douleur cest de la perte d'un filz[13].

Six mois après, une autre catastrophe plongea la cour dans un nouveau deuil. Le 48 février 1546, le dauphin et quelques gentilshommes se trouvaient au château de la Roche-Guyon ; il faisait très-froid ; le prince et les seigneurs se battirent à coups de boules de neige ; detix partis s'organisèrent, l'un pour défendre, l'autre pour prendre le château ; le premier, commandé par le dauphin, l'autre par François de Bourbon-Vendôme, comte d'Enghien. Pendant le combat, François d'Enghien, harassé de fatigue, s'arrêta au pied d'un bastion. Dans ce même moment, un des défenseurs du château jetait d'une fenêtre un coffre plein de linge. Le prince fut frappé à la tête et tomba ; on le crut mort. Cependant les chirurgiens assuraient que sa blessure n'était pas mortelle ; il n'avait pas de lésion grave apparente ; mais bientôt la fièvre le prit ; il expira le 23 février. La douleur du roi fut aussi grande que s'il avait perdu son troisième fils ; suivant l'ambassadeur d'Espagne, il disait : J'ay donc bien offensé Dieu pour qu'il m'ait enlevé deux de mes fils et après eux quelcun que j'aimois comme mon enfant[14]. La présence du dauphin dans ces jeux imprudents donnait lieu à d'infâmes calomnies. Le comte d'Enghien, à peine âgé de 27 ans, était le héros des guerres d'Italie ; il avait remporté la victoire de Cerisoles ; on accusait le dauphin d'être jaloux de sa gloire ; le coffre avait été jeté par Cornelio Bentivoglio, aventurier italien, favori du fils de François Ier. La méchanceté des courtisans attribua l'accident à un crime et le crime au prince. L'histoire a fait justice de ces accusations. Mais si la mémoire de Henri II avait besoin d'être défendue, Saint-Mauris, narrateur impartial et toujours bien informé, fournirait son témoignage. Dans trois lettres consécutives il insiste sur le hasard involontaire qui a causé l'accident[15].

Le roi avait d'autres motifs de tristesse. La cour était divisée en deux camps, celui de la duchesse d'Estampes, dont la faveur ne faisait que croître à mesure que le roi avançait en âge, et celui de Diane de Poitiers, la maîtresse du dauphin. Pas de courtisan qui n'appartint à l'un ou à l'autre parti, celui du présent ou celui de l'avenir. Les favoris de la duchesse, le cardinal de Tournon et l'amiral Annebaut, dirigeaient les affaires à l'exclusion des amis de Diane, et le dauphin, de parti pris, blâmait leur politique. En 1515, après la mort du duc d'Orléans, le roi voulut donner à son fils la présidence du conseil privé ; c'était le meilleur moyen de l'initier aux affaires du royaume. Voici dans quels termes l'ambassadeur d'Espagne raconte cet incident de cour : Ledict roy de France avoit naguieres consenti que lediot daulfin fust appelé au conseil privé pour y cotre le chief et affin qu'il entendist les affaires de ce roy, laquelle chose toutesfois ledit daulfin a refusé, estant très content que ceulx qui administrent en ceste saison ayent le bon et le mauvais, considerant en cecy que, comme tout vad mal aujourd'huy, que l'on gecteroit après cy toute la faulte sur luy[16]. Pendant les dernières années de François Ier, le dauphin n'avait qu'une ambition, après celle de plaire à la belle Diane, l'ambition de ramener le connétable à la cour. Par moment le roi se laissait ébranler et se montrait favorable à son ancien compagnon d'armes ; il prenait plaisir à entendre louer son expérience et ses services ; la dame d'Estampes, elle-même, dit un jour qu'elle le reverrait avec plaisir ; elle appuya le cardinal de Lorraine qui s'était chargé, à la prière du dauphin, de demander son rappel au roi. Le bruit se répandit que le roi allait céder aux instances de son fils. Mais le cardinal de Tournon et l'amiral surent empêcher le retour d'un rival si redouté et le roi ne voulut plus en entendre parler[17]. Le dauphin mécontent s'éloigna de plus en plus du roi ; il quitta même la cour pendant quelque temps ; il voulait rester étranger à la direction des affaires. La reine Marguerite seule aurait eu assez de dextérité pour apaiser la rivalité du père et du fils, mais elle était en Béarn. Le roi prit l'habitude de ne plus convoquer le dauphin au conseil[18]. Le jeune prince se consolait de son isolement avec ses favoris, les Guise et Diane de Poitiers, en supputant le temps qui lui restait avant d'arriver au pouvoir.

La santé du roi déclinait tous les jours. Sa vie licencieuse et les excès auxquels il se livrait sans relâche avaient miné son tempérament robuste. Déjà en 1535 il avait eu de forts accès de fièvre et les médecins avaient prédit que son mal serait long à guérir[19]. Trois ans après il eut la fièvre quarte[20]. En 1546 il était atteint d'une fistule au périnée et ne pouvait monter à cheval. Vandenesse constate que pendant le voyage de Charles-Quint en France, le roi suivait son hôte en litière[21]. La maladie empira peu à peu. Voici dans quels termes Saint-Mauris signale à son maitre l'état du roi de France au mois de juillet 1545 : Le roi de France a une veine rompue et pourrie dessous les parties basses, par où les médecins désespèrent de sa longue vie...., disant être celle de laquelle dépend la vie de l'homme et que, si elle se rompt, qu'elle le suffoquera[22]. Le mal s'aggrava à la fin de l'année, et, au commencement de 1546, Saint-Mauris adressait à son maitre des informations complètes.

En premier lieu, l'on donne aduertissement qu'il y a jà assez longuement que le Roy trip chrestien s'est treuvé malade ; et fut ce commencement de son indisposition par une flebure lante qui le print, laquelle l'a tenu par plusieurs fois, et sans qu'elle heust jour ny heure certaine, sinon qu'elle fut une fois continué cinq jours. Oultre laquelle fiebvre, se descouvroit après ung apostume soubz les parties infirieures, par lequel ledict Roy a esté grandement molesté et tellement affoibli qui ne se pouvoit soubstenir sur ses piedz ; par où il fut contraint de tenir le let ou demeurer en chayère. Pour la guérison duquel apostume l'on manda incontinant les plus expers médicins et cirurgiens de Paris, lesquels, après avoir purgé ledict seigneur Roy, luy appliquarent certain cautère sur ledict, apostume, affin de le mire tant plus tost meurir et percer ; ayans réitéré ledict cautère jusqu'à ce que ledit apostume se rompit. Mais, où l'on espéroit que ce seroit en ung lieu seullement, ce a esté en trois, et en places bien dangereuses, tellement que l'on ne sçait jusques au présent quelle seurté y peut avoir sa personne. Et mesme qui luy advint naguères ung évanouissement et foiblese, combien qui soit toujours esté et soit encores en son bon sens et entendement. Et procède ceste maladie de celle qui luy fut quasi semblable lorsque l'Empereur passa d'Espaigne par France. Et depuis, selon le succès de ladicte maladie, pour ce que l'évacuation ne se faisoit comme il appartenoit, l'on a appliqué trois nouveaulx cautères audict sire Roy, par le moyen desquels luy sont esté faiz trois pertuys, par lesquels est deffluée rumeur pourrye en grande habondance. Et finablement, pour mieulx résouldre ladicte maladie, ledict sire Roy a commencer de faire la diette, laquelle il doit continuer par vingt jours, qu'a esté par le conseil de ses médicins, lesquels demeurent tous d'opinion que ceste maladie procède du mal françois, à l'expulsion duquel ladicte diette pourra grandement servir. Si est-ce que l'on se craint qu'il n'y ait ulcère en la vésique, réceptacle de l'urine[23].

Un mois s'écoula ; le roi était plus souffrant. L'apostume avait cinq pertuis. Le roi, se sentant affaiblir graduellement, exigea la cautérisation de quatre pertuis. Dans cet état, les médecins estimaient qu'un homme sain pouvait vivre encore, mais ils n'osaient se prononcer sur le compte d'un homme fort pourri dedans le cors[24].

L'automne apporta une petite amélioration dans l'état du malheureux roi, mais au mois de janvier 1547 il retomba en son mal accoustumé de l'apostume, et certains accidents prirent des proportions inquiétantes. Saint-Mauris notait sans regret la décadence du rival de Charles-Quint : Si le jeu dure, écrit-il, il y pourroit bien laisser le jeu[25]. » Les médecins rouvrirent sa plaie de laquelle il sortit une grande infection dont il eut grand soulagement. Cependant il n'avait pas encore perdu ses forces au point d'interrompre ses habitudes. Il prent tous les jours son desduit à la chasse, écrit Saint-Mauris, allant en litiere..... Et dans une autre lettre : Le roy est toujours amoureux[26].

Henri VIII mourut le 28 janvier 1547. Sa mort frappa d'autant plus le roi de France que, dans ses derniers jours, le monarque anglais lui avait rappelé qu'ils estoient tous deux mortels[27]. A la fin de février François Ier se trouva de passage à Rambouillet. L'apostume s'enflamma et la fièvre le reprit. Le 20 mars il commença à être en danger. Prévoyant sa fin ; il se confessa et communia ; il adressa des recommandations au dauphin sur le maintien de la religion catholique et le gouvernement de son peuple. Le 24 mars, les médecins désespéraient de la vie du roi[28]. La tumeur fut percée, et le malade éprouva un certain soulagement. La princesse Marguerite, sa fille, vint le voir, mais il s'attendrit et ne put lui adresser la parole. Son état empira d'heure en heure pendant la semaine. Le 29 mars, il reçut l'extrême-onction. Dans la journée il demanda son fils et voulut lui remettre son testament, mais on ne retrouva pas cet acte. Il en fit dresser un autre à la hâte et y fit inscrire des legs au nom de quelques-uns de ses serviteurs. Il tint au dauphin de bien longs et affectionnés propos en faveur de la reine, avouant qu'il l'avait mal traitée, et de la princesse Marguerite, qui n'était pas encore mariée[29]. Un peu avant minuit il ressentit un grand tremblement. Il prit une croix et ne la quitta plus. Le mercredi, il recouvra un peu de force, fit entrer une partie de ses serviteurs dans sa chambre et demanda pardon à Dieu à haute voix des scandales qu'il avait causés. La journée et la nuit se passèrent dans une alternative de calme et de délire. Le lendemain, il entendit une messe dite au pied de son lit. Le dauphin, profondément ému, était à genoux auprès de son père ; le roi ouvrit les yeux : Embrassez-moi, mon fils, dit-il, et il le bénit. Il reprit la croix et dit : In manus tuas, Domine, commendo spiritum meum. Puis il prononça plusieurs fois d'une voix faible : Jésus ! Jésus ! Ce furent ses dernières paroles ; il rendit le dernier soupir entre une heure et deux[30] (31 mars 1547).

Le lendemain, après que la mort eut été constatée par les médecins, le corps du roi fut ouvert : On trouva un apostume en son estomac, les rognons gâtés et les entrailles pourries, le gosier en chancre et le poumon entamé[31]. En attendant les funérailles, le corps, enfermé dans un double cercueil de bois et de plomb, dont nous pouvons donner le prix (il coûta 50 sols tournois[32]), fut mené par les cardinaux de Tournon et de Meudon, les évêques de Nevers, d'Évreux et de Mâcon, à Haultebruyère, prieuré de filles dépendant de l'abbaye de Fontevrault. L'amiral Annebaut, le grand écuyer Boisy et Montgommery conduisaient le cortège. La chapelle était garnie d'insignes de deuil. Cent religieux ou prêtres séculiers disaient chaque jour une messe au chevet du feu roi, les premiers au prix de cinq sols tournois, les seconds au prix de quatre. Le mercredi, 6 avril, son cœur et ses entrailles furent enterrés au pied de l'autel de la chapelle[33].

Les documents contemporains nous permettraient de raconter, jusques aux moindres détails, les funérailles de François Ier. Nous choisissons quelques parties du récit, dont les traits caractéristiques font revivre une grande époque, si éloignée de nous. Le lundi de Pâques, 11 avril, le corps fut apporté à Saint-Cloud, maison de campagne de l'évêque de Paris. Quarante-huit moines des quatre ordres, Cordeliers, Jacobins, Augustins et Carmes, le gardaient tour à tour et chantaient les prières des morts. Le dimanche, 21 avril, on plaça sur un trône, au-dessus du corps, l'effigie, statue de bois et de plâtre, représentant fidèlement les traits du roi et moulée sur son visage. L'effigie portait une chemise de Hollande, brodée au col et aux manches de soie noire, une camisole de satin rouge, doublée de taffetas de même couleur et bordée d'un passement d'argent.... par dessus, une tunique de satin blanc cramoisy, semé de fleurs de lys d'or, de riche broderie.... un manteau royal de velours violet cramoisy, semé de fleurs de lys d'or ; un bonnet de velours cramoisy brun, et la couronne royale et imperiale ; aux jambes des houssettes ou brodequins de toile d'or, la semelle de satin cramoisy. A droite était le sceptre royal, à gauche la main de justice.

L'effigie demeura onze jours exposée. Pendant ce temps, suivant un usage de la monarchie qui n'admettait pas la mort du roi avant le couronnement de son successeur, les repas habituels étaient servis devant le trône ; les tables dressées par les officiers de fourrière ; les mets apportés par les gentilshommes servants, panetiers, échansons, écuyers tranchants, du gobelet, maîtres d'hôtel, écuyers de cuisine, pages de la chambre ; la table bénite par un des cardinaux ; les bassins d'eau à laver offerts à la chaire dudict seigneur roy comme s'il eut esté vif et assis dedans ; les trois services successivement présentés et chaque plat essayé par le grand maistre.

Le mercredi, 4 mai, la chapelle fut ornée de drap noir, de cierges et de lampes d'argent. Le 18, veille de l'Ascension, le dauphin, conduit par le connétable, vint de Saint-Germain et donna l'eau bénite au corps de son père. Il portait un manteau de pourpre de cinq aunes de long, dont la queue était tenue par les princes d'Enghien, de Vendôme, de Montpensier, duc de Longueville et sire de Rohan. Le 21 mai, le corps fut porté en grande pompe à l'église Notre-Dame-des-Champs. Le nouveau roi y avait déjà réuni les cercueils de ses deux frères, le premier dauphin, mort le 10 août 1536, au château de Tournon, et le duc d'Orléans. Le lendemain était le jour des funérailles. Le cortège se présenta dans l'ordre suivant : la marche était ouverte par le capitaine, les archers et les arbalétriers de la ville de Paris. Ils étaient suivis du clergé régulier, des Minimes, des Cordeliers, des Jacobins, des Augustins, des Carmes, des ecclésiastiques des paroisses, de cinq cents pauvres vêtus de neuf aux armes du roi et portant des torches, des vingt-quatre crieurs de la ville, la cloche à la main, criant à tous les carrefours : Priez Dieu pour l'âme de très hault, très puissant, et très magnanime François, par la grâce de Dieu roy de France très chrétien, premier de ce nom, prince clément, père des arts et sciences. Puis venaient le guet, les officiers municipaux, le prévôt et ses sergents, les collèges, le chapitre et tous les corps établis de la bonne ville de Paris, dont la seule énumération occupe plusieurs pages de l'annaliste ; la maison du roi, les cent Suisses, les deux cents gentilshommes de l'hôtel, les officiers de service, les gentilshommes servants, les pages et les écuyers, portant les pièces de l'armure du feu roi, les évêques et les archevêques. Les effigies et les cercueils du duc d'Orléans et du dauphin, portés par les gentilshommes de leur maison, précédaient ceux du roi. Derrière le catafalque royal marchait le cheval de bataille couvert et houssé de veloux violet azuré, le grand écuyer de Boisy, le cardinal du Bellay, évêque de Paris, le Parlement en robe rouge, chaque président tenant un coin du drap mortuaire, les princes du sang en grand deuil, les cardinaux à cheval, les vingt-quatre archers de la garde du corps, les ambassadeurs du pape, de l'empereur, d'Angleterre, d'Écosse, de Venise, de Ferrare et de Mantoue, chacun conduit par un prélat à cheval. Les princes et chevaliers de l'ordre, les huissiers et les gentilshommes de la chambre et les quatre cents archers de la garde fermaient la marche. Ces cardinaux, princes, seigneurs, qui éblouissaient les yeux par la magnificence de leur deuil, étaient vêtus ainsi que les pauvres, aux frais du roi. Les cardinaux et l'amiral Annebaut avaient reçu chacun huit aunes et demie de drap écarlate au prix de 42 livres l'aune ; les princes du sang, les évêques, le connétable, en tout vingt-quatre seigneurs, neuf aunes de fin drap noir à 40 livres ; les ambassadeurs et les gentilshommes de l'hôtel, onze aunes à 7 livres ; les conseillers des comptes n'avaient que du drap à 4 livres. La maison du roi tout entière, au nombre de douze cents personnes, était habillée à différents prix, et chaque homme portait un bonnet de 45 sols. Le total des dépenses d'habillement se montait à 66.027 livres 6 sols 8 deniers, sans compter les douze cents bonnets de deuil.

Le cercueil du roi et ceux des deux princes furent conduits à la cathédrale, illuminée de torches funéraires et tapissée de tentures de deuil. Le lendemain, après la messe dite par le cardinal du Bellay, Pierre du Chastel, évêque de Mâcon, prononça la première partie de l'oraison funèbre. Vers midi, le cortège, commandé par l'amiral Annebaut, en l'absence du connétable de Montmorency, malade, se remit en route dans le même ordre que la veille, par le pont Notre-Dame et la rue Saint-Denis, au milieu d'une foule immense. Au village de Saint-Ladre chascun peult monter à cheval pour le soulagement de sa personne. Le cardinal de Bourbon, abbé de Saint-Denis, attendait le cortège à la Croix-qui-penche[34]. L'église était en tout tel accoustrement et appareil, tant en chapelle ardant, luminaire, tenture que tout autre aornement, comme celle de Nostre Dame de Paris, sans en rien défaillir ne excepter. Le mardi 23 mai, après la grand'messe chantée par le cardinal de Bourbon, l'évêque de Mâcon acheva l'oraison funèbre commencée la veille. Les corps du duc d'Orléans et du dauphin, enfermés dans un cercueil de veloux noir croisé de satin blanc et garni de quatre écussons de broderie de l'armoirie desdits seigneurs, furent descendus les premiers dans le caveau. Puis les gentilshommes de la chambre y déposèrent le cercueil du roi ; les rois d'armes, leurs cottes d'armes ; les capitaines des compagnies de la garde, leurs enseignes ; les écuyers, les diverses pièces de l'armure, le pennon et l'épée du roi ; le grand maitre, son bâton ; l'amiral Annebaut, la bannière de France ; Horace de Farnèze, la main de justice ; le duc de Lorraine, le sceptre royal ; le chevalier de Lorraine, la couronne. Au milieu d'un profond silence l'amiral dit : Le roy est mort ! parole qui fut répétée trois fois par les hérauts d'armes. Au bout d'un moment, Annebaut releva la bannière de France en criant : Vive le roy Henry deuxieme de ce nom ! Et tous les assistants répétèrent ce cri avec les hérauts d'armes.

Après cette cérémonie, qui consacrait une fois de plus les traditions de la monarchie, tous les assistants se rassemblèrent dans les salles de l'abbaye pour le festin funéraire. L'usage de ces agapes funèbres remontait à l'antiquité. Le repas, servi aux frais du trésor royal, était considéré comme le dernier acte de générosité du défunt. Celui du 23 mai 1547 fut servi avec cette magnificence qui est le caractère des fêtes de François Ier. Il coûta 2.627 livres 8 sols 4 deniers. A la fin du repas une rixe, qui faillit ensanglanter les salles de l'abbaye, s'éleva entre les rois d'armes d'une part, et les gens de Notre-Dame et de Saint-Denis de l'autre ; ils se disputaient la propriété des manteaux de deuil des princes et des tentures qui avaient servi à l'ornement des chapelles ardentes. Annebaut trancha la question en faveur des rois d'armes.

Telles furent les funérailles de François Ier ; celles de Henri II, douze ans après, furent célébrées avec la même étiquette. La dépense totale des obsèques du roi et de ses deux fils s'éleva à la somme de 168.690 livres tournois[35]

Suivant la coutume de la cour de France le nouveau roi, Henri II, n'avait pas paru aux funérailles de son père[36]. Le 1er avril il avait conduit le corps au prieuré de Haulte-Bruyère et s'était retiré à Saint-Germain, laissant à l'amiral Annebaut le soin de présider les cérémonies funèbres. Le connétable de Montmorency, disgracié depuis six ans, arriva à la cour le même jour, lendemain de la mort de François e, et fut reçu avec de grands transports de joie par le nouveau roi, son compère. Après une conférence secrète de plus de deux heures, Montmorency sortit du cabinet du roi et annonça aux courtisans qu'il allait reprendre le gouvernement ; il fit appeler les cardinaux Charles de Lorraine et Odet de Chastillon ; au premier il confia les finances, afin de ne pas s'exposer au reproche de tout accaparer ; il s'adjoignit le second dans la direction générale des affaires. Le soir il prit d'autorité le logis occupé par la dame d'Estampes et s'y installa avec ses gentilshommes[37]. Le lendemain, 2 avril, une ordonnance royale réorganisa le Conseil privé[38] ; mais, parmi les membres nommés, seuls, les cardinaux Jean de Lorraine, Hippolyte d'Este, cardinal de Ferrare, Jean du Bellay, l'évêque de Hesdin, Jacques d'Albon, seigneur de Saint-André, et Charles de Lorraine, archevêque de Reims, secrétaire, chargé de recueillir les voix, se réunissaient journellement sous la présidence du connétable[39]. Les autres conseillers, le roi de Navarre et les princes, ne prenaient part qu'aux délibérations d'apparat.

La reine Léonor se trouvait au monastère de Poissy au moment de la mort du roi. Elle tenait si peu de place à la cour que personne n'avait songé à l'avertir de l'aggravation de l'état de son époux. Henri II et la princesse Marguerite allèrent la visiter à Poissy[40]. Le roi la pressa de demeurer en France et lui promit de grands égards. Marguerite s'émut en parlant de son père ; elle se trouva mal, et, malgré les soins de ses dames, elle se trouva mal une seconde fois en prenant congé de la reine. Léonor se revêtit de deuil et s'enferma pour six semaines dans le couvent. Elle renvoya de sa maison la dame de Canaples, ancienne maîtresse de François Ier, et s'attacha la dame de Missi, qu'il avait voulu chasser de la cour, et l'amirale Annebaut, dont le mari, maintenant disgracié, avait été l'ami du feu roi. La dame de Canaples, qui n'avait été qu'une favorite de passage, expia durement sa faute ; son mari refusa de la recevoir et l'obligea à entrer dans un couvent[41]. Le séjour de la reine Léonor en France ne se prolongea guère au-delà de son année de deuil. Au mois d'octobre 1548 elle rejoignit l'empereur en Flandre, emportant ses coffres et hardes, et quittant probablement sans regret une cour où elle n'avait trouvé, malgré ses vertus, que de l'indifférence[42].

Le sort de la dame d'Estampes ne fut pas moins rigoureux que celui de la dame de Canaples. Un peu avant la mort de François e, elle s'était retirée à Limours. Deux jours après, elle réclama son logis de Saint-Germain pour l'occuper en attendant son audience de congé du nouveau roi. Le connétable en avait déjà pris possession. Henri II fit répondre à l'audacieuse duchesse qu'il s'en rapportait à la décision de la reine Léonor[43]. Les courtisans, dégagés de toute hypocrisie, ne dissimulaient plus la haine qu'inspirait l'ancienne favorite. Le déchaînement devint général. Le chancelier Olivier[44] dressa une instruction contre la vie et vexations de la dame d'Estampes. On l'accusait d'avoir emporté des trésors et de les avoir cachés en Normandie. On saisit tous ses biens, meubles et immeubles. Le cardinal de Lenoncourt, mandé à la cour, fut sommé de jurer qu'il n'avait rien reçu en dépôt d'elle. Ses créatures furent destituées sans fainctise et de plein sault. Son agent de confiance, le Bossut de Longueval, qui passait pour son amant, fut arrêté dans des circonstances piquantes : Fut prins sur la minuit à Paris, en la maison d'un sien procureur, estant couché avec une italienne, qui souloit estre à la femme du dauphin, mariée puis deux mois. Et Dieu sçait si l'on a ri de la honte qu'il reçut méritoirement. Il avait été devancé à la Bastille par le sieur de Rainet, contrôleur de la maison de la duchesse[45]. Gilbert Bayait, général des finances, autre agent de la favorite, n'échappa que par la fuite au sort de Longueval. Le cardinal de Tournon fut renvoyé. L'amiral Annebaut fut aussi poursuivi malgré sa qualité d'exécuteur testamentaire du feu roi. Il était accusé d'avoir soustrait une partie de la somme consacrée à la dernière guerre maritime contre l'Angleterre. Le roi lui enleva sa compagnie d'hommes d'armes et garda, en nantissement des amendes auxquelles il pourrait être condamné, les 100.000 livres que François Ier lui avait léguées[46].

Henri II prit des mesures pour moraliser les filles de la reine. Il a chassé, écrit l'ambassadeur d'Espagne, la petite bande des dames, en ayant retenu le moins qu'il a peu pour estre avec la royne et Madame Marguerite. Et, pomme que du passé, les damoiselles sembloient vivre par trop licencieusement et avec une effrénée liberté, lon a défendu en général que personne des gentilshommes ne devise avec elles, sinon en présence de la dame qui en a la charge, laquelle est tenue d'en respondre. Et se dit que Madame Marguerite a fait une sévère admonition aux siennes et de les déchasser, vivans aultrement qui ne convient[47]. La dame de Vertus reçut son congé ; le roi voulait aussi renvoyer Jacqueline de Longwic, duchesse de Montpensier, qui avait déplu à Diane de Poitiers ; mais la princesse Marguerite déclara qu'elle ne la quitterait jamais[48]. Plus tard la duchesse devint la confidente de Catherine de Médicis.

Blaise de Monluc écrit dans ses Commentaires : Les dames avoinct perdu leur crédit, d'autres y entrèrent[49]. A Anne de Pisseleu succéda Diane de Poitiers. La nouvelle favorite ne fut pas moins avide que la première, et elle devint promptement encore plus puissante. Saint-Mauris présente le roi comme l'esclave de la grande séneschale[50]. L'ancienne rivalité d'Anne et de Diane fut la première cause du duel de Guy Chabot de Jarnac et de François de Vivonne de La Chasteigneraye. Tous les historiens ont raconté ce combat, présidé par le roi et terminé par la défaite de La Chasteigneraye, champion secret de Diane, contrairement aux vœux de la nouvelle cour[51] (10 juillet 1547).

Malgré le crédit que la belle Diane exerçait sur le roi, il se montrait disposé à tout faire pour le bien et le bonheur de son peuple. L'histoire ; qui a porté de sévères jugements sur ce prince, doit enregistrer les témoignages que ses ennemis eux-mêmes donnent de ses nobles intentions. Voici le tableau d'une des journées de Henri II dans les premières semaines de son règne, d'après l'ambassadeur d'Espagne :

Le dauphin[52] est levé quest coutumièrement entre huiet et neuf heures du matin. Le conseil se rassemble autour de luy et il est environ deux heures, traitans les principaulx affaires ; de là il sort pour la messe. Et après son disner donne audience à tous ceux qui désirent parler à luy, escoutant ung chacun affablement ; de laquelle audiance le peuple se eajouyt par l'espoir qu'il conçoit que, par ce, fera donner train aux malveillans et qui souloient oppresser le peuple. Ladicte audiance finie, il se retire en sa chambre . . . . et reçoit encore privément, si l'occasion se donne, et que ce soit personnage de respect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Sur une heure après midi, il se trouve envers la reine et Madame Marguerite, devisant avec elles par quelque temps. Et joinctement, après avoir parlé à elles, il s'adresse à la séneschale de Normandie, et puis jouhe à la paume, quest son exercice ordinaire, ou va ! à l'assemblée, n'ayant rien cassé de ce qui attouche à la chasse. Sur le soir, après son soupper, il devise avec les principaux de sa noblesse et autres capitaines selon que l'occasion se présente, tenant souvent propoz qui désire que ceux de sadite noblesse vivent comme il convient, et que, suyvent ce chemin, il les assistera et advancera selon leurs qualités ; par le contraire il les déboutera jusques au boult. Et dict et répète souvent qu'il veut sa gendarmerie estre bien payée, mais que il entend elle ne oppresse, comme qui soit, le peuple, comme elle a fait par le passé, et que le premier qui le mescontentera connoistra avec effet le chastoyment exemplaire qui désire estre fait des contrevenants à son vouloir. En cela ses œuvres et versations tendent au reste à toute vertu et grande perfection. Il a remis deux décimes et dit qui n'en relevera cy après sinon avec très urgente cause et du consentement de son clergé. Lon a soulagé le peuple du tiers des tailles et accrues d'icelles. Lon a aussi publié eh ceste court que, sur peine arbitraire et d'estre griefvement pugnis, lon ne jure ny blaspheme le nom de Dieu, chose questoit par trop ordinaire cy devant Estans tous actes par lesquels lon peult concevoir bien certaine opinion et meilleur espoir quil sera prince qui ne vouldre, fouler son peuple. Et au reste lon dit quil recommande jusques au bout à ses principaux ministres l'administration de la justice[53].

Cette lettre révèle une partie des abus de l'administration de François Ier. Le roi était inabordable. L'ambassadeur le dit en propres termes : lon ne pouvoit approucher du feu roy. Les gens d'armes, mal payés, abandonnés pendant la paix dans les garnisons par leurs capitaines, qui vivaient à la cour, pillaient le bonhomme et vivaient de rapines. Le clergé et la noblesse ne jouissaient que de privilèges illusoires. Les tailles, les aides, les gabelles s'accroissaient chaque jour au mépris des garanties stipulées par les États généraux. Malheureusement la bonne volonté du nouveau roi fut bientôt paralysée par les efforts des courtisans. Quand les ministres s'enrichissent des injustices qu'ils commettent, tous leurs efforts tendent à les cacher.

Ledict roy avoit introduict de luy mesme de donner audiance après le diner, mais maintenant il ne le faict plus, et se dict que ses ministres ont rompu cela dextrement et à droit proupos, afin quil nentende les parolles de ses subjects et sache le fond ou du mal ou du bien ; tellement que, comme il a diné, le connétable ou aultre de ses favoris s'approuche de luy, rompant par ce moyen l'occasion de luy parler. Et au demorant ceulx de Guise le suivent tousjours de sy près quon a peine à luy dire la moindre chose[54].....

La reine de Navarre n'avait pas assisté aux derniers moments de François Ier ; elle se trouvait en Béarn depuis le mois de février 1546. Cette princesse, si tendrement dévouée à son frère, à son mari, à sa fille, était tombée dans la tristesse et le découragement. Ses lettres sont rares pendant cette année. Sa ganté ne lui laissait plus la force d'aller et de venir de Navarre à la cour. Plus que jamais elle cherchait un refuge dans les lettres et surtout dans la poésie. Il semble que plusieurs des nouvelles qui forment l'Heptaméron aient été composées à cette époque ; enfin elle mettait sana doute la dernière main à son recueil de vers, les Marguerites de la Marguerite des princesses, qui furent imprimées l'année suivante à Lyon, par les soins d'un de ses secrétaires, Simon Sylvius, dit de La Haye. A la première annonce de la maladie du roi, elle sentit revivre, dit Sainte-Marthe, tous les sentiments qui avaient fait le bonheur de sa jeunesse. Elle députa à la cour messagers sur messagers ; aucun d'eux ne revenait. Sainte-Marthe assure que la nuit qui précéda la mort de son frère, elle le vit en songe, pâle et décomposé. La fatale nouvelle arriva bientôt de Rambouillet, mais ses serviteurs la lui cachèrent. Un jour, dans une église, dit le même historien, elle entendit pleurer une religieuse qui était folle ; elle s'efforça de la consoler. Hélas ! Madame, dit cette malheureuse, je déplore votre fortune. A ces mots Marguerite devina la perte qu'elle venait de faire ; mais, au lieu de s'abandonner à ses larmes, elle se mit à genoils et très humblement remercia le Seigneur de tous les biens qui luy plaisoit luy faire[55].

Une des plus graves affaires que François Ier laissât à son successeur était le mariage de l'héritière de la Navarre. A l'avènement de Henri II, l'infant d'Espagne, Philippe, était veuf de dona Maria de Portugal. Marguerite boudait la cour ; la mort de son frère Misait le principal lien qui la rattachât encore à la maison de France ; Henri d'Albret s'en était depuis longtemps éloigné . Entre le roi de Navarre mécontent et l'empereur hostile, un accord pouvait se conclure et s'exécuter rapidement. La politique commandait au roi d'aviser. Parmi les princes du sang disponibles, le premier de tous était Antoine de Bourbon, duc de Vendôme, lieutenant du roi en Picardie. Antoine avait peu de caractère, peu de solidité, des goûts frivoles, mais ces défauts restaient dans l'ombre. Né sur les marches du trône et le plus proche héritier de la couronne après les Valois, il rachetait par son dévouement la félonie de son oncle, le célèbre connétable de Bourbon. II avait montré des qualités militaires, surtout en 1543, sous les yeux de Jeanne d'Albret, dans la campagne qui fut marquée par la défection du duc de Clèves. Son élégance et sa bravoure l'avaient mis en faveur à la cour. Brantôme fait son portrait en ces termes : Il estoit très bien né, brave et vaillant, car de ceste race de Bourbon il n'y en a point d'autres, belle apparence, estant de belle taille et plus haute de beaucoup que celle de Messieurs ses frères, la magesté toute pareille, la parole et l'éloquence très bonne. Le mariage de ce prince et de Jeanne d'Albret avait été un des derniers projets de François Ier ; le bruit s'était même répandu en Navarre que la reine Marguerite le désirait[56]. La mort du roi avait interrompu cette affaire ; Henri II la reprit. Aussitôt après son avènement, il envoya en Béarn le cardinal d'Armagnac, un des favoris de la maison d'Albret, chargé d'une mission secrète. Pour tromper la curiosité des courtisans, on répandit le bruit que Marguerite arrivait en France et que le cardinal allait au-devant d'elle. Saint-Mauris pénétra bientôt le secret du message : le nouveau roi, suivant la politique de son père, négociait le mariage de la princesse Jeanne avec le duc de Vendôme. En juin, les désirs du roi n'étaient plus un mystère. Saint-Mauris écrit à la reine de Hongrie : Le mariage de la princesse d'Alebrech avec M. de Vendôme se continue tousjours, en sorte que lon dit quil se conclura bientôst sy le père sy veult accommoder. Et a le roy, pour leffect d'iceluy, donné sa parole audict sieur de Vandosme[57].

Tout à coup surgit un second prétendant, redoutable par son crédit et ses qualités. François de Lorraine, comte et bientôt duc d'Aumale[58], fils allié du duc de Guise, avait vingt-huit ans à l'avènement de Henri II, à peu près le même âgé que Vendôme, son cousin-germain. Ils avaient été élevés ensemble[59] ; ils avaient fait les mêmes campagnes, combattu sur les mêmes champs de bataille. Le frère cadet de François de Lorraine, Claude, marquis de Mayenne, allait épouser, le 1er août 1547, Louise de Brezé, fille de Diane de Poitiers. Ce mariage élevait la maison de Lorraine au comble de la faveur. Protégé par la favorite, d'Aumale pouvait tout oser. Antoine de Bourbon montra une grande ardeur à repousser ce nouveau concurrent : Et comme M. d'Aumale sest quelquefois advancé pour faire la court à lad. princesse, ledict sieur de Vendosme, deffendant sa querelle, dict qu'il luy greveroit assez quil la veit mariée et colloquée à ung qui fust de moindre maison que luy, desquelz propos il pensa souldre escrime entre lesdicts sieurs, comme il feust advenu sans ce que le roy pacifia le tout[60]. Antoine de Vendôme et François d'Aumale étaient divisés par une ancienne jalousie qui se prolongea bien au-delà des événements que nous avons à raconter : sept ans auparavant ces deux princes avaient été rivaux ; tous deux avaient aspiré en même temps à la main de Vittoria Farnese, nièce du pape Paul III[61].

Les deux candidatures demeurèrent en suspens jusqu'à l'arrivée du roi de Navarre. Henri II l'avait invité à son sacre. Le prince d'Albret, pensionné par le trésor royal, inféodé à la couronne de France ; devait aller saluer le nouveau roi, quelles que fussent ses rancunes. Mais il avilit la goutte et prétextait ses infirmités pour retarder son voyage[62] ; les affaires d'une de ses sœurs, la dame de Rohan, ruinée par des serviteurs infidèles, lui prêtaient d'autres défaites[63]. Enfin il quitta Mont-de-Marsan le 26 juin. Marguerite malade resta au monastère de Tusson en Poitou[64]. En passant à Plessis-lès-Tours, Henri d'Albret prit sa fille[65] et tous deux se rendirent à Saint-Germain.

Henri II était décidé à marier la princesse Jeanne, mais il était indécis entre les deux princes de Vendôme et d'Aumale. Tel était l'empire de Diane que du commencement, dit Saint-Mauris, le roy eut bien desiré complaire audiet sieur d'Aumale[66]. Dans son incertitude il prit un bon parti, celui de s'adresser à Jeanne elle-même. La jeune princesse lui répondit fièrement par une allusion aux charges de cour de la dame de Mayenne, dont le mariage était prochain : Voudriez-vous, Monseigneur, que celle qui me doit porter la queue fût ma belle-sœur et que la fille de madame de Valentinois vint à me cotoyer. Après cette leçon, le roi ne pouvait plus songer qu'au duc de Vendôme. Ayant entendu que l'alliance convenoit trop mieux en l'autre seigneur et que la fille le reserchoit plus tost, il s'accommoda enfin audit mariage. Les protecteurs du brillant comte d'Aumale trouvèrent bientôt une autre union pour lui. Le cardinal de Guise était à Rome ; il reçut la mission de passer par Ferrare et de demander la main de la princesse Anne d'Este, fille du duc de Ferrare et de Renée de France[67].

Quant au roi de Navarre il repoussait également les deux princes. N'osant résister ouvertement au roi, il usait de la politique des ajournements qui lui avait si bien réussi avec le duc de Clèves ; il demandait du temps ; il faisait valoir l'absence de la reine Marguerite. Le pere, écrit Saint-Mauris, prolonge le plus qu'il peult pour le desir qu'il a qu'il verroit volontiers colloquer plus haultement ladicte princesse. souffrait de la goutte ; Saint-Mauris le représente, à son arrivée à la cour, comme bien extenué a present de sa personne, en facon que l'on espere peu de vie de luy[68]. Vendôme de son côté tomba malade et se rétablit lentement. C'étaient autant de raisons de gagner du temps. D'autre part, François de Lorraine reprenait ses intrigues avec l'esprit de suite qui a fait la grandeur de sa maison : Il voudroit bien rompre le tout pour son respect, dit Saint-Mauris. Henri d'Albret lui-même se laissait peu à peu séduire par les qualités de ce prince : Et a tenu propos, ledict sieur d'Albret, que au fort encores l'aimeroit-il mieux pour sa fille que le premier, prevoyant qu'il sera grand en ce royaume, encores qu'il ne soit arresté de goutter l'ung ni l'aultre[69]. Dans une dernière conférence avec le roi, il obtint un délai de six ou sept mois pour s'en conseiller avecques sa femme et incontinent avecques sa femme retourner devers le roy résolu[70].

Le sacre de Henri II eut lieu le 28 juillet[71]. Henri d'Albret rentra dans ses états au mois de septembre[72], mais il ne put emmener sa fille. Elle demeura à la cour avec la dame de Lafayette, sa gouvernante, le vicomte de Lavedan et d'Yzernay, intendant de sa maison, ancien valet de chambre du roi François Ier, devenu l'homme de confiance de la reine de Navarre. Jeanne eut des officiers de tout ordre, suivant l'usage des princesses du sang. La dépense était excessive. Heureusement Marguerite obtint par le crédit du connétable le renouvellement de sa pension et des charges de Henri d'Albret, qui formaient un revenu de 34 mille livres[73]. Les dons du roi étaient presque entièrement absorbés par la maison de la princesse ; aussi Marguerite ne cessa-t-elle de protester contre ces dépenses dans ses lettres[74].

Les prétentions du duc de Vendôme sur la princesse de Navarre étaient encore un mystère à la cour, bien qu'il fût très-assidu près d'elle et qu'elle y parût sensible ; une parole indiscrète lui arracha son secret. Au commencement de novembre, Catherine de Médicis touchait à la fin de sa troisième grossesse. Un jour, pendant les couches de la reine, à Fontainebleau, une demoiselle d'honneur demanda étourdiment au prince ce qu'il aimerait le mieux, ou que la reine de France eût un fils ou que le roi de Navarre en eût un. La question était insidieuse ; Catherine n'avait encore qu'un fils, celui qui fut plus tard François II, prince débile, dont on n'espérait pas longue vie, et, en cas de non-survenance d'enfants mâles, Antoine de Bourbon était de droit roi de France. Sans réfléchir, il répondit qu'il aimerait mieux que la reine eût douze fils plutôt que d'Albret un seul, parce que la naissance d'un héritier enlèverait à la princesse de Navarre le royaume de son père. A cette réponse les dames sourirent : le secret d'Antoine lui était échappé[75]. Catherine accoucha d'une fille, la princesse Claude, le 12 novembre. Henri II invita la reine Marguerite à servir de marraine à l'enfant. Comme elle était absente, elle fut remplacée par Jeanne d'Albret[76].

Cependant Henri II n'oubliait pas ses dernières conventions avec le roi de Navarre. Au mois de décembre il lui envoya le capitaine Jean d'Estrées pour les lui rappeler. Henri d'Albret répondit qu'il était malade, qu'il ne pouvait se mettre en route. Sa lettre dissimule mal, sous les formules de l'obéissance, son vif désir de gagner du temps. On verra tout à l'heure que le prince n'avait jamais eu de plus graves motifs d'éloigner l'échéance du mariage de sa fille. Marguerite, qui était sans doute dans le secret, multipliait les assurances de son dévouement au roi de France : Quant au mariaige dont il vous plest m'escripre, dit-elle, vous feriez tort au pere et à la mere si vous ne croyez fermement que leurs biens, leur fille et leurs propres vies sont desdiées à vostre service. Elle offre tout au roi, mais elle se tait sur l'objet principal de la mission de Jean d'Estrées[77]. Quelque temps après, Henri II tenta une nouvelle démarche auprès de son oncle. Le roi de Navarre, comme tous les princes économes, passait pour avare[78]. Henri II le tenta par son faible ; il lui fit offrir par Tristan de Monein[79], son lieutenant en Guyenne, une rente de dix mille écus. Cette proposition ne réussit pas mieux que les autres.

Comment le roi de Navarre persistait-il à repousser un mariage que toutes les convenances royales rendaient acceptable et que sa fille, d'après les contemporains, appelait de ses vœux[80] ? II se sentait menacé dans son indépendance par le nouveau roi[81] ; il avait quitté la cour, après le sacre, mécontent du roi et du connétable[82], et songeait à tenter de nouveaux projets d'alliance avec l'empereur. Vers la fin de l'été, Descurra se trouvait à Madrid ; il attendait le marquis de Mondejar, ancien vice-roi de la Navarre espagnole, déjà initié aux précédentes négociations. Dans son zèle, il demanda avec insistance à don Tristan d'Olsace, autre agent béarnais, un portrait de Jeanne d'Albret afin de le faire passer sous les yeux du prince. Philippe. Au lieu du marquis de Mondejar arrivèrent deux gentilshommes béarnais, les seigneurs de Saint-Pater et de Ballejas, sous prétexte d'apporter à la cour d'Espagne des nouvelles d'Allemagne. Ils visitèrent les infantes, quelques personnages importants, sondant le terrain, demandant des conseils, disant partout que le roi de France était l'unique obstacle au mariage de Jeanne d'Albret avec l'infant. Leur allure et leur langage les firent prendre pour des espions, d'autant plus que les conseillers de l'empereur n'avaient pas été prévenus de leur mission. Le grand commandeur de Léon fut chargé de les renvoyer[83].

Deux mois après, le roi de Navarre envoya à Madrid Miguel Dolite et Jacques de Foix, évêque de Lescar, son lieutenant-général. Descurra voulait éloigner le dernier qu'il soupçonnait d'être vendu au roi de France, mais Henri d'Albret consulté lui maintint sa confiance. Ils eurent trois conférences avec Descurra et lui révélèrent les instances du roi de France en faveur de Vendôme et la résistance secrète de leur maitre, qui jusqu'à ce jour avait su éviter tout engagement. L'objet principal de leur mission était d'offrir au roi d'Espagne, en même temps que la main de l'héritière de Navarre, l'entrée dans les places de Bayonne, Dax, Bordeaux et toute la Guyenne. La grande difficulté consistait à faire sortir la princesse de France ; son gardien habituel, le sire de Lavedan, penchait en faveur du duc de Vendôme. Mais l'évêque de Lescar, parent de Lavedan, se flattait de tourner ses dispositions ; l'évêque devait aller à la cour, en apparence pour discuter les conditions du mariage demandé par le roi, en réalité pour préparer l'enlèvement de Jeanne. Avant de passer à l'action, Henri d'Albret demandait un traité qui lui assurât la garantie de ses biens actuels et la restitution de la Navarre espagnole[84]. Alors s'engagea une négociation obscure, toute de détails, dont il est impossible de saisir l'ensemble. Les frontières de l'ancienne Navarre avaient souvent varié. Les Béarnais et les Espagnols se disputaient les villes et les moindres parcelles de territoire. Pour dissimuler l'intrigue au roi de France, qui avait donné l'ordre du connétable de faire saisir et d'ouvrir toutes les lettres adressées à son oncle et à sa tante[85], les agents béarnais les signaient de noms supposés, San Julian, Juan de Bilbao, Martin de Bittaray, Julian de Lescano, Sancho de Ursua, don Luis de Velasco, et n'y traitaient en apparence que d'affaires personnelles. Les personnages importants y sont désignés par des surnoms ; ainsi Orpelate désigne probablement le roi de Navarre ; Johan Cajado, sa fille ; Juan de Bilbao, l'évêque de Lescar ; Ferrua, le roi de France ; Garritz ou Agarritz, la ville de Mont-de-Marsan ; el corregidor, l'empereur ; San Julian, Miguel Dolite ; Diego de Salamanca, Descurra ; Anciondo, Nicolas Dangu, évêque de Mende[86].

A son insu ou en connaissance de cause, le roi de France traversait la négociation ; il offrait sa sœur Marguerite à l'infant Philippe et sa fille Élisabeth, née le 2 avril 1545, à don Carlos[87]. A la fin de novembre, le connétable porta ces propositions à Saint-Nantis ; le roi consentirait, dit Montmorency, à ce double mariage parce que l'union des deux maisons consoliderait à jamais la paix, mais il craignait les exigences de l'empereur[88]. Informé des pourparlers du connétable, Henri d'Albret présenta sa fille au prince de Piémont, avec lequel il avait déjà traité dans les dernières années du règne de François Ier[89]. Là encore le roi de France lui opposait une concurrence invincible ; il demandait lui-même le prince pour Marguerite. Charles de Cossé-Brissac, gouverneur au delà des monts, avait reçu l'ordre d'entamer les négociations et faisait espérer à Philibert de Savoie qu'en faveur de ce mariage Henri II restituerait le Piémont à sa maison[90].

Au milieu de janvier, Henri d'Albret reçut un nouveau messager de Henri II. Le roi pressait son oncle d'arriver à la cour et de consentir au mariage du duc de Vendôme. Le prince béarnais répondit qu'il était malade, qu'il ne pouvait voyager ; mais il envoya, en apparence pour discuter les clauses du contrat, l'évêque de Mende avec des demandes exorbitantes qu'il espérait voir rejeter. C'était un moyen de gagner du temps. Dans l'intervalle l'évêque de Lescar fit demander au comte de Castro par Miguel Dolite une réponse définitive. Le prince avait épuisé tous les prétextes ; son retour en France ne pouvait se retarder. L'évêque espérait recevoir à Mont-de-Marsan le message du comte[91]. Descurra, de l'autre côté de la frontière, pressait aussi les agents impériaux. Don Idiaquez, secrétaire de l'empereur, avait annoncé son arrivée ; il devait passer à Saint-Sébastien et de là en Béarn[92].

L'empereur était en Allemagne et ne pouvait se décider à se prononcer ; les propositions de Henri II, relatives au mariage de la princesse Marguerite, n'apportaient aucun appui nouveau à la maison d'Autriche ; celles du prince d'Albret paraissaient plus avantageuses, mais elles coïncidaient avec un refroidissement marqué de la cour de France[93] ; Charles-Quint redoutait toujours un piège tendu par les rois de France et de Navarre ligués contre lui. Ses conseillers et Saint-Mauris lui-même étaient persuadés que les pratiques du Béarnais procedoient de la farine du roy de France, qui le faisoit seulement pour voir de quel pied Sa Magesté chemineroit[94].

Au milieu de ces négociations matrimoniales, uniquement inspirées par une politique étroite ; on aime à retrouver un sentiment digne de Charles-Quint. Ce grand homme s'était laissé séduire par les qualités de Jeanne d'Albret. Dans un testament du 18 janvier 1548 il la signale à son fils comme une épouse d'un exterieur agreable, vertueuse et parfaitement élevée[95]. Il engage l'infant à l'épouser à défaut de la sœur du roi de France :

Il faudrait à mon avis tourner vos regards sur la princesse de Navarre, pourvu que l'on obtint une renonciation à toutes prétentions sur le royaume de Navarre et que l'on pût faire sortir de France la princesse. En effet, bien que les Français ne manqueraient pas d'en temoigner leur ressentiment, il est à présumer que, la chose une fois faite, ils dissimuleraient en voyant vostre puissance accrue par cette alliance avec M. d'Albret. Vous ne devez pas reculer devant les difficultés que l'on a quelquefois soulevées au sujet de la difference qui pourrait exister entre les enfans issus de ce mariage et les autres, parce que, tout considéré, ces difficultés sont sans fondement[96].

Ces dernières paroles nous révèlent un des obstacles soulevés par Henri d'Albret. Philippe de Castille ayant déjà un fils de sa première femme, les enfants à naître de son second mariage ne pouvaient attendre la couronne d'Espagne.

Au printemps de 1548, le roi entreprit un grand voyage à travers les provinces de l'Est. Parti de Saint-Germain vers la fin d'avril 1548 avec la reine, le duc de Vendôme et la plupart des princes de sa cour, il se trouvait à Troyes le 10 mai[97]. De Troyes, dit Vincent Carloix, le roy traversa toute la Bourgoigne, faisant à Dijon, Beaune et autres de la duché, ses entrées ; puis vint en Savoie pour en faire de même et commença par la ville de Chambéry[98].

A Chambéry, Antoine de Bourbon eut une difficulté dont il se tira habilement. Dans toutes les cérémonies il prenait place, en qualité de premier prince du sang, derrière le dais du roi. Au moment de l'entrée triomphale, il vit avec étonnement le duc d'Aumale se placer à sa gauche, sur le même rang que lui. Voici le récit du biographe de Vieilleville : Mon compaignon[99], dit le prince, tenons-nous rang en ce pays-ci ?Oui, Monsieur, répond le duc d'Aumale, et plus qu'en autre pays de France, car, estant celui-cy de nouvelle conqueste, duquel je suis gouverneur et lieutenant général pour le roy, Sa Majesté veult monstrer à tous les estats d'iceluy en quel estime il a ceste province, et m'a commandé de marcher ainsi. — Je le dy, mon compaignon, répliqua Monsieur de Vendosme, parce que tout ce que pouffa faire le chef de vostre maison seroit d'estre en ma main. — Je le pense bien, Monsieur, répond d'Aumale, en la France, mais hors le royaume vous seriez après luy, parce qu'il est souverain et vous ne l'êtes pas, ains subject et vassal de la couronne de France.

Antoine de Bourbon, piqué de ce superbe langage, quitte alors son rang et se retire. Le roi sort de son dais et entre en conférence avec le connétable ; le cortège s'arrête ; les courtisans attendent la fin de l'incident. Après le conseil, Vieilleville est chargé d'apaiser la querelle. Au premier mot des ordres du roi, le prince se soumet et reprend sa place ; mais son amour-propre n'y perdit rien ; il dit tout haut que si le roy s avoit commandé à un lacquay de se mettre au rang où il estoit, qu'il le souffriroit et l'auroit très-agréable pour le respect du mandement. Le duc d'Aumale aima mieux dévorer cet affront que perdre son rang. Il estoit fort esclave des honneurs et de la gloire. Le roi sut gré du sacrifice au duc de Vendôme. Pour un prince du seizième siècle, céder sur une question d'étiquette c'était céder deux fois.

De fête en fête le roi arriva à Turin[100]. La paix régnait encore entre l'empereur Charles-Quint, possesseur du Milanais, et le roi de France, maitre du Piémont, mais les deux souverains n'attendaient qu'une occasion favorable pour recommencer la guerre. A Turin, le roi reçut la nouvelle d'un nouveau soulèvement causé à Bordeaux par la perception de la gabelle. Aussitôt il repassa les Alpes, croyant peut-être retrouver dans ce mouvement l'influence occulte de son ennemi.

François Ier, peu de jours avant le mariage de Jeanne d'Albret et du duc de Clèves, avait établi dans l'ouest un nouveau mode de perception de la gabelle. En 1544 cette charge fut aggravée par un édit qui monopolisait la vente du sel entre les mains des officiers du roi[101]. Le prix du sel augmenta rapidement. Les gabeleurs ajoutaient leurs propres exactions aux rigueurs de l'édit royal. Un vif mécontentement agita les campagnes. Après quelques soulèvements partiels, au mois de mai 1548, une insurrection générale, qui prenait le caractère d'une Jacquerie, s'éleva en Saintonge, Aunis, Angoumois, Bordelais et dans les Ides. Saintes et Cognac furent saccagées. A Bordeaux, le lieutenant du roi, Tristan de Moneins, fut assassiné. Sur tout le littoral, même en Périgord et en Agenais, les officiers du roi qui voulurent résister, et surtout les gabeleurs, furent égorgés [102]. Le roi de Navarre, gouverneur de la Guyenne, lutta avec énergie contre les séditieux. Cette insurrection pouvait lui donner les moyens de retarder encore le mariage de sa fille, mais le roi, au commencement de septembre, envoya le connétable de Montmorency et François de Guise en Guyenne[103]. Guise remplit sa mission avec le vidame de Chartres, de la maison de Bourbon ; dans cette œuvre de répression il montra une magnanimité qui contrastait avec la dureté du connétable[104].

La cour n'avait pas accompagné le roi en Piémont ; Catherine de Médicis l'attendait à la côte Saint-André ; l'ambassadeur d'Espagne était resté à Mâcon[105]. A son retour d'Italie, Henri II, accompagné de la reine et de toute sa cour, fit une entrée solennelle à Lyon ; les fêtes se prolongèrent pendant huit jours, du 20 au 28 septembre. Parmi les princesses du cortège, un témoin oculaire cite Marguerite d'Angoulême, arrivée à la cour un mois auparavant, et Jeanne d'Albret, toutes deux dans une litière de velours noir découverte ; Antoine de Vendôme, à cheval à la portière, tenant propos à la dite royne, se faisait remarquer par son empressement auprès de la princesse et de sa mère[106].

Le mariage d'Antoine de Bourbon et de la princesse de Navarre était irrévocablement arrêté dans l'esprit du roi depuis la fin de l'année 1547[107], mais il l'avait ajourné jusqu'au retour de la cour à Saint-Germain, époque du mariage du duc d'Aumale, afin de réunir les deux fêtes en une seule, digne de la magnificence de François Ier. Tout à coup, à Lyon, le roi se montra pressant, et, sans attendre la fin du voyage, il décida que la cérémonie serait célébrée à Moulins. Avait-il été prévenu des dernières menées de Henri d'Albret ? Montmorency était à Bordeaux ; il avait pu recueillir dans cette ville, voisine du Béarn, des informations particulières. Quoi qu'il en soit, le roi ne se laissa arrêter par aucune représentation. Marguerite tâchait encore de gagner du temps ; elle avait obtenu l'appui du chancelier Olivier ; elle implorait celui de la reine Catherine et de Diane de Poitiers ; l'ambassadeur d'Espagne était l'âme de la résistance. Voici dans quels termes Henri II raconte au connétable l'opposition de sa tante :

Mon compere, je vous ranvoye se porteur quy vos sara bien rendre compte de toutes choses, toutes foys je ne leré (laisseray) à vous mander se mot, que sens (ceux) que je vous avoys mandé quy estoyt demeurés daryere, ont eu peur que je ne maperseuse de ce quy se foyt, qui estoyt que l'anbassadeur de !empereur estoyt venu voyr la reyne de Navarre et le chanselyer pour les persuader de ronpere ce maryage de monsyeur de Vendome ; et, à se que je peu conpter, ont grant anvye qui ne se fase point, car le chanselyer me dit que l'on me vouloyt mestre de grana partys enavant. Je luy dys que ftdloyt que je les eusse devant que an répondre. La royne, ma tante, laie (l'alla) incontynent dyre à ma fame et à madame de Vanlytynois. Et pour se quy seroit trop longs à vous escryre, ce porteur les vous dyra. Toutesfoys jé (j'ai) fort bien connu au propos que ma dyt la bonne dame, quele a grant anvye que sesy ne se fasse point. Je feré ce que je pouré afyn de fayre les noses ou pour le moyns les fyansailles à Moulins, et vous asure quy les fera ou par amour ou par forse, et, sy ne le fayt, souvené-vous de ce que je vous dys[108].

La cour arriva le 8 octobre à Moulins. Les ducs de Bourbon, au XVe siècle, y avaient élevé un château féodal. Moulins, écrit André Navajero, en 1538, est la ville la plus considérable du duché de Bourbon. Les ducs y ont construit un palais magnifique en guise de forteresse, avec de beaux jardins, des forêts, des fontaines et toute sorte de somptuosités, dignes de la demeure d'un prince. Le parc, qui renfermait une grande quantité de bêtes et d'oiseaux, est en partie désert. Il reste cependant des francolins, des poules d'Inde, des perdrix en quantité et des perroquets de différentes espèces[109]. Après la condamnation du connétable de Bourbon, le château de Moulins était passé des mains de Louise de Savoie, mère de François Ier, à la couronne. C'est dans ce somptueux palais, témoin de la grandeur de la maison de Bourbon, que Henri II voulut, par une attention délicate, célébrer le mariage du duc de Vendôme.

Après avoir longtemps retardé son départ sous le prétexte des troubles de Guyenne, le roi de Navarre, forcé par de nouveaux messages, s'était mis en route au commencement de septembre[110], à petites journées, pour donner aux courriers de l'empereur, qu'il attendait toujours en vain, le temps de le rejoindre. Il arriva à Moulins avec l'intention de tenir tête au roi, mais le roi montra tant d'insistance que le prince fut obligé de céder. Henri II raconte lui-même cette entrevue au connétable :

Se quy m'a fait tarder à vous escryre s'a esté la venue du roy de Navarre, lequel m'est venu trouver en acte vyle ; l'on m'avoyt averty quy dysoyt quy parleroyt bien à moy, se que j'atandoys an Brant devosyon, toute foys sa colere s'et refredye et m'a tyns les plus dous proupos quy l'est possyble et pour ne me parla d'otre chose ; et voyant quy ne me fesoyt semblant de ryens, je luy dys sy ne vouloy mestre fyn à se quy m'avoyt promys, qui estoyt du maryage de sa fylle. Y fit se quy peut pour l'alonger, mes je luy dys quy falloyt quy le fyt, et que ce fut dedans dymanche ; se quy m'a acordé[111].

Pour consoler son oncle de ce mariage, Henri II lui promit le recouvrement de la Haute-Navarre, mais le Béarnais, désillusionné, ne croyait plus à cette promesse, si souvent oubliée par François Ier ; le roi lui avait offert précédemment une pension de trente mille livres sur le trésor royal ; Henri d'Albret, en prince avisé, préféra une rente de quinze mille livres assise sur les . recettes de Gascogne qui passaient par ses mains.

Quant à se quy me touche, écrit le roi au connétable, jan suys quyte à bon marché : je luy balle seulement quine mille frans tous les ans pour le couverement de son réaume[112]. Malgré les serments du roi et les précautions de Henri d'Albret, les 15.000 livres ne furent payées qu'une fois. Henri II l'avoue lui-même[113].

Avant de donner son consentement, le roi de Navarre fit venir Antoine de Bourbon, lui reprocha son luxe et ses prodigalités et lui signifia d'avoir à prendre les habitudes modestes de la cour de Navarre, recommandations impuissantes qu'il devait souvent renouveler.

Le contrat de mariage était prêt. Le conseil du roi en avait discuté les clauses depuis plus d'une année[114] Henri d'Albret constituait à sa fille une dot de 100.000 écus, soit 225.000 livres. Le duc lui promettait un trousseau et des bijoux pour 10.000 écus. En cas de veuvage, la princesse désirait jouir d'un douaire de 12.000 livres de rente. Le cardinal Louis de Bourbon faisait donation aux futurs époux des terres de Condé et de la Fère en Brie. Le prince apportait de son chef à la communauté le duché de Vendôme, le comté de Marie, la châtellenie de la Fère et des terres dans les Pays-Bas Enfin, dans sa dernière clause, le contrat stipulait que le premier né hériterait du royaume de Navarre et des biens des deux maisons et qu'il joindrait aux armes d'Albret les fleurs de lys des Bourbons[115].

Jeanne d'Albret était-elle belle ? Saint-Mauris nous apprend, en 1547, quelle avoit quelques glandes au collet, que lon se doubte que ce soit le mal des écrouelles. Et est jà ledict mal depuis longtemps, tellement quelle fut touchée par le feu roi (François Ier), que toutesfois ne luy a proufité. Et lon tient que le Roy moderne y mettra la main après son sacre[116]. Olhagaray, historiographe de la Navarre, la représente comme une des plus belles princesses de l'Europe ; suivant cet annaliste elle était brune[117], rouge suivant Nicolas Bourbon, blonde d'après tous ses portraits[118]. Malheureusement il n'existe pas de portraits de Jeanne d'Albret fait pendant sa jeunesse. Les peintures, les gravures et les dessins dont l'authenticité est reconnue, la montrent presque toujours dans son costume de veuve, la bouche serrée, les lèvres minces, le nez long, les sourcils peu épais, l'œil clair, le regard pénétrant et ferme. L'énergie est le caractère de cette physionomie délicate. Sur le mérite de cette princesse et ses qualités morales nous avons des renseignements plus complets. Tous les contemporains sont d'accord pour célébrer sa science et ses vertus. La fille de Louis XII, Renée de France, duchesse de Ferrare, portait d'elle ce jugement : Je luy porte amour de mere et admire et loue les graces que Dieu lui a départies[119]. L'éducation très-soignée qu'elle avait reçue au château de Plessis-lès-Tours, sous l'inspiration de sa mère, avait fait d'elle une princesse accomplie, digne de prendre rang à côté de ces trois Marguerite qui ont illustré la cour des Valois par leur instinct poétique et leur goût pour les arts. L'éditeur des poésies de la reine de Navarre, Simon Silvius, dit de la Haye, qui écrivait en I 517, lui dédie les Marguerites de la Marguerite et la compare à sa mère :

Plus tost verrons, ô illustre princesse

Totalement Diane avoir prins cesse ;

Plus tost verrons les immortels rayons

Du beau Phebus, que luire nous voyons,

Du tout esteint ; . . . . . . . . . . . . . . . . .

Que celle fleur, qui nostre siecle honore

Et les beaux lys et la France décore,

Ne porte fruictz d'inestimable prix

Dont soyent repeuz tant de nobles esprits.

En tête du second volume, dans une autre dédicace, l'éditeur, jouant sur le prénom de la reine Marguerite, qu'il a donné au livre, conseille à la princesse d'imiter sa mère et de se faire auteur à son tour :

La Marguerite est la céleste aurore....

Qui saintement ce monde emperle et dore

Et de la France ainsi le nom décore,

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

A celle fin que vous, princesse illustre,

Estant miroir de sa royale image

Soyez aussi l'image de sa gloire[120].

Si ces vœux poétiques ne furent pas exaucés, c'est aux ardentes préoccupations de la vie militante de Jeanne qu'il faut le reprocher, car on sait qu'elle faisait des vers aujourd'hui malheureusement perdus[121].

Le 20 octobre 1548, le mariage fut célébré à Moulins. Saint-Mauris, témoin oculaire, nous apprend quil ny eust grana esbatemens. La précipitation du roi avait empêché les officiers de la cour d'organiser les fêtes ordinaires. L'ambassadeur remarqua que Henri II fist autant bon recueil, visaige et traietement audict sire d'Albret quil ne l'eust sceu désirer meilleur[122]. Le jeune Pierre de Ronsard, qui suivait la cour avec Baïf, écrivit l'épithalame :

Quand mon prince épousa

Jeanne, divine race,

Que le ciel compousa

Plus belle qu'une grace,

Les princesses de France,

Ceintes de lauriers verts,

Toutes d'une cadance

Lui chantèrent ces vers :

Ô Hymen, Hymenée,

Hymen, ô Hymenée.

Prince, plein de bon heur,

L'arrest du ciel commande,

Qu'on te donne l'honneur

De nostre belle bande :

D'autant qu'une déesse

La passe en majesté

D'autant elle, princesse

Nous surpasse en beauté.

. . . . . . . . . . . . . . . . . .

Le ciel fera beaucoup

Pour tout le monde ensemble

Si tu conçois un coup

Un fils qui te ressemble,

Où l'honneur de ta face

Soit peint, et de tes yeus,

Et ta céleste grace

Qui tanteroit les Dieus.

. . . . . . . . . . . . . . . . . .

Cependant consommés

Vos nopces ordonnées,

Et les feux allumés

De vos amours bien nées :

La chaste Cyprienne,

Ayant son demi-ceint,

Avec les graces vienne,

Compaigne à l'œuvre saint,

Afin que le neud blanc

De foi loyale assemble

De Navarre le sang

Et de Bourbon ensemble,

Plus étroit que ne serre

La vigne les ormeaus,

Ou l'importun lierre

Les apuians rameaus.

Adieu, prince, adieu soir,

Adieu pucelle encore,

Nous te reviendrons voir

Demain avec l'aurore :

Pour prier Hymenée

De vouloir prendre à gré

Notre chanson sonnée

Sur votre lit sacré.

Ô Hymen, Hymenée,

Hymen, ô Hymenée[123].

Antoine de Bourbon, arrivé au triomphe de son ambition, redoublait d'élégance et de gentilhommerie. Le roi écrit familièrement au duc d'Aumale en lui annonçant sa prochaine arrivée à Saint-Germain, où devait se faire le mariage du duc[124] : .... et là ce sera à vous à courre : et verra-on si vous serez aussi gentil compagnon que mon cousin le duc de Vendome[125].

La princesse paraissait heureuse. Lasse de servir de jouet à une politique qui se disputait sa main sans interroger son cœur, elle s'était laissé séduire par la bravoure chevaleresque et les mœurs élégantes du mince de Bourbon. On en plaisantait à la cour : Vous asure, écrit Henri II, que je ne vys jamès maryée plus joyeuse que sete-cy ; et ne fyt jamès que ryre ; je croy quy ne luy a pas fayt grand mal[126]. Deux jours après le maréchal de Brissac écrivait à François de Lorraine, qui était à la veille de son mariage, une lettre sur le même sujet, où la note gauloise est si vivement renforcée de la liberté de langage du XVIe siècle, que nous n'osons la publier[127].

Le lendemain, Henri d'Albret, effrayé du luxe de son gendre, exécuta lui-même les ordres d'économie qu'il lui avait donnés. Il se rendit au logis occupé par les nouveaux époux, et chassa la plupart des pages et officiers de luxe qu'il y trouva. C'est encore Henri II qui nous apprend ce coup d'état : Ledit roy ma dyt quy feroyt bien rongner le teryn à son beau fils, et vous asure quy ly a bien commansé, car tous les jantysoumes quy le souloyt suyvre sont désespérés et se retyret tous ches eux.... Je panse quy vont point tous ansamble dix gentyshoumes[128].

Peu de jours après les nouveaux époux partirent pour Vendôme. La séparation de Marguerite et de Jeanne fut déchirante : Vous ne vytes jamès, écrit Henri II au connétable, tant pleurer que a fait ma tante au partyr, et, sy neut été moy, ene (elle ne) fut jamès retournée avecques son mary[129]. Marguerite ne se consolait pas du mariage de sa fille : Elle n'eme déjà guyers son beau fyls, écrit le roi. Jeanne au contraire ne dissimulait pas son contentement ; de là de petites querelles qui faisaient dire à Henri II, toujours malveillant à l'égard de la maison d'Albret, que Jeanne ne tenoyt conte de sa mere.

Tout s'effondrait à la fois autour de la reine de Navarre ; elle avait perdu un frère qu'elle aimait ; sa fille unique épousait un prince dont elle pénétrait la futilité et la faiblesse ; Henri d'Albret n'était plus qu'un étranger pour elle. Ses mœurs légères avaient éloigné la reine ; il se consolait de cet abandon par des amours faciles qu'il étalait complaisamment au sein de sa petite cour encore un peu grossière. Il est veiray, écrit Henri II, que ma bonne tante et son mary se veullent le plus grant mal du monde[130]. Le roi et la reine de Navarre avaient combattu ensemble les projets de Henri II sur leur fille, mais, aussitôt que le mariage fut célébré, le prince changea tout à coup de sentiment, soit pour faire sa cour au roi, soit par esprit de contradiction vis-à-vis de sa femme : La royne de Navarre, écrit Henri II à son confident, est le plus mal quy lest possible avecque son mary pour l'amour de sa fylle. Henri d'Albret affectait d'approuver le mariage qu'il avait si longtemps repoussé : Il ma dict que, gy sa fille avoyt des edams, quy ne se remaryroit jamès. Il ne paraissait occupé que de présenter le plus tôt possible le duc de Vendôme à ses futurs sujets : L'on m'a dict que le roy de Navarre sans veult aller de Nevers et anmener sa fylle avecque luy. Je ne suis pas deliberé de leur refuser leur congé, car y me semble que, ayant maryé sa fylle, set le plus grant gré que je puis avoir d'eux. Il montrait une condescendance extrême à son gendre : Je vous astre que monsieur de Vandosme le gonverne..... Y dict estre le plus contant du monde. Et dans une autre lettre : Y fait samblant d'estre le plus contant du monde. Vous connessés l'onme. Ces derniers mots semblent révéler que le roi de France ne croyait qu'à demi aux protestations de son oncle de Béarn.

La séparation de Marguerite et de Jeanne ne fut pas de longue durée. Le 24 octobre la reine quitta Moulins, et le 13 novembre elle arriva à Vendôme. Au printemps suivant, l'un des vœux les plus ardents du roi de Navarre fut exaucé ; il reçut en Béarn son gendre et sa fille. Leur présence y excita des transports de joie et d'enthousiasme. La vue du bonheur de Jeanne adoucit la dernière année de la reine Marguerite. Antoine de Bourbon montrait des qualités qu'elle ne lui soupçonnait pas. Vers le mois de mars 1549, il écrit familièrement à son ancien rival, au duc d'Aumale : Quant au debvoir de bon mary que faites à ce commencement de mesnage, Dieu vous veuille longuement continuer ceste bonne voulanté, en laquelle toutesfoys je cuide que tous deux demourerons si bien que l'on ne nous metra jamays du nombre des mauvais marys[131]. Cette consolation ne manqua pas à Marguerite, et elle en jouit jusqu'à sa mort, le 21 décembre 1549. Henri d'Albret survécut de six ans à la reine ; avant de mourir il eut le bonheur de voir naître l'enfant qui devait être un jour Henri IV.

A la nouvelle du mariage de Jeanne d'Albret, l'empereur assembla à Pampelune les États de la province, et fit décerner à son fils le titre de roi de Navarre. Ainsi fut ratifiée la spoliation consommée par Ferdinand le Catholique. L'incorporation de ce royaume à l'Espagne devint définitive. Le duc de Vendôme, successeur de Henri d'Albret, renouvela souvent ses réclamations et poursuivit l'éternelle revendication de la Navarre, mais sans plus de succès que son beau-père. Une plus haute fortune était réservée à sa race. Son fils devait succéder aux petits-fils dégénérés de François Ier, fonder la grandeur de la France moderne et laisser au monde le souvenir du plus habile et du meilleur des rois.

 

FIN DE L'OUVRAGE

 

 

 



[1] Rapports d'espions (Arch. nat., K. 1485, n° 57, 58).

[2] Nouvelles de France adressées à Los Covos (Arch. nat., K. 1483, n° 100).

[3] Arch. nat., K. 1487, passim.

[4] Mémoires de Saint-Mauris à Los Covos, datés du 7 mai et du 29 juillet 1545 (Arch. nat., K. 1485, n° 85 et 95).

[5] Lettres de Saint-Mauris d'octobre 1545 (Arch. nat., K. 1485, n° 75 et 106).

[6] Lettres de Saint-Mauris écrites à la fin de 1545 ou au commencement de 1546 (Arch. nat., K. 1485, leu 75, 110, K. 1486, n° 14, 16, 17, 20, 27).

[7] Lettres de Saint-Mauris et du prince d'Espagne (Arch. nat., K. 1486, n° 17, 37, 50, 52).

[8] Nouvelles de France transmises par Descurra ou Saint-Mauris (Arch. nat., K. 1487, n° 31 bis et 41).

[9] Lettre de Saint-Mauris au commandeur de Léon, du 27 juillet 1545, déchiffrement (Arch. nat., K. 1485, n° 91).

[10] Œuvres de Brantôme, édit. de la Soc. de l'Hist. de France, t. III, p. 179.

[11] Lettre de Saint-Mauris, ambassadeur, à Charles-Quint, datée d'Amiens du 15 septembre 1545 (Arch. nat., K. 1485, n° 103).

[12] Lettre de Saint-Mauris à l'empereur, sans date, déchiffrement (Arch. nat., K. 1485, n° 75).

[13] Lettre autographe de François Ier à Charles-Quint, sans date (Arch. de Bruxelles, Négociations de France, t. I).

[14] Lettre de Saint-Mauris (à l'empereur ?) sans date, déchiffrement (Arch. nat., K. 1486, n° 23).

[15] Lettres de Saint-Mauris à l'empereur, au prince d'Espagne et au commandeur de Léon (Arch. nat., K. 1486, n° 23, 8 et 20). Nous avons pris dans ces lettres les éléments de notre récit de la mort du prince d'Enghien, qui diffère par quelques points secondaires des récits des historiens contemporains.

[16] Lettre de Saint-Mauris à Los Covos, commandeur de Léon, déchiffrement sans date (Arch. nat., K. 1485, n° 75).

[17] Lettres de Saint-Mauris de 1546 (Arch. nat., K. 1486, n° 14, 17, 79).

[18] Nouvelles de France transmises en Espagne par Descurra, original sans date (Arch. nat., K. 1487, n° 31 bis).

[19] Lettre de Martin Vallès, agent impérial en France, au commandeur de Molina, chambellan de l'impératrice, du 29 novembre 1535 (Arch. nat., K. 1485, n° 30).

[20] Lettre de l'ambassadeur d'Espagne à Charles-Quint, du 14 novembre 1538 (Arch. nat., K. 1484, n° 100).

[21] Journal de Vandenesse (Bibl. nat., coll. Dupuy, vol. 560, anno 1540).

[22] Lettre de Saint-Mauris à Los Covos du 27 juillet 1545, déchiffrement original (Arch. nat., K. 1485, n° 91).

[23] Nouvelles transmises par l'ambassadeur d'Espagne à l'empereur, février 1545 (1546), déchiffrement original (Arch. nat., K. 1485, n° 77). Consultez aussi la lettre de Saint-Mauris à Los Covos, du 28 février 4545 (4546) (Ibid., n° 79).

[24] Lettre de Saint-Mauris à Los Covos, du 31 mars 1545 (1546), déchiffrement original (Arch. nat., K. 1485, n° 82).

[25] Lettre de Saint-Mauris à Los Covos du 29 janvier 1546 (1547), déchiffrement original (Arch. nat., K. 1486, n° 25).

[26] Lettre de Saint-Mauris au prince d'Espagne du 16 février 1546 (1547), déchiffrement original (Arch. nat., K. 1486, n° 28). Une lettre du cardinal d'Armagnac, datée du 31 janvier 1546 (1547), confirme le récit de Saint-Mauris (Lettres de Marguerite d'Angoulême, t. II, p. 473).

[27] Lettre de Saint-Mauris à Granvelle, du 21 mars 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 51).

[28] Lettre de Saint-Mauris à Granvelle, du 21 mars 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 51).

[29] Lettre autographe de Saint-Mauris au prince d'Espagne, du 9 avril 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 55).

[30] Oraison funèbre du roi François Ier par Pierre du Chastel, évêque de Mâcon, imprimée à la suite de la vie de ce prélat par Pierre Galland, Paris, 1674, in-8°.

[31] Lettre de Saint-Mauris du 10 avril 1547, original chiffré, déchiffré par M. Friedman (Arch. nat., K. 1487, n° 56).

[32] Compte des funérailles de François Ier dressé par Nicolas Lejay, notaire. Original sur parchemin (Bibl. nat., f. fr., vol. 10392). Nous faisons ci-après plusieurs emprunts à ce curieux manuscrit.

[33] Nous avons deux récits des funérailles de François Ier. Le premier, le plus complet, est inédit ; il en existe une copie à la Bibliothèque nationale (f. fr. 4341, f. 7 et suiv.). Le second a été imprimé chez Robert Estienne (in-4°, s. d.) et réimprimé à la suite de la vie de Pierre du Chastel par Galland (in-8°, 1674). Nous fondons ensemble les deux récits en les abrégeant.

[34] Le village de Saint-Ladre ou Saint-Lazare était situé autour du couvent de ce nom à l'extrémité du faubourg Saint-Denis actuel. La Croix-quipenche était placée dans la plaine Saint-Denis, à gauche en sortant de Paris ; elle a été détruite le 18 novembre 1793.

[35] Il est difficile d'établir la comparaison de la valeur de l'argent pendant la première moitié du XVIe siècle avec la valeur du nôtre. Suivant M. Mignet il vaut aujourd'hui cinq fois plus (Rivalité de François Ier et de Charles-Quint, t. I, p. 126 et 143, notes). Suivant M. Pierre Clément il vaut près de trente fois plus (Trois drames historiques, p. 166, 185 et 195).

[36] D'après Vincent Carloix il se trouvait déguisé dans une chambre de la rue Saint-Jacques, sur le passage du cortège (Mémoires, liv. II, chap. 11).

[37] Lettre de Saint-Mauris du 10 avril 1547, déchiffrée par M. Friedman (Arch. nat., K. 1487, n° 56).

[38] Cette ordonnance est imprimée dans les Mémoires d'État de Ribier, t. II, p. 1.

[39] Lettre de Saint-Mauris à l'empereur, avril 1547, copie (Arch. de Bruxelles, coll. de doc. hist., t. VII, p. 183). C'est à tort que le copiste a attribué ce document à l'abbé de Saint-Vincent.

[40] On sait que Henri II et Marguerite étaient fils de la première femme de François Ier, la reine Claude, fille de Louis XII, morte à Blois en 1524.

[41] Lettre de Saint-Mauris du 10 avril 1547 déchiffrée par M. Friedman (Arch. nat., K. 1487, n° 561.

[42] Lettre de Henri II à La Hochepot du 23 octobre 1548 (Bibl. nat., f. fr., vol. 3119, f. 18).

[43] Lettre de Saint-Mauris du 10 avril 1547 déchiffrée par M. Friedman (Arch. nat., K. 1487, n° 56).

[44] Chancelier de France depuis le 18 avril 1545.

[45] Lettre de Saint-Mauris, avril 1547, déjà citée (Arch. de Bruxelles).

[46] Lettre de Saint-Mauris, avril 1547 (Arch. de Bruxelles).

[47] Lettre de Saint-Mauris, avril 1547 (Arch. de Bruxelles).

[48] Lettre de Saint-Mauris du 10 avril 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 56).

[49] Commentaires et lettres de Blaise de Montluc, édit. de la Soc. de l'Hist. de France, t. I, p. 328.

[50] Lettre de Saint-Mauris à la reine de Hongrie, juin 1547 (Arch. de Bruxelles, Négociations de France, t. II).

[51] L'acte original de l'accord arrêté pour ce duel est conservé à la Bibliothèque nationale (f. fr. vol. 3122, f. 9).

[52] Le nouveau roi portait le titre de dauphin jusqu'à son sacre.

[53] Lettre de Saint-Mauris à l'empereur, avril 1547, déjà citée (Arch. de Bruxelles).

[54] Lettre de Saint-Mauris à la reine de Hongrie, juin 1547, déchiffrement original (Arch. de Bruxelles, Négociations de France, t. II).

[55] Charles de Sainte-Marthe, Oraison funèbre de la reine de Navarre, in-4°, 1550. L'auteur tenait ces détails de la reine elle-même.

[56] Lettre de Palatios, de Perpignan, au général des Franciscains à Pampelune, Saint-Jean-Pied-de-Port, 6 mars 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 47).

[57] Lettre de Saint-Mauris, juin 1547, original (Arch. de Bruxelles, Négociations de France, t. II).

[58] Les lettres-patentes qui érigent la comté d'Aumale en duché-pairie sont de juillet 1547 (Bibl. nat., coll. Dupuy, vol. 484). Le Parlement protesta le 3 décembre 1547 (Mémoires de Ribier, t. p. 89).

[59] Antoine de Bourbon écrivait à François de Lorraine, quelques années après, en lui annonçant la naissance de son fils : Puisqu'il a pleu au Seigneur Dieu me faire tant de bien que de m'avoir donné un filz, ce sera pour estre compaignon du vostse comme nous avons esté, estant jeunes et petis. (Bouillé, Histoire des ducs de Guise, t. I, p. 186.)

[60] Lettre de Saint-Mauris à la reine de Hongrie, juin 1547, original (Arch. de Bruxelles, Négociations de France, t. II).

[61] Mémoires de Ribier, t. I, p. 478, 512,'532, 547, 549. Victoria Farnese, fille de Pierre-Louis Farnese, premier duc de Parme, épousa le duc d'Urbin.

[62] Lettre de Saint-Mauris au prince d'Espagne, 6 juin 1547 (Arch. nat., K. 1488, n° 13).

[63] Lettres de Marguerite d'Angoulême, t. I, p. 384.

[64] Nouvelles de France du 22 juillet 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 70).

[65] Un mot d'une lettre de la reine Marguerite (t. I, p. 384) a donné à penser que Jeanne d'Albret était en Béarn, mais ce mot peut s'expliquer autrement et tous les historiens du tempe sont d'accord pour affirmer que Jeanne n'alla pas en Béarn avant son mariage. Voyez l'Histoire du Béarn de Bordenave, p. 40.

[66] Lettre de Saint-Mauris déjà citée (Arch. de Bruxelles).

[67] Lettre originale du cardinal dé Guise au roi (Bibl. nat., f. fr., vol. 3126, f. 24).

[68] Lettre de Saint-Mauris déjà citée (Arch. de Bruxelles).

[69] Nouvelles de France transmises à la cour d'Espagne (Arch. nat., K. 1487, n° 70).

[70] Lettre de Henri d'Albret au roi, datée du 24 décembre 1547 (Bibl. nat., f. fr., vol. 20521, f. 99). Une partie de cette lettre a été publiée par M. le comte de Laferrière dans son étude sur Marguerite d'Angoulême, p. 112.

[71] Une lettre de l'ambassadeur Saint-Mauris donne un récit très-détaillé du sacre (Arch. nat., K. 1487, n° 72).

[72] Lettre de Henri d'Albret du 29 septembre, datée de Pau (Arch. nat., K. 1487, n° 87).

[73] Lettre de Saint-Mauris déjà citée (Arch. de Bruxelles).

[74] Lettres de Marguerite d'Angoulême, t. I, p. 384 à 391. Voyez aussi la lettre de Saint-Mauris déjà citée (Arch. de Bruxelles).

[75] Lettre de Saint-Mauris au prince d'Espagne du 20 novembre 1547, déchiffrée par M. Friedman (Arch. nat., K. 1485, n° 111).

[76] Conférez Négociations sous François II, p. 893, dans la Coll. des doc. inédits, et la lettre de Marguerite, t. I, p. 389. La princesse Claude, duchesse de Lorraine en 1559, naquit le 11 novembre suivant les uns, le 12 suivant les autres. Elle eut les Suisses pour parrains, et la reine de Navarre et la duchesse de Guise douairière pour marraine (Pièce du temps, publiée dans Négociations sous François II, p. 893, dans la Coll. des doc. inédits).

[77] Lettres du roi de Navarre et de la reine de Navarre au roi de France, en date du 24 décembre 1547 (Bibl. nat., f. fr., vol. 20521, f. 99 et 100, copies). Une partie de ces deux lettres a été publiée par ï le comte de Laferrière dans son étude sur Marguerite d'Angoulême, p. 112 et 113.

[78] Une lettre de Henri II au connétable contient ce jugement du roi de Navarre : y nest délibéré .... synon d'amaser forse arjant et fayre bonne chere. (Bibl. nat., f. fr., vol. 3122, f. 7).

[79] Lettre de Henri II an connétable (Bibl. nat., f. fr., vol. 3429, f. 1). M. le comte de Laferrière, qui a publié cette lettre (Marguerite d'Angoulême, p. 427), imprime Monge ; nous lisons Mounys : sur le manuscrit autographe. Il s'agit probablement de Tristan de Moneins, alors lieutenant du roi au gouvernement de Guyenne.

[80] Lettre de Saint-Mauris déjà citée (Arch. de Bruxelles). — Rapport d'espion du 22 juillet 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 70).

[81] Les rois de France convoitaient depuis longtemps la Navarre. Après la mort de Henri d'Albret (25 mai 1555), Henri II proposa au nouveau roi de Navarre de lui céder son royaume moyennant compensation. On n'avait pas osé faire de telles propositions à Henri d'Albret, mais il n'ignorait pas les secrètes intentions du roi. Voyez la Chronologie Novenaire de Palma Cayet, liv. I (Coll. Buchon, p. 175).

[82] Résumé de chancellerie du 3 novembre 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 95).

[83] Lettre de Descurra au comte de Castro, vice-roi de la Navarre espagnole, du 5 novembre 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 97).

[84] Relation de Descurra datée du 4 janvier 1548, original (Arch. nat., K. 1488, n° 29).

[85] Lettre de Henri II au connétable publiée dans Marguerite d'Angoulême, p. 114, par M. le comte de Laferrière.

[86] Arch. nat., K. 1487.

[87] Lettre de Saint-Mauris au prince d'Espagne du 6 juin 1547 (Arch. nat., K. 1488, n° 13).

[88] Lettre de Saint-Mauris au prince d'Espagne du 28 novembre 1647 (Arch. nat., K. 1487, n° 100).

[89] Rapport d'espion du 22 juillet 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 70).

[90] Lettre du duc de Savoie au prince d'Espagne du 26 septembre 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 86).

[91] Lettre de l'évêque de Lescar au vice-roi de la Navarre, du 28 janvier 1548 (Arch. nat., K. 1488, n° 37).

[92] Lettre de Descurra au vice-roi de la Navarre, du 28 janvier (Arch. nat., K. 1487, n° 106).

[93] Lettre de Saint-Mauris à l'empereur du 28 février 1548 (Arch. nat., K. 1488, n° 40).

[94] Lettre de Saint-Mauris (Arch. nat., K. 1488, n° 78).

[95] .... dicha princessa es de buena dispusicion, virtuosa, cuerda y bien criada. (Instructions de Charles-Quint à son fils Philippe, 18 janvier 1548 ; Papiers d'État de Granvelle, t. III, p. 312.)

[96] Si esto no a lugar, me pareçe que deviere convenir la princesa de Albret, con tanto que se tratase de manera que se quitasse la diferencia y pretension sobre el regno de Navarre, y con medios convinientes, y que se pudiese sacar la dicha princesa de Francia (Papiers d'État de Granvelle, t. III, p. 312). Cette pièce a été connue du savant Godefroy qui la mentionne dans un mémoire inachevé et inédit (Bibl. de l'Institut, coll. Godefroy, vol. 377).

[97] Lettres de Dianne de Poytiers, p. 25, note de M. Guiffrey. Dans les pages qui suivent nous empruntons plusieurs indications aux notes de cet ouvrage.

[98] Mémoires sur Vieilleville par Vincent Carloix, liv. III, chap. VIII.

[99] Vincent Carloix s'accorde ici avec Brantôme qui dit positivement que Antoine de Bourbon appelait habituellement François de Lorraine mon compaignon ; Guise lui répondait Monsieur. (Œuvres de Brantôme, édit. de la Soc. de l'Hist. de France, t. IV, p. 368.)

[100] Pendant ce voyage en Piémont le roi se fit présenter l'état de tous les soldats estropiés à son service et les distribua dans toutes les abbayes de France à la charge des abbés (Mémoires sur Vieilleville par V. Carloix, liv. III, chap. 9). Plusieurs historiens contemporains ont considéré cette mesure comme une innovation en faveur des invalides, mais elle était déjà en usage sous le règne de François Ier (Relations des ambassadeurs vénitiens, t. I, p. 300, dans les Documents inédits).

[101] Édit de juillet 1544 imprimé dans le recueil de Fontanon, t. II, p. 1020. M. Dareste de la Chavanne, dans son Histoire de l'administration en France, a très-bien résumé l'histoire un peu obscure des transformations de l'impôt sur la gabelle.

[102] Paradin, V. Carloix et surtout Belleforest, témoin oculaire, sont les historiens du temps qui donnent le plus de détails sur l'insurrection de 1548.

[103] Lettre de Henri II au s. d'Humières en date du 8 septembre 1548 (Bibl. nat., Ve de Colbert, vol. 23, f. 25, v°, copie).

[104] Ronsard a publié une jolie pièce de vers sur l'insurrection de la Guyenne (Odes, 1555, p. 38 v°).

[105] Lettre de Saint-Mauris au prince d'Espagne du 13 août 1548 (Arch. nat., K. 1488, n° 66).

[106] La magnifica e trionfale entrata del Christ. re di Francia, Henri II, .... Lyon, in-4°, 1549. Brantôme a reproduit presque littéralement le récit italien (t. III, p. 250, édit. de la Soc. de l'Hist. de France).

[107] Lettre de Saint-Mauris au prince d'Espagne du 20 décembre 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 103).

[108] Lettre sans date, autographe (Bibl. nat., f. fr., vol. 3119, f. 3). Le reste de la lettre est relatif à la sédition de Bordeaux. — Une partie de cette lettre a été publiée par M. le comte de Laferrière (Marguerite d'Angoulême, p. 125).

[109] Relations des ambassadeurs vénitiens, t. I, p. 33 dans la Coll. des doc. inédits.

[110] Lettre de Pedro de Gaztelu du 11 septembre 1548 (Arch. nat., K. 1484, n° 84).

[111] Bibl. nat., f. fr., vol. 3129, f. 1. — Une partie de cette lettre a déjà été publiée par M. le comte de Laferrière dans son étude sur Marguerite d'Angoulême, p. 120, et par M. Guiffrey dans les notes des Lettres inédites de Dianne de Poytiers, p. 41.

[112] Lettre autographe du roi au connétable, sans date (Bibl. nat., f. fr., vol. 3129, f. 1).

[113] Lettre du roi au connétable et au cardinal de Lorraine, du 10 juin 1555, analysée par M. Louis Paris dans le Cabinet historique, 1873, 2e partie, p. 65.

[114] Rapport d'espion du 22 juillet 1547 (Arch. nat., K. 1487, n° 70).

[115] Le contrat de mariage du duc de Vendôme et de Jeanne d'Albret est imprimé dans le Recueil des Traités, t. II, p. 246.

[116] Lettre de Saint-Mauris, juin 1547, original (Arch. de Bruxelles, Négociations de France, t. II).

[117] Olhagaray, Hist. de Navarre, 1609, p. 503.

[118] Voyez la collection des portraits de Jeanne d'Albret, gravures et dessins, conservée à la Bibliothèque nationale, et le Recueil de portraits de M. Niel.

[119] Lettre de Renée de France à Calvin (Arch. cur. de l'Hist. de France, 1re série, t. V, p. 399).

[120] Les Marguerites de la Marguerite des princesses, Lyon, Jean de Tournes, 1547, 2 vol. in-8°.

[121] Joachim du Bellay a inséré quelques vers de Jeanne d'Albret dans ses œuvres, 1573, f. 158, v.

[122] Lettre de Saint-Mauris à Maximilien du 9 novembre 1548 (Arch. nat., K. 1488, n° 78 et 80).

[123] Les quatre premiers livres des odes de P. de Ronsard, Paris, 1555, p. 103. Par une singularité qui n'a peut-être jamais été remarquée, plusieurs couplets de cet épithalame ont été littéralement reproduits dans l'épithalame d'Élisabeth de Valois par I. Le Gendre. Voyez le Bulletin du Bibliophile, 1874, p. 454.

[124] Le duc d'Aumale épousa, le 4 décembre 1548, à Saint-Germain, après le retour du roi, la princesse Anne d'Este, fille du duc de Ferrare. C'est par erreur que dom Calmet et le père Anselme ont rejeté ce mariage à l'année 1549. Cette erreur est d'autant plus inexplicable de la part de ces savants auteurs qu'aucun des contemporains du mariage ne s'est trompé sur sa date. Voyez à ce sujet les notes que M. Guiffrey a ajoutées aux Lettres de Dianne de Poytiers, p. 30 et 51.

[125] Mémoires-journaux du duc d'Aumale et de Guise, p. 2, dans la Nouvelle collection de Mémoires pour servir à l'Hist. de France, publiée par MM. Michaud et Poujoulat.

[126] Bibl. nat., f. fr., vol. 3122, f. 7. — M. le comte de Laferrière a publié une partie de cette lettre dans son étude sur Marguerite d'Angoulême, p. 128, et M. Guiffrey dans les notes des Lettres de Dianne de Poytiers, p. 41.

[127] Bibl. nat., f. fr., vol. 20449, f. 119. — M. Guiffrey a publié une petite partie de cette lettes dans les Lettres de Dianne de Poytiers, p. 41.

[128] Lettre autographe du roi au connétable, sans date, Bibl. nat., f. fr., vol. 3122, f. 13.

[129] Lettre autographe de Henri II au connétable, Bibl. nat., f. fr., vol. 3122, f. 13.

[130] Trois lettres autographes de Henri II nous fournissent cette citation et celles qui suivent, Bibl. nat., f. fr., vol. 3129, f. 1, vol. 3122, f. 7 et 13.

[131] Bibl. nat., f. fr., vol. 20469, f. 149.