LES ORIGINES POLITIQUES DES GUERRES DE RELIGION

LIVRE PREMIER. — LE ROI. - LA CONSTITUTION DES PARTIS

CHAPITRE IV. — LES FUORUSCITI D'ITALIE.

 

 

La maison de Lorraine donnait à la politique de Henri II l'élan des ambitions puissantes ; mais il n'est pas sûr que, réduite à ses propres moyens, cette influence, qui s'exerçait sur tout le champ des entreprises extérieures, eût localisé particulièrement son action en Italie. Les grands cardinaux représentent une influence plus étroitement italienne, avec des mobiles moins généraux et des desseins moins vastes : au reste, pacifiques d'esprit, amis du bien-être, de la richesse et des arts, ces princes de robe longue s'emploient surtout aux jeux d'une diplomatie astucieuse, qu'ils parent de leur faste et du lustre de la Renaissance. Pour coordonner et pousser ces deux forces, qui n'eussent peut-être pas suffi à entraîner le gouvernement royal dans les aventures, comme aussi pour exciter les passions de la Cour, il fallait un stimulant. L'influence violente et tenace des exilés italiens, réfugiés en France, offrit ce stimulant efficace. Les bannis ceux qu'on appelait les fuorusciti — apportèrent, dans les Conseils et parmi l'entourage du Roi, les germes de guerre que produisent la haine et les rancunes. Les causes qui avaient déterminé, dès le XVe siècle, l'émigration italienne en France, ont été souvent expliquées[1]. L'importance même de cette émigration a été mesurée avec une érudition qui reste encore impuissante à peindre toute l'étendue d'une telle invasion[2]. On sait, en effet, que du moment où Charles VIII franchit les Alpes, la pénétration italienne en France devint intense. On vit une foule de princes, de grands seigneurs, de capitaines venir d'outremonts se ranger à la solde des rois ; banquiers et diplomates de la Péninsule donnèrent à la politique française leurs ressources et leur habileté. Dans tous les corps de l'administration royale se pressèrent les Italiens, comme ce Nicolas Panigarola de Gênes qui, nommé conseiller au Parlement de Normandie, arrivait à Rouen sans connaître la langue française[3]. Lyon, Montpellier, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Cahors, Paris, voire Nantes et Rouen eurent des paroisses peuplées de marchands italiens. Il est superflu de rappeler combien d'œuvres ont travaillé les artistes étrangers venus à la Cour, dans la première moitié du XVIe siècle. On comprend aisément qu'attirés en France, ces Italiens aient entraîné par retour les ambitions françaises vers la Péninsule.

Mais, si cette infiltration italienne se produisit, avec une force égale, pendant plus d'un demi-siècle, pourtant le règne de Henri II est très marqué par l'influence extraordinaire, et comme officielle, qui fut donnée clans les Conseils, à la Cour et clans les armées aux bannis de 'liane.

Au cours du flux et reflux des guerres italiennes, le flot des armées royales avait ramené d'outremonts un élément singulièrement dangereux, — le fuoruscito. La plante-homme, dit Alfieri, ne naît en aucun pays plus forte qu'en Italie. Le fuoruscito offre un type d'une énergie forcenée. C'est en général un rebelle ou un failli, prince, soldat, aventurier, victime ou héros de ces drames politiques qui ensanglantent chaque jour la vie de la Péninsule, parfois simple criminel chargé de trahisons et de meurtres. Les qualités qui le font apprécier dans les rangs où il sert sont précisément la fureur et le courage, formes guerrières de la virtù. Il y joint quelquefois l'éclat d'une existence brillante.

François Ier, tout en accueillant les fuorusciti de la Péninsule, avait confiné leur activité dans les charges militaires d'ordre inférieur ; sauf quelques Napolitains, les bannis avaient tenu, sous l'ancien règne, le rang de mercenaires. L'avènement de Henri II leur ouvre les entrées de la Cour : par la faveur de la reine Catherine de Médicis, ils prennent place au premier plan, s'associent le plus souvent aux ambitions des Lorrains et enveniment de leurs propres passions toutes les querelles italiennes. De plus, ce sont eux qui proposent les entreprises et offrent l'appât à la politique royale. L'un deux obtiendra la charge de maréchal de France.

Le Roi lui-même professait, nous l'avons dit, une admiration naturelle pour ces soldats brillants, de sorte que la France devint le port et l'asseuré refuge des princes injustement oppresséz[4]. Joachim du Bellay a vanté l'hospitalité du roi Henri II :

Les estrangers chassés tellement il traittoit,

Qu'un refuge commun la France leur estoit[5].

Dans la foule des bannis italiens qui se réfugièrent sous la protection de Henri II, il convient de distinguer deux groupes, le parti des Florentins et celui des Napolitains. Le budget royal, qui dispensait aux fuorusciti de riches pensions, offrait cette distinction[6]. A ces deux groupes se joignaient des exilés et aventuriers de Gênes, de Milan, de Mantoue, des Etats pontificaux, même quelques Calabrais : mais cette catégorie se composait d'hommes qui poursuivaient des intérêts isolés et qui cherchaient en général plus la fortune que la vengeance.

 

Les Florentins sont alors les plus influents et les plus nombreux.

Qui pourrait peindre la vie complexe, mouvante, subtile tour à tour et violente qu'a portée la Toscane aux XVe et XVIe siècles ? A l'époque de Verrochio, de Ghirlandajo et de Botticelli, au moment où l'imprimerie paraissait en Italie, tandis que les navigateurs toscans découvraient de nouveaux mondes, dans cette Florence où se pressaient marchands de laine et marchands de soie, banquiers, changeurs et politiques, artistes et poètes, l'histoire des grandes familles s'était projetée sur un fond de démocratie et d'émeutes. Puis, durant toute la Renaissance, continua ce bouillonnement de vie diverse : nous le verrons s'apaiser et mourir au temps de Henri II.

Aussi Florence ne dut-elle pas sa primauté à la seule puissance de l'esprit : les luttes incessantes, le développement de l'énergie individuelle que soutenait, excitait la nécessité pour chacun de reconquérir, à chaque révolution, la fortune et les honneurs, enfin l'urgence pour les tyrans menacés de se défendre par des moyens sanglants contre la haine toujours renaissante de rivaux furieux, firent de cette patrie florentine le plus intense foyer d'expansion italienne. Ainsi s'accrut l'esprit d'entreprise des Florentins, qui répandirent leur action clans toute l'Europe. Les marchands de Florence eurent des comptoirs de Constantinople jusqu'à Londres, dans toutes les grandes cités ; colporteurs d'idées et d'argent, ils imprimèrent sur la vie internationale de ce temps une couleur italienne[7]. Beaucoup de ces Florentins cosmopolites étaient des bannis politiques, des fuorusciti ; les autres, soumis à la tyrannie des Médicis, portaient en eux cette haine secrète que fait jaillir une occasion propice.

Lorsque Henri II monta sur le trône, les principales colonies de fuorusciti florentins étaient établies à Lyon, Venise, Rome et Ancône. Des rapports étroits unissaient ces quatre fractions et leur permettaient d'exercer une action commune[8]. Chacune de ces colonies offrait une société particulière : le cercle des Florentins de Venise était le plus homogène, formé seulement de fuorusciti politiques, marchands ou capitaines ; à Rome, la société florentine, plus mêlée, réunissait amis et ennemis des Médicis, sous le consulat du grand marchand Bindo Altoviti, dont le fils fut créé archevêque de Florence en 1543[9]. Cette colonie de Rome, restée longtemps en termes courtois avec Cosme de Médicis, montrera ses vrais sentiments dans la crise de 1553 et 1554[10]. Mais le centre dirigeant de la Florence du dehors s'établit en France, è, Lyon. Là toute une organisation avait été instituée. Le consul de la nation florentine, assisté de quatre conseillers procureurs, y représentait, aux yeux des exilés, l'image ancienne de leur République abolie[11]. Sur leur vie et sur leurs biens, les fuorusciti s'engageaient à restaurer cette liberté de la patrie dont le souvenir remplit leurs discours et leurs lettres. La relation de l'entrée de Henri II à Lyon, en 1548, décrit le cortège somptueux de la nation florentine : chevauchoient les pages de la nation florentine, au nombre de six, lesquels furent suivis de la Seigneurie, au nombre de trente-sept ; au dernier rang, leur consul au milieu de ses conseillers[12].

Pour comprendre l'importance de la domination économique qu'exerçaient à Lyon et en France les fuorusciti de Florence, il faut s'arrêter dans la grande cité du Rhône, porte d'Italie, par laquelle passèrent les éléments d'échange entre la Péninsule et le royaume.

 

Lyon a retenu l'attention de ceux qui ont étudié la vie errante des humanistes et des réformés[13]. C'est que, pour user d'une locution familière, tous les chemins de la Renaissance mènent à Lyon, point de pénétration des civilisations italienne et française.

Entre la Saône et Fourvière s'élèvent encore aujourd'hui des hôtels que hantent les souvenirs florentins, demeures qui abritèrent une société éprise d'air, de lumière et de liberté. Grâce à des circonstances toutes favorables, une civilisation s'établit alors, au confluent du Rhône et de la Saône, avec des caractères de richesse et de finesse incomparables[14]. A l'origine de cette opulence matérielle et de cette culture de l'esprit, on reconnaît l'activité économique. Emboucheure de toutes nouvelles[15], sise au nœud des grandes routes de l'Europe centrale et voisine des pays francs, Lyon était en relations directes avec la Méditerranée, les bassins de la Seine et du Rhin, les cantons helvétiques, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne. Les routes les plus fréquentées, à la fin du XVe siècle et pendant le cours du XVIe, se trouvaient à l'Est du royaume. Le passage incessant de la Cour et des armées, qui se rendaient en Italie, avait entraîné dans cette région un courant plus intense, sans que la guerre, confinée au delà des monts ou au nord de la France, mît en péril les voyageurs. D'autre part, cette contrée, qui formait, entre le royaume et l'empire, un terrain où se combinaient les influences et les nations, offrait plus de liberté commerciale et même plus de tolérance intellectuelle que tout autre pays. Terre de passages et d'échanges, l'ancienne Lotharingie jouissait d'une sorte de neutralité, dans les luttes économiques et dans les disputes de l'esprit.

Trois grandes voies, venues du Nord, confluaient à Lyon. Depuis plusieurs siècles, les rois, pour gagner le sud-est de la France ou l'Italie, suivaient la route dite du Bourbonnais, qui, par Montargis, Gien, Nevers, Moulins, Roanne, L'Arbresle, arrive à Lyon, après avoir franchi les montagnes de Tarare et du Beaujolais : c'est le grand chemin le plus direct de Paris à Lyon, où passent les courriers rapides, les fonctionnaires, les soldats, parfois la Cour. Desservant des pays plus riches, la route de Bourgogne était fréquentée par des voyageurs nombreux, venus de Champagne, de Lorraine et des cités du Rhin, qui se dirigeaient vers le Sud, par la vallée de la Saône. De Mâcon, un grand chemin conduisait, par Bourg, en Savoie. Mais la plupart des voyageurs, marchands, ouvriers, artistes, humanistes, originaires des Pays-Bas et de l'Allemagne, descendaient jusqu'à Lyon, où aboutissait encore la grande route de Genève, que suivaient les Suisses et les Allemands de l'Est. De Lyon partait, au long du Rhône, une voie fort importante qui donnait accès au Languedoc et à l'Espagne, par Beaucaire et Aigues-Mortes[16]. Lyon, où s'arrêtaient tous les courriers, était la tête des routes nombreuses qui s'offraient pour gagner l'Italie. Le choix des voyageurs variait, selon le terme du voyage et surtout selon l'état politique et militaire de la Péninsule. Sous le règne de Henri II, on peut préciser les raisons qui déterminèrent la préférence pour tel ou tel chemin.

De France en Piémont, on se rendait sans difficultés, soit par le chemin ordinaire de Chambéry, — le Mont-Cenis, Suse et Turin —, soit par le Dauphiné, Grenoble, Briançon et Pignerol[17].

Beaucoup plus compliqué était l'itinéraire des Français qui voulaient gagner l'Italie centrale et les Etats de l'Eglise. De fait, la route qui, des vallées alpines, descendait vers le Sud, était barrée au Tanaro, et même au delà de Chieti, par les troupes impériales qui occupaient la Lombardie jusqu'à Bergame ; plus bas, les territoires génois et le pays de Nice étaient également soumis à l'influence espagnole. Dans les premières années du règne de Henri II, jusqu'à l'année 1551 où la guerre éclata de nouveau, les grands personnages, ambassadeurs ou cardinaux, obtinrent du lieutenant impérial, Don Ferrante Gonzague, le sauf-conduit nécessaire pour traverser cette zone dangereuse : en général, les voyageurs s'embarquaient sur le Pô à Turin et débarquaient à Plaisance. Mais la sécurité de ce passage fut toujours précaire : en pleine paix, les courriers y étaient arrêtés et les postes pillées. Don Ferrante maintenait difficilement ses troupes indisciplinées, et, du reste, selon son gré, il refusait le sauf-conduit aux personnages dont la mission lui paraissait hostile ou simplement désagréable.

Lorsque la crise de 1551 eut rallumé la guerre dans l'Italie du Nord, personne ne s'aventura plus clans cette région, sauf les courriers ou les espions qui traversaient les lignes impériales, déguisés. Les Français adoptèrent dès lors la seule route qui offrît quelque sécurité. Partis de Lyon, ils remontaient la vallée du Rhône par Genève jusqu'au Valais, s'engageaient dans le canton des Grisons, passaient à Coire, puis descendaient en Italie, par la Valteline, arrivaient au lac d'Iseo et à Brescia, enfin s'arrêtaient en Vénétie, pays neutre. Venise, porte d'Orient, formait un centre cosmopolite, en relations continues avec Lyon. De Venise, les voyageurs gagnaient facilement Ferrare et les villes de la via Emilia, Parme, Modène, Bologne, soumises à l'influence française ou cités pontificales. De Bologne, pour gagner Rome, l'itinéraire se compliquait encore. Jusqu'à l'année 1554, époque où Cosme de Médicis ouvrit les hostilités contre la République de Sienne et contre le Roi, la plupart des personnages français prirent la route de Toscane qui, par Florence, Poggibonsi, Sienne et Viterbe, arrivait à la Ville éternelle. Mais, déjà par goût, et plus tard par nécessité, beaucoup de voyageurs français choisirent la voie des Marches et de l'Ombrie, qui, par Cesena, Pesaro, Urbin, Pérouse et Orvieto — ou Spolète et Terni — aboutissait à la Campagne romaine. Lyon, la vallée du Rhône, les Grisons, la Valteline, la Vénétie, le Ferrarais, la Romagne et les Marches, tels sont les pays où le courant de France en Italie creusa son lit profond. Route de grande valeur militaire, par laquelle les Suisses, enrôlés au service du Roi, purent gagner directement les places du Parmesan et du Siennois. Les deux clefs stratégiques de ce passage étaient Venise et Ferrare.

L'itinéraire par la Suisse, que nous venons de suivre, offrait de graves inconvénients. Il prolongeait de beaucoup la durée du voyage : pour aller de Paris à Rome, le voyageur mettait un mois à grandes étapes, et deux ou trois mois à petites étapes. Les courriers pressés parcouraient le même trajet en dix ou quinze jours[18]. De plus, les gîtes de Suisse étaient dépourvus de confort et de salubrité. La peste y régnait à l'état endémique. La rareté des vivres était telle que les personnes, qui voyageaient en groupe, devaient, arrivées en Suisse, se séparer pour ne pas encombrer les villages trop pauvres. Denys Lambin, qui revint d'Italie, en 1552, à la suite du cardinal de Tournon, adressait à son ami Prévost une description pittoresque et désolée de la route des Grisons : Quel voyage ! Difficile, pénible, affligeant, surtout dans le temps où nous avons traîné parmi les rochers et les montagnes de la Rhétie[19]. Traverser de tels passages, c'était combattre son chemin, comme l'écrivait de Coire jean du Bellay, au mois de mai 1553[20].

Beaucoup plus courte était la voie de mer ; mais elle ne devint fréquentée qu'à partir de l'année 1553, époque où la Corse, conquise par les Français, offrit aux galères parties de Marseille ou de Toulon une escale et un refuge contre André Doria, les corsaires et la tempête avant d'atteindre Civita-Vecchia.

En tout cas, Lyon était le point de départ des routes d'Italie, capitale des courriers et des postes, où bruyaient les sonnailles des chevaux venus des grands chemins de l'Europe.

Le maître des postes du Roi pour l'Italie, pendant la plus grande partie du règne de Henri II, fut un personnage qu'on appelait Il Zoppo. Ce Zoppo étant tombé gravement malade, à l'automne de 1552, le maître des postes du pape, Mattheo Palmerini, dit Il Matthiolo, fit des démarches afin d'obtenir sa place ; mais Zoppo guérit[21]. Au reste, les dépêches importantes de Henri II et de ses représentants étaient confiées à des courriers spéciaux, agents politiques ou secrétaires, capables de commenter oralement les nouvelles sommaires qu'ils transmettaient. Les banques aussi mirent leurs courriers au service des princes : telle la maison Salviati, de Lyon, qui assurait la transmission des dépêches du duc de Florence[22]. Nous verrons quel rôle joua, dans ce service d'entremise, le banquier royal Albisse del Bene.

De sorte que Lyon exerça sur l'opinion publique, en France, en Italie et en Allemagne, une influence considérable. La plupart du temps, lorsque le gouvernement de Henri II voulut agiter l'Italie par des nouvelles vraies ou fausses, il les transmit au gouverneur de Lyon, qui par un vaste système de diffusion, les répandit dans toute la Péninsule[23].

 

Lyon ne fut pas seulement un carrefour. Cette ville devint la plus puissante place de commerce de l'Europe centrale.

Par une série d'ordonnances, Louis XI avait favorisé cet essor économique[24]. Dans la période qui s'étend de la guerre de Cent Ans aux guerres de religion, sous l'égide de la royauté plus forte, les bourgeois augmentent leurs richesses : de toutes parts affluent les marchands qui toujours désirent libertez [25]. A la fin du XVe siècle et au XVIe, les premières foires du royaume, même de l'Europe, sont les foires de Lyon[26]. La naissance des industries nouvelles et l'activité des échanges provoquent le développement extraordinaire de la banque, commerce cosmopolite. Les banquiers, qui offrent à tous, et particulièrement aux rois, les moyens d'action, enserrent dans un réseau de comptoirs le trafic de l'Europe et, jouant de leur puissance, mêlent la politique au négoce. Au cours du moyen âge, les Lombards et les Gênois avaient été les maîtres du change au XVIe siècle, la domination financière des Florentins est absolue, et le centre s'en établit à Lyon[27]. Siège du syndicat international des banquiers italiens et allemands, fondamento del danaro, dit un Vénitien[28], cette ville étend son action économique à tous les comptoirs de l'Occident, Florence, Rome, Venise, Nuremberg, Anvers, Bruges, Londres. Et, par une conséquence ordinaire, tandis que les Fugger tiennent en quelque mesure sous leur volonté les destinées de l'Allemagne, le banc de Saône à Lyon possède des créances assez fortes sur la couronne de France pour marquer de son empreinte la politique royale[29].

On trouverait une preuve de la force des banquiers florentins de Lyon dans la résistance qu'à plusieurs reprises ils opposèrent aux attaques de la royauté même. Un jour, Charles VIII, pris de colère, avait chassé les employés du comptoir des Médicis[30]. En 1521, François lei prétendit se venger sur la banque des déboires de la politique royale en Italie, et il fit jeter en prison les membres principaux de la nation florentine de Lyon. Mais ces représailles se brisèrent contre la nécessité financière : le 1er mai 1535, un édit révoquait toutes les mesures fâcheuses. D'un progrès constant, jusqu'aux guerres de religion, s'accrut l'influence de la banque florentine[31].

Sur ce terrain riche, fleurit la civilisation lyonnaise de la Renaissance, née d'une culture originale que n'avaient créée ni les livres ni les savants, mais la vie sociale même par les rapports qu'entretenaient des hommes venus de tous pays, dans le confort du luxe italien, parmi les fêtes qu'ornaient de grandes dames lettrées.

Cette évocation sommaire n'est pas inutile pour montrer de quelle puissance les banquiers lyonnais, dont la plupart étaient fuorusciti ou parents de fuorusciti, soutenaient le crédit de leurs compatriotes employés dans la politique ou dans l'armée.

La guerre italique absorbait sans cesse des sommes énormes : le Roi ne pouvait vaincre définitivement qu'en épuisant les ressources de son adversaire. Vostre Majesté doibt prendre argent de tous coustez, et en Italie et en France, quand il s'en trouve, et faire soulier vostre ennemy de la guerre s'il ne veult recongnoistre[32]. Ces conditions favorisent l'influence de la banque florentine et, par corrélation, renforcent la situation des fuorusciti à la Cour[33].

Sous Henri II, les banques royales sont la banque Gadagni, dirigée par Albisse del Bene, et la banque Strozzi, qu'administre Roberto. Ces deux maisons, 'a la fois florentines, vénitiennes et lyonnaises, émettent et garantissent les emprunts de la couronne[34].

Albisse ou Albertaccio del Bene, premier facteur de la banque Gadagni[35], fut l'agent financier de Henri II dans les entreprises italiennes. C'était un Florentin, qui avait épousé une Florentine, Lucrèce Cavalcanti, dame d'honneur de Catherine de Médicis. Créé par le Roi général et surintendant des finances hors du royaume, il remplit surtout les fonctions importantes d'intermédiaire entre le gouvernement et la banque internationale. Outre son frère, Alberto, qui résidait, semble-t-il, en Italie[36], Albisse délégua des représentants dans toutes les grandes villes de la Péninsule. La raison Gadagni-Del Bene, en concurrence avec la banque Capponi, négociait facilement les lettres de change sur l'Italie, et son crédit offrait des ressources commodes aux ambassadeurs et agents royaux[37]. Les frères Nasi, israélites florentins, dirigeaient les opérations financières de la banque Gadagni à Venise, sous la haute administration d'Albisse del Bene. Le chef de la maison Nasi, Francisco, représentait en Vénétie à la fois les intérêts privés et les fonctions publiques d'Albisse et devint en quelque sorte le caissier de la politique royale : pendant les guerres de Parme et de Sienne, il tint en ses mains le sort des armes françaises[38]. Ce Francisco était, au témoignage du trésorier Du Gabre, un homme de grand crédit et un homme de bien, qui a toujours fourni les deniers pour le Roi en Italie et a secouru les ambassadeurs[39].

On ne saurait s'exagérer la puissance et le prestige de ces hommes de finances. Les marchands, qui prêtaient à la couronne, prenaient leurs sûretés sur Albisse del Bene, préférant sa caution aux promesses du Roi. Veullent, écrivait à Henri II le trésorier des armées d'Italie, qu'ils n'ayent traiter que avec le général d'Albenne en son propre et privé nom, et qu'il prenne par delà de vous les sùretés qu'il advisera, se voulant bien lier à luy seul de la seureté de leurs deniers, pour la bonne réputation en quoy ilz le tiennent d'estre homme de bonne foy et qui sçait conduire ses affaires[40]. A l'heure où tous les princes italiens, le duc de Ferrare, les Farnèse, le pape lui-même, mettaient leur amitié à l'encan, les deniers étaient plus efficaces que les armes. Les négociations qui, pendant les premières années du règne, entourèrent le projet de ligue entre Paul III et Henri II, offrent ainsi le spectacle d'un marché d'affaires, dont les banquiers de Lyon et de Rome, par l'entremise d'Albisse del Bene, mènent la discussion cauteleuse, dans l'ombre des hommes politiques[41].

En dehors de la préparation des grands emprunts, le service et la répartition des deniers royaux en Italie furent assurés par une administration régulière. Le Piémont, par suite de la naturalisation qui avait incorporé les pays subalpins au royaume, ne ressortissait pas à cette administration.

Provenus soit du trésor de l'Epargne, soit des banques, après la conclusion d'un emprunt, les deniers étaient voiturés, par la route des Grisons, de Lyon à Venise, où la banque Nasi les recevait. A Venise, résidait également un commis royal, qui fut longtemps un nommé Bohier, lequel avait mission de contrôler les deniers et de les faire porter à Ferrare, où était établi le trésorier général des armées d'Italie, Dominique du Gabre, évêque de Lodève. Celui-ci répartissait les sommes reçues, au moyen de convois de cavalerie, entre les principaux postes français, La Mirandole, Parme et plus tard Sienne[42]. Sous le règne de Henri II, l'ambassadeur de France à Venise eut ainsi, dans ses attributions, une importante partie financière ; il advint, du reste, qu'un seul titulaire fût en même temps trésorier à Ferrare et ambassadeur à Venise[43]. Lyon, Venise et Ferrare, nœuds de la route de France en Italie, telles sont les trois sources des finances royales, qu'administrent en commun les officiers du pouvoir central et les banquiers. Pour les deniers non affectés aux armées, mais destinés aux ambassadeurs ou agents politiques, les opérations étaient d'ordinaire plus simples .et se faisaient par lettres de change[44].

Ces notions permettent d'entrevoir comment la banque florentine pouvait, à son gré et sans risques, exciter ou paralyser le nerf de la politique royale. Pour suivre avec clairvoyance les courbes de cette politique et pour comprendre l'influence qu'acquirent, dans l'histoire de ce règne, les bannis de la Péninsule, influence qui paraît, d'abord, disproportionnée, il faut garder sans cesse présente l'image de la Babel lyonnaise, où se fondaient, pour la réalisation de desseins politiques, les richesses et les passions des exilés.

La banque Gadagni-Del Bene, bien que solidaire des fuorusciti, était surtout une banque d'affaires. Par contre, la maison Strozzi fut une banque toute politique, étroitement inféodée au parti florentin de la cour de France. C'est la constitution de ce parti que nous devons maintenant étudier.

 

Dès le début du règne de Henri II, le groupe des Florentins de la Cour apparaît compact, résolu et actif. Les fuorusciti épanchaient alors leur haine contre Cosme de Médicis, le tyran de Florence, en des réunions intimes. La synagogue des réfugiés — c'est le mot de l'ambassadeur toscan — siégeait de préférence en la maison du célèbre poète Luigi Alamanni[45].

Homme de cour déjà expert, protégé depuis longtemps par le cardinal de Ferrare, maître d'hôtel de la Reine, bien vu du nouveau Roi, beau de corps et la voix suave[46], Luigi forma un centre d'attrait pour ses compatriotes. Aussi bien, son crédit grandissait chaque jour dans l'entourage de la Reine : il devint le conseiller, le porte-parole et l'agent intime de Catherine de Médicis, de sorte que le nonce put le signaler à la Curie parmi les personnages dont il convenait de capter la bonne grâce. Son crédit parut bien, lorsqu'il publia Girone il Cortese, poème épique dédié à Henri II : en l'année même de la publication, 1548, les princes italiens s'empressèrent de lui accorder un privilège de librairie pour leurs Etats[47], et le pape Paul III décerna cette faveur au poète, en considération des services qu'il rend à la Reine[48]. L'épouse d'Alamanni, Maddalena Bonajusti, jeune Florentine qui devint, en 1552, dame d'atour de Catherine de Médicis, était, au dire de l'agent Ricasoli, fine d'esprit et mauvaise langue : confidente de la Reine, elle dépeignait sinistramente à celle-ci le gouvernement et la politique de Florence. L'ambassadeur de Cosme représente en termes fort vifs la maligne passion de ces exilés, qui exerçaient à la Cour une influence néfaste pour son maître. Lui-même se rendit un jour chez la Reine et la mit en garde contre les mauvais propos[49].

Luigi Alamanni fut le plus insinuant des fuorusciti et l'orateur permanent de son parti. Mais son caractère montre plus de souplesse que de droiture : parmi les traverses qu'éprouvèrent ses compatriotes, il maintint sa fortune sans trouble, et, au carnaval de 1555, tandis que s'effondrait en Italie l'armée des fuorusciti, la cour de France applaudissait, à Fontainebleau, une comédie du poète toscan, Flora[50]. Alamanni représente une modération qu'on trouve rarement chez les exilés florentins, hommes de violence par origine. Aussi bien ne fut-il qu'un instrument au service des chefs de son parti.

La direction, toute la vie de cette faction, appartint aux Strozzi, famille illustre que Florence avait rejetée dans les orages de son gouvernement ; elle incarna, avec une fureur virulente, la haine des exilés contre Cosme de Médicis, le tyran usurpateur qui avait rendu leur patrie prisonnière et esclave[51].

Le chef héroïque de cette famille avait été Filippo Strozzi, marié, en 1508, à Clarisse, fille du banni Pierre de Médicis. L'histoire florentine, pendant trente années du xvi' siècle, est pleine des conspirations et des tentatives désespérées de cet homme qui périt dans les cachots de sa patrie, en décembre 1538[52]. Fra Giuliano Ughi, en la Cronica di Firenze, a tracé le portrait de Filippo : Il fut, dans sa vie, l'homme le plus heureux et le plus fortuné. Il était beau, intelligent et docte, musicien et écrivain très notable. Mais il fit toujours peu de compte de Dieu et de la vie chrétienne, étant tout adonné aux délicatesses et aux sensualités de l'amour[53]. Après les Fugger d'Augsbourg, Filippo était, selon Rabelais, le plus riche marchand de la Chrestienté[54]. Clarisse de Médicis, son épouse, mérite de figurer clans la lignée des femmes florentines qui furent des mères supérieures, les Isabella Sacchetti, Maria Salviati, Catherine Sforza. Elle prit soin de l'enfance de Catherine de Médicis, sa nièce, alors que la jeune duchessina vivait orpheline en Toscane[55].

Aux Strozzi, Catherine ne dut pas seulement une seconde mère, elle leur dut encore sa dot. Lorsque Clément VII voulut doter magnifiquement sa nièce, fiancée au second fils de France, il eut recours à la banque Strozzi, qui d'un coup paya quatre-vingt mille ducats[56].

Rebelles au duc de Florence, les fils de Clarisse et de Filippo Strozzi passèrent au service des Valois. Quatre d'entre eux acquirent, sous le règne de Henri II, une fortune et une influence considérables : ce furent Piero, Leone, Roberto et Lorenzo, doués de qualités et munis de moyens divers, mais tous animés d'une passion égale. Chacun d'eux, dit leur ennemi Montalvo, fut grand dans sa carrière[57].

Dispersés en Italie, au début de 1547, les Strozzi s'empressèrent de rejoindre la cour de France, lorsque leur parvint la nouvelle du trépas de François Ier. Le 28 mars 1547, Piero, averti de la maladie du Roi, quittait Venise à la hâte, en route pour Paris[58]. Roberto et Lorenzo partirent de Rome le 2 juillet, emportant des joyaux et des œuvres d'art, présents destinés à la Reine[59]. L'épouse même de Piero, accompagnée d'une escorte de vingt personnes, parmi lesquelles se trouvaient Cecco dei Pazzi, Vincenzo Taddei, Gino Capponi, Vico dei Nobili et Luca degli Albizzi, quittait Venise pour la France, à la fin d'octobre[60].

 

Piero Strozzi, par l'éclat de son existence et la vigueur de sa personnalité, prit, devant ses frères, le relief d'un héros.

Cousin et favori de la Reine, marié à Laudamina de Médicis qui était elle-même proche parente de Catherine, il tira de cette situation la force dans ses entreprises. La Reine entoura d'une tendresse fidèle et attentive ce condottiere brillant dont elle fit un maréchal de France. Elle l'aime et le favorise autant qu'il est possible, écrira Soranzo[61]. Et Brantôme : La reyne l'aymoit et son âme ettout[62].

Un panégyriste, qui fut le témoin de sa vie, dessine en ces termes la silhouette pittoresque de ce personnage dont les ardentes passions se revêtaient d'orgueil et de fatuité : Il avait coutume d'aller vêtu très élégamment, et par ce qu'il semblait avoir la tête petite à proportion du reste de son corps, il portait toujours des chapeaux hauts et ornés ; il s'appliquait par des artifices à rendre ses jambes plus modelées, et chaussait des bottes hautes en pied pour paraître plus grand. D'une agilité et d'une adresse extraordinaires, il s'adonnait avec furie aux jeux et exercices tant militaires que chevaleresques. Ce fut un grand et beau parleur, et, dans son discours, il prenait plaisir à faire preuve de subtilité et d'esprit. Fertile en ressources, il était résolu, courageux et patient ; aussi, bien qu'il fût malheureux dans ses entreprises, ne se laissa-t-il jamais abattre. Prompt et diligent à exécuter les choses résolues, il était surtout téméraire, étourdi et altéré de gloire[63].

Trait curieux, l'esprit de cet homme, capricieux, passionné et versatile comme le Diable[64], possédait la culture et les goûts d'un humaniste. Il lisait et portait constamment sur soi les Commentaires de César. On le voit, en 1558, dans les bruits de la guerre, faysant la diète et s'addonnant à l'étude des lettres grecques et de filosophie et à la traduction des Commentaires de César[65]. Nous savons, en effet, par Brantôme[66], qu'il traduisit l'œuvre de César de latin en grec, et que Ronsard et Daurat goûtaient assez son grec pour le comparer au latin de l'original. Piero réunit une belle librairie d'ouvrages grecs : la plupart de ses livres provenaient de la bibliothèque du cardinal Nicolà Ridolfi, neveu de Léon X, qui mourut au début de l'année 1550. Après la mort de Strozzi, cette bibliothèque fut achetée par la reine Catherine de Médicis et transportée à Chenonceau[67]. Enfin, dans le Borgo de Rome, près du pont Saint-Ange, Piero possédait un palais qu'avec l'aide de son frère Roberto, il transforma en un véritable musée d'antiquités et d'armures[68].

La marque essentielle de son caractère était le goût de la violence. Il remplit la Cour et les camps du bruit de ses querelles ; ses haines étaient mortelles. Il provoquait à la légère des incidents graves : du temps de François Ier, il s'était brouillé avec Brissac[69] ; de même une dispute maladroite lui attira l'animosité du cardinal de Ferrare, qui ne cessa de le détester. En octobre 1548, il soutint à Paris une sérieuse querelle avec un capitaine Gualtieri, dont il avait calomnié la conduite militaire en Piémont : Piero dut se rétracter, non sans provoquer les risées de ses ennemis[70]. En juillet 1552, on l'accusa d'avoir fait assassiner, à Parme, par sa créature Masino del Bene, le comte Lorenzo Tiberti, familier des Farnèse, pour se venger d'un simple démenti[71]. Le gouverneur de Grosseto, Orsini, se plaignait au connétable, en 1555, que Strozzi usât à son égard de faicts et paroles convenables à varlet[72]. Aussi Piero souleva-t-il autour de lui des haines dangereuses. En 1548, comme il s'embarquait à Brest, parmi les salves d'arquebuses, une volée de projectiles atteignit sa galère et tua deux personnes à ses côtés : on ne douta pas que les coups ne lui fussent destinés[73]. Brantôme le dépeint comme un furieux.

D'ailleurs, franchement athée, Piero offensait la religion de ses contemporains. Jules III lui reprochait de n'avoir jamais ouï la messe, de ne s'être jamais confessé, de n'être jamais entré dans une église, sinon peut-être pour assister aux cérémonies de la Cour[74]. Du vivant de François Ier, Strozzi avait été l'amant de Mme de Bonneval, personne fort liée avec Mme d'Etampes, et les médisants accusèrent le célèbre fuorescito d'avoir mêlé son intérêt à ses amours[75]. Piero tirait de sa fureur une audace prête à tout : traqué par les Impériaux et par les agents de Cosme de Médicis, haï souvent de ses subalternes et de ses pairs, il bravait le danger, poursuivait ses desseins, toujours en route, traversant l'Italie, déguisé et rasé[76].

A l'avènement de Henri II, rainé des Strozzi pouvait déjà s'enorgueillir d'une vie pleine de périls et d'aventures. Né en 1510 à Florence et appelé Piero du nom de son aïeul maternel, il avait été poussé à la cléricature par son père que tentait la fortune ecclésiastique des Médicis. Mais il montra bientôt peu de goût pour l'Eglise. De ce premier âge il garda une forte culture littéraire, résultat, dit-on, des leçons de Marcello Cervini de Montepulciano, qui plus tard devint pape sous le nom de Marcel II. En 1529, Piero étudiait à l'Université de Padoue. Dès lors, il prit part à toutes les conspirations, à tous les coups de force qui ensanglantèrent la vie florentine[77]. Après quelques velléités de suivre la fortune impériale, il vint à la cour de François Ier, où l'avait précédé sa cousine, Catherine, épouse du duc d'Orléans et bientôt Dauphine. Brantôme a peint l'admiration du Roi et de son entourage, lorsqu'arriva, au camp de Marolles, Piero Strozzi, avec la plus belle compagnie qui fut jamais veut de deux cens harquebuziers à cheval, les mieux montéz, les mieux doréz et les mieux en poinct qu'on oust sceu voir[78]. Le condottiere florentin amenait, dans sa troupe, des capitaines vaillants, le terrible Sampiero Corso[79], le barbu et grand chevalier Jehan de Turin[80], et d'autres aventuriers venus de Florence, de Ferrare et de Calabre. Madame la Dauphine s'en cuyda perdre de joie, pour voir ainsi son cousin parestre et faire un si beau service au Roy.

Du vivant de François Ier, Piero ne prit jamais de crédit réel à la Cour : son activité fut alors tout italienne et, pour partie seulement, inspirée de la politique du Roi. On le vit combattre à La Mirandole et en Piémont : il mena en héros l'assaut de Barges et la prise de Racconigi[81]. Mais sa passion aventureuse était toujours orientée vers Florence. C'est après la trêve de Nice que, séjournant à Venise où résidaient, parmi une importante colonie de fuorusciti, la plupart des membres de sa famille, il épousa Laudamina de Médicis, sœur de Lorenzo, mariage qui resserra plus fort ses liens de parenté et d'amitié avec la dauphine Catherine[82]. L'avènement de celle-ci au trône des Valois donna à la fortune de Strozzi un éclat et à ses efforts une efficacité imprévus.

Piero, venant d'Italie, arriva à la Cour, le 8 avril 1547[83]. Il était assuré de trouver bon accueil auprès du nouveau Roi : Henri l'aimait depuis longtemps[84]. En effet, le chef des fuorusciti fut créé gentilhomme ordinaire de la Chambre[85], pourvu d'une pension de deux mille livres[86], portée plus tard à quatorze mille livres[87], et nommé capitaine général de l'infanterie italienne[88]. Seul, avec Coligny, comme par une sorte de privilège, Strozzi reçut le collier de l'Ordre de Saint-Michel au sacre de Henri II[89], et cet honneur fut pour lui le principe d'une exaltation nouvelle[90]. Dès son retour, il avait acheté du trésorier Buonaccorsi une maison à Paris, dans le faubourg Saint-Germain : c'était montrer qu'il fixait désormais sa fortune dans la nouvelle Cour[91]. Auprès des souverains, il jouit d'un crédit singulier que ne purent ruiner ni ses ennemis nombreux, ni ses propres fautes.

Pourtant, dans les années 1547 à 1550, période de préparation, sa fortune, à plusieurs reprises, parut compromise. Il montrait trop vite ses passions personnelles et jouait sans prudence de sa faveur récente. Lorsqu'à l'automne de 1547, l'attention du gouvernement royal se porta vers l'Italie, Strozzi proposa des entreprises d'exécution si lointaine qu'elles ne furent même pas considérées[92]. Mais le Roi l'écoutait volontiers, l'estimant comme homme instruit des choses d'Italie. Du reste, on se rendait compte que ses desseins étaient nourris de passion et d'ambition[93]. Henri II lui garda une grande faveur, utilisant les capacités et le courage militaires du soldat, sans adopter les visées téméraires du fuoruscito, jusqu'au jour où, grâce à des accidents propices et aux intérêts d'autres partis, l'illustre Florentin put entraîner les forces françaises à la poursuite de ses propres chimères.

En dépit des obstacles qui se dressèrent d'abord devant la réalisation de ses grands projets politiques, Piero se targua tout de suite de sa nouvelle fortune. Ricasoli racontait à son maitre, au mois de mai 1547, qu'ayant rencontré Strozzi dans l'antichambre de la Reine, il avait reçu de lui des confidences pleines de fatuité sur le crédit qu'on lui accordait, crédit qui, au dire du même Strozzi, réparait la défiance dont l'avait entouré François Ier[94].

De fait, mêlé aux principaux événements de la Cour, entre autres au fameux duel de Jarnac, — c'est lui, dit-on, qui donna à La Châtaigneraie un conseil fâcheux qui le perdit[95] —, Piero reçut, au printemps de 1548, le commandement de l'expédition d'Ecosse[96]. Quelques jours auparavant, il avait participé à l'arrestation du marquis de Saluces, rebelle au Roi. Un familier de don Ferrante raconte à Cosme de Médicis qu'au moment où Strozzi, en compagnie du prince de Melfi et de M. de Termes, pénétra, à Revello, dans la chambre du marquis de Saluces, celui-ci était encore au lit : Lève-toi, porc cria Strozzi. On parlait alors de donner l'Etat de Saluces au chef des fuorusciti[97].

L'aîné des Strozzi atteignit le plus haut degré de sa fortune pendant la crise de 1554 : un moment, il parut devoir réaliser le rêve passionné, qu'il avait fait partager au Roi. Le 20 juillet de cette année, Henri II lui donna la charge de maréchal de France. Mais la chute ne tarda pas[98]. Il se releva, dans les dernières années de ce règne, comme meurtri et sans flamme, et fut tué, en 1558, au siège de Thionville, d'une harquebusade au dessus du tétin gauche, M. de Guise parlant à luy et ayant l'une des deux mains sur son espaule[99].

Le magnifique Piero, champion des fuorusciti[100], fut le cauchemar des diplomates et des pacifiques, dont il troublait sans cesse les savantes combinaisons. Il souleva surtout la haine des robins et des cardinaux. Strozzi, écrivait l'évêque de Cortone, en 1547, est, au dire de tout le monde, si vain, si orgueilleux et si encombrant qu'il n'y a homme en cette Cour, Italien ou Français, qui veuille en entendre parler. Il est considéré comme doué de si peu de valeur et de si peu de prudence qu'on prévoit sûrement qu'il tombera à la première rencontre, sous la poussée de ses ennemis qui sont nombreux et influents, et, entre autres, du cardinal de Ferrare qui le hait à mort[101]. L'évêque de Cortone exagérait, par malveillance, l'hostilité dont était entouré Piero : celui-ci fut soutenu par le Roi et par la Reine, avec une extraordinaire complaisance, et il trouva toujours, pour exciter ses passions, les hommes de guerre français et les fuorusciti italiens.

L'homme qui le craignit et le haït le plus fut assurément le duc de Florence. Faire surveiller et noter les moindres mouvements de ce furibond Strozzi, c'était le souci constant de Cosme de Médicis. Les agents du tyran, dispersés dans toutes les Cours, avaient pour principale mission de dresser l'itinéraire du chef des fuorusciti florentins. Parmi les serviteurs de Piero, le duc entretenait un espion, prêt à commettre un assassinat au premier signe[102]. Strozzi justifiait de telles précautions : toute sa vie fut animée par la haine du Médicis. Des témoins racontent qu'un jour, en Piémont, il fit tirer des arquebusades par ses soldats sur un objet qui figurait le duc de Florence[103]. Aussi bien, il fut l'âme damnée de la politique italienne de Henri II. Par son passé, plein de rebellions et de violences, par sa réputation d'aventurier sans scrupules, par ses querelles bruyantes, par les discordes qu'il suscita au sein même du parti français en Italie, par son entourage formé de mercenaires sans aveu que ses richesses lui permirent de recruter, il donna à toutes les entreprises où il fut mêlé, dans la Péninsule, une apparence :de mauvais aloi qu'on trouve indiquée dans les correspondances des petits princes et jusque dans les lettres de ses propres serviteurs[104]. La force de ce condottiere vint de ses passions obstinées : il était vraiment de ces caractères dont on a dit qu'ils ont une suite enragée.

 

Bien que Piero Strozzi ait dépensé la plus grande part de son énergie dans les armées et sur les champs de bataille, il exerça, au Conseil du Roi, une action qui, pour difficile qu'il soit de la préciser, n'apparaît pas moins considérable. II ne fut pas membre du Conseil avant 1558, il est vrai, mais il assistait fréquemment, lorsqu'il se trouvait à la Cour, aux audiences secrètes des ambassadeurs, voire aux délibérations[105]. D'ailleurs, une foule d'agents défendaient sa réputation et ses projets. Lui-même, dès qu'une ombre menaçait sa fortune, se répandait en lettres, démarches, voyages et intrigues, sûr d'être toujours soutenu ou relevé par sa grande amie, la reine Catherine. La plupart des serviteurs on lieutenants de Strozzi étaient des hommes réputés. Son secrétaire, Ludovico Angelleti, ne mérite qu'une mention[106]. Le conseiller, l'ami et le principal agent de Piero fut Tomaso del Vecchio. Gentilhomme ferrarais[107], employé par Hippolyte d'Este, en 1541, à l'administration de l'archevêché de Lyon[108], passé ensuite au service du dauphin Henri dont il était devenu le factotum[109], Tomaso reçut, à la mort de François Ier, le titre de conseiller et aumônier ordinaire du Roi : le nouveau souverain le combla de dons en argent et le pourvut de l'abbaye de Haute-Fontaine[110]. Pendant les années 1547 et 1548, ce personnage, mal connu, apparaît comme un confident secret de Henri II, ayant assez d'influence pour inspirer le choix des ambassadeurs que le gouvernement envoyait en Italie[111]. Au mois de septembre 1547, il accompagna Charles de Lorraine et lui servit de guide dans la Péninsule[112]. Puis, au printemps de 1548, Del Vecchio fut sur le point d'obtenir la charge de secrétaire résidant de l'ambassade de Rome[113]. Mêlé fort activement aux négociations qui précédèrent le mariage d'Anne d'Este avec François de Guise[114], il revint à la Cour et y joua un rôle important jusqu'à la fin de l'année 1549[115]. Le 23 novembre, à l'occasion du conclave qui suivit la mort de Paul III et pour régler ses affaires privées, il se rendit en Italie[116]. A partir de cette époque, il figure dans toutes les guerres, en Lorraine, à Metz et en Italie, aux côtés de Strozzi. Très intelligent et très averti, possédant la confiance du Roi et la faveur des Guises, d'ailleurs souvent tracassé par Montmorency qui le détestait, Tomaso del Vecchio était d'un dévouement sans limites au chef des fuorusciti, se montrait comme sa créature et maniait tout sous lui[117].

Le lieutenant militaire du magnifique Piero, dans les guerres italiennes, fut Cornelio Bentivoglio[118] : on le regardait comme l'âme de Strozzi[119]. Né d'une famille qui avait ses racines à Bologne et à Ferrare, Cornelio, failli et homicide, s'était réfugié en France et engagé dans la maison du dauphin Henri[120]. C'est lui qui, durant l'hiver de 1546, jeta un coffre par une fenêtre du château de La Roche-Guyon et tua le jeune vainqueur de Cérisoles, François, comte d'Anguien[121]. Chassé de la Cour à la suite de cet acte brutal, Cornelio retourna en Italie, où il attendit l'avènement de Henri II. Le 8 avril 1547, il arrivait à Paris avec Piero Strozzi. Piero se rendit le premier à Saint-Germain et demanda au nouveau Roi de pardonner à Cornelio[122]. Lorsque Bentivoglio parut devant Henri II, le jeune souverain l'embrassa et le baisa deux fois, le créa gentilhomme de sa chambre et le pourvut d'une pension de six cents livres[123]. Le chevalier noir possédait de grandes qualités militaires : Lorenzo Contarini le nomme colonello reputato, buon soldato, et Sozzini, dans son fameux diaire des révolutions de Sienne, compare la présence de Bentivoglio parmi les troupes à l'huile qui ravive soudain une lampe presque éteinte[124]. Il participa non sans éclat aux guerres de Parme et de Sienne, et jouit d'une grande influence parmi les fuorusciti qui servaient le Roi ; lui-même avait recruté de nombreux partisans à Bologne et dans les régions voisines de la Toscane[125]. Strozzi et Bentivoglio étaient de nature trop foncièrement violente pour ne pas se quereller entre eux : à Sienne, en janvier 1554, ils se disputèrent rudement au sujet du cardinal de Ferrare. Cornelio, comme Piero, amoindrit, par sa réputation fâcheuse, l'honneur des armes royales en Italie. L'histoire de ces deux hommes, sous le règne de Henri II, fut souvent commune, et leur action sur la politique, à des degrés divers, offrit le même caractère.

La clientèle de Piero Strozzi fut mêlée d'individus fort suspects. Nous connaissons quelques-uns de ses conseillers, outre Tomaso del Vecchio et Bentivoglio. Les Del Bene — Masino et Baccio — vécurent dans sa famiglia. Masino, nous l'avons dit, assassina pour lui plaire le comte Tiberti. Baccio était plus civil : en faveur auprès de la Reine et gendre de Giuliano Buonaccorsi, on l'appelait aussi l'âme de Strozzi ; doué, au dire de l'agent florentin, d'un cervello acutissimo, il étudiait avec amour Machiavel et Lucrèce[126]. Le principal confident de Piero, pendant la guerre de Sienne, fut Flaminio Orsini da Stabbia, son beau-frère[127]. Strozzi attirait, dans son entourage, les hommes violents : par exemple, en mai 1547, un capitaine Moretto de Massa, qui avait tué le camerlingue de sa ville natale et qui projetait d'attenter à la personne du cardinal Cibo, se jeta dans les bras de Piero et fut introduit par lui à la cour de France[128]. Enfin, il faut nommer l'agent qui, en 1552, pendant les préliminaires de la révolution de Sienne, servit d'intermédiaire entre les fuorusciti florentins et les Siennois, le capitaine Niccolo Franciotto de Lucques. Les émissaires de Cosme transmettaient alors son signalement : Petit, maigre, barbe clairsemée et châtaigne, mais doué d'une grande éloquence et très accrédité auprès des Siennois[129].

En ses propres frères, comme il était naturel, Piero Strozzi trouva les plus dévoués auxiliaires.

 

Le cadet de Piero, Leone Strozzi, prieur de Capoue, mérite toute estime. Plus jeune de cinq ans, il avait étudié, comme son frère aîné, à l'Université de Padoue[130]. Puis entré dans l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, devenu commandeur et prieur, il acquit sur mer une maîtrise bientôt reconnue. La haine des Médicis usurpateurs le poussa au service de François Ier. A l'avènement de Henri II, Leone fut nommé gentilhomme de la chambre et capitaine général des galères du Roi dans les mers du Levant et du Ponant[131]. Il réorganisa et illustra la marine française, où il combla le vide produit jadis par la défection d'André Doria. C'était un homme d'une intelligence ferme et sensée, de tempérament plus pondéré que Piero[132]. Ses ennemis eux-mêmes reconnaissaient cette valeur et François Ier avait préféré Leone à son aîné[133].

Le second des Strozzi semblait destiné à une glorieuse fortune. Ses victoires maritimes donnèrent de l'éclat aux premières années du règne de Henri II. En 1548, Leone enleva d'assaut Saint-Andrew en Ecosse, après quatorze jours de bombardement naval, et cet exploit lui valut d'être institué garde du sceau d'Ecosse par Marie de Lorraine[134]. Mais une malheureuse aventure brisa le cours de sa carrière. Comme tous les fuorusciti, Leone exécrait Montmorency, haine que justifiait particulièrement, à ses yeux, la maladresse et l'esprit routinier du connétable, reconnu depuis longtemps pour le fléau de la marine royale. Tombé gravement malade à Briançon, au mois de septembre 1548, le prieur de Capoue, avec une expansion tout italienne, fit transmettre au Roi ses dernières recommandations par Antoine de Bourbon[135]. Sire, déclarait en substance Leone Strozzi, ne laissez point tant d'autorité au connétable ; je sais, par expérience, combien son action est néfaste à vos intérêts. Par fortune, le prieur de Capoue guérit, mais Montmorency lui voua une haine terrible[136]. Nous verrons les suites tragiques de cet incident[137].

L'un des fils de Piero servit, dans la marine, sous les ordres de Leone Strozzi, et fut blessé, en août 1552, au siège de Tripoli[138].

L'administration de la banque paternelle fut confiée par les enfants de Filippo à leur frère, Roberto Strozzi. Héritier des aptitudes commerciales de son père, Roberto consacra un dévouement de toutes les heures aux intérêts de sa famille et à la cause des fuorusciti. Il résida peu à la cour de France, bien que Henri II eût créé gentilhomme de sa chambre[139]. Le soin des affaires le retenait le plus souvent à Venise et à Rome : dans la première de ces deux villes se trouvait le siège principal de la banque Strozzi, qui faisait surtout des opérations avec le Levant. Les richesses que Roberto Strozzi mit à la disposition de ses aînés donnèrent aux entreprises de ceux-ci une efficacité singulière. Lui-même acquit, à Rome, une situation politique considérable et servit à plusieurs reprises d'intermédiaire entre Henri II et les Farnèse[140]. Hospitalier et libéral, toujours prêt à séduire les ministres par des offrandes, généreux à l'égard des agents royaux qui étaient souvent besogneux, le grand banquier fuoruscito accompagnait ou suppléait son frère aîné dans les missions difficiles[141]. A la fin de juin 1549, les deux filles de Roberto quittèrent Rome pour se rendre à la Cour ; elles prirent rang dans la compagnie de Catherine de Médicis[142]. Roberto Strozzi combla de présents le Roi et ses conseillers : à Henri II il offrait surtout des chevaux, à Montmorency il envoya, le 29 avril 1550, les Esclaves de Michel-Ange[143].

On n'aurait, en effet, qu'une idée incomplète de la puissance des Strozzi, si l'on ne connaissait la source de leurs moyens d'action. Ils possédèrent des richesses considérables, et le Roi tira d'eux beaucoup plus de deniers qu'il ne leur en donna. La banque Strozzi avait, nous l'avons dit, une succursale importante à Lyon, établie dès le début du XVIe siècle ; elle subsista, en France, jusqu'à l'époque de Henri IV et étendit son commerce à l'Océan[144]. L'union qui associait les marchands de Lyon et les fuorusciti, dispersés à la Cour et aux armées, n'apparaît nulle part plus saillante que dans la vie de ces Strozzi, tour à tour banquiers, conspirateurs et soldats.

On trouve ce même goût de l'aventure chez le plus jeune des frères Strozzi, Lorenzo. Destiné à ('Eglise, il devint, selon sa nature, un clerc remuant. Son jeune âge lui valut de la Reine une tendre affection. Titulaire de plusieurs abbayes en Piémont et de celle de Saint-Victor de Marseille, il reçut, à l'avènement de Henri II, l'évêché de Béziers et la promesse de la pourpre. Le Roi lui-même prit la peine d'écrire à Paul III et au cardinal Farnèse, pour demander le chapeau de Lorenzo, des lettres que porta Charles de Guise, en décembre 1547[145]. Pendant plusieurs années, la reine Catherine, Piero et Roberto Strozzi, le duc Horace Farnèse et l'ambassadeur d'Urfé, avec le concours du nonce, ne cessèrent de répéter cette demande à la Curie[146]. Lorenzo fut créé cardinal assez tard, le 15 mars 1557[147]. La première raison de ce délai doit être cherchée dans les intrigues secrètes des Lorrains, désireux d'écarter le jeune Strozzi, afin de rendre plus facile la promotion de Louis de Guise. Cette dignité insigne, avec la charge de maréchal donnée à l'aîné des Strozzi, consacra la fortune et l'influence des fuorusciti florentins sous le règne de Henri II.

Aussi bien, Lorenzo, qui résidait parfois à Rome, auprès de son frère Roberto, et plus souvent à la Cour, dans l'entourage de la Reine, se mêla-t-il aux intrigues ardentes de ses aînés.

A la racine des Strozzi tenaient un grand nombre de parents et d'alliés, intéressés aux mêmes entreprises. Parmi ces alliés, quelques-uns apportèrent dans la famille un nouvel élément de violence. Tels les Fieschi, conspirateurs bannis de Gênes en 1547. Henri II, à son avènement, les prit sous sa protection, donna à l'aîné le collier de Saint-Michel et le pourvut d'une pension de trois mille écus[148]. Scipione Fieschi épousa Alphonsina Strozzi, fille du banquier Roberto, et devint chevalier d'honneur de la Reine. Son frère naturel, Cornelio, fut créé gentilhomme de la chambre du Roi[149].

Si dangereuse qu'ait été la fureur passionnée des Strozzi, il sied de reconnaître le trait qui les distingue de tant de fuorusciti, le mépris de l'argent[150]. Ils poursuivirent, non sans âpreté, il est vrai, les honneurs que pouvait leur procurer l'amitié du roi de France : mais c'est parce que ces honneurs réparaient les blessures faites à leur prestige et à leur fortune par les révolutions italiennes, en même temps qu'ils leur donnaient une force nouvelle pour recouvrer, dans la patrie florentine, le rang perdu naguère. Jamais ils ne combattirent pour la solde, mais ils dépensèrent leurs richesses au service du parti qu'ils représentaient. La seule nourriture de leur passion fut la haine des Médicis[151]. Cette haine, au fond de laquelle il serait facile, sans doute, de découvrir des rancunes ou des visées personnelles, se revêtait pourtant des traditions d'une cause plus généreuse, celle de la liberté de Florence. Ainsi s'explique l'influence des Strozzi et leur acharnement. Un homme aussi médisant que Brantôme a dû leur rendre justice. Hélas ! écrit au sujet de Piero, l'auteur des Capitaines François, ce brave seigneur a bien brouillé et despendu tous ses grandz moyens au service de nos roys ; car, de plus de cinq cens mill'escus qu'il avoit vaillant quand il vint à leur service, il est mort n'ayant pas laissé à son fils vaillant vingt mill'- escuz. Et ce, sans avoir grandes récompenses ny bienfaictz de nos roys, car il n'estoit point importun ny demandant. II avoit le cœur fort noble, généreux et splendide[152]. La faveur de Catherine de Médicis et leurs richesses propres, tels furent les moyens qui permirent à ces aventuriers, forcenés, mais probes, d'emporter parfois la politique française au gré de leurs passions.

Les Strozzi eurent successivement comme adversaires et comme alliés les deux grands partis de la cour de France, celui de Montmorency et celui des Guises. Le connétable devait ressentir une aversion fatale pour ces hommes dont toute la vie était tendue vers la guerre et les aventures italiennes. Cependant, jusqu'à l'année 1548, Piero Strozzi entretint des relations d'amitié avec François de Châtillon, sieur d'Andelot, neveu de Montmorency. Mais une brouille qui survint entre eux, à cette date, et l'incident qui suivit la maladie de Leone Strozzi aggravèrent singulièrement l'antipathie du connétable[153]. A la fin de 1549, les rapports devinrent meilleurs : également hostiles au cardinal de Ferrare, Montmorency et Piero s'entendirent pour nuire au prélat, durant le conclave[154]. C'est encore le cardinal de Ferrare qui provoqua, à l'automne de 1553, leur réconciliation définitive et leur alliance, au détriment des Guises. Plus tard, tout en récusant la politique des fuorusciti, trop opposée à la sienne, Montmorency ne laissa pas de montrer à Piero Strozzi un attachement personnel[155].

L'attitude des Lorrains s'oppose à peu près exactement à celle du connétable. Lié d'une amitié étroite à François de Guise, qui lui servit souvent d'avocat auprès du Roi[156], dans les premières années du règne, Piero Strozzi plaidait, en retour, la cause des Lorrains auprès de la Reine[157]. Jusqu'à l'année 1550, l'alliance demeure étroite : après le conclave, Charles de Lorraine demande au pape Jules III la pourpre pour Lorenzo Strozzi et la réhabilitation de Cornelio Bentivoglio, lieutenant de Piero et failli de Bologne[158]. Mais bientôt paraissent quelques germes de division : la rivalité de Lorenzo et de Louis de Guise, au sujet de la dignité cardinalice[159], et surtout la haine qui oppose depuis longtemps le magnifique Piero à l'oncle du duc de Guise, Hippolyte d'Este[160]. Obligés de soutenir le cardinal de Ferrare, les Lorrains se détachèrent des Strozzi, pendant les années 1554 et 1555. Mais cette séparation forcée ne fut jamais très profonde. La guerre des Carafa réunit de nouveau les efforts de la maison de Guise et ceux des fuorusciti. Au surplus, seul le cardinal de Lorraine montra parfois quelque hostilité, sans que François de Guise ait jamais retiré l'ancienne amitié qu'il portait à Piero Strozzi.

 

Les Strozzi furent les chefs incontestés de la multitude des fuorusciti florentins : l'aîné, Piero, était reconnu partout comme le champion des bannis italiens. Eux seuls, parmi les exilés, eurent assez d'influence, de passion et d'entregent pour animer parfois de leur souffle la politique de Henri II. L'innombrable clientèle, qui entourait les Strozzi, suivit l'élan de ses patrons.

Cependant, la Florence exilée ne peut être rangée tout entière sous les ordres de cette famille. Le parti des fuorusciti comprenait des éléments trop divers et mouvants pour être serrés en des cadres rigides. D'abord, on trouvait à la cour de France et dans les couches de la société beaucoup d'exilés qui, venus jadis d'outremonts, s'étaient accommodés, à la longue, de l'exil, oubliant un peu par nature, par mollesse ou par le fait des satisfactions nouvelles, leurs passions d'antan. Luigi Alamanni, nous l'avons vu, était un fuoruscito de ce type. De telles gens peuplaient l'entourage de la Reine. Parmi eux, les Gondi jouirent d'une situation brillante. C'est, dit-on, à la femme d'Antonio de Gondi, Marie-Catherine de Pierrevive, dame du Perron, que Catherine de Médicis dut de ne pas rester stérile : en tout cas, elle fut la confidente intime de celle-ci[161]. L'un des Gondi, Gian Battista, était l'ami de Piero Strozzi[162] ; un autre, Domenico, servit sous ses ordres comme lieutenant[163].

D'autre part, on hésite à ranger dans la même faction des hommes de lettres, comme Bartolomeo Cavalcanti, exilé volontaire de Florence, qui n'était uni aux Strozzi que par la communauté d'origine et par des affinités théoriques[164], ou des capitaines, comme Jérôme de Pise, qui servaient tour à tour le duc de Florence, le roi de France et le pape, donnant à chacun des gages de fidélité stipendiée[165].

Mais, si différents qu'ils fussent de tempérament et de goûts, un même élan, à certaines heures, pouvait emporter tous ces Florentins qui vivaient en dehors de Florence. Issus d'une même patrie, dont la vie historique était, depuis plusieurs siècles, tissue de luttes civiles, violemment ou mollement rebelles, ils restaient tous sensibles au langage de la liberté. Aussi, malgré les degrés divers de leurs passions, offrent-ils le spectacle d'un groupe compact et organisé. Leur influence fut homogène, marquée de caractères précis.

Ces caractères retiennent l'attention. Les fuorusciti, réfugiés en France, ne représentaient qu'une fraction d'un parti international. D'où résultaient, pour le gouvernement royal, une force et une faiblesse : force que lui procurait le grand nombre de complices répandus dans tous les centres politiques de la Péninsule ; faiblesse née du fait que les réfugiés, même naturalisés, poursuivaient des fins étrangères aux intérêts de leur récente patrie. Nous verrons combien peu conforme aux tendances raisonnables de la politique française fut la guerre de Toscane, et de même plus tard la guerre des Carafa.

De plus, comme il était naturel, les bannis florentins s'efforcèrent d'entraîner les forces royales vers l'objet de leur passion, Florence et la Toscane : ainsi s'expliquent la plupart des incohérences et des échecs de la politique italienne de Henri II. Seulement, les fuorusciti voulurent pallier leurs visées particulières, en y mêlant parfois l'intérêt dynastique des Valois : en 1554, ils présenteront la guerre florentine comme un moyen de restituer aux bannis leur ancienne patrie et de procurer un royaume au second fils de Henri II[166].

Enfin, les bannis apportaient au service du Roi des sentiments singulièrement dangereux. Leur activité, désintéressée et déterminée seulement par la haine d'un usurpateur, ne pouvait s'accommoder de modération. Les rancunes, dont s'alimentait leur passion, étaient insatiables et rebelles aux concessions réciproques. De là chez eux, un acharnement auquel répondait, chez leur ennemi, le souci inquiet et jamais apaisé de son salut. Ce fut un perpétuel levain de guerre.

Dispersée dans les grandes villes de la Péninsule et de la France, la nation florentine, formée des partisans et des adversaires de Cosme, suscita partout des troubles. Les exemples abondent. Au jour de la Saint-Jean 1554, les Florentins de Rome célébrèrent leur fête, comme de coutume, par un banquet réunissant toute la colonie. Un camérier du pape, Stanchino, voulut communiquer à l'assemblée une lettre adressée, le 4 juin, par Henri II, al console della natione fiorentina[167]. L'ambassadeur de Cosme, Serristori, s'y opposa et arracha le papier des mains de Stanchino. Une bagarre s'ensuivit, au cours de laquelle l'ambassadeur dut restituer la lettre du Roi. Cette démonstration enfantine provoqua un grave incident diplomatique : le cardinal du Bellay se plaignit vivement de l'injure faite à son maître et demanda réparation au pape Jules III ; les factions s'irritèrent et le conflit général, qui divisait alors le Roi et le duc de Florence, prit un tour plus violent[168].

 

Les réfugiés napolitains ne possédèrent ni les richesses, ni la cohésion du parti florentin. Tandis que les ennemis de Cosme créent, dans la politique de Henri II, la question florentine, les exilés napolitains représentent seulement la survivance d'une question ancienne, la question de Naples.

Du vivant de François Ier, les Napolitains avaient exercé une action notable à la Cour, par le ministère de leurs chefs, le prince de Melfi, les ducs de Somma et d'Atri : à ceux-ci le Roi avait conféré, en 1537, le collier de Saint-Michel et, plus tard, au premier la charge de maréchal[169]. Mais, à l'avènement de Henri II, l'influence de Catherine de Médicis donne aux Florentins la prépondérance.

Cette prépondérance, il est vrai, ne fut jamais absolue. Dans les deux premières années du règne, grâce aux visées belliqueuses du pape Paul III et des Farnèse, la guerre de Naples reste présente aux préoccupations du gouvernement royal. En juillet 1547, lorsqu'il apprend les tumultes qui se sont produits contre la domination du vice-roi, Henri II met la chose en délibération, fait dresser une liste des fuorusciti de l'Italie méridionale et leur ordonne de se tenir prêts à partir secrètement pour une expédition à Naples. Les ducs d'Atri et de Somma excitent les velléités du Roi[170]. L'année suivante, au mois de juin 1548, le brui t se répand en Italie que Henri II, de concert avec le pape Paul III, se dispose à lancer sur le royaume de Naples, par la route de Venise, de Ferrare et des Abruzzes, une armée de quinze à vingt mille hommes[171]. Pendant toute la durée du règne, ces projets renaîtront dans les Conseils. Mais les Florentins feront dévier les tendances orientées de ce côté. C'est seulement après les terribles déceptions de la guerre de Toscane que surgira de nouveau la question de Naples, avec un relief imprévu.

Quelques personnages, qui figurent assez souvent dans la chronique du règne, incarnent, sous Henri II, le parti napolitain.

Giovanni Caracciolo, prince de Melfi, acheva sa carrière en 1550 : il était alors gouverneur de Piémont et maréchal de France et recevait une pension de quinze mille livres[172]. Son attachement à la France datait du temps de Charles VIII : grand sénéchal du royaume de Naples, il s'était rallié au conquérant ; plus tard, en 1512, il avait combattu, à Ravenne, dans les rangs français. Retombé sous la domination espagnole, il fut fait prisonnier par Lautrec, en 1528, au sein même de sa principauté de Melfi. Puis, rendu à la liberté, il servit le Roi avec une rare loyauté et le plus noble désintéressement[173]. François Ier lui donna, pour compenser la perte de ses biens saisis par Charles-Quint, les terres de Romorantin, Nogent, Brie-Comte-Robert et Martigues[174]. Dans les dernières années de sa vie, il se voua tout entier à l'administration du Piémont, et son gouvernement, juste, sévère et prudent, transforma cette conquête en province française. La noblesse et la valeur de ce prince napolitain, devenu l'un des meilleurs serviteurs des Valois, ont été louées par tous les auteurs de Mémoires ou d'Histoires du xvi° siècle. Trop peu mêlée aux intrigues politiques et aux disputes des partis pour nous retenir longtemps, sa vénérable figure mérite cependant d'être évoquée, parce qu'elle s'oppose de façon honorable à celles des aventuriers qui formèrent la majeure partie de l'Italie française sous Henri II[175].

Le prince de Melfi avait épousé une Aquaviva de Naples. Charles-Quint détenait également les biens confisqués des Aquaviva : à titre de dédommagement, le Trésor royal versait à Gian Francesco d'Aquaviva, duc d'Atri, une pension de six mille livres[176]. Ce personnage, après avoir participé aux premières intrigues du règne, disparut de la scène politique et fixa sa résidence à Rome.

Les deux chefs actifs du parti napolitain, dans la politique de Henri II, furent le duc de Somma et le prince de Salerne. Le duc de Somma, Giambernardo de San Severino, banni jadis de sa patrie pour estre bon François, fut surtout un soldat, de façon belle et haute taille[177]. D'abord allié aux fuorusciti florentins, lieutenant de M. de Termes, puis de Piero Strozzi, à Sienne, il prit plus tard une part importante aux menées qui jetèrent le Roi dans l'aventure italienne de 1557. Son habileté et la faveur du célèbre Carlo Carafa, son compatriote, lui procurèrent le collier de Saint-Michel, le généralat de l'infanterie française en Italie et deux mille écus de rente sur les terres du Siennois[178]. Dès 1549, il recevait du Trésor une pension de six mille livres[179].

De tous ces Napolitains, le plus remuant fut sans doute le prince de Salerne. Déjà il était venu à Fontainebleau en décembre 1544, et y avait charmé par des canzone napolitane les joyeuses dames de la Cour de François Ier[180]. C'est seulement au printemps de 1552 qu'il abandonna Naples définitivement pour se mettre au service du Roi ou plutôt pour tenter d'entraîner le Roi dans ses propres desseins : défection qui fut en partie le fruit des conseils du cardinal de Ferrare. Celui-ci mit en rapports le prince avec Henri II et l'engagea à choisir Venise pour demeure[181]. Par l'intercession de Salerne, le Roi accorda, en septembre 1554, un don de trois cents ducats à Bernardo Tasso, qui les reçut des mains du trésorier Du Gabre[182].

Le parti napolitain, très réduit, se défendit mal devant l'influence puissante des fuorusciti florentins, qui retenaient l'attention et les faveurs. Précisément, la défection du prince de Salerne, en 1552, surprit beaucoup ses compatriotes : on s'étonna que lui et ses compagnons pussent conserver des illusions sur les sentiments du Roi, qu'on savait possédés par les Florentins[183]. De fait, ces hommes du Midi n'avaient ni l'esprit de commerce, ni la ténacité politique des fuorusciti toscans. Ils apparaissent comme des romanesques, toujours entravés par leur extrême pauvreté. On les voyait à la Cour, Salerne, Somma, Atri, Gaiazzo, Brancatio et d'autres, faisans à tout le monde plus de pitié que d'envie, et qui mouroient quasi de faim[184]. La veuve de Fernando de San Severino, dernier prince de Salerne, dut quêter dans la chambre de la Reine, pour payer l'enterrement de son mari[185].

 

Si faibles que paraissent leurs moyens d'action, les Napolitains doivent pourtant être rangés à côté des Florentins : comme ces derniers, ils représentent la politique des haines et des rancunes personnelles. Dans la foule des Italiens, qui servirent Henri II et dont un grand nombre ne poursuivaient d'autre dessein que d'acquérir quelques honneurs et rémunérations, ces cieux groupes, seuls, formèrent des courants efficaces et continus. L'un et l'autre exercèrent, sur les projets du Roi, une influence de même nature.

Cette influence fut néfaste. L'ingérence des partis étrangers dans la politique française fait qu'à son tour, le Roi participe aux passions de l'Italie, s'associe aux factions et rabaisse son ambition au niveau des querelles municipales. Ces querelles italiennes ressemblent à des procès, dont les parties n'auraient pas de scrupules. Et, à vrai dire, l'absence de scrupules se montre dans le sacrifice même que ces fuorusciti font de leur liberté à un maître, dont les ressources promettent la victoire, dont la personne est un point de ralliement, dont l'intérêt doit se confondre avec celui de ses sujets volontaires[186].

Il importe, au reste, de ne pas fonder d'illusions sur la fidélité des fuorusciti à leur protecteur. Un certain nombre d'entre eux trahirent le roi de France : gens sans aveu, prêts à toutes les besognes, ils recevaient des deux mains. Les lettres, adressées par Charles-Quint à son ambassadeur en France, nous apprennent, en effet, que celui-ci dépensait des sommes importantes à payer l'espionnage ou la trahison de certains fuorusciti[187]. Bannis de Florence, de Naples ou d'ailleurs étaient, à cet égard, pareillement dépourvus de scrupules, et l'on s'étonne de trouver, parmi les complices de l'ambassadeur impérial, un membre de l'illustre famille des Birague, le capitaine Ludovic, proche parent de ce René de Birague, premier président du Parlement de Turin, qui devint plus tard chancelier du royaume[188]. Les jalousies mutuelles expliquent en partie ces défaillances. En 1552, Jehan de Turin et Sampiero Corso se plaignirent qu'on récompensât mal leurs exploits et menacèrent de passer au service de l'Empereur[189]. L'année suivante, l'attitude du capitaine Jérôme de Pise parut suspecte au cardinal de Ferrare et à M. de Termes, lieutenants du Roi à Sienne[190].

 

Il serait facile d'expliquer, par la direction et la fin de leurs intérêts, les tendances de chacun de ces partis, dont nous avons dessiné sommairement l'armature. Montmorency désire la stabilité, parce qu'il n'a rien à gagner aux nouveautés ni aux aventures ; les Guises cherchent l'occasion de pousser leur fortune, et tâchent de situer leur ambition en Italie, où ils prétendent avoir des droits d'héritiers ; les grands cardinaux, peu enclins à la guerre, parce qu'ils n'y participent pas et parce qu'elle profite toujours plus aux soldats qu'aux clercs, mais néanmoins très italiens par leurs goûts, leur situation et leur clientèle, entraînés d'ailleurs par l'entourage, rêvent d'une intervention qui mettrait la Péninsule sous une sorte de protectorat français, glorieux et plus ou moins désintéressé ; les fuorusciti poursuivent des fins précises, la satisfaction sanglante de rancunes incurables et la restauration de leur fortune matérielle dans la patrie locale, d'où les révolutions les ont bannis. Mais, encore que ces mobiles généraux apparaissent, sans doute possible, à travers les documents et les faits, il serait périlleux d'enserrer l'âme mouvante et complexe de ces hommes, mus surtout par l'impulsion quotidienne, en des cadres rigides et sous des catégories immuables. Entraînés tour à tour et repoussés par les événements, les partis s'allient ou se combattent, se fondent parfois, changent sans cesse de buts et modifient leurs expédients, toujours plus résolus et obstinés dans leurs haines que dans leurs affections. En dépit de ses intentions pacifiques, le connétable deviendra, sous le coup de certains chocs, le plus aventureux des ministres, dominé seulement par un sentiment durable, la peur d'être égalé et évincé de ses jeunes rivaux ; les Lorrains seront gênés par les contradictions que soulèvent leur double ambition de conquérir un royaume en Italie et de servir étroitement le Saint-Siège ; les fuorusciti eux-mêmes, poussés par des passions tenaces et limitées, trouveront en conflit, à certaines heures, leurs intérêts italiens et leurs intérêts français ; quant aux cardinaux, leur vie n'est qu'une fluctuation perpétuelle, guidée au jeu de leur indolence et de leur vanité. De son côté, le Roi, non par dessein préconçu, moins encore par force de caractère, mais par les exigences de sa nature, bride et retient, dans une certaine mesure, les poussées trop impulsives des partis : prince têtu et obstiné, il ne s'abandonne à une cause qu'après un long travail, et, une fois la partie engagée, s'en détache plus difficilement encore.

Ces réserves faites, l'histoire du règne de Henri II montre combien peu un roi pouvait être maître de sa politique. Une fois constitués, les partis dirigent et emportent vers l'Italie les efforts qui, selon une logique spécieuse, devaient s'exercer et se limiter au nord-est de la France. Sans doute il est commode d'accuser ce roi de faiblesse : les historiens se plaisent à reconstruire les monuments à leur gré, ils savent prendre des résolutions vigoureuses, diriger les factions et les maîtriser, montrer de la sagesse, renoncer aux conquêtes inutiles et mener à bien des expéditions heureuses. Ceci n'est qu'idéologie : la tâche des souverains fut plus complexe et difficile que celle de leurs chroniqueurs. Qu'on ne reproche pas à Henri II son aveuglement : il vit bien que l'orientation logique de sa politique était vers le Nord. Qu'on ne lui reproche pas trop sa faiblesse : Charles-Quint, qui déclarait souvent vouloir oublier l'Italie pour faire tous ses grands efforts du cousté de France[191], ne résista pas mieux aux mirages d'outremonts et y laissa fondre l'or et le sang de ses royaumes.

A dire vrai, lorsque Henri II monta sur le trône, l'heure du renoncement n'était pas encore venue. Dans un pasquil de 1553, l'Italie adressait au roi de France ces mots : Ecce ancilla domini, fiat mihi secundam verbum tuum[192]. Servante, en vérité, mais aussi maîtresse, ancienne et toujours parée d'illusions, dont l'héritier de François Ier se trouvait comme prisonnier. Sur cette terre, si longtemps promise, les partis n'avaient pas encore épuisé leurs efforts ambitieux. Si l'on veut suivre le mouvement des aspirations françaises, qu'on lise les œuvres des poètes. En 1550, avant la guerre, c'est Ronsard qui souhaite au Roi de

Graver bien avant sa loy

Dans le gras champ d'Italie[193].

Six ans plus tard, Joachim du Bellay exprime, au contraire, la lassitude :

Maudict soit mille fois le Borgne de Lybie,

Qui le cœur des rochers perçant de part en part.

Des Alpes renversa le naturel rempart,

Pour ouvrir le chemin de France en Italie[194].

Les politiques du XVe siècle n'étaient pas hommes à mûrir de savants desseins : ils obéissaient simplement aux traditions, aux passions, à l'honneur et au respect des conquêtes une fois obtenues. En de telles conditions, les forces collectives pouvaient, seules, arrêter ou entraîner le cours matériel des événements. Or, à l'avènement de Henri II, toutes ces forces collectives étaient encore orientées vers l'Italie.

L'état même de cette Italie attire toujours les conquérants d'outremonts. La Péninsule ne possède pas encore la stabilité relative que lui donnera le traité du Cateau-Cambrésis. Tout y est en fusion : les tyrans ou les républiques s'y disputent les terres et invoquent l'étranger. D'une avidité insatiable et jalouse, les petits princes de l'Italie portent la responsabilité du renouvellement perpétuel des guerres, qui ensanglantent et affament leur pays. Sire, écrivait à Henri II le trésorier Du Gabre, si vous voulez prendre la protection de tous ces potentatz d'Italie, tout vostre royaulme n'y basteroit, et je n'ay jamais veu ung seul d'eux qui s'y soit présenté pour désir de vous faire service, mais pour tirer de vous le plus d'argent qu'ilz peuvent et faire leurs affaires les premiers, et puys des vostres qu'il advienne ce qu'il plaira à Dieu[195].

Ainsi recommença la guerre italique par la protection que donna Henri II à la famille Farnèse.

 

 

 



[1] J. BURCKHARDT, La civilisation en Italie au temps de la Renaissance, trad. Schmidt, t. I, pp. 168-469.

[2] Voyez les travaux de M. E. Picot, qui ont à peu près épuisé les sources imprimées, même les plus rares, et qui sont fondés aussi sur des documents de la Bibliothèque Nationale. Le dépouillement des Archives de France et d'Italie reste à faire.

[3] FLOQUET, Histoire du Parlement de Rouen, t. I, pp. 455-456 : FL. VINDRY, Les parlementaires français du XVIe siècle, t. I, fasc. II, p. 279.

[4] Boyvin du Villars, éd. 1607, p. 9.

[5] Œuvres, éd. Marty-Laveaux, t. II, p. 467 : Le tumbeau du roy Henry II.

[6] Etat des dépenses de la maison du Roi pour l'année 1349 (Bibl. Nat. ms. fr. 3132, fol. 32), publié en partie p. E. PICOT, Bulletin italien, t. III, pp. 25-36.

[7] Op. cit. ; CHARPIN-FEUGEROLLES, Les Florentins à Lyon ; A. LEFRANC, Marguerite de Navarre et le platonisme de la Renaissance (Bibl. de l'Ec. des Charles. tt. LVIII et LIX) ; A. BAUR, Maurice Scève et la Renaissance lyonnaise (Paris, 1906, in-8°), etc.

[8] Voyez liv. III. Par exemple, A. Serristori au duc de Florence, 1554, 7 juillet, Rome (Arch. d'Etat de Florence, Mediceo, 3273, fol. 422 ; orig.).

[9] A. Serristori au duc de Florence, 1548, 19 avril, Rome (Mediceo, 3267, fol. 3 ; orig.)

[10] Nous tirons ces renseignements généraux des documents qui seront utilisés et cités plus loin, au cours du récit des faits.

[11] CHARPIN-FEUGEROLLES, Les Florentins à Lyon, pp. 7-8. Sur l'organisation de la nation florentine à Lyon, voyez l'importante communication de A. ROUCHE, La nation florentine de Lyon au commencement du XVIe siècle (Revue d'histoire de Lyon, t. XI, pp. 26 et suivantes).

[12] La magnificence de la superbe entrée... (Lyon, 1549, 4°).

[13] Entre autres, voyez les études de Copley Christie, Ferd. Buisson, Abel Lefranc, Ferd. Brunetière, Em. Picot, Imbart de La Tour, et l'intéressant article de H. HAUSER, Etude critique sur la rebeine de Lyon (Revue historique, 1896).

[14] ALB. BAUR, Maurice Scève et la Renaissance lyonnaise (Paris, 1906, 8°).

[15] ET. PASQUIER, Lettres, dans Œuvres, t. II, p. 21.

[16] CH. ESTIENNE, La guide des chemins de France, éd. 1553 ; MAYERNE-TURQUET, Le guide des chemins, éd. 1603 ; THEVET, Cosmographie, éd. 1575 ; F. et Th. Platter à Montpellier, notes de voyage de deux étudiants bâlois, trad. Kieffer (Montpellier, 1892, in-8°).

[17] Nous renvoyons le lecteur pour ces renseignements et ceux qui suivent aux nombreuses mentions de voyages, qui sont citées plus haut et plus bas. Pour les XVIIe et XVIIIe siècles, on peut consulter les diverses éditions de Le Guide des chemins de Rome aux principales villes d'Italie et lieux circonvoisins (Route, 1750, in-16°). Mais il est toujours préférable de rapprocher et de coordonner les itinéraires réels.

[18] D'après M. S. GIGON (La révolte de la gabelle, pp. 207-208), il faudrait admettre le parcours de 400 kilomètres par jour comme normal en poste, au XVIe siècle, pour les courriers rapides. C'est à peu près le résultat auquel nous sommes arrivé par des calculs opérés sur un grand nombre de documents. Mais l'allure de la plupart des voyageurs était bien loin de cette rapidité.

[19] Denys Lambin à Prévost de Thérouane, 1552, 30 août, Coire, cité p. H. POTEZ, Revue d'histoire littéraire de la France, t. XIII, pp. 460-462.

[20] Le cardinal du Bellay à Montmorency, 1553, 18 mai, Coire (Bibl. Nat., ms. fr. 20447, fol. 2-3 ; orig.). Les ambassadeurs de Sienne au Reggimento, 1552, 7 novembre, Lyon (Arch. d'Etat de Sienne, Lettere al Reggimento, IV, 33 ; orig.). Sur les étapes de la route de Paris en Italie, par Lyon et les Grisons, une lettre d'Alvarotti au duc de Ferrare, 1555, 6 juillet, Marly, nous donne de précieux renseignements (Arch. d'Etat de Modène, Francia ; orig.).

[21] Prospero Santo Croce au cardinal del Monte, 1552, 17 novembre, Châlons (Arch. Vatic., Nunz. Francia, t. III, fol, 56 : orig.). Il Matthiolo signait Mattheo Palmerini, maestro generale delle poste di N. Ste. Lettre originale adressée à la Balia de Sienne, 1552, 9 août (Arch. d'Etat de Sienne, Lettere alla Balia, CCXVII, 15 ; orig.).

[22] Arch. d'Etat de Florence, Mediceo, 333-387, passim : lettres d'envoi.

[23] Beaucoup des avvisi qu'on trouve dans les archives italiennes, particulièrement dans l'archivio Mediceo, proviennent de cette source.

[24] LAURIÈRE, Ordonnances, t. XI, pp. 45-48, t. XIII, pp. 299 et suivantes, t. XV, p. 644. Cf. FR. BOREL, Les foires de Genève au XVe siècle, passim, et G. BARBIER, Privilèges des foires de Lyon, éd. 1649.

[25] Voyez la synthèse de ce mouvement présentée par P. IMBART DE LA TOUR, Les origines de la Réforme, t. I, l. II : La Renaissance économique.

[26] P. HUVELIN, Essai historique sur le droit des marchés et des foires (Paris, 1897, in-8°).

[27] E. PICOT, Les Italiens en France au XVIe siècle (Bulletin italien, t. II, pp. 22 et sqq.)

[28] Il viaggio fatto in Spagna et in Francia dal magnifico M. Andrea Navagero (Venise, 1563, 8a), fol 58.

[29] Catalogue des actes de François Ier, passim. Sur la banque internationale, cf. le célèbre ouvrage de R. EHRENBERG, Das Zeitalter der Fugger, tt. I et II. H. Pirenne, au tome III de son Histoire de Belgique, donne la bibliographie de l'histoire économique des Pays-Bas, étroitement liée à l'histoire économique de Lyon.

[30] A. DESJARDINS, Négociations avec la Toscane, t. I, p. 408.

[31] M. VIGNE, La banque à Lyon du XVe au XVIIIe siècle ; E. PICOT, loc. supr. cit.

[32] D. du Gabre au Roi, 1553, 1er octobre, Ferrare (A. VITALIS, Correspondance..., p. 73).

[33] Sur les rapports financiers de la royauté avec les Florentins de Lyon, voyez Catalogue des actes de François Ier, passim ; CHARPIN-FEUGEROLLES, op. cit. ; la correspondance de del Bene (Arch. Nat., K 92) utilisée en partie par H. FURGEOT, Henri II après la journée de Saint-Quentin (Revue des questions historiques, t. XXXII, p. 466). En 1558, les intérêts seuls de la somme due par le Roi aux banquiers de Lyon s'élevaient à seize cent mille livres. Voyez L. ROMIER, Lettres de Giovanni Dalmatio (Bibl. de l'Ecole des Chartes, 1910, p. 318).

[34] Détails dans la correspondance de Fr. Babbi (Arch. d'Etat de Florence, Mediceo, 2885 ; orig.).

[35] J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1549, 6 septembre, Paris (Arch. d'Etat de Modène, estero, Francia ; orig.).

[36] G. B. Ricasoli au duc de Florence, 1548, 1er mai (A. DESJARDINS, op. cit., t. III, p. 232).

[37] Cl. Tolomei au Reggimento de Sienne, 1553, 1er décembre, Paris (Arch. d'Etat de Sienne, Lettere al Reggimento, XXIII, 49 ; orig.).

[38] Fr. Babbi au duc de Florence, 4553, 22 février, Ferrare (Arch. de Florence, Mediceo, 2885, à la date ; orig.).

[39] Correspondance de D. du Gabre, p. 8.

[40] Op. cit., p. 65.

[41] A. Serristori au duc de Florence, 1548, 9 juin. Rome (Arch. d'Etat de Florence, Mediceo, 3267, fol. 21 ; orig.).

[42] Arch. d'Etat de Florence, Carte Strozziane, 70, fol. 28 : note originale de novembre 1551, expliquant le mécanisme de l'administration des deniers royaux.

[43] Le 21 janvier 1554, de Ferrare, le trésorier Du Gabre écrit au Roi : Il est vray que ung homme seul ayant un peu la praticque des marchands et l'intelligence avec le prince (Hercule d'Este)... satisfera fort bien à la charge de Venize et à ceste-cy. (A. VITALIS, Correspondance..., p. 23). De fait, quelque temps après, Du Gabre reçut l'ambassade de Venise. A côté de Du Gabre, Nicolas Lefèvre était commis par le Roy à tenir le compte et à faire le paiement des fraiz extraordinaires de ses guerres en païs d'Itallie. (Bibl. Nat. Pièces orig. 1100, 25329 ; quittances 1552-1553).

[44] Voici deux textes comme exemples de la pratique financière. Instructions au sr de Bleneau, 1551, mai : Le sr de Bleneau, gentilhomme de la maison du Roy, passant à Lyon, verra le sr Albisse Dalbene, duquel il sçaura l'ordre et provision qu'il aura donné au port et change de cinquante mil escuz, qui ces jours passez luy ont esté delivrez par le trésorier de l'extraordinaire de Piedmont, Me Nicolas Lefevre ou son commis, pour faire tenir en Italie, c'est assavoir douze mil escuz à Romme ès mains de Messieurs les cardinaulx de Ferrare et de Tournon, qui les ont prins à la bancque pour le service du Roy avec l'intérest accoustumé montant quatre cens quarante escuz, et le reste, qui sont trante mil sept cens soixante escuz, ès mains du sr de Selve, ambassadeur pour le Roy à Venize. (Bibl. Nat., ms. fr. 20455, fol. 107 : orig.). — Le cardinal du Bellay à Henry II, 1554, 16 octobre, Rome : M. de Lodève, veoyant, que les affaires ne se manient poinet à Rome comme ilz doibvent, a deliberé d'envoyer les deniers droict à Montalcin sans plus passer à Rome : qui ne m'a pas esté, Sire, chose nouvelle, car j'avoye desjà assez descouvert qu'il me voulloit non seullernent aster l'entremise ou adresse de voz deniers, mais par indirect la congnoissance de voz affaires en l'estat de Siene et la tirer à soy par la voye de Venise. (Bibl. Nat., ms. fr. 20447, fol. 222 ; orig.).

[45] G. B. Ricasoli à Cosme de Médicis, 1547, 21-23 novembre (Arch. de Florence, Mediceo, 4592 : orig.). Cf. H. HAUVETTE, Luigi Alamanni, pp. 136-137.

[46] Vita di Benvenuto Cellini, ed. O. Bacci, p. 247.

[47] Hippolyte d'Este au duc de Ferrare, 1548, 29 février, Fontainebleau (Arch. d'Etat de Modène, Princ. Estensi, Ippolito II ; orig.).

[48] Bref, 1543, 28 janvier (Arch. vatic.. Brev. Pauli III, t. XLI, fol, 89 ; minute). Le pape accorde le privilège in toto christiano orbe. Le cardinal Farnèse au nonce, 1548, janvier (Arch. Vatic.. Borghèse I, 3. fol. 125 ; cop. du XVIe s.). On voit Luigi Alamanni, dès le début du règne, parler au nom de la Reine. L'évêque de Ceneda au cardinal Farnèse, 1547, 16 novembre, Melun (Arch. Vatic., arm. VIII, ordo 1a, vol V, fol. 214 ; orig.).

[49] Sources sup. cit., et E. PICOT, Bulletin italien, t. III, p. 26.

[50] Bern. Buoninsegni à Deifebo Turamini, 1555, 18 février, Melun (Arch. d'Etat de Florence, Mediceo, filza 1855 : orig.).

[51] Advis des Florentins, 1556 (Bibl. Nat., ms. fr. 3126, fol. 117 ; trad. du XVIe s.).

[52] Voyez LUIGI ALBERTO FERRAI, Cosimo de' Medici e il suo governo (1537-1543), Bologne, 1882, in-16°.

[53] Archivio storico italiano, S. 1a, append. t. VII, pp. 202-203. Cf. Vie de Philippe Strozzi, p. p. Niccolini (Florence, 1847, in-8°), et Vita del sig. Pietro Strozzi (Bibl. Vatic., Barberini, lat. 4824).

[54] Rabelais à l'évêque de Maillezais, 1535, 30 décembre, Rome, p. p. V. L. BOURRILLY, Lettres écrites d'Italie par François Rabelais (Paris, 1910, in-8°), p. 41.

[55] SCIPIONE AMMIRATO, Istorie florentine, lib. XXX ; A. DE REUMONT, La jeunesse de Catherine de Médicis, éd. Baschet, pp. 60 et sqq.

[56] Op. cit., p. 477.

[57] MONTALVO, Relazione della guerra di Siena, pp. 16-18.

[58] Pandolfini au duc de Florence, 1547, 30 mars, Venise (Arch. de Florence, Mediceo, 2967, fol. 15 : orig.).

[59] Pandolfini au duc de Florence, 1547. 30 avril, Venise (Arch. de Florence, Mediceo, 2967, fol. 536 ; orig.). A. Serristori au même, 1547, 1er juillet, Rome (Mediceo, 3464 ; minute).

[60] Pandolfini au duc de Florence, 1547, 2 novembre, Venise (Arch. d'Etat de Florence, Mediceo, 2967, fol. 720 : orig.). Laudamina de Médicis arriva à Fontainebleau, le 11 avril 1548, et fut présentée à la Cour par Lorenzo Strozzi, évêque de Béziers. J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1548, 11 avril, Sens (Arch. d'Etat de Modène, estero, Francia ; orig.).

[61] ALBERI, S. 1a, t. II, p. 130.

[62] Œuvres, éd. Lalanne, t. IV, p. 139. Ce fut Catherine de Médicis qui dota Clarisse Strozzi, fille de Piero, mariée, en 1558. à Honorat de Savoie-Tende. G. Dalmatio au cardinal Farnèse, 1558. 12 mai. Paris : La Royne... a constitué la dot du sien propre jusques à cinquante mil livres assignées sur son domayne et dix mil livres comptant en bagues et meubles. (L. ROMIER, Lettres de G. Dalmatio, ap. Bibl. de l'Ecole des Chartes, 1910, p. 324).

[63] Vita di Pietro Strozzi (Bibl. Vatic., Barberini, lat. 4824, fol. 64 et sqq.). Cf. A. DESJARDINS, op. cit., t. III, p. 355.

[64] J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1547, 3 mai, Paris (Arch. de Modène, Francia ; orig.).

[65] Lettres de G. Dalmatio, loc. cit., p. 319.

[66] Œuvres, t. II, p.239 et sqq.

[67] P. PARIS, Les manuscrits français de la Bibliothèque du Roi, t. I, p. 15.

[68] BOISSARD, Romanæ Urbis topographia, pars 1a, p. 32 ; BRANTÔME, loc. cit.

[69] A. Serristori au duc de Florence, 1547, 30 juin, Rome (Arch. de Florence, Mediceo, 3464 ; minute).

[70] A. Serristori au duc de Florence, 1549, 21 mai, Rome : les actes en copie de cette querelle sont enclos dans la dépêche de Serristori (Mediceo, 3268, fol. 151).

[71] Fr. Bahbi au duc de Florence, 1552,10 juillet, Ferrare (Arch. de Florence, Mediceo, 2884 ; orig.).

[72] Bibl. Nat., Clairambault, 348, fol. 88 ; copie. — Cf. Morvillier au prince de Melfi, 1546, 26 octobre, Venise, cité p. G. BAGUENAULT DE PUCHESSE, Morvillier, p. 374.

[73] Serristori au duc de Florence, 1547, 6 juin, Rome (Arch. d'Etat de Florence, Mediceo, 3267, fol. 16 ; orig.). Le fait et les soupçons sont confirmés par une dépêche d'Alvarotti au duc de Ferrare.

[74] Jules III à l'évêque d'Imola, 1551, 27 août, Rome (Arch. Vatic., Borghèse II, 485, fol. 166 ; reg. orig.).

[75] DESJARDINS, III, 144.

[76] H. Dandino à G. Bta del Monte, 1552, 3 avril, Rome (Arch. Vatic., Principi, 146 E ; reg. orig.).

[77] Vita del sig. Pietro Strozzi (Bibl. Vatic., Barberini, lat. 4824).

[78] Loc. cit.

[79] Sur ce personnage, voyez ARRIGHI, Histoire de Sampiero Corso (Bastia, 1842, in-8°) ; C. LIVI, La Corsica e Cosimo I di Medici, Introduction, pp. 25 et sqq. PINARD, Chronologie militaire, t. III, p. 578 ; E. PICOT, Bulletin italien, t. III, p. 120 ; X. POLI, Histoire militaire des Corses au service de la France, t. I. Sous le règne de Henri II, il fut employé principalement en Toscane et en Corse. Au début du règne, il fut mêlé à la vie de Cour (DESJARDINS, III, 196). C'était un homme d'une extraordinaire énergie et d'une égale cruauté. — Voyez plus bas, livre III.

[80] Giornale dell' assedio di Montalcino (Arch. stor. italiano. S. 1a, append. t. VIII, p. 347). Il devint lo spavento di tutte le genti imperiali (ib., p. 348). Matteo Bandello le qualifie famoso capitano di fantaria (Novelle, t. IV. fol. 15). Voyez ALBERI, S. 1a, t. IV, p. 83 ; DESJARDINS, III, p. 24 ; E. PICOT, loc. cit., p. 121. — Il servit en Siennois et en Corse, sous Henri II. — G. B. Ricasoli au duc de Florence, 1547, 26 juillet, Reims (Arch. de Florence, Medieso, 4592 (1), fol. 135 v°, orig.) ; J. Alvarotli au duc de Ferrare, 1549, 17 janvier, Poissy (Arch. de Modène. Francia ; orig.).

[81] L. STAPFETTI, Un episodio della vita di Piero Strozzi (Arch. storico ital., S. 5a, t. XV, pp. 63-77) : Fra GIOLIANO UGHI, Cronica di Firenze, lib. IV (Arch. st. ital., s. 1a. pp. t. VII, pp. 213-241).

[82] DESJARDINS, III, 55, et passim.

[83] J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1547, 8 avril, Paris (Arch. d'Etat de Modène, estaro, Francia ; orig.).

[84] Le dauphin Henri au duc de Ferrare, 1546, 30 novembre, Folembray : Conguoissant led. sr Pierre tel qu'il est, et luy portant l'affection que je fais, je ne désire moins la commodité et prospérité de ses affairas que des miennes propres. (Arch. de Modène. Principi esteri, Enrico 11 : orig.).

[85] Bibl. Nat., Pièces orig., 2730 ; quitt. orig.

[86] Etat de la maison du Roi en 1549 (Bibl. Nat., ms. fr. 3132, fol. 32).

[87] Correspondance de D. du Gabre, éd. Vitalis, p. 119.

[88] H. Dandino au cardinal Farnèse, 1547, 4 mai, Paris (Arch. Vatic., arm. VIII, ordo 1a, vol. 5, fol. 169 et sqq. ; orig.). Dépêche de Saint-Mauris, 1547, 20 avril (Revue historique, t. V, p. 107).

[89] Le cardinal Farnèse à M. Appolinio, 1547, août (Arch. Vatic., Borghèse, I, 3, fol. 75 : copie du XVIe s.). Confirmé par Alvarotti.

[90] CL. TOLOMEI, Lettere (1547), fol. 219.

[91] J. Alvarotti au duc de Ferrare, 4547, 26 mai, Paris (Arch. de Modène, Francia ; orig.). — Piero Strozzi obtint, le 25 juillet 1552, continuation du don de la terre et seigneurie de Belleville en Beaujolais pour le temps de neuf ans (Arch. Nat., X1a 8617, fol. 31 v° 32 ; enr.).

[92] Le cardinal Salviati au duc de Florence, 1547, 11 octobre, Ferrare (Arch. de Florence, Mediceo. 611, fasc. 2 ; orig.).

[93] Buonanni au duc de Florence, 1547, octobre, Rome (Mediceo, 3263, fol. 457 ; orig.).

[94] DESJARDINS, III, 192.

[95] MONLUC, Œuvres, éd. de Ruble, I, 460 ; P. COURTEAULT, Blaise de Monluc historien, pp. 183-184.

[96] Fr. Giustiniani au Sénat de Venise, 1548, 25 mars, Paris (Arch. d'Etat de Venise, Dispacci, Franza, reg. 3 ; orig.).

[97] Fr. Vinta au duc de Florence, 1548, 13 mars, Asti (Mediceo, 3101, fol. 1059 ; orig.). Sur cette affaire, cf. Bern. Buoninsegni à la Balia de Sienne, 1543, 3-12 mars, Milan-Asti (Arch. d'Etat de Sienne. Lettere alla Balia, CCIII, 50 ; orig.). Sur la prise du marquis de Saluces et du château de Revello. cf. Ludovic de Birague au duc d'Aumale, 1543, 17 avril, Revello (Bibl. Nat., fr. 20649, fol. 3 : orig.).

[98] Voyez plus bas liv. III.

[99] RABUTIN, Commentaires, XXXII.

[100] Expression de Jules III. Lettre à l'évêque d'Imola, 1531, 28 juin, Rome (Arch. Vatic., Borghèse, II, 465, fol. 97 ; reg. orig.).

[101] G. Bia Ricasoli au duc de Florence, 1547, 6 octobre, Melun (Arch. de Florence, Mediceo, 4502, fol, 285-286 ; orig.).

[102] Correspondance de Gio. Fabbrini, qui occupa cette charge d'espion en 1538-1554 (Mediceo, 614, fasc. 15 ; orig.).

[103] Voyez en particulier, lettre de Lorenzo Pagni au duc de Florence, 1548, 4 avril, Florence (Mediceo, 386, fol. 75-76 ; orig.). Durant le règne de Henri II, chaque lettre de l'ambassadeur florentin en France contient un rapport sur Strozzi. Cf. DESJARDINS, III, 58, et R. ANCEL, Nonciatures de Paul IV, I, I. p. XXXIX.

[104] DESJARDINS, III, 31 et 356 ; CHARRIÈRE, Négociations dans le Levant, I, 528 et sqq.

[105] Bern. Giusti à Chr. Pagni, 1551, 4 avril (DESJARDINS, III, 261).

[106] Anne d'Este le nomme : Ludovico Angelleti da Ugobbio. Lettre au duc de Ferrare, 1549, 12 mars, Saint-Germain (Arch. d'Etat de Modène. Anna d'Este orig.).

[107] F. Giustiniani au Sénat de Venise, 1548, 28 avril. Sens (Arch. d'Etat de Venise, Dispacci, Franza, reg. 3 ; orig.).

[108] Arch. d'Etat de Modène, Memoriale d'Ippolito II, 1545-1548, fol. 91.

[109] J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1547, janvier-mars, La Ferté-Milon (Arch. de Modène, Francia ; orig.). H. Dandino au cardinal Farnèse, 1547, 8 février (Arch. Vatic., Nunz. Francia, t. Il. fol. 303 v°).

[110] J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1547, 9-12 mai, Paris (Arch. de Modène, Francia : orig.). Del Vecchio ne prend le titre de abbé de Haulte-Fontaine qu'a partir de 1553. Henri II au duc de Ferrare, 1553, 3 décembre, Fontainebleau (Arch. de Modène, Principi esteri, Enrico ; orig.). Il fut candidat à l'évêché de Bazas, en 1555. T. Burtio au cardinal Farnèse, 1555, 11 août, Vigny (Arch. Parme, Frauda orig.).

[111] J. Alvarotti, 1547, 9 mai, Paris (Arch. de Modène, Francia : orig.).

[112] G. B. Ricasoli au duc de Florence, 1547, 15 septembre, Melun (Mediceo, 4592, fol. 240 y. orig.). Sur les dernières années de ce personnage, voyez détails dans une lettre qu'il écrivit au duc de Guise, 1559, 17 février, Hautefontaine (Bibl. Nat., Clairambault, 333, fol. 34-35 ; orig.).

[113] B. Ruggieri au duc de Ferrare, 1548, 6 mars, Rome (Arch. de Modène, Roma ; orig.).

[114] F. Giustiniani au Sénat de Venise, 1548, 18 juin, Vassy (Arch. de Venise, Dispacci, Franza, reg. 3 ; orig.).

[115] Il figure à toutes les pages de la correspondance d'Alvarotti.

[116] Henri II fait un vif éloge de lui au duc de Ferrare, 1549, 23 novembre, Paris (Arch. de Modène, Enrico II ; orig.).

[117] Hippolyte d'Este au duc de Ferrare, 1554, 41 février, Sienne (Arch. de Modène. Ippolito II ; orig.). Le cardinal du Bellay à Montmorency, 1534, 10 septembre, Rome : Thomas Delveche mange tout sous luy [Strozzi]. (Bibl. Nat., ms. fr. 20447, p. 194 ; orig.).

[118] Locotenente del signor Pietro Strozzi : F. Giustiniani au Sénat de Venise, 1548, 5 mars, Paris (Arch. d'Etat de Venise, Dispacci, Franza, reg. 3 : orig.). Lieutenant de la compagnie coronelle de Pierre Strossi (BOYVIN DU VILLARS, Mémoires, éd. Michaud, p. 29).

[119] DESJARDINS, III, 265.

[120] Un fallito qual'è Cornelio Bentivogli. Jules III à l'évêque d'Imola, 1551, 19 juin, Rome (Arch. Vatic., Borghèse, II, 465, fol. 97 : reg. orig.). Le dauphin Henri au duc de Ferrare, 1545, 17 février, Gébecourt : Corneille Vintevoglio m'a faict entendre qu'il désireroit grandement aller à Ferrare veoir ses parens, où il y a trois ans qu'il n'a osé aller pour raison d'un homicide qu'il commist aud. lieu. (Arch. d'Etat de Modène, Principi esteri, Enrico II ; orig.). Cf. FRIZZI, Memorie di Ferrara, t. IV, p. 329.

[121] DU BELLAY, Mémoires, éd. Michaud, p. 566 ; BRANTÔME, III, 220 ; DE THOU, trad. 1734, I. 453 ; MONLUC, I, 283.

[122] Alvarotti au duc de Ferrare, 1547, 8 avril, Paris (Arch. de Modène, Francia ; orig.).

[123] Alvarotti au duc de Ferrare, 1547, 13 avril, Paris (Ibidem ; orig.). Bibl. Nat., ms. fr. 7856, fol. 1108. Etat de 1519 (Bibl. Nat., lus. fr. 3132, fol. 32).

[124] MELLIN DE SAINT-GELAIS, éd. Blanchemain, I, 175. — ALBERI, S. 1a, IV, 83. SOZZINI, Diario (Arch. stor. ital., s. 1a, II, 336).

[125] DESJARDINS, III, 265. — Pour les dates de sa biographie, voyez E. PICOT, Bulletin italien, III, 20, n. 2.

[126] G. B. Ricasoli au duc de Florence, 1547, 21 juillet, Reims (Arch. de Florence, Mediceo, 4592 (1), fol. 131 ; orig. déchif.).

[127] Voyez liv. III.

[128] G. B. Ricasoli au duc de Florence, 1547, 13 juin, Paris (Mediceo, 4592 (1), fol. 69 v. ; orig.).

[129] Fr. Babbi au duc de Florence, 1552, 13 juin, Ferrare (Mediceo, 2884 ; orig. chif.).

[130] LIFTA, Famiglie celebri italiane, STROZZI di Firenze, t. XX.

[131] Bibl. Nat., Pièces orig. 2730 : quit. —Jos. FOURNIER, Les galères de France sous Henri II (Bullet. de géogr. hist., 1904).

[132] Buonanni au duc de Florence, 1549, octobre, Rome (Mediceo, 3268, fol. 457 ; orig.).

[133] BRANTÔME, IV, 120-139.

[134] Fr. MICHEL, Les Ecossais en France, les Français en Ecosse, t. I, p. 381.

[135] J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1548, 23 septembre, Lyon (Arch. de Modène, Francia. ; orig.).

[136] PIERO STROZZI et ARNALDO POZZOLINI, Memorie per la vita di fra Leone Strozzi, p. 33.

[137] Voyez les émouvantes pages qu'a consacrées à ce personnage CH. DE LA RONCIÈRE, Henri II précurseur de Colbert (Bibl. de l'Ec. des Charles, t. LXVI, pp. 647 et suivantes.).

[138] C. Massaini à la Balia de Sienne. 1552, 17 septembre, Rome (Arch. d'Etat de Sienne, Lettere alla Balia, CCXIX, 85 ; orig.).

[139] Les cardinaux Farnèse et du Bellay au Reggimento de Sienne. 1554, 14 août, Rome (Arch. de Sienne, Lettere al Reggimento. XXXIII, 90 : orig.).

[140] A. Serristori au duc de Florence, 1548, 18 juillet, Rome (Arch. de Florence, Mediceo, 3267, fol. 120 ; orig.).

[141] A. Serristori au duc de Florence, 1549, 31 mai, Rome (Mediceo, 3268, 169 ; orig.). — A. VITALIS, Correspondance de D. du Gabre, p. 90. Voyez liv. III.

[142] A. Serristori au duc de Florence, 1549,14 juin (Mediceo, 3268, 199 v° ; orig.).

[143] VASARI, Opere, éd. G. Milanesi, t. VI, p. 165, n. 1.

[144] CHARPIN-FEUGEROLLES, Les Florentins à Lyon, pp. 182-185.

[145] Henri II à Paul III et au cardinal Farnèse, 1547, 1e, décembre, Fontainebleau (Arch. d'Etat de Naples, Carte Farnes., fascio 185, fasc. 1, pièces 9 et 16 ; orig.).

[146] Lorenzo Strozzi au cardinal Farnèse, 1548, 16 février, Fontainebleau (Arch. d'Etat de Parme, Carteggio Farnes., Francia ; orig.). L'évêque de Ceneda au cardinal Farnèse, 1548, 19 novembre, Poissy (Arch. Vatic., Principi, 14, fol. 104). A. Serristori au duc de Florence, 1548, 5 décembre, et 1550, 27 mars, Rome (Arch. de Florence, Mediceo, 3267, fol. 380, et 3269, fol. 625 ; orig.). Catherine de Médicis à Jules III, 1550, S avril, Paris (Ardt. Vatic., arm. XV, capsa 14, n. 23 ; orig.).

[147] R. ANCEL, Nonciatures de Paul IV, I, I, p. 120.

[148] Bon. Ruggieri au duc de Ferrare, 1549, :25 mai, Rome (Arch. de Modène, Roma ; orig.). — Henri II le recommande au cardinal Farnèse, 1548, 29 décembre, Saint-Germain (Arch. d'Etat de Naples, Carte Farnes., fascio 706 ; orig.).

[149] E. PICOT, Bulletin italien, t. I, p. 135.

[150] En mai 1544, les Strozzi avaient engagé jusqu'à leurs bijoux pour lever des troupes au profit du Roi (DESJARDINS, III, 70).

[151] Au sujet de cette haine, Brantôme écrit : Au lieu de quelques gouttes de sang qu'espandit le père, ilz en ont fait couler des ruysseaulx. (Œuvres, IV, 137).

[152] Loc. cit., II, 244.

[153] G. Corregrani au duc de Mantoue, 1548, 23 mai, Saint-Dizier (Arch. d'Etat de Mantoue, amb. Francia ; orig.).

[154] J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1549, 30 novembre, Paris (Arch. de Modène, Francia ; orig.).

[155] Voyez liv. III.

[156] Piero Strozzi au duc d'Aumale, 1548, 11 avril, Nantes (Bibl. Nat., fr. 20541, fol. 1 ; orig.).

[157] J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1550, 8 août. Poissy (Arch. de Modène, Francia ; orig.).

[158] B. Buonanni au duc de Florence, 1550. 23 février, Rome (Arch. de Florence, Mediceo, 3269, fol. 540 ; orig.).

[159] A. Serristori au duc de Florence. 1550, 19 mars, Rome (Mediceo, 3269. fol. 610 orig.).

[160] Voyez liv. III.

[161] L'ESTOILE, éd. Jouaust, I, 9 ; E. PICOT, Bulletin italien, I, 135 ; Lettres de Catherine de Médicis, I, 41. — De la dame du Perron, gouvernante de Monseigneur d'Orléans, on trouve des lettres italiennes, adressées à la duchesse de Mantoue, aux Arch. Gonzague (amb. Francia ; orig.).

[162] Gio. Battista Gondi, molto amico di Piero Strozzi. J. Alvarotti au duc de Ferrare, 1553, 6 novembre, Paris (Arch. de Modène, Francia ; orig.). Gianfiglazzi au duc de Florence, 1556, 10 septembre, Rome (Mediceo, 3276 ; orig.).

[163] P. Strozzi au Roi, 1559, 15 juin (Bibl. Nat., ms. fr. 20455, fol. 349 ; orig.).

[164] Voyez livre III. — Cf. G. CAMPORI, Diciotto lettere inedite di B. Cavalcanti (Modène, 1868, in-4° ; broch.). — Cavalcanti était lié surtout avec Roberto Strozzi.

[165] Sur les origines de ce personnage, A. Serristori au duc de Florence, 1548, 10, avril, Rome (Mediceo, 3267, fol. 1 ; orig.). — En 1547, il entretenait des rapports avec Cosme de Médicis ; en 1551, il était lieutenant de la garde de Rome, sous les ordres d'Ascanio della Corgna (Modène, Roma, février 1551 ; orig.). Cf. livre III.

[166] A. Serristori au duc de Florence, 1554, 29 janvier, Rome (Mediceo, 3272, fol. 517 ; orig.).

[167] Arch. Vatic., XLIV. 3, fol. 25 ; copie du XVIe s.

[168] DESJARDINS, III, 343-346 ; R. ANCEL, Nonciatures de Paul IV, I, I, 55-56.

[169] L'évêque d'Ivrée à Ricalcato, 1537, 24 juillet (Arch. Vatic., Cast. S. Angelo, Nunz. Gallica, III, 25 ; orig.).

[170] F. Giustiniani au Sénat de Venise, 1547, 12 juillet, Reims (Arch. d'Etat de Venise, Dispacci, Franza, reg. 3 ; orig.).

[171] A. Serristori au duc de Florence, 1548, 23 juin, Rome (Arch. d'Etat de Florence, Mediceo, 3267, fol. 61 ; orig.).

[172] Bibl. Nat., ms. fr. 3132. fol. 32 ; E. PICOT, Bulletin italien, III, 26.

[173] MARIANO D'AYALA, Giovanni Caracciolo, principe di Melfi (Arch. st. ital.. s. 3a, XV, 268-279).

[174] Catalogue des actes de François Ier, V, n° 18881.

[175] J. B. L'HERMITE DE SOLIERS, L'Italie françoise, éd. 1664, pp. 127-132.

[176] Sur cette famille, voyez E. PICOT, Bulletin italien, I, 108-109.

[177] BRANTÔME, VI, 213 ; PINARD, Chronologie militaire, III, 584.

[178] R. ANCEL, Nonciatures de Paul IV, I, I, XXXVII et passim.

[179] E. PICOT, Loc. cit., I, 101.

[180] DESJARDINS, III, 140.

[181] F. Babbi au duc de Florence, 1552, 27 mars, Ferrare (Arch. d'Etat de Florence, Mediceo, 2884 ; orig.).

[182] G. CAMPORI, Lettere di Bernardo Tasso (Bologne, 1869, in-16°), p. 105.

[183] Orlando Mariscotti à la Balia de Sienne, 1552, 21 mai, Rome (Arch. d'Etat de Sienne. Lettere alla Balia, CCXIII, 86 ; orig.).

[184] BRANTÔME, VIII, 235.

[185] La France protestante, nouv. édit., I, col. 882.

[186] Personne n'a mieux peint la psychologie de la faction italienne que M. E. JORDAN, Les origines de la domination angevine en Italie (Paris, 1909, in-8°), Introduction.

[187] Papiers de Granvelle, p. p. Weiss, III. 402-403.

[188] En mars 1548, Ludovic de Birague fut créé luogotenente del sr Pietro Strozzi delle fantarie italiane in Piamonte. G. Corregrani au duc de Mantoue, 1548, 31 mars, Melun (Arch. d'Etat de Mantoue, amb. Francia ; orig.). A la fête de Saint-Michel, en septembre 1556, il reçut le collier de l'Ordre. Herc. Strozzi au duc de Mantoue, 1555, 1er octobre, Villers-Cotterêts (Arch. de Mantoue, loc. cit. ; orig.).

[189] G. Cappello au Conseil des Dix, 1552, 7 juin. Damvillier (Arch. d'Etat de Venise, Dispacci al Consiglio dei Dicci, filza 2 ; orig.).

[190] Correspondance de Lanssac, p. p. Sauzé, p. 112.

[191] Correspondance de D. du Gabre, p. p. Vitalis, p. 78.

[192] Mémoires journaux du duc de Guise, p. 213.

[193] RONSARD, Œuvres, éd. Blanchemain, II, 41.

[194] J. DU BELLAY, Œuvres, éd. Marty-Laveaux, II, 214.

[195] Correspondance de D. du Gabre, p. 126.