Le peuple romain, avec le franc parler qui lui est habituel, distinguait autrefois trois catégories de papes, suivant l'élément qui semblait prédominer dans leur caractère ; i dotti, i politici, i zelanti, les doctes, les politiques, les zélés ou les pieux. Ces trois genres de mérite peuvent être attribués simultanément à Léon XIII. Ainsi s'exprime un des biographes de ce pontife. Il faut bien reconnaître que, pour le public contemporain de Léon XIII, les qualités de l'homme politique ont souvent laissé dans l'ombre celles du prêtre pieux. Mais il nous semble que l'histoire de ce pape, telle qu'on vient de la lire, a suffisamment mis en relief l'éminente piété qui a toujours dirigé ses actes. Qu'il défende contre les empiétements du gouvernement italien l'indépendance de son autorité suprême, qu'il cherche à faire l'union entre les catholiques français, qu'il guide les catholiques allemands dans leur lutte contre le Kulturkampf, qu'il poursuive, par tous les moyens que le respect du dogme lui permet, l'union des Eglises séparées avec l'Eglise-Mère de Rome, qu'il encourage et seconde de tous ses efforts la propagation de l'Evangile dans l'univers entier, le progrès du mouvement intellectuel et social dans le monde civilisé, son but final est toujours le même : faire régner en tout et partout la doctrine du Christ et, l'amour du Christ, principe et fin de toutes choses. On a pu définir toute l'œuvre de son pontificat en une formule : promouvoir la vraie civilisation. La formule est exacte, si on entend ces mots d'une-civilisation chrétienne, s'inspirant des principes évangéliques, s'épanouissant en œuvres de piété et de charité. Passer en revue les actes accomplis par Léon XIII ou sous son inspiration, qui eurent directement pour but le développement de la vie chrétienne : tel est l'objet du présent chapitre. I Les enseignements donnés par les encycliques de Léon XIII sui la vie chrétienne, sa nécessité, sa nature, ses motifs, son principe et ses moyens d'action, ont été si abondants et si complets, qu'on pourrait en extraire tout un traité de spiritualité. Que le retour à la vie chrétienne soit le premier, le seul remède aux maux individuels et sociaux du siècle, c'est ce qu'il a hautement affirmé à plusieurs reprises. Le moyen de guérir les plaies dont le monde souffre, écrivait-il dans son encyclique Exeunte anno du 25 décembre 1888, c'est de revenir, dans la vie publique comme dans la vie privée, à Jésus-Christ et à la loi chrétienne de la vie. Cette vie chrétienne, base de toute rénovation et de toute civilisation, Léon XIII la conçoit comme une chose à la fois très simple dans sa nature et très complexe dans ses applications. Dans sa nature, elle consiste à vivre en union avec Jésus-Christ, ou, pour parler d'une manière plus précise, en Jésus-Christ, pour Jésus-Christ et par Jésus-Christ. Pour exciter les fidèles à cette union avec le Christ, le Saint-Père le leur fait envisager dans le bienfait de la Rédemption, dans celui de l'Eucharistie et dans l'amour qui a inspiré ces deux grands bienfaits. C'est l'objet de trois encycliques remarquables : l'encyclique Tametsi, du 1er novembre 1900, sur le Christ Rédempteur ; l'encyclique Miræ caritatis, du 28 mai 1902, sur la sainte Eucharistie ; et l'encyclique Annum sacrum, du 25 mai 1899, sur le Sacré Cœur. Mais le pontife ne veut pas laisser oublier que le principe de toute vie chrétienne est la grâce, don gratuit du Saint-Esprit ; d'où son encyclique Divinum illud, du 9 mai 1897, sur l'action du Saint-Esprit et son encyclique Provida matris, du 5 mai 1895, sur la célébration de la fête de la Pentecôte. Léon XIII n'omettra pas non plus de rappeler quels sont les moyens les plus efficaces pour nous amener à la pratique de cette vie chrétienne. Avec une insistance toute particulière, il recommandera la dévotion aux deux saintes âmes qui ont le mieux pratiqué la vie d'union avec le Sauveur : la très sainte Vierge Marie et saint Joseph. A la dévotion à la sainte Vierge Marie, il ne consacrera pas moins de neuf encycliques[1], sans compter plusieurs Lettres apostoliques. Quant à la dévotion à saint Joseph, non content de la recommander avec instance par son encyclique Quanquam pluries du 15 août 1889, il la popularisera en recommandant de célébrer la fête de ce grand saint comme si elle était d'obligation, en encourageant la pieuse pratique de lui consacrer le mois de mars et en composant en son honneur une belle prière qui sera récitée dans toutes les églises, au mois d'octobre, après les exercices du Rosaire. Léon XIII envisage la vie chrétienne comme devant régénérer non seulement les individus, mais les familles, les Etats, le monde entier. On rencontrera cette pensée dans la plupart de ses encycliques et de ses Lettres apostoliques : elle inspire plus particulièrement ses neuf encycliques sur le Rosaire, sa lettre du 20 novembre 1890 sur le culte de la sainte Famille, ses Lettres du 20 septembre 1887 aux évêques d'Italie et du 2 août 1894 aux évêques du Mexique, son encyclique du 25 mai 1899 sur la consécration du genre humain au Sacré Cœur. Pour mieux entretenir et propager cette vie chrétienne, Léon XIII s'attache à la rendre très intense dans ses principaux foyers : les communautés religieuses, le clergé séculier, l'élite des fidèles. C'est le but qu'il se propose dans un grand nombre d'actes pontificaux, tels que sa constitution apostolique Condita in Christo, du 8 décembre 1900, sur les instituts religieux à vœux simples, son encyclique Depuis le jour, du 8 septembre 1899, aux évêques de France sur la formation du clergé et son encyclique Auspicato, du 17 septembre 1882, sur le Tiers Ordre de saint François d'Assise. De ce Tiers Ordre, encouragé, enrichi d'indulgences, propagé dans toutes les classes de la société, Léon XIII rêve de faire une élite de chrétiens, formant, entre le clergé et les masses populaires, entre le clergé et le monde intellectuel, un intermédiaire actif, entreprenant, ad omne opus bonum paratum[2], suivant la parole de saint Paul, prêt à se dévouer à toute bonne œuvre de piété, d'apostolat, de régénération sociale, renouvelant, au XXe siècle, les prodiges de régénération accomplis au nue siècle par les disciples de saint François. II En procédant aux béatifications et aux canonisations des saints, les papes ont toujours eu en vue de promouvoir la piété et le zèle des fidèles. En insérant le nom d'un serviteur de Dieu dans le catalogue ou canon des saints, le pape déclare agir pour la gloire de la foi catholique et le progrès de la religion chrétienne. Léon XIII, en plaçant sur les autels les sept Fondateurs des Servites de Marie, saint Pierre Claver, saint Jean Berchmans, saint Alphonse Rodriguez, saint Pierre Fourier, saint Jean-Baptiste de la Salle et saint Benoît-Joseph Labre, en prend occasion de recommander aux religieux, au clergé des paroisses et aux fidèles, les vertus dont la vie de ces admirables saints leur offre les modèles[3]. En béatifiant Grignion de Montfort, Clément Hofbauer, Pierre Chanel, Gabriel Perboyre, Gérard Majella et Jeanne de Lestonnac, ce sont encore la pureté de vie, l'obéissance religieuse jusqu'à la plus parfaite.abnégation, le zèle apostolique jusqu'au martyre, dont le Saint-Père offre au monde les vivants exemples[4]. Et, chaque fois, sa parole émue a un retentissement bienfaisant dans les âmes des chrétiens, frappe l'esprit des incrédules eux-mêmes, en offrant à leur admiration ces témoignages d'héroïque sainteté dont le concile du Vatican a déclaré qu'ils constituent les éléments d'une preuve irréfragable en faveur de la divinité de l'Eglise. Grand et saint, avait écrit Victor Hugo vers le milieu du siècle[5], ce sont les deux plus augustes épithètes dont le ciel et la terre puissent couronner une tête humaine. A la veille de l'avènement de Léon XIII, Taine, dans un ouvrage célèbre[6], avait parlé de ces légendes de saints qui ont rendu sensible le Royaume de Dieu et dressé le monde idéal au bout du monde réel, comme un magnifique pavillon d'or au bout d'un enclos fangeux. En 1884, un autre incroyant, Leconte de Lisle, ne pourra retenir son admiration devant ceux qui, Ayant fait de leur âme un ciel intérieur[7], ont mérité le titre de saint. Enfin, quatre ans plus tard,
le plus positiviste et le plus brutal des romanciers, Emile Zola, admirera,
au moins comme les personnifications d'un idéal bienfaisant, ces saints que les mortifications purifient, à qui la prospérité et la santé sont en mépris, et pour
qui la joie commence aux privations qui tuent le
corps[8]. Les progrès de l'hagiographie, réalisés pendant le dernier quart du XIXe siècle, ne sont pas étrangers à ce mouvement d'opinion. La biographie des saints n'est plus ce récit terne et sans critique qu'on a eu souvent à déplorer. Déjà, Montalembert, avec sa Vie de sainte Elisabeth, Dom Guéranger, avec sa Vie de sainte Cécile, Lacordaire, avec sa Vie de saint Dominique, Louis Veuillot, avec sa Bienheureuse Germaine Cousin, Ernest Hello, avec sa Physionomie des saints, ont élevé la biographie des saints à un ton littéraire qui la fait pénétrer dans les milieux intellectuels et mondains étrangers à la foi. Sous Léon XIII, on voit le duc de Broglie consacrer son beau talent à écrire la vie de saint Ambroise ; un professeur de l'université, connu pour ses ouvrages de critique, M. Hatzfeld, raconter la vie de saint Augustin. Un historien de valeur, futur membre de l'Institut, M. Paul Monceaux, dans les deux premiers volumes de son Histoire littéraire de l'Afrique chrétienne, dépeint les grandes figures des saints de l'antique Afrique, entre autres celle de saint Cyprien. L'admirable Jeanne d'Arc devient l'objet de nombreuses études, qui passionnent le public le plus indifférent, aux choses d'Eglise. Saint François d'Assise n'est pas l'objet de moins de travaux ni de moins d'enthousiasmes. La Sorbonne accueille avec éloges une thèse de doctorat sur saint Jean Chrysostome[9]. Un jeune poète symboliste traduit et fait admirer les poésies de saint Jean de la Croix. Paul Féval, converti, glorifie les saints de la Compagnie de Jésus[10]. Une religieuse anonyme, dont l'œuvre révèle un beau talent d'écrivain, publie à Nantes, puis à Paris, sur sainte Thérèse, deux volumes, qui, rapidement répandus, font connaître et aimer à des milliers de lecteurs la Réformatrice du Carmel[11]. Un écrivain de l'école naturaliste, ancien élève de l'école de Zola, converti à la foi et à la pratique du catholicisme, célèbre, en un style d'une couleur et d'un relief parfois excessifs, les étonnantes vertus de sainte Lydwine de Schiedam[12]. Le savant ouvrage de M. Paul Allard sur les martyrs, les biographies de saint Bernard par l'abbé Vacandard, de sainte Paule par l'abbé Lagrange, de sainte Chantal et de la bienheureuse Marguerite-Marie par l'abbé Bougaud, de Bernadette Soubirous par Henri Lasserre, ont une diffusion qui peut être comparée à celle des ouvrages d'actualité les plus en vogue. Des études de pure science entreprises sur le moyen âge mettent en lumière les grands moines de cette époque. La grandeur des physionomies de saint François de Sales et de saint Vincent de Paul se manifeste à mesure que se multiplient les études historiques sur leur époque. Une collection de vie de saints, entreprise par un professeur de l'Université, membre de l'Institut, M. Henri Joly, avec la collaboration d'une élite d'écrivains et de savants, obtient un succès considérable. Dans les Universités, dans la Société française de philosophie, on étudie la psychologie des saints, la psychologie des mystiques ; et dans le livre d'Ernest Hello, plusieurs fois réédité, sur la Physionomie des saints, que les uns lisent pour l'édification qu'ils en retirent, les autres simplement pour le charme prestigieux de son style, plus d'un se sent remué au fond de l'âme par ces quelques lignes de la Préface : Des saints ! Souffrez que je vous arrête un instant sur ce mot. Souvenez-vous de vous-même. Regardez votre abîme. Pour qu'un homme devienne un saint, songez à ce qu'il faut qu'il se passe... J'ai pris, pour dire ces choses immortelles et tranquilles, l'heure où le monde passe, faisant son fracas... Car c'est en vain que le monde s'écroule. L'Eglise compte ses jours par les fêtes de ses saints... Vous la maudissez. Elle chante. Rien n'endormira et rien n'épouvantera son invincible mémoire[13]. III Une hagiographie bien faite est par elle-même une leçon d'ascétique et de mystique. Mais l'ascétique et la mystique sont aussi, pendant le dernier quart du XIXe siècle, l'objet d'ouvrages spéciaux. Nous avons eu déjà l'occasion de parler de l'œuvre de Mgr Gay. La publication, en 1879, de ses Elévations sur la vie et la doctrine de N.-S. J.-C., et, en 1887, de ses Entretiens sur les mystères du Rosaire, fait pénétrer dans un public de plus en plus étendu la doctrine profonde et sûre de cet auteur spirituel, classé désormais parmi les écrivains mystiques les plus éprouvés. L'apparition, après sa mort, survenue en 1891, de ses Lettres de direction et de sa Correspondance avec ses amis et ses proches, exerce, à certain point de vue, une influence plus grande encore. On y découvre qu'en écrivant ses livres de spiritualité, l'évêque d'Anthédon n'a pas seulement résumé, condensé et adapté à son siècle les écrits des grands mystiques du temps passé ; il a exprimé le fond même de sa propre vie intérieure. Ce que révèlent ces lettres, c'est l'âme d'un mystique dans la trame quotidienne des événements d'une vie ordinaire. Tel, que le mot de mysticisme effarouche, se rassure, en ne trouvant dans cette vie ni extases, ni visions, ni prétentions chimériques ou extravagantes d'aucune sorte. Tel autre, à qui le mysticisme a paru, jusque-là, se réduire à une sorte de névrose, c'est-à-dire à une abdication de la personnalité, découvre au contraire que nul, plus que le vrai mystique, ne tend plus directement et n'aboutit plus efficacement à prendre possession de soi-même, car nul ne réussit mieux à se dégager, par l'union à Dieu, du tumulte, du désordre et de la servitude de sa vie inférieure, et, par suite, à organiser et unifier toutes ses forces personnelles vers la fin suprême que nous indiquent la raison et la foi[14]. Pendant que les œuvres de Mgr Gay appellent ainsi l'attention du monde vers les plus hauts sommets de la vie chrétienne ; dans une sphère plus modeste, plusieurs auteurs s'appliquent à donner une synthèse méthodique de la spiritualité. Tel est le but que se proposent : M. Ribet, dans son Ascétique et sa Mystique, en rattachant systématiquement les faits, ascétiques et mystiques aux grands principes de la théologie générale ; M. Saudreau, dans ses Degrés de la vie spirituelle, en les classant dans le cadre ingénieux et simple de son maître M. Houbart[15]. Le R. P. Maynard, des Frères-Prêcheurs, qui intitule son ouvrage Traité de la vie intérieure ou Petite Somme de théologie ascétique et mystique d'après l'esprit et les principes de saint Thomas d'Aquin, et le R. P. Rousset, du même ordre, qui publie l'Ascétisme dans l'ordre de saint Dominique, indiquent assez clairement le point de vue où ils se sont placés. Le R. P. Poulain, de la Compagnie de Jésus, dans son important ouvrage sur les Grâces d'oraison, tout en se réclamant de la spiritualité de saint Ignace, comme de la spiritualité du bon sens et de l'action par excellence, admirablement propre à aider l'âme à monter, avec la grâce de Dieu, vers la plus haute sainteté, fait profession de suivre une méthode essentiellement descriptive, recueillant et cataloguant, avec les procédés d'un savant, les faits mystiques d'après les paroles des grands saints qui les ont éprouvés. M. Beaudenom, dans les divers ouvrages qu'il a publiés sous le voile de l'anonyme, notamment dans la Pratique progressive de la confession, s'inspire plus volontiers de saint François de Sales. Le R. P. Bouchage, rédemptoriste, dans sa Pratique des vertus ou Méthode pour arriver à la perfection, s'appuie principalement sur les principes de saint Alphonse de Liguori, tandis que le R. P. Ludovic de Besse, dans sa Science de la prière, où il se propose de vulgariser l'oraison de simplicité, se rattache manifestement à saint François d'Assise. A-t-on eu raison de trouver de vagues traces du quiétisme fénelonien dans les premières éditions de la Vie intérieure simplifiée, ouvrage d'un vénérable chartreux publié par le R. P. Tissot. Du moins, les éditions postérieures ont-elles fait disparaître les passages incriminés[16]. Si la contribution de la France est grande dans le mouvement de spiritualité qui se produit sous le pontificat de Léon XIII, celle de l'Italie, de l'Espagne, de l'Angleterre, de l'Allemagne, des Etats d'Amérique mérite qu'on la mentionne avec honneur. En Italie, don Bosco, fondateur de l'Institut des Salésiens, n'est pas seulement un modèle de vie ascétique et mystique par sa vie, favorisée des dons les plus extraordinaires, qui en font le pendant de celle de notre saint curé d'Ars ; don Bosco, dans les opuscules que lui inspire la direction de ses chers écoliers et apprentis, dans lès biographies qu'il donne au public de ceux de ses enfants qui ont quitté ce monde en y laissant un parfum de sainteté, est un maître de la vie spirituelle, dont l'influence s'étend bien au delà des œuvres de sa congrégation. En Espagne, l'abbé Sarda y Salvany, connu par ses luttes ardentes contre les libéraux, se révèle, dans son Petit mois de Marie, dans son Petit mois de saint Joseph, et surtout dans ses méditations sur l'Année chrétienne, comme un guide spirituel savant et sûr. En Allemagne, le cardinal Melchers commente le Pater et écrit une vie de la Très Sainte Vierge. En Angleterre, si Newman et Manning ne suivent pas toujours la même voie dans la manière de résoudre les questions sociales et apologétiques, ils rivalisent dans le zèle avec lequel ils propagent les principes et les règles de la vie spirituelle. Le Sacerdoce éternel (The Eternal Priesthood), du cardinal Manning, qui parait en 1883, propose au prêtre catholique un idéal de perfection, fondé sur l'amour du Christ bien plus que sur ses commandements, et ne tendant à rien de moins qu'à modeler l'âme et le sacerdoce de tout prêtre terrestre sur l'âme et le sacerdoce du Prêtre Eternel, Jésus-Christ. En Amérique, douze ans plus tard, le cardinal Gibbons aborde un sujet semblable dans son livre, l'Ambassadeur du Christ. D'une plume qui a le don de tout colorer, de tout animer, de tout rajeunir, le prince de l'Eglise expose au clergé américain l'idéal du prêtre pieux, savant et zélé. A peine parues, ces œuvres des don Bosco, des Newman, des Manning, des Gibbons sont traduites en France. Elles y renforcent, elles y amplifient le courant mystique, que les œuvres françaises y ont déjà déterminé. Mais les productions dont nous venons de parler n'ont guère exercé d'action que sur le monde catholique. Trois auteurs, plus en contact avec le monde profane, vont l'initier à ce courant d'idées et de sentiments. Le premier de ces auteurs est Ernest Hello. Sous le pontificat de Pie IX, la renommée d'Ernest Hello a à peine franchi les limites du public qui lit l'Univers et la Revue du monde catholique. Tout au plus sait-on que Louis Veuillot le considère comme un penseur. Mais voici qu'en 1886, dans la France Juive, dont le succès de librairie est immense, Edouard Drumont le signale comme un homme de génie, qui a traversé ce siècle sans que ce siècle s'en soit aperçu[17] ; voici que Barbey d'Aurevilly, en 1887, dans un chapitre étincelant de son volume Philosophes et écrivains religieux, le place d'emblée au-dessus de Vauvenargues, de La Rochefoucauld et de La Bruyère[18] ; qu'Adrien Mithouard, dans une conférence publique, demande du bronze pour Hello ; qu'en 1894, Joseph Serre consacre un volume spécial à celui qu'il appelle le Pascal de Kéroman[19]. Or, Ernest Hello a traduit et commenté les œuvres de la Bienheureuse Angèle de Foligno, de Ruysbrœk l'Admirable, de Jeanne Chézard de Matel, et ses autres écrits, le Style, l'Homme, le Siècle, les Paroles de Dieu, les Contes extraordinaires eux-mêmes, sont d'inspiration mystique. Ne fût-ce que par curiosité, que par l'attrait d'un style
qui, au milieu de certaines obscurités nuageuses, a des éclats fulgurants, le
monde des lettres et des arts se tourne vers ce catholique audacieux, plus libéral que Lacordaire et plus intransigeant que
Veuillot[20].
Mais voici qu'en 1895, un auteur plus hardi, et qui n'est pas, lui, un
inconnu pour ses contemporains frivoles, un disciple de Zola, à qui Barbey
d'Aurevilly a naguère porté le défi de faire un pas
de plus dans le sens épuisé du blasphème, Joris-Karl Huysmans, entré
en 1892 dans l'Eglise catholique par la porte du mysticisme, raconte son
itinéraire en un volume intitulé En route, bientôt suivi de la
Cathédrale, de l'Oblat, des Foules de Lourdes, où les
émotions de l'âme religieuse sont décrites avec les couleurs les plus
réalistes de l'art le plus moderne. Les uns s'effarouchent, d'autres
applaudissent, mais les livres sont lus, commentés, discutés ; et la question
de la vie intérieure est à l'ordre du jour. Elle y est d'autant plus que, tandis qu'un disciple de Zola célèbre en prose naturaliste la mystique du catholicisme, un poète étrange, aux contrastes déconcertants, Paul Verlaine, la glorifie en des vers dont la facture, ingénue et savante, naïve et subtile, s'impose à l'attention de tous les lettrés : Ô mon Dieu, vous m'avez blessé
d'amour, Et la blessure est encore vibrante, s'écrie-t-il, en des tercets qui seront bientôt sur toutes les lèvres. Je ne veux plus aimer que ma Mère Marie, déclare-t-il en un sonnet bientôt fameux. Le volume qui contient ces vers s'intitule : Sagesse. Un religieux ne craint pas de rapprocher le nom de son auteur des plus grands noms de la littérature catholique, et publie un livre sous ce titre : De Dante à Verlaine[21]. Un prêtre de l'Oratoire écrit[22] : Il faut ouvrir sainte Thérèse ou saint Jean de la Croix pour trouver des notations analogues. Il faut bien reconnaitre que la religiosité d'un Lamartine, d'un Hugo, d'un Vigny et d'un Musset pâlit devant le pur accent catholique du dialogue qui débute par ces mots : Mon Dieu m'a dit : Mon fils, il
faut m'aimer. Tu vois Mon flanc percé, mon cœur qui rayonne et qui saigne. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . . A quoi le poète répond : Seigneur, j'ai peur. Mon âme en moi
tressaille toute. Je vois, je sens qu'il faut vous aimer. Mais comment ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . J'ai l'extase et la terreur
d'être choisi. Ah ! quel effort, mais
quelle ardeur ! Et me voici, Plein d'une humble prière, encor
qu'un trouble immens Brouille l'espoir que votre voix
me révéla, Et j'aspire en tremblant. — Pauvre âme, c'est cela ! La question de la mystique chrétienne est mûre pour faire l'objet de l'étude des corps savants. M. Emile Boutroux, de l'Institut, professeur de Sorbonne, publie dans la Revue politique et littéraire, puis en brochure séparée, une étude sur ln Psychologie du mysticisme, et les états mystiques de sainte Thérèse feront l'objet d'une discussion philosophique, en 1906, dans la Société française de philosophie. Quel chemin parcouru depuis un siècle, depuis le jour où Bernardin de Saint-Pierre, ayant osé prononcer seulement le nom de Dieu dans une séance de l'Institut, se faisait chasser, pour ce fait, de l'assemblée ! IV Sans doute, au moment même où des esprits éminents, l'opinion publique elle-même, s'intéressent ainsi aux manifestations les plus hautes de la vie spirituelle, les pouvoirs publics, poussés par les sectes, ne cessent, en France comme en Allemagne, en Italie et en Suisse comme en Autriche, d'attaquer ces foyers par excellence de vie mystique et ascétique, qui sont les congrégations religieuses. Mais Léon XIII se souvient sans doute de la maxime de sainte Thérèse, à savoir que, plus l'armée des ennemis est menaçante, plus il importe de fortifier les citadelles[23]. Les citadelles, ce sont d'abord, pour lui, ces grands ordres qui, tels que ceux de saint Benoît, de saint François d'Assise, de saint Dominique, de saint Ignace, ont, tant de fois, su défendre, conserver et renouveler au besoin, dans l'Eglise de Dieu, les trésors de la vie spirituelle. Comme la plupart des familles religieuses, l'ordre antique de saint Benoît a beaucoup souffert, à la fin du XVIIIe siècle, des atteintes du gallicanisme, du jansénisme, du joséphisme et de la crise révolutionnaire, qui a été l'aboutissement de toutes ces erreurs. Mais le XIXe siècle l'a vu renaître et prospérer en une végétation puissante. Léon XIII le trouve établi sous diverses formes dans la plupart des nations de l'Europe. C'est la Congrégation du Mont-Cassin, avec ses 16 monastères ; la Congrégation anglaise, avec ses 4 couvents et ses nombreuses missions ; la Congrégation suisse et ses 6 maisons. La Congrégation de Bavière en compte 8 ; celle de France, 10 ; celle du Brésil, 11. Deux Congrégations distinctes se sont établies en Autriche ; deux en Amérique ; huit monastères ne se rattachent à aucune Congrégation. L'efflorescence est magnifique. C'est surtout par leurs œuvres d'érudition que les bénédictins du me siècle ont continué à servir l'Eglise ; les travaux apostoliques ne leur sont pourtant point étrangers ; en Italie, en Suisse, en Belgique et en Amérique, des établissements d'instruction secondaire sont annexés aux principales abbayes ; il s'est même fondé, en 1887, près de Landsberg, en Bavière, une Congrégation bénédictine de Sainte-Othile, spécialement vouée à l'évangélisation des nègres du Zanguebar. En 1893, Léon XIII croit le moment venu de fortifier ce mouvement de vie religieuse, en établissant une fédération entre toutes ces congrégations diverses, fondées sous le patronage de saint Benoît. Après avoir pris l'avis des représentants de ces différentes familles, il décide, par un Bref du 12 juillet 1893, qu'elles seront désormais placées sous la juridiction suprême d'un Abbé Primat. Cet Abbé Primat résidera à Rome, dans l'abbaye primatiale de Saint-Anselme, sur l'Aventin, où une Ecole supérieure de philosophie sera établie comme centre et foyer d'études de tout l'ordre bénédictin, sans préjudice toutefois de la légitime indépendance des congrégations et abbayes dans ce qu'elles ont décrété de conforme aux directions du Saint-Siège et au droit commun. Les fils de saint François d'Assise sont aussi répartis, depuis des siècles, en plusieurs familles religieuses. Les Frères Mineurs de l'Observance, les Frères Mineurs conventuels et les Frères Mineurs capucins ont chacun leur général. De plus, les Frères Mineurs de l'Observance se divisent en Observants proprement dits, et Frères Mineurs de la stricte observance, appelés Réformés en Italie, Récollets en France, Alcantarins en Espagne, etc. Ces différents Observants forment des provinces séparées sous l'autorité du Général des Frères Mineurs. Une Constitution apostolique, du 4 octobre 1897, fond en une seule ces diverses observances, et rappelle que saint François, en fondant une société religieuse, l'a voulue unie en un seul corps et régie par une même règle, sous un même chef, car toute force s'accroit par l'union et s'affaiblit par la division. L'année suivante, une Lettre apostolique du 25 novembre 1898, adressée au Ministre général des Frères Mineurs, sur les études scripturaires et théologiques, la prédication et le tiers ordre franciscain, donne une impulsion nouvelle aux travaux des fils de saint François, de plus en plus fidèles aux préceptes que leur a laissés leur grand Fondateur : Pratres illi, quibus gratiam dedit Dominus laborandi, laborent fideliter et devote[24]. Les témoignages de confiance et les encouragements donnés aux fils de saint Dominique par Léon XIII sont innombrables. Il honore de la pourpre romaine plusieurs membres de l'ordre ; il recommande avec instance au monde entier la dévotion dominicaine du Rosaire ; mais surtout il compte sur le zèle et sur la science des Frères Prêcheurs pour propager partout la théologie du Docteur Angélique, saint Thomas, où il voit l'antidote des principales erreurs modernes, k fondement de la doctrine qui peut le plus efficacement contribuer à la restauration de la foi et des mœurs dans les temps présents. En prenant possession du Siège apostolique, Léon XIII a trouvé les fils de saint Ignace dispersés. Chassés de la Suisse depuis 1847, de l'Allemagne depuis 1872, ils sont expulsés de France en 1880 ; mais ; légalement bannis en tant que corps, ils ne cessent de lutter individuellement pour la conservation de leurs œuvres, en se plaçant sur tous les terrains que leur offre encore la légalité ; et leurs cinq Assistances, d'Italie, de France, d'Allemagne, d'Espagne et d'Angleterre, groupées à Rome, autour de leur Général, continuent à diriger leurs entreprises d'apostolat en coordonnant leurs efforts. Par un Bref du 13 juillet 1886, le Saint-Père, voulant, dit-il, répondre aux attaques et aux injures prodiguées aux sociétés religieuses qui se sont le plus distinguées par leurs bienfaits envers l'Eglise et la société, en donnant à ces mêmes sociétés religieuses les témoignages de satisfaction et de bienveillance qui leur sont dus, déclare confirmer, en leur donnant leur pleine et totale efficacité, tous les privilèges, exemptions et immunités accordés par ses prédécesseurs à la Compagnie de Jésus. Que cette lettre, dit-il, soit considérée comme un témoignage de notre affection constante envers cette illustre Société, si féconde en hommes de science et de zèle, et qui, au milieu des graves épreuves qu'elle supporte pour la cause de la justice, ne cesse de travailler, d'un cœur allègre et invincible, dans la vigne du Seigneur. La grandeur des œuvres réalisées par les congrégations religieuses dont nous venons de parler, ne cache pas à Léon XIII les fléchissements dont certains grands monastères se rendent coupables en Autriche. Il y envoie des visiteurs extraordinaires, et, d'après les enquêtes de ces derniers, prend les dispositions utiles pour parer aux abus. V Non content de veiller à la conservation de la discipline religieuse dans les anciens ordres religieux, le pontife pourvoit activement au développement des congrégations nouvelles, que les besoins des temps nouveaux ont suscitées. En 1876, Pie IX avait accordé à l'institut des Chanoines Réguliers de l'Immaculée-Conception, fondé à Saint-Claude par un vicaire général du diocèse, Dom Gréa, ce premier encouragement connu dans le droit canonique sous le nom de décret de louange. Le 12 mars 1887, Léon XIII, à la suite d'un rapport très élogieux qui lui est adressé sur les fruits d'édification donnés par la congrégation nouvelle, lai confère, par son décret Vinea Domini Sabaoth, l'approbation définitive. Le pieux fondateur croit devoir protester contre le titre d'ordre nouveau donné à sa jeune société. Il n'a voulu que rajeunir une antique institution : celle de ces collèges de clercs de tout ordre qui, au moyen âge, exerçaient, soit sous la juridiction immédiate de leur évêque, soit sous celle d'un abbé, prieur ou prévôt dépendant de l'évêque, un ministère pastoral auprès d'une église. Ils y avaient la vie commune, y faisaient même les vœux qui constituent l'état religieux, et y menaient de front une double fonction : récitant l'office divin suivant toute la plénitude des règles liturgiques, et remplissant tous les devoirs du ministère paroissial. De 1871 â 1887, la pieuse communauté de Saint-Claude a provoqué, non seulement l'attention, mais encore l'admiration de plusieurs saints prêtres, de plusieurs prélats éminents. Le R. P. Desurmont, rédemptoriste, le R. P. Giraud, des Missionnaires de la Saiette, Mgr de Ségur, les cardinaux Caverot et Mermillod aiment à séjourner au milieu d'elle. Le biographe de Mgr d'Hulst a raconté comment le recteur de l'Institut catholique de Paris en fut si édifié, qu'il conçut un moment le désir d'y entrer[25]. Le décret d'approbation donné à l'Institut par le souverain pontife est pour lui le point de départ d'un grand essor. En 1890, Dom Gréa établit sa maison mère dans l'antique monastère de Saint-Antoine, au diocèse de Grenoble. Des essaims, Sortis de la ruche-mère, vont porter la vie liturgique en Ecosse, au Pérou, mais surtout au Canada, sous la direction de Dom Paul Benoît. En 1896, quand Léon XIII érige en abbatiale l'église de Saint-Antoine et confie le titre de premier à Dom Gréa, la société compte plus de cent profés, répartis dans deux maisons majeures et dans quatorze prieurés[26]. Une autre institution nouvelle est l'objet des plus chauds encouragements de Léon XIII : c'est celle des Salésiens, fondée à Turin par Don Bosco, pour prendre soin des enfants abandonnés, mais qui a dû, depuis, élargir son but primitif et s'occupe d'un grand nombre d'œuvres de zèle. Débordant de l'Italie, puis de l'Europe, elle a reçu en partage, en 1883, de la part du souverain pontife, le vicariat apostolique de la Patagonie du Nord et la préfecture apostolique de la Patagonie du Sud. A la mort de son fondateur, survenue en 1888[27], elle occupe plus de 200 maisons ; dix ans plus tard, ce nombre sera presque doublé ; et l'institut des Filles de Marie Auxiliatrice, fondé par Don Bosco pour s'occuper d'écoles enfantines, d'ouvroirs de jeunes filles et de toutes œuvres d'assistance dans les missions lointaines, aura pris un développement analogue. L'institut des Petites Sœurs de l'Assomption, fondé, comme les congrégations précédentes, sous le pontificat de Pie IX, prend également, sous Léon XIII, un développement extraordinaire. Leur fondateur, le P. Pernet, des Augustins de l'Assomption[28], leur a donné pour mission de se faire les servantes des pauvres : de s'acquitter de tous les soins du ménage pendant les maladies de la mère de famille, ou de lui prêter aide durant la maladie des siens, sans exiger jamais de ceux qu'elles soigneront ou de leur famille aucun salaire ni rémunération d'aucune sorte. Une statistique, établie en 1893, porte qu'en une seule année les Petites Sœurs des pauvres ont réhabilité près de 600 mariages, amené au baptême et à la première communion une foule d'adultes, fait faire leurs pâques à 4 ou 5.000 personnes et obtenu 40 abjurations[29]. L'Autriche ne compte qu'une seule congrégation adonnée à l'apostolat des pays infidèles, et encore cette congrégation est-elle d'origine allemande ; mais, en 1889, elle fonde, dans la banlieue de Vienne, un établissement qui comprend juvénat, noviciat et scolasticat : c'est la Société du Verbe divin (Gesellschaft des göttlichen Wortes), connue aussi bous le nom de Société des missionnaires de Steyl. Le nombre des sujets de la Société s'accroît rapidement : il atteint le nombre de 115 en 1894, celui de 236 en 1899. Léon XIII lui confie l'évangélisation de plusieurs colonies allemandes en Afrique, et, en Chine, la mission de Chan-Toung. En 1900, M. l'abbé Pisani, se faisant l'interprète d'un sentiment général, exprime le vœu que l'introduction dans la Société de Steyl de nombreux Autrichiens tempère l'influence des vertus énergiques mais quelque peu batailleuses de leurs frères allemands[30]. Le pontificat de Léon XIII est aussi marqué par le grand développement de certaines associations dont les membres, sans se distinguer des laïques par le costume, ni même par la cohabitation, se lient par des promesses d'obéissance et se vouent ainsi à toutes sortes d'œuvres de charité. Léon XIII apprécie les services rendus par de pareilles sociétés, mais ne croit pas le moment venu de leur accorder une approbation définitive. En 1896, l'une de ces associations, celle des Filles de Saint-François-de-Sales, fondée par Mme Carré de Malberg, comptait 2.090 membres. Le 26 avril 1911, le pape Pie X, en approuvant ses constitutions, a défini le but de la Société. Nous citons textuellement les principaux passages du décret approbatif, parce qu'il consacre une forme nouvelle de vie religieuse. Cette Association, dit le décret pontifical, enrôle au nombre de ses membres, non seulement des jeunes filles et des veuves, mais aussi des femmes vivant dans l'état du mariage, en quoi elle se différencie absolument de toutes les congrégations religieuses[31]. Elle se propose une double fin : la sanctification de chacun de ses membres et un constant apostolat... La sanctification de chaque associé est pieusement aidée par les probations ou examens méthodiques... En ce qui concerne l'apostolat, il a principalement pour objet, en premier lieu, le bon exemple à donner à ses proches dans la vie de famille, ensuite dans les œuvres de charité en faveur du prochain, même dans les contrées les plus éloignées [32]. Ces derniers mots font allusion à l'œuvre des catéchistes-missionnaires, entreprise en 1889 par les Filles de Saint-François-de-Sales, et qui, au moment de la mort de Léon XIII, avaient exercé, dans les missions de l'Inde, un apostolat des plus fructueux. VI Tant de foyers de vie religieuse intense ne pouvaient que produire de nombreuses œuvres d'édification. Nous avons eu déjà l'occasion de décrire les œuvres d'éducation, d'assistance et d'apostolat fondées sous le pontificat de Léon XIII ; il ne nous reste qu'à faire l'exposé des œuvres de piété proprement dites. On aura quelques données sur ces dernières, en parcourant les comptes rendus des nombreux congrès catholiques tenus sous le pontificat de Léon XIII : congrès catholique national de Reims en 1896 ; congrès de la jeunesse catholique de France tenus à Reims en 1896, à Besançon en 1898, à Paray-le-Monial en 1899, à Châlons en 1903 ; congrès des catholiques de Hongrie organisés en 1893 ; congrès belge d'Anvers en 1894 ; congrès des catholiques allemands tenus à Bochum en 1889, à Cologne en 1894, à Munich en 1895 ; congrès des catholiques espagnols tenus à Séville en 1892 et à Tarragone en 1894 ; congrès des catholiques italiens organisés en 1894 ; congrès des catholiques américains tenu à Chicago en 1893. Des renseignements plus précis seraient fournis par les congrès internationaux consacrés au culte de l'Eucharistie et au culte de la Sainte Vierge, par plusieurs congrès sacerdotaux, par un Certain nombre de congrès organisés par le tiers ordre franciscain, et par les comptes rendus des grands pèlerinages nationaux et internationaux à Lourdes et à Jérusalem. Pour nous borner aux seules grandes lignes que comporte le plan de cette histoire, nous nous contenterons de mentionner les deux dévotions dont le développement semble avoir caractérisé le mouvement de la piété sous le pontificat de Léon XIII, la dévotion à l'Eucharistie et la dévotion à la Sainte Vierge ; nous signalerons ensuite la forme particulière que ces dévotions ont revêtue dans les grands pèlerinages. Née en 1879 dans un cœur profondément dévoué au sacrement de l'autel, aussitôt adoptée par ce grand apôtre de la communion fréquente que fut Mgr de Ségur, l'idée de convoquer des représentants du monde entier à un congrès des œuvres eucharistiques rencontre d'abord peu d'enthousiasme. On doute de son succès. Mais le cardinal Dechamps, archevêque de Malines, ayant exposé le projet au Saint-Père, obtient de lui une bénédiction spéciale, qui encourage les bonnes volontés. Un comité se forme à Paris, sous la présidence de Mgr de Ségur. Léon XIII, en encourageant la pieuse initiative, a laissé toute latitude pour la fixation de l'époque et du lieu du congrès. Au début de l'année 1881, quelques fervents chrétiens de Lille se mettent à la disposition du comité pour organiser dans leur ville l'assemblée projetée. On est précisément à l'heure où la secte maçonnique, levant le masque, menace de ruiner toutes les institutions catholiques. Les religieux ont été expulsés de leurs demeures. Sous un prétexte de neutralité, les pouvoirs publics mènent ostensiblement une campagne antireligieuse. Le 25 avril 1881, Mgr de Ségur, au nom du comité d'organisation, rédige et communique à la presse catholique l'appel suivant : Le déchaînement de haines et de persécutions qui se manifeste contre le catholicisme est tel, que les hommes se sentent incapables, par eux-mêmes, d'arrêter le mal. C'est au cœur et à l'essence même du catholicisme que nos ennemis s'attaquent ; c'est le cœur et l'essence de notre divine religion que nous voulons défendre... Le projet d'une assemblée générale des représentants des œuvres du Très Saint Sacrement et des personnes dévouées au culte de l'Eucharistie, a reçu la bénédiction et les encouragements du Vicaire de Jésus-Christ. Puisque le mal est universel, l'assemblée sera internationale ; toutes les contrées seront invitées à s'y faire représenter. Le congrès eucharistique a lieu à Lille, les 28, 29 et 30 juin 1881, dans un local de l'Université catholique de cette ville. Mgr de Ségur, qui devait le présider, avait rendu son âme à Dieu le g juin. Tous les ordres religieux y sont représentés. Rome, l'Italie, la Belgique, l'Espagne, l'Autriche, l'Angleterre, la Suisse, la Hollande, le Mexique, le Chili, les Antilles y ont envoyé des délégués. Mille adhérents prennent part aux séances, dont le double objet est : la propagande eucharistique et la réparation des crimes commis contre les droits de Dieu et de son Eglise. Le succès de ce congrès est si grand, que ses promoteurs décident d'en faire une institution périodique. De 1881 à 1903, des congrès eucharistiques se tiennent, avec un succès qui ne se dément jamais, à Avignon, à Liège, à Fribourg, à Toulouse, à Paris, à Anvers, à Jérusalem, à Reims, à Paray-le-Monial, à Bruxelles, à. Lourdes, à Angers et à Namur. Au lendemain de l'un de ces congrès, le R. P. de Gabriac écrivait[33] : Ceux qui ont pu assister aux réunions d'études, aux conférences sacerdotales, aux assemblées générales, aux exercices du soir, ont conservé de tout cet ensemble un souvenir suave et profond, qu'il est impossible d'oublier et de reproduire... C'est que Jésus-Christ était là, roi invisible et permanent, dominant les siècles et les passions du monde... L'œuvre des congrès est une œuvre d'édification, de lumière et d'espérance. En 1898, les merveilleux résultats donnés par les congrès eucharistiques suggèrent à quelques catholiques la pensée d'un congrès marial, c'est-à-dire d'un congrès destiné à propager le culte de la Sainte Vierge et les œuvres qui s'y rattachent. Aux congrès de Bruxelles et de Lourdes, l'idée est acclamée. Ce me siècle, qui touche à sa fin, n'a-t-il pas été, par les apparitions de la Sainte Vierge dans la chapelle des Filles de la Charité de la rue du Bac en 1830, sur les hauteurs de la Saiette en 1846, à la grotte de Lourdes en 1858, à Pontmain en 1871, à Pellevoisin en 1876, le siècle de la glorification de la Vierge Marie ? Quoi de plus naturel que de le clore par une imposante manifestation en l'honneur de la Mère de Dieu et des hommes L'assemblée se réunit le 5 septembre 1900 à Lyon, dans la nouvelle église de Fourvières. Les séances générales, les réunions des commissions, les cérémonies pieuses se succèdent pendant trois jours. Comme aux congrès eucharistiques, l'univers entier est représenté. L'Angleterre, l'Espagne, la Pologne, la Suisse, la Belgique, les Indes, le Liban, d'autres nations encore viennent dire combien elles aiment et honorent la Vierge Marie. Des théologiens s'appliquent d'abord à rappeler comment la Sainte Vierge, par sa dignité de Mère de Dieu, occupe le centre même du dogme révélé, résumant en son titre de Θεοτοκος ou Deipara tous les mystères chrétiens. Trente monographies décrivent les honneurs rendus à la Vierge Mère dans autant de diocèses ; une centaine de rapports ont pour objet les lieux de pèlerinage où les foules vont solliciter le secours de la Mère de Dieu. En se séparant, le 8 septembre, les membres du congrès émettent le vœu que le congrès marial devienne une institution permanente, que le clergé déploie tout ce qu'il a de zèle pour restaurer les sanctuaires antiques de la Sainte Vierge et pour y conduire les foules. VII Les grands pèlerinages organisés à Jérusalem et à Lourdes se révèlent, en ce moment, comme les moyens les plus puissants de réveiller la foi dans les masses. Les pèlerinages de pénitence à Jérusalem ont été entrepris pour la première fois en 1882 par le R. P. Picard, des Augustins de l'Assomption. Formidable entreprise, que bien des gens considèrent alors comme téméraire, chimérique, folle. Le hardi religieux ne rêve rien de moins que de transporter en Terre sainte, en un pays qu'il connaît à, peine, avec des ressources dont il ne dispose pas encore, un millier de pèlerins. Mais les objections pratiques ne l'arrêtent pas. Sa foi ardente, sa ténacité viennent à bout des obstacles qui, jusqu'au dernier moment, se dressent devant lui. L'arrivée au Saint-Sépulcre d'une immense caravane de 1.200 pèlerins, crue précède le drapeau français, cause, parmi les populations orientales, une impression profonde. L'œuvre est désormais fondée. Les pèlerinages vers la Ville sainte se multiplieront. Le 15 avril 1893. Léon XIII, recevant en audience les pèlerins de Jérusalem, conduits par le P. Picard, leur adresse les paroles suivantes : Vos pèlerinages nous apparaissent comme autant de pacifiques croisades... Les prières qu'annuellement vous faites monter au ciel des lieux mêmes où a prié le Sauveur, les actes de pénitence que vous accomplissez là où il a pleuré et souffert, réveillent l'esprit chrétien chez un grand nombre, et fortifient chez d'autres les solides vertus[34]. Et comme ce pèlerinage de 1893 doit être l'occasion d'un congrès eucharistique à Jérusalem, le Saint-Père fait le vœu que ce congrès, en même temps qu'il augmentera chez les catholiques l'amour du Dieu de nos autels, soit pour les chrétiens séparés une muette mais éloquente invitation à venir se fusionner avec les pèlerins dans un seul et même sentiment de foi, d'espérance et de charité[35]. Le gouvernement français lui-même, si préoccupé alors de la lutte anticléricale dans sa politique intérieure, voit dans les pèlerinages de pénitence à Jérusalem une force à utiliser pour faire pénétrer en Orient l'influence occidentale ; le ministre des Affaires étrangères subventionne l'entreprise ; M. Gambetta, sur la demande du consul de France à Jérusalem, envoie, en une seule fois, aux directeurs de l'œuvre une somme de 11.000 francs[36] ; et quand, en 1900, le gouvernement français fait poursuivre douze membres de la congrégation de l'Assomption, en vertu de l'article 291 du code pénal, pour association illicite, l'avocat des religieux, M. Bazire, après avoir rappelé ces faits, peut répliquer fièrement à l'organe du ministère public : Est-ce peu de chose, pour notre protectorat en Orient, que ces milliers de pèlerins français qui sillonnent les routes de la Palestine ? Est-ce peu de chose, que cette entrée triomphale à Jérusalem avec les cavas du consul général de France ?... Vous avez encore présent dans la mémoire ce pèlerinage extraordinaire de l'empereur d'Allemagne, enveloppé du manteau de soie blanche, cherchant un de ces effets à la fois théâtral, politique et mystique dont il est coutumier. Depuis vingt ans, les Pères de l'Assomption ont répondu à cette provocation de l'autocrate allemand, en faisant entrer par les portes de Jérusalem le seul souverain de notre démocratie, le peuple...[37] C'est aussi le peuple que les Pères de l'Assomption conduisent à Lourdes, où, d'année en année, le nombre des pèlerins, la splendeur des manifestations, l'enthousiasme des foules ne font que grandir. D'après une statistique dressée par les missionnaires de Lourdes, le chiffre des pèlerins, qui était, en 1878, de 65.000, s'élève, en 1904, à 211.000[38]. Ces 211.000 pèlerins sont venus en deux cents groupes organisés, dont vingt-trois formés à l'étranger. Ces groupes étrangers n'arrivent pas seulement des divers pays de l'Europe ; il en vient de l'Australie, de la Chine, de l'Inde, du Japon, de l'Equateur, etc. Et ces nombres imposants sont loin, parait-il, de représenter toute la multitude qui visite annuellement le vénéré sanctuaire. Les pèlerins isolés sont plus nombreux, et de beaucoup, que ceux qui arrivent en pèlerinages organisés[39]. Les deux manifestations les plus grandioses sont celles de 1883, à la célébration du vingt-cinquième anniversaire de l'apparition miraculeuse, et celle de 1901, lors de l'inauguration de l'église du Rosaire. Le sanctuaire de Lourdes reçoit, à cette occasion, la visite de vingt-cinq prélats, dont deux cardinaux et un patriarche. Outre les pèlerinages nationaux, qui ont commencé en 1873, sous l'inspiration des Pères de l'Assomption, on inaugure, à la fin du XIXe siècle, des pèlerinages exclusivement composés d'hommes. Trois de ces pèlerinages ont lieu en 1899, 1901 et 1903. On compte, dans l'un, une trentaine de mille hommes ; dans les autres, cinquante-cinq à soixante mille. — Soixante mille hommes ! s'écrie, après avoir relaté ces chiffres, l'historien de Notre-Dame de Lourdes[40]. Une véritable armée ! On peut dire que rien de pareil ne s'est vu depuis les croisades. Croisades pacifiques, bienfaisantes et sanctifiantes. Un auteur dont la verve n'a pas ménagé les critiques à tout ce qu'il a découvert de banal, de vulgaire et de laid dans les pèlerinages de Notre-Dame de Lourdes, Huysmans, en a excellemment décrit le charme délicieux et la surnaturelle bienfaisance. Lourdes, dit-il[41], est une merveille... Son hôpital est, à la fois, un enfer corporel et un paradis d'âmes... Où constater un épanouissement de la grâce et une efflorescence de la charité plus grande qu'ici ?... A cette heure, où la société, fissurée de toutes parts, craque, où l'univers, empoisonné par des germes de sédition, s'inquiète, il semble que cette grotte embrasée de Lourdes ait été placée par la Vierge comme un grand feu allumé sur la montagne, pour servir de repère et de guide aux pécheurs égarés dans la nuit qui envahit le monde. Il était naturel que Léon XIII, si dévot à la Vierge Marie, s'intéressât à ce mouvement. En pensée, disait-il un jour, je fais bien souvent le pèlerinage de Lourdes. En 1889, il délègue le cardinal Richard pour bénir en son nom l'église du Rosaire ; en 1901, il se fait représenter par le cardinal archevêque de Reims à la consécration de l'église. Il autorise un office et une messe propres en l'honneur de la miraculeuse apparition. Il fait construire, dans les jardins du Vatican, une grotte semblable à celle que la Vierge a honorée de se présence ; et, sur le bureau de son cabinet de travail, une statue de Notre-Dame de Lourdes est l'objet de sa tendre vénération. VIII A mesure que les infirmités de la vieillesse avertissent Léon XIII de sa fin prochaine, on dirait que sa piété envers la Sainte Vierge devient plus confiante et plus sereine. Le 26 mai 1903, dans la Lettre apostolique par laquelle il institue une commission cardinalice pour préparer les fêtes du cinquantenaire de la définition de l'Immaculée-Conception, il écrit : La dévotion envers la Mère de Dieu n'est pas seulement une de nos plus chères affections, et cela depuis notre enfance ; elle est encore pour nous l'un des plus puissants secours accordés par la Providence à l'Eglise catholique. Le 20 juin de la même année, il écrit à l'archevêque de Cambrai : Pour guérir les plaies sociales, il n'y a pas de remède plus efficace que l'invocation de Celle qui, après avoir, par son divin Fils, procuré le salut du genre humain, a mérité d'être appelée le très puissant Secours des chrétiens. Au moment même où le pontife écrit ces mots, un acte du gouvernement français vient lui apporter une amertume qui, au témoignage de ses familiers, a probablement hâté le moment de sa mort : c'est la publication, par le cabinet de M. Combes, d'un Livre Jaune qui, par un choix systématique de documents, a pour but de rendre le Saint-Siège responsable devant l'opinion de toutes les mesures persécutrices dont l'Eglise de France est la victime. Le 22 juin, en ouvrant, pour la dernière fois, le consistoire, Léon XIII commence son allocution par ces mots : Vénérables Frères, vous ne doutez pas de la joie que j'éprouve à vous voir autour de moi. Pourquoi faut-il que je n'aie à vous dire que des choses tristes ? Deux jours après, il fait publier par l'Osservatore romano une protestation énergique contre l'odieux procédé du ministre français. On l'entend répéter à son entourage : Ils m'ont trompé ! Ils m'ont trompé ! Le 2 juillet, recevant Mgr de T'Serclaes, supérieur du séminaire belge à Rome, dans une audience qui devait être la dernière, il lui dit : Je sens qu'il est temps pour moi de terminer ma vie[42]. Trois jours après, le 5 juillet, un bulletin médical annonce à Rome et au monde entier la douloureuse nouvelle de la maladie grave qui, de puis l'avant-veille, s'est déclarée chez l'auguste pontife. Le cardinal Mathieu, témoin des derniers moments de Léon XIII, a raconté avec émotion les touchants incidents de sa pénible agonie : sa dernière entrevue avec son dévoué secrétaire d'État, à qui il veut demander humblement pardon des torts qu'il a pu avoir envers lui, la protestation du cardinal Rampolla à ces paroles, l'affaiblissement graduel du pontife au milieu des cardinaux en prière, puis enfin les derniers et douloureux soupirs du grand pape qui, tourné vers le cardinal Serafino Vannutelli, récitant les prières des agonisants, répond à chaque invocation par un faible gémissement, qui est un effort pour dire : Ora pro me, priez pour moi[43]. Léon XIII rend son âme à Dieu le 20 juillet 1903, âgé de quatre-vingt-treize ans. Les manifestations extraordinaires que la dernière maladie et la mort de Léon XIII provoquent dans le monde entier ; les témoignages de regret et de sympathie universels qui font du deuil de l'Eglise un deuil vraiment mondial ; les hommages rendus à la mémoire du pontife dans toutes les nations, même non catholiques, même non chrétiennes, par la voix des souverains et par les organes de l'opinion publique, attestent quelle grande place la personnalité de Léon XIII tenait dans son époque. Dans les Etudes, le R. P. Prélot écrit[44] : Léon XIII s'inscrira parmi les papes qui ont laissé de leur passage dans la chaire de saint Pierre la trace la plus originale et la plus personnelle. Dans le Correspondant[45], M. Etienne Lamy remarque que peu de papes ont, à l'égal de Léon XIII, étendu sur l'universalité de leur tâche l'universalité de leurs dons ; car, aussi attentif à entretenir la piété qu'à accroître la science, à fortifier la doctrine, à développer l'apostolat, à introduire dans la vie sociale l'intelligence de la justice évangélique, à sauvegarder le magistère religieux des conflits avec les gouvernements humains, il a accompli jusqu'à la plénitude chacune de ces fonctions comme si elle eût été unique. Et quelques-uns font observer que ces grandes tâches ont été remplies, que cet ascendant inouï de la papauté sur les princes et sur les peuples s'est exercé en un moment où le Saint-Siège s'est trouvé plus dépourvu de toute puissance matérielle qu'il ne l'avait jamais été depuis les catacombes. Un résultat si inattendu est dû sans doute à une assistance divine, mais il doit être aussi attribué aux éminentes qualités du pontife qui vient de mourir. FIN DU NEUVIÈME ET DERNIER VOLUME |
[1] Celles du 1er septembre 1883, du 30 août 1884, du 22 septembre 1891, du 7 septembre 1892, du 8 septembre 1894, du 5 septembre 1895, du 20 septembre 1896, du 12 septembre 1897 et du 5 septembre 1898.
[2] Tit., III, 1.
[3] Pour avoir la liste complète des canonisations faites par Léon XIII, il faut ajouter aux noms précités ceux de saint Jean Baptiste de Rossi, de saint Laurent da Brindisi, de sainte Claire de Montefalco, de saint Antoine-Marie Zaccaria et de sainte Rita de Cascia.
[4] Léon XIII a aussi béatifié Alphonse de Orozio, Charles de Sezze, Humble de Bisignano, Gilles de Saint-Joseph, Félix de Nicosie, Inès de Beniganim. Pompilio Pierotti, Juvénal Ancina, François-Xavier Bianchi, Léopold de Gaichis, Antoine Baldinucci, Rodolphe de Aquaviva, Pierre Sanz, Jean d'Avila, Diego de Cadix, Bernard Realino, Théophile de Corte, Clet et ses compagnons, Madeleine Martinengo, Denys de la Nativité, Redento de la Croix, Antonio Grassi, Crescenca Hoss.
[5] Victor HUGO, le Rhin, IX.
[6] TAINE, l'Ancien Régime, p. 7.
[7] LECONTE DE LISLE, Poèmes tragiques.
[8] E. ZOLA, le Rite, II.
[9] A. PUECH, S. Jean Chrysostome et son temps, un vol. in-8°.
[10] Paul FÉVAL, Jésuites, un vol. in-12.
[11] Vie de sainte Thérèse, d'après les Bollandistes, 2 vol. in-8°, Nantes, 1882.
[12] HUYSMANS, Sainte Lydwine, un vol, in-12.
[13] E. HELLO, Physionomie des Saints, un vol. in-12, Préface, p. VII-XI.
[14] Cf. L. LABERTHONNIÈRE, Un mystique au XIXe siècle, dans la Quinzaine du 1er août 1899, p. 297-310.
[15] M. Houbart, prêtre de Saint-Sulpice, n'a point publié d'ouvrages de spiritualité. Mais ses lectures spirituelles, données au grand séminaire d'Angers, ont été recueillies et religieusement conservées par plusieurs de ses auditeurs.
[16] Si le plan de cet ouvrage ne nous permet pas de citer tous les traités importants de spiritualité parus sous le pontificat de Léon XIII, nous ne pouvons passer sous silence deux séries d'œuvres dont la grande diffusion en France et à l'étranger ont considérablement contribué à faire connaître, aimer et pratiquer les principes de la vie chrétienne. Sous le titre d'Elévations dogmatiques, M. Sauvé, prêtre de Saint-Sulpice, a su mettre à la portée du public cultivé de nos jours les principes de la théologie affective, telles que l'avaient enseignée Thomassin, Bail et Contenson ; et, dans de modestes volumes, les Paillettes d'Or, le Livre de piété de la jeune fille, le Livre des professes, le Livre des supérieures, etc., M. l'abbé Sylvain, mort vicaire général d'Avignon, a su faire goûter, sous une forme accessible aux âmes les plus simples et qu'ont appréciée les esprits les plus délicats, une spiritualité duce, attirante, autant que sûre et solide, où les amis de ce saint prêtre, ceux qui l'ont connu de près, aiment à retrouver le reflet de son âme pieuse et rayonnante.
[17] E. DRUMONT, la France Juive, t. II, p 262.
[18] BARBEY D'AUREVILLY, les Philosophes et les écrivains religieux, p. 216.
[19] J. SERRE, Ernest Hello, un vol. in-12, Paris, 1894.
[20] Expression de J. SERRE dans Ernest Hello.
[21] PACHEU, De Dante à Verlaine, un vol. in-12.
[22] Abbé Ph. PONSARD, dans la Quinzaine, t. LXI, p. 545.
[23] SAINTE THÉRÈSE, Chemin de la perfection, ch. III.
[24] Que ceux de nos frères à qui Dieu a donné la grâce de pouvoir travailler, travaillent avec constance et dévotion.
[25] Mgr BAUDRILLART, Vie de Mgr d'Hulst, t. II, p. 551.
[26] Cf. chanoine GRÉVY, Dom Adrien Gréa, br. de 60 p. in-8°, Lyon, 1917.
[27] Don Bosco a été déclaré Vénérable en 1908.
[28] Voir Vie du P. Pernet, un vol. in-12, Paris, 1901, et Vie de la Mère Marie de Jésus, un vol. in-8°, Paris, 1888.
[29] Questions actuelles du 7 octobre 1893, p. 37.
[30] P. PISANI, au mot Autriche, dans le Dict. de théol. de VACANT, t. I, col. 2616. Léon XIII encourage, par des Brefs laudatifs ou par des approbations définitives, un-grand nombre de congrégations nouvelles. Le -22 septembre 1894, il accorde un. Bref laudatif aux Tertiaires franciscaines de la Mère du divin Pasteur ; le 25 septembre de la même année, il approuve les Constitutions des Servantes du Cœur de Jésus ; le 27 septembre, il décerne un Bref de louange aux Missionnaires de Saint-Joseph de Mexico. Le 8 mai 1895, il approuve les Constitutions des Prêtres du Saint-Sacrement ; le 31 juillet 1896, celles des Frati Rigi. Le 6 septembre 1897, il approuve l'Institut des Sœurs dites a divina Pastora, de Vicence ; le 12 juin 1899, celui des Sœurs de la Croix de Saint-Quentin ; le 8 juillet de la même année, celui des Sœurs de la Sainte Famille d'Urgel. De 1900 à 1903, il encourage ou approuve : les Sœurs de Notre-Dame de la Merci de Malaga, les Sœurs de la Pureté de Marie de Majorque, les Sœurs de la Sainte Trinité de Madrid, les Sœurs servantes de Saint-Joseph de Salamanque, la Société des Missions d'Afrique de Lyon, les Tertiaires dominicaines de Frasnes-le-Château, les Sœurs espagnoles dites Filles de Jésus, les Tertiaires franciscaines missionnaires, les Servantes du Sacré-Cœur, les Frères Carmes enseignants, les Missionnaires de Saint-Joseph et les Sœurs de Saint-Joseph du Mexique.
[31] C'est la première fois qu'un acte pontifical approuve les Constitutions d'une association qui se différencie absolument des congrégations religieuses.
[32] Mgr LAVEILLE, Madame Carré de Malberg, un vol. in-8°, Paris, 1917, p. 499. Du même, Monsieur l'abbé Chaumont, un vol. in-8°, Paris, 1919.
[33] Etudes d'août 1888, p. 643 et s. Les comptes rendus des congrès eucharistiques forment chacun un gros volume, comprenant le texte des mémoires communiqués et le résumé des discussions. Cf. VAUDON, l'Œuvre des congrès eucharistiques, ses origines et son histoire, un vol. in-8°, Paris. Voir aussi Paul FÉRON-VRAU, les Triomphes eucharistiques, un vol. in-12, Paris, 1920.
[34] Questions actuelles, t. XXI, p. 195.
[35] Questions actuelles, t. XXI, p. 195.
[36] Questions actuelles, t. LII, p. 296.
[37] Questions actuelles, t. LII, p. 392.
[38] Voir la statistique complète, année par année, dans BERTRIN, Hist. critique des événements de Lourdes, un vol. in-8°, Paris, 1913, p. 439.
[39] BERTRIN, Hist. critique des événements de Lourdes, p. 101.
[40] BERTRIN, Hist. critique des événements de Lourdes, p. 101.
[41] HUYSMANS, les Foules de Lourdes.
[42] T'SERCLAES, Le pape Léon XIII : sa vie, son action religieuse, politique et sociale, t. III, p. 685.
[43] UN TÉMOIN (Cardinal MATHIEU), les Derniers jours de Léon XIII et le conclave de 1903, dans la Revue des Deux Mondes du 15 mars 1904.
[44] P. PRÉLOT, dans les Etudes du 25 juillet 1903, p. 299.
[45] Correspondant du 10 septembre 1903, p. 797.