Ici s’arrête le récit de M. Mommsen. Après Thapsus, après
le suicide du dernier des républicains, Toutefois, en s’arrêtant à la mort de Caton d’Utique, il faut bien le constater aussi, l’auteur a rompu avec les traditions de l’école, avec la division acceptée par tous les grands historiens, et les principaux représentants de la critique et de la philosophie de l’histoire. A ne point vouloir pousser jusqu’au jour où, victorieux à Actium, maître incontesté du monde grec et romain, Octave rentrera dans Rome, et se couronnera du titre d’Auguste, il semble, à tout le moins, que M. Mommsen eût donné à l’esprit, aux habitudes du lecteur, à l’art lui-même, pourquoi ne pas le dire ? satisfaction plus complète, en achevant en quelques pages la biographie du premier des Césars ! Qu’il nous soit permis d’exprimer un regret, sinon peut-être une critique. — Aussi bien dans les deux chapitres XI et XII, qui terminent son livre, dans le chapitre XI, surtout, M. Mommsen reprenant et achevant le portrait du grand général, du grand politique, et du grand fondateur d’empire, se voit bien forcé d’embrasser les desseins, les plans et les institutions créés ou ébauchés par lui jusqu’au jour de sa mort. En sorte qu’ici le tableau déborde du cadre[1]. — Tout en respectant la pensée de notre auteur, il nous paraît utile de résumer ici en quelques lignes, pair de simples indications de faits et de dates, les points historiques principaux, et les innovations législatives, financières et économiques, qui achèvent la vie de César. Le lecteur, après cette récapitulation rapide, se sentira plus à l’aise, ce semble : il appréciera mieux, et à leur juste importance ces deux grands chapitres XI et XII, où les institutions de la monarchie nouvelle, les nécessités manifestes de la concentration du gouvernement, de l’unification administrative et nationale du monde romain, la préparation par une main puissante et prévoyante d’un terrain destiné à la civilisation commune et à la semence prochaine du christianisme, sont exposées de main de maître. A côté de ces grandes vues, et en dépit de ses éloges, M. Mommsen ne peut écarter la trop juste sentence de l’histoire sur l’homme qui a franchi le Rubicon : quelque grand que soit le bienfait allégué pour excuse après l’usurpation, l’usurpation reste ce qu’elle est, un crime, vengé sur César en sa personne par les haines et l’assassinat ; et puni, dans l’institution impériale, par les vices mêmes, les désordres et les alternatives d’insécurité, de cruautés et de revers, qui conduiront l’empire à une dissolution finale, après des alternatives aussi de grandeur, de puissance et de gloire ! Mai 1870 — C. A. ALEXANDRE |
[1] Dans le domaine des faits et des institutions, M. Mommsen parle de la dictature décennale, de la censure triennale décernées à César ; de ses quatre triomphes : de la réforme du calendrier, etc., etc., lesquels se placent après Thapsus ; des honneurs et de la dictature perpétuelle décernée après Munda ; de l’ensemble des créations législatives et financières antérieures ou postérieures au retour d’Espagne ; du diadème et du titre de roi offerts par Antoine, aux Lupercales, et enfin des projets de guerre contre les Parthes.