LE DROIT PUBLIC ROMAIN

LIVRE TROISIÈME. — LE PEUPLE ET LE SÉNAT.

LE SERVICE MILITAIRE ET LE DROIT DE  VOTE QUI EN RÉSULTE DANS L’ÉTAT PATRIClO-PLÉBÉIEN.

 

 

Le service militaire est un droit et un devoir pour le citoyen. L’arrivée au droit de cité des hommes libres en clientèle, la transformation du peuple patricien en un peuple patricio-plébéien se place au moment ou ces clients arrivèrent au droit de servir et- au droit de vote qui en est inséparable. La fusion de l’Italie dans Rome ou de Rome dans l’Italie est la dernière conséquence de la fédération militaire romano-latine. Le servira militaire des sujets sous le Principat a conduit à la fusion des provinces dans Rome et au développement complet de l’idée de l’empire. Nous décrierons ici le service militaire du peuple patricio-plébéien, en y comprenant le droit de vote dont il est la condition, et qui, dans la forme présente de la tradition, est plus mis au premier rang que le service militaire lui-même. Cependant ce n’est que du dernier point de vue que l’on peut acquérir une conception des choses conforme à leur mode de génération.

Jamais un non citoyen n’a servi dans une division de l’armée romaine. Le Latin établi sur le sol romain, qui contribuait aux charges publiques et votait dans les comices, n’était pas lui-même, autant que nous sachions, admis a servir dans les armées romaines[1]. Il faut remarquer à ce sujet que le Latin propriétaire pouvait être contraint sur ses immeubles à l’accomplissement de ses corvées, au paiement de ses impôts, et qu’au contraire on n’aurait pu, par les voies de droit ordinaire, forcer l’étranger à exécuter son obligation de se présenter sous les drapeaux. Le Latin accomplissait indirectement son obligation de servir, par les renforts que sa cité fournissait aux Romains ; au contraire il était soumis à, l’impôt, selon l’emplacement de ses biens, tant dans sa cité que dans la cité romaine. Les troupes auxiliaires des Alliés et des Sujets appartiennent bien en fait à l’armée romaine ; mais les hommes qui les composent n’ont jamais été, même sous le Principat, regardés en théorie comme des soldats romains.

En revanche, l’obligation au service pèse en principe sur tous les citoyens. Quoique, à l’époque ancienne, le service militaire ordinaire ait seul en pratique une importance effective, le citoyen qui n’y est pas soumis n’est aucunement dispensé de son obligation parce que ses services ne sont pas en général utilisés. Seulement il y a des causes spéciales d’exemption légale du service. Nous devons d’abord réunir ici ces dispenses, dont au reste une partie remonte jusqu’à l’époque de l’État patricien.

La dispense du service (vacatio militiæ) dépend, dans le système romain, principalement de la volonté des magistrats qui procèdent aux levées. En particulier dans le cas d’infirmités physiques comme pour toutes les excises tenant à la position de la personne[2], il dépend absolument de l’arbitraire du magistrat de ne pas incorporer ou de congédier, en vertu d’une cause suffisante (ex causa), les individus sujets au service qui sont dans ces cas (causarii)[3]. En droit, il n’y a à s’occuper que des motifs d’exemption fixés par la loi. Lorsqu’il en existe un, il protège contre le dilectus ordinaire ; mais pour l’appel fait par voie de tumultus et de conjuratio[4], c’est-à-dire au cas de guerres ouvertes en Italie ou en Gaule en deçà des Alpes[5], les vacationes peuvent être suspendues[6], à moins que le contraire ne soit dit expressément dans la loi qui établit l’exemption et que cette loi elle-même n’ait été rendue irrévocable par un serment[7]. — Les causes suivantes d’exemption nous sont connues :

1. L’âge de quarante-six ans accomplis libère du service de campagne[8], et celui de soixante ans accomplis de tout service quelconque[9].

2. L’accomplissement d’un certain nombre d’années de service, en général de dix dans la cavalerie et de seize dans l’infanterie, dans des conditions exceptionnelles, de vingt, dispense du service pour l’avenir[10].

3. Celui qui est employé pour le compte de l’état à un service dont l’accomplissement est plus indispensable à l’intérêt public que ne sont ses services militaires, est par suite exempté du service militaire. A l’origine, ce droit était certainement en même temps un devoir ; cependant on ne peut dans notre tradition tout au plus en relever que des traces[11]. Sont ainsi exempts :

a. Les prêtres de la cité, naturellement à vie, puisque les sacerdoces sont viagers[12]. Il est surprenant que cette exemption se transmette à leur descendance agnatique[13].

b. Les magistrats[14] et leurs employés[15], pendant la durée de leurs fonctions. L’exemption du service militaire ne paraît pas avoir été étendue aux sénateurs[16], soit que leur participation aux délibérations du sénat semble moins importante que leur participation à la guerre, soit que les sénateurs fussent en réalité, à l’époque ancienne, des Anciens et fussent déjà exempts de ce chef.

c. Les citoyens établis dans les colonies maritimes à titre de garnison permanente[17]. Si ce service de place dispense du service de campagne, il entraîne une obligation au domicile qu’on ne peut à la vérité préciser plus nettement[18].

d. Les fournisseurs de l’armée en vertu d’une concession spéciale[19], naturellement seulement pendant le temps de leur contrat.

4. Il existe aussi des privilèges personnels de ce genre, qui s’étendent en partie aux descendants[20].

L’organisation militaire, patricio-plébéienne se révèle déjà comme relativement récente en face de l’organisation militaire patricienne, par le fait que la légende historico-juridique la rattache à l’avant-dernier roi. En outre une portion notable de la propriété immobilière romaine devait déjà se trouver entre les mains des plébéiens au moment de son introduction, puisque le but de la réforme ne peut avoir été que d’étendre l’obligation au service aux plébéiens propriétaires qui en étaient jusqu’alors exempts[21]. Assurément cette propriété n’était pas la propriété immobilière individuelle du droit moderne, également ouverte au patricien et au plébéien. Car cette dernière propriété n’est probablement née que du partage des terres duquel sont sorties les seize plus anciennes tribus rustiques. Or la constitution des tribus serviennes et la constitution des centuries serviennes sont, dans notre tradition, constamment considérées comme inséparables, et la propriété individuelle du sol ne s’étendait probablement pas encore, du temps des quatre tribus, aux terres labourables. Mais il peut facilement ÿ avoir eu, dès cette époque, un droit individuel sur les terres labourables accessible même aux plébéiens[22].

Le système des centuries de Servius est resté en vigueur, autant que nous voyons, sans transformations essentielles, — non pas à la vérité comme organisation militaire, mais comme organisation électorale en procédant, — jusqu’au commencement de la guerre d’Hannibal, et il a encore été remis en activité par Sulla. Le plus ancien des annalistes romains peut avoir voté d’après lui au Champ de Mars. Il existait un tableau schématique des divisions établies par le roi Servius lors du premier cens, qui est cité sous des dénominations diverses et qui doit encore avoir été utilisé par les savants du temps d’Auguste[23]. Ce tableau ne peut pas avoir été emprunté aux annales et faisait plutôt partie de ces instructions rédigées pour guider les magistrats dans l’exercice de leurs fonctions[24], qui ont plus ou moins influé sur la rédaction des annales. Il porte le nom du 6e roi parce qu’à l’époque où il fat rédigé, ce roi était considéré comme le fondateur de l’armée civique patricio-plébéienne de la République[25]. Il ne peut avoir été regardé par des autorités compétentes comme un travail écrit de la main même du roi ; il doit avoir été composé peu de temps avant la transformation de cette organisation, vers le début du VIe siècle[26], et avoir servi de base aux renseignements relativement détaillés et concordants qui se trouvent dans nos annales.

Sur l’emploi fait pour le vote du système des centuries serviennes, nous ferons un renvoi d’ensemble à la théorie de la compétence de l’Assemblée du peuple. Cet emploi des centuries est inséparable de leur emploi militaire ; car il a pour base une idée qui a, de tout temps, dominé la constitution romaine : l’idée que le peuple a la même capacité en matière civile et en matière militaire. Des actes tels que l’inauguration du flamine de Mars, la promesse de fidélité renouvelée avant le cens, la déclaration de guerre pour cause de violation d’un traité d’alliance, n’ont jamais pu avoir lieu qu’avec le concours de l’armée des citoyens de l’époque, et les non patriciens cent donc nécessairement acquis le droit de participer aux comices à partir du moment où l’obligation au service militaire leur a été étendue. Mais il n’est aucunement forcé que cette participation ait été complète dès le principe, et la réduction du rôle des curies aux simples privilegia de droit privé petit encore bien moins s’être faite dé[ le moment où les plébéiens furent admis dans les centuries. La situation que nous dépeint notre tradition la plus ancienne des curies sans pouvoirs et des centuries toutes-puissantes, a probablement, comme tous les autres résultats de la lutte des classes que nous connaissons dans leur devenir, été atteinte par des étapes successives.

C’est principalement au point de vue militaire que nous devons exposer ici le système des centuries de Servius ; ce que nous devons y étudier en première ligne c’est le droit et le devoir de servir[27]. Mais, à, la vérité, la forme de la tradition, dans laquelle la connaissance de l’organisation militaire la plus ancienne nous est surtout conservée par l’organisation électorale des temps historiques, aura pour conséquence forcée de nous obliger non seulement à nous préoccuper partout du droit de vote, mais aussi à comprendre dans l’exposition présente les modifications modernes qui ne concernent rigoureusement et exclusivement que le droit de vote.

Le service militaire n’est pas le service des armes. Les citoyens qui, avons-nous dit, sont tous soumis au service, se distinguent en citoyens astreints au service des armes proprement dit, et en citoyens desquels on n’exige qu’un service auxiliaire : selon le langage des sources, on distingue les 188 centuries de citoyens armés (armati) et les 5 centuries de citoyens sans armes (inermes), en tout 193 centuries dort la réunion constitue l’armée (exercitus).   

L’aptitude au service des armes, qui, on le conçoit, est en général considéré purement et simplement comme service militaire, comporté deux éléments : elle implique, d’une part, une certaine fortune et, d’autre part, une honorabilité intacte.

Comme condition de fortune du service ordinaire, on exigea d’abord une mesure minimum de propriété immobilière, c’est-à-dire la tribu, sauf que, la tribu résultant purement et simplement de la propriété immobilière, il n’y a pas pour elle de minimum. Cette règle primitive ne nous a pas été transmise elle est même en contradiction avec une tradition que nous aurons à étudier plus loin et d’après laquelle le roi Servius lui-même aurait attaché le service à la fortune et l’aurait gradué selon des chiffres fixés en argent. Mais ces chiffres attribués à Servius remontent au plus t6t.à l’époque de la première guerre punique ; car ils sont calculés sur le taux de l’as d’1/10 de denier qui fut introduit à cette époque ; il y a donc eu des chiffres plus anciens qui ont disparu, et ces chiffrés étaient probablement fixés en surface de terres et non pas en argent. En premier lieu, notre institution remonte probablement à une époque où le cuivre pesé lui-même n’était pas encore reconnu comme mesure générale de la valeur. — En second lieu, le fait que les centuries de la première classe étaient plus tard sensiblement écales en nombre à celles dés quatre catégories inférieures réunies ne peut pas se ramener exclusivement à ce que les centuries des classes inférieures comprenaient certainement un plus grand nombre de têtes que celles de la classe supérieure. Ce rapport de chiffres surprenant exige tout au moins que les individus aptes au service de la première catégorie soient, au point de vue absolu, supérieurs en nombre à ceux de la catégorie qui suit immédiatement et cela ne peut se concevoir qu’à condition que la gradation se rapporte à la propriété immobilière, et que, par exemple, les fractions de ¾, — produites certainement en grande partie par le morcellement, — fussent moins nombreuses que les unités entières. — En troisième lieu, la tribu qui n’est primitivement, avons-nous vu, rien autre chose que l’expression de la propriété immobilière, doit nécessairement être dans un rapport avec la composition de l’armée. La séparation dans les listes des censeurs des individus soumis au servie et à l’impôt en tribules et ærarii, c’est-à-dire d’après le sens primitif des mots, en citoyens propriétaires fonciers et en citoyens soumis à l’impôt, ne peut pas venir de l’impôt puisque les premiers y sont soumis comme les seconds ; elle ne peut venir que du service. L’administration se meut, à l’époque ancienne, autour de la tribu réelle : la tribu personnelle n’y est que la tribu résultant de la propriété foncière ; or, puisque tout dans cette administration se rapporte au service militaire, que le paiement de la solde et la perception de l’impôt ne sont que des corollaires du service, il est impossible de séparer ce service de la tribu. — Enfin il est attesté directement que la réforme d’Appius, qui n’est autre chose que l’affranchissement de la tribu personnelle de la tribu du sol, fit entrer les personnes qui n’avaient pas de propriété immobilière dans les centuries de vote ; elles en étaient donc antérieurement exclues.

Les chiffres récents des classes ne pouvant être qu’une expression nouvelle des chiffres anciens accommodée au changement des circonstances[28], on peut avec quelque certitude déterminer ceux-ci à l’aide de ceux-là. Cela est aussi vrai pour la relation des classes entre elles que pour les chiffres absolus de chacune. Si la classe la plus élevée indique, comme il n’y a pas à en douter, la mesure de terrain nécessaire pour impliquer le service complet, l’unité de lot agraire, la propriété du citoyen, les quatre classes inférieures peuvent être considérées comme correspondant aux trois quarts, à la moitié, au quart et à une moindre fraction de cette unité. Le propriétaire d’un emplacement inférieur en superficie au chiffre le plus bas ne devait pas être compté au cens comme propriétaire. Le mode de réduction peut aussi se déterminer. La plus petite parcelle de terre qui se rencontre chez les Romains est l’heredium de 2 jugera ; on peut y reconnaître la petite fraction et par conséquent évaluer le lot complet à environ 20 jugera[29]. Le jugerum est donc exprimé dans les chiffres qui nous ont été transmis par 2200 sesterces (= 485 fr.) ; et ce taux correspond à la valeur moyenne attribuée au sol dans les évaluations postérieures[30].

Les censures de 442 et 450 ont mis à la place des immeubles la fortune : les citoyens qui n’avaient pas de terres acquirent par là tous une place dans les tribus ; et, pourvu qu’ils eussent le chiffre de fortune requis, le droit de servir et aussi le droit de voter dans les centuries politiques. Mais les chiffres ne peuvent avoir été fixés à cette époque que selon le système de l’as lourd, ou, ce qui est la même chose, du sesterce d’1/4 de denier ; ils ne nous ont pas été transmis et doivent donc être déduits des chiffres postérieurs par un calcul. Or ce calcul fixe la fortune minimum requise pour le service complet à 40000 as lourds ou sesterces et les fractions à 30000, 20000, 10000, 4400 as lourds ou sesterces. Mais la distinction des propriétaires fonciers et des citoyens qui ne l’étaient pas subsistait encore au milieu de ces évaluations ; car non, seulement les individus astreints au service appartenant aux tribus rustiques qui, au moins en général, excluaient les autres, étaient tous propriétaires fonciers ; mais en outre ce n’était pas la fortune en général, c’était la propriété foncière qui déterminait les classes[31], et, par conséquent, celui qui ; d’après cette propriété, appartenait à la cinquième classe, ne pouvait ras être mis, à raison du reste de sa fortune, dans une classe plus élevée.

Peu avant le début de la première guerre punique, vers l’an 486 de la ville, s’introduisit à Rome le système monétaire qui y resta depuis en vigueur, le système basé sur le sesterce d’argent de 2 as légers et demi et sur le denier de 10 as légers. Le cens s’y conforma soit aussitôt, soit par la suite[32]. Les chiffres du cens qui nous ont été transmis sont calculés en as d’1/10 de denier[33]. Ils se trouvent donnés soit dans une relation de la constitution de Servius, qui a passé, en termes concordants dans Tite-Live et Denys de la même source ou de sources analogues, et qui a peut-être servi de base commune à toutes les annales en remontant jusqu’à Fabius[34], soit dans les témoignages isolés qu’on trouvera réunis ici :

 

1re classe, au moins

 

100.000 as, Annales ; Polybe (note 33),

 

120.000 as, Pline et Festus[35],

 

[125.000 ? as, Aulu-Gelle[36],]

2e classe, au moins

 

75.000 as, Annales,

3e classe, au moins

 

50.000 as, Annales,

4e classe, au moins

 

25.000 as, Annales,

5e classe, au moins

 

11.000 as, Annales (note 34),

 

4.000 as, Polybe[37].

 

Les deux divergences relatives aux chiffres minimum de la 1re et de la 5e classe doivent être ramenées à ce que, d’une part, le service militaire ordinaire fut étendu, et cela des avant le temps de Polybe, aux citoyens dont le cens était de moins de 11.000 as et de plus de 4.000, et à ce que d’autre part, postérieurement à Polybe, on fit remise aux, citoyens dont la fortune était de plus de 100.000 as et de moins de 120.000, de l’équipement coûteux de la 1er classe ; ce qui aura ensuite exercé une influence symétrique sur la composition des centuries de vote. Les deux changements ont pour caractère commun de restreindre les différences résultant de la gradation du service d’après la fortune, et elles préparent la suppression totale du recrutement fait d’après le cens qui fut opérée par Marius.

Quant à l’absence d’indignité, qui est requise à côté de la condition relative aux biens, il suffit, en principe, de rappeler lés développements fournis sur la censure. Les citoyens auxquels les magistrats chargés du cens refusaient la pleine possession de l’honneur civique perdaient par là, à l’époque ancienne, l’aptitude au service militaire et le droit de suffrage lié avec elle, ou plutôt les deux droits étaient en suspens jusqu’à ce que d’autres censeurs ne vinssent effacer cette tache. Car l’exclusion de la tribu doit avoir été, à l’origine, ce qu’implique son nom, et la perte du droit de suffrage est signalée comme en étant la conséquence[38]. En réalité, l’acte n’a de sens qu’autant que l’exclusion de l’armée en résulte. On ne doit pas imposer au citoyen honorable de servir aux côtés de l’indigne. L’arbitraire extrême de la juridiction sur les moeurs attribuée aux censeurs a pour source le point d’honneur délicat produit par l’esprit de corps.

Mais cela changea, lorsqu’à la suite de l’admission au service et au vote des citoyens sans immeubles les districts urbains qui leur étaient affectés commencèrent à être regardés non pas précisément comme les tribus des gens sans honneur, mais pourtant comme des tribus moins honorables. Désormais les personnes exclues, pour indignité, des tribus rustiques furent, au moins en général[39] ; placées dans les tribus urbaines, et restèrent donc dans l’armée pour la guerre et pour le vote. Désormais des citoyens marqués de la nota du censeur ont fréquemment servi[40], et cette note a difficilement entraîné des déchéances légalement formulées[41], si fréquemment qu’il ait pu arriver en fait que l’individu noté fût, en considération de la note, — révélée au magistrat qui fait la levée par les listes mêmes d’enrôlement —, omis dans cette levée, ou encore qu’il fût, une fois levé, puni par un service plus dur[42]. Il est également difficile que le droit de vote de ces individus ait subi d’autre restriction que le changement de tribu.         

Nous avons déterminé les limites dans lesquelles le peuple est soumis au service militaire ordinaire. Pour l’organisation même de l’armée populaire, l’infanterie et la cavalerie sont séparées. La première comprend deux parties : armée active (juniores) et réserve (seniores), selon l’âge des individus astreints au service. L’armée active et la réserve se composent toutes       deux de citoyens ayant un cens complet qui fournissent le service complet, et de citoyens astreints au service ordinaire, mais non au service complet, qui fournissent un service moindre d’après quatre degrés différents. Toutes les parties de l’armée, les cavaliers comme les fantassins, l’armée active comme la réserve, étaient militairement formées en compagnies (centuriæ, ordines) composées d’un nombre fixe d’hommes et commandées par un capitaine[43]. Tout le système est bien applicable au vote, mais il a été imaginé au poila de vue militaire et il est, jusque dans le détail, organisé au point de vue militaire. C’est donc dans leur ordre militaire que les différentes parties de l’armée doivent ici être étudiées.

L’organisation servienne de la cavalerie[44] est dominée par le caractère permanent qu’à la différence de l’infanterie ce corps a eu dès le principe. Il se compose de six centuries nommées et de douze centuries innommées[45].

Les premières, les sex suffragia[46], portent les noms empruntés au peuple patricien de Titienses, Ramnes, Luceres priores et posteriores[47], et sont certainement les centuries procum patricium citées comme appartenant au système électoral de Servius. Elles ont donc d’abord été composées exclusivement de patriciens et n’ont, semble-t-il, été ouvertes aux plébéiens que Mirs de la réforme de la constitution de Servius faite en 531[48].

A ces premières centuries s’ajoutent douze autres centuries qui n’ont pas de nom individuel, mais qui, par opposition aux ses stsff9’argia, s’appellent par excellence centuriæ equitum[49]. Elles sont, selon toute vraisemblance ;’ une portion intégrante de l’organisation militaire patricio-plébéienne avec laquelle elles auront été appelées à, l’existence ; elles ont sans doute été, dès le principe, également ouvertes aux patriciens et aux plébéiens, mais en’£ait elles ont peut-être été, de tout temps, exclusivement plébéiennes[50].

Le chiffre total de 18 centuries s’est maintenu, du temps de la Royauté jusqu’à celui de l’Empire, sans aucune modification[51]. Les changements faits dans l’organisation électorale n’ont modifié en rien ni le nombre ni, autant que nous voyons, l’organisation des chevaliers.

Il n’y avait pas, dans le système primitif, de condition de capacité spéciale pour servir dans la cavalerie. Le caractère permanent du service suffit à exclure l’existence d’un cens propre des cavaliers correspondant aux autres chiffres du cens ; car le but de ces chiures gradués, qui est de constater pour le magistrat qui fait la levée la capacité prescrite pour chaque classe, disparaît ici où le cens et la levée se confondent. La limitation théorique du choix des cavaliers à une certaine fraction des citoyens impliquerait aussi chez le magistrat qui fait le cens une restriction de pouvoirs peu conciliable avec la liberté d’action ordinaire qu’a le magistrat pour cet acte, Surtout ce serait inconciliable avec ce qui nous est rapporté des équivalents pécuniaires accordés pour le service à cheval. Puisque, selon les institutions romaines, l’armement et l’entretien du citoyen au service le, concernent en première ligne, le cavalier a aussi à se procurer son cheval, ou dans la mesure où c’est exigé, ses deux chevaux[52], avec l’équipement qui convient[53] ; c’est à lui de se les procurer[54], et c’est encore à lui de pourvoir à leur nourriture. Mais il lui est fourni dans ce but une indemnité plus élevée, même relativement, qu’au citoyen qui sert dans l’infanterie. Il reçoit, aux frais de l’État[55], à son entrée au service, pour l’acquisition de son cheval un argent de cheval (æs equestre) de 10.000 as ou 1000 deniers (875 fr.) et pour le nourrir un argent de fourrage annuel (æs hordiarium) de 2.000 as ou 200 deniers (475 fr.)[56]. Le cavalier parait avoir supporté la perte du cheval[57] et la solde des cavaliers plus tard introduite avoir été déduite, non pas immédiatement après sa création, mais bientôt après, de l’argent du fourrage[58]. Nous n’avons pas de réponse pour une série d’autres questions qui se posent ici. Nous ne savons si l’æs equestre devait être restitué en tout ou partie dans certaines circonstances, par exemple lorsque le cheval était retiré au cavalier par sa faute, on lorsque, même sans sa faute, le service du cavalier finissait avant le temps ordinaire ; nous ne savons pas davantage si l’æs equestre et l’æs hordiarium, dont la connaissance ne parait s’être transmise à nous que par une tradition juridique[59], ont encore effectivement été payés à, l’époque récente. Mais on ne peut révoquer en doute que ces chiffres étaient évalués largement[60] et que le cheval public n’a pas pu, dans ces circonstances, être pour celui qui le recevait une charge plus lourde que celle supportée par le fantassin. Le fait que l’acceptation n’en était pas plus facultative que ne l’est celle du service en général[61] ne peut aucunement être invoqué en sens contraire. On voit nettement ressortir la volonté de faire passer du soldat à l’État l’augmentation de charges produites par le service à cheval et de rendre ainsi le service à cheval accessible même aux citoyens sans ressources, de manière à ce que les choix puissent être exclusivement déterminés par le mérite. Enfin, s’il y avait eu dès le principe un cens équestre, il aurait sans nul cloute été intercalé dans le schéma de Servius et nous aurait été transmis avec lui or c’est si peu le cas qu’il nous est seulement parlé en termes généraux du choix des chevaliers parmi les citoyens les plus riches et les plus considérés[62]. Ce doit là sans doute être l’expression exacte de la situation de fait. Quoique le citoyen qui n’était pas apte au service complet de fantassin pût, en droit, recevoir le cheval public, il est certain que lion seulement ce cheval fut de tout temps donné en général à des citoyens complets, mais que les jeunes gens distingués par leur naissance et leurs biens ont été pris de préférence pour ce service plus considéré. Niais, comme il sera expliqué dans la partie des Chevaliers, le cens équestre légal n’a été établi, que, lorsque, vers le milieu du IVe siècle, on introduisit, à côté des cavaliers equo publico les cavaliers equo privato et qu’en même temps on organisa l’enrôlement par le général pour le service à cheval et la fixation par le censeur des conditions d’aptitudes rendue nécessaire par là, — toutes institutions d’ordre purement militaire qui ne touchèrent pas les centuries politiques des equites equo publico. Toute l’influence que cela eut sur elles fui que, depuis qu’il y eut un cens équestre, il fut, soit par une disposition de la loi, soit simplement en fait, étendu aux détenteurs du cheval public[63] ; et, par suite, les centuries de chevaliers, quoiqu’elles ne fassent pas partie de la classis, au sens ancien, de la phalange[64], et qu’elles ne puissent pas être désignées, dans les habitudes du langage nouveau, comme des centuries de la première classe[65], peuvent, au moins pour l’application du principe timocratique, être réunies à la première classe.

La centurie de cavaliers, qui est passée, quant au nom comme quant an fond, de l’ancienne constitution patricienne de la cité dans la constitution patricio-plébéienne, est toujours restée ce que veut dire son nom : une troupe de gent hommes commandée par un centurion[66]. Le maintien invariable du chiffre de 1.800 soldats pourvus du cheval public depuis le temps des rois jusqu’au vile siècle est pleinement atteste[67], et est confirmé par les efforts — infructueux, résulte-t-il de ce témoignage, — faits par Caton l’Ancien pour élever leur nombre à 2.200[68]. La centurie politique de cavaliers différait donc sous un double rapport de la centurie de fantassins que nous étudions plus loin. D’abord cette dernière compte, verrons-nous, normalement 120 hommes. Ensuite le droit de vote dans les centuries équestres se restreint aux détenteurs du cheval publie et exclut, à l’époque où il y a des conditions de capacité à ce sujet, ceux qui sont seulement capables de le recevoir[69] ; ce qui explique que le nombre de voix de la centurie de cavaliers soit, même à la fin de la République, beaucoup plus faible que celui de la centurie de fantassins[70]. La première différence vient probablement de ce que l’ancien système décimal fat maintenu pour la cavalerie permanente et abandonné pour l’infanterie ; la proposition de Caton peut avoir tendu précisément à porter aussi la centurie de cavaliers à 120 hommes et par conséquent, le chiffre total à 2.160. La seconde différence, de beaucoup plus importante, résulte nécessairement de ce que la centurie de cavaliers comprend des hommes en service effectif et celle de fantassins simplement des, hommes aptes à une certaine catégorie de services.

On ne sait rien de plus sur l’organisation des centuries de cavaliers de Servius. Rien n’indique une relation quelconque entre le choix des cavaliers et les tribus serviennes[71] pas plus qu’aucune autre réglementation de ce choix. Au point de vue militaire, l’unité proprement dite est, pour la cavalerie, dès le temps antérieur à Servius, la turma de 30 hommes, avec la decuria de 10 hommes qui en est le tiers[72]. Le commandement est exercé, comme dans la cavalerie de la cité patricienne, pour chaque decuria par le decurio, ou plutôt pour chaque turma par les trois décurions coordonnés entre eux[73]. De même que es six centuries de l’État patricien constituaient militairement vingt turmæ, on forma quarante autres turmæ des douze Centuries qui leur furent ajoutées dans l’État patricio-plébéien[74]. Cela fut fait probablement parle censeur ; car, pour la constitution d’une troupe permanente, il ne suffisait pas de choisir les hommes, il fallait aussi régler leurs places dans les rangs ; on peut supposer que le cavalier entrant n’était pas nommé à titre abstrait, mais remplaçait toujours un prédécesseur sortant. Les décurions doivent aussi avoir été nommés pour chaque turma par les censeurs[75] ; la cavalerie resta, comme l’infanterie, divisée en centuries pour le vote, ce qui peut avoir tenu à cette nécessité d’une similitude approximative des unités électorales qui est indispensable pour le vote. Dans quel rapport étaient le centurion de la centurie politique avec les chefs de la cavalerie, les trois décurions de la turma, et en général la turma militaire de cent hommes avec la centurie politique de cavaliers ? Ce sont là des questions sans réponses. Autant que nous pouvons le discerner ; l’organisation militaire des turmæ n’a exercé aucune influence sur les centuries politiques.

De même que la limite d’âge n’est pas appliquée à la cavalerie et qu’il est laissé à la discrétion des censeurs d’inviter le cavalier devenu moins apte au service â, se défaire de son cheval[76] ; il n’y a pas, dans cette arme, de seconde partie du contingent. La cause n’en est sans doute pas surtout à chercher dans le fait que les hommes âgés peuvent être mieux utilisés comme fantassins que comme cavaliers. La considération déterminante aura été dans la faible utilité de la cavalerie pour la défense de la ville, à laquelle la seconde portion du contingent est principalement destinée, et, par dessus tout, dans les frais, disproportionnés avec son utilité et très sensibles pour l’administration économe des temps anciens, occasionnés par le service équestre.

Les hommes qui n’étaient pas employés dans la cavalerie étaient d’abord divisés, selon leur âge, en un second ban. La séparation entre les deux était, comme il est expliqué en un autre lieu[77], fournie par l’âge de &6 ans accomplis. Au reste, les deux bans sont organisés avec une similitude parfaite, tant en ce qui concerne leurs classes qu’en ce qui concerne le nombre de leurs divisions. Selon toute apparence, le second ban, qui ne figure pour ainsi dire jamais à, titre militaire dans notre tradition[78] et qui, à l’époque historique, n’a sûrement fonctionné qu’à titre politique, n’a pas été constitué d’une manière indépendante, mais a eu pour source le classement de celui qui sortait, à raison de son âge,’ d’une centurie du premier ban dans la centurie correspondante du second. Il suffira donc d’exposer l’organisation du premier ban, et celle du second sera donnée par là même. Les centuries du second ban devaient forcément être notablement inférieures en nombre de membres à celles du premier, et par suite lés voix des citoyens âgés avaient plus de poids que celles des jeunes. C’est là assurément une conséquence nécessaire du système, mais il est difficile que tel ait été le but immédiat poursuivi par son organisateur ; car l’organisation des centuries procède constamment de considérations militaires, et leur emploi politique n’est que d’ordre secondaire.

L’infanterie se compose de citoyens astreints au service complet et de citoyens obligés à un service moindre qui comporte quatre degrés. Le peuple astreint au service complet constitue la classis, le citoyen qui y est astreint est le classicus, tandis que les autres citoyens inférieurs sont désignés comme infra classem. L’étymologie du mot classis, qui ne vient certainement pas du grec, n’a point encore été découverte[79] ; mais, d’après l’emploi qui en est fait pour les guerres de terre et de mer, il doit désigner la ligne de bataille, par opposition aux troupes ou aux navires qui prennent part au combat en dehors des rangs. Classis est employé dans ce sens, relativement à l’organisation servienne, par Caton l’Ancien[80]. Lorsque les centuries serviennes perdirent leur caractère militaire et que la classis, au sens propre, n’eut plus de rapport avec elles, le mot prit, comme il le fait déjà dans un titre législatif de 613 et constamment dans Cicéron[81], une corrélation exclusivement politique et une signification nouvelle : on entend par là désormais les séries de sections de l’infanterie venant voter les unes après les autres ; ce qui fait que les centuries obligées au service complet, qui formaient antérieurement seules la classis, forment désormais la prima classis, et que, par corrélation, les quatre groupes existant au dessous de la phalange se présentent désormais comme la 2e, la 3e, la 4e et la 5e classes.

Puisque, dans l’infanterie, à la différence de ce qui a lieu dans la cavalerie, le soldat doit s’équiper exclusivement à ses frais, l’opposition du service complet et du service inférieur, la distinction du classicus et de l’infra classem se montre en première ligne dans l’équipement exigé du soldat[82]. Pour le service complet, cet équipement comprend, comme armes défensives, un casque, une cuirasse, un bouclier et des jambières, et, comme armes offensives, une épée et une pique, le tout en métal. Au contraire, la cuirasse disparaît dans la première des quatre autres classes et le bouclier de cuivre y est remplacé par un bouclier de bois. La seconde est en outre dispensée des jambières. Chez les soldats de la troisième et de la quatrième, les armes défensives disparaissent complètement, et comme armes offensives, ils ont ceux de la troisième la pique et le javelot, ceux de la quatrième la fronde[83]. Cette organisation est visiblement fondée sur la distinction de la phalange fermée et équipée et des troupes légères non équipées combattant hors du rang[84]. Mais cette distinction ne coïncide pas avec celle du soldat de la classis et de celui qui n’en est pas. Les deux groupes supérieurs de la seconde catégorie correspondent plutôt aux derniers rangs, qui ne sont pas complètement équipés, d’une phalange en ordre de bataille.

Cette réglementation a plus tard été obscurcie, parce que la décomposition de la legio ancienne en plusieurs légions et la disposition de l’infanterie de ligne en manipules, équipés et instruits pour combattre isolément, rendirent nécessaire, en premier lieu, de rendre l’équipement plus uniforme, en second lieu, de tenir compte, pour la disposition des hommes dans les rangs, de l’instruction militaire de chacun et, par conséquent, de son temps de service. Par suite, au temps de Polybe, tous les légionnaires équipés portent la cuirasse, et tous ceux qui ne le  sont pas (velites) le javelot, et l’on tient, soit pour la distinction des premiers et des seconds, soit pour la mise en rang des premiers, principalement compte du temps de service. Mais alors encore les pauvres gens sont de préférence placés parmi les velites[85], et la cuirasse des citoyens de la première classe est meilleure et plus chère que celle des autres légionnaires[86]. C’est seulement dans la légion de Marius qu’a disparu toute trace de l’ancienne gradation du service selon la fortune.

Les fantassins sont, comme les cavaliers, groupés en centuries, c’est-à-dire réunis en divisions ayant un chiffre militaire normal et soumises à un commandement militaire. La centurie compte ici, nous l’avons déjà dit, 120, hommes[87]. Elle a un centurion qui n’y est pas compté[88] ; elle a aussi son enseigne militaire[89]. Peut-être non seulement les cavaliers,mais les citoyens en général ont-ils été, dan s le cens primitif, disposés de façon à ce que les hommes pussent être conduits devant l’ennemi selon l’ordre du cens et avec lés chefs nommés : les anciens semblent l’avoir admis[90]. En particulier, tant que le cens et le recrutement incombèrent encore aux mêmes magistrats, le premier peut avoir déjà constitué par lui-même une formation provisoire de l’armée,et les exercices faits au Champ de Mars supposent déjà une certaine permanence de l’armée totale du peuple. Mais le cens ne s’est certainement jamais restreint à la détermination d’un certain nombre de divisions d’infanterie organisées pour le service ; la centuriation se continuait, même après que le nombre normal était atteint, jusqu’à ce que tous les citoyens, en condition de servir, qui n’étaient pas pris pour la cavalerie, eussent été répartis dans les centuries de l’infanterie. Par conséquent, il y avait, dans chaque centurie de l’infanterie, à côté du chiffre normal fixe, un chiffre effectif variable[91]. C’est seulement parce que ce chiffre variable ne se présentait pas pour les centuries de cavaliers que la distinction des troupes levées et des hommes tenus prêts pour un certain service, en vue des levées, sépara de tout temps la cavalerie et l’infanterie. Après l’introduction de la disposition de l’infanterie en centuries de Triarii, de Principes et de Hastati, la centurie qui résultait du cens perdit sa destination militaire directe, puisque cette disposition nouvelle dépendait d’autres éléments dont le cens ne tenait pas compte, tandis que la cavalerie ne subit pas de telles transformations et que ses turmæ continuèrent à être formées dès avant le moment de la levée. La centuriation des censeurs a dû primitivement assigner à chaque homme, même au point de vue militaire, le rang qu’il aurait dans la phalange, ou la place qu’il occuperait ailleurs, au cas de formation d’une armée de campagne. Mais la centuriation militaire s’est de bonne heure séparée de celle accomplie lors du cens.

Le nombre des centuries de fantassins du premier ban monte à 85, qui se répartissent, comme il suit, selon les degrés du service ordinaire[92] :

En présence duce tableau, on ne peut, en comparant entre eux les différents groupes quant à leurs chiffres attribuer aux fondateurs du système l’intention d’appeler en même temps tous les citoyens obligés au service ordinaire et de ne traduire la différence des charges qu’exclusivement par la diversité de l’équipement. Il est plus que vraisemblable que les riches avaient relativement plus d’hommes à fournir et étaient par suite aussi plus fréquemment appelés que les pauvres. Le nombre de têtes moyen des centuries de la cinquième classe aura donc été plus grand, peut-être considérablement plus grand que celui des centuries de la première ; par suite, le service aura été mains lourd et le droit de vote plus faible dans celles-là[93]. Seulement il ne faut pas aller trop loin dans cette voie. Les citoyens qui n’étaient pas considérablement au dessous du chiffre intégral minimum ne peuvent pas avoir été beaucoup moins souvent appelés que ceux obligés au service complet, et, s’il est attribué à ces derniers un nombre de centuries quadruple de celui des moins obligés du premier degré, la raison ne doit pas en avoir été seulement dans une diminution de la charge moyenne imposée aux plus pauvres, elle doit avoir été aussi dans le nombre absolu plus considérable des gens propres au service complet.

Les règles légales placent le citoyen astreint au service ordinaire dans le premier ou le second ban et, dans l’un ou l’autre, dans l’une des cinq classes. Chacune de ces dix divisions se subdivisant en un certain nombre de centuries, le citoyen devait en outre être placé dans une de ces centuries, être centurialis d’une centurie déterminée ; car une telle détermination préalable était nécessaire soit pour l’usage militaire primitif de l’exercitus[94], soit, de tous les temps, pour son usage politique. Les magistrats chargés du cens procédaient à la répartition, des citoyens dans les centuries, naturellement pour la durée de la période du cens, et probablement avec une liberté encore plus grande que celle que mous les avons vus avoir pour l’inscription des citoyens dans les tribus. Comme principe directeur, on indique, pour l’époque ancienne de la République, la répartition proportionnelle des tribales de chaque tribu dans toutes les centuries et par conséquent la composition de chaque centurie d’un nombre égal de tribales de toutes les tribus[95]. Puisque les fractions du peuple formées d’après les tribus personnelles doivent, avons-nous vu, être à peu près équivalentes, à l’époque ancienne, soit quant au nombre de têtes, soit quant au rapport des biens, une telle composition tant de l’armée unitaire des citoyens que même de la légion postérieure était, à tout prendre, réalisable ; elle était même d’accord avec le principe de l’ancienne constitution d’écarter, militairement et politiquement, autant que possible, les distinctions locales. Mais cette égalité ne pouvait, en mettant les choses au mieux, être qu’approximative. Le nombre des hommes fournis par les diverses tribus pour les diverses catégories ne pouvait tout au plus être qu’à peu près égal. Même du temps où le nombre des centuries à former s’accordait avec celui des districts des hommes, comme c’était le cas au débat lorsque les 4 tribus et ensuite les 20 avaient à fournir les 40 centuries du premier ban des hommes sujets au service complet, le nombre de tètes des tribales de la Suburana ne pouvait pas être identique à celui de la Romulia. Et, lorsque il fallut, par exemple, former les mêmes 40 centuries avec 21 tribus, on ne put prendre dans chaque tribu qu’environ un 20e de chaque centurie. — Même pour les centuries, le chiffre normal peut bien se déterminer régulièrement pour chacune. Mais le chiffre effectif, qui importe seul militairement et politiquement à l’époque historique, ne peut être égalisé qu’approximativement, quand bien même on s’en préoccuperait exclusivement dans la composition de chaque centurie et il n’interviendrait aucune considération de personne, licite ou illicite. Or l’arbitraire a encore moins été absent de la répartition des tribules dans les centuries que de celle des citoyens dans les tribus ; c’est là un point qui, en présence de la moindre précision du principe de répartition et en face de la liberté d’action des magistrats chargés du cens, ne peut souffrir aucun doute.

L’arbitraire inévitable laissé aux censeurs pour la répartition des citoyens dans les centuries put être supporté, tant que les citoyens à répartir dans les 85, ou les 170 centuries furent tous des propriétaires fonciers. Mais il prit un tout autre caractère lorsque, depuis l’an 442, les citoyens sans propriétés eux-mêmes pénétrèrent dans les tribus et de là dans les centuries, pourvu qu’ils eussent la fortune requise, Que ces citoyens fussent placés dans toutes les tribus ou seulement dans les tribus urbaines, cela ne changeait juridiquement rien sous ce rapport. Les classici de la Suburana appartenaient aussi bien aux 80 centuries de la classis que ceux de la Romulia, et les uns et les autres devaient même, en suivant le principe admis jusqu’alors, être répartis le plus également possible entre toutes les centuries. Il est probable que cette conséquence du nouveau système, qui ne pouvait ni rester inaperçue ni être longtemps supportée, fut d’abord écartée par l’arbitraire du censeur. De même que le censeur Fabius avait eu le droit de parquer tous les citoyens non propriétaires dans quatre tribus, de même et à plus forte raison on pouvait, pour le partage des tribules entre les centuries, enfermer ceux de ces quatre tribus dans un certain nombre de centuries ; le partage entre toutes les tribus était un précepte d’administration ; ce n’était pas une loi, et on peut y avoir souvent dérogé dès une époque précoce.

Mais l’emploi de cet expédient dépendait de la bonne volonté de chaque collège de censeurs. Un remède meilleur fut fourni par une réforme de principe des relations des centuries et des tribus[96], opérée difficilement par une loi, plus probablement de nouveau par une mesure des censeurs, qui se place certainement entre 513 et 536[97], probablement en 531[98], et qui est restée la règle des temps postérieurs. Il est vrai qu’un siècle plus tard, après la catastrophé de Sulpicius, l’auteur de la loi admettant les Italiotes et les Affranchis à l’égalité de suffrage, lorsque Sulla révisa, en 666, la constitution dans un sens aristocratique, il rétablit l’ancienne organisation servienne du vote. Mais elle fut de nouveau écartée lors du mouvement de Cinna, et, dans sa seconde réorganisation de l’Etat, Sulla ne l’a pas rétablie, ou, s’il l’a fait, cette disposition n’a eu qu’un empire, éphémère.

La transformation du système des centuries est une réforme politique de l’institution, — elle avait, perdu son importance militaire directe avant l’introduction du nouveau système — ; ce n’est pas une révolution. Les trais fondements sur lesquels repose l’organisation servienne : la séparation des corps qui votent selon l’âge, puis selon la fortune, et la centuriation des dix masses ainsi obtenues sont aussi ceux de l’organisation nouvelle, et ils sont rattachés par les anciens ; à la fois au roi précurseur de la République et à la constitution des temps les plus récents de celle-ci[99].

L’unité de vote est après comme avant la centurie. Cela résulte déjà de ce que les comices restent toujours centuriata, mais aussi de nombreux témoignages concrets[100]. Chaque citoyen en droit de porter les armes appartient aussi toujours au premier ou au second ban. Cela nous est attesté[101], et les réunions complexes de centuries dont nous allons avoir a parler s’appellent, pour l’une moitié, juniorum, pour l’autre, seniorum.

Les cinq degrés de fortune, selon lesquels l’organisation antérieure échelonnait le service et le droit de vote ainsi que l’ordre des votes, restent aussi déterminants pour les deux points après la réforme[102]. La dénomination classis réservée anciennement à la première classe est, comme nous avons déjà vu, étendue, sinon par le nouveau système, au moins pendant qui il est en vigueur, aux cinq classes de l’infanterie qui votent l’une après l’autre[103]. Par une conséquence forcée, chaque classe se compose d’un certain nombre de centuries.

Les chiffres des classes restent les mêmes ; tout au moins cela nous est attesté pour la première classe[104] et, jusqu’à un certain point pour la seconde. La réduction du chiffre minimum de la 5e classe de 11.000 as à 4.000 a-t-elle eu lieu en même temps que cette réforme ou en dehors d’elle, c’est un point qu’il faut laisser incertain[105].

Sous tous ces rapports, le nouveau système ne s’écartait pas de l’ancien. Au contraire, c’était une nouveauté, c’était même en aux tribu& réalité la seule innovation apportée alors à la disposition du peuple que la combinaison de sa division en trente-cinq tribus avec la division donnée par les trois termes du groupement de Servius, l’âge, la fortune et la centurie, que la combinaison exprimée par Cicéron dans son invitation aux censeurs Populi partes, c’est-à-dire le peuple tout entier considéré dans tous ses éléments, in tribus discribunto exin pecunias ævitates ordines partiunto equitum peditumque.

D’abord chacun des deux bans était divisé entre, les trente-cinq tribus ; ainsi, par exemple, tous les citoyens qui, d’après l’organisation des tribus, appartenaient à la Romulia et, d’après celle des centuries, aux juniores, étaient mis dans un groupe tribuaire de centuries ; ce qui formait 70 groupes de cette espèce[106]. Ce ne sont là ni des tribus, ni des demi-tribus ; la tribu reste ce qu’elle est : elle n’est touchée par cette institution ni dans sa relation avec le sol, ni dans sa relation avec les personnes. Cette institution appartient à l’organisation des centuries et ce n’est que sous l’Empire que la dénomination : tribus (illa) juniorum ou seniorum est entrée dans l’usage pour ces 70 groupes de centuries[107].

Il fallait en outre mettre ces groupes tribuaires de centuries en relation avec la centurie de vote et avec la classe, qui continuait après comme avant à fonctionner comme ensemble de centuries. A ce sujet, il faut distinguer entre la première classe et les autres.

Pour la première classe, il ne peut y avoir de doute. Les centuries votant les premières et par conséquent appartenant à cette classe, qui sont fréquemment citées, portent toutes le nom de l’une des 35 tribus avec l’addition de la désignation du ban[108]. Chacun des deux bans de la première classe a donc un nombre de centuries égal à celui des tribus, et la classe tout entière 70 centuries et 70 voix. La centurie de la première classe est donc, comme le dit Cicéron, une fraction d’une tribu unique[109]. Ce principe est encore confirmé par le fait que, d’après le témoignage exprès de Tite-Live, les chiffres des centuries de Servius et les chiffres postérieurs sont différents[110], et avant tout par celui que Cicéron, dans sa description de l’organisation servienne[111], qui ne peut être rapportée qu’à l’organisation réformée[112], compte soixante-dix centuries pour la première classe[113].

Relativement aux quatre classes qui suivent, nos documents sont en désaccord, selon qu’ils concernent le nombre des centuries qui comptent pour le vote ou l’organisation des groupes de centuries.

Les quatre classes allant de la seconde à la cinquième avaient ensemble 100 voix ; cela résulté de l’exposition de Cicéron[114], et c’est en outre confirmé de divers cotés. Or le nombre total des centuries d’infanterie n’a pas été plus touché parla réforme que celui des centuries de cavaliers : il est resté, sans modifications, de 85 par ban et de 170 en tout. Les chiffres des centuries appartenant jusqu’alors aux quatre dernières classes : 20+20+20+30=90 ont donc au contraire forcément été changés ; et cela correspond, comme pour la première classe, au témoignage de Tite-Live. Nous ne savons ni ne pouvons deviner comment les 100 voix ont été divisées entre les quatre classes ; tout ce qui nous est attesté, c’est que, tandis que, d’après la constitution servienne primitive, la classes et les chevaliers, s’ils étaient d’accord, formaient à eux seuls la majorité, d’après la constitution réformée, la seconde classe tout au moins devait prendre part au vote, mais d’ailleurs décidait aussi de la majorité, en votant dans le même sens[115].

Les groupes de centuries ont, dans la capitale, par connexité avec les distributions de grains et d’argent qui y étaient en usage, survécu à la République et subsisté jusqu’au quatrième siècle de notre ère. Nous le verrons en détail dans la partie des Affranchis. Ici leur organisation corporative seule nous importe, en tant qu’elle remonte aux groupes de centuries de la République. Nous savons peu de choses de ceux des tribus rustiques, qui étaient peu représentées dans la plèbe de la capitale[116]. Au contraire, nous trouvons nommés, pour la Suburana comme pour la Palatins, les seniores et les juniores, qui sont plus tard réunis sous la désignation collective de corpora[117] ; à côté, il apparaît, dans la Suburana, un corpus Julianum[118], dans la Palatina et l’Esquilina, un corpus Augustale[119] ; on rencontre aussi dans la Suburana des corpora fœderata[120], sans doute les seniores ; les juniores et les Juliani réunis. Les juniores de la Suburana[121], probablement aussi ceux de la Palatina[122] se divisent en huit centuries, qui se répartissent, dans la première, en un groupe de trois et un groupe de cinq. Le corpus Julianum de la Suburana se compose de six centuries. Il saute aux yeux que les groupes de centuries désignés comme ceux de Jules ou d’Auguste ne se sont adjoints que du temps de l’Empire. Si donc, comme il semble, le corpus Julianum de la Suburana se composait de trois centuries de juniores et trois centuries de seniores, les trois centuries sur huit de la tribu, qui apparaissent comme séparées des cinq autres, peuvent lui être attribuées et les cinq autres titre considérées comme présentant la forme républicaine du groupe. On est donc ainsi conduit au chiffre de cinq centuries pour chacun des 70 groupes tribuaires de centuries.

Nous arrivons encore par une autre voie au résultat que chacun de ces groupes, doit avoir eu autant de sections qu’il y a de classes. Puisque chaque groupé de centuries comprend les citoyens appartenant à une tribu, en tant qu’ils sont soit seniores, soit juniores, et puisqu’en outre on vote par classer, les citoyens appartenant, par exemple, à la Romulia et aux seniores, qui rentraient dans la 2e classe, doivent avoir voté ensemble ; et il en est de même des autres sections. Il faut donc que les citoyens des quatre dernières classes aient été divisés en 4x70=280 sections. Les sections sont appelées des centuries sur les inscriptions du temps de l’Empire ; et leur origine exigerait cette dénomination avec une nécessité rigoureuse, alors même que nous ne l’aurions pas attestée par des titres. Leurs chefs, dont il a déjà été question à propos des tribus, ne portent pas le nom de centurions, c’est un fait qui se reproduit pour tous les collèges divisés par centuries, et ce qui l’explique, c’est qu’on trouvait scabreux, sous le Principat, d’employer sans nécessité cette désignation militaire ; mais néanmoins il est suffisamment certain que ce sont les centurions de Servius.

La différence ainsi établie entre le nombre des centuries elles-mêmes et le nombre de leurs voix ne peut être écartée. Les groupes de centuries ont beau avoir été remaniés sous l’Empire, et le nombre des centuries qui y sont contenues avoir été augmenté par des fondations nouvelles ; il faut l’inexpérience enfantine avec laquelle la philologie qui nous est antérieure se comportait en face des institutions impériales et des monuments épigraphiques pour contester que le caractère de réunion de centuries de ces groupes soit attesté par les inscriptions. D’un autre côté, il est impossible que chacune de ces 350 centuries ait eu une voix propre, et il est impossible que le droit de vote ait été égal entre elles. Le nombre des petits propriétaires fonciers ne peut pas, à cette époque, où l’absorption de la propriété rurale devient déjà très sensible, avoir été assez supérieur à celui des propriétaires de fortunes complètes pour qu’on ait pu leur accorder un nombre de voix quadruple de celui des derniers. Les citoyens possédant plus de 10.000 deniers doivent avoir sensiblement dépassé en nombre ceux en possédant moins de 10.000 et plus de 7.500 ; et ce n’est pas de la démocratie, c’est de la niaiserie de donner une supériorité de vote absolue à celui qui possède moins en face de celui qui possède plus. Une réduction s’impose nécessairement, et l’assertion de Cicéron selon laquelle les citoyens des quatre dernières classes avaient à eux tous cent voix, correspond bien à cette idée. Les 280 centuries de vote ont donc été réunies entre. elles pour être ramenées à 100 voix collectives. On peut supposer que, par exemple, sur les 70 centuries de vote de la 2e classe, il y en avait 60 qui étaient rassemblées 3 par 3 et 10 qui l’étaient 2 par 2, de façon à tirer 25 voix de leur vote. On explique aussi parla pourquoi les voix de la première classe étaient désignées par le nom de la tribu en y ajoutant la mention du ban. Il n’y avait que dans cette classe que chaque section de vote eût une voix propre. Étant donné que nous avons la preuve, que soit le nom de la tribu[123], soit celui du ban étaient appelés, pour la renuntiatio du vote de chaque centurie électorale de l’infanterie, il faut que, par exemple, la première de la seconde classe ait été appelée Romulia et Voltinia juniorum classis secundæ, une désignation simple telle que Romulia juniorum était impossible pour elle, et par suite cette désignation simple pouvait être employée, sans autre addition, pour la première classe[124].

L’organisation de ces groupes tribuaires de centuries rendait impossible la fondation de nouvelles tribus ; cette fondation aurait conduit ou à un dérangement essentiel du rapport de voix existant entré lés classes, ou à une modification du chiffre de 170 centuries d’infanterie maintenu par l’obstination romaine. Si, ce qui n’est pas démontré, les Romains ont réellement pensé, après la guerre sociale, à porter le nombre des tribus à 45[125], ce plan a été aussi vite mis à l’écart que le fut le rétablissement de la constitution servienne primitive accompli par Sulla. Quant à l’essentiel, on a voté à home selon le système réformé, tant que l’on y a voté par Centuries, et les institutions de l’Empire, dans lesquelles subsistèrent les centuries, sont issues du système réformé.

On ne peut déterminer si la transformation du système des centuries a réagi sur le mode de recrutement, ni alors dans quelle mesure elle l’aurait fait. Ce que nous savons sur la procédure qui y était suivie est aussi bien applicable au système ancien qu’au nouveau[126].

La tendance et la portée de la réforme résultent de la réforme même. Si les tribus sont composées des hommes aptes à être arôme ta  levés et les centuries des hommes déjà levés ou mis en ordre pour l’être, et si par conséquent les deux comprennent, à tout prendre, les mêmes individus, mais seulement dans une disposition différente, ce qui n’était jusqu’alors vrai que pour le peuple pris eu général le fut rendu par la constitution réformée pour la tribu prise individuellement. Auparavant les tribules astreints au service de campagne de la Romulia, par exemple, pouvaient et même rigoureusement devaient être distribués dans toutes les centuries du premier ban ; mais leur attribution à. telle où telle centurie dépendait, en dernière analyse, de l’arbitraire du censeur ; désormais le censeur fut obligé de les rassembler dans le groupe de centuries de la tribu Romulia du premier ban, de former de ceux qui appartenaient à la première classe la centuria Romulia juniorum, et de combiner ceux de la classe suivante en centuries de vote avec les sections correspondantes d’autres tribus d’après des règles fixes. C’est la continuation du rejet dans les tribus urbaines des citoyens non propriétaires, ou peut-être plus exactement des citoyens inférieurs quelconques, organisé par Fabius. La centuriation étant désormais enfermée dans la tribu, les centuries des quatre tribus urbaines sont bien livrées aux tribules urbains ; mais en revanche celles des tribus rustiques leur sont fermées, et il est assuré à ces dernières, dans les comices par centuries, une majorité analogue à celle qu’avaient les trente et une tribus rustiques sur les quatre tribus urbaines dans les comices par tribus.

La réforme est une réforme démocratique, le meilleur témoin en est Sulla qui l’abrogea[127], et cela se révèle aussi dans tous les détails : dans la limitation essentielle apportée à l’influence du censeur sur la composition des comices par centuries ; dans l’abaissement du nombre des voix de la première classe de 80 à 70 et dans l’élévation de celui des autres classes de 90 à 100, ce qui enleva à la première classe la possibilité de décider seule du vote ; avec les centuries de chevaliers qui lui appartenaient en fait ; dans l’abaissement du cens minimum de 4.100 deniers à 100, qui lui appartient aussi probablement ; dans la substitution des cinq classes à l’ancienne distinction de la classis et des quatre catégories infra classem ; dans le transport, que nous étudierons plus loin, de droit de voter en premier lieu des centuries équestres à une centurie de la première classe désignée par le sort. La suppression du dernier privilège patricien, l’enlèvement à la vieille noblesse de la possession exclusive des six centuries équestres nommées et l’ouverture à tous les citoyens des dix-huit centuries équestres qui se placent probablement à la même époque, appartiennent encore à la même tendance politique. Mais la réforme était démocratique dans le sens où l’était la loi agraire de C. Flaminius qui partagea par tètes entre les citoyens le territoire de la Gaule et du Picenum ; elle était dirigée à la fois contre la noblesse en possession du pouvoir et contre les citoyens non propriétaires dont elle limitait l’influence politique à la façon de Fabius Maximus. Aussi l’exclusion des affranchis des tribus urbaines, qui, d’après les témoignages que nous possédons, a eu lieu vers le même temps, est-elle rapportée avec raison aux mêmes censeurs qui appelèrent à l’existence le système électoral réformé[128]. Les indices chronologiques plaident, avons-nous vu, pour que ces censeurs soient ceux de 534, C. Flaminius et L. Æmilius Papus ; et cette attribution a aussi pour elle les vraisemblances de fond. Aucun des hommes d’état de l’époque où la réforme a été accomplie ne peut, par ses tendances, par son audace, par la haine qu’il inspire à ses ennemis[129], plus prétendre à être considéré comme l’auteur de cette réforme que le hardi champion du parti populaire qui occupait alors la censure, trois ans avant de trouver la mort, en face d’Hannibal, dans la bataille du lac Trasimène.

Telle est la constitution servienne du service des armes. Elle a pour assise d’abord le citoyen propriétaire, plus tard le citoyen aisé, dont l’honneur est intact. Le reste des citoyens est dispensé ou exclu, comme on voudra, du service des armes ; mais il ne l’est pas du service, et il est organisé militairement de telle sorte que tout citoyen, même le moindre et le plus pauvre, trouve sa place dans les centuries serviennes. Toute armée a besoin, pour d’autres services que la guerre proprement dite, d’un certain nombre d’hommes qui, bien qu’ils ne portent pas les armes, sont soumis à une organisation militaire, c’est-à-dire d’après l’expression romaine, à une centuriation. Aux 188 centuries d’hommes armés s’adjoignent les cinq[130] centuries suivantes d’hommes non armés qui appartiennent, comme les premières, à l’armée régulière, et auxquelles est accordé, comme aux premières, un rôle politique, c’est-à-dire le droit de vote. Ce sont les

1. Centuria fabrum tignariorum[131],

 

2. Centuria fabrum ærariorum[132],

 

3. Centuria liticinum en tubicinum,

plus tard æneatorum.

4. Centuria cornicinum[133],

5. Centuria adcensorum velatorum.

 

Non seulement il n’est, relativement à ces centuries, jamais fait allusion à aucune autre condition de capacité que la qualité de citoyen ; à aucune considération d’âge[134], de fortune ou d’honorabilité. Mais la présence dans la seule de ces centuries où nous connaissions une séria de personnes, dans la cinquième, de nombreux affranchis[135] prouve directement que les conditions de capacité étudiées plus haut comme servant de base à l’organisation de centuries disparaissent ici. Cela se manifeste encore dans la dénomination donnée à la cinquième centurie ; cette dénomination conviendrait également à toutes les cinq, et, si elle n’est devenue le titre officiel que de la cinquième, c’est parce que les quatre premières tirent leur nom de leur destination spéciale, tandis que les hommes de la cinquième classe, qui, d’après le témoignage digne de foi de nos sources, étaient destinés à servir à la place des soldats disparus pour une cause quelconque, avec leurs chevaux et leurs armes, ne pouvaient être indiqués comme ayant une fonction effective et ne pouvaient être qualifiés que par l’expression générale. Car velatus désigne, selon l’explication qui nous a été transmise et qui est certainement exacte, l’homme qui n’est pas habillé en militaire[136], et adcensus[137], comme son synonyme adscriptivus[138], le contraire des Cavaliers et des fantassins inscrits au cens sur le registre des individus propres au service. Les deux négations, celle de l’uniforme et celle du cens, s’appliquent également aux ouvriers et aux musiciens, et la qualification adcensi velati doit avoir été mentalement ajoutée à la leur.

Les centuries d’hommes non armés étaient, comme les centuries d’infanterie soumises à l’exigence du chiffre normal et au commandement d’un centurion ; cela résulte à la fois de la nature des choses et de leur nom[139]. Mais, pas plus qu’elles, elles ne peuvent s’être fermées au chiffre normal ; elles doivent avoir compris toutes les personnes appartenant à la catégorie dont il s’agissait, sans qu’il y ait eu de différence pour le droit de rote entre les citoyens compris dans le chiffre normal et ceux qui se trouvaient en dehors de lui. Cela est de faible importance pour les quatre premières classes ; car les centuries d’ouvriers ne comprenaient que ceux exerçant ces professions, et les centuries de musiciens ne comprenaient même pas les musiciens ordinaires[140]. Au contraire tous les citoyens exclus des classes par leur manque de fortune ou d’honorabilité[141] étaient placés dans la cinquième centurie. Cette conséquence est tirée parles Romains eux-mêmes ; mais aussi, on le conçoit, ils considèrent le droit de vote dans la dernière centurie et l’absente de droit de vote comme s’équivalant. Car, si le droit de vote est refusé aux ærarii pour l’époque ancienne, cela ne veut dire qu’une chose, c’est qu’ils appartiennent à la dernière centurie, comme, dans le nouveau système, les citoyens des quatre tribus urbaines, dont le cens reste au dessous du minimum de la 5e classe. D’un autre côté, le suffrage universel est indiqué comme principe précisément pour les comices par centuries[142] ; et la dernière centurie est représentée comme comprenant la grande masse des citoyens[143], à ce point qu’elle est évaluée comme ayant un plus grand nombre de têtes que les centuries de la première classe[144] ou même que tout le reste des centuries[145]. Les deux façons de parler se comprennent et peuvent se justifier[146]. Mais on ne peut pas en dire autant de la conception, évidemment très ancienne, de cette centurie des pauvres comme différente de celle des adcensi velati[147] et comme votant non pas avec la cinquième classe, mais après elle[148] : cette conception renverserait les chiffres totaux avérés de 393 centuries et de 5 classes, si la prétendue cinquième centurie était autre chose qu’une fiction produite probablement par une fausse entente du rapport entre la cinquième centurie du droit public théorique et la centuria adcensorum velatorum que l’on voyait fonctionner en pratique.

Il y a une autre tradition qui nous est également transmise et qui n’est pas moins fictive, ni moins impossible en soi c’est celle de la réunion dans une centurie spéciale de tous ceux qui n’auraient pas voté dans l’une des autres centuries on laisse incertain le point de savoir s’il s’agit là seulement des citoyens qui ont omis de voter ou même de ceux qui n’ont le droit de suffrage dans aucune centurie déterminée[149], et l’on peut encore bien moins déterminer si cette centurie impossible tient la place de l’autre centurie également impossible des pauvres ou a sa place propre à côté d’elle. — Le fait que la dernière classe ne doit pas être souvent arrivée en pratique à exprimer son vote, rend les allégations de ce genre un peu moins inconcevables.

Si nous passons de ces théories décolorées, mais caractéristiques, à la réalité, le témoignage de Cicéron sur la constitution réformée et le maintien postérieur des centuries d’hommes non armés établissent également qu’elles n’ont pas été touchées parla réforme et ont subsisté aussi longtemps que l’organisation des centuries elles-mêmes.

Les deux centuries des charpentiers et des forgerons peuvent peut-être être identifiées avec les deux collèges correspondants qui sont mentionnés parmi les neuf collèges de Numa, par conséquent parmi ceux qui ont existé à Rome de toute antiquité[150]. Il ne semble y avoir, aucun obstacle à considérer ces deux collèges comme des unités de vote. Le collegium fabrum qui fut excepté lors de la suppression des collèges de la ville de nome par César et Auguste, et qui subsistait encore sous l’Empire[151], peut avoir été formé par la fusion de ces deux collèges ou de ces deux centuries.

Les liticines[152], ou, comme on les appelle plus tard, les lubicines[153], en Grec σαλπισταί[154], précédent en rang[155] les cornicines, en grec βυκανισταί[156]. Les comices par curies étaient, verrons-nous, à l’époque la plus ancienne, annoncés avec la tuba, et elle s’est toujours maintenue comme signal du combat au sens militaire proprement dit. Nous ne pouvons au contraire établir qu’elle fut employée pour les comices par centuries de la ville. Le signal par lequel le magistrat, ou mieux le général, appelait la classis, le classicum était donné au son de la trompette[157], et c’est toujours lui qui est mentionné pour ces comices[158]. Cependant les sonneries de trompette faites pour les comices par centuries ne sont pas faites, à l’époque récente, par des hommes dont ce serait le service ; mais, cela constitue, comme tous les services du même genre, l’objet d’un marché fait par les censeurs avec un entrepreneur[159]. — Sous l’Empire nous trouvons ces deux centuries réunies pour composer un collegium liticinum cornicinum ou plus ordinairement æneatorum[160], dont les membres touchaient à cette époque des émoluments analogues à ceux des membres des groupes de centuries[161].

Nous avons déjà dit l’essentiel sur la destination des accensi velati. Etant adjoints à l’armée comme hommes d’excédant destinés à combler les vides qui pourraient se produire, ils n’avaient pas, jusqu’à ce qu’ils fussent employés, de compétence déterminée ; ils intervenaient et étaient employés, selon que le leur prescrivait leur sentiment du devoir ou l’ordre de leurs supérieurs immédiats. Leur affectation directe aux décurions de la cavalerie et aux centurions de l’infanterie donne à croire que les atterrai auront aussi, dans les centuries politiques, où non pas à la vérité les décurions, mais les centurions participaient anciennement à la direction da vote, rempli près de ces derniers des fonctions auxiliaires. Ln outré, nous avons, dans la partie des Appariteurs, déjà émis l’hypothèse que les magistrats ayant des licteurs avaient anciennement le droit de prendre dans cette centurie chacun un remplaçant pour leur licteur. Plus tard cela disparut, ou, ce qui est encore possible, on mit en pratique le principe que cette centurie comprend tous les citoyens qui ne sont dans aucune autre, et on permit au magistrat de se constituer pour accensus tout citoyen de cette espèce. Les titulaires des places nominales de cette centurie subsistèrent comme corporation[162], jusqu’au troisième siècle de notre ère[163]. La qualité de membre de cette corporation était alors un honneur envié[164] ; on y trouve, à côté de riches affranchis[165], des personnages considérés de l’ordre équestre[166]. Puisqu’ils sont alors, comme d’autres corporations employées à des services publics, exemptés de l’acceptation des fonctions de tuteurs[167], ils doivent également avoir été employés aux affaires publiques. Si la conjecture faite sur leur emploi à titre auxiliaire en matière de scrutin est exacte, cet emploi pourrait avoir été pour eux l’origine de situations analogues à celles des appariteurs les plus hauts placés des magistrats, auxquels les accensi velati correspondent en effet comme condition sociale[168].

L’ordre de classement des centuries observé pour le vote, ordre de vote sera, dans la mesure où il n’a pas déjà été expliqué jusqu’à pré- des centuries : sent, plus commodément exposé ici que dans la théorie générale de la tenue des comices. Ainsi qu’on le conçoit, l’arbitraire du législateur et l’influence des tendances politiques se manifestent là plus que dans toute autre partie de la constitution des centuries. Il est inutile de répéter que les gradations de l’infanterie ont, dès le principe, déterminé l’ordre des votes et que la notion moderne de la classis, envisagée comme la partie de l’infanterie populaire appelée à voter simultanément, s’est précisément développée en partant de là. Le premier ban et la réserve sont toujours venus au vote en même temps. Par conséquent, dans l’ancien système, toute la classis avec ses 80 sections du premier et du second ban votait en même temps[169] avant les quatre catégories infra classem, et, dans le système réformé, la première classe dans ses 70 sections votait avant la seconde, la troisième, la quatrième et la cinquième. Le grand nombre des sections les plus faibles en chiffre de membres, devait extraordinairement accélérer le vote. — Il nous reste à déterminer la place de vote soit des centuries équestres, soit des centuries d’hommes non armés et à étudier le droit de voter en premier lieu introduit par la constitution réformée.

Les usages militaires, qui dominent toute l’institution, peuvent, jusqu’à un certain point, avoir été la cause que, de même que la cavalerie ouvrait le combat, d’après l’ancienne tactique, les 18 centuries de cavaliers aient aussi voté primitivement avant celles de la première classe[170]. Elles constituaient par conséquent en fait ce que, dans le langage moderne, on aurait appelé la première classe, et, si elles ne s’appellent pas ainsi, c’est uniquement parce que classis désignait alors la phalange, dont les cavaliers ne faisaient pas partie. Les dix-huit centuries votaient-elles simultanément eu non, nous n’avons pas à ce sujet de témoignages. Si le droit de voter en premier lieu des cavaliers doit être rattaché à ce qu’ils ouvraient le combat, la question est par là même tranchée dans le premier sens. Mais des considérations politiques peuvent, dès les temps les plus anciens, avoir exercé leur influence sur l’ordre de vote, et nous allons immédiatement montrer qu’il est probable que, si au début les 18 centuries de cavaliers votaient avant l’infanterie, les six centuries patriciennes votaient parmi elles avant les douze centuries plébéiennes.

Les centuries de chevaliers perdirent le premier rang vraisemblablement après 458[171], certainement avant 539[172], donc probablement par la même réforme qui, semble-t-il, en 584, organisa les centuries par tribus. Il est démontré que depuis les douze centuries plébéiennes de chevaliers émirent leurs votes en même temps que les 70 centuries de la première classe[173]. Mais les six centuries patriciennes paraissent avoir voté à part entre la première et la seconde classe[174]. S’il en est ainsi, le droit de vote séparé des patriciens doit être une institution primitive et avoir été seulement, de même que quelques autres, transformé d’un avantage en une infériorité. Car le vote des douze centuries plébéiennes avant les six centuries patriciennes ne peut pas avoir été introduit seulement lors de la réforme de 534. On put conserver alors une infériorité déjà existante des dernières il aurait été impossible d’en introduire une nouvelle, surtout si les six centuries nommées ont cessé à ce moment d’être patriciennes. La réforme doit avoir retiré aux chevaliers leur droit de voter les premiers, et auparavant les dix-huit centuries de chevaliers devaient voter avant la première classe, mais d’abord les douze centuries plébéiennes, puis les six centuries patriciennes. On est naturellement porté à supposer que primitivement l’ordre devait être inverse.

Les cinq centuries d’hommes non armés ne formaient pas une série de vote spéciale ; nous avons déjà montré que la sixième centurie indiquée comme en formant une est une invention. Les cinq centuries étaient adjointes aux cinq séries de vote ; sur la place de chacune, les documents sont pour partie en désaccord. Les charpentiers votaient, selon Cicéron et Tite-Live, avec la première classe, selon Denys, avec la seconde. Les forgerons sont placés par Cicéron et Denys dans la seconde, par Tite-Live, dans la première[175]. Les deux centuries de musiciens sont attribuées par Tite-Live à la cinquième, par Denys à la quatrième[176]. Les accensi velati votaient avec la dernière classe, ainsi que nous le dit Tite-Live qui est seul à les nommer[177], et comme il va de soi.

Il n’y avait pas, dans l’organisation primitive des centuries, de droit de voter en premier lieu distinct de l’ordre des catégories[178]. C’est seulement depuis leur réforme qu’on appelle la première au vote une centurie tirée au sort, — nous ne savons pas nettement si c’est sur les 62 centuries rustiques de la première classe ou seulement sur les 31 de son premier ban[179], — puis[180] ensuite les autres dans l’ordre (jure), c’est-à-dire en commun[181]. La cause de cette mesure fut la suppression du droit de voter les premiers qu’avaient jusqu’alors eu, en fait, les chevaliers. Si l’on avait fait voter en même, temps, sans autre forme, les 83 centuries appelées au vote en premier lieu, les voix se seraient très fréquemment éparpillées dans les élections, et il n’y en aurait pas eu facilement une seule de définitive au premier tour de scrutin.

Le parti démocratique proprement dit désapprouvait naturellement le privilège accordé aux citoyens dont le cens était le plus élevé de voter avant ceux des classes inférieures. Le second des Gracques eut l’idée de faire gour tous les votes tirer les rangs au sort entre toutes les centuries de vote ; de telle sorte que les centuries qui auraient tiré le premier numéro auraient voté ensemble, de quelque classe qu’elles fissent partie. Il ne fut pas donné suite à cette proposition, et, tant que l’on vota par centuries, l’ordre des classes fut maintenu.

L’organisation servienne du service militaire et du droit de vote qui en résulte a donc pour base l’exercitus[182], c’est-à-dire l’armée régulière des citoyens, de 193 centuries[183], composées des 18 centuries de chevaliers, des 83 centuries du premier ban, des centuries en nombre égal du second et des cinq centuries d’hommes non armés[184]. A cette armée appartiennent tous les citoyens romains pubères, du sexe masculin[185], et, aux 188 centuries d’hommes armés appartiennent jusqu’à l’an 442, tous les citoyens portés sur les listes du cens pour une propriété foncière de deux jugera au moins, et depuis, tous ceux portés sur ces listes pour une fortune de 11000 as et plus tard de 4000. Comme institution politique, selon l’expression romaine, comme exercitus urbanus[186] ou quinquennalis[187], parce que dans ce rôle, elle appartient à la compétence domi et est constituée à nouveau à chaque lustre, l’armée des citoyens n’est, d’après une tradition de la plus haute antiquité, arrivée al l’existence qu’avec la fondation della République, la première élection de consuls et la plus ancienne loi centuriate, la loi Valeria sur l’introduction de la provocatio au peuple des condamnés[188]. Elle a subsisté, immuable dans ses fondements, aussi longtemps que le peuple lui-même, et elle n’a pas péri de mort violente, mais par ce dépérissement qui est le terme fatal assigné à l’homme et à toutes les créations humaines.

 

Militairement, la constitution servienne a réglé le service militaire des citoyens, tant qu’il y a eu une armée de citoyens, on peut même dire tant qu’il y a eu un État de citoyens. Les anciennes distinctions de classes s’étaient presque nivelées parmi les troupes du temps de Polybe. La distinction des 3.000 légionnaires complètement équipés et des 1.200 équipés à la légère était sans doute issue de la distinction des trois premières classes et des deux dernières et, du temps de Polybe, la fortune entrait encore au moins en ligne de compte pour la partage. La différence de l’équipement n’avait pas non plus complètement disparu. La considération de la fortune donnait encore au magistrat qui faisait la levée une certaine ligne directrice, quoique les limites des classes ne fussent plus observées et que-le temps de service devint de plus en plus le premier principe de disposition des hommes. Mais le choix fait parmi les centuriales pour le service militaire pouvait être arbitraire, les légions de l’armée de guerre avec leurs centuries d’hastati,de principes et de triarii pouvaient ne rappeler encore qu’à peine la phalange de l’armée électorale et ses centuries, ces légions n’en étaient pas moins contenues dans cette phalange, et ; pendant toute la durée de la République, la distinction des 188 centuries d’hommes armés et des 5 cen taries d’hommes non armés, c’est-à-dire la distinction des citoyens obligés au service des armes et de ceux qui ne sont employés militairement qu’à titre accessoire, resta, même militairement, en pleine vigueur. Toutes les règles nouvelles concernant non pas la disposition, mais la composition de la population astreinte au service des armes, la substitution de la fortune a la propriété immobilière comma condition de capacité, la réduction du cens minimum de 11.000 as à 4.000, ont aussi bien régi les levées que le vote. Une réglementation spéciale n’était nécessaire sous ce rapport que pour exclure du service les citoyens qui n’étaient pas en pleine possession des droits honorifiques, en particulier les affranchis ; car sans cela, bien qu’enfermés pour le vote dans huit groupes de centuries urbaines, ils en seraient aussi bien passés parmi les individus soumis au service que les membres des autres groupes. Il sera montré, dans la partie des Affranchis, qu’une mesure de ce genre a été prise vers l’époque de la réforme des tribus et des centuries.

Mais la dernière phase de l’organisation militaire de la République a pour caractère essentiel, que les anciennes conditions de capacité requises pour le service y ont disparu et que le recrutement ordinaire des troupes a pris la forme dans laquelle, jusqu’alors, les citoyens incapables étaient, à titre extraordinaire, appelés au service. Ce n’est pas aux cinq centuries d’hommes non armés prises parmi ces derniers pour l’armée du peuple ordinaire que s’est rattaché le recrutement de l’époque moderne ; c’est à l’appel au service, devenant en fait de plus en plus constant, des citoyens peu considérés et peu fortunés, incapables de servir dans l’armée du peuple, mais néanmoins soumis à l’obligation générale de servir. L’exposition détaillée de ce système ne peut trouver sa place que dans la théorie des Antiquités militaires. Il suffira ici d’en indiquer, pour finir, les grandes lignes juridiques.

Certainement depuis le cinquième siècle, probablement de tout temps, les Romains ont, lorsque les circonstances le réclamaient, appelé sous les armes, à côté des hommes reconnus pour avoir la capacité de servir, ceux qui n’avaient pas cette capacité ; ils ne les ont pas seulement mis sous les armes dans la forme prévue par la constitution de Servius, comme remplaçants  répartis entre les diverses sections, mais en corps d’armée distincts et irréguliers[189]. Surtout depuis la création de la flotte, ce recrutement a assez probablement eu lieu d’une façon aussi permanente que celui des individus véritablement astreints au service[190]. A la suite de cela, la règle s’est établie que ceux qui se trouvent entre le minimum requis pour servir (11.000 as et plus tard 4.000) et celui requis pour être contribuable (1.500 as), et qui par conséquent sont au moins encore adsidui, auraient, s’ils étaient appelés à ce service, à fournir leur équipement[191], tandis que ceux qui ne sont pas contribuables, les proletarii ou capite censi[192] recevraient, en pareil cas, des armes fournies par l’État[193]. Il est aussi rapporté, et ce n’est tout au moins pas impossible, que, parmi les derniers, ceux qui avaient une fortune de moins de 375 as, auraient été absolument exclus du service et appelés capite censi au sens étroit[194].

Cette levée, extraordinaire au moins en théorie, sert de base à la formation de l’armée qui fut mise par C. Marius à la place de l’ancienne[195]. Jusqu’au milieu du septième siècle, le service militaire des citoyens et l’organisation des centuries tiennent,’ avons-nous vu, l’un à l’autre ; il n’y a à pouvoir être pris pour le service que les citoyens inscrits dans une centurie de cavaliers ou dans l’une des cinq classes de l’infanterie. Au temps de Marius, probablement par une conséquence immédiate des levées en masse faites pour la guerre des Cimbres, on abandonna ce principe. Désormais le magistrat qui procède au recrutement enrôle le citoyen, sans s’occuper de la condition de capacité relative aux biens ; au reste, l’incapacité des affranchis est en revanche maintenue. En même temps disparut la distinction des légionnaires complètement armés et armés à la légère, à laquelle il n’est plus fait allusion depuis la guerre de Jugurtha[196]. La seule différence faite pour le service entre les légionnaires est celle basée sur l’ancienneté. Quoique l’obligation de servir et le droit de faire des levées n’aient pas été supprimés en principe, que même on ait, pendant les guerres civiles, recouru, dans une large mesure, aux enrôlements forcés dans les légions, ce sont, en général, dans le temps postérieur à Marius, des volontaires appartenant aux couches inférieures de la population qui ont été incorporés dans les légions. Le dictateur César a, probablement en partant d’anciennes dispositions semblables, ouvert aux membres des classes supérieures le droit de revêtir les magistratures municipales avant trente ans, à condition de servir dans les légions, pendant six ans dans l’infanterie ou trois ans dans la cavalerie[197]. Mais, en dehors du service d’officier issu du service équestre, dont il sera question dans la partie des chevaliers, les hommes des classes élevées ne satisfaisaient sans doute dés cette époque qu’exceptionnellement au service militaire. Sous le gouvernement impérial, le service obligatoire pour tous les citoyens fut, comme il sera montré dans la même partie, réglementé par l’obligation imposée à ceux qui avaient le cheval équestre de servir comme officiers et à yeux qui ne l’avaient pas de servir dans les légions[198]. En allant même au fond des choses, l’exclusion des non citoyens du service régulier est alors éludée par la concession du droit de cité toujours faite sur une plus large échelle à ceux qui entraient dans les légions[199] ; la distinction juridique des citoyens romains et des habitants de l’empire qui n’étaient pas admis à la cité a même été anéantie par là. Quant à l’infériorité des affranchis en matière de service militaire, qui est, sous l’Empire, plutôt aggravée en théorie, mais également tournée en fait, au moins pour le service de la flatte de l’époque moderne, on consultera à son sujet la partie des affranchis.

 

 

 



[1] Cf. la partie des Latins.

[2] Tite-Live, 42, 84, 42, montre, par exemple, qu’on avait des ménagements pour les pères de famille.

[3] Cf. Handbuch, 5, 384.

[4] L’evocatio, qui fonctionne a côté dé deux modes de formation de l’armée par le magistrat, du dilectus et du tumultus (cf. sur sa définition, Eph. epigr. 5, 142), c’est-à-dire la levée des individus propres au service faite par le premier citoyen venu an cas de force majeure, est en dehors de notre sujet, puisqu’elle a pour base le service volontaire.

[5] Cette restriction de la vocatio est citée pour les seniores (Appien, B. c., 2, 150) ; les prêtres (Plutarque, Cam. 41 ; Marcell. 3) ; les appariteurs des magistrats (note 15) ; les colonies maritimes déduites après l’an 425 (Tite-Live, 27, 36) ; les privilégiés cités dans Cicéron, Phil. 5, 49, 53.

[6] Cicéron, Phil. 5, 12, 31 ; Tite-Live, 7, 9, 67 3, 20, 3 ; Tite-Live, 4, 26, 12, a le même sens ou est une erreur.

[7] Sont désignées comme sacro-saintes les vacations des colonies maritimes et des prêtres ; cependant le serment peut bien avoir été fréquemment ajouté ailleurs. Naturellement, à côté du serment qui rend l’acte irrévocable, tout dépend de la formule. Les vacations des colonies maritimes paraissent avoir été toutes garanties par serment ; mais il n’y eut que celles d’Ostie et d’Antium qui furent trouvées suffisantes pour protéger même contre l’appel fait au cas de tumultus.

[8] V. tome II, la partie de la Capacité d’être magistrat, sur l’accomplissement du service militaire. Appien, B. c. 2, 150.

[9] V. tome III, la partie de la Censure, sur les listes de recrutement.

[10] Cette règle est donnée, pour son temps, par Polybe, 6, 19 (cf. sur la lecture, le tome II, dans la théorie de la capacité d’être magistrat, au début de la partie de l’Accomplissement du service militaire) ; Auguste fixa aussi le temps de service du légionnaire d’abord à 16 ans (Dion, 54, 25), puis à 20 (Dion, 55, 23) qui en sont devenus plus tard 25. C’est à cela que se rapporte la formule annexée à celle de la vocatio : Æra stipendiaque ei omnia merita sunto (Lex repetundarum, ligne 77 = 84) statut municipal de Genetiva (c. 66). La loi Julia municipalis assimile aussi à celui qui a accompli le nombre légal d’années de service, celui à qui vocatio rei militas is legibus plebeive scilis exve fœdere erit, quo circa eum inveitum vitrera non oporteat. V. les détails, Handbuch, 5, 381. 433. 542.

[11] Lorsque, pour faire abstraction du rex sacrorum (v. tome III, la partie de la Royauté, sur le roi des sacrifices), des difficultés sont faites aux trois grands flamines et même au grand pontife relativement a l’occupation des magistratures et en particulier à l’absence de l’Italie (v. tome II, dans la théorie de la capacité d’être magistrat, les détails donnés dans la section du défaut ou de la défectuosité du droit de cité), cela petit se rattacher a la question de savoir s’ils ont la droit de quitter l’Italie.

[12] Cicéron, Acad. pr. 2, 38, 121. Statut municipal de Genetiva, c. 66. Plutarque, Cam. 41. Denys, 4, 62, sur les duovirs sacris faciendis.

[13] Statut municipal de Genetiva, loc. cit. ; liberi ne peut, d’après les habitudes établies du langage juridique, être pris au sens étroit. La même extension se rencontre pour les privilèges personnels, et elle y est concevable. Le droit ne peut que difficilement avoir à l’origine appartenu aux prêtres avec cette étendue ; cette addition aura été faite postérieurement lorsque le but véritable de la dispense était oublié et qu’elle faisait reflet d’un privilegium personnel. An fond, cela importait peu, puisque l’enrôlement forcé sortit de très bonne heure de l’usage pour les personnes appartenant à la noblesse.

[14] Cette exemption ne nous est pas transmise par la tradition ; maïs elle résulte de celle des appariteurs.

[15] Statut municipal de Genetiva, c. 62.

[16] Le contraire ne résulte pas de Tite-Live, 22, 49, 17 ; et il n’y a pas à s’arrêter aux mots de Denys, 6, 9, selon lesquels ό τε χρόνος ό τής ήλικίας καί ό νόμος libère les sénateurs du service militaire.

[17] Nous avons connaissance de deux contestations survenues entre le sénat et ces colons en 547 (Tite-Live, 27, 38) et 563 (Tite-Live, 36, 3) sur les points de savoir si la vocatio s’applique lorsque la guerre se fait en Italie, — ce qui fut tranché par l’affirmative seulement pour les deux colonies lés plus anciennes, Ostie et Antium, — et si elle se rapporte aussi au service de la flotte, — ce qui fut tranché par la négative.

[18] Les colons d’Ostie et d’Antium furent invités, en 547, à ne pas s’éloigner pendant plus d’un mois de leur résidence (Tite-Live, 27, 38, 5). Cf. la partie du droit municipal.

[19] Tite-Live, 23, 49, 2, sur l’an 539.

[20] Dans la loi repetundarum de 631-632 (lignes 77 = 84) le droit de cité est promis au non citoyen qui poursuit un citoyen avec succès pour repetundæ et à ses enfants et petits-enfants. Tite-Live, 39, 19 ; 4, sur l’an 568. Cicéron, De d. n. 2, 2, 6. Le même, Phil. 5, 19,53.

[21] De ce qu’à côté de six divisions de cavaliers qui étaient, en droit, patriciennes, il y en avait douze qui, probablement dés le principe, étaient, en fait, plébéiennes, on ne peut pas conclure que la propriété foncière des deux classes fut dans le même rapport du temps de l’établissement de ce système ; car le service équestre a difficilement dépendu de la fortune à l’origine. On pourrait plutôt déterminer approximativement par là les chiffres respectifs des individus aptes au service.

[22] La propriété individuelle du sol, gai n’est pas urbain a été précédé par un droit personnel sur ce sol, qui ne peut se déterminer avec certitude, mais qui doit s’être lié d’une façon quelconque à la possession de fait et qui peut parfaitement avoir embrassé à la fois l’exercice du droit de la gens par le patricien et la possession légalement précaire du plébéien.

[23] Cicéron, Orat. 46, 156 cite (pour la forme du génitif) les mots centuria fabrum et procum des censoriæ tabulæ. Selon Tite-Live, 19 60, 4, les premiers consuls furent élus ex commentariis Servii Tullii. Festus, p. 246, cite, d’après Varron, Rerum humanarum l. VI, les mots pro censu classis juniorum comme de Servius Tullius in discriptione centuriarum, et immédiatement après, p. 249, comme de la discriptio classium quam fecit Ser. Tullius, les mots procum patricium, c’est-à-dire précisément ceux que cite Cicéron. Une pièce de ce genre était, en réalité, aussi bien un programme du cens qu’un règlement de l’élection des consuls et qu’aussi une discriptio centuriarum ; elle ne peut pas s’être désignée elle-même du nom de discriptio classium, puisque classis n’était pas employé dans cette acception à l’époque ancienne. Le grand fragment des tabulæ censoriæ conservé par Varron, 6, 86-88, doit aussi avoir appartenu à ce document.

[24] V. au tome I, le début de la partie de la Magistrature et des pouvoirs des magistrats.

[25] La relation d’après laquelle le dernier roi fit de nouveau le cens selon l’ancienne forme (Denys, 4, 43) et les consuls rétablirent celui de Servius (le même, 5, 20), est probablement une réponse à, la question de savoir pourquoi la constitution à de Servius n n’était entrée en vigueur que depuis la République.

[26] L’as de 1/10 de denier, sur lequel ce document est probablement calculé, a été introduit en 485. D’un autre côté, les centuries procum patricium, qui y sont citées, ont probablement été ouvertes aux plébéiens en 534, et cela fit sans doute disparaître cette dénomination.

[27] La constitution de l’exercitus centuriatus ne peut être omise ni dans la partie de la Censure, ni dans celle-ci. Les répétitions ont été limitées la puas possible ; mais je n’ai pas voulu les éviter toutes ; car, en se bornant, dans ces questions difficiles, à de simples renvois, on n’arriverait pas suffisamment à tenir compte de la différence de points de vue.

[28] Lorsque l’argent remplaça la superficie comme mesure des classes, ceux qui avaient été jusqu’alors classici ne doivent pas avoir cessé de l’être pour cela. Il serait encore plus déraisonnable d’admettre que, lors du passage de l’as d’un ¼ de dénier à l’as d’un 1/10, on ait conservé nominalement les anciens chiffres, et qu’on ait ainsi, par une simple manipulation de chiffres, fait entrer parmi les classici, des classes tout entières qui étaient jusqu’alors infra classem.

[29] Lors de l’installation des Claudii, il est donné 2 jugera à chacun et 25 à leur chef (Plutarque, Popl. 21). Ce sont bien encore là, semble-t-il, les chiffres de la dernière et de la première classe. On ne peut s’attendre à une concordance absolue entre des chiffres ainsi obtenus par réduction.

[30] Columelle, 3, 3, 8, évalue l’arpent de terrain propre à la culture à 1000 sesterces, Varron, De re r. 3, 2, le produit moyen de l’arpent labouré à 150 sesterces, ce qui, en calculant avec Columelle le rendement des biens ruraux à 6%, donne pour valeur du capital 2500 sesterces. Cf. Hermes, 19, 398.

[31] Les censeurs de 585 excluent de certaines restrictions les libertini, qui prædium prædiave rustica pluris HS. XXX milium haberent (Tite-Live, 45, 1,5, 2). C’est la limite du cens de la 2e classe.

[32] Il a encore été souvent compté postérieurement par as libraux, et il est possible, il est même vraisemblable que les censeurs aient encore procédé ainsi pendant longtemps, que par suite les chiffres qui nous ont été transmis appartiennent à une époque postérieure.

[33] La cuirasse caractéristique de la 1re classe était portée, d’après Polybe, 6, 23, 15, par οί ύπέρ τάς μυρίας τιώμενοι δραχμάς. Denys, 4, 16, 17, met également constamment la miné ou 100 drachmes la où Tite-Live parle de 1000 as. De plus, lorsqu’il est fait allusion pour l’an 585 au chiffre de 30000 sesterces comme a la limite d’une classe (note l) ; cela ne peut s’entendre que de lias léger ; car, si le cens de la 1re classe était de 100000 as lourds ou sesterces, le chiffre de 30000 sesterces se placerait entre la 3e et la 4e classe. Abstraction faite de ces témoignages de grand poids, il est, peut-on dite, impossible que, dans un État comme l’État Romain, le service complet ait en pour condition un cens de 100000 as lourds = 22000 fr., l’époque ancienne une propriété immobilière d’environ 50 arpents. C’est encore plus vrai, s’il est possible, des chiffres donnés pour l’équipement de la cavalerie, qui sont transmis en même temps et qui se rapportent saris nul doute au même as. Assurément la limite tracées par la loi Voconia de 585 pour les successions dévolues aux femmes, de centum milia æris (Gaius, 2, 274) ou 25000 deniers (Dion, 56, 10 ; centum milia sestertium : schol. de Cicéron, Verr. 2, 1, 11, éd. Orelli, p. 188), a été probablement fxée comme étant celle du cens de la 1re classe, puisque, comme il résulte d’Aulu-Gelle, 6[7], 13 (cf. aussi Festus, Ép. p. 113, v. Infra classem) Caton discuta à ce propos les expressions opposées classis et infra classem. Mais Caton peut n’avoir invoqué cette opposition qu’à titre de comparaison ; ensuite il est parfaitement possible que, comme je l’ai supposé, R. M. W. p. 302 = tr. fr. 2, p. 32 ; la loi elle, même ait visé le cens de la ire classe, et que l’interprétation, pour en restreindre l’application le plus possible, ait entendu l’équivoque centum milia æris de l’as lourd.

[34] Tite-Live, 1, 43. Denys, 4, 16. 17. L’unique divergence dans les chiffres, l’indication pour la cinquième classe de 12 mines ½ = 12500 as dans Denys a certainement pour source une égalisation, tandis que le chiffre de Tite-Live s’explique parfaitement parla considération des petits lots de 2 jugera.

[35] Pline, H. n. 33, 3, 43. Festus, Ép. p. 113.

[36] Aulu-Gelle, 6[7], 13. Festus ayant probablement tiré sa glose de la même source, il y a une erreur de chiffre chez lui ou chez Aulu-Gelle ; Pline donne à croire que c’est Aulu-Gelle qui se trompe.

[37] Polybe, 6, 19, 2.

[38] Cf. tome III, la partie de la Censure, sur la tribu personnelle primitive.

[39] Peut-être l’inscription parmi les demi-citoyens sans suffrage subsista-t-elle encore comme peine plus forte à côté de calle-là.

[40] Par exemple, Tite-Live, 24, 18. 27, 11. L’ærarius de ce temps était soumis au service, résulte-t-il de la mesure prise par le censeur de 550, M. Livius, de déclarer ærarii les tribules de toutes les trente-cinq tribus sauf une (Tite-Live, 29, 37) ; cependant cette mesure est encore plus que singulière. D’abord il y avait quatre de ces tribus qui étaient déjà dans cette catégorie. Ensuite les comices par tribus étaient impossibles s’il manquait seulement une tribu, et ceux par centuries l’étaient aussi, puisque la centurie est dans ce temps-là une pars tribus. C’était là une tentative dictée par un aveugle ressentiment, dont la réalisation aurait constitutionnellement anéanti l’État et que le censeur ne fit que parce qu’il savait d’avance qu’il n’aurait pas l’assentiment nécessaire de son collègue et que tout se bornerait donc à l’essai frivole d’un acte impossible. L’accusation de majesté était fondée là ou jamais ; mais le sénat la fit échouer partie en considération d’Hannibal, partie pour d’autres raisons moins honorables.

[41] On ne peut que difficilement s’appuyer sur le renseignement peu digne de foi du De viris ill., 50, pour conclure à la disparition de la solde.

[42] On pouvait employer ces hommes au service d’outre-mer plutôt qu’à celui d’Italie, ou les retenir plus longtemps sous les drapeaux ; on ne pouvait les exclure des légions ; car le citoyen ne peut servir que dans la légion. Il peut y avoir eu, en fait, des légions de discipline, comme celles de Cannes n Sicile ; mais il ne peut pas y en avoir eu, en droit.

[43] Lælius Felix (dans Aulu-Gelle, 15, 27) indique comme principes politiques de répartition servant de base à la constitution servienne, le census et l’ætas par opposition aux genera des comices par curies et aux regiones et loci des comices par tribus. Cicéron, De leg. 3, 3, 7, dit de même et c. 19, 44. Le même, Pro Flacco, 7, 15, De rep. 4, 2. Par les partes populi du premier et du troisième texte, qui se retrouvent dans la désignation des comices par centuries, De leg., 3, 4, 11, il ne peut être fait allusion à des parties déterminées, que ce soient les tribus, les classes ou les centuries ; car elles dérivent toutes là par ces partes. Il ne reste par conséquent autre chose à faire qu’à voir là comme au Pro Arch. 5, 11 (voir tome III, la partie de la Censure, sur la durée des règles établies par les censeurs, à la 1re note), dans les parties du peuple une périphrase pour le peuple tout entier. En outre, les deux premiers textes (dont l’un fait aussi une allusion expresse aux comices par tribus) distinguent de nouveau les trois éléments de disposition de l’armée Servienne : en premier lieu, les degrés de fortune, en second lieu, les limites tenant à l’âge, en troisième lieu la centuriation. Le dernier est exprimé ou par ordines equitum peditumque, ou par ordines tout court, ou par la désignation des ordines d’infanterie et de l’equitatus ; on se rappellera à ce sujet qu’ordo au sens militaire ne désigne que la centurie d’infanterie et que par conséquent l’extension du mot à la centurie de cavaliers est d’ordre zeugmatique. — La même chose peut se trouver dans les mots de Plutarque, Cato maj., 16, selon lesquels les censeurs τά γένη καί τάς ήλικίας — propose Willamowitz au lieu de πολιτείας qui n’a pas de sens — διέκρινον, quoique γένη, s’il est la traduction d’ordines, vienne d’une confusion.

[44] L’analogie, qui se manifeste si fréquemment avec les institutions attiques, est ici particulièrement surprenante. A Athènes aussi, la cavalerie est permanente et défile publiquement chaque année ; la aussi les autorités examinant l’homme et le cheval ; là aussi il y a, à côté de la κατάστασις, de l’æs equestre Romain et de l’argent de fourrage, une solde du cavalier d’une drachme par jour. Bœckh, Staatshaushallung, 3, 354 et ss. = tr. fr. 4, 409 et ss. ; Gilbert, Staatsalterth. 1, 305. On nous approuvera de laisser constamment de côté, dans cette exposition, lés institutions parallèles grecques et spécialement les attiques. Le péril d’attribuer à l’analogie une influence injustifiée n’est pas mince, et ce n’est que par un examen indépendant que la comparaison peut être faite comme elle le mérite. Mais il reste vivement à souhaiter que cette étude soit essayée par une main expérimentée et soit en particulier consacrée à la séparation de ce qui est le fond commun romano-hellénique et de ce qui, dans les institutions romaines, est un emprunt à l’Attique. En présence des rapports existant entre les Douze Tables et les lois de Solon, l’organisation de la cavalerie pourrait parfaitement venir de ces dernières.

[45] La tradition sur l’origine des 18 centuries de chevaliers de l’armée servienne a été exposée au sujet de la cavalerie antérieure à Servius. Les récits que nous possédons à ce sujet différent aussi bien relativement à la part des rois Tarquin et Servius dans l’augmentation de la cavalerie que sur ses phases, et les deux combinaisons divergentes qui se trouvent dans les sources contiennent également des impossibilités. La combinaison selon laquelle les six anciennes centuries auraient contenu chacune 300 hommes et Servius en aurait fait 18 centuries de 100 hommes en laissant les anciens noms à six d’entre elles est aussi mal imaginée que la combinaison opposée selon laquelle Servius aurait trouvé douze centuries innommées et y aurait adjoint les six centuries nommées. Mais il n’y a pas à s’arrêter ni en histoire, ni en droit public, à ces récits- Les anciens eux-mêmes n’avaient pas de relation de ces événements. Il ressort avec une clarté frappante de l’institution elle-même que les six centuries à noms patriciens sont empruntées à la constitution patricienne et que les douze centuries innommées sont nées dans la cité patricio-plébéienne ; peu importe comment la pseudo-histoire s’est figurée les choses.

[46] Cette désignation se trouve dans Cicéron, De rep. 2, 22, 39 et dans Festus, p. 331 s. v. Le chiffre a-t-il disparu avant suffragia dans Cicéron, Phil. 2, 33, 82, comme le pensait Niebuhr, ou bien pouvaient-ils aussi être appelés suffragia tout court c’est un point incertain. Dans Tite-Live, 1, 36, 8. c. 43, 9, elles s’appellent sex centuriæ.

[47] Les Ramnes, nommés à côté des centuriæ seniorum, dans Horace, Ars poet. 342, y représentent encore les centuries des chevaliers.

[48] L’absence des sis centuries de chevaliers parmi les institutions qui, selon. Cicéron (De domo, 44, 131 et Tite-Live, 15, 11, 91, seraient supprimées par la disparition du patriciat, alors qu’elles avaient plus d’importance que toutes les institutions nommées par eux, prouve irréfutablement qu’elles n’étaient plus, à l’époque moderne, exclusivement patriciennes. Salluste, en étendant (Hist. 1, 9, éd. Dietsch) les luttes des plébéiens et des patriciens jusqu’à la guerre d’Hannibal, implique la suppression d’un privilège patricien vers l’an 536. Or, d’une part, entre les privilèges dont les patriciens furent plus tard privés, il n’y en a qu’un dont la perte ne soit pas datée : c’est la possession séparée des six centuries nommées de chevaliers. Et, d’autre part, nous établirons plus loin que la reforme de l’organisation servienne des centuries doit être placée entre 593 et 535. On pourrait par conséquent, comme le suggèrent d’autres raisons encore, la placer dans le voisinage de la dernière date, c’est-à-dire sous la censure de C. Flaminius en 534. — Dans les Rœm. Forsch. 4, 134 et ss., j’ai fait à tort remonter à Servius lui-même l’ouverture des six centuries aux plébéiens.

[49] Duodecim centuriæ equitum, Tite-Live, 43, 15, 14 ; equitum centuriæ cum sex suffragiis, Cicéron, De rep. 2, 22, 39 ; naturellement les 18 centuries sont aussi appelés centuries equitum (Cicéron, Pro Mur. 25, 54. 35, 73. Phil. 7, 6, 16).

[50] Aucun vestige n’indique qu’elles aient jamais été réservées légalement aux plébéiens. Et la date de cette institution suffit pour condamner une telle opinion. Un patricien L. (Pinarius) Natta dans les (dix-huit) centuries de chevaliers, dans Cicéron, Pro Murena, 35, 73.

[51] Postérieurement les dix-huit centuries de chevaliers sont citées en l’an 263, dans Denys, 7, 59 ; en l’an 294, dans le même, 10, 47 ; pour le commencement du VIIe siècle dans Cicéron, De rep. 2, 22 ; les 12 centuries en l’an 585, dans Tite-Live, 43, 16, 44.

[52] Festus, p. 221, et, éd. de Bonn, p. 4. D’après les deux textes, le cheval auxiliaire ne parait pas avoir été’ exigé de tous les cavaliers, et une indemnité spéciale semble avoir été payée pour lui. Si la restitution proposée par les éditeurs est exacte, cette obligation plus étendue pèse sur les trois centuries patriciennes du premier système.

[53] Il n’y avait de nécessaire que la garniture de tête du cheval qui, à part la garniture d’argent dés bossettes, ne devait occasionner que des frais modérés. Les selles sont inconnues à l’époque ancienne et elles ne pénétrèrent dans la pompa que sous Néron (Dion, 63, 13). Il n’y avait pas, dans la cavalerie, d’armes défensives ni pour le cheval, ni, sauf le bouclier, pour l’homme (Polybe, 6, 24, 3). Au contraire un esclave devait être nécessaire pour tenir le cheval et constituer un surcroît de dépense à mettre en ligne de compte.

[54] Ce n’est qu’à cette condition que peuvent se comprendre les frais d’équipement. L’equus publicus, en dépit de son nom, n’est pas la propriété de l’état, mais de celui qui le monte, la preuve en est dans l’invitation à le vendre adressée au cavalier renvoyé du service (Tite-Live, 29, 37, 40 ; d’où Val. Max. 2, 9, 61. Cela ne peut s’entendre que d’une vente faite par lui pour son propre compte et non pour celui de l’état. Si, comme il est vraisemblable, le cavalier subit un préjudice pécuniaire au cas où le cheval lui est enlevé a titra de peine, ce préjudice ne peut consister que dans l’obligation à la restitution totale ou partielle de l’æs equestre ; la simple restitution du prix de vente à l’ærarium ne suffirait pas pour le constituer.

[55] Ce n’est pas exactement par le trésor que ces fonds sont payés aux bénéficiaires. Si, en parlant d’un paiement de l’æs equestre ex publico, Tite-Live veut parler d’un paiement par le trésor et non pas simplement d’une charge supportée par le peuple, son allégation doit peut-être être liée avec l’assertion de Plutarque selon laquelle Camille a la premier soumis les orphelins à l’impôt, dans sa censure de 317 (Cam. 2). En tout cas ; Gaius montré que, même pour l’æs equestre, le bénéficiaire était renvoyé à des intermédiaires : on au contribuable, ou, comme pour la solde, au percepteur de l’impôt. L’observation de Cicéron, De re p. 2, 20, 36, faite sans transition à propos de l’organisation de la cavalerie par Tarquin ne peut non plus être comprise que dans ce sens que l’æs equestre pesait sur les contribuables orbi et l’æs hordiarium sur les contribuables viduæ. — Au reste, d’après les mots de Festus (p. 78 de mon éd. du quat. XVI, cf. p. 85), ces prestations des orbi et des viduæ paraissent avoir été considérées, de même que le tributum, comme de simples avances que le trésor public remboursait quand les vectigalia le permettaient.

[56] Tite-Live, 1, 43, 9. Festus, Ép. p. 84. Le même, Ép. p. 402. Gaius, 4, 21. Les chiffres étant, dans Tite-Live, en corrélation avec ceux du cens servien dont l’as est certainement celui d’un 1/10 de denier, il faut nécessairement admettre la même chose pour eux.

[57] Les frais d’équipement devaient par conséquent suffire à tout le temps de service du cavalier ; il ne faut pas oublier à ce sujet que chaque revue des censeurs s’étendait à l’état convenable du cheval. Cinq chevaux qu’il avait perdus à la guerre furent remplacés par l’État au grand-père de Caton l’ancien (Plutarque, Cat. maj. 1) ; mais il peut avoir servi equo privato, ou encore ce peut avoir été là une faveur individuelle.

[58] Tite-Live, 7, 41, 8, sur l’an 412. Il ne peut s’agir là que de l’æs hordiarium. D’après la contexture du texte, cette disposition doit avoir été prise à ce moment.

[59] Comme exemplification de la pignoris capio du droit privé. Ces indications pourraient n’être venues que de là dans nos annales.

[60] Varron semble, dans le texte du De l. L. 8, 71, avoir employé assarium, qui ne se rencontre que là, comme ailleurs æris gravis, c’est-à-dire pour l’as libral équivalent au sesterce. Le prix d’achat du cheval propre au service aurait donc alors été de 250 deniers (= 220 fr.) ; c’est peu, mais ce n’est pas impossible. En Attique, le cheval de labour ordinaire vaut, à l’époque de la guerre du Péloponnèse, environ 3 mines (= 300 fr. ; Bœckh, Staatshaushalt. 1, 103 = tr. fr. 1, 126). Dans les fournitures de chevaux on compte, à l’époque moderne de l’empire, comme équivalent du cheval, 23 (C. Théod. 11, 17, 1 de l’an 307), 20 (loc. cit., const. 2, de 401) ou 18 (op. cit., 14, 4, 29, de la même année) solidi (= 375 à 290 fr.). Les frais de l’esclave peuvent avoir été compris dans l’argent de fourrage.

[61] Tite-Live, 39, 19, 4.

[62] Cicéron, De re p. 2, 22, 39. Denys, 4, 18. Tite-Live, 1, 43. Dans toutes ces indications, il faut remarquer qu’on évite d’indiquer un cens déterminé et qu’on fait ressortir la bonne extraction. — Tite-Live conçoit, il est vrai, le cens de chevaliers comme établi par Servius. Non seulement il parle, 3, 21, 1, d’un patricien qui a servi pedibus propter paupertatem ; mais il le regarde aussi, 5, 7, 5, sur l’an 351, comme déjà établi lors de l’introduction du service equo privato.

[63] Dès le temps de la guerre d’Hannibal, des chevaliers montés sur un cheval public furent, à titre de peine, obligés a servir sur un cheval privé (Tite-Live, 27, 11) : ils avaient donc le cens équestre.

[64] A la vérité, ce langage a disparu de si bonne heure que l’exclusion des equites de la classis ne peut pas être établie par des documents ; mais il suffit qu’ils soient plus tard mis a côté des cinq classes.

[65] La preuve la plus nette, en est dans la relation de Cicéron (De re p. 2, 22, 39) sur l’organisation servienne des centuries. Mais Denys, dans son texte fondamental, 4, 18, dit aussi seulement que Servius coordonna les cavaliers des 18 centuries équestres aux 80 centuries de la 1re classe, tandis qu’il met, 7, 59. 10, 17, les 18 centuries de chevaliers et les 80 centuries de fantassins expressément dans la πρώτη συμμοία ou la πρώτη τάξις. Tite-Live ne dit rien autre chose. Ce n’est que par une légère inexactitude que, selon lui, 43, 40, 44, huit des 12 centuries équestres multæque alia prima classis condamnent le censeur Claudius. On ne peut pas même appeler une inexactitude le fait que, dans la description de l’élection de Dolabella, il nomme, dans l’énumération des différentes sections du vote, seulement la prima classis et non les 12 centuries équestres qui votent avec elle.

[66] Denys, 4, 18.

[67] Cicéron (en admettant le changement indispensable de MACCC en MDCCC) et Tite-Live fixent l’un et l’autre le chiffre dés cavaliers sous Tarquin à 4800, et, chez le premier, le jeune Scipion appelle cela un mos qui osque adhuc est retentus. Les 18 centurions sont probablement compris dans ce chiffre.

[68] Nous avons deux fragments de la harangue qua suasit in senatu ut plura æra equestria fierent (éd. Jord. p. 66) : Nunc ego arbitror oportere institui quin (Mss. : restitui qui ou quo) minus duobus milibus ducentis sit ærum equestrium, et De æribus de duobus milibus ducentis (Charisius, milibus acc. Priscien : milibus actum).

[69] Ce point sera développé plus en détail dans la partie des chevaliers.

[70] Il y a dans le commentariolum petitionis attribué à Q. Cicéron, 8, 33 : Jam equitum centuriæ multo facilius mihi diligentia posse teneri videntur primum cognoscito equites, pauci enim sunt, deinde appetito : multo enim facilias illa adulescentulorum ad amicitiam ætas adjungitur. Cf. Cicéron, Ad fam. 11, 16 : Quoniam equitum centurias tenes, in quis regnas (D. Brutus, alors cos. des.), mitte ad Lupum nostrum, ut is nobis (pour la candidature de L. Ælius Lamia à la préture) eas centurias conficiat.

[71] C’est seulement au cens que les cavaliers sont appelés dans l’ordre des tribus. Cf. tome IV, la partie de la censure, sur la révision des chevaux et des cavaliers.

[72] Le decurio est forcément compris dans la decuria, en vertu non seulement du sens primitif du mot : 10e homme, mais aussi de la fixation des 18 centuries à 1.800 têtes dans Tite-Live et Cicéron, si la décurie du système moderne composée de 11 hommes avait été prise pour base, le chiffre total aurait été de 1.980.

[73] Polybe, 6, 25, 1. Caton dans le discours aux cavaliers au camp de Numance (éd. Jordan, p. 39).

[74] On peut soulever la question de savoir si, de même que l’on a probablement formé 20 turmæ des 20 décuries respectives des trois cités primitives, en composant chaque turma de trois décuries appartenant chacune à l’une des trois cités, la turma postérieure n’aurait pas été composée d’une décurie de cavaliers patriciens et de deux décuries de cavaliers non patriciens. Mais, en tout cas, il aurait, ici fallu de bonne heure abandonner l’ancien procédé d’amalgame.

[75] Cela n’exclut pas la faculté pour le général de changer les chefs au moment de la mobilisation des troupes.

[76] Auguste, en rendant la condition des chevaliers viagère, les libéra, à partir de l’âge de 35 ans, du service personnel (Suétone, Auguste, 38). Cela peut se rattacher à l’usage antérieur. Cette limite d’âge, se rencontre aussi pour le service de la flotte (Tite-Live, 29, 11, 9).

[77] Cf. au tome II, la partie de la capacité d’être magistrat, sur l’accomplissement du service.

[78] Cf. au tome IV, la partie de la censure, sur les tabulæ juniorum.

[79] Denys, 4,18 et Quintilien, Inst. 1, 6, 33, certainement tous deux d’après Varron, ramènent déjà le mot au latin calare. Mais la prétendue forme ancienne calasis est difficilement autre chose qu’une donnée schématique : Κλάσις est un des pseudodorismes qui ne sont déjà pas rares chez les philologues de l’époque de Varron ; de κλέω il ne peut venir, que κλήσις (Willamowitz). Le sens de convocation correspond si bien à son emploi politique moderne qu’on n’a pu s’en dégager ni à l’époque ancienne, ni à l’époque moderne, tout clair qu’il soit que ce sens ne s’applique convenablement ni à la flotte, ni à la phalange, ni par conséquent en général l’emploi ancien de l’expression. Corssen lui-même (Ausspr. 1, 496 ; cf. Curtius, Griech. Etym. 5e éd. p. 139), qui proteste avec raison contre l’étymologie tirée du grec, a laissé de côté le sens primitif.

[80] Relativement a la guerre maritime, classis a conservé son sens primitif. Relativement à la guerre terrestre, — le mot ne se présente généralement que dans son acception militaire, — classis se rencontre dans le sens d’armée, chez les grammairiens (Festus, Ép., p. 56 ; de même dans la loi attribuée à Numa, op. cit. p. 189, v. Opima spolia et p. 225 ; Fabius Pictor, dans Aulu-Gelle, 10, 15, 4, rapproché de 1, 11, 3) et a titre isolé dans les poètes (Virgile, Æn. 7, 716). Le sens fondamental ne ressort dans toute sa vigueur, relativement à l’infanterie servienne, que dans Caton. Mais classis paraît être employé de même dans lés mots pro (c’est-à-dire d’après l’explication, in) censu classis juniorum (Festus, p. 246) qui ont été conservés de l’ancien document sur la constitution servienne. Les classici testes qui signandis testamentis adhibebantur (Festus, Ép. p. 56 ; cf. Aulu-Gelle, 19, 8, 15) pourraient être compris dans le sens de Caton. — Il est encore fort possible que classis ait pu se dire aussi de la cavalerie (scolies sur l’Æn. 6, 1 ; cf. celles sur 2, 30. 3, 602. 6, 1. 7, 716), quoique Virgile ait difficilement employé le mot dans ce sens. — Sur la problématique quintana classis, Varron , 5, 82, Tite-Live, 8, 8, 8.

[81] Il emploie déjà quintæ classis par métaphore (Acad. pr. 2, 23, 73).

[82] Les pièces de l’équipement étaient impérativement requises (Tite-Live, 1, 43, 2 ; Denys, 4, 46.47) et étaient présentées au cens (cf. tome IV, la partie de la censure, sur la revue des armes des fantassins). La fourniture par le soldat lui-même des armés et du costume ne se sera pas longtemps maintenue en vigueur ; mais, jusque sous l’Empire, on lui en déduisit le montant sur sa solde (Polybe, 6, 39, 45 ; Tacite, Ann. 4, 17 ; Handb. 5, 94 = tr. fr. 40 ; 417).

[83] Tite-Live, 1, 43 ; Denys, 4, 16. 47. Ce dernier est en désaccord avec Tite-Live, en ce qu’il ajoute, pour la 3e classe, le bouclier, et, pour la 4e, le javelot. Ce n’est pas ici te lieu d’étudier ces institutions au point de vue militaire ; cf. Handb. 5, 326.

[84] Denys, 4, 48.

[85] Polybe, 6, 31, 7.

[86] Polybe, 6, 23, 14. Cf. Handb. 5, 336.

[87] Nous ne pouvons il est vrai, établir ces chiffres normaux que pour les centuries du système récent qui rattache la centuriation aux tribus, et encore là seulement pour les centuries de la plebs urbana de l’Empire. Dans la grande inscription de la Suburana juniorum de l’an 70 (C. I. L. VI, 200), les noms des centuriales des huit centuries sont énumérés de telle sorte que la première centurie, y compris les noms manquants détruits à la fin, mais qui peuvent être supputés d’après l’espace qu’ils occupaient, doit avoir compté à peu près 120 têtes et les autres un peu moins. D’après une autre inscription de l’an 251 (C. I. L. VI, 3104, p. 844), la Palatins a juniorum homines num(ero) DCCCCLXVIII, soit 8 X 120, en déduisant les centurions.

[88] Festus, p. 177, v. Ni quis scivit. Denys, 4, 17. 7, 58. A l’époque récente, dans laquelle la centurie est une partie de la tribu, le centurie se confond avec le curator tribus, en ce sens que chacun de ces derniers est à la tête d’une centurie et que la tribu a autant de curateurs que de centuries. La dénomination officielle est, à cette époque, curator. L’expression centurio qui est exacte au fond, n’est employée que par l’empereur Julien. Il a déjà été remarqué que les chefs des tribus, les tribuni (ærarii) et les centuriones, les chefs des centuries, sont confondus dans les titulaires de cette fonction ; comme nous verrons, elle appartient en réalité au groupe tribuaire de centuries et par conséquent, au sens propre, à notre sujet actuel.

[89] Denys, 7, 59. Domaszewski (Die Fahnen im rœm. Heer, p. 21) a tort de nier l’existence d’enseignes de centuries.

[90] Tout au moins Denys, 2, 14, conçoit de cette façon, peut-être d’après Varron, l’organisation primitive de l’armée. Il faut alors admettre que l’on prenait en considération, dans le cens primitif, à côté de la détermination de l’âge et de l’examen des armes (v. tome IV, la partie de la censure, sur la revue des armes des fantassins) l’examen de l’aptitude physique ; cela n’existe plus postérieurement (tome IV, loc. cit.) ; mais cela peut parfaitement avoir existé. Car la plus ancienne méthode de combat n’avait que de faibles exigences à l’égard de celui qui servait à pied dans la phalange ou à côté à d’elle, et les institutions établies pour l’exclusion des criminels ne s’accordent pas avec les conditions primitives de l’État ; ce qu’il y avait d’indispensable, peut parfaitement avoir été compris dans le cens primitif.

[91] Les chiffres de la plebs urbana rapportés, note 87, ne peuvent être entendus qu’ainsi. Au point de vue effectif, le nombre des tribules est de beaucoup plus élevé.

[92] Tite-Live, 1, 43 ; Denys, 4, 16. 17. 7, 59, sans divergences. Les 80 centuries de la première classe aussi dans Denys, 4, 20. 10, 17.

[93] Denys le dit aussi, 4, 19. 21.

[94] D’après Denys, 4, 19, le nombre d’hommes nécessaire est, lors de la levée, réparti entre les 193 centuries, et il est requis de chacune τό έπιβάλλον έκάστω λόχω πλήθος ; mais l’expression tout au moins est mauvaise ; car ce n’est pas à la centurie qu’on s’adresse, ce sont les centuriales (ou, ce qui revient au même, les tribules) qui ont à se présenter tous au dilectus, et il n’est ni possible de prouver, ni même vraisemblable que l’on y ait pris un nombre égal d’hommes dans chaque centurie politique, ni même qu’il ait été tenu compte, pour le dilectus, des centuries politiques, en dehors du temps où le census lui-même était un dilectus préalable.

[95] Denys, 4, 14. Lorsque Tite-Live, 1, 43, 13, nie, pour les tribus serviennes, que ex ad centuriarum distributionem numerumque quiequam pertinuerunt, cela se rapporte seulement au rattachement fixe postérieur des diverses centuries aux diverses tribus ; cela n’exclut pas la composition proportionnelle des premières par les secondes. Une autre indication dans ce sens est donnée par le fait que, dans les levées peu étendues, on n’appelait point parfois toutes les tribus au dilectus (Tite-Live, 4, 46, 4). En général, on rapprochait sans doute le nombre des hommes sujets au service tel qu’il résultait des listes et celui des hommes nécessaires, et, ensuite, si par exemple le premier était le double du second, on prenait la moitié des hommes de chaque tribu, de manière que l’inégalité du chiffre des individus sujets au service dans chaque tribu se reproduisit dans l’armée. — J’essaie ici d’écarter, sans entrer dans le détail de la faute, ce que j’avais dit de défectueux sur ces points, dans un livre de jeunesse, sous le charme du démon des nombres.

[96] Les deux seuls textes qui fassent une allusion précise à une réforme essentielle et durable du système de vote de Servius, sont Tite-Live, 1, 43, 12, qui, après avoir expliqué la constitution servienne, continue en disant : Nec mirari oportet hunc ordinem, qui nunc est post expletas quinque et triginta tribus duplicato eorum numem centuriis juniorum seniorumque (tous les bons Mss. intercalent ici se) ad institutam ab Ser. Tullio summam non convenire, et Appien, B. c. 1, 59. Les expressions de Denys, 4, 41, prouvent bien que les comices par centuries auxquels assistait l’auteur ne suivaient pas la système de Servius et que la prédominance des riches qu’il souligne si fortement ne s’y observait aucunement ; mais il ne décrit, dans ses parfaits, que l’état de son temps ; évidemment sans en connaître l’origine ; l’organisation du vote lui semble même plutôt une application embrouillée de l’ancien régime qu’une nouveauté.

[97] Pour la fixation de la date, nous n’avons de base précise que dans le texte de Tite-Live, cité ci-dessus, mais cette base est double : Tite-Live, qui cite proleptiquement les institutions de son temps à propos des serviennes, ne peut pas les avoir omises à leur place ; or ses annales, complètes jusqu’en Pan 462 et recommençant en 536, supposent, pour la première fois, la réforme accomplie en 539 (Tite-Live, 24, 7, 13). Elle doit donc se placer entre 462 et 536. En outre, puisque elle consista d’après lui dans l’amalgame des 35 tribus d’une part et du premier et de second ban de l’autre, elle ne peut pas se placer avant l’an 513, où la 34e et la 35e tribus furent constituées. Cela concorde bien avec les nombreuses générations de Denys, sur lesquelles il n’y aurait d’ailleurs aucun fond à faire cela concorde en outre avec le fait que l’ancien système fut rétabli par Sulla et était connu jusque dans le détail, avec ses classes calculées au pied de l’as d’1/10 de denier introduit en 486.

[98] La réforme a été accomplie sinon par une censure, tout au moins forcément pendant une censure. Or, dans la période donnés, les lustra tombent en 513, 520, 524, 529, 534. Le fait que les tribus furent portées à 35 en 513 semble plaider pour 513. Mais en réalité, il n’y a pas de lien intime entre les chiffres des tribus et la réforme, et elle aurait aussi bien pu se réaliser en présence de tout autre chiffre de tribus. Les mots de Tite-Live : Post expletas V et XXX tribus eux-mêmes n’excluent pas, il est vrai, absolument la contemporanéité de l’augmentation du nombre des tribus et de la réforme des centuries ; mais ils s’accordent mieux avec l’idée que la réforme des centuries eut lieu postérieurement. Au contraire il est favorable à la date de 534 que Salluste place la fin des divisions des patriciens et des plébéiens vers 536, et : que cela soit rapporté avec vraisemblance a l’admission des plébéiens dans les sex suffragia, qui a dû être une partie de la nouvelle organisation des centuries.

[99] Les mots essentiels census, ætas, ordo sont certainement une formule traditionnelle. C’est pourquoi Scipion dans Cicéron présente encore l’organisation électorale de son temps comme celle de Servius.

[100] Cicéron, De orat. 2, 64, 260 (pour l’an 578). Le même, Pro Flacco, 7, 15. Pro Sulla, 32, 91. Brutus, 67, 237. De imp. Pompeii, 1, 2 ; In toga cand. chez Asconius, p. 85 ; Cum sen. gr. eg. 11, 27. Asconius, In or. in toga cand. p. 93. Tite-Live, 28, 18, 9, 27, 21, 5. 29, 22, 5. 34, 6, 3. c. 7, 1. 37, 47, 7. 43, 16, 16. [Q. Cicéron], Comm. pet. 5, 18. 8, 38. Val. Max. 4, 4, 3, et beaucoup d’autres textes. La tribu n’est indiquée comme unité de vote pour les comices par centuries par aucun auteur compétent ; Tite-Live, Ép. 49 et Orose, 6, 7, 1. Mais les élections des centuries peuvent parfaitement être attribuées au peuple des V et XXX tribuum dans son ensemble (Cicéron, Phil. 7, 6, 16 rapproché de 6, 5, 12).

[101] Cicéron, Verr. 5, 15, 38. Par conséquent chacune des centuries qui votait avait l’un ou l’autre qualificatif. Horace, Ars poet. 341.

[102] Pseudo-Salluste, De re p. ord. 2, 8. Loi agraire de 643, ligne 38. Salluste, Jug. 86. A cela s’ajoutent les mentions générales citées, note 43, et aussi l’emploi métaphorique de quinte classis dans Cicéron déjà signalé. — Les classes sont citées comme une antiquité par Arnobe, Adv. nat. 2, 67 ; Servius, ad Æn. 7, 716 ; Symmaque, Pro patre, 6 ; Ausone, Grat. act. 3, 12 et 9, 41.

[103] Il est fait allusion au vote successif des classes dans le procès du censeur C. Claudius de 583 (Tite-Live, 43, 16, 14 ; Val. Max. 6, 5, 3, d’après Tite-Live ; De viris ill. 57), et, pour l’élection consulaire complémentaire de 710, par Cicéron, Phil. 2, 33, 82.

[104] L’élévation de 100.000 as à 120.000 est postérieure au temps de Polybe, elle est donc étrangère à la réforme.

[105] Polybe indique seulement cette limite comme celle du service dans les légions. Mais il est impossible qu’on ait, à cette époque, soumis au service des légions les citoyens dont le cens était de plus de 4.000 as et de moins de 11.000 sans leur accorder en même temps le droit de vote lié au service ordinaire.

[106] Tite-Live exprime que les tribus de son temps ad centuriarum distributionem numerumque pertinebant en le niant pour les quatre tribus serviennes. La relation respective des centuries et des tribus dans la constitution réformée ne peut pas être exprimée plus précisément que ne fait Tite-Live par les mots : Duplicata (tribuum) rumero centuriis juniorum seniorumque. Cela ne signifie pas qu’il fut formé 70 tribus, mais qu’en doublant le chiffre des tribus, on créa 10 groupes de centuries, soit de seniores, soit de juniores.

[107] À l’époque républicaine, tribus a toujours son sens primitif, même dans les curatores tribus de la formule des censeurs. On ne trouve pas et il e y a peut-être pas eu ; à l’époque républicaine, d’expression technique pour désigner les groupes de centuries formés dans les tribus. Autrement Tite-Live aurait employé cette expression au lieu de centuris juniorum seniorumque, qui, d’après le sens des mots, s’applique également aux centuries isolées. Cela a sa raison d’être. Nous verrons plus loin que les centuries appartenant à la même tribu et au même ban ne possédaient pas elles-mêmes un nombre fixe de voix et ne pouvaient donc pas être considérées commue un ensemble formé par un certain nombre de centuries de vote. Leur réunion tient exclusivement à leur organisation intérieure, notamment en vue des libéralités publiques ; et, de même que ces libéralités ne se sont développées que sous l’Empire et principalement par rapport à la plebs urbana frumentaria, lest aussi d’abord dans cette dernière que l’on rencontre la dénomination correspondante pour la, première fois, dans les inscriptions de la tribus Suburana juniorum du temps de Vespasien (C. I. L. VI, 199. 200) ; plus tard cette dénomination devient constante, le plus souvent, avec corpus avant l’indication du ban. Cf. aussi Appien, B. c. 1, 59.

[108] Tite-Live, 24, 7, 12. c. 9, 3. 26, 22, la prærogaliva Veturia juniorum est expressément désignée plus loin comme une centuria. 27, 6, 3, la prærogaliva Galeria juniorum est opposée aux jure vocatæ. Lorsque César, dans Lucain (5, 394), decantat tribus et vana versat in urna en vue du tirage de la prærogaliva, il s’agit des mêmes noms.

[109] Cicéron, Pro Planc. 20, 49, discute l’importance de la centuria prærogaliva et continue ensuite : Ædilem tu Plancium factum miraris, cujus in honore non unius tribus pars, sed comitia tota comitiis fuerint prærogaliva ? Il ne le dit pas de toutes les centuries, et pour de bonnes raisons.

[110] Tite-Live, 1, 43, 12. Les chiffres du nouveau système qui ne concordent pas ad institutam ab Ser. Tullio summam ne peuvent être que les chiffres des centuries des diverses classes ; Tite-Live ne parle pas du chiffre total.

[111] Cicéron, De re p. 2, 22, 39 : Reliquum populum distribuit in quinque classes senioresque a junioribus divisit..... quæ discriptio si esset ignota vobis, explicaretur a me. Nunc rationem videtis esse talent (c’est-à-dire, puisqu’elle vous est connue, vous comprenez le système établi par elle), ut equitum centuriæ (la 1re main : certamine) cum sex (la 1re main : et au lieu de sex) suffragiis et prima classis, addita centuria quæ..... fabris tignariis est data, LXXX (LXXX : addition de la seconde main) VIIII centurias habeat : quibus ex centum quattuor centuriis (habeat q. ex c. q. centuriis : addition de la seconde main) — tot enim reliquæ suntocto solæ si accesserunt, confecta est vis populi universa. Il est évident que la seconde main seule est décisive. Les sex suffragia n’auraient pu être trouvés par aucune correction conjecturale, et les autres divergences par lesquelles la première main se sépare de la seconde se ramènent toutes aisément à des fautes de copistes, tant la confusion de CERTAMINE et CENTVRLÆ que le saut de LXXXVIIII CENTVRIAS à IIII CENTVRIIS. — Les négligences de langage invoquées surtout par Ritschl (Opusc. 3, 641) ne peuvent être contestées ; equitum centuriæ comme l’un des sujets de centurias habeat et la retour sans transition à l’exposition historique avec, le conjonctif excluderetur sont des inélégances ; mais, à mon sens, elles n’autorisent pas de doutes sur la sincérité essentielle de la tradition.

[112] Le Scipion de Cicéron, après être arrivé à la constitution servienne, déclare superflu de l’analyser devant ses auditeurs auxquels elle est familière, et il se contente de relever brièvement la majorité qui y est donnée essentiellement par la première classe et par suite la tendance politiqué qui agit là ; or, il ne peut parler ainsi que des comices centuriates de son temps ; car ils devaient être exactement connus à tout citoyen qui s’acquittait de ses devoirs, tandis que les différences existant outre la constitution servienne et la constitution réformée,si cela avait été d’elles qu’il s’était agi, auraient, tout aussi bien et même plus que la plupart des points qu’il traite, exigé une analyse. A la vérité, Cicéron, qui ne pouvait pas ignorer ces différences, les a regardées comme assez peu importantes pour se permettre, là où il s’occupe de déterminer la tendance de la constitution, de traiter le système de son temps comme s’il était celui de Servius toujours en vigueur. Il ne fait là que faire plus complètement ce qu’il fait assez souvent en désignant les trois principes de l’organisation des centuries : census, ætas, ordines comme une antique coutume, et, puisque il parle en homme politique et non en archéologue, il le fait avec raison. Il importe peu, pour la prépondérance des riches, qu’ils aient 99 centuries contre 94 ou 89 contre 104 ; il n’y a qu’une question de convenances a ne pas permettre que la première classe puisse statuer seule. En outre, cette conception de son exposé est commandée par des raisons tirées à la fois du langage et du fond des choses. Quant au langage le passage, du discours au présent (rationem videtis esse ut.... habeas) du parfait (auparavant populum distribuit :.... curavitque.... ne plurimum valeant plurimi, ensuite reliquaque.... multitudo.... neque excluderetur suffragiis, où le subjonctif dépend évidemment de curavit) s’explique très bien si, dans le récit, le résultat politique, encore obtenu dans le temps présent, est intercalé parmi les mesures prises par le roi ; mais il ne s’explique qu’à cette condition. Pour le but que poursuivait Cicéron, il avait le droit et le pouvoir d’identifier l’ancien et le nouveau systèmes de centuries, et il devait conformer ses indications détaillées au second, puisqu’il ne traitait pas le sujet en archéologue.

[113] Le compte 70 + 18 + 1 + 104 = 193 est juste.

[114] Il sera démontré plus bas que, sur les 104 voix appartenant aux divisions qui votaient ensuite, il y en avait 4 qui revenaient aux centuries auxiliaires.

[115] En dehors de l’exposition de Cicéron, c’est établi par la relation de l’élection de Dolabella. Elle s’accomplit évidemment sans opposition, et le dernier moment où elle peut donner lien à contestation est celui du vote de la seconde classe. Par conséquent, la condamnation de Claudius par deux classes dans le De viris ill. est une faute, dont les meilleurs témoignages sont exempts. Il résulte de là que, comme au reste il se comprend de soi, la seconde classe avait au moins 9 voix.

[116] Nous connaissons seulement (à moins que la... ia seniarum de l’inscription Bull. Com. 1886, p. 279, n’appartienne à une tribu rustiqué) la tribus Claudia patrum et liberum clientium (C. I. L. IX, 5823. XIV, 374 ; dédication à Hadrien des tribules trib. Claudia[e].... C. I. L. VI, 980) et un tribule trib. Offentinæ rentrant dans le même ordre d’idées (C. I. L. VI, 10221). Si, dans le second cas, l’indication de la moitié manque et si, dans le premier, les patres et les liberi, évidemment les seniores et les juniores, sont réunis, cela s’explique parfaitement par le petit nombre de ces tribules.

[117] Trib. Suc. cor. sen. plus haut ; trib. Suc. junior. C. I. L. VI, 199. 200, toutes deux du temps de Vespasien. — Tribules tribus Palatinæ corporis seniorum clientium, C. I. L. VI, 40215 ; tribus Palatinæ Corp. juniorum tribus juvenal. hon[orat. ?] client : C. I. L. VI, 1404, p. 844, de 254 ; tribulis tribus Palatinæ corp. juniores, C. I. L. VI, 10218.

[118] Une pierre est érigée, en l’honneur de Vespasien, par la trib. Suc. corp. Juliani, par un homme, cui populos ejus corporis immunitatem sex centuriarum decrevit (C. I. L. VI, 198), ce qui doit être expliqué par l’analogie de l’immunis Romæ regionibus XIIII (C. I. L. VI, 9104).

[119] Viator trib. Palat. corpore August. C. I. L. VI, 10216 ; tribu Esq. corpore Aug. C. I. L. VI, 10217 ; Esquilina Aug. C. I. L. VI, 10097.

[120] Trib. Suc. corp. fœder. C. I. L. VI, 196. 197, du temps de Vespasien.

[121] C. I. L. VI, 199, avec la liste des noms de huit centuries, cinq sur le derrière, trois sur la paroi latérale du côté droit de cette grande base. La première centurie de la trib. Suc. Cor. sen., Varron, 6, 86.

[122] C. I. L. VI, 4104.

[123] On peut conclure cela, mais rien de plus, des mots de Cicéron, De l. agr. 2, 2, 4.

[124] Ce doit être là principalement la confusion dont les comices du système réformé semblent entachés à Denys, 4, 41.

[125] Puisque, si le témoignage d’Appien est exact, les 10 nouvelles tribus votaient après les 35 anciennes, l’organisation restait extérieurement ce qu’elle était, et elle ne subissait une sorte de doublement qu’en ce sens que, si les anciens citoyens ne formaient pas à eux seuls une majorité, on appelait au vote 5 nouvelles classes.

[126] D’après Polybe, 6, 20, les tribus étaient pour la levée appelées par le sort, puis les hommes étaient pris quatre par quatre et incorporés dans les quatre légions. Cette procédure fait complètement abstraction de la centurie des censeurs et est également applicable, que cette centurie soit composée de tribules de toutes les tribus ou appartienne à une seule tribu.

[127] Denys (4, 41) le dit aussi.

[128] Cf. la partie des Affranchis. A la vérité, on ne peut pas affirmer que le témoignage de Tite-Live, Ép. 20, doive forcément être rapporté à la censure de 534.

[129] Pour le conservateur Polybe (2, 21), il est l’άρχηγός τής έπί τό χεΐρον τοΰ δήμου διαστροφής.

[130] Pour l’organisation servienne, Denys énumère plusieurs fois cinq centuries d’hommes non armés et indique à plusieurs reprises (4, 18. 19. 20. 7, 59. 10, 17) le chiffre 193 comme le chiffre total. Tite-Live en nomme six (si on suit les manuscrits) et passe le chiffre total sons silence. Cicéron, dans son exposition de la constitution réformée, ne nomme expressément qu’une des centuries d’hommes non armés ; pour le chiffre total, il est d’accord avec Denys, et il ne peut être douteux que sur les loi centuries, qu’il donne partie aux quatre classes d’hommes armés allant de la 2e à la 5e, partie aux non armés à l’exclusion des charpentiers, il y en a 100 pour la première catégorie et 4 pour la seconde. On rencontre ici une très ancienne confusion de la tradition, sur la cause de laquelle nous reviendrons plus bas. Le chiffre total donné dans Cicéron et Denys est le vrai ; mais une 6e centurie a été ajoutée à tort, et par suite la réunion des chiffres partiels donnerait le total 194. Les traces de ces six centuries se trouvent dans Cicéron ; mais elles ne sont pas assez claires pour que l’on soit choqué du chifft0 total. Tite-Live cite les six centuries ; mais, à cause de cela, il omet de faire l’addition. Denys a refait le calcul, et, pour mettre les chiffres d’accord, il a effacé la centuria adcensorum velatorum, qui est authentique.

[131] Cicéron, De re p. 2, 22, 30. Le même, Orat. 46, 456. Tite-Live, 1, 43, 3. Denys, 4, 17. 7, 59.

[132] Tite-Live, loc. cit. Denys, loc. cit.

[133] Cicéron, De re p. 2, 20, 40. Tite-Live, 1, 43, 7, où in his ne peut vouloir dire qu’une chose, c’est que ces trois centuries votent en même temps que les 3e centuries de la 5e classe qui les précèdent : en admettant qu’on doive les compter dans les 30, on fausserait le chiffre total, et l’on détruirait l’égalité de nombre des centuries de seniores et de juniores. Denys, 4, 17. 7, 5.

[134] Ce n’est que par l’une de ses nombreuses fautes que Denys (4, 17) divise d’après l’âge les deux centuriæ fabrum et les deus centuries de musiciens.

[135] Les accensi des magistrats qui paraissent avoir en pour origine la centuria accensorum velatorum, sont aussi habituellement des affranchis. V. tome I, la partie de Appariteurs, sur les Accensi.

[136] Festus, Ép. p. 369, également, p. 14, v. Adscripticii. L’opposé de velatus doit être proprement sagatus.

[137] Festus, Ép. p. 18, p. 369. Varron distingue adscriptivus et accensus (De l. L. 7, 56, en expliquant le texte de Plaute, Menæchm. 1, 3, 1) ; au contraire, les accensi sont pour lui les auxiliaires pris parmi ces hommes pour les sous-officiers de l’armée, d’après De vit. p. R. III dans Nonius, p. 520 (de même Végèce, 2, 1). Ces hommes semblent donc, comme au reste il est vraisemblable, avoir été partagés entre les diverses centuries ; et puisque en pareil cas les sous-officiers prenaient naturellement parmi eux leurs aides personnels, ou, plutôt leurs serviteurs, Varron indique probablement exactement le sens moderne du mot, quoique à l’origine adscriptivus et accensus signifient sans nul doute la même chose. — Il peut être exact que les accensi aient aussi été appelés ferentarii, si ces derniers, comme le dit Caton (dans Festus, Ép. p. 369, v. Velati ; et Varron, De l. L. 7, 58), tela ac potiones militibus pugnantibus subministrabant, mais non d’après l’explication qui y voit des hommes armés à la légère (Festus, loc. cit. et p. 85. 93, v. ferentarii, p. 11, v. adscriplicii, Varron dans Nonius, p. 520 ; Végèce, 3, 14).

[138] Festus, Ép., p. 14, p. 18, v. Accensi, et Varron, De l. L. 7, 56, aussi Varron, dans Nonius, p. 57, v. Legionem. Une mauvaise étymologie dans Varron, De l. L. 6, 89 et chez Nonius, p. 58, v. Accensi.

[139] Cela résulte aussi de Festus, p. 177, v. Ni quis scivit.

[140] La trompette et le clairon n’ont rien de commun avec les musiciens de profession ; les joueurs de flûte seuls figurent dans les collèges de Numa.

[141] Les cives sine suffragio proprement dits, c’est-à-dire les citoyens auxquels les conditions du droit de vote ne font pas défaut, mais qui ont reçu de la loi le droit de cité avec exclusion du droit de suffrage, n’existent pas encore du temps de Servius. Cette centurie ne leur a pas été étendue.

[142] Cicéron, De re p. 2, 22, 40. Tite-Live, 1, 43. Ce droit de suffrage aussi général qu’inégal substitué au droit de suffrage égal et général du temps des rois est une des idées favorites du gouvernement aristocratique et est caractéristique de sa façon de traiter le principe de l’égalité politique’ des citoyens.

[143] Tite-Live, 4, 43, 8. Denys, 4, 18. 7, 59.

[144] Cicéron, De re p. 2, 22, 40.

[145] Denys, 4, 18. 7, 59.

[146] Il faut que cette centurie, envisagée au point de vue de son actif, ait été assez forte pour pouvoir céder des hommes à chacune des 188 centuries armées. En ce sens, on peut comprendre que, d’après Varron, 5, 82, le magister equitum ait pouvoir sur les equites et accensos, et que Tite-Live, (8, 8, 8 rapproché de c. 10, 2) parle des tria vexilla de force égale des veterani, rorarii et accensi, dont il appelle le dernier minimæ fiduciæ manum. Je maintiens par conséquent en principe ma proposition (Tribus, p. 1,20) de restitution de la glose à moitié détruite de Festus, p. 257. Les accensi peuvent, d’après le sens primitif de classis, parfaitement être conçus comme en étant une, et cette classis comme votant avec la cinquième classe moderne, avoir ensuite été appelée quintana.

[147] Dans Tite-Live, il y a, à côté de la centuria des accensi velati, l’una centuria des citoyens au dessous du cens de la 5e classe, et Denys, 4, 18, in fine, conçoit de même, en excluant la centuria adcensorum, son λόχος τών άπόρων, auquel se rattache la désignation, aujourd’hui courante et étrangère aux sources, de centuria capite censorum. Cicéron nommant dans un texte, il est vrai mutilé (De re p., 2, 20, 40), les proletarii à côté des accensi velati et des liticinus, cornicines, il parait avoir également connu la dernière centurie et l’avoir attribuée aux proletarii. Mais c’est, s’il est possible, encore plus étrange que les systèmes de Tite-Live et de Denys ; car les proletarii sont, comme Cicéron le dit précisément là, des citoyens dont le cens est inférieur à 1500 as, et les citoyens sujets à l’impôt qui ont plus de 1.500 as et moins de 11.000 as (ou de 4.000) se trouvent ainsi rester complètement dehors du classement. Il a été montre plus haut que les idées d’adsiduus et de proletarius sont étrangères à l’organisation militaire de Servius et appartiennent à son organisation fiscale qui n’est aucunement de même nature. — Il est dit encore plus inexactement dans le grammairien Charisius, éd. Keil, p. 75 : Cum a Ser. Tullio populus in quinque classes esses divisus, ut tributum prout possideret quis inferret, diliores qui asses dabant assidui dicti sunt.

[148] Denys, 4, 18. 7, 59, ne fait pas seulement la dernière centurie voter après la cinquième classe et non avec elle, par conséquent intervenir seulement si jusque-là les votes se balancent, ce qui, dit-il lui-même (4, 20. 7, 59) est presque un miracle et pour ainsi dire impossible ; il n’hésite pas à parler expressément de sixième classe. Même dans Tite-Live, la dernière centurie vote après la cinquième classe et les trois centuries qui en dépendent ; lui aussi admet donc six appels ; mais il se garde bien pour eux comme pour les centuries, de faire l’addition.

[149] Festus, p. 217. La définition elle-même conduit à l’idée de négligence de voter ; mais le but indiqué concorde mieux avec la conception générale, et cette dernière seule rend dans quelque mesure compréhensible cette combinaison bizarre.

[150] Plutarque, Numa, 17, nomme les τέκτονες et les χαλκεΐς, Pline, H. n. 34, 1, 1, nomme les fabri ærarii comme troisième collège de Numa.

[151] Asconius, in Cornel, p. 75. Son existence n’est pas, à ma connaissance, attestée par les inscriptions. Le collegium fabrum tignariorum Romanensium de Capena (Orelli, 4086 = C. I. L. XI, 3936) se compose, d’après ce que dit Festus, p. 61, s. v. Corinthiensis, sur la signification de cette forme d’adjectif, vraisemblablement de charpentiers travaillant à la manière de la capitale et non pas de charpentiers de la capitale. Il faut aussi entendre dans ce sens le pistor Romaniensis ex reg. XIIII (C. I. L. XIV, 2213), quoiqu’il soit urbain et qu’il y ait des boulangers viennois partout excepté a Vienne.

[152] La corporation ne porte l’ancienne dénomination liticines que dans Cicéron (De re p. 2, 20 ,40) et sur la remarquable inscription de la capitale (manquant dans le C. I. L.) Orelli 4106 (gravée dans Bartoli, Pictura ant. crypt. Romanarum, Rome, 1738, p. 195 ; aussi dans Spon, Misc. 69) M. Julius Victor ex collegio liticinum cornicinum, avec la représentation des deux instruments. J’ai fait chercher le relief indiscutablement authentique au palais Corsini ; mais il est perdu. Peut-être faut-il aussi restituer la mention du collegium liticinum dans Asconius (In Cornel., p. 75) ; collegium lictorum, comme on écrit d’ordinaire, est en contradiction avec les usages de la langue (cf. tome II, la partie des Licteurs) et collegium pistorum, proposé par Hirschfeld, Gall. Studien, Mener Sitzungsberichte, 107, 1, p. 256, est impossible, parce que les droits de corporation n’ont été accordés que plus tard aux urbici pittores.

[153] Il sera montré, dans la partie de la Marche des comices, que lituus et tuba sont identiques.

[154] Denys (4, 17). Les gloses de Philoxène traduisant liticen par ίεροσαλιγκτής, tubicen par σαλπιγκτής.

[155] En dehors de l’ordre des mots dans Cicéron et sur l’inscription de la note 152, cela résulte du rang hiérarchique postérieur des deux catégories dans la légion (Eph. ep. 4, 530 ; Domaszewski, die Fahnen im rœm. Heer, p. 8).

[156] Denys, loc. cit. Polybe emploie souvent βυκάνη pour cornu. Les gloses de Philoxène traduisent cornicen par καμπυλοσαλπεγκτής et classicarii par σαλπισταί.

[157] Varron, 5, 91. La restitution des mots corrompue n’est pas certaine ; mais il est certain que l’éditeur a commis une correction fausse en introduisant ici le lituus. Végèce, 2, 22.

[158] Cf. tome I, la partie du droit d’agir avec le peuple, sur les contiones, et ci-dessous la partie de la marche des comices.

[159] Varron, De l. L. 6, 91.

[160] Festus, Ép. p. 20. Les æneatores employés au camp ont aussi la tuba, Cauer, Eph. epigr. 4, 374, l’a conclu avec raison de Suétone, Cæsar, 32 ; ceux de la ville doivent être conçus comme des cornicines.

[161] Un enfant de quatre ans est appelé trib. Offentinæ contegio æniatorum frumento publico (C. I. L. VI, 10221) ; un autre dit dans son inscription funéraire : Reliqui tri[bu]m ingenuam, frumentum [publ]icum et æneatorum [collegium ?]. Il y a aussi des collegia æneatorum municipaux (C. I. L. V, 5173. 5415). — Les libicines religieux recevaient aussi des émoluments semblables (C. I. L. VI, 2584 : un vétéran frumento publico collegio libicinum).

[162] M’. Poblicius Nicanor ung(uentarius) de sacra via s’intitule maximus accensus velatius (C. I. L. VI, 4974). T. Velatius accensorum velatorum l. Ganymedes, Orelli, 2461 ; d’autres T. Velatii, évidemment également affranchis du collège, C. I. L. VI, 4970.

[163] Les accensi velati sont nommés en relation avec la constitution des centuries par Cicéron, la centurie des accensi par Tite-Live où on ne peut l’écarter par voie de correction. Denys la passe sous silence. Ulpien, Vat. fr. 338. Elle parait figurer, C. I. L. VI, 1973, comme decuria accens(orum) velato(rum). Il faut sans doute aussi lui rapporter l’inscription de Rome C. I. L. VI, 9219.

[164] Inscription de Ficulea, C. I. L. XIV, 4010. Cela ne peut être rapporté é, l’immunité publique de la tutelle accordée aux accensi verati, mais, ainsi que je l’ai déjà remarqué dans une étude da reste défectueuse pour le surplus, Ann. 1849, p. 212, tout comme l’immunité que l’on rencontre dans les groupes de centuries (C. I. L. VI, 498 et ailleurs) à l’immunité corporative de la taxe d’entrée et des cotisations. Mais la construction de chemin que lait Cérinthe par reconnaissance pour son admission, et son admission sans charges, dans le collège (cf. tome, IV sur les charges correspondantes des questeurs, la fin des préliminaires de la partie de la questure), ne peut pas facilement avoir été à la charge du collège, et le chemin rentre certainement parmi ceux qui doivent être construits aux frais de l’état ; sa reconnaissance s’adressa donc nécessairement à l’empereur qui ta fait arriver à cette situation avantageuse. L’inscription a été traitée d’une manière défectueuse par son dernier éditeur.

[165] C. I. L. VI,  1969-1932, 4974. XIV, 2193. 2812. Ce sont des négociants en soieries et en parfums, évidemment toujours des gens de grosse fortune.

[166] Chevaliers romains — C. I. L. VI, 1607. X, 3865. XI, 1230 = Mur. 1067, 4. XI, 1848 = Orelli, 2182.

[167] Ulpien, Vat. fr., 138.

[168] Les accensi velati sont en même temps souvent pourvus d’une place élevée d’appariteurs : C. I. L. III, 6079.4I, 1859. X, 6094.

[169] Sur Tite-Live, 10, 13, 11, comparez la partie de la Marche des Comices.

[170] Tite-Live, 4, 43, 8. D’autres assertions du même auteur ne concordent pas complètement avec ce témoignage certain. 30, 22, 1, sur l’an 458 ne peut se concilier avec lui qu’en entendant par les primo vocatæ centuriæ celles de la première classe, qui cependant ne sont, à cette époque, proprement appelées qu au second rang. On peut expliquer par une omission de la renuntiatio des voix de la première classe que la majorité ne soit pas proclamée après leur vote et que l’élection soit ajournée. A la vérité, c’est en discordance avec le fait que, dans Tite-Live 10, 15, 7, les primo vocatæ omnes centuriæ sont toutes proclamées et que pourtant le scrutin n’est pas terminé. Dans 5, 48, 1, il faut peut-être restituer prærogativæ, ou Tite-Live a écrit creat ; mais, puisque immédiatement après il parle du vote des jure vocatæ tribus, il pense aux comices par tribus, quoiqu’ils ne puissent procéder a un tel vote et qu’il n’y ait pas chez eux de droit de voter en premier lieu. Par suite d’une négligence pareille, il a pu faire une tribus prærogativa des centuriæ prærogativæ nommées dans sa source. Dans le texte de Festus, p. 249, le principal a disparu, dans la lacune qui semble importante. Il discute le point de savoir si le droit de voter en premier lieu et la renuntiatio qui suit ont pour objet de faire connaître les noms des candidats ou de faciliter l’examen de leur honorabilité. Il n’y avait peut-être rien sur la nature des centuries qui votaient les premières ; pourtant le pluriel confirme la relation de Tite-Live. — Si Denys, en contradiction avec Tite-Live et Festus, fait les chevaliers voter avec la première classe (4, 18. 1, 59. 10, 17), ce n’est pas par erreur ; il le fait, parce qu’il lui aurait fallu avoir sept classes s’il avait fait les chevaliers voter avant la première. — Quand, du temps de la constitution réformée, qui ne connaît qu’une prærogativa, on rencontre le pluriel comme dans Cicéron, Verr. act. 1, 9, 26, c’est que l’on réunit plusieurs votes différents.

[171] A la vérité, cela ne s’appuie que sur l’indication de Tite-Live, 10, 22, 1, et on ne peut avoir en cette indication une véritable confiance.

[172] C’est en cette année que l’on trouve, pour la première fois, dans Tite-Live, 24, 7, 12, la centuria prærogativa de l’organisation électorale moderne.

[173] C’est ce que prouve rigoureusement la relation du procès, de C. Claudius de 583 ; car ce n’est que pour cette raison que l’on peut mettre à côté des duodecim centuriæ equitum les multæ aliæ primæ classis. On ne trouve d’ailleurs nulle part une trace d’un vote séparé des douze centuries.

[174] Le premier argument dans ce sens, et c’est peut-être le plus décisif de tous, est la version rapportée plus haut, selon laquelle les douze centuries innommées sont les anciennes et les six aux vieux noms patriciens ont été ajoutées ensuite, tout comme également celle de Tite-Live dans laquelle les 18 sont organisées par Servius, mais les douze sont nommées d’abord et les six ensuite. Cela est évidemment si contraire à la nature de l’institution que cela ne peut avoir été imaginé qu’en vertu d’une infériorité juridique des secondes à l’époque moderne. — En second lieu, Cicéron, De re p. 2, 22, 39, dans son exposition sommaire de la constitution de la majorité dans les comices, a probablement employé pour les chevaliers la tournure spéciale : Equitum centuriæ cum sex suffragiis, parce que les deux formaient bien un même tout, mais ne votaient pas ensemble, et que les secondes votaient après les premières. — Si en outre, dans le procès de 583, huit centuries équestres sur les douze et beaucoup d’autres de la première classe prononcent la condamnation, cette façon de s’exprimer indique, dans son sens naturel (écarté à tort par moi, Rœm. Forsch. 1, 136), qu’il n’y avait à voter avec la première classe que ces douze centuries ; si toutes les centuries de chevaliers l’avaient fait, les sex suffragia, qui en principe y sont comprises, n’auraient pas pu être laissées en dehors du calcul, et, quand bien même elles auraient voté toutes les six pour l’acquittement, il aurait fallu en nommer dix-huit. — Enfin les mots ita ut adsolet suffragia, placés entre la renuntiatio du veto de la première classe et l’appel au scrutin de la seconde, dans la relation concise et précisant nettement toutes les périodes du vote propres a intercession, des élections consulaires de 710, ne peuvent guère vouloir indiquer autre chose qu’une telle période, et ils ne semblent pouvoir être expliqués d’une manière satisfaisante que de la façon indiquée. La question de savoir s’il faut intercaler sex avant suffragia ou si suffragia se disait pour sex suffragia dans la langue électorale, doit être laissée incertaine.

[175] Cicéron (De re p., 2, 22, 39) attribua expressément les charpentiers à la première, et par son silence les forgerons à la seconde. Tite-Live, 1, 43, 3 ; Denys, 4, 17. 7, 59.

[176] Tite-Live, 1, 43, 7. Denys, 4, 14. 7, 59.

[177] Tite-Live, loc. cit.

[178] La désignation des centuries équestres comme prærogativæ appartient bien à cette organisation, mais elle est parallèle à l’expression infra classem ; la prédominance de la classis s’exprime dans toutes deux. Les centuries équestres de l’ancien système sont jure vocatæ tout comme celles d’infanterie.

[179] Il se comprend de soi que les centuries appartenant en droit à la première série d’appel concouraient seules au tirage au sort pour la première place. Les trois centuriæ prærogativæ qui nous sont connues par leur nom appartiennent toutes aux centuries de la première classe et du premier ban des tribus rustiques. Nous ne savons si celles du second ban manquent par hasard on si elles ne prenaient pas part au tirage au sort. Les huit centuries des tribus urbaines, les centuries de chevaliers et collé de charpentiers étaient certainement exclues. Les urbanarum tribuum prærogativæ d’Ausone sont absurdes et sont moitié le produit de réminiscences littéraires, moitié un emprunt aux tribus des frumentationes de la capitale qui existaient encore alors, les prœrogativæ tribus, quæ primæ suffragium ferunt ante jure vocatas, relatives aux élections consulaires chez un scoliaste récent des Verrines, Act. 1, 9, 26, p. 439, et le genus populi prærogativum ou la prærogativa classis par opposition au genus jure vocatum, chez un autre, sont également absurdes.

[180] La sortitio prærogativæ comme phase spéciale du vote des centuries est mentionnée de la manière la plus précise dans Cicéron, Phil., 2, 33, 82 ; en outre, dans le même, Ad Q. fr. 2, 14, 4 ; dans Tite-Live, 24, 79 12. 27, 6, 3. Pour l’influence de cette centurie sur le résultat du scrutin, cf. la partie de la Marche des Comices.

[181] Les jure vocatæ centuriæ, dans Tite-Live, 27, 8, 3, par opposition à la prærogativa, sont les autres centuries votant dans l’ordre ordinaire ; cette expression, qu’emploient par réminiscence Ausone et les scoliastes des Verrines, peut s’appliquer à toutes les centuries a l’exception de celle désignée par le sort ; mais elle est naturellement employée de préférence pour celles qui out avec elle participé au tirage.

[182] Varron, 6, 88, des commentarii consulares. Tite-Live, 39, 15, 11, Aulu-Gelle, 15, 21, 4, et beaucoup d’autres textes. — Exercitum imperare se trouve dit ici pour les comités, mais est également employé de l’ordre de marche donné à l’armée de guerre (Festus, Ép. 103, v. justi dies ; Macrobe, Sat. 1, 16, 15 ; Servius, Ad Æn. 8, 4). L’armée de campagne a sans doute été à l’origine désignée par le nom de legio avant que ce mot ne prît le sens de corps à armée ; l’exercitus c’est l’armée des citoyens réunie pour faire l’exercice sur le champ de manœuvres et de laquelle à l’époque la plus ancienne les seniores ne devaient pas être absents.

[183] Ce chiffre est donné par Cicéron et Denys.

[184] Il faut compter dans ces centuries les Latins qui émigrent a Rome et les nouveaux citoyens en général, jusqu’à ce qu’ils ne soient inscrits dans les tribus.

[185] Le droit publie romain ne connaît pas de forme d’exclusion individuelle du droit de suffrage dans les 193 centuries avec conservation du droit de cité. L’exclusion du droit de vote militaire avec maintien de l’obligation au service militaire se présente à vrai dire à titra général chez les demi citoyens, l’exclusion des affranchis doit être conçue au contraire comme une inscription dans la dernière centurie.

[186] Varron, De l. L. 6, 93. Dans un sens différent, Tite-Live, 22, 11, 8.

[187] Varron, 6, 93. Cf. tome IV, la partie de la censure, sur les formalités de la lustration.

[188] Cf. tome III, la partie du Consulat sur le mode d’élection des consuls. Au reste, à côté de cette version, il y a celle de l’élection du roi Servius par les centuries. V. tome I, la première section de la théorie du droit de nomination du magistrat.

[189] Pour la bataille de l’Allia, en 364 : Diodore, 14, 314 ; également Tite-Live, 5, 38, les legiones et les subsidarii, et Denys, 13, 12. — Sous la date de 425 : Tite-Live, 8, 20, 4. — Probablement en 473 : Cassius, Hemina, fr. 21, éd. Peter, confirmé par Augustin, De civ. Dei, 3, 17 = Orose, 4, 1, 3 ; aussi sans doute Ennius. — En 537 Tite-Live, 22, 13, 8. Cf. la partie des Affranchis. Les plus anciens de ces témoignages sont peu dignes de foi. Cependant les cas particuliers importent peu pour la conception juridique.

[190] Polybe, 6, 49, 2. Caton, dans Festus, p. 234.

[191] Festus, Ép. p. 8.

[192] Il est traité du sens des deux expressions dans la partie de l’obligation à l’impôt.

[193] Ennius, dans Aulu-Gelle, 16, 10, 1 ; Aulu-Gelle, 16, 10, 10 et ss.

[194] Les deux points sont exclusivement attestées par Aulu-Gelle, loc. cit., et ne sont pas autrement appuyés.

[195] Salluste, Jug. 86. De même, Val. Max. 2, 3, 1. Florus, 1, 36 [3, 1], 13. Aulu-Gelle, 16, 14, 14.  Plutarque, Mar. 9.

[196] Salluste, Jug. 46, 7 rapproché de 105, 2. Handb. 6, 434.

[197] Cf. tome II, la partie de la capacité d’être magistrat, sur l’accomplissement du service militaire.

[198] C’est encore toujours un privilège μή εΐς στρατείαν καταλέγεσθαι άκοντας (Modestie, Digeste, 27, 1, 6, 8).

[199] Cela se rattache aux concessions du droit de cité faites par le général étudiées dans le chapitre de l’État patricio-plébéien, 7, e, et aux concessions en masse de cette espèce faites dans les dernières crises de la République (Hermes, 19, 11 et ss.).