LE DROIT PUBLIC ROMAIN

LIVRE PREMIER. — LA MAGISTRATURE.

INSIGNES ET HONNEURS DES MAGISTRATS EN FONCTIONS.

 

 

COSTUME DES MAGISTRATS.

Relativement au costume, il faut tout d’abord poser en principe qu’on ne s’en occupe en droit qu’autant qu’il est porté de jour[1] et qu’il s’agit principalement des vêtements de dessus[2]. Les détails que nous avons à donner sont dominés par la distinction faite plus haut, entre la magistrature exercée domi et celle exercée militiæ ; car cette distinction s’exprime extérieurement dans la différence du costume du magistrat. Toute sa profondeur se révèle à ce fait que le magistrat, lorsque il sort de l’un des territoires et entre dans l’autre, quand il franchit la limite de la ville, change de costume officiel. Nous traiterons par conséquent d’abord du costume de paix du magistrat, puis de son costume de guerre.

1. COSTUME DE PAIX.

Dans l’autorité exercée domi, le magistrat apparaît avec le vêtement ordinaire des citoyens, la toga, emblème d’ordre, de paix et de vie civile[3] ; et cet usagé s’est maintenu longtemps après que la toge avait cessé d’être le vêtement ordinaire des citoyens, strictement parlant, aussi longtemps qu’il y a eu un État romain[4]. Il fallait de plus que la toge parut en réalité comme vêtement de dessus : les magistrats patriciens tout au moins ne pouvaient la recouvrir, ni par conséquent en particulier porter un manteau par dessus[5]. Les empereurs, lorsqu’ils paraissaient en public à Rome ou dans les autres villes de l’Italie, ont également conservé en principe l’usage de la toge[6]. C’est seulement lorsque Rome cessa d’être capitale et que les empereurs ne résidèrent plus ordinairement en Italie que ce costume semble être, par voie de conséquence, tombé en désuétude.

La coupe du vêtement du magistrat ne diffère pas de cette couleur pourpre du vêtement ordinaire du citoyen ; ce qui le distingue c’est la couleur. La couleur pourpre a été, dans toutes les périodes et chez tous les peuples de l’antiquité, regardée comme l’insigne propre du pouvoir et elle est par suite interdite aux simples citoyens[7]. Il en est de même à Rome, et cela aussi bien sous la République que sous l’Empire ; la pourpre impériale elle-même n’a été, à aucune époque, d’une autre couleur que celle des magistrats[8].

La pourpre entre, en deux proportions inégales, dans le costume des magistrats : ou bien sous la forme d’un vêtement de pourpre (toga purpurea) plus tard habituellement brodé d’or (toga picta)[9], auquel se joint un vêtement de dessous de la même espèce (tunica palmata)[10] ; ou bien sous la forme d’une bordure de pourpre[11] mise au vêtement blanc de dessus (prætexta), à laquelle se joint également un vêtement de dessous orné d’une bande de pourpre (clavus)[12]. C’est la distinction fondamentale dont il nouas faudra partir pour la suite de nos explications.

Dans la vie civile de la Rome républicaine, la toge de pourpre unie n’est pas l’habillement ordinaire des magistrats. La meilleure tradition n’attribue même pas aux rois de Rome, du moins depuis qu’ils eurent cessé de porter toujours et partout le costume de guerre, la toge de pourpre, mais seulement la prétexte[13]. Tout ce que cela signifie, il est vrai, c’est que les plus anciens rédacteurs des annales jugèrent à propos de construire le costume royal à l’imitation du costume consulaire[14]. Historiquement on peut légitimement conjecturer que les rois ont eu pour costume officiel ordinaire la toge de pourpre et que le régime postérieur, qui n’accorde aux magistrats en cette qualité que la toge blanche bordée de pourpre, est une atténuation qui coïncide avec l’établissement du consulat. — La prétexte est le costume avéré des magistrats de la République ; les censeurs eux-mêmes ne portent qu’elle pendant la durée de leurs fonctions[15].

Cependant la toge toute de pourpre n’est pas absolument bannie de la vie publique de l’époque républicaine ; c’est le costume de fête des magistrats dans certaines circonstances, en particulier pour le triomphe. Ainsi que l’on sait, le magistrat le plus élevé de l’État auquel il est donné de célébrer la fête de la victoire, n’y porte pas son costume de guerre et ses armes, mais, de même que les autres insignes de Jupiter Capitolin ; la toge et la tunique de pourpre, qui furent plus tard brodées d’or, la toga picta et la tunica palmata qui viennent d’être citées, ou, comme on dit plus tard habituellement, la vestis triumphalis[16]. Ces divers vêtements n’étaient pas confectionnés à nouveau pour chaque triomphateur ; ils appartenaient au trésor du temple de Jupiter Capitolin et ils en étaient retirés chaque fois qu’il y avait à s’en servir[17].

Le triomphe étant devenu, dès le début de l’Empire, un privilège exclusif des empereurs en fonction, l’usage du costume triomphal se trouva par là même restreint à eux seuls. Les ornements triomphaux continuèrent bien à être accordés jusqu’à Hadrien ; mais leur concession n’impliquait pas nécessairement l’entrée solennelle dans la capitale ; et, lorsque cette dernière se trouvait avoir lieu, parce que, dans les triomphes impériaux, les officiers décorés des ornements triomphaux à la même occasion prenaient part au cortège, on ne leur donnait habituellement que la prætexta ; on ne leur donnait jamais tout le costume triomphal[18].

L’appareil en usage pour le triomphe fut plus tard transporté à d’autres solennités publiques. Ce fut avant tout le cas pour les jeux apollinaires introduits en 542. Le préteur urbain qui y conduit au cirque en cortège solennel (nompa) les chars des Dieux (tensæ), de même qu’il paraît en char, — il est vrai, ici seulement à deux chevaux, — porte le costume triomphal tout entier[19]. Les ludi se rattachant en principe à la fête de la victoire et au triomphe et en ayant été peut-être, primitivement une partie intégrante, cette coutume peut aussi s’être généralisée[20]. Cependant l’existence du même cortège triomphal ne peut être établie avec certitude pour les magistrats présidents, c’est-à-dire pour les consuls, dans les jeux de beaucoup les plus anciens, dans les jeux romains[21]. Les édiles curules ne peuvent, au moins dans les jeux romains où ils ne sont rien de plus que les organisateurs de la fête, guère avoir eu droit à autre chose qu’à la prétexte, et il n’y a du reste aucun indice du contraire. Ils pourraient plutôt avoir paru en costume de pourpre aux jeux de la Mère des dieux dont ils avaient la présidence. Ce costume est attribué aux édiles plébéiens comme présidents des jeux plébéiens par un témoignage qui est assurément confus, mais qu’il n’est cependant pas possible d’écarter complètement[22].

Par conséquent tous les magistrats n’ont peut-être pas porté la robe de pourpre dans les jeux qu’ils donnaient â l’époque républicaine ; c’est au contraire suffisamment établi pour l’époque d’auguste et des empereurs postérieurs, soit d’une manière générale[23], soit aussi par des exemples particuliers, qui montrent en même le temps qu’on était plus avare du droit de paraître en char dans le cirque que du costume triomphal[24]. En particulier, ce costume était accordé aux présidents des jeux, consulaires, non plus seulement quant à la forme, comme les jeux romains, mais quant aux fonds, donnés aux frais des consuls, qui se rencontrent désormais[25].

Il y a aussi des sacrifices isolés pour lesquels le magistrat qui les offrait paraît avoir porté un costume particulièrement relevé, qui n’est autre que le costume triomphal[26].

Beaucoup plus tard, à une époque incertaine, mais assurément postérieure à la fin de la République le cortège du nouveau consul qui se rendait de sa demeure au Capitole pour y prendre possession de ses fonctions, fut organisé sur le modèle de la pompe triomphale. Le vestige le plus ancien que l’on ait jusqu à présent rencontré de cette innovation se place à l’époque de Domitien, sous lequel existait au moins déjà l’usage d’orner de lauriers les faisceaux du consul[27]. La pompe triomphale complète, avec la robe de pourpre et le char, est établie être en usage pour les nouveaux consuls dès le milieu du IIe siècle[28] ; depuis, ce costume, désormais considéré comme le véritable costume consulaire, s’est conservé sans modification essentielle jusqu’à la disparition du consulat lui-même[29]. La façon dont on est arrivé à rendre ainsi au nouveau consul les honneurs triomphaux est incertaine ; l’explication la plus simple paraît être de rattacher cette innovation aux jeux consulaires. Sous la République, les consuls n’étaient pas à proprement parler présidents de jeux ; s’ils pouvaient peut-être revêtir pour les jeux romains les insignes triomphaux, ils n’ont, selon toute apparence pas dû faire alors un sérieux usage de ce droit ; quand, à partir du début de l’Empire, ils devinrent des présidents de jeux réguliers, il fut naturel de leur donner, dès leur entrée en fonction, l’appareil dans lequel ils paraissaient à ce titre. Au reste, le costume triomphal ne semble pas, même à l’époque la plus récente, être, en dehors des jours de jeux et de leur entrée en charge, devenu le costume ordinaire des consuls[30]. Il sera établi plus bas que ce fut la prétexte qui garda ce caractère, au moins jusqu’à Dioclétien.

Comme les magistrats de la République, les empereurs ne portèrent le costume triomphal qu’à l’occasion de certaines solennités spéciales. Le droit de paraître ainsi vêtu en tout temps et en tout lieu fut, il est vrai, accordé au dictateur César peu de temps avant sa mort[31] ; mais cela ne se renouvela ni sous Auguste, ni sous ses successeurs. On fit seulement application à Auguste[32] et aux empereurs suivants[33], comme aussi aux corégents investis de la puissance proconsulaire[34], d’une distinction qui avait déjà été attribuée sous la République à quelques viri triumphales marquants et sur laquelle nous aurons à revenir, du droit de reprendre le costume triomphal poule les fêtes et les spectacles ; encore les empereurs paraissent-ils en avoir fait un usage fréquent, mais non suivi[35]. Il est rapporté de Domitien, comme un fait spécial, semble-t-il, qu’il se fit accorder le costume triomphal pour les cas ou il paraissait au Sénat[36]. Le costume triomphal est donc en somme resté même pour les empereurs le costume traditionnel de grande cérémonie[37].

Si, par suite, la toge de pourpre doit être signalée comme le costume de cérémonie des magistrats de l’État Romain, la toge blanche bordée de pourpre, la toga prætexta est, au contraire, leur costume officiel ordinaire. Nous pouvons, après ce qui a déjà été dit sur le siège curule, être brefs sur ce sujet. Tous les magistrats qui ont droit au siège curule, ont droit à la prétexte. Il en est ainsi, non seulement des magistrats romains, mais aussi de ceux des municipes[38] ; en revanche, cette distinction est toujours restée refusée aux magistratus plebis, soit aux tribuns du peuple[39], soit aux édiles du peuple[40]. Ce principe est appliqué en particulier aux rois, puis aux consuls et aux préteurs, et en général tous les magistrats qui ont l’imperium consulaire[41], ensuite au dictateur[42], au maître de la cavalerie[43] ; enfin aux censeurs et aux édiles curules[44]. En revanche, les questeurs[45] et les autres magistrats inférieurs n’ont pas la prétexte. Il n’est dit nulle part que les divers magistrats se soient distingués par des différences dans la largeur on dans la coupe de la prétexte[46], et cela n’était certainement pas. — Les magistrats quittent la prétexte en signe de deuil[47] et ils semblent y parvenir, à l’époque ancienne, tout simplement en tournant leur toge à l’envers[48]. Mais ils conservent, au moins en général[49], la bande de pourpre à la tunique et le costume blanc, ce qui revient à dire qu’ils portaient alors le costume des simples sénateurs. Cependant il est sans doute aussi arrivé dans dés cas spéciaux que la toge blanche fût abandonnée pour une toge de couleur sombre[50].

Sous l’Empire, le costume des magistrats est conservé dans ses traits essentiels. Même, depuis que les consuls montaient en costume triomphal au Capitole pour leur entrée en fonctions, ils portaient néanmoins, dans le reste de leurs fonctions, la prétexte et non pas la robe triomphale[51]. La robe prétexte doit également, avoir été attribuée au prince[52], en même temps que les faisceaux et le siège curule. Elle paraît figurer dans la garde-robe impériale sous le nom de vestis forensis et être le costume ordinaire dans lequel le prince se montrait en public à Rome. On signale seulement comme une particularité du costume impérial que le prince, peut-être, en sa qualité de grand pontife[53], ne portait jamais les vêtements de deuil[54]. — Il y a eu cependant des empereurs isolés qui n’ont porté la robe prétexte que lorsqu’ils occupaient le consulat[55] ou qu’ils remplissaient un sacerdoce, et qui sans cela s’habillaient du costume civil ordinaire, de la toge blanche[56].

Leur caractère sacerdotal fait accorder la prétexte non seulement au flamen Dialis, qui a aussi un licteur, mais aux pontifes[57], aux augures[58], aux épulons et aux quindecimviri[59], c’est-à-dire en somme aux membres des quatre grands collèges sacerdotaux[60]. Cependant les prêtres ne portent pas, comme les magistrats, la prétexte partout où ils paraissent en public ; par exemple, ils ne la portent pas au sénat. Ils ne la portent en dehors des fêtes publiques que pour remplir leurs fonctions sacerdotales et seulement au moment où ils les remplissent. La règle est spécialement attestée par l’exception faite en faveur du flamine de Jupiter qui, étant cottidis feriatus, paraît toujours dans son costume sacerdotal[61]. De même les arvales, dont les procès-verbaux fournissent à ce sujet un témoignage précis, ne portent la prétexte que les deux jours principaux de leur fête annuelle, et encore là prennent-ils seulement pour la cérémonie religieuse même et la retirent-ils à sa fin, avant leur banquet[62]. — nous étudierons, au sujet des ornementa des magistrats, la mesure dans laquelle le droit de paraître dans les cérémonies avec la prétexte, se rencontre comme distinction individuelle.

Restent les présidents de jeux. Il a déjà été remarqué que le préteur urbain pour les jeux apollinaires et, tout au moins à l’époque d’Auguste, les magistrats en général pour leurs jeux étaient tout vécus de pourpre. Au contraire les magistri collegiorum des derniers temps de la République et les vicomagistri de l’Empire, portaient, quand ils présidaient leurs jeux, la robe prétexte[63]. Les questeurs, à partir du moment où ils furent, sous l’Empire, astreints à donner des jeux, durent aussi y porter tout au moins la prétexte ; cependant on ne sait rien de plus à leur sujet. L’arvale qui présidait les jeux arvales y portait le ricinium, un vêtement également garni d’une bordure de pourpre[64]. Le particulier qui était dominus ludorum portait aussi la prætexta, et même, si les jeux étaient des jeux funéraires, une toge de couleur sombre bordée de pourpre (prætexta pulla), qui ne se rencontre que là.

Les institutions romaines ne connaissent ni de vêtements de dessous qui soient des insignes de magistrats, ni de chaussures spéciales aux magistrats. On peut trouver là des insignes du rang sénatorial (VII) et du rang équestre ; on ne peut y trouver d’insignes propres de la magistrature. On remarque seulement, pour les souliers de César, qu’ils surprenaient par leur hauteur, et peut-être aussi par leur forme spéciale, copiée sur les ancêtres des Julii, les anciens rois d’Albe[65].

Les torches rentrent parmi les honneurs des magistrats en ce qu’ils jouissent du privilège, s’ils paraissent la nuit, de faire porter des lumières devant eux[66]. Il existait sans doute là des modalités spéciales qui distinguaient cet honneur de l’usage ordinaire fait des torches[67]. II est possible que l’apparition solennelle du magistrat fut moins rattachée au flambeau porté devant lui qu’au réchaud à l’aide duquel ce flambeau pouvait être allumé instantanément[68]. Il se peut aussi qu’il fut d’usage, au retour des repas faits au dehors, pour lequel l’emploi de la torche ruait surtout fréquent, de reconduire les magistrats au son de la flûte[69] ; c’est peut-être à cela que servait principalement le joueur de flûte que nous avons rencontré parmi les appariteurs du magistrat. Le droit aux torches va avec celui à la prétexte. Les torches et le joueur de flatte appartiennent aux édiles aussi bien qu’aux magistrats supérieurs. Sous les Antonins, nous trouvons le même droit comme privilège de l’empereur[70] et de l’impératrice[71]. Il ne parait plus avoir étés, à cette époque, en vigueur pour les autres magistrats.

Le sceptre est un insigne royal, et, par suite, il est banni de la constitution romaine de l’époque historique[72]. Il faut laisser incertain le point de savoir si le citoyen romain portait autrefois une baguette dans l’intérieur de la ville aussi régulièrement qu’une lance au camp[73]. A l’époque historiquement connue, le port d’un bâton n’est pas d’usage, et peut-être même n’est pas permis dans l’intérieur de la ville. Le bâton même du magistrat n’est plus libre dans sa main[74] ; il est dans celle du licteur, régulièrement lié en faisceau avec les verges. Ce n’est que comme insigne des vieux, en particulier de Jupiter très bon et très grand, que les Romains connaissent le bâton de commandement. En tant que le magistrat qui triomphe prend le costume de Jupiter, il prend aussi son bâton. C’est un bâton d’ivoire orné d’un aigle au sommet[75] et désigné, d’un mot qui est tiré du grec, mais dont la déformation suffit à établir la haute ancienneté, du nom de scipio[76]. Mais l’usage de ce bâton est absolument restreint au jour du triomphe. A la différence de ce qui a lieu pour les autres insignes triomphaux, il n’est jamais permis à l’ex-triomphateur de le reprendre, ni de son vivant, ni même après sa mort[77]. Le sceptre n’a jamais été donné aux empereurs eux-mêmes comme insigne de leur pouvoir. Il n’est pas rare, il est vrai, de trouver sur les médailles ou les statues, un sceptre dans la main de l’empereur[78]. Mais il n’y a pas lieu de le rapporter à une autre idée qu’à celle du triomphe, et il n’est jamais question chez les auteurs de cet insigne comme d’un insigne impérial propre.

En règle, le magistrat en tenue de paix ne porte sur la tète aucune coiffure. A plus forte raison, il n’est pas permis à un citoyen de paraître couvert devant un magistrat. Et par suite aussi le, peuple doit paraître tète nue dans toutes les assemblées publiques ; car, que ces assemblées soient des jeux, des contiones ou des comices, elles se tiennent toujours sous la présidence d’un magistrat. L’unique exception à cette règle est la couronne (corona) qui est l’emblème de la victoire et que le vainqueur dans les jeux[79] et le vainqueur à la guerre[80] reçoivent l’un et l’autre pour cette raison de l’État[81]. Mais c’est là une distinction qui s’adresse aux citoyens[82] et non aux magistrats. La couronne qui, dans la fête par excellence, dans la fête de la victoire, distingue le triomphateur lui-même ; peut seule réclamer une place parmi les insignes du magistrat. Cette couronne se présente sous deux formes. D’une part, le triomphateur, comme tous les guerriers qui figurent dans le triomphe, orne sa tête de laurier vert[83] ou, pour le petit triomphe, de branches de myrte ; mais, d’autre part, et en outre, il a seul droit à une couronne de feuilles de laurier d’or qu’un esclave, debout derrière lui, dans le char, tient au-dessus de sa tête[84].

Ces couronnes de triomphateurs sont, comme les autres insignes triomphaux, devenues, sous l’Empire, en un certain sens, des insignes impériaux. Il n’a pas, à la vérité, été fait grand usage de la couronne d’or qui, au lieu d’are portée sur la tête, était tenue au-dessus d’elle. A l’exemple de Pompée, le dictateur César[85] reçut le droit de paraître en cet appareil aux spectacles, et il est possible que le même droit ait été concédé à Auguste[86] et à ses successeurs, quoique nous n’en ayons pas de preuves certaines. Mais, cependant, les empereurs ne doivent pas avoir bien fréquemment usé de cette distinction incommode. En tout cas, le port de la couronne d’or, comme celui du reste du costume triomphal, demeura restreint aux cas où l’empereur paraissait au cirque ou au théâtre. Au contraire, la couronne de lauriers, que les viri triumphales avaient verrons-nous, dès l’époque de la République, à titre permanent, le droit de porter dans les spectacles et les fêtes, fut concédée, sans restriction de temps ni de lieu, d’abord au dictateur César[87] puis, en 748, à son successeur[88], et elle passa d’eux aux empereurs suivants[89]. Lorsque cette couronne, qui, venons-nous de dire, pouvait, à l’époque républicaine, être portée dans les fêtes publiques, par tous ceux qui en avaient été décorés, leur fut plus tard retirée, que le droit de porter la couronne triomphale se trouva ainsi restreint à l’empereur, elle devint par là, en un certain sens, une véritable couronne de souverain[90]. L’époque où la couronne fut retirée aux particuliers ne peut se déterminer avec certitude[91] ; mais cela se fit certainement longtemps avant que les particuliers eussent cessé de triompher et de recevoir les ornements triomphaux, probablement dès le commencement de l’Empire.

L’emblème de la divinisation, la couronne radiée mise autour de la tête, n’a pas été portée par les empereurs des deux premiers siècles[92], bien qu’elle se rencontre souvent, à partir de Néron, sur les monnaies du sénat[93].

Enfin, le diadème, c’est-à-dire le bandeau blanc placé sur le front[94] qui est le signe propre de la dignité royale dans l’antiquité, fut, comme on sait, repoussé par César[95] ; et les empereurs suivants ne firent aucun pas sérieux dans la voie de son adoption[96]. Ce ne, fut que Constantin le Grand qui, en même temps qu’il transféra sa capitale en Orient, prit aussi cet insigne de la royauté[97].

II. — COSTUME DE GUERRE

Le costume de guerre n’est porté, à Rome, même par le magistrat du premier rang, que pour l’acte de déclaration de guerre, pour l’ouverture des portes du temple de Janus[98], et alors le magistrat porte par dessus son armure l’antique vêtement court des cavaliers, la trabea. En outre, lorsqu’il part en campagne, il prend au Capitole, avec sa suite, le costume’ de guerre après y avoir adressé à Jupiter la promesse des vœux qu’il exécutera s’il revient victorieux, et il quitte la ville immédiatement après. En dehors de ces exceptions, le costume de guerre ne peut apparaître domi. Et ce régime n’a pas seulement été constamment maintenu : nous le trouvons étendu sous le Principat, oit probablement par suite de l’englobement de toute l’Italie dans ce territoire opéré par Sulla, l’empereur lui-même[99] et les soldats qui sont en Italie paraissent ordinairement en public revêtus de la toge. A la vérité, cette prescription, en particulier en ce qui concerne les derniers, n’est, même sur le pied de paix, observée qu’avec des restrictions essentiel-les : les anciennes règles sur la prise du costume de général au moment où est franchi le. Pomerium n’ont pas été modifiées par elle et les dépôts de la garde et de la flotte qui se trouvaient en Italie en étaient naturellement exclus. Mais la règle est que le prince, quand il pénètre dans la ville ou même en Italie, quitte le costume militaire[100] ; les souverains du IIIe siècle furent les premiers à porter fréquemment l’uniforme dans la capitale[101]. Les soldats de la garde eux-mêmes, portaient la toge, en montant la garde au palais, du temps de Néron tout au moins, et peut-être encore plus récemment[102] ; des souverains constitutionnels ont interdit à leurs soldats le port de l’uniforme dans toute l’étendue de l’Italie[103].

Le costume militaire romain, qui ne fut d’abord qu’une toge autrement drapée, est, compte on sait, à l’époque historique, — la trabea n’est maintenue qu’au point de vue rituel, — le sagum ou paludamentum. Au fond, ce n’est pas autre chose que la chlamyde grecque[104], un manteau court attaché à l’épaule gauche qui se portait par dessus l’armure[105]. La langue ancienne ne paraît pas avoir fait de différence entre les mots sagum et paludamentum[106] ; mais, dès une époque assez reculée, la langue usuelle employa la première expression, au moins en règle pour les soldats[107] et la seconde exclusivement pour le général[108]. Le général porte le paludamentum, insigne du commandement en chef, avant tout dans les cérémonies et sur le champ de bataille[109]. Mais il le porte aussi, d’une façon générale, lorsqu’il paraît en public[110]. A l’époque ancienne, où le magistrat supérieur ne quittait la ville que pour se mettre à la tète d’une armée, le costume militaire était sans doute porté par tout magistrat supérieur qui se trouvait hors de Rome. Mais il n’est pas probable qu’à l’époque récente, en particulier depuis l’établissement des provinces fixes, les préteurs qui y étaient envoyés y aient porté le paludamentum, quand leur rôle y restait essentiellement judiciaire. Le costume militaire semble avoir été alors absolument lié à l’exercice réel du commandement en chef. Sous l’Empire, où l’imperium militaire se concentra rapidement dans les mains du monarque, le paludamentum fait incontestablement défaut, aussi bien que le titre d’imperator et les lauriers, à tous les proconsuls sénatoriaux, et il est ainsi devenu l’insigne exclusif de la puissance impériale[111]. Le mot paludamentum est remplacé, à l’époque récente, par l’expression grecque chlamys dont le sens matériel est le même[112].

La couleur rouge prédomine dans le costume de guerre du général. Il en est ainsi tant pour l’ancienne trabée[113] que pour le paludamentum de l’époque historique, qui peut, il est vrai, être de couleur blanche, mais qui, dès le temps de la République, est ordinairement rouge[114]. L’empereur étant sous l’Empire seul en droit de porter le paludamentum, le rouge vêtement militaire s’est trouvé être, dès le principe, le symbole de la monarchie ; si ce n’est qu’à partir du ml siècle que l’usage, s’est introduit de désigner la prise du pouvoir par l’expression : revêtir la pourpre[115]. Cela tient à ce qu’en droit le costume militaire était banni de Rome et de l’Italie.

La tenue de guerre des magistrats comprend en outre naturellement leurs armes. Parmi ces armes, le casque, le bouclier et la cuirasse n’ont jamais été considérés comme des insignes[116]. Mais il en est autrement de l’épée. L’épée est le signe distinctif de l’officier par opposition au magistrat non militaire[117] ; c’est pour cela que les magistrats qui n’étaient exclusivement qu’officiers, comme les tribuns militaires[118] et le maître de la cavalerie[119], la portaient constamment.

Par suite, lapée est aussi, après la chute de la République, peut-être encore plus vite et plus nettement que le vêtement de pourpre, devenue l’insigne de la monarchie nouvelle, non pas de celle de César, mais de celle d’Auguste fondée sur la puissance proconsulaire et sur la concentration de l’imperium militaire dans la personne du souverain. L’acquisition du pouvoir s’exprime par la prise de l’épée[120], et la retraite du pouvoir par son abandon[121]. Le port de l’épée[122], signe du commandement militaire, n’est permis à personne autre qu’aux commandants nommés par l’empereur, en particulier au præfectus prætorio, qui est lui-même considéré comme le porteur et le gardien de l’épée impériale[123], et de plus aux légats impériaux[124] et aux tribuns militaires, et même à certains affranchis chargés, à titre extraordinaire, d’un commandement militaire sans être magistrats[125] ; il ne l’est, au contraire, à l’époque où la monarchie est constituée[126], à aucun magistrat du Sénat, pas même à celui qui l’emporte par le rang sur tous les autres, au proconsul consulaire.

C’est du costume des soldats de l’époque ancienne de l’Empire qu’est venu celui des magistrats de son époque récente, le manteau de soldat et le ceinturon (cingulum) que portèrent alors eux-mêmes les magistrats qui, faute d’attributions militaires, n’avaient pas droit à l’épée[127].

 

 

 



[1] Loi de Bantia (C. I. L. I, p. 45), ligne 4. Metellus Pius qui aimait à manger en costume triomphal (Val. Max. 9, I, 9. Macrobe, Sat. 3, 13, 9 ; Plutarque, Sertor. 22), faisait là un acte risible, mais non un acte défendu par les règlements de police. De même rien n’était plus habituel que de se mettre une couronne chez soi à l’occasion de quelque fête ; mais celui qui paraissait couronné en public, ou qui même seulement se montrait de jour avec une couronne, sur la plate-forme de sa maison (Pline, H. n. 21, 3, 8), tombait sous le coup des mesures de police.

[2] Le vêtement de dessous, la tunica, parait d’une façon générale ne s’être introduit que tard (Handb. 7, 550) ; on ne s’en occupe qu’à titre secondaire, et naturellement seulement à condition que, conformément à lisage, il se voie sous le vêtement de dessus.

[3] La prescription du droit romain qui rend obligatoire pour les citoyens le port du costume national, en particulier de la toge est étudiée au sujet des Devoirs des citoyens (VI, 1).

[4] Le dernier vestige en est la toga conservée encore au vie siècle de l’ère chrétienne comme costume officiel du præfectus urbi. Cassiodore, Var. 6, 4, dans la formula præfecturæ urbanæ : Habitus le togatæ dignitatis ornamus, ut indutus veste Romulea jura debeas affectare Romana. Cf. la théorie du costume des citoyens, VI, 1.

[5] Vita Hadriani, c. 3. Tibère fit exception en prenant le manteau quand le temps était mauvais (Dion, 51, 13).

[6] Vita Hadriani, c. 22, c. 27. Vita Alexandri, c. 40. Vita Gallieni, 16. — C’est pourquoi l’empereur est appelé togatus dans Martial, 6, 76. Naturellement tout ce qu’on doit affirmer, c’est que telle fut la règle théorique jusqu’à Dioclétien et que les princes qui tenaient à cœur de ne pas se présenter à Rome comme agissant en vertu de leur imperium proconsulaire se conduisaient de cette façon.

[7] L’assertion de Becker (Gallus 3, 243 [cf. éd. Goell, 3, 300]), d’après laquelle les qualités inférieures de pourpre auraient pu être portées par tout le monde est erronée ; le droit ne fait pas de distinction entre ces qualités et les autres. Dans Cicéron, Pro Sest. 8, 49, purpura plebeia ac pane fusca est dit par opposition à la pourpre de Tyr introduite à cette époque (Pline, H. n. 9, 39, 137) et préférée par la mode. De même Caton surprenait par sa πορφύρα μέλαινα (Plutarque, Cat. min. 6). En revanche on reprochait à l’élégant M. Cælius son purpura genus (Cicéron, Pro Cæl. 34, 71), ce qui doit faire allusion à une prétexte sacerdotale ; car, à cette époque, Cælius n’avait pas encore revêtu de magistratures curules.

[8] Pour le commencement de l’Empire, cela résulte de ce que la même toga picta, conservée au temple du Capitole, servait pour le processus consularis de l’empereur et des particuliers (Vita Alex. 40). Il n’y a même ailleurs aucun indice que les empereurs, bien qu’usant naturellement des meilleures qualités de pourpre, s’en soient jamais réservé l’usage exclusif ; de ce que Néron les interdisait aux femmes, il ne résulte aucunement qu’il n’ait pas permis aux magistrats de les porter. Si à l’époque postérieure à Dioclétien, il existait pour certaines qualités de pourpre un monopole impérial et si ces qualités ne pouvaient être préparées dans des fabriques privées, c’est là une chose toute différente. V. les détails Handb. 7, 513 et ss.

[9] Festus, p. 209. La toga purpurea se trouve aussi dans Tite-Live, 27, 4, 8. 31, 11, 42 ; la picta était déjà en usage à l’époque de Polybe (6, 53). Denys, 3, 61. 62 cf. 4, 74 ; Appien, Pun. 66. La toga palmata se rencontre aussi chez les auteurs postérieurs, par exemple, dans Martial, 7, 2, dans Apulée, Apolog. 22, dans Tertullien, De cor. 14, Servius, Ad Æn. 11, 334, Isidore, 19, 24, 5. V. les détails Handb. 7, 54 et ss. L’ancienne toga purpurea simple est d’ailleurs, même après l’introduction de la toga picta, restée en usage pour un seul cas : c’est comme costume funéraire du censorius.

[10] Tunica palmata, Festus, loc. cit. Denys, loc. cit. V. les détails Handb., loc. cit.

[11] La largeur inaccoutumée de la bande de pourpre et l’allongement des vêtements qui en résultait paraissaient choquants. Ainsi Cicéron (Pro Cluent. 40, 111) blâme L. Quinctius de son usque ad talos demissa purpura.

[12] La prætexta et le clavus sont à l’origine deux choses indépendantes. La prætexta est l’insigne de la magistrature, le clavus celui de l’ordre équestre. C’est seulement lorsque le clavus devient l’insigne des sénateurs que le clavus et la prætexta coïncident, celui qui porte cette dernière appartenant toujours au sénat. A partir de là, les deux sont dans la même relation que la toga picta et la tunica palmata, et sont toujours portées en même temps (Horace, Sat. 1, 5, 36).

[13] Tite-Live, 1, 8 notamment ; cf. Schwegler, 1, 278, et O. Müller, Etrusker 1, 261. 371. Le roi Porsenna des Romains lui-même ne porte que la prætexta (Festus, p. 322, v. Sardi).

[14] D’après Denys 13, 61. 62. 4, 74. 6, 95), Dion (44, 6. 11) et Zonaras (7, 8) les rois auraient porté la toga picta et ce seraient seulement les consuls qui l’auraient échangée contre la prætexta. C’est une combinaison assez vraisemblable. Mais il est manifeste qu’il n’y a là qu’un arrangement moderne.

[15] Zonaras, 7, 19 le prouve plus sûrement qu’Athénée, 44, 79, p. 660 C. — Les textes de Polybe et de Diodore pour les censorii qui figurent tout vêtus de pourpre dans la procession des ancêtres, ne disent pas que l’on mette aux ancêtres le costume honorifique le plus relevé qu’ils aient porté dans leur vie, mais que l’on peut reconnaître à leur costume la plus haute dignité à laquelle ils ont été élevés de leur vivant ; ce qui se concilie très bien avec la concession exclusive de la pourpre à leur cadavre et à leur image.

[16] Handb. 5, 586. 7, 542. Cependant la vestis alba triumphalis impériale montre que le blanc uni était admis dans la tenue de gala de la paix comme dans le paludamentum, peut-être même qu’il prévalait, à l’époque récente, dans la tenue de paix. L’empereur Alexandre Sévère ne portait ni pourpre ni broderies d’or, mais simplement la vestis alba.

[17] Tertullien, De coron. 13. Vita Gordiani, 4. Vita Alex. 40. Vita Probi, 7. Je considère l’indication du Palatium dans la vie de Gordien et celle de la prætexta dans celle d’Alexandre comme des additions défectueuses de biographes ignorants. Mais il n’y a pas lieu de révoquer en doute que les consuls et ceux qui donnaient les jeux tirassent leur costume de cérémonie du trésor du temple, et c’était là probablement une vieille coutume. A la vérité, cela ne s’accorde pas avec ce que l’empereur Valérien, en annonçant à Aurélien sa nomination au consulat, lui offre entre autres insignes officiels, en partie très singuliers, une toga picta et une tunica palmata (Vita Aurel. 13). Mais ce n’est là qu’une preuve de plus après bien d’autres que ces prétendus documents sont encore beaucoup plus maladroitement compilés que les misérables semblants d’histoire dans lesquels ils sont incorporés.

[18] Pour le triomphe de Claude sur les Bretons en l’an 44 de l’ère chrétienne, les autres triumphalia ornamenta eodem Bello adepti défilent à pied et avec la prétexte, et seulement M. Crassus Frugi (consul en 27 de l’ère chrétienne) qui obtenait cet honneur pour la seconde fois, equo phalerato et in veste palmata (Suétone, Claud. 17). Par conséquent, le char et la toga picta lui furent refusés à lui-même. Il fallait nécessairement qu’il subsistât une différence entre l’empereur qui triomphait et les officiers qui l’escortaient. Pour le grand triomphe Auguste en 725, tous les officiers de rang sénatorial qui y prirent part portaient, si le récit de Dion, 51, 20, est exact, la prétexte.

[19] Handb. 6, 508 = tr. fr. 13, 279. Le cortège triomphal du préteur, son costume brodé et sa couronne d’or sont mentionnés a plusieurs reprises (Juvénal, 10, 36. 11, 195 ; Pline, H. n. 34, 5, 20 ; Martial, 8, 33, 1), et il se peut que cet usage soit aussi vieux que les jeux apollinaires eux-mêmes, bien que nous n’ayons sur lui aucun document plus ancien que l’indication de Tite-Live, 5, 41, 2. Si Juvénal appelle une fois pour varier le préteur consul, il n’y a là qu’une licence poétique dont l’excuse est dans l’existence, au moins à l’époque impériale, d’un cortège semblable pour les jeux consulaires.

[20] Rhein. Mus., nouv. série, 14, 81 et ss. = Römisch. Forsch.. 2, 42 et ss.

[21] Comme on sait, c’est ici le consul (ou celui qui le représente, en règle générale le préteur urbain ou, s’il est lui-même empêché, un dictateur nommé dans ce but spécial, Tite-Live, 8, 40, 2) qui conduit en char la pompa au cirque (Denys, 5, 57), puis descend de voiture aux carceres et donne le signal du commencement de la course (Ennius, dans Cicéron, De div. 1, 48, 107 ; Tite-Live, 8, 40, 7. 45, 1, 6), et ensuite remonte en voiture et se rend ainsi aux tribunes des spectateurs (Tite-Live, 45, 1, 7). Les témoignages établissent un lien entre cette conduite du cortège et le port du costume de cérémonie ; ainsi Tite-Live, 5, 41, 2 et Tertullien, De coron. 13. D’après cela, il faut que le consul ait eu le droit de paraître aux jeux romains dans le même appareil que le préteur aux jeux apollinaires, et le fait est que je ne vois pas comment on peut se soustraire à cette conclusion. Il est vrai que cette opinion est à son tour directement contredite par l’indication de l’appareil dans lequel le préteur urbain paraît aux jeux apollinaires et en particulier de la biga comme d’une distinction qui lui est spécialement réservée. La solution de la difficulté, est peut-être que, sous la République, jusqu’à Sulla, les consuls étaient régulièrement absents au moment des jeux romains et que par suite il fallait qu’ils y fussent remplacés par un préteur, que, d’autre part, les frais et l’organisation de la fête ne les concernaient pas, tandis que le préteur payait et dirigeait ses jeux. Le magistrat qui tensas ducebut n’était sans doute pas obligé à se présenter dans l’appareil triomphal, et il se peut que le préteur ait déployé une plus grande pompe pour ses jeux propres que pour ceux qu’il présidait seulement comme représentant des consuls.

[22] Denys, en parlant de πορφύρα pense à la toga purpurea et non pas à la prætexta. Cela résulte déjà de ce qu’il l’attribue aux rois.

[23] La décision d’Auguste de 718 (Dion, 49, 16, cf. 57, 13 ; aussi Suétone, Jul. 43) l’exprime en termes généraux. La prescription, d’après laquelle les sénateurs en fonctions doivent seuls être autorisés à porter le costume tout de pourpre (car c’est là l’έσθής άλουργής) perd son caractère surprenant si l’on entend cela, ainsi qu’on doit le faire, comme rapporté tacitement à l’acte pour lequel le costume de pourpre est d’une façon générale admis, c’est-à-dire à l’acte de celui qui donne des jeux ; cela signifie simplement que ce costume ne peut être porté par aucun particulier ou du moins non sénateur, qui donne des jeux, c’est-à-dire ni par le dominus funeris, ni par le magister vici, mais que les consuls, les préteurs et les édiles peuvent le porter pendant qu’ils remplissent cette fonction. Les questeurs et les tribuns du peuple ne donnaient pas encore de jeux à cette époque.

[24] En l’an 14, on accorda aux tribuns du peuple pour les jeux augustaux, qu’ils dirigèrent pendant quelques années, non pas, il est vrai, la biga, mais du moins le costume triomphal (Tacite, Ann., 1, 15 ; Dion, 56, 46).

[25] Sur les jeux consulaires du commencement de l’Empire, cf. tome III, la théorie du Consulat, sur ceux d’après Dioclétien, ce que j’ai réuni C. I. L., I, p. 382, sur le 7 janvier. Le consul qui donnait les jeux s’y rendant en char, il a dû, à plus forte raison, porter le costume triomphal, et cela nous est attesté même pour l’époque récente, par exemple par Symmaque, Ep. 6, 40.

[26] Appien, B. c, 1, 45, représente au moins le préteur urbain Asellio comme offrant un sacrifice au Forum, au temple de Castor. Il est probablement fait allusion à la fête de Castor, du 15 juillet, que Denys, 6, 18, qualifie aussi de θυσίαι πολυτελεΐς. Pour la qualification concernant César, voir Appien, B. c. 2, 106.

[27] Martial, 10, 10, interpelle le consul Paulus par les mots : Laurigeris annona qui fascibus intras. Claudius, De IV cons. Honorii, 14.

[28] Les premiers vestiges s’en montrent dans les médailles sur lesquelles, il est vrai, selon la juste remarque d’Eckhel, 8, 333 et ss., il est souvent difficile de distinguer outre la représentation du véritable triomphe et ce processus consularis. Les plus anciennes médailles à rapporter sûrement à ce dernier, qui m’ont été signalées par des personnes compétentes, sont celles d’Antonin le Pieux de 140 (Cohen, 2, p. 286 et 30, reproduite eod. op. pl. 13), et de César Marcus de 156 (Eckhel, 6, 46) ; celle de Maxence de 310 (Cohen, 6, 36, 65, 66) mérite en outre d’être mentionnée à cause de sa légende : Fel(ix) process(us) con(sulatus) III Aug(usti) n(ostri). Sur les médailles de Constantin et de ses fils qui ont la même légende (par exemple Cohen, 6, 187, 4, 5), le magistrat est représenté debout avec le globe terrestre et le sceptre. Parmi les écrivains, celui qui cite le premier cette coutume est Fronton, Ad Marcum, 1, 7. Il est même possible qu’Hérodien (sous Gordien), lorsqu’il cite parmi les solennités du nouvel an que les άρχαί έπώνυμοι τότε πρώτον τήν ένδοξον καί ένικύσιον πορφύραν περιτίθενται, n’ait pas fait allusion à la περιπόρφυρος. Les mentions s’en trouvent en foule chez les écrivains de l’époque qui suit Dioclétien, à partir des biographes impériaux. Procope, Bell. Vand., 2, 9, appelle le processus, par opposition au cortège de la victoire de Bélisaire 31. p. 155, note 2), un θρίαμβο κατά τόν παλαιόν νόμον. Lydus, De mens. 4. 1, confond ce processus consularis avec l’ovation. Cf. Hirschfeld, dans Friedlænder, sur Martial, 11, 4, 5.

[29] Cassiodore, Var. 6, 1. Ausonius, Grat. act. 11, 53. Cependant le changement de costume a encore ici exercé son influence. Les monuments, en particulier les diptyques consulaires (Gori, Thesaurus veterum diptychorum consularium et ecclesiasticorum, Florence, 1759, 3 vol. in-folio), montrent le consul avec un vêtement brodé à manches garni d’une large bordure, par dessus lequel une large écharpe également brodée est omise autour du dos et retombe en deux longs pans qui descendent jusqu’aux pieds et dont l’un remonte encore ensuite s’attacher au bras gauche. Ce vêtement à manches est évidemment la vestis palmata, comme on l’appelle désormais, et avec raison, car les noms de toga et de tunica ne conviennent ni l’un ni l’autre absolument à ce vêtement. L’écharpe peut être la trabea ; c’est du moins l’idée que suggère Ausone en employant une fois (Grat. act. 1, 51 et suiv.) pour le costume consulaire, trabea toga, palmata vestis, picta vestis comme synonymes et ensuite en parlant dans des vers, Protrept. ad nep. 92, de trabea pictaque toga. La matière réclame encore du reste une étude plus approfondie. Elle a été traitée, mais d’une manière peu satisfaisante, par Ducange, dans sa Dissertation De inf. ævi numism. (à la suite de son glossaire de la langue latine) § 4 et suiv., et aussi par Godefroy dans son commentaire du code Théodosien, 8, 11, 5.

[30] Si Dion, 79, 8, comprend parmi les prodiges de mauvais présage pour Elagabal que τή έπινικίω στολή ύπατεύων έν τή Νικομηδεία έν τή τών εύχών ήμέρα [ούκ έχοήσατο], il résulte de là, en admettant l’exactitude de la restitution, que le consul portait aussi la robe triomphale au jour des vota (3 janvier), mais pas du tout qu’il parut habituellement dans ce costume.

[31] Dion atteste cette décision à deux reprises pour la même année : 44, 4 et 44, 6 (cf. 44, 49). Il est signalé à plusieurs reprises que ce fut aux Lupercalia (15 février) de 710 que César parut pour la première fois dans ce costume, cum purpurea veste (Cicéron, De div. 1, 52, 119. 2, 16, 37 et également Val. Max. 1, 6, 13 ; Pline, H. n. 11, 37, 186 ; Nicolas de Damas, Vit. Cæsar, 21), amictus toga purpurea (Cicéron, Philipp. 2, 34, 8,5), θριαμβικώ κόσμω κεκοσμημένος (Plutarque, Cæs. 61, et de même Ant. 12). Dion a visiblement été amené par des relations conçues dans des termes différents à raconter deux fois le même événement.

[32] En 129, Auguste reçut le droit de paraître en costume triomphal, au premier jour de l’an ; car c’est là n’importe comment le sens des expressions, assurément discutables au point de vue critique, de Dion, 53, 26. Mais il est probable, que, soit à cette époque, soit antérieurement le droit de porter ce costume lui fut accordé, non pas d’une manière générale, mais du moins à toutes les fêtes et à tous les spectacles. C’est peut-être à cela que se rapportent les médailles qui portent les insignes triomphaux et la légende : Cæsari Augusto s. p. q. R. parenti cons(ervatori) suo (Eckhel, 6, 113).

[33] Aux jeux, l’empereur ne parait jactais qu’en costume triomphal ou en tout cas avec le paludamentum militaire (Claude portait par exemple ce dernier pendant le combat naval représenté aux jeux qui eurent lieu à l’inauguration du canal du lac Fucin). La surprise que l’on éprouvait à l’y voir en robe prétexte est démontré par le fait que ce fut considéré comme un des présages de la chute d’Elagabal (Dion, 79, 9). Il faut encore rattacher à cela l’apparition de Néron aux jeux du cirque en costume triomphal decore imperatorio. Dans Dion, 69, 10, l’ensemble des idées montre, que la pompe impériale ne se rapporte pas à l’apparition en public du monarque en général, mais à son apparition au cirque ou au théâtre. Même pour les solennités extraordinaires, l’empereur porte fréquemment le costume triomphal, ainsi pour la dédication d’un temple (Dion, 59, 7), pour la réception de princes étrangers (Dion, 63, 4), pendant les supplicationes (Tacite, Ann. 13, 8) ; dans d’autres cas, c’est le costume de guerre qui lui sert de costume de gala. Fronton doit penser en même temps à tous deux quand il écrit à l’héritier de l’empire (Ad Marcum, 1, 8) : Vobis, quibus purpura et eocco uti necessarium est.

[34] Néron apparaît au cirque, après avoir reçu la puissance proconsulaire, en costume triomphal, decore imperatorio, et Britannicus avec la prétexte, puerili habitu (Tacite, Ann. 12, 41). Je ne trouve pas d’autre preuve que le droit au costume impérial de cérémonie tint à la puissance proconsulaire ; il n’est pas certain que cette conséquence ait été tirée partout où elle aurait pu l’être.

[35] La remarque est faite pour Claude qu’en 41 (c’est-à-dire avant qu’il n’eut triomphé en réalité), il ne faisait usage du costume triomphai que pour le commencement des flues et qu’il y assistait ensuite vêtu de la prétexte (Dion, 60, 6).

[36] Dion, 67, 4.

[37] Les divisions de la garde-robe impériale que nous font connaître les inscriptions sont les suivantes : 1° vestis alba triumphalis (C. I. L. VI, 8546) ; — 2° vestis forensis (C. I. L. VI, 5193) ; — 3° vestis munda (C. I. L. VI, 8548. 8549) ; — 4° vestis castrensis (C. I. L. VI, 5248. 8547. XIV, 2832) ; — 5° vestis venatoria (C. I. L. VI, 8555) ; — 6° vestis imp. privata (C. I. L. VI, 8550 ; cf. C. I. L. VI, 872e) ; — 7° vestis scænica et gladiatoria (C. I. L. VI, 10089) ; vestis scænica (C. I. L. VI, 8553. 8554. 10090) ; vestis regia et Græcula (C. I. L. VI, 8552) ; vestis regia (C. I. L. VI, 8551).  La vestis marina (C. I. L., VI, 963a) et la vestis matutina (C. I. L. VI, 3053a) sont l’œuvre de faussaires. — Précédemment j’ai rapporté la vestis regia au costume de gala de l’empereur, parce que Dion appelle, à propos de César, le costume complet de pourpre ή στολή, ή ποτε καί οί βασιλεΐς έκέχρηντο et j’ai cherché dans la vestis Græcula le costume de fête grec que les empereurs revêtirent non seulement pendant leur séjour dans des villes grecques (ainsi Claude à Naples, Dion, 60, 6 ; Hadrien à Athènes, Dion, 69, 16), mais aussi plus d’une fois à Rome, ainsi Néron à son entrée à Rome après la victoire d’Olympie (Suétone, Nero, 25), Domitien pour présider l’agon capitolin (Suétone, Domit. 4), Commode au théâtre romain (Dion, 72, 17 ; Vita Pertinacis, c. 8 ; Hérodien, 1, 14), et qui fréquemment devenait un simple costume de fantaisie. Mais à cela s’opposent, d’une part, la désignation différente que présente pour la garde-robe de gala de l’empereur la première des divisions citées plus haut, d’autre part, l’invraisemblance que les rois se soient aussi ouvertement convertis à la royauté et au costume des Græculi. Il s’agit donc sans doute des vêtements royaux et des costumes grecs de la garde-robe du théâtre impérial.

[38] Cf. Tite-Live, 34, 7 et beaucoup d’autres textes.

[39] Plutarque, Q. R. 81. L’usque ad talos demissa purpura, que Cicéron, Pro Cluent. 40, 114, reproche au tribun du peuple de 680, L. Quinctius, doit nécessairement, d’après la rédaction même du texte, être entendue de l’époque après celle où il occupa cette magistrature ; la candidature aux magistratures supérieures ayant été de nouveau permise aux tribunicii dès l’an 679, Quinctius aura obtenu depuis l’édilité curule ou la préture. — Quand Appien mentionne, 8. c. 4, 93, τήν έσήτα τήν ίράν des tribuns du peuple, il pense sans doute simplement au costume de fête ordinaire, à la toga alba (cf. VI, 1).

[40] Les témoignages exprès font défaut dans ce sens ; mais il n’y en a non plus aucun qui attribue la prétexte aux édiles de la plèbe. Car, si Val. Max. 7, 3, 8, dit abjecto honoris prætextu de l’édile de la plèbe M. Volusius, cela n’a rien de commun avec la prétexte (cf. Kempf, sur Val. 2, 10, in.), et ce que Denys, 6, 95, rapporte du vêtement de pourpre des édiles plébéiens, concerne leur présidence des jeux plébéiens.

[41] Cicéron, Cum sen. gr. eg. 5, 12 ; Velleius, 2, 65 ; Denys, 5, 47, et beaucoup d’autres textes.

[42] Tite-Live, Ep. 19, dit de Claudius Glicia qui n’avait occupé d’autre magistrature que la dictature : Coactus abdicare se magistratu postea ludos prætextatus spectavit. Il faut donc qu’il ait, porté la prétexte comme dictateur. Denys, 10, 24, donne au dictateur le costume tout de pourpre, logiquement en ce sens qu’il l’attribue également aux rois. Cf. Lydus, De mag. 1, 37.

[43] Dion, 42, 27.

[44] Tite-Live, 7, 1. Cicéron, Verr. 5, 14, 36, cite comme avantages de l’édilité curule qui lui a été concédée : Antiquiorem in senatu sententiæ dicendæ locum, togam prætextam, sellam curulem, jus imaginis ad memoriam posteritatemque prodendæ. Nepos, dans Pline, H. n. 9, 39, 137. Cicéron, Cum sen. gr. egit, 5, 12 (note 41). Le même, In Vat. 8, 16, relativement à la candidature infructueuse de Vatinius à l’édilité : Video te ædiliciam prætextam togam, quam frustra confeceras, vendidisse. Dans les deux derniers textes, l’édilité dont il s’agit n’est pas spécifiée.

[45] Outre le silence des sources, plusieurs des textes cités dans la note précédente montrent que celui qui suivait la carrière régulière des magistratures n’acquérait la prétexte qu’avec l’édilité curule.

[46] Il est à la vérité surprenant qu’Appien, B. c. 2, 121. 122, fasse d’abord un préteur, puis un consul prendre ou laisser, le premier τήν έσθήτα τήν στρατηγικήν, le second τήν όπάτον έσθήτα. Mais, en présence du silence des autres sources, il ne peut y avoir là qu’une inexactitude d’expression. C’est aux licteurs que les trois magistratures curules annales se distinguent entre elles.

[47] D’après Dion, 56, 31, ont paru à la séance du sénat qui suivit la mort d’Auguste, les membres [du Sénat] y vinrent revêtus de la toge de chevalier, les magistrats de celle de sénateur au lieu de la prétexte. Les obsèques de Germanicus sont également suivies par les magistratibus sine insignibus (Tacite, Ann. 3, 4). L’union de la prætexta et de la pulla n’est pas permise aux magistrats. Il faut ajouter a cela qu’en pareil cas, les consuls ne s’assoient pas au sénat sur leurs sièges curules, mais sur les bancs des sénateurs (Tacite, Ann. 4, 8). — D’après Lydus, De mens. 4, 24, les magistrats paraissaient pendant les parentalia (13-22 février) έν σχήματι ίδιωτών (cf. C. I. L. I, p. 386).

[48] Sénèque, De ira, 1, 46, 5. D’où l’expression proverbiale toga perversa persequi pour une poursuite impitoyable dans Pétrone, c. 58. Il résulte clairement de là que, dans les procès devant le peuple du temps de la République, le magistrat accusateur portait la toge retournée ; l’idée que ce n’est là autre chose que le costume de deuil ordinaire des magistrats me paraît une conclusion vraisemblable.

[49] Dans un cas de ce genre, les consuls réunissent, d’après Dion, 40, 46, le sénat τήν βουλευτικήν έσθήτα λαβών. S’il ne s’est pas glissé là une méprise, les consuls changeaient aussi parfois le latus clavus pour l’augustus.

[50] Je ne peux, il est vrai, citer qu’une preuve positive ; c’est que Denys, 5, 17, montre le consul Valerius prononçant l’oraison funèbre de son collègue. Mais, quand, pour les jeux funéraires en l’honneur d’Agrippa, Dion, 55, 8, rapporte que tous les assistants, sauf Auguste, portaient φαιάν έσθήτα, on ne peut faire une exception pour les magistrats ; et les règles en vigueur à Pise pour les magistrats municipaux (Orelli, 642 = C. I. L. XI, 420), peuvent être transportées aux magistrats de Reine. Le manteau de couleur sombre mis par dessus la robe, qui constitue essentiellement la tenue de deuil des sénateurs (Dion, 12, 21) ne peut se rencontrer chez le magistrat, puisqu’il lui est défendu de mettre un autre vêtement sur sa toge, à moins cependant que le deuil n’occasionne précisément une exception à cette règle.

[51] Vita Elag. 15 : K. Jan. (Elagabal en qualité de consul) sumpta prætexta hora diei sexta processit ad senatum. Par suite, la toga picta et la toga prætexta sont encore désignées en même temps parmi les insignes du consulat à cette époque (Vita Alex. 40 ; Vita Aurel. 13). Enfin tous les témoignages sur le costume triomphal montrent, que l’usage de ce costume était restreint à certaines cérémonies.

[52] Vitellius se laissa déterminer à ne pas faire son entrée à. Rome en costume militaire, mais sumpta prætexta (Tacite, Hist. 2, 89). Il n’était pas consul, et il ne pouvait porter ce costume dans la ville qu’en qualité de prince. C’est là le texte décisif ; car le port de la prétexte au théâtre par Claude et par Élagabal pourrait s’expliquer par l’existence à. leur profit du droit plus fort de porter le costume tout de pourpre. — Les sources ne nous rapportent rien sur l’acquisition par les empereurs du droit à la prétexte ; d’après ce qui va être remarqué dans un instant pour Tibère, il parait ne pas l’avoir eu, c’est-à-dire avoir refusé cet honneur. Tous leurs insignes ont probablement été attribués aux gouvernants postérieurs par la loi d’investiture faite pour chacun.

[53] Bernays le croit, en partant de ce qu’Auguste dut, par suite de son titre de grand pontife, s’abstenir de voir le corps d’Agrippa. Dion, qui rapporte le fait (54, 28) objecte, il est vrai, qu’il ne sait riels des prescriptions de ce genre imposées au grand pontife ; mais cela peut rentrer parmi les accroissements de rigueur introduits par Auguste quand il prit ce sacerdoce.

[54] Seul de tous les assistants, Auguste parut sans vêtements de deuil aux jeux funéraires célébrés en l’honneur d’Agrippa, et l’on rapporte parmi les prodiges que Commode présida des jeux de gladiateurs donnés à cause d’un décès in pullis vestimentis (Vita, c. 16 ; cf. Dion, 12, 23). Il rentre, encore dans cet ordre d’idées que l’empereur ne paraisse jamais publiquement en manteau ; car le manteau sombre portés par dessus la toge blanche est le costume de deuil. — Tibère porta, il est vrai, au convoi funèbre d’Auguste une toge noire, faite à peu près comme celle que porte le pauvre peuple (Dion, 56, 31), par conséquent la toga pulla ; mais il n’était pas encore alors grand pontife, et il a paru menue en dehors de cela dans le costume civil ordinaire et non en costume de magistrat. — Le décret de Pise dit aussi que certaines personnes ne peuvent, probablement comme prêtres, porter le deuil en certains temps.

[55] Vita Alex. 40. Vita Elag. 15.

[56] C’est dit expressément d’Alexandre Sévère non seulement dans le texte concernant son consulat cité plus haut, mais aussi Vita, c. 4. Cela résulte aussi de ce que Tibère portait, même au théâtre, la pænula (μανδύη) quand il pleuvait (Dion, 51, 43) ; car c’était là un costume défendu aux magistrats patriciens, et l’empereur se présentait ainsi comme un simple citoyen. — Naturellement l’empereur ne se montrait pas facilement en costume de bain ou d’intérieur. Vita Alex. 42. Vita Pii, 6. La vestis privata figure aussi dans la garde-robe impériale.

[57] Tite-Live, 33, 42. Vita Alexandri, 40. La ίερατική στολή, qui appartient à l’empereur en sa qualité de grand pontife, est citée par Zosime, 4, 36. Servius, Ad Georg. 3, 17. Handb. 6, 223 = tr. fr. 12, 268.

[58] Cicéron, Pro Sestio, 69, 144 : Cui superior, annus et virilem patris et prætextam populi judicio togam dederit, ce qui, d’après les scolies, p. 313, se rapporte à l’augurat. Cicéron, Ad Att. 2, 9, 2 : Vatinii strunam sacerdotii διβάφω vestiant se rapporte (d’après In Vatin. 8, 19) également à l’augurat (cf. encore Ad fam. 2, 16, 7). Il doit aussi s’agir de la prétexte sacerdotale, Pro Cæl. 31, 77. Sur la trabea des augures et d’autres prêtres voir plus bas.

[59] Tite-Live, 27, 37, 13.

[60] Tite-Live, 34, 1. Pline, 9, 36, 127.

[61] Servius, Ad Æn. 8, 552. Statut de Genetiva, c. 66.

[62] Cela ressort avec une clarté spéciale dans les trois procès-verbaux relatifs au jour de leur grande fête, Henzen, Arv. p. CXCVI. CCIII. CCVIII (cf. p. 25 et ss.). Les cérémonies faites dans le bois et devant lui une fois terminées et les arvales étant descendus de la colline, depositis prætextis cenatoria alba acceperunt. On procède de même le premier jour.

[63] Le président de jeux municipaux est également prætextatus (inscription d’Amiternum, C. I. L. IX, 4208).

[64] La formule d’après laquelle l’arvale prend la présidence riciniatus soleatus cum corona pactili rosacea se trouve fréquemment dans leurs actes ; une fois (Henzen, Arv. p. CCIX), il y a : Latum sumsit et ricinium. Le latus est la tunica laticlavia (cf. Cicéron, De leg. 2, 23, 59), le ricinium un vêtement analogue à la toga prætexta, les enfants employés pour ces cérémonies sont appelés, dans les actes, tantôt riciniali, tantôt prœtextati. Festus dit également, p. 274 : Recinium omne vestimentum quadratum hi qui XII interpretati sunt esse dixerunt : Verrius togam, qua (d’après Juste Lipse ; le ms. vir toga) mulieres utebantur, prætextam clavo purpureo. La différence entre la toga et le ricinium tient à la coupe qui, dans la toge, est elliptique, et, dans le ricinium, quadrangulaire, selon la mode grecque (Handb. 7, 5, 75, où il faut ajouter Denys, 3, 61).

[65] Dion, 43, 43.

[66] Cela est désormais établi jusqu’à l’évidence par le chapitre 62 de la loi municipale de Genetiva. Ainsi se trouve démontré ce que je n’indiquai dans la première édition que comme une conjecture incertaine, l’allusion faite par Cicéron à ce droit quand il raconte, Cat. 13, 44, de C. Duilius, consul en 494 : Delectabatur cereo (faut-il écrire au lieu du texte traditionnel crebro ou credo) funali et tibicine, quæ sibi nullo exempla privatus sumpserat. Il faut par suite rapporter à la coutume le réchaud mentionné par Horace (Sat. 1, 5, 36) parmi les insignes du préteur Aufidius Luscus. Ce préteur est nécessairement un préteur romain et non pas, comme on admet ordinairement, un préteur de Fundi, d’abord parce que c’est l’édile qui est le premier magistrat à Fundi, ensuite, cet surtout, parce que le latus clavus n’appartient qu’aux sénateurs de l’empire et non aux décurions.

[67] En soi, il n’était pas inusité que l’on portât des lumières devant ceux qui revenaient à pied du théâtre chez eux (Dion, 58, 19).

[68] Relativement à Duilius, il n’est jamais question que de la torche (Cicéron, loc. cit. ; Val. Max. 3, 6, 4 ; Florus, 1, 13 [2, 2] et Victor, 38. Tite-Live, 17 ; Silius, 6, 661). L’empereur Marc-Aurèle dit, également, dans un texte que Juste Lipse a avec raison rapporte à notre matière. Mais Dion et Hérodien ne nomment jamais la torche ; ils nomment le premier τό φώς et le second τό πύρ ; et le prunæ vatillum (et non batillum ; cf. Estienne, Gloss. p. 222), n’est certainement pas une torche, mais un réchaud. On peut du reste facilement comprendre que les torches faisant partie de l’appareil solenelle dans lequel parait le magistrat, les gens à son service devaient toujours tenir prêts à la fois des torches et un réchaud ; si bien que ce réchaud apparaissait plus encore que les torches allumées comme l’insigne du magistrat.

[69] Le récit relatif à C. Duillius (note 68) réuni au port des torches le joueur de flûte qui marche devant lui au son de son instrument (tibicen dans tous les auteurs, à l’exception de Val. Max. qui fait intervenir le fidiem, sans doute par erreur, quand il revient de dîner en ville (cena publica doit être une erreur dans Victor, 38) ; quasi quotidie triumpharet, ajoute Florus.

[70] Dion, 71, 35, pour Marc-Aurèle, du vivant d’Antonin. Hérodien, 2, 3, pour Pertinax. Corippus, De laud Just., 2, 299. Il est possible que la coutume perse, (Quinte-Curce, 3, 3, 9 ; Ammien, 23, 6, 34) ait influé sur l’usage impérial ; mais ce n’est pas précisément vraisemblable, parce quelle dérive de la religion nationale.

[71] Hérodien, 1, 8, 16, pour Marcia, la concubine de Commode.

[72] En dehors des documents qui construisent le costume des rois de Rome à l’image de celui des triomphateurs, le sceptre n’est jamais attribué aux rois par les relations les meilleures et les plus anciennes ; il fait partie du costume poétiquement donné par Virgile aux rois latins (Æn. 12, 206, etc.).

[73] On peut invoquer pour l’affirmative l’emploi de cette baguette (hasta pura, festuca) dans la procédure la plus ancienne de revendication et mime dans le mariage. Tant la vindicta que l’hasta cælibaris ne peuvent s’expliquer simplement que par la supposition qu’à l’époque la plus ancienne le citoyen paraissait régulièrement en public avec un bâton à la main. Le témoignage de Servius (Ad Æn. 11, 238) d’après lequel tous les duces, à l’origine, et plus tard seulement les anciens consuls, seraient venus à la curie avec des sceptres, vient d’un mélange des tableaux de Virgile et d’Homère avec le costume triomphal porté par le consul dans le processus consularis.

[74] Il n’y a pas de témoignage qui attribue le scipio au consul. C’est par une pure bévue de Denys, sinon de ses copistes qu’il ne cite pas, 3, 62, le sceptre parmi les insignes que le triomphateur a de plus que les consuls ; il donne lui-même la solution exacte, 4, 74.

[75] Juvénal, 10, 43 ; 10, 146. Inscription C. I. L. X. 1709. Eckhel, 6, 113. Les représentations sont fréquentes sur les médailles et les diptyques, et les mentions ne le sont pas moins dans les auteurs. — Le triomphateur tient en même temps dans la main droite la branche de laurier (Pline, H. n. 15, 30, 131 ; Plutarque, Paul. 34 ; Appien, Pun. 66).

[76] De la forme dorique σκάπτον. cf. σκηπτοΰχος.

[77] Ni pour la procession des ancêtres, ni dans les autres circonstances où il est question des honneurs de l’ex-triomphateur, il n’est fait allusion au scipio. L’unique exception est le récit de Tite-Live, 5, 41, où les vieillards qui attendent les Gaulois ont le bâton en même temps que le costume triomphal ; il n’y a là probablement qu’une exagération poétique.

[78] Par exemple sur la base de la colonne antonine et sur les monnaies de Volusien, Cohen, 2e éd. 5, 219, 138.

[79] Loi des XII tables, 40, 9. C’est ainsi à peu pris qu’il faut restituer, d’après Pline, H. n. 21, 3, 7, et Cicéron, De leg. 2, 24, 60, ce texte qui n’a pas été exactement rétabli par Schoell dans son édition. La première moitié s’en rapporte aux jeux, où même les esclaves et les chevaux peuvent gagner la couronne, et la seconde à la guerre. L’acquisition au profit du père de la couronné obtenue par le fils en puissance est attestée par nos deux autorités et résulte aussi par analogie, de Pline, H. n. 16, r, 13 ; au contraire, il est impossible d’admettre avec Schoell que la couronne gagnée, par le père profite au fils. En revanche, Schoell me fait remarquer avec raison, dans une lettre, que la mention du père est mieux à sa place dans le dernier membre de phrase que dans le premier où j’avais d’abord proposé de la mettre.

[80] Handb. 5, 576 et ss.

[81] Cette couronne d’une forme déterminée et attribuée à vie, ne doit naturellement pas être confondue avec la couronne que portaient tous les citoyens pour certaines cérémonies, en particulier pour les supplicationes (Caton, dans Aulu-Gelle, 6 [7], 4, 5 ; Tite-Live, 25, 42, 15. 34, 55, 4. 36, 37, 5. 40, 37, 3, etc.), ce qui se produisit, pour la première fois, en l’an 461 de Rome (Tite-Live, 10, 47). Sans nul doute, des mesures étaient prises pour que personne ne portât, dans de pareilles occasions, une couronne qui ressemblât à la couronne de lauriers de triomphateur, à la couronne civique, ou aux autres décorations régulières.

[82] La couronne civique a pour conditions la qualité de citoyen du sauvé (Pline, H, n. 16, 4, 12 ; en sens divergent Polybe, 6, 39, 6), et sans doute aussi du sauveur.

[83] Pline, H. n. 15, 30, 127. 137. Ce laurier est également porté par tous les combattants qui figurent dans le cortège (Tite-Live, 45, 38, 12. c. 39, 4 ; Appien, Pun. 66 ; Festus, Ep. p. 117, v. Laureati) ; au contraire, les civils qui sont chargés de l’organisation du triomphe et qui, par conséquent, y figurent, portent la couronne d’olivier (Aulu-Gelle, 5, 6, 4 ; Festus, Ep. p. 192, v. Oleagineis). Ce laurier vert fait sans doute défaut dans la procession triomphale fictive du président de jeux.

[84] C’est là la corona triumphalis ou aurea. Velleius, 2, 40 ; Martial, 8,33 ; Pline, H. n. 33, 1, 11 ; Denys, 3, 62 ; Appien, Pun. 66 ; Zonaras, 7, 21 ; Juvénal, 10, 39. Je ne crois pas que cette couronne se soit jamais appelée techniquement corona laurea ; Borghesi Dec. 9, 8, Opp. 1, 452 a écarté avec raison la modification fausse faite à Velleius, loc. cit. La couronne d’or et la couronne de feuillage vert sont distinguées par Tite-Live, 10, 7, 9, et Zonaras, loc. cit., distingue également la couronne mise sur la tête et la couronne tenue au-dessus de la tête. Selon la description des annalistes, les premiers rois n’auraient porté pour le triomphe que la couronne de lauriers, tandis que la couronne d’or ne serait venue s’y joindre qu’avec les autres insignes étrusques (Denys, 2, 34. 3, 62 ; Aulu-Gelle, 5, 6, 5). C’est incorrectement que Servius, Ad Æn. 1, 276, cite la corona parmi les insignes royaux.

[85] Dion, 44, 6. Il ne peut là être fait allusion qu’à la couronne triomphale. César la porta aux Lupercales de 710 (Dion, 44, 11 ; cf. 45, 6 ; Cicéron, Phil., 2, 34, 85). Florus doit commettre une inexactitude, 2, 13 [4, 2], en la qualifiant d’in theatro distincta radiis corona. Il confond probablement l’emblème en usage à son époque pour les divi avec la couronne de Jupiter accordée à César.

[86] Dion, 51, 20, qui parait faire allusion à la couronne d’or tenue au-dessus de la tête d’Auguste en 725 et non pas à la couronne de lauriers ; car Auguste avait déjà obtenu cette dernière en 714.

[87] Dion, 43, 43. Suétone, Jul. 45. Le ruban noué par derrière et dont les deux bouts retombent sur la nuque, par lequel est attachée la couronne de lauriers sur les monnaies à Auguste et des empereurs suivants (Eckhel, 6, 84), manque ordinairement sur les monnaies de César ; une pièce du maître monétaire L. Flaminius Chilo publiée par Sallet, Comm. Mommsen, p. 93, fait exception. Ce lien ne peut avoir eu d’importance politique ni avoir changé la couronne en diadème.

[88] Dion, 49, 15. Eckhel, 6, 84. Le droit lui avait été accordé, dès 714, d’entrer à Rome avec la couronne de lauriers et de paraître désormais avec elle aux jeux comme les viri triumphales (Dion, 48, 16).

[89] Pline, H. n. 15, 30, 137. Suétone, Galb. 1. Il est superflu de citer d’autres textes.

[90] La haute importance de cet insigne de l’imperator ressort en particulier de la pratique suivie quant à la couronne de laurier pour les corégents : Ils ne la portent que lorsque le titre d’imperator leur a été attribué, ce qui s’est produit pour la première fois relativement à Titus et, en somme, n’est arrivé que rarement. Les autres détenteurs de la puissance proconsulaire ou tribunicienne secondaire, et encore moins les simples princes, ne la portent pas, sauf l’exception unique de Domitien qui fut assimilé à son frère quant à tous les honneurs, mais seulement quant à eux. La couronne de lauriers se voit, en outre, sur les médailles commémoratives de quelques proches parents défunts de l’empereur régnant. Ce point sera étudié de plus près, tome V, dans le chapitre consacré à la participation à l’empire.

[91] Les couronnes qui se rencontrent fréquemment parmi les décorations militaires sous l’Empire n’étaient point portées sur la tète, mais exposées dans l’Atrium, comme les hastæ et les vexilla.

[92] L’assertion, d’après laquelle César aurait déjà porté au théâtre une distincta radiis corona est probablement une erreur de Florus. Cette coiffure se rencontre fréquemment à l’époque la plus récente, ainsi, dans Mamertin, Paneg. ad Maxim. c. 3. — L’attribution aux divi de la couronne radiée est un fait connu ; Virgile la donne également au roi Latinus (Æn. 12, 162).

[93] Eckhel, 6, 269. R. M. W. p. 765 = tr. fr. 3, 36. Les monnaies de frappe impériale à couronne radiée commencent sous Caracalla (Eckhel, 7, 220. R. M. W. p. 782 = tr. fr. 3, 70). Ce coin a, du reste, été accordé aux Césars plutôt que la couronne de lauriers ; des monnaies des Augusti Balbinus et Papienus et du Cæsar Gordianus donnent la couronne de lauriers aux premiers, la couronne radiée au second.

[94] Lorsque la statue de César est couronnée d’une couronné de laurier candida fascia præligata, les tribuns ordonnent d’enlever le lien (coronæ fasciam detrahi) d’après Suétone, Jul. 79.

[95] Drumann, 3, 688-690.

[96] Suétone, c. 22, dit de Caligula : Non multum afuit quin statim diadema sumeret speciemque principatus in regni formam converteret. Le diadème d’Élagabal (Vita, c. 23) ne devait être qu’une parure, de femme. L’introduction du diadème par Aurélien n’est attestée que par le témoignage peu diane de foi de l’Epitomé attribué à Victor, 35, 5.

[97] Spanheim, De usu et præst. numm. (éd. de 1717) 2, 385 et ss. Eckhel, 8, 79, 363. Il faut ajouter aux autorités Polemius Silvius, Laterc. p. 275 de mon édition : Constantinus senior propter refluentes de fronte propria capillos.... invertit ; ejus modus hodie custoditur. C’est aussi sous Constantin que commence à se présenter le nimbus impérial (Eckhel, 8, 79, 502) qui, à l’époque ancienne, ne se rencontrait, de même que le diadème, que comme parure féminine.

[98] Virgile, Æn., 7, 611. Elle est plus courte que la toge (parva trabea : Virgile, Æn. 7, 487) et elle se distingue par une étroite bande de pourpre qui y est tissée ou cousue ; ainsi que Denys le dit des chevaliers, 6, 13 et des Saliens 2, 70 ; et que le confirme Pline (H. n. 9, 39, 63, rapproché de 8, 48, 195), où ressort nettement la distinction de la bande étroite (= πάρυφοι) et du latus clavus. Son caractère de costume de guerre résulte clairement, en même temps que du texte de Virgile reproduit plus haut, de ce qu’elle est portée par les Saliens dans la dansé des armes (Denys, 2, 70 ; cf. Handb. 6, 432 = tr. fr. 43, 464) et qu’elle apparaît avec le même caractère chez les chevaliers (VI, 2). Son attribution aux premiers rois (Pline, loc. cit. ; de même aux vieux rois Latins : Virgile, Æn. 7, 187. 11, 334 avec les scolies ; — à Romulus : Servius, Ad Æn. 7, 612 ; Ovide, Fast. 1, 37. 2, 503. 6, 375. 796. Metam. 14, 828 ; Lydus, De mag. 1, 7 ; Isidore, Orig. 19, 24, 8 ; — à Remus : Stace, Sylves, 3, 2, 48 ; — à Numa : Lydus, De mens. 1, 19 ; — à Servius. Tite-Live, 1, 41, 6 ; Juvénal, 8, 259), doit vouloir indiquer que ce ne fut que progressivement que s’établit la distinction de l’état de paix et de l’état de guerre qui est le fondement du droit public postérieur. — L’indication de Servius Ad Æn. 7, 188. 190. 612 ; Handbuch, 6, 233 = tr. fr. 42, 2.78), d’après laquelle le flamen Dialis, celui de Mars et les augures portaient aussi la trabea, est surprenante ; mais les prêtres les plus anciens portent dans des circonstances multiples le costume de guerre, sans que nous en voyons clairement la raison. — Sur la trabea comme insigne consulaire de l’époque la plus récente, voir plus haut.

[99] Quand, dans la période antérieure a Dioclétien, il est question de la pourpre impériale, en dehors des spectacles où le costume triomphal trouvait sa place, la relation avec le costume militaire est en général visible ; ainsi Gaius porte en passant sur le pont de Puteoli χλαμύδα σηρικήν par dessus son armure avec l’épée et le casque (Dion, 59, 17) ; ainsi Vitellius porte la χλαμύς πορφυρά à cheval (Dion, 65, 6) ou avec l’épée (Dion, 65, 16) ; ce que Dion rapporte de la chlamyde rouge ou rayée de rouge de Caracalla est également mentionné à l’occasion de ses fonctions militaires ; c’est ainsi que Probus lorsque les soldats le proclament empereur dans le camp, se revêt pallio purpureo (Vita Probi, c. 10). Les indumenta coccea et purpurea veteraque castrensia imperii insignia (Vita Diadum. 3) ne sont pas autre chose. — Cette section de la garde-robe impériale porte la désignation : ventis castrensis.

[100] C’est ce que firent Vitellius (Tacite, Hist. 2, 89 ; Suétone, Vit. 11) et même encore Sévère (Dion, 74, 1).

[101] Ainsi, Dion, 77, 4, après avoir raconté que Caracalla prit sous sa protection Cilo, que l’on avait train en le maltraitant au palais, et qu’il le couvrit de sa propre chlamyde, ajoute : Τήν γάρ στρατιωτικήν έσθήτα εΐχε, et les témoignages réunis attestent des faits analogues. Vitellius semble aussi être paru régulièrement dans l’intérieur de la ville vêtu du costume utilitaire et en armes. Claude le portait aux jeux célébrés pour fêter la victoire remportée en Bretagne (Suétone, Claud. 21).

[102] Dans Tacite, Hist. 1, 38, Othon dit de la cohorte qui monte la garde au palalium, (c. 29) : Nec una cohore togata defendit nunc Galbam, sed detinet. On peut donc admettre que par exemple les soldats de la flotte ne pouvaient se montrer en dehors du camp en uniforme qu’avec une permission spéciale de leurs officiers. — Au reste, comme on sait, les soldats portaient à l’époque ancienne la toge avec le cinctus Gabinus (Handb. 7, 560) et on doit l’avoir employé ici d’une manière semblable. Tacite donne à comprendre qu’elle gênait les mouvements des soldats.

[103] Vita Marci, 27.

[104] Handb. 7, 565.

[105] D’où paludatus ferroque succinctus dans Suétone, Vit. 11, et de même Tacite, Hist. 2, 89. Aussi la formule dans les scolies de Vérone, Ad Æn. 10, 241 : Cincti armati paludati ; de même Virgile, réunit la trabea et le cinctus Gabinus.

[106] Paludati, dit Festus, p. 253, dans les livres anciens ce mot signifie, nomme le dit Veranius, armés, ornés ; car, selon lui, le mot paludamenta comprend toutes les pièces de l'équipement militaire et les lictores paludati le confirment, ainsi que Lucilius (dans Nonius, p. 553), etc. Handbuch, 7, 566.

[107] Sagum se dit aussi du costume du général (ainsi dans Salluste, Hist. 2, éd. Dietsch, fr. 11) ; mais lorsqu’il faut désigner le costume officiel comme tel, le mot ne s’emploie guère sans être accompagné d’un qualificatif (ainsi par exemple Hirtius, Bell. Afr. 57, emploie la formule sagulum purpureum). Cf. Handbuch, 7, 566.

[108] Tite-Live, 9, 5, 12. 25, 16, 21 ; Suétone, Claud. 21 (cf. Dion, 60, 17) ; Tacite, Ann. 12, 56, etc.

[109] Val. Max. 1, 6, 11 ; César, Bell. Gall. 1, 88.

[110] Tite-Live, 25, 16, 21.

[111] Pline, 22, 21 3 ; Apulée, Apolog. 22. Isidore, Orig. 19, 24, 9.

[112] Tacite, Ann. 12, 56, emploie chlamys pour le vêtement d’Agrippine, tandis qu’il donne à Claude le paludamentum. Dion, 60, 33, dit de même, tandis que Pline, H. n. 33, 3, 63, appelle incorrectement le vêtement d’Agrippine paludamentum. L’absence d’une similitude absolue entre la chlamys des Grecs et des femmes et le paludamentum ou sagum des Romains résulte déjà du blâme adressé aux généraux romains qui portaient la chlamyde ou se faisaient représenter avec elle (Cicéron, Pro Rab. Post. 10, 27, et beaucoup d’autres textes), Mais, cependant, les deux costumes étaient les mêmes quant aux traits essentiels. Les Grecs n’ont pour sagum et paludamentum pas d’autre expression que χλαμύς, nomme est souvent appelé, dans Dion, le costume militaire de l’empereur (cf. le texte cité plus haut, et en outre 59, 17. 60, 17. 65, 5. 16. 75, 6). Hérodien, 4, 7, l’appelle Ρωμαική χλαμύς, par opposition cependant au costume barbare et non pas à la chlamyde grecque. Le mot est passé de là dans le latin, grécisé sous bien des rapports, de la plèbe de la capitale, ainsi que le prouvent les biographies des Empereurs. Les grammairiens glosent également paludamentum par chlamys (Nonius, sub hoc v°, p. 538 ; schol. Juv. 6, 400 ; Gloses de Labbé, p. 129) ; Isidore (Orig. 19, 24, 9), le fait inexactement par pallium. Au reste chlamys n’est pas seulement usité comme l’est paludamentum à l’époque récente pour le costume de guerre de l’empereur ; il l’est aussi pour le costume tic guerre en général ; ainsi par exemple la constitution de 382 (C. Theod. 14, 10, 1) qui défend aux sénateurs de porter le costume de guerre dans l’intérieur de la ville, l’appelle tantôt habitus militaris et tantôt chlamys.

[113] Handb. 7, 507. La couleur rouge prévaut au moins absolument, tantôt comme pourpre unie, tantôt sous la forme de rayures alternativement écarlates (coccum) et pourpres ; on rencontre cependant aussi des rayures rouges et blanches.

[114] Le paludamentum est désigné comme pourpre ou blanc par Val. Max. 1, 6, 11, comme rouge écarlate par Pline, H. n. 22, 2, 3, Silius, 17, 396, et par Plutarque, Crass. 23. Il est aussi représenté comme rouge sur le bras gauche du général figuré sur la cuirasse que porte Auguste dans la statue de la villa de Livie (Annali dell’ Inst. 1863, p. 440). Metellus Scipio porte d’abord dans le camp africain sagulum purpureum en qualité de général en chef ; mais, quand le roi Juba arrive et demande qu’il porte un autre costume que le sien, factum est, ut Scipio ad album sese vestitum transferret (Bell. Afr. 57). Dion, 78, 3. Le costume triomphal est aussi tantôt rouge, tantôt blanc.

[115] Le plus ancien document qui me soit connu, d’après lequel la prise du costume de pourpre exprime la prise du pouvoir, est le passage d’Hérodien, 2, 8,  par conséquent un texte d’un écrivain de l’époque de Gordien. Purpuram sumere se trouve aussi fréquemment dans les biographies des empereurs (Trig. tyr. 18, et ailleurs encore), purpuratus aussi, pour désigner l’empereur (Vita Aurel. 42 et ailleurs). Eutrope, 9, 26. Pour l’époque postérieure à Dioclétien, les témoignages se trouvent partout. Cf. Lactance, Inst. 4, 7. Ammien, 14, 9, 7. 15, 5, 16. — La question de savoir si la pourpre du corégent se distingue de celle du prince sera étudiée, tome V, en même temps que la corégence.

[116] Il se conçoit que les armes de l’officier et le harnachement de son cheval se distinguent par un travail plus soigné et une ornementation plus riche ; mais on ne peut voir là d’insignes officiels proprement dits. L’equus qui consularia insignia gestabat dans Tacite, Ann. 45, 7, est le cheval qui portait pendant la marche les, faisceaux des licteurs ; car il n’y a pas de harnachement qui soit propre au cheval du consul.

[117] L’épée des officiers s’appelle pugio (cf. outre les textes cités plus bas, Val. Max. 3, 5, 3, où le pugio est désigné comme militare decus) plus ordinairement que gladius. Elle se portait ou bien suspendue à une bandoulière autour du corps ou bien au côté, pendu au ceinturon.

[118] Le jeune homme nommé tribun militaire recevait l’épée de l’empereur, montrent Stace (Silves, 5, 2, spécialement 154. 173) et Martial, 11, 32. — Au reste l’insigne propre qui caractérisait le tribun militaire (Tite-Live, 28, 24, 14) comme le paludamentum caractérisait le général et le cep de vigne le centurion, a probablement été le clavus. Nous avons expliqué ailleurs qu’à une époque très précoce l’officier n’était pas autre chose qu’un cavalier détaché près de l’infanterie ; et, si le clavus n’appartenait en droit qu’à l’eques equo publico, rien ne s’oppose à l’idée qu’il ait été porté par tous ceux qui servaient dans la cavalerie (VI, 2). C’est de là que vient la dénomination de rufuli ; le diminutif exprime l’opposition avec le paludamentum. L’étymologie tirée du nom de P. Rutilius Rufus, le consul de 649, donnée par Festus sub hoc v° n’a pas l’air très croyable.

[119] Par suite Antoine porte, en cette qualité, l’épée avec la prétexte, ce que Dion, 42, 27 (cf. 45, 29. 46, 16) regarde avec raison comme la réunion des emblèmes de la République et de la monarchie.

[120] Suétone, Galba, 1. Le même, Vitellius, 8. Sénèque, De clem. 1, 11, 3, pour Néron.

[121] Tacite, Histoires, 3, 68, sur l’abdication de Vitellius. Sur le refus du consul, il s’éloigne, ut in æde Concordiæ positurus insignia imperii. Le récit est fait de la même façon dans Suétone, Vitellius, 15, et Dion, 65, 16, rapproché de c. 5.

[122] Le jus gladii, l’exercice de la juridiction capitale impériale, en diffère en ce que, d’une part les officiers étrangers à la justice, tels que les légats de légions et les tribuns militaires portent bien l’épée, mais n’ont pas le jus gladii et, d’autre part, en ce que ce droit, au moins à l’époque récente, peut être accordé, par délégation impériale, aux gouverneurs sénatoriaux eux-mêmes, sans qu’ils aient pour cela coutume de porter l’épée.

[123] Ainsi il est dit de Trajan, quand il nomme le præf. prætorio Suburanus : Cum insigne potestatis, uti mos erat, pugionem daret (Victor, Cæs. 13, 9 ; cf. Pline, Paneg. 67 ; Dion, 68, 16). Plutarque, Galba, 8, du præf. præf. Nymphidius Sabinus. Philostrate, Vita Apollonius, 4, 42, et 8, 16. Vita Commodi, c. 6. Hérodien, 1, 9. 3, 1. Cf. Lydus, De mag. 2, 19.

[124] Dion, 53, 14, indique comme l’un des privilèges des légats provinciaux impériaux de n’être pas limités à une année. Cf. 52, 22.

[125] C’est ainsi que l’épée fut accordée à Narcisse, sous Claude, d’après Tacite, Ann., 11, 33 (cf. Zonaras, 11, 9) ; pareillement à Parthenius, sous Domitien, Dion, 61, 17.

[126] Tant que le proconsul a encore exercé, au moins parfois, le commandement en chef effectif devant l’ennemi, il a forcément porté alors l’épée. Tibère, d’après Tacite, Ann. 3, 21, reconnaissait lui-même que le gouverneur avait jure proconsulis le droit de conférer les distinctions militaires supérieures, tout en aimant autant qu’il ne le fit pas.

[127] Bethmann-Hollweg, Civilprozess, 3, 37.