ROME ET LE CLERGÉ FRANÇAIS SOUS LA CONSTITUANTE

 

CHAPITRE XI. — LA PROMULGATION DE LA CONSTITUTION CIVILE DU CLERGÉ.

 

 

Les écrivains ultramontains prétendent que la Constituante vit avec regret les négociations que le roi entama avec Rome pour obtenir le baptême de la constitution civile du clergé. Elle en aurait même redouté le succès[1]. Nous mettons au défi, s'écrie Ludovic Sciout, ceux qui cherchent à jeter quelque blâme sur la Cour de Rome, d'établir que les zélateurs de la constitution civile, ses champions attitrés, aient seulement laissé entrevoir la plus légère disposition à entrer dans une voie de conciliation[2]. Ridicule défi ! C'est de l'assentiment parfaitement délibéré, quoique tacite, de l'Assemblée que les négociations ont été engagées. Pendant quatre mois, du 12 juillet, date du vote des derniers articles des décrets, au 15 novembre, date d'un nouveau décret complémentaire, l'Assemblée n'a rien fait qui pût sérieusement compromettre le succès des négociations entreprises. Pendant tout ce temps, elle est restée fidèle à la ligne de conduite qu'elle s'était tracée à elle-même. Officiellement, elle a ignoré la conversation entre le roi et le pape. Mais, en fait, elle a souhaité très vivement que cette conversation ne fût pas en pure perte. Elle a cru fermement qu'il en serait ainsi, et si elle a péché, c'est plutôt par excès de confiance.

Les ultramontains se récrieront : Que faites-vous de la pression exercée sur le roi pour le forcer à promulguer les décrets ? Les ultramontains oublient que les décrets, étant acceptés dès le 22 juillet, leur promulgation n'était plus qu'une formalité. Ils oublient que la négociation engagée avec Rome ne portait pas ou plutôt ne devait pas porter sur le fond des choses, mais seulement sur les formes canoniques à remplir pour mettre les décrets à exécution. La promulgation succédant à l'acceptation n'aurait eu des conséquences graves que si elle avait été suivie immédiatement (le l'exécution. Il me sera facile do prouver tout à l'heure que les comités de l'Assemblée s'entendirent avec les ministres du roi pour retarder cette exécution le plus longtemps possible. La promulgation ne fut en réalité qu'une satisfaction donnée à l'opinion publique et peut-être aussi un avertissement au pape d'avoir à se hâter. Elle ne fut pas un obstacle sérieux à la marche de la négociation. Mais elle offrit au pape l'occasion de formuler une plainte de plus contre l'Assemblée.

Le 16 août au soir, le député Bouche, avec son impatience provençale, vint se plaindre à la tribune des lenteurs apportées à la publication des décrets en générai et de ceux du clergé en particulier. Il était allé plusieurs fois, disait-il, chez le garde des sceaux pour stimuler son zèle. Le garde des sceaux lui avait répondu que les retards provenaient de l'imprimerie royale. Mais, défiant, Bouche avait voulu vérifier l'affirmation du ministre. Il s'était informé près du directeur de l'imprimerie et celui-ci lui avait répondu qu'il n'avait point reçu les manuscrits des décrets

Fi en question. Bouche dévoila la ruse ministérielle et demanda que l'Assemblée chargeât son président d'écrire au garde des sceaux pour l'inviter à faire imprimer et expédier les décrets sans délai.

L'Assemblée se rangea à cet avis, sans discussion, semble-t-il. La publication des' décrets apparaissait à tous comme une simple formalité découlant nécessairement de l'acceptation précédemment donnée.

Le lendemain, 17 août, le garde des sceaux expliqua par un message les raisons du retard, dont Bouche s'était plaint la veille, et demanda indirectement un nouveau délai qu'il motiva par les négociations en cours : A l'égard du décret sur la Constitution civile du clergé, le Roi, en faisant connaître son acceptation à l'Assemblée, lui a témoigné qu'il allait prendre dans sa sagesse les mesures nécessaires pour en assurer l'exécution[3]. Ces mesures ont occasionné quelques délais dans la promulgation, et M. le Garde des Sceaux rendra un compte fidèle au Roi du vœu que l'Assemblée lui a fait manifester hier par M. son Président[4].

L'Assemblée était en ce moment même mal disposée pour le haut clergé. Son comité des recherches lui dénonçait dans la même séance comme séditieuse une lettre pastorale de l'évêque de Toulon. Elle décrétait que cette pastorale serait déférée aux tribunaux et que, l'évêque étant absent du royaume, son traitement serait séquestré[5].

Après la séance, le comité ecclésiastique fit une démarche auprès du garde des sceaux pour lui demander de fixer la durée du délai dont il avait besoin. Champion de Cicé réclama huit jours[6].

Durand de Maillane, qui présidait alors le comité et qui fut chargé en cette qualité de s'aboucher avec l'archevêque-ministre, a expliqué tout au long les motifs qui le poussèrent, lui et ses collègues, à demander la promulgation des décrets.

Le retard de la promulgation, dit-il en substance, avait de mauvais effets. Les séculiers et les réguliers, inquiets de leur sort, s'agitaient. Les uns et les autres avaient perdu l'administration de leurs biens depuis le mois d'avril. Ils se plaignaient au comité de ne pas être encore fixés sur leur situation future, de ne pas être assurés d'un traitement. Ils réclamèrent si souvent et si fort que le comité, après avoir patienté sur l'espérance qu'il avoit ou qu'on lui donnoit de l'approbation ou des nouvelles de Rome qu'on attendoit tous les jours, voulut une bonne fois pour sa décharge s'en assurer par le garde des sceaux luimême[7].

On ne fait pas assez attention, en effet, que toutes les réformes votées par l'Assemblée étaient dans une dépendance mutuelle et étroite. La grande opération de la vente des biens nationaux, dont les préparatifs commençaient, ne pouvait se faire dans de bonnes conditions que si elle ne laissait aucun regret aux anciens possesseurs des biens vendus, aucune appréhension aux futurs acquéreurs. La mise en train de la constitution civile du clergé était seule capable d'apaiser ou de prévenir ces appréhensions, ces regrets) en assurant aux dépossédés indemnités, traitements, aux acquéreurs sécurité.

Que telle fût bien sa préoccupation dominante, bien plutôt que la pensée de traverser la négociation entamée avec le pape, Durand de Maillane ne le dit pas formellement mais le laisse clairement entendre. Un autre motif de hâter la publication, dit-il encore, c'était l'exemple de la publication immédiate des décrets rendus en février sur les ordres religieux[8]. Le rapprochement est significatif. Il montre bien la liaison que Durand de Maillane établissait entre les deux questions. Il n'est pas douteux que l'imminence de la mise en vente des biens nationaux ne fût la principale cause qui fit désirer à l'Assemblée la publication rapide de la constitution civile du clergé.

Cependant le délai de huit jours accordé par le comité ecclésiastique au garde des sceaux paraissait encore trop long à Bouche. Le 20 août, il revint à la charge. Peut-être ne voulait-il pas d'un accord avec Rome, dans la crainte que cet accord ne se nt au 3étriment des patriotes d'Avignon dont il s'était constitué le protecteur. Si le pape baptisait la constitution civile, les Avignonnais couraient grand risque de rester sujets pontificaux.

Cette fois, à l'insistance du député provençal, un membre du comité ecclésiastique, Lanjuinais, répliqua par cette interruption : On attend une lettre du chef de l'Église afin de rassurer les consciences timorées[9]. C'était mettre les points sur les i.

Le délai expirait le 24 août, jour de la Saint-Louis. L'Assemblée envoya, ce jour-là, une députation au roi pour le complimenter à l'occasion de sa fête. Dupont (de Nemours), qui présidait alors l'Assemblée, porta la parole. Il profita de la circonstance pour remonter le cœur du monarque et l'encourager indirectement à triompher des scrupules qui le faisaient hésiter à ordonner la promulgation du décret qu'il avait accepté. II fit l'éloge de Louis IX en représentant le saint personnage comme un gallican déterminé : A Taillebourg, s'écria-t-il, il repoussa les Anglais avec son épée, et, dans tous les temps, les entreprises de la Cour de Rome avec son génie. Puis s'adressant à Louis XVI lui-même, il finissait par ce trait un peu gros : Restaurateur de la Liberté française, la reconnoissance de la Nation vous couvrira de palmes plus honorables que celles que saint Louis fut chercher en Afrique et en Asie[10]. Louis XVI ne répondit que quelques mots insignifiants. Mais il avait compris l'allusion et la leçon. Si on en croit certaines traditions[11], le comte de Provence, son frère, lui aurait conseillé de céder au vœu des Constituants. Le même jour, il signa la proclamation par laquelle  la Constitution civile du clergé était promulguée comme loi de l'État[12].

Satisfaite de l'effet moral produit, l'Assemblée ne mit aucune hâte à exiger l'exécution des décrets ainsi promulgués. La proclamation royale du 24 août ne fut reçue dans les départements qu'avec plusieurs semaines de retard. Ainsi le district de Cusset ne reçut notification légale des décrets que le 29 octobre seulement, c'est-à-dire plus de deux mois après leur publication à Paris[13]. Ce ne fut pas une exception. La constitution civile du clergé fut promulguée à Nantes à la fin de septembre, à Mmes le 21 septembre, à Lyon le 2 octobre, à Bourges le 8 octobre, à Digne le 12 octobre, à Troyes vers la même date[14], à Senez le 7 novembre[15]. Dans ce temps-là, me loi ne devenait exécutoire que du jour de sa réception et publication par les autorités locales. Il est difficile de croire que l'Assemblée ait ignoré ces lenteurs et, comme elle ne les a pas blâmées, comme Bouche lui-même a gardé le silence, il est évident que les ministres se sont assurés de son approbation, au moins tacite.

 

II

L'Assemblée donna d'autres preuves encore de sa modération et de son esprit politique.

Le 24 août, le jour même où Louis XVI consentait à promulguer la constitution civile du clergé, l'affaire d'Avignon revenait sur le tapis[16]. Si les Constituants avaient voulu, comme on le dit, entraver la négociation entamée à Rome, l'occasion était belle. Cette occasion, ils ne la saisirent pas. Ils s'efforcèrent au contraire d'éviter de donner au pape de nouveaux griefs contre la France.

Le rapporteur, choisi par le comité d'Avignon pour donner son avis sur la demande d'annexion des Avignonnais, fut le juriste Tronchet[17].

Par une étude historique assez approfondie, Tronchet montra d'abord que les droits de propriété du pape sur Avignon, consacrés par une possession de plusieurs siècles, étaient difficiles à contester : Les princes de l'Europe ont-ils des titres plus sacrés et plus respectables ?

Il se demanda ensuite si le vote des Avignonnais avait été libre, s'il était bien l'expression de la volonté générale, et il remarqua que ce vote s'était produit en temps de troubles, quand une foule d'habitants avaient quitté la ville, quand l'autorité de la nouvelle municipalité était contestée.

Le vote d'ailleurs serait-il régulier que la réunion ne serait pas légitime. La ville d'Avignon fait partie des États du pape. Elle est une province dans un tout. Elle ne peut se détacher de la nation dont elle fait partie sans le consentement de cette nation exprimé par ses représentants.

Tronchet gardait enfin en réserve un suprême argument. L'annexion serait contraire à la Constitution, puisque, faite sans le consentement du pape d'une part et des Comtadins de l'autre, elle serait une conquête.

Il conclut que le roi ayant l'initiative en matière diplomatique, il fallait lui renvoyer la pétition des Avignonnais.

Tronchet était évidemment d'accord avec Montmorin. Renvoyer l'affaire au roi, c'était lui remettre l'initiative des mesures à prendre et des propositions à faire au pape, c'était lui donner le moyen de conduire librement les deux négociations, la temporelle et la spirituelle, et de les faire aboutir par une transaction. Le pape n'avait-il pas manifesté le désir de voir les deux affaires liées entre elles ?

Malouet et Clermont-Tonnerre appuyèrent l'avis de Tronchet. Bouche s'attacha à ruiner sa thèse. La cession d'Avignon au pape par une reine mineure était nulle. Cette cession était entachée de dol, ayant été faite pour prix d'une absolution. Les peuples d'ailleurs ne se vendent pas. Ils ne peuvent jamais perdre leur souveraineté. Or, Avignon était une nation à part dans les États du pape. Elle ne faisait pas partie intégrante du Comtat Venaissin. Elle avait ses lois propres. Elle était en petit ce que la France est en grand. Elle avait donc le droit de disposer de ses destinées.

Puis Bouche faisait valoir les raisons d'intérêt qui devaient porter la France à accueillir une juste requête. Avignon occupait une excellente position stratégique sur le bas Rhône. Ce serait 150 lieues de douanes en moins à garder. La France était puissamment intéressée à n'avoir pas dans son sein une puissance étrangère, dont les principes et le système politique sont diamétralement opposés à sa Constitution. Le Comtat était non seulement le réceptacle de tous les malfaiteurs, de tous les contrebandiers de l'Europe, c'était encore un dangereux foyer d'aristocratie qui menaçait d'allumer la guerre civile dans toutes les provinces voisines.

Il n'y avait pas lieu de s'arrêter à l'objection de Tronchet que le vœu des Avignonnais n'avait pas été librement émis. Ce vœu était énoncé dans des délibérations unanimes et répétées.

Il n'y avait pas lieu davantage à tenir compte de la protestation de l'Assemblée représentative du Comtat Venaissin.

Cette assemblée n'avait pas le droit de traiter les Avignonnais de rebelles, puisqu'elle avait elle-même désobéi aux ordres du vice-légat.

Bouche proposait d'inviter le roi à envoyer des troupes à Avignon pour y protéger les établissements qu'y possédait la France et à engager une négociation avec le pape pour rentrer en possession du pays. Tous les habitants d'Avignon sans distinction seraient mis sous la sauvegarde de la nation française. Les aristocrates avignonnais détenus à Orange depuis l'émeute du 12 juin seraient élargis mais obligés cependant de continuer de séjourner dans la ville d'Orange[18].

Charles Lameth et Barnave demandèrent le renvoi de la discussion à une prochaine séance. Mais l'Assemblée, sur la proposition de Mathieu de Montmorency, vota un ajournement indéfini et l'élargissement des prisonniers d'Orange qui auraient désormais la ville elle-même pour prison.

La signification de ce vote n'a pas besoin d'être soulignée. Entre la thèse de Tronchet qui reconnaissait la légitimité de la propriété du pape et la thèse de Bouche qui la niait, l'Assemblée n'a pas voulu choisir. Elle a déjà sur les bras l'affaire des princes possessionnés d'Alsace. Elle ne tient pas à inquiéter l'Europe par une seconde affaire semblable. Surtout, elle ne veut pas, par un vote intempestif, nuire aux négociations entamées par le roi pour le baptême de la constitution civile du clergé. Malheureusement, si elle ne fait rien pour compromettre ces négociations, elle ne fait rien non plus pour les faciliter. L'ajournement indéfini qu'elle vote reste une menace discrète et lointaine, mais une menace suspendue sur le Saint-Siège[19]. Les Constituants, quoique sincèrement chrétiens en majorité, avaient trop de mépris pour la Cour romaine pour croire que la menace ne serait pas efficace. En quoi ils se trompèrent d'ailleurs.

 

III

Le débat sur Avignon venait à peine de se terminer qu'arrivait à Paris la réponse de Pie VI aux propositions du roi sur le baptême de la constitution civile du clergé en même temps qu'une dépêche explicative de Bernis[20].

Les ministres furent dans un cruel embarras. Ils avaient conseillé au roi, quelques jours plus tôt, de I promulguer la constitution civile du clergé, dans l'espoir où ils étaient que le pape accepterait, au moins en principe, l'idée d'un accommodement. Et voilà que le pape, non seulement ne donnait :aucune promesse, mais tenait un langage assez peu rassurant !

Plus que jamais il aurait fallu à la tète du gouvernement des hommes habiles et résolus, s'entendant i entre eux, ayant une politique. Or, les faibles ministres du faible Louis XVI n'avaient jamais été bien unis. lis le sont de moins en moins. Necker, abreuvé de dégoûts par l'Assemblée, vient de donner sa démission[21]. L'ancien archevêque de Vienne, affaibli par l'âge, tombe malade de la maladie qui le mènera au tombeau. Il n'avait déjà pas assisté, parait-il, au Conseil du 24 août[22]. Les autres ministres se jalousent. Montmorin cherche avant tout à ne pas déplaire à l'Assemblée. L'archevêque de Bordeaux s'épuise à concilier les contradictoires. Les autres ont assez à faire avec leurs propres départements. Ils n'ont pas d'autre politique que celle du jour le jour. Ils subissent les événements sans essayer de les prévenir et de les dominer. Ne les accablons pas cependant, ces pauvres ministres I Comment auraient-ils pu agir quand ils n'avaient ni toute la confiance du roi, ni toute la confiance de l'Assemblée ?

Au conseil tenu dans les premiers jours de septembre, ils décidèrent d'ajourner les difficultés, puisque aussi bien ils n'avaient pas les moyens de les résoudre. Une nouvelle lettre du roi au pape presserait sa décision et expliquerait, par un distinguo bien spécieux, qu'il avait été obligé non pas de promulguer les décrets, mais seulement de les publier[23].

La lettre est datée du 6 septembre 1790 :

J'ai reconnu dans la lettre de Votre Sainteté l'expression des sentiments les plus touchants pour moi, et je ne pourrais qu'attendre avec une juste confiance les déterminations ultérieures de Votre Sainteté, si des circonstances impérieuses n'exigeaient que je ne me refuse pas plus longtemps à la publication des décrets concernant la constitution civile du clergé. Je charge le cardinal de Bernis de nous exposer les motifs puissants qui règlent ma conduite, mais j'espère que la réponse de Votre Sainteté me sera parvenue avant que la promulgation des nouvelles lois puisse être effectuée...[24]

En même temps Montmorin et l'archevêque de Bordeaux écrivaient à Bernis pour exprimer leur déception et réchauffer son zèle :

e... Vous ne serez pas surpris d'apprendre, disait Montmorin, que le retour du courrier sans une réponse au moins provisoire a trompé notre attente. Je suis bien persuadé que vous ne perdrez aucune occasion de presser la décision de Sa Sainteté sur les points essentiels. — Le retard de la réponse provisoire que le roi attendait nous met dans un grand embarras et les circonstances sont telles qu'il sera difficile de suspendre plus longtemps la promulgation des décrets de l'Assemblée nationale...[25]

 

Les ministres mirent-ils le comité ecclésiastique au courant de la négociation et des difficultés qu'elle traversait ? Ils durent le faire puisqu'ils obtinrent d'être dispensés de presser l'exécution des décrets.

Faibles moyens, petites habiletés ! Sur le terrain où elle était placée, la négociation n'avançait pas. La Constituante croyait avoir assez fait en s'abstenant de prononcer sur Avignon. Le pape n'était pas loin de se reprocher comme une faiblesse de n'avoir pas prononcé sur la constitution civile du clergé. Si chacune des parties restait sur ses positions, l'entente était impossible.

 

 

 



[1] Les Constituants redoutaient, sans vouloir l'avouer, le résultat des négociations du roi avec le pape (Ludovic Sciout, Histoire de la Constitution civile du clergé, t. I, p. 264).

[2] Ludovic Sciout, Histoire de la Constitution civile du clergé, t. I, p. 267.

[3] Aucun député ne put se méprendre sur le sens de cette phrase qui était une allusion très directe aux pourparlers engagés avec le pape.

[4] Procès-verbal, séance du mardi, 17 août, au soir, p. 11.

[5] Procès-verbal, séance du 17 août au soir, p. 20.

[6] Le courrier de cabinet Lépine était parti pour Rome le 1er août. Le garde des sceaux espérait qu'il ferait le voyage de Rome aller et retour en 24 jours et qu'il rapporterait sinon une réponse favorable, du moins des promesses qui permettraient d'aller de l'avant.

[7] Durand de Maillane, Histoire apologétique..., p. 85.

[8] Durand de Maillane, Histoire apologétique..., p. 83.

[9] Moniteur, réimp. t. V, p. 439.

[10] Procès-verbal, séance du 25 août au matin, p. 2.

[11] Abbé Guillaume, Vie de Mgr Antoine Osmond, Nancy, 1862, p. 7.

[12] Si on en croyait le nonce, Louis XVI, en informant le comité ecclésiastique de sa résolution, se serait exprimé en ces termes : qu'il se rendait aux instances répétées du comité litais que n'ayant pas eu le temps de prendre les mesures nécessaires, il ne pouvait pas répondre du résultat. (Dugnani à Zelada, 6 septembre 1790.) Par une petite ruse qu'il crut habile le garde des sceaux ne promulgua pas les décrets selon la forme habituelle des lettres patentes : Je me suis refusé spécialement à revêtir ces décrets de leurs patentes qui, suivant les formes reçues, étaient nécessaires pour leur donner le caractère de loi (Lettre citée du Champion de Cicé à Dillon).

[13] Arch. nat. DXIX. 101. feuille 520 bis. Lettre du procureur syndic du district de Cusset au comité ecclésiastique, rn date du 11 novembre 1791.

[14] Babeau, Histoire de Troyes, 1873, t. I. p. 406.

[15] Pierre de la Gorce, Histoire religieuse de la Révolution française, p. 301.

[16] La discussion continua le 27 août.

[17] La désignation de Tronchet comme rapporteur donna lieu à un vif incident. Tronchet se plaignit, le 27 août, d'une infamie dont il venait d'être victime : On a fait courir, dit-il, des cartes imprimées sur lesquelles se lisent ces mots : Les membres patriotes de l'Assemblée nationale sont prévenus que le rapport sur l'affaire d'Avignon est l'ouvrage de Messieurs Tronchet, Virieu et Rhedon, et que MM. Barnave, Charles Lameth, Bouche et Petion n'y ont aucune part. Je dis que c'est une infamie, continua Tronchet, et puisqu'il fart parler, je vais rappeler tout ce qui s'est passé. Vous aviez nommé six commissaires : M. Mirabeau Paine a donné sa démission. M. Desmeuniers est tombé malade ; les autres n'assistaient pas à nos séances. Le comité se trouvait réduit à M. Bouche et moi. Sur notre demande, vous avez nommé de nouveaux commissaires. Deux seulement se sont réunis à nous, MM. Virieu et Rhedon. M. Bouche n'a pas manqué à une seule séance pendant l'examen des pièces. M. Petion s'est présenté deux fois. MM. Lameth et Barnave ont ensuite assisté accidentellement à nos travaux. Le projet de décret a été en général unanimement décrété avec eux. Il n'est qu'un seul point sur lequel M. Bouche n'ait pas été d'accord avec le comité... Charles Lameth s'excusa de ses absences au comité par des affaires de ramille et déclara d'ailleurs qu'il ne donnait pas son assentiment au projet de décret. Quant à Barnave, il pria Tronchet de continuer son rapport (Moniteur, réimp., t. V, p. 503).

[18] Opinion de Charles-François Bouche député de la sénéchaussée d'Aix et membre de l'Assemblée nationale, sur la pétition de la nation avignonnaise, séance du soir, 27 août 1790, in-8° de 22 pages.

[19] M. Debidour a bien vu ce calcul : L'Assemblée jugeait politique de ne pas le (le pape) pousser à bout et ajournait en conséquence, le 27 août, la proposition d'annexer (Avignon) ainsi que le Comtat Venaissin. (A. Debidour, Histoire des rapports de l'Église et de l'État, Alcan, 1898, p. 79).

[20] La lettre du pape est datée du 17 août, celle de Bernis du lendemain 18. Il est probable qu'elles partirent par le même courrier qui n'arriva pas à Paris avant le 30 août au plus tôt. C'est par erreur que M. A. Debidour a écrit que Louis XVI promulgua la constitution civile le 24 août, après avoir reçu la veille une lettre du pape (ouvrage cité, p. 79).

[21] La démission de Necker est annoncée, sans un mot de regret, dans la dépêche de Montmorin du 7 septembre.

[22] C'est du moins ce qui est affirmé dans une lettre, il est irai très postérieure, en date du 8 mars 1802, de l'abbé Pichot, ancien secrétaire de Lefranc de Pompignan, à l'abbé Émery. La lettre, conservée dans les papiers Émery à la bibliothèque du séminaire de Saint-Sulpice, est citée par M. de la Gorce, Histoire religieuse de la Révolution française, Plon, 1909, p. 296.

[23] Ce distinguo a dû être concerté par Champion de Cicé avec Boisgelin et cachait sans doute un calcul. Quand le directoire du département des Bouches-du-Rhône invitera Boisgelin à exécuter les décrets, celui-ci répondra que la proclamation n'est pas une forme suffisante pour l'exécution des décrets, qu'il paroit nécessaire que l'envoi du décret qu'elle ordonne, pour être exécuté suivant sa forme et teneur, soit fait dans la forme ordinaire et que cette forme nécessaire est celle des Lettres patentes avec la signature et le sceau royal. Boisgelin ajoutait que quand bien même la proclamation serait suffisante, il faut que les décrets soient signifiés aux parties intéressées, il faut que chacune d'elles en ait reçu de notre part une connaissance légale, pour qu'elles puissent dire ou faire ce qui appartiendra, sur la réquisition de ceux qui sont chargés de leur exécution, et enfin qu'il doit recevoir lui-même les réquisitions qui le concernent dans son diocèse. (Lettre du directoire des Bouches-du-Rhône à l'Assemblée nationale, datée d'Aix du 26 octobre 1790. Papiers du comité des recherches. Arch. nat., DXXIXb 25).

[24] Archives des Affaires étrangères. Correspondance de Rome, reg. 913.

[25] Archives des Affaires étrangères, Correspondance de Rome, reg. 913. La lettre de l'archevêque de Bordeaux annoncée par Montmorin dans sa dépêche à Bernis n'a pas été retrouvée.